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Full text of "Traite du ramollissement du cerveau"

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Digitized  by  the  Internet  Archive 
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https://archive.org/details/b21985418 


TRAITÉ 

DU 


RAMOLLI  SSEMEN'l 


DU  U EU VEAU. 


;iTiAUi. 


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l’iii'is.  — Imprimerie  île  'inonuT  r.t  llAL'y^lp.l.^^• 
rue  lie  lu  Jlarpc,  90, 


TUAJTl' 


D13 


DU  CERVEAU, 


FAK 

Max.  DURAND-FARDEL, 

DOCTEUR  EN  MÉDECINE  DE  LA  FACULTE  DE  PARIS* 

LX-INTERNE  LAURÉAT  DES  HOPITAUX  ET  HOSPICES  DE  PARIS  ; MEMBRE  HONORAIIIL 
ET  ANCIEN  VICE-PRÉSIDENT  DE^LA  SOCIÉTÉ  ANATOMIQUE; 

MEMBI^  TITULAIRE  DE  LA  SOCIÉTÉ  MÉDICALE  d’oBSERVATION  , 

ET  DE  LA  SOCIÉTÉ  DE  MEDECINE  DE  PARIS. 


f)UVU.\GE  GOüROMNi:  TAI!  L’ACAUGMlli  liUYALt  MG  MEDGCIAK. 


f^iiœrile  et  iuvcinelit. 
SuNT  l,UC. 


V O 


l’yVniS, 

CliliZ  BAILIJÈKE, 

libraire  de  l’académie  royale  de  médecine, 

RUE  DK  l’école  DE  MÉDECINE  17, 

•K  LOiNDKliS,  CHEZ  H.  BAILLIÈRE,  219,  REGENT  STREET 


1843 


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A MESSIEURS 


GRUYETLHIER, 


Professeur  à la  Faculté  de  médecine  de  Paris, 
Médecin  de  l'hôpital  de  la  Charité, 
Membre  de  l’Académie  royale  de  médecine,  etc. 


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ROGHOUX, 

Médecin  de  l’hospice  de  Bicêtre , 


ombre  de  l’Académie  royale  de  médecino,  etc. 


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7/ommage  de  grnlitiulp  et  d'affection 


DK  KFÜR  KtnVÉ, 


Max.  DURAND.FARDEL 


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PRÉFACE. 


On  peut  entendre  deux  choses  bien  différentes  par  cette 
expression  de  ramollissement  du  cerveau  : ou  bien  un  état 
morbide  particulier , une  maladie  , qui  attend  un  autre  nom 
lorsque  sa  nature  aura  été  bien  définie,  ou  bien  le  fait  môme 
de  la  diminution  de  consistance  de  la  pulpe  cérébrale.  Or,  on 
peut  après  la  mort  trouver  le  cerveau  ramolli  par  suite  de 
putréfaction  , ou  mécaniquement  par  l’action  directe  d’un 
corps  étranger  ; le  cerveau  peut  se  ramollir  durant  la  vie  par 
suite  d’une  contusion,  de  la  gangrène,  de  l’imbibition  des  li- 
quides ou  de  mainte  autre  cause  certaine  ou  simplement  pos- 
sible. 

Ce  que  j’étudierai  dans  cet  ouvrage,  c’est  le  ramollissement 
considéré  comme  an  état  morbide  spécial , se  développant 
spontanément  ou  sous  l’influence  de  causes  plus  ou  moins 
appréciables  , et  par  un  mécanisme  dont  nous  aurons  à re- 
chercher la  nature  ; c’est  cette  maladie  que  M.Rostan  a,  non 
pas  indiquée,  mais  décrite  le  premier,  et  qu’on  a paru  géné- 
ralement s’accorder  jusqu’ici  à étudier  isolément  de  1 encé- 
phalite proprement  dite , de  l’encéphalite  traumatique. 

Prenant  la  science  au  point  où  elle  en  est  aujourd’hui , je 
suivrai  cet  exemple,  et  laissant  de  côté  le  ramollissement  in- 
flammatoire que  l’on  voit  se  développer  à la  suite  des  plaies 
de  tête  ou  à l’entour  des  productions  organiques , le  ramol- 
lissement purulent  qui  accompagne  habituellement  les  alté- 
rations des  os  du  crâne  et  de  l’oreille  interne  , l’encéphalite 
superficielle  qui  suit  quelquefois  les  méningites  franches  des 
enfants  et  des  adultes  ; je  n’étudierai  ces  altérations  que 
comme  pvoint  de  comparaison , et  bien  que  leur  histoire  soit 
loin  d’ôtre  achevée,  je  pourrai  cependant  tes  invoquer  main- 


viij  PRÉFACE. 

l es  l’ois  pour  éclairer  par  leur  rapprochement  les  faits  bien  au* 
trement  obscurs  dont  j’aurai  à traiter. 

.le  devrai  chercher  surtout  à résoudre  cette  question  : le 
ramollissement  cérébral  est-il  une  altération  toujours  identi- 
que , ou  y a-t-il  plusieurs  espèces  de  ramollissement?  Car , 
suivant  moi  , ce  que  le  programme  de  l’Académie  royale 
de  médecine  semblait  poser  en  fait , lorsque  cette  savante 
compagnie  a mis  l’étude  du  ramollissement  au  concours  (1) , 
est  précisément  la  chose  en  question.:  nous  verrons  s’il  en 
seraencore  ainsi  à la  fin  de  ces  recherches. 

Ce  travail  est  le  fruit  de  plusieurs  années  d’observation  : 
quelle  que  soit  la  valeur  que  l’on  veuille  bien  accorder  aux 
conclusions  que  j’ai  posées , j’espère  qu’on  me  rendra  cette 
justice,  qu’aucune  assertion  n’y  est  émise  qui  ne  soit  appuyée 
surdos  faits.  Et  je  puis  allirmer  une'chose  : c’est  que,  dans 
mon  esprit  > ces  conclusions  ne  sont  venues  qu’à  la  suite  de 
l’observation  , et  ne  sont  en  aucune  façon  le  résultat  de  ces 
idées  préconçues  qui  ne  conduisent  pas  nécessairement  à 
l’erreur,  mais  dont  il  faut,  je  le  sais,  se  garantir  avec  le  plus 
grand  soin  dans  les  questions  de  science. 

L’historique  du  ramollissement  cérébral  est  facile  à faire  ; 
car  la  connaissance  de  cette  maladie  est  de  date  toute  mo- 
derne , et  ne  remonte  réellement  qu’à  quelques  années.  A 
peine  indiquée  par  Morgagni  et  par  Lieutaud  , puis  par  Bail- 
lie,  Leroux,  Portai,  le  grand  Dictionnaire  des  Sciences  médi- 
cales, etc.,  M.  Rostan  est  le  premier  qui  ait  décrit  cette  affec- 
tion si  commune  dans  la  vieillesse , et  qui  se  développe  en 
dehors  des  causes  traumatiques  et  des  circonstances  dans  les- 
quelleson  est  habitué  à voir  se  produire  l’encéphalite.  Aussi,  il 

(1)  Voici  quels  (‘talent  les  tei'me.s  de  la  qiie.sliou  proposée  par  l’Acadcûiiie  : 
M Décrire,  les  différentes  espèces  de  rnmollissenieiil,  des  centres  nerveux  (cer- 
veau, cervelet,  moelle  é])inière)  ; en  exposer  les  causes,  ies  signes  et  le  Irai- 

t 'Uient. 


PRÉFACE. 


ix 

faiil  le  dire,  les  travaux  quionteu  pou r objet  Thistoire  de  cette 
dernière,  entre  autres  les  ouvrages  si  remarquables  à divers 
titres  de  MM.  Bouillaud  et  Lallemand,  n’ont  que  peu  avancé 
l’histoire  du  ramollissement  considéré  en  général  ; car  il  est 
évident  que  le  livre  de  M.  Rostan  comprend  une  série  de  faits 
dont  ces  auteurs  ne  font  aucune  mention,  et  qu’ils  ne  parais- 
sent môme  pas  avoir  observés.  M.  Andral  était  le  seul  qui  eût 
repris,  dans  sa  clinique  médicale,  cette  question  du  ramollis- 
sement cérébral  considéré  en  général , lorsque,  assez  récem- 
ment, MM.  Delaberge  et  Monneret  ont  analysé,  avec  le  soin 
qu’on  leur  connaît , les  travaux  et  les  écrits  particuliers,  les 
observations  qui  depuis  plusieurs  années  ont  été  publiés  sur 
cette  partie  de  la  pathologie  cérébrale. 

Je  me  bornerai  à ces  indications  qui  comprennent  les  prin- 
cipales phases  qu’a  présentées  jusqu’ici,  dans  sa  courte  exis- 
tence, l’histoire  du  ramollissement  du  cerveau.  Les  divers 
travaux  qui  ont  eu  pour  sujet  cette  maladie  seront  longue- 
ment analysés , et  souvent  môme  , on  me  le  pardonnera  , je 
l’espère,  critiqués  dans  le  cours  de  cet  ouvrage  ; et  aux  noms 
que  je  viens  de  citer  on  verra  souvent  se  joindre  ceux  de 
MM.  Raikem,  Rochoiix,  Gendrin , Cruveilhier,  Calmeil,  Shé- 
del,  Foville,  Dechambre,  etc.,  dont  les  recherches  nous  aide- 
ront plus  d’une  fois  à éclairer  notre  sujet. 

La  question  du  ramollissement  cérébral , comme  du  reste, 
nous  pouvons  le  dire  avec  satisfaction,  presque  toutes  celles 
qui  se  rattachent  à la  pathologie  cérébrale  , appartient  à la 
médecine  française.  Je  connais  peu,  il  est  vrai,  ce  qu’ont  fait 
sur  ce  point  les  médecins  allemands  ; mais  cette  ignorance 
même  me  fait  présumer  qu’ils  n’ont  point  créé  de  travaux  im- 
portants sur  ces  matières.  Quant  aux  Anglais , chez  lesquels 
du  reste  on  trouve  plus  facilement  que  chez  nous  des  em- 
prunts faits,  quand  il  y a lieu , à la  littérature  allemande  , ils 
se  sont  contentés,  relativement  au  ramollissement  cérébral, 


X 


PRÉFACE. 


de  répéter  ce  qu’avaient  écrit  les  médecins  français.  Ainsi 
Copland  reproduit  simplement  les  idées  de  M.  Rostan.  Le  bel 
ouvrage  de  Bright  sur  les  maladies  du  cerveau  n’est  qu’un 
recueil  d’observations  très-bien  prises  du  reste,  et  auxquelles 
sont  joints  des  dessins  fort  remarquables.  Quant  à Abercrom- 
bie  , dont  le  livre  est  si  populaire  chez  nous  , l’essai  qu’il  a 
tenté,  en  dehors  des  doctrines  françaises , pour  substituer  ta 
symptomatologie  à l’anatomie  pathologique  , comme  base  de 
la  pathologie  cérébrale,  n’a  pas  été  heureux.  Ce  que  je  viens 
de  dire  toutefois  ne  saurait  s’appliquer  au  docteur  Carswell , 
auquel  nous  devons  certainement  un  des  meilleurs  articles 
qui  aient  été  écrits  sur  le  ramollissement  cérébral. 

L’observation  d’un  grand  nombre  de  faits  particuliers , et 
la  méditation  des  écrits  publiés  sur  celte  matière  m’ayant 
■conduit  à des  résultats  fort  différents  des  opinions  exprimées 
jusqu’à  ce  jour  par  la  plupart  des  auteurs , la  critique  a dû 
tenir  une  assez  large  place  dans  cet  ouvrage.  La  plus  entière 
indépendance  a toujours  présidé  aux  jugements  que  je  me 
suis  cru  permis  de  porter.  Parmi  les  hommes  dont  j’ai  dû 
combattre  les  idées  , plusieurs  ont  été  mes  maîtres , soit  par 
les  leçonsque  j’en  ai  reçues,  soit  par  les  connaissances  que  j’ai 
puisées  dans  leurs  écrits  : si  j’ai  discuté  librement  leurs  opi- 
nions , je  désire  qu’ils  .soient  convaincus  que  je  n’en  ai  pas 
moins  toujours  conservé  pour  eux  les  sentiments  d’estime  et 
de  reconnaissance  que  l’on  doit  à ceux  à l’école  desquels  on 
.s’est  formé. 

Je  dois  des  remerciements  à plusieurs  des  médecins  et  des 
internes  de  l’hospice  de  la  Salpétrière,  pour  l’obligeance  avec 
laquelle  ils  ont  mis  à ma  disposition  tous  les  faits  qui  pou- 
vaient m’aider  dans  mes  recherches  ; je  les  adresserai  spé- 
cialement à mon  excellent  maître  M.  Prus,  à MM.  les  doc- 
teurs Bouvier,  Dalmas,  à MM.  Ernest  Boudet,  Guyton , Mol- 
loy,  Veyne,  Mascarel,  Bennett , Ducrest , internes  de  l’hoS' 


PRÉFACE. 


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pice.  Je  ne  puis  malheureusement  y joindre  un  nom  qui  m’é- 
tait bien  cher  ^ je  n'ai  plus  de  remerciements  à lui  offrir,  mais 
seulement  des  regrets  à adresser  à sa  mémoire.  Je  veux  par- 
ler de  Charles  Rogée,  qui  vient  d’être  enlevé  bien  jeune  à la 
science  et  à ses  confrères.  Si  Rogée  n’eût  été  que  mon  ami , 
je  n’eusse  pas  songé  à lui  rendre  ici  un  dernier  hommage  ; 
mais  depuis  que  ses  importantes  recherches  sur  la  curabilité 
de  la  phthisie  pulmonaire  ont  été  publiées,  son  nom  appar- 
tient désormais  à la  science. 


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Page  17.  Les  infiltre.  . . , Usez  l’infiltre. 

— 70.  Avec  aréole  jaim<1trc.  , . , /«ec  .•  avec  tics  aréoles 

jauniltre 


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DU 


UAM0LL1SS£J»1E]NÏ  CEREBRAL. 


La  première  division  qui  se  présente  à établir  dans  cette  his- 
toire, c’est  celle  du  ramollissement  aigu  et  du  ramollissement 
chronique.  Quelque  essentielle  , quelque  classique  qu’elle  soit, 
la  plupart  des  écrits  qui  ont  été  consacrés  à l’étude  de  cette  ma- 
ladie en  offrent  à peine  de  traces;  et  cependant  nous  verrons 
qu’elle  est  parfaitement  naturelle  et  facile  à établir,  non-seule- 
ment pour  les  symptômes  qui  seuls  ont  encore  fixé  l’attention 
sous  ce  point  de  vue  , mais  encore  et  surtout  pour  les  altérations 
anatomiques.  Cet  oubli  des  auteurs  , ou  plutôt  leur  ignorance 
sur  ce  côté  de  la  question , est  sans  doute  une  des  causes  qui 
ont  le  plus  contribué  à retarder  les  progrès  de  l’histoire  du  ra- 
mollissement. 

Dans  un  grand  nombre  de  cas , le  ramollissement  cérébral 
se  termine  dans  sa  période  aiguë  ; d’autres  fois,  après  avoir  tra- 
versé cette  période  ordinairement  bien  tranchée  et  facile  à sai- 
sir, il  passe  a 1 état  chronique  ; dans  certains  cas , enfin  , beau- 
coup plus  rares  , il  semble  chi’onique  dès  le  principe , non  pas 
que  si  une  circonstance  étrangère  à son  développement  donnait 
occasion  de  1 etudier  à cette  époque,  on  ne  dût  lui  reconnaître 
les  caracières  de  1 acuité  ; mais  alors  sa  marche  graduelle  ne  per- 
met aucunement  de  distinguer  pendant  la  vie  ces  périodes 
1 une  de  1 autre.  On  voit  qu’au  point  de  vue  de  la  marche 
qu  il  suit , la  plus  grande  analogie  existe  entre  le  ramollisse- 
ment du  cerveau  et  bien  d’autres  affections  des  différents 
oigancs.  Cette  analogie  , que  nous  retrouverons  dans  bien 
^ auties  points  de  son  histoire,  se  remarque  encore  sous  le  rap- 


xiv  DU  RAMOLLISSEMENT  CEREBRAL. 

port  cie  la  difficulté  de  tracèV  dans  tous  les  cas  une  ligue  de 
démarcation  absolue  entre  l’état  aigu  et  l’état  chronique,  quel- 
que distincts  qu’ils  Soient  dans  l’ensemble  de  leurs  caractères. 

INe  pouvaitt  doiïc’  pfécisep  âttefi  exabtitnidé  où'^  fîmti  lé  ramol- 
lissement aigu  et  où  commence  le  ramollissement  chronique,  je 
dirai  seulement  que  l’on  peut  appeler  aigu  le  ramollissement, 
lorsqu’il  parcourt  ses  périodes  dans  un  espace  de  temps  peu  con- 
sidérable, pendant  lequel  le  malade  demeure  incessamment 
sous  le  coup  de  l’affection  dont  il  est  atteint,  et  qui  n’est  pas 
assez  long  pour  que  l’altération  anatomique  puisse  se  dénaturer 
et  perdre  la  physionomie  qu’elle  avait  dans  le  principe.  On  peut 
fixer  approximativement  du  vingt-cinquième  au  trentième  jour 
l’époque  où  se  fait  la  transition  du  ramollissement  aigu  au  ra- 
mollissément  chïottiqtoe. 


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PREMIERE  PARTIE. 

RAMOLLISSEMENT  AIGU. 


CHAPITRE  PREMIER. 

ANATOMIE  PATHOLOGIQUE  DU  KAMOLLISSEMENT  AIGU. 


ARTICLE  PREMIER. 

Le  ramollissement  cérébral,  dans  sa  pci  iode  aigue,  est  .spcda- 
lement  caractérisé  par  la  rougeur  et  la  dimiiuuion  de  consi.s- 
tance , sans  désorganisation,  de  la  pulpe  cérébrale.  Kous  ctu- 
clierons  successivement  : 

1°  Son  siège; 

2“  Sa  consistance  ; 

3“  Sa  couleur; 

4”  Les  modifications  dans  la  forme  du  cerveau  qui  peuvent 
1 accompagner  ; 

5“  L’état  des  méninges  et  du  reste  du  cerveau. 

S I"-  Siège. 

Le  ramollissement  aigu  peut  se  montrer  sur  tous  les  points 
c U cerveau  , mais  nulle  part  aussi  fréquemment  qu’aux  circon- 
volm.ons;  dans  33  cas  de  ramolli»se,ne,u  observés  par  moi, 
31  fors  ces  deriuères  élaient  affectées  ; 9 fois  elles  l'éuieiu  seules 
ou  a b.en  peu  de  choses  près  ; 22  fois  la  substance  blanche  sous- 
jaecnte  participait  dans  une  étendue  notable  à leur  alléialion  , 
4 fois  le  corps  slrié,  5 fois  la  couche  optique.  Dans  un  cas  la 

substance  médullaire  était  seule  ramollie;  une  fois  le  rervcletà 
sa  surlace. 

Dans  53  cas  qui  ne  m’appartiennent  pas  et  que  j’ai  sous  les 
Hux,cioisis  dans  des  circonstances  analogues  (I),  mais  chez 


djJtdir.ji  u;i,  une  fuis  pour  tuiUet. 


'pic  , 5uuf  CAcepiiijii , les  r 


di'.vef  sla- 

1 


'2  IWMOI.LISSEMIÎWT  AKiU.  ( AN  AT.  l’ATH.  j 

dosiiulivKlus  de  dilfcirents  âges,  la  recherche  du  siège  du  ra- 
inollissement  aigu  nous  donne  les  résultats  suivants  (1)  ; 


Circonvolutions  et  substance  blanche. 

Circonvolutions  seules 

Substance  blanche  seule 

Corps  strié  et  couche  optique  ensemble. 

Corps  strié  seul 

Couche  optique  seule 

Protubérance  annulaire 

Pédoncule  du  cerveau 

Corps  calleux 

Parois  des  ventricules,  septum.  . 
Voûte  à trois  piliers.  ....  • • 

Cervelet 


22  fois. 
6 

5 

6 
11 

4 

3 

1 

1 

1 

1 

1 


11  y a longtemps  que  l’on  répète  que  le  ramollissement  se  ren- 
contre beaucoup  plus  souvent  dans  la  substance  grise  que  dans 
la  substance  blanche  ; mais  cela  est  loin  d’être  aussi  vrai  qu’on 
le  pense  ; car  ce  n’est  que  dans  des  cas  assez  peu  nombreux  qu’on 
le  trouve  exactement  limité  à l’une  ou  l’autre  de  ces  substances. 
Tl  faut  convenir  cependant  que  le  ramollissement  affecte  la  sub- 
•tance  grise  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas,  puisque  sur  86 
€as  de  ramollissement  aigu  , 9 fois  seulement  il  avait  son  siege 
exclusivement  dans  la  substance  blanche.  Les  circonvolutions 
sont  le  point  du  cerveau  où  l’on  rencontre  le  plus  fréquem- 
ment le  ramollissement  aigu  ; car , sur  ces  86  cas  , elles  étaient 
malades  59  fois  ; mais  15  fois  seulement  l’altération  était  hini- 


lisliqiies  et  les  descriplions  qui  trouveront  place  dans  ce  traiail,  ne  por 
leront  (lue  .sur  des  faits  de  ramollissement  indépendant  : de  lésions  trau- 
matiques, de  maladies  des  os  du  crltne,  de  dcsénére.scences  ou  cicatrices 
lidiuorrliagiqiies  du  cerveau,  de  suppuration  des  méningés,  etc.  m a paiu 
tout  à fait  nécessaire,  surtout  pour  le  ramollissement  aigu,  d e apier,  au 
tant  que  possible,  les  complications  et  certaines  circonstances  d’éiiologie, 
afin  d’obtenir  une  liisloire  exacte  et  bien  certaine  du  ramollissement  célé- 
brai, tel  que  j’ai  entrepris  de  l’ctudier. 


N)  Ces  faits  qui  me  bcrviroiit  spécialement  à liaccr  l’IiisLoire  du  rauiol- 
«isu,  .soDt  18  i H.  R., su,,,  9 I,  »1.  A.ulr«l,  li  a 

■M.  Raikem,  H à M.  Lallemand  ( 1™  lettre),  1»  à divers  recueils. 


siÉGi:. 


3 


tee,  ou  a bien  peu  de  choses  près,  à la  couche  coilicale  ; dans 
les  autres  cas,  elle  pénétrait  plus  ou  moins  profondément  dans 
la  substance  médullaire.  Les  circonvolutions  sont  donc  beau- 
coup plus  souvent  atteintes  par  le  ramollissement  que  les  par- 
ties centrales  ; le  corps  strié  et  la  couche  optique  n’ont  été 
trouvés  ramollis  que  28  fois,  soit  isolément,  soit  simultané 
ment , quelquefois  en  même  temps  que  les  circonvolutions. 
Lette  tendance  du  ramollissement  à se  développer  vers  la  su- 
perficie du  cerveau  est  intéressante  à rapprocher  de  la  tendance 
toute  opposée  de  l’hémorrhagie,  si  rare  aux  circonvolutions  , si 
commune  au  voisinage  des  ventricules  ; on  s’est  donc  trompé 
quand  on  a cru  trouver  entre  ces  deux  affections  une  analogie 
complété  sous  le  rapport  du  siège  (l). 


Quand  le  ramollissement  occupait  le  corps  strié  ou  la  couche 
optique , presque  toujours  la  substance  médullaire  avoisinante 
participait  à leur  altération  ; seulement  je  ne  puis  indiquer  le 
• re  précis  des  cas  de  ce  genre  , parce  qu’un  grand  nombre 
fl  observations  ne  sont  pas  assez  explicites  sur  ce  sujet. 

Ce  résumé  nous  montre  donc  que  les  deux  substances  du  cer- 
veau sont  presque  toujours  simultanément  ramollies  ^2),  et  que 
par  conséquent  si  la  substance  corticale  est  plus  souvent  alté- 

portbn  que  dans  une  faible  pro- 


be ramollissement,  dans  sa  période  d'acuité,  peut  occuper  un 
espace  ties-vanable.  Une  fois  je  l’ai  vu  s’étendre  à la  supmficie 

presquenliere  des  deux  hémisphères  et  à la  surface  des  deux 

re  Dans  des  cas  plus  rares  il  occupe  presque  toute  l’épaisseur 
une  des  moitiés  du  cerveau.  D’autres  fois  on  le  voit  n^affecter 

Mc”  aÜîsT  ;i“  de  la  ,ab«ance  cére- 

r duc  gros  pois,  doue  noisette.  11  s’en 

que  les  symptôme»  se  ttoueent  toujours  en  rapport  avec  des 

(f  ) Voyez  cliap.  VI,  § V,  une  e'lude  compnratwe  du  sid-e  d,  rr 
rnenl  et  de  l’ hémorrhagie  cdrdbralc.  ^ > amollisse- 

Jltdi'^oli'c'h’' t ""  1'™''»“"'  .11  n’est  ,,ss 


4 RAMOLLISSKMENX  AlGÜ.  (ANAT.  PAXH.  ) 

différences  aussi  grandes  dans  l’étendue  de  1 altération  anato- 
mique. 

Lorsque  le  ramollissement  aigu  siège  dans  les  circonvolutions, 
on  le  trouve  quelquefois  exactement  circonscrit  à la  couche 
corticale  ; mais  l’étude  du  ramollissement  chronique  montie  qus 
plus  tard  il  finit  presque  toujours  par  gagner  la  substance  mé- 
dullaire sous-jacente. 

Ç II.  Consistance. 

f .. 

Lorsque  l’on  étudie  un  ramollissement  cérébral , il  est  im- 
portant de  chercher  à reconnaître  si  le  tissu  malade  est  com- 
plètement désorganisé,  ou  si  sa  consistance  est  seulement  dimi- 
nuée. Cette  distinction  est  plus  facile  à faire  qu’à  décrire  : j aurai 
occasion  de  donner  de  nombreux  exemples  de  désorganisation 
du  cerveau  ; je  me  contenterai  de  dire  maintenant  qu  il  y a dés- 
organisation de  la  substance  cerebrale , lorsque  sa  textuie 
paraît  absolument  modifiée,  que  la  pulpe  nerveuse  a elle-même 
plus  ou  moins  complètement  disparu  ou  au  moins  tout  à fait 
changé  d’aspect  ; par  exemple,  qu’elle  est  remplacée  par  du  tissu 
cellulaire  , infiltrée  par  un  liquide  autre  que  le  sang,  etc.  Dans 
les  cas  de  ce  genre  , il  est  certain  que  le  ramollissement  est 
chronique,  parce  qu’il  faut  un  certain  temps  pour  que  de  sem- 
blables modifications  de  texture  puissents  opérer  .Une  infiltration 
sanguine  considérable  peut , il  est  vrai , désorganiser  très-rapi- 
dement la  substance  cérébrale  , mais  d’une  façon  toute  méca- 
nique, et  d’ailleurs  la  présence  seule  du  sang  suffit  pour  attester 
la  date  récente  de  la  lésion. 

Ainsi  quand  la  substance  cérébrale  est  simplement  diminuée 
de  consistance  , sans  que  son  organisation  paraisse  profondé- 
ment altérée,  il  y a toutes  probabilités  que  le  ramollissement  est 
aigu. 

Quelquefois  cette  diminution  de  consistance  est  si  légère  que 
le  tissu  cérébral  paraît  à l’œil  avoir  conservé  toute  sa  cohésion  , 
et  qu’un  courant  d’eau  ne  peut  aucunement  le  pénétrer  ni  en  sé- 
parer les  fibres.  Cependant,  lorscju’on  le  touche,  il  offre  la  sensa- 
tion d’une  gelée  un  peu  fi  rme.  Ordinairement  alors  il  y a une 
rougeur  uniforme  bien  prononcée  , de  la  tuméfaction  , et  il 
présente  un  aspect  ticiulffollant , comme  gélaliuiformc.  C est 


CONSISTA \CH. 


5 


le  plus  souvent  dans  la  substance  grise  que  se  présente  cette  ap- 
parence, qui  indique  du  reste  un  ramollissement  tout  à fait  à 
son  début. 

La  mollesse  du  tissu  ramolli  peut  aller  jusqu’à  celle  d’une 
bouillie  peu  épaisse  : elle  n’atteint  guère  ce  degré  que  dans  la 
substance  blanche  et  au  centre  du  ramollissement.  On  sent  quel- 
quefois alors  de  la  fluctuation  en  pressant  la  surface'  du  cerveau. 
Les  angles  des  coupes  que  l’on  pratique  dans  une  partie  ramol- 
lie s’arrondissent  aussitôt. 

Il  n’est  possible  de  bien  étudier  un  ramollissement  qu’à 
l’aide  de  l’eau.  On  peut  placer  la  partie  ramollie  sous  l’eau  ; 
mais  cela  ne  saurait  guère  servir  qu’à  en  laver  la  surface.  Le 
mieux  est  de  projeter  sur  elle  une  nappe  ou  un  filet  d’eau , 
dont  on  gradue  le  diamètre  et  la  force  à volonté.  Un  filet  délié 
est  quelquefois  utile  pour  étudier  avec  précision  les  limites  d’un 
ramollissement  ; mais  il  faut  prendre  garde  , s’il  a un  peu  de 
force,  qu’il  peut  produire  quelques  érosions  artificielles.  Lors- 
qu un  ceiveau  est  sain,  il  est  possible  de  projeter  impunément 
de  1 eau  sous  toutes  les  formes,  à la  surface  de  ses  coupes  ; 
mais  si  une  fois  il  se  trouve  éraillé  soit  par  un  ramollissement, 
soit  par  une  déchirure  accidentelle  , un  filet  d’eau  peut  péné- 
trer plus  loin  que  l’alteration  existante , et  l’agrandir  ainsi.  Il 
est  encore  une  chose  fort  remarquable  : c’est  qu’une  éraillure 
ainsi  artificielle  de  la  substance  médullaire  lui  fait  perdre  sa 
blancheur  naturelle , pour  lui  donner  une  teinte  légèrement 
grisâtre,  et  qui  pourrait  induire  facilement  en  erreur.  Je  me 
suis  assure  de  ce  fait  dans  de  nombreuses  expériences. 

Un  courant  d’eau  un  peu  large  , tombant  de  15  ou  20  centi- 
mètres de  hauteur , pénètre  et  sépai  e les  parties  ramollies  , les 
soulève  légèrement  et  mesure  la  profondeur  du  ramollissement. 
Il  est  rare  que  dans  un  ramollissement  très-récent,  il  entraîne 
avec  lui  des  lambeaux  de  substance  nerveuse  : ces  derniers  se 
laissent  en  général  détacher  d'autant  plus  aisément  que  la  ma- 
ladie est  plus  ancienne. 

Je  pense  qu’il  est  impossible  de  fixer  d^me  manière  précise 
le  degré  de  consistance  au-delà  ou  en  deçà  duquel  le  cerveau 
doit  être  considéré  comme  malade.  Assurément  il  est  une  foule 
de  conditions  dépendant  de  l’organisation  du  sujet . de  sa  der- 
nière maladie,  delà  composition  du  sang,  de  l’état  almosphé- 


6 


RAMOLLISSEMENT  AIGU.  (anAT.  PATH,) 

nque,  du  temps  écoulé  depuis  la  mort,  etc.,  qui  peuvent  influer 
sui  la  consistance  du  cerveau,  sans  qu’il  nous  soit  permis  d’ap- 
precier  exactement  leur  mode  d agir.  On  saura  bien  que  lors- 
que la  putréfaction  commence  à se  développer  , la  mollesse  du 
CCI  veau  tient  à la  meme  cause  que  celle  du  reste  du  corps,  on 
a pu  remarquer  encore  que  dans  les  temps  chauds,  le  ramol- 
lissement SC  montre  plus  hâtivement  dans  les  centres  nerveux 
qu’ailleurs  ; je  crois  également  pouvoir  affirmer  que  chez  les 
individus  hydropiques,  lorsque  le  cerveau  baigne  de  toutes 
parts  dans  la  sérosité , la  consistance  de  la  pulpe  nerveuse  est 
notablement  diminuée.  Mais  il  est  en  dehors  de  toutes  ces  cir- 
constances des  cas  ou^  sans  qu’il  soit  possible  de  savoir  pourquoi, 
le  cerveau  et  le  cervelet  paraissent  beaucoup  plus  mois  qu’ils  ne 
le  sont  habituellement.  Je  puis  en  citer  plusieurs  exemples.  Une 
femme  de  65  ans  , atteinte  d’une  affection  organique  du  foie  , 
mouiut  dans  le  marasme,  sans  avoir  présenté  aucun  symptôme 
du  côté  du  cerveau.  Ce  dernier  était  dans  un  tel  état  de  mol- 
lesse que,  placé  sur  la  main,  les  doigts  y pe'nétraient  par  sa  seule 
pesanteur.  Il  ne  présentait  à part  cela  rien  de  particulier.  L’au- 
topsie avait  été  pratiquée  40  heures  après  la  mort , et  par  un 
temps  assez  chaud  : mais  on  n’était  qu’au  commencement  de 
mai.  Le  cadavre  ne  présentait  aucun  signe  de  putréfaction.  Au 
meme  moment,  un  cerveau  examiné  70  heures  après  la  mort, 
et  24  heures  après  avoir  été  retiré  du  crâne , était  loin  de  cet 
état  de  mollesse. 

31.  3'Iillet  rapporte  que,  faisant  l'autopsie  d’un  aliéné  atteint 
de  paralysie  générale , 41  heures  après  la  mort , au  mois  d’août, 
il  vit  la  pulpe  cérébrale  s’écouler  sur  la  table  comme  une  boud- 
lie  ; les  circonvolutions  n’étaient  plus  distinctes.  Il  y avait  au 
milieu  de  cette  bouillie  des  grumeaux  plus  blancs  que  le  reste  , 
comme  des  caillots  dans  du  lait.  On  trouva  un  foyer  apoplec- 
tique ancien,  lout  cela  répandait  une  odeur  douceâtre  et  nau- 
séabonde très-pénétrante.  La  substance  grise  paraissait  plus 
molle  que  la  blanche.  La  moelle  était  également  comme  putré- 
fiée dans  les  régions  cervicale  et  lombaire.  Il  y avait  à peine 
quelques  signes  extérieurs  de  putréfaction  commençante  (1). 

31.  IMillet  a examiné  comparativement  plusieurs  cerveaux 

(I)  -1nnal,-t  d’hygiène  rl  r/..  medecine  légale,  I8H.  T.  XXV,  png.  183. 


I 


COULEUR. 


7 


conservés  à une  même  températuie.  Il  a vu  que  le  cerveau  d un 
individu  mort  d’une  encéphalite,  ouvert  au  bout  de  6 jours  el  7 
heures,  représentait  assez  bien  l’état  de  celui  qui  vient  d’être 
décrit.  L’état  d’un  cerveau  examiné  de  6 à 8 mois  après  l’inhu- 
mation , ( Orfila  et  Lesueur,  Traité  des  exhumations  juridiques ,) 
y répond  également. 

Si  l’on  ne  peut  guère  avoir  une  connaissance  précise  du  de- 
gré qui  constitue  l’état  normal  pour  la  consistance  géneiale  des 
centres  nerveux,  il  est  plus  facile  et  non  moins  inqiortant  d éta- 
blir des  données  assez  certaines  sur  les  nuances  relatives  qui  , 
sous  ce  rapport , existent  entre  les  divers  points  de  ces  organes. 
Ainsi  les  circonvolutions  de  la  face  inférieure  des  lobes  anté- 
rieur et  moyen  présentent  une  consistance  beaucoup  moindre 
que  celles  de  la  convexité,  surtout  les  circonvolutions  de  la  corne 
sphénoïdale  dont  la  mollesse  pulpeuse  parait  souvent  au  pre- 
mier abord  annoncer  une  altération  commençante , et  dont  la 
pie-mère  entraîne  fréquemment  avec  elle,  quand  on  la  détache, 
la  couche  la  plus  superficielle,  sous  forme  de  lamelles  minces  et 
aplaties.  A la  convexité,  les  circonvolutions  de  la  partie  moyenne 
offrent  un  peu  plus  de  densité  que  celles  des  lobes  antérieurs,  et 
celles  de  la  pointe  occipitale  présentent  une  dureté  toujours  très- 
prononcée  , et  quelquefois  tout  à fait  extraordinaire.  Ces  remar- 
ques, auxquelles  il  faut  ajouter  celles  plus  vulgaires  du  peu  de 
consistance  du  cervelet , de  la  densité  au  contraire  considérable 
de  la  protizbé rance , et  surtout  du  bulbe  rachidien,  des  oli- 
ves et  des  pyramides,  je  les  ai  faites  constamment  sur  plus  de 
cent  cinquante  cerveaux  examinés  avec  soin,  après  l’enlèvement 
des  méninges.  Je  dois  dire  que  la  plupart  appartenaient  à des 
vieillards.  La  consistance  de  la  substance  médullaire  pré.sente 
des  nuances  moins  tranchées , si  ce  n’est  aux  environs  des  points 
de  la  superficie  où  elles  se  trouvent  le  plus  prononcées  ; ain.si 
elle  est  plus  molle  à la  base  , vers  la  corne  sphénoïdale,  beau- 
coup plus  dense  à l’extrémité  du  lobe  postérieur. 

§ III.  Couleur. 

Deux  altérations  de  couleur  importantes  doivent  être  étudiées 
dans  le  ramollissement  aigu  : la  rougeur  d’abord  , et  ensuite  la 
coloration  jaune. 

La  rougeur  se  montre  sous  des  aspects  très-différents,  parmi 


^ «amollissement  aigu.  (anat.  patm  ) 

rrrrrH-“^“ 

-uve . eo„.,„e 

Séi  ? « “iTos  "î'  excessivement 

voit  on  l'Xu  ir^  '““  ”'T  O" 

" '°"Pe  . entre  les  intervalles  des  vaisseaux 

njectes  un  grand  non, lu  e d’aut,  es  petits  vaisseaux  rouges  une 

i nlcCT"'  F“  ^ -■■‘-en: 

a^,  1 e ; r'“  r"'“  encore  à l'en, our 

e les,  et  quelquefois  le  ramollissement  est  moins  mjecié  lui- 

que  sa  ci,. conférence,  où  Ton  voit  des  vaisseaux'pius  ou 
son  ccntZ  - ‘‘"■■ge'-  '■■  convergeant  vers 

clans  la  ZiT  >-en'o“issen,ent  aigu  , surtout 

‘ Jstance  gnse,  accompagné  d’une  injection  vascu- 

a ce  congespon  sanguine)  un  peu  vive  , sans  gn’,!  se  t,.o„“ 
une  certamc  quanme  de  son,,  i„y;;,ce  dans  le  tissu  ra,.,olli  Cette 
circonstance  qui  lien,  à ia  rupture  des  parois  des  petits  vaisseaux, 
O bsene  cgaicnen.andébutde  toutesies  pblegmasies  aiguès  des 
a., très  „,.g„„.s  (,).  Tantôt  on  trouve  de  petit'  fojers  sangui,:: 

par  unràt  T:  celui  d’un  gros 

uc.neau)  ou  des  noyaux  d’étendue  et  de  forme  irrégulière 
•ouges  violets  ou  noirâtres,  dans  lesquels  on  distingue  aisé- 
■»ent  du  sang  .uelé  à 1a  substance  cérébrale.  C’est  là  ce  qu’on  a 
‘ osigne  sous  le  nom  de  ramollissement  rouge  , amaranthe  (2). 

- uLiecette  infiltration  sanguine,  on  trouve  souvent  une 

a ramollies.  C’est  là  ce  qui 

' ■ cl  su  is.ai.ce  grise  , des  circonvolutions  surtout,  remplace 
injection  vaiculairc.  Ce  n’est  en  effet  que  rarement  que  l’on 

(f)  r.alleaiiiiitl,  leures  sur  V encéphale ^ -fc»  lettre,  p.  87  et  .siiiv, 

,-)  yr~  chctji.  tl,§li  lie  l’mfiliralirnsanÿuine  ihi  cerceau. 


COULF.Ur,. 


9 


ilistingue  clans  la  couche  corticale  de  la  superficie  cpaelques 
petits  vaisseaux  isolés,  grêles,  transversalement  dirigés,  ne 
paraissant  pas  se  continuer  dans  la  substance  médullaire  sous- 
jacente  , et  ne  se  laissant  suivre  que  dans  un  court  trajet.  Cette 
coloration  varie  d’un  rose  pâle  à un  rouge  jamais  très-foncé  : il 
est  probable  qu’elle  est  due  à une  sorte  d’imbibition  plutôt 
qu’à  une  véritable  infiltration  de  sang,  sans  rupture  des  vais- 
seaux. Dans  la  substance  médullaire,  entourant  toujours  com- 
me une  auréole  les  infiltrations  sanguines  un  peu  considéra- 
bles , elle  se  montre  quelquefois  seule  sous  forme  de  mar- 
brures ; plus  souvent  elle  accompagne  l’injection  des  vaisseaux 
dont  elle  remplit  les  vides.  Elle  m’a  paru  présenter  le  même 
aspect  à la  loupe  qu’à  l’œil  nu. 

Le  professeur  Lallemand  distingue  aussi  avec  soin  la  colora- 
tion de  Vinjeclion  et  de  V infiltration  sanguine  du  ramollisse- 
ment. Les  nuances  diverses  de  coloration,  qu’il  étudie  surtout 
dans  la  substance  grise , lui  paraissent  le  résultat  « de  la  com- 
binaison du  sang  en  différentes  proportions  avec  la  substance 
grise.  » Mais  on  conçoit  c[ue  cette  combinaison  du  sang  avec  la 
substance  cérébrale  peut  être  telle  qu’elle  se  rapproche  beau- 
coup de  1 infiltration  sanguine  ; aussi  je  regarde  comme  une 
contradiction  difficile  a comprendre  cette  phrase  qui  précède 
1 explication  que  je  viens  de  rapporter  : «...  Les  différentes 
teintes  que  pourraient  former  des  quantités  de  sang  variées 
n’expliqueraient  pas  la  couleur...  brune-noirâtre  des  deux  cou- 
ches optiques  (n°  21),  lie  de  vin  du  corps  strié  (n°  6)...  pour- 
quoi dans  la  troisième  observation  la  surface  du  cerveau  était 
rouge  dans  cm-tains  points,  bruire  dans  d’autres  5 pourquoi..., 
dans  la  deuxième,  clans  la  substance  blanche,  le  cerveau,  quoi- 
que tres-injecté,  était  crun  rouge  amaranihe,  et  non  pas  gris  ou 
brun...  ..  Tout  cela  s’explique  aisément  par  la  présence  du 
sang  infiltré  dans  le  cerveau.  Mais  je  me  demande  quelle  dif- 
férence existe  entre  la  coloration  que  pourraient  former  des  quan- 
tités de  sang  variées,  et  celle  qui  résulterait  de  la  combinaison 
du  sang  en  différentes  proportions  avec  la  substance  cérébrale. 
Smrs  doute  ici  rexpi-e.^sion  n’a  p.rs  rendu  heureusement  la  pen- 
see  de  1 auteur  (1). 


(t)  Lalleraaml,  lettre  1",  j).  79 


10 


RAMOLLISSEMENT  AIGU.  (anAT.  PATH.) 

La  rougeur,  que  nous  considérons  comme  un  pliénomène 
constant  au  début  du  ramollissement  (1),  est,  en  général,  beau- 
coup plus  prononcée  dans  la  substance  grise , dans  laquelle  je 
lui  ai  presque  toujours  vu  occuper  toute  l'étendue  du  ramollis- 
sement, Elle  ne  se  montre  souvent  que  dans  une  partie  de  la 
substance  médullaire  ramollie,  sous  forme  d’infiltration  san- 
guine circonscrite  ou  de  marbrures  jetées  çà  et  là  : quelquefois, 
mais  rarement,  lorsque  le  ramollissement  occupe  simultané- 
ment et  la  substance  corticale  et  la  médullaire,  celle-ci  paraît 
conserver  sa  teinte  naturelle,  tandis  qu’une  rougeur  vive  co- 
lore la  précédente.  On  remarquera  cette  circonstance  dans  les 
observations  6 et  12  de  la  première  lettre  de  Lallemand. 

La  coloration  jaune  joue  également  un  rôle  important  dans  le 
ramollissement  cérébral;  mais,  avant  de  décrire  les  divers  as- 
pects sous  lesquels  elle  peut  se  présenter,  nous  devons  nous 
occuper  un  peu  de  sa  nature,  ou  plutôt  de  son  origine. 

Suivant  M.  Lallemand,  la  couleur  jaune  dans  le  cerveau  serait 
un  indice  de  la  présence  actuelle  ou  passée  du  pus.  C’est  sur 
cette  hypothèse  que  reposent  les  idées  émises  par  ce  savant  écri- 
vain sur  la  suppuration  du  cerveau.  Convaincu  que  la  forma- 
tion du  pus  était  un  phénomène  presque  constant,  presque  né- 
cessaire même  de  l’encéphalite  aiguë,  il  devait  naturellement 
en  chercher  les  traces  dans  les  cas  si  nombreux  où  l’encépha- 
lite se  montre  à nous  après  avoir  traversé  ses  premières  pério- 
des. Ces  traces,  il  a cru  les  voir  dans  la  couleur  jaune  que  l’on 
rencontre  à peu  près  constamment  dans  le  ramollissement  chro- 
nique, conduit  ainsi  à une  erreur  fort  grave,  au  moins  telle  est 
ma  conviction,  pour  avoir  admis  deux  faits  à priori  et  sans  dé- 
monstration directe,  à savoir  : 1°  que  la  suppuration  est  un  phé- 
nomène habituel  de  l’encéphalite;  2°  que  la  suppuration  colore 
en  jaune  la  substance  cérébrale.  La  question  ainsi  posée  engage 
dans  une  sorte  de  cercle  vicieux  : si  la  suppuration  est  un  phé- 
nomène presque  constant  de  l’encéphalite,  la  coloration  jaune, 
presque  constante  aussi,  lui  doit  appartenir  ; car,  en  général,  on 
en  chercherait  en  vain  d’autres  indices  ; d’une  autre  part,  si  la 
coloration  jaune  de  la  substance  cérébrale  est  le  résultat  de  la 
suppuration,  cette  dernière  doit  être  très-fréquente,  puisque  l’on 


(1)  Voyez  cliap,  tl,  § m. 


COULEUR . 


H 


observe  presque  coustamment  clans  l’encéphalite,  à une  certaine 
e'poque,  la  coloration  jaune  comme  trace  d’une  altération  ac- 
tuelle ou  passée. 

Nous  nous  occuperons  plus  loin  de  la  suppuration  du  cer- 
veau (1)  : quant  à la  couleur  jaune,  je  crois  devoir  remplacer 
la  théorie  du  professeur  Lallemand  par  la  proposition  sui- 
vante : que  la  couleur  jaune  dans  la  substance  cérébrale  est  un 
indice  de  la  présence  du  sang,  soit  que  ce  dernier  vienne  d’être 
épanché  récemment  dans  un  point  voisin  de  celui  t[ui  est  le 
siège  de  la  coloration,  soit  que  cette  dernière  soit  la  trace  d’un 
épanchement  ou  d’une  infiltration  ancienne. 

Les  auteurs  se  sont  peu  occupés  de  ce  phénomène  ; plusieurs 
ont  reproduit  l’opinion  de  M.  Lallemand,  comme  le  docteur 
Sims,  suivant  lequel  « la  couleur  jaune-paille  du  cerveau  est  le 
résultat  du  mélange  d'’un  fluide  purulent  avec  les  débris  de  la 
substance  blanche  ramollie  (2)  ; » mais  sans  jamais  en  faire, 
que  je  sache  au  moins,  le  sujet  d’une  étude  spéciale. 

Le  premier  point  à rechercher  ici,  c’est  si  dans  les  autres  par- 
ties du  corps  on  peut  établir  quelque  rapport  entre  la  suppura- 
tion et  une  coloration  analogue  des  tissus.  Or,  voilà  ce  que  je 
crois  pouvoir  nier  comme  contraire  à l’observation  de  tous  les 
jours,  tandis  que  je  prétends  que  partout,  ainsi  que  dans  le  cer- 
veau, on  trouve  cette  même  coloration  directement  liée  à la 
presence  du  sang.  Ainsi  la  couleur  jaune  des  ecchymoses,  à la 
suite  des  contusions,  autour  des  piqûres  de  sangsues,  dans  les 
trombus,  suites  d une  saignée,  passe,  pendant  leur  résolution, 
par  toutes  les  nuances  que  peut  présenter  celle  qui  s’observe 
dans  le  cerveau.  Au  sein  des  tumeurs  encéphaloïdes,  tout  le 
monde  a vu  de  ces  taches  jaunes  qui  résultent  de  petits  épan- 
chements de  sang  dans  ce  tissu,  et  dont  l’origine  ne  peut  offrir 
aucune  espèce  de  doute  ; n’est-ce  pas  même  à un  état  particu- 
lier du  sang  qu’on  a comparé  à l’ecchymose,  que  plusieurs  per- 
sonnes ont  cru  pouvoir  attribuer,  dans  certains  cas,  l’ictère  des 
nouveaux-nés  ? 

Il  n est  pas  une  affection  aiguë  de  l’encéphale  peut-être,  qui 

(1)  Voyez  chap.  VI,  §t. 

(2)  Docteur  Sims,  Mdmoire  sur  la  guérison  du  ramollissement  du  ce/veau. 
tiaz,  med.  28  juillet  1838, 


^2  RAmolussement  aigtJ;  (anaï.  path.) 

ne  fouinisse  aussi  1 occasion  de  constater  avec  certitude  Tori- 
gine  c e cette  coloration.  Ainsi,  dans  les  épanchements  sanguins 
de  1 arachnoïde  (apoplexie,  hémorrhagie  méningée),  ne  voit-on 

pas  deslesecondjonr,d’uncôtélafaceinterned!ladure-mère, 

dien^T^  à travers  le  feuillet  arachnoï- 

sang?  Qui  n a vu,  dans  le  tissu  cellulaire  sous-arachnoïdien, des 
suff  usions  sanguines  à demi-résorbées  laisser  un  reflet  jaunâtre 
sui  la  partie  correspondante  de  la  pie-mère  et  du  liquide  séreux 
qui  y es  t in  ti  e ? Dans  l’intérieur  du  cerveau,  on  a assez  souvent 
décrit  les  périodes  de  résorption  du  sang  épanché  en  W 
apoplexie,  hémorrhagie  cérébrale)  pour  que  je  n’aie  pas  à L- 
sistei  sur  ce  point.  Ainsi  la  teinte  jaunâtre  des  parties  saines 
qui  environnent  les  foyers  récents;  ainsi  ce  liquide  jaune-foncé, 
semblable  a de  la  bile,  qui  remplit  l’intérieur  de  ces  foyers  (au 
bout  d un  ou  deux  mois  ou  davantage),  et  sans  que  leurs  parois 
O fient  de  traces  d’inflammation  ; ainsi,  dans  une  période  plus 
avancée,  ces  cicatrices  ou  ces  kystes  à parois  d’un  jaune 

Dans  de  fortes  congestions  cérébrales,  j’ai  vu  quelquefois 
une  lepre  teinte  jaunâtre  se  montrer  sur  la  substance  blanche 
des  hémisphères,  résultat  de  la  transsudation  du  sang  encore 
contenu  dans  les  vaisseaux  (1). 

Tout  a fait  au  début  du  ramollissement,  la  couleur  jaune  se 
rencontre  assez  rarement  dans  la  substance  corticale,  parce  que 


(t)  On  rencontre  assez  fréquemment  une  coloration  jaune  du  cerveau, 
ciezies  individus  morts  sous  l’influence  d’un  empoisonnement  lent  parle 
P omb.  « La  coloration  jaune,  terreuse,  sale  de  la  substance  du  cerveau,  dit 
anquerel  des  Planclies,  dans  son  excellent  ouvrage  sur  les  maladies 
-aiuinines,  ne  peut  être  regardée  que  comme  un  accident  lié  à un  des  plié- 
nomènes  caractéristiques  de  l’intoxication  saturnine  primitive,  l’iclère  sa  • 
tiirniu.  Elle  dénoté  la  présence  du  plomb  dans  le  cerveau  (t.  H,  p.  360)». 
Celle  explication  est-elle  bien  certaine,  ou  doit-elle  s’appliquer  i tous  les 
cas.?  M.  Martin-Solou  avait  rencontré  huit  fois  (en  1837) , chez  des  indivi- 
dus affectés  d’épilepsie  saturnine,  une  hypertrophie  du  cerveau.  Quand  ils 
avaient  eu  du  délire,  il  avait  trouvé  une  teinte  jaune  fort  remarquable; 
quand  ils  n en  avaient  jias  eu,  le  cerveau  avait  sa  coloration  normale. 

( Bulhun  ch  Cuicudénh  royale  de  mc'decine  1837,  l.  2,  pag.  31/,).  Je  me 
suis  demandé  si  celle  coloration  jaune  ne  tiendrait  pas  à d’anciennes  con- 
gestions, qui  auraient  elles-mêmes  causé  le  délire  observé  pendant  la  vie. 


COULE UK. 


13 


la  rougeur  y est  généralement  trop  vive  ; quelques-unes  de  nos 
premières  observations  nous  montreront  cependant,  dès  les 
premiers  jours  de  la  maladie,  une  teinte  jaune  légère,  mais  bien 
prononcée  sur  des  circonvolutions  rougeâtres,  tuméfiées  et  en- 
core à peine  ramollies.  Dans  la  substance  médullaire,  la  cou- 
leur jaune  se  montre  habituellement  plus  tôt,  dans  l’intervalle 
des  points  injectés,  à l’entour  des  infiltrations  sanguines  partielles. 
Mais  il  faut  noter  que  dans  le  ramollissement  aigu  la  couleur 
jaune  n’est  autre  chose  que  le  résultat  d’une  véritable  imbibi- 
tion  du  sang  infiltré  ou  encore  contenu  dans  les  vaisseaux  ; 
aussi  la  trouve-t-on  presque  toujours  unie  à la  rougeur.  Les  cas 
où  elle  remplace  déjà  complètement  cette  dernière  sont  fort 
rares  : je  n’ai  vu  cju’une  fois,  le  vingtième  jour,  un  ramollisse- 
ment colore  en  jaune  sans  offrir  plus  aucune  trace  de  rougeur 
(obs.  57).  Il  en  était  ainsi  dès  le  onzième  jour,  dans  la  20®  ob- 
servation de  M.  le  professeur  Andral  (1).  Cependant  j’ai  montré 
a la  Société  anatomique  un  cerveau  sur  lequel  non  pas  un  ra- 
mollissement, mais  une  simple  infiltration  sanguine  trauma- 
tique avait,  dès  le  sixième  jour,  pris  une  teinte  jaune  d’ocre 
foncé  sans  qu’il  restât  d’autre  vestige  de  rougeur.  Une  forte 
contusion  avait  atteint  sansfracture  la  région  frontale.  L’infiltra- 
tion avait  eu  son  siège  dans  la  couche  corticale  des  deux  lobes 
anterieuis  du  cerveau  et  dans  la  pie-mère  qui  les  recouvre.  Cette 
dernière  était  couleur  jaune  d’ocre  comme  le  cerveau.  L^ab- 
sence  de  friabilité  et  d’adhérences  de  la  pie-mère,  et  d’aucune 
modification  dans  la  forme  ou  la  consistance  des  circonvolutions 
jaunies,  montrait  qu  il  n y avait  eu  là  qu’infiltration  sanguine 
sans  développement  d’aucun  travail  inflammatoire  (2}. 

En  etudiant  le  l’amolhssement  chronique,  nous  retrouver-ons 
presque  constammen*;  la  couleur  jaune  comme  trace  de  la  rou- 
geur que  nous  aurons  toujours  rencontrée  dans  le  ramollisse- 
ment aigu;  plus  prononcée  et  plus  constante  dans  la  substance 
corticale,  de  même  qu’au  début  la  rougeur  sétait  montrée  plus 
constante  et  plus  vive  dans  cette  dernière  (.3). 


(1)  Andral,  ClinUiuc  mél.  l.  V,  p.  4(57,  3' édition. 

\‘î)  Bullr.tinsde  la  Svciéld aitaloinifiua,  tSAOjp.  98. 

(3)  Ln  docteur  Carswell  a émis  sur  l’origine  delà  couleur  jaune  dans  le 

cerveau  des  idées  assez  conlradicloiros.  <r  Certaines  couleurs  annoncent  «pie 
cl  raniollissenicul  date  d'un  temps  cousidéraldo , clii-il,  plusieurs  semaines 


14 


hamollissemekt  aigu.  (anAt.  i-ath.) 

Tels  sont  à peu  près  les  seuls  changements  de  couleur  que  l'on 
observe  dans  le  ramollissement  aigu  : la  rougeur  avec  toutes 
ses  nuances,  depuis  une  teinte  rosée  jusqu’au  ponceau  noirâtre, 

et  la  couleur  jaune. 

La  coloration  grise  doit  être  fort  rare  dans  le  ramollissement 
leeent;  je  ne  1 y ai  jamais  rencontrée;  elle  me  paraît  apparte- 
nir  a peu  près  exclusivement  à une  période  plus  avancée  de  la 
maladie.  La  couleur  verte,  lorsqu’elle  n’est  pas  l’indice  d’un 
commencement  de  putréfaction,  annonce  toujours  de  la  suppu- 
ration, phénomène  rare,  comme  nous  le  verrons,  dans  la  classe 
es  faits  que  nous  étudions.  Dans  le  ramollissement  chronique 
la  substance  médullaire  offre  quelquefois  une  blancheur  plus 
mate  qu  a 1 état  naturel  ; j’ai  observé  ce  même  fait  dans  un  cas 
de  ramollissement  très-évidemment  aigu,  où  une  partie  du 

ISSU  ramolli  offrait  la  rougeur  vive  si  commune  à cette 
époque. 


S 1\  • Modifications  dans  la  forme  du  cerveau. 

Lorsque  le  ramollissement  aigu  occupe  la  superficie  du  cer- 
veau, il  s’accompagne  ordinairement  de  tuméfaction  : celle-ci, 
presque  toujours  due  à l’augmentation  d’épaisseur  de  la  couche 
corticale,  facile  à constater  à l’aide  d’une  coupe  verticale,  donne 
heu  a 1 aplatissement  des  circonvolutions , à la  tension  delà 
dure-mère,  ci  la  sécheresse  des  méninges,  précisément  comme 
Il  arrive  dans  les  grandes  compressions  produites  par  les  épan- 
c lemenls  sanguins  des  ventricules  ou  de  la  substance  médul- 
kire.  La  tuméfaction  se  remarque  aussi  quelquefois  à la  sur- 
face des  ventricules  latéraux,  quand  le  ramollissement  a son 
smge  dans  les  corps  striés;  la  même  chose  peut  sans  doute  ar- 
river dans  le  ramollissement  des  couches  optiques,  mais  je  ne 


ou  plusieurs  mois  : les  principales  sont  les  couleurs  brune,  jaune  ou  orange, 
^ wn,  yello-w  O!  orange  colour)  soit  isole'es,  soit  combinées,  occupant 
soit  e ruinollissement  lui-mème , soit  les  parties  voisines,  soit  toutes  deux 
en  meme  temps.  Ces  couleurs  tiennent  à X effusiondu  ja/zg^daiis  la  substance 
cercirae.  Puis  il  dit  : « Une  Ic'gère  teinte  jaune-paille  ) a pale  yellow 
stj  aw^  coloured...  ) résulte  aussi  ( arises  also  ) de  la  présence  du  pus.  Mais 
ceci  s oiservc  rarement,  a moins  que  l.a  substance  ramollie  ne  soit  en  contact 
«vec  es  meinhr.mesdii  cerveau.  « ( 77ic  Cyclop.  of  praclical  med . Vol.  IV, 


FOUME. 


15 


l’ai  j)as  observée.  Enfin  j’ai  vu,  rarement  il  est  vrai,  des  ramol- 
lissements circonscrits  dans  lapuipe  médullaire  déterminer  une 
compression  de  la  surface  du  cerveau,  bien  que  les  circonvolu- 
tions fussent  demeurées  intactes,*  il  y avait  alors  du  sang  infil- 
tré dans  la  pulpe  ramollie.  Cette  tuméfaction  dans  le  ramollis- 
sement aigu  est  d’autant  plus  importante  cà  noter,  que  nous 
remarquerons  un  phénomène  tout  à fait  opposé  dans  le  ramol- 
lissement chronique , une  tendance  constante  au  retrait  et  à l’a- 
trophie. 

Lorsque  la  diminution  de  consistance  des  circonvolutions  est 
considérable , on  trouve  ces  dernières  déformées,  réduites  en 
bouillie;  mais  cela  s’observe  rarement  dans  la  première  pé- 
riode de  la  maladie,  à moins  qu’il  n’y  ait  suppuration. 

Les  circonvolutions  présentent  entr’elles,  à l’état  sain , de 
grandes  différences  de  volume.  Celles  de  la  face  inférieure  du 
cerveau  paraissent  assez  volumineuses  ; mais  il  faut  tenir  compte 
de  leur  aplatissement,  qui  les  fait  paraître  plus  larges  qu’elles 
ne  le  sont  en  réalité.  A la  convexité,  les  plus  grandes  sont  celles 
de  la  partie  moyenne,  surtout  ces  circonvolutions  transversales 
qui,  placées  à la  limite  des  lobes  moyens  et  postérieurs,  décri- 
vent toute  la  largeur  de  la  convexité  des  hémisphères.  Les  cir- 
convolutions des  lobes  antérieurs  sont  plus  petites , mais  sur- 
tout celles  de  la  pointe  occipitale  ; celles-ci  sont  toujours  étroites, 
comme  ratatinées,  et  cette  disposition,  jointe  à la  dureté  que 
nous  y avons  déjà  notée,  contribue  souvent  à faire  prendre 
pour  un  état  d’atrophie  ce  qui  n’est  qu’une  manière  d’être  na- 
turelle et  constante.  Les  plus  petites  de  toutes  les  circonvolutions 
sont  celles  auxquelles  aboutit  la  scissure  de  Sylvius,  celles  qui 
forment  Vinsula  ou  lobule  du  corps  strié,  et  restent  cadrées 
sous  la  saillie  du  bord  antérieur  du  lobe  moyen. 

L’épaisseur  de  la  couche  corticale  des  circonvolutions  m’a  paru 
varier  notablement  chez  les  différents  individus  : je  ne  saurais 
rien  établir  de  précis  à cet  égard.  Je  dirai  seulement  qu’elle  est 
moindre  aux  circonvolutions  de  la  base  qu’à  celles  de  la  con- 
vexité, et  un  peu  plus  grande  au  sommet  des  circonvolutions 
qu  au  fond  des  anfractuosités. 

Il  est  un  état  particulier  des  circonvolutions  cérébrales  qu’il 
importe  de  connaître,  parce  que,  vu  sa  fréquence  chez  bs  vieil- 
lar.ls  , et  son  peu  de  rapport  avec  l’olat  général  des  facultés  chez 


16 


UAAIÜLUSSEiMEINX  aigu,  (ajnat.  path.) 

ces  individus,  il  est  difficile  de  lui  assigne.-  un  caractéie  patho- 
logique. 

Je  veux  parler  de  l’atrophie  seiiile.  Voici  sous  quel  aspect  elle 
se  présente  ; 

La  couche  corticale  de  la  superficie  du  cerveau  prend  une 
teinte  un  peu  plus  pâle  et  en  même  temps  une  densité  un  peu 
plus  grande  qu’à  l’état  normal  ; sa  surface  est  inégale , bosselée 
et  comme  rugueuse  au  toucher.  Les  circonvolutions  sont  ratati- 
nées et  diminuées  dans  tous  les  sens;  lorsqu’on  les  incise  on 
trouve  la  lame  de  substance  blanche  qu’elles  renferment  consi- 
déiablernent  amincie;  cependant  il  est  évident  que  l’atropbie 
porte  principalement  sur  la  substance  grise. 

Cette  altération  présente  des  degrés  très-variables  en  étendue. 
Quelquefois  elle  occupe  toute  la  sujierficie  du  cerveau;  anfrac- 
tuosités et  circonvolutions  , tout  est  inégal,  ratatiné  et  rugueux 
autouchei.  Cependant,  en  général,  la  base  ne  m’a  j>as  paru  par- 
ticipei  à cet  état.  Le  plus  souvent  l’atrophie  se  montre  seule- 
ment au  sommet  des  circonvolutions,  et  encore  sur  quelques- 
unes  d’entre  elles.  L’ordre  de  fréquence  dans  lequel  je  les  ai 
vues  atteintes  de  cette  atrophie  , est  le  suivant  ; d’abord  les  cir- 
convolutions de  la  partie  latérale  et  externe  des  hémisphères  , 
celles  de  la  convexité  du  lobe  moyeu , surtout  à sa  réunion  avec 
le  postérieur,  puis  celles  du  lobe  antérieur.  Elle  se  montre  ra- 
rement sur  la  face  interne  des  hémisphères.  11  faut  bien  se  gar- 
der de  prendre  pour  le  résultat  d’une  semblable  atrophie , la  con- 
formation que  nous  avons  dit  être  naturelle  à l’extrémité  des 
lobes  postérieurs. 

§ V.  Etat  du  reste  du  cerveau  et  des  méninges. 

Le  ramollissement  cérébral , même  à son  premier  degré  , est 
en  général  une  affection  toute  locale , bien  circonscrite  : au 
moins  c’est  ainsi  qu’il  se  présente  habituellement  à nous.  Les 
parties  environnantes  sont  quelquefois,  comme  nous  l’avons  déjà 
dit,  le  siège  d’une  vive  injection  ou  d’infiltrations  sanguines  de 
formes  diverses  : la  totalité  même  du  cerveau  peut  offrir  les 
traces  d’une  congestion  sanguine  plus  ou  moins  prononcée;  mais 
le  plus  souvent , le  reste  de  cet  organe  ne  jnesente  rien  de 
semblable  , et  se  montre  avec  sa  pâleur  et  sa  consistance  habi- 
tuelles. 


JIVJJBCXIÜ»’  UES  JiÉiXlAGES. 


17 


Les  méninges  apparaissent  sous  des  aspects  très-variés,  et  qui 
demandent,  pour  être  convenablement  appréciés,  une  étude  un 
peu  miuutieuse. 

Je  n’ai  jamais  trouvé  dans  la  cavité  de  raraclmoïde  , aucune 
lésion  qui  nie  parût  avoir  quelque  rapport  avec  un  ramollisse- 
ment aigu  : seulement,  lorsque  ce  dernier  détermine  une  vive 
tuméfaction  du  cerveau  , la  cavité  de  l’arachnoïde , soit  des  deux 
côtés,  soit  seulement  au-dessus  de  l’hémisphère  malade,  est 
sèche  et  même  un  peu  visqueuse,  ce  qui  arrive  toutes  les  fois 
que  le  cerveau  vient  à être  comprime  de  dedans  en  dehors  par 
une  cause  quelconque.  Cette  secheresse  et  cette  viscosité  s’obser- 
vent alors  également  sur  la  pie-mère,  très-mince  et  comme 
tassée  : il  faut  prendre  garde  de  ne  point  voir  tlans  celte  dispo- 
sition le  résultat  d un  état  pathologique  particulier  des  méninges. 

La  pie-mere  nous  présenté  à etudier  l’injection  de  ses  vais- 
seaux , le  liquide  qui  les  infiltre  et  ses  adhérences  à la  surface 
du  cerveau. 

Il  faut  distinguer  soigneusement  dans  la  pie-mère  l’injection 
des  gios  troncs  veineux,  de  celle  des  petits  vaisseaux  qui  se  ra- 
mifient en  si  grand  nombre  dans  le  tissu  cellulaire  sous-ara- 
chnoidien.  La  première  peut  fort  bien  n’être  cju’un  phénomène 
d agonie,  s’être  produite  mécaniquement  par  l’embarras  de  la 
respiration  et  ae  la  circulation  , peut-être  même  après  la  mort, 
et  elle  coïncide  avec  la  repletion  des  sinus,  souvent  avec  l’en- 
goigement  sanguin  de  la  face  et  du  cuir  chevelu  : ce  ne  serait 
alors  qu’un  phénomène  d’asphyxie.  La  seconde  est  évidemment 
le  résultat  d’une  congestion  active,  faite  durant  la  vie  : c’est  la 
seule  qui  nous  intéresse  réellement. 

'Voici  le  résultat  que  me  donne  le  relevé  de  24  observations 
dans  lesquelles  j’ai  noté  exactement  l’état  de  la  pie-mère  : 

Pas  d’injection,  ou  injection  ordinaire I3  fois 

Injection  assez  vive.  . ^ \ 

Injection  considérable 4 

Injection  limitée  à riiémisphère  malade.  . • . . 1 

Limitée  au  point  irralade  de  la  superficie  d’un 
hémisphère . ^ 

Dans  deux  cas,  je  n’ai  pas  noté  l’état  des  vaisseaux,  mais  seu- 
lement une  suffusion  générale  de  cette  membrane. 


2 


18 


RAMOLLISSEMEWT  aigu.  (ANAÏ.  I'ATH.) 

Dans  deux  cas  ou  l’injection  de  la  pie-mère  était  assez  vive,  il 
y avait  un  peu  de  suffusion  sanguine  ; dans  un  cas  une  suffusion 
sanguine  considérable  était  limitée  au  point  malade. 

Nous  avons  obtenu  les  mêmes  résultats  des  observations  de 
M.  Andral.  L’état  de  la  pie-mère  a été  indiqué  dans  13  cas  de 


ramollissement  aigu  : 

Elle  était  injectée 2 fois. 

Assez  vivement  injectée 1 

Vivement  injectée 2 


Huit  fois  il  est  dit  expressément  qu’elle  n’était  point  injectée, 
ou  qu’elle  n’offrait  rien  de  remarquable.  Dans  ces  derniers  cas, 
on  trouve  deux  sujets  au-dessous  de  trente  ans,  un  au-dessous 
de  cinquante. 

Ces  faits  qui  comprenuent  spécialement  des  vieillards,  mais 
aussi  quelques  individus  peu  avancés  en  âge,  nous  montrent 
que  dans  le  ramollissement  spontané,  la  pie-mère  semble  prendre 
une  part  peu  active  au  développement  de  la  maladie,  puisque  sur 
3T  cas,  21  lois  elle  n’offi'ait  aucune  injection,  6 fois  une  injec- 
tion seulement  assez  vive,  et  qu’en  définitive  il  n’y  a eu  d’injec- 
tion considérable  que  6 fois. 

Un  phénomène  dont  l’élude  offre  beaucoup  plus  de  difficulté , 
c’est  la  présence  de  la  sérosité  infiltrée  dans  la  pie-mère.  On  sait 
qu’il  est  fort  commun,  chez  les  vieillards,  de  trouver  une  quan- 
tité notable  de  sérosité  infiltrée  dans  le  tissu  cellulaire  sous- 
arachnoïdien. 

Il  s’agit  de  savoir  quelle  est  la  date  de  cet  épanchement,  et  s’il 
tient  au  ramollissement  ou  à la  cause  qui  l’a  produit. 

Voici  quelles  données  m’a  fournies  sur  ce  sujet  l’examen 
d’un  très-grand  nombre  de  cerveaux  infiltrés  de  sérosité,  chez 
des  sujets  pris  dans  les  conditions  les  plus  variées. 

Il  faut  d’abord  examiner  avec  le  plus  grand  soin  les  circon- 
volutions : si  elles  présentent  cette  diminution,  ce  ratatinement 
que  nous  avons  décrit  tout-à-l’heure  sous  le  nom  d’atrophie  sé- 
nile, il  n’y  a pas  de  doute  que  l’épanchement  séreux  est  an- 
cien : conséquence  nécessaire  du  retrait  du  cerveau,  il  s’est 
formé  pour  remplir  le  vide  qui  s’était  produit  entre  ce  dernier  et 
le  crâne.;  il  n’a  reellenient  pas  alors  de  caractèrepathologique.  En 
outre,  on  trouve  dans  ce  cas  les  circonvolutions  écartées  par  la 


INFILTHATION  SÉREUSli  DK5  MÉNINGÉS. 


19 


sérosité  épanchée  jusqu’au  fond  des  anfractuosités,  et  cette  re- 
marque est  delà  plus  haute  importance;  car  l’on  peut  établir 
qu’en  général  les  circonvolutions  sont  d’autant  plus  écartées  que 
l’épanchement  est  plus  ancien. 

Lorsqu’au  contraire,  les  circonvolutions  ont  leur  volume  et 
leur  développement  normal  ,ou  peut  être  assuré  que  l'épanche- 
ment tient  à une  cause  morbide  et  ne  s’est  plus  produit  simple- 
ment pour  remplir  un  espace  vide  ; si,  de  plus,  les  circonvolu- 
tions, au  lieu  d’être  écartées  par  la  sérosité,  sont  rapprochées 
les  unes  des  autres,  si  surtout  leur  surface  est  légèrement  aplatie 
par  la  compression  de  dehors  en  dedans,  si  quelques-unes  d’en- 
tr’elles  sont  partiellement  déprimées  par  la  sérosité  et  forment 
comme  des  godets  ou  des  impressions  digitales  à la  surface  du 
cerveau  , il  est  à peu  près  certain  que  l’épanchement  est  récent. 

Ainsi  la  forme  des  circonvolutions  et  leur  degré  d’écartement 
par  la  sérosité;  telles  sont  les  conditions  dont  l’examen  permet 
d’apprécier  le  plus  sûrement  la  date  approximative  des  infiltra- 
tions sereuses  de  la  pie-mere.  Jeregrctie  beaucoup  de  ne  pouvoir 
exposer  ici  tout  au  long  les  raisons  et  les  faits  qui  m’ont  aidé  à 
établir  ces  propositions,  je  le  ferai  dans  une  autre  occasion; 
mais  je  désire  qu’en  attendant  l’on  veuille  bien  prendre  eu  con- 
sidération ces  données , peut-être  propres  à diminuer  un  peu 
l’obscurité  de  ce  point  d’anatomie  pathologique. 

Il  faut  encoie  noter  avec  soin  la  nature  du  liquide  épanché  ; 
il  est  ceitain  que  plus  il  se  rapprochera  des  conditions  de  la  sé- 
rosité normale,  aqueuse,  transparente,  incolore,  plus  il  sera 
permis  de  le  négliger.  On  m’a  paru  quelquefois , à tort , je 
pense,  attacher  quelque  importance  a l’aspect  gélatineux  du 
fluide  sous-arachnoklieii  ; cet  aspect  tient  tout  simplement  à 
1 enlacement  des  lames  et  des  mailles  du  tissu  cellulaire,  qui  le 
retiennent  dans  leur  réseau.  Lorsqu’il  y a un  peu  de  suffu- 
sion sanguine  dans  la  pie-mère  (et  cette  sufl'usion  est  en  général 
bien  peu  importante,  car  elle  se  rencontre  chez  des  individus 

morts  de  toutes  sortes  de  maladies),  ou  une  injection  un  peu 
vive  , la  sérosité  offre  parfois  une  teinte  jaune  due  à une  simple 
transsudation  du  sang;  cette  coloration  demeure  partielle  k 
cause  (le  la  disposition  du  tissu  cellulane  sous-aualinoï'lieti. 

Or,  il  ne  m est  pas  arrive  une  seule  fois  de  i eiicon i er  un  ra- 
mollissement aigu  accompagné  d’une  infiltration  séreuse  de  la 


20 


KAJIULLISSüi'.Ui.VT  AIGL  . (aAAX.  l’AXH.  ) 

pie-mère,  dans  des  conditions  telles  qu  on  me  parût  devoir  lui 
attribuer  une  date  récente  ; dans  aucun  cas  je  n’ai  trouvé  de 
pus,  m même  de  sérosité  laiteuse  ou  trouble  dans  les  méninges. 
.1  en  dirai  autant  des  observations  de  M.  Rostan.  Sur  les  33  ob- 
servations de  M.  Andral , une  seule  fois  on  a trouvé  un  peu  de 
sérosité  légèrement  trouble  infiltrée  sous  l’arachnoïde.  Ces  ré- 
sultats , joints  à ceux  que  nous  avait  déjà  donnés  l’étude  de  l’in- 
jection vasculaire  du  tissu  cellulaire  sous-arachnoïdien  , me  pa- 
raissent fort  remarquables.  Ne  montrent-ils  pas  un  isolement 
plus  gland  que  I on  ne  serait  porté  à le  supposer,  entre  le  cer- 
veau et  les  méninges,  dans  le  ramollissement  aigu. ^ Et  notez 
bien  que,  si  dans  mes  observations  il  y a quelques  individus 
encore  adultes,  il  y en  a encore  un  bien  plus  grand  nombre, 

et  des  individus  très-jeunes,  dans  l’ouvrage  du  professeur 
Andral. 

M.  Lallemand  n’a-t-il  donc  pas  eu  tort  de  faii  e jouer  aux 
méningés  un  si  grand  rôle  dans  l’inflammation  du  cerveau?  Ne 
s’est -il  pas  un  peu  laisse  abuser,  même  sur  les  dispositions 
anatomiques  qu’elles  offrent  sur  le  cadavre?  El  à ce  propos,  je 
dirai  que  je  ne  conçois  pas  l’importance  que  certains  auteurs  atta- 
chent à l’épaississement,  à l’opacité  surtout  de  l’arachnoïde,  pour 
expliquer  les  symptômes  observés  durant  la  vie  : pour  moi , cet 
etatde  1 arachnoïde  n’a  pas  en  général  plus  devaleurque  les  pla- 
ques laiteuses  du  cœur,  que  les  adhérences  de  la  plèvie,  etc. 
L’origine  de  ces  altérations  est  commune,  leur  valeur  esi  iden- 
tique. Je  soutiens  qu’il  est  impossible  de  voir  les  choses  autre- 
ment, pour  peu  que  l’on  ait  ouvert  avec  soin  quelques  cada- 
vres de  vieillards.  Et  cependant  c’est  sur  ces  opacités  et  épais- 
sissements de  l’arachnoïde  qu’un  auteur  distingue  a basé  une 
théorie  de  l’aliénation  mentale. 

Passons  maintenant  à l’étude  des  adhérences.  Les  adhérences 
que  la  pie-nière  peut  présenter  avec  le  cerveau,  sont  de  trois 
ordres  : I»  une  sorte  de  viscosité  qui  s’établit  entre  leur  double 
surface,  lorsqu’aucun  liquide  n’est  interposé  entre  elles,  ainsi 
dans  le  cas  de  compression  du  cerveau  et  d’aplatissement  des 
circonvolutions  ; 2“  les  vaisseaux  qui  des  membranes  se  ren- 
dent au  cerveau  lui-même;  3“  enfin  des  adhérences  celluleuses 
anciennes  ou  récentes. 

A I état  noi  mal  , le  degré  d’adhérence  des  incmbianes  au 


ADHERENCE  DES  MÉKIKCES. 


21 


cerveau  varie  suivant  les  points.  Je  crois  que  l’on  peut  établir 
qu’en  général , lorsque  Tautopsie  est  pratiquée  avant  quarante 
heures,  et  que  la  température  n’est  pas  trop  élevée,  ainsi  au- 
dessous  de  20°,  l’érosion  de  la  surface  du  cerveau  par  l’adhé- 
rence de  la  pie-mère  , est  un  phénomène  pathologique.  Il  faut 
tenir  compte  cependant  des  cas  où  la  putréfaction  marcherait 
avec  une  vitesse  inaccoutumée.  Il  faut  également  excepter  à la 
base  du  cerveau  les  circonvolutions  du  lobe  moyen  ou  sphénoï- 
dal et  quelquefois  aussi  du  lobe  antérieur,  dont  la  mollesse 
rend  la  séparation  des  méninges  si  difficile,  comme  nous  l’avons 
déjà  dit. 

Les  méninges  s’enlèvent  en  général  facilement  sur  toute  la 
convexité  et  sur  les  parties  latérales  des  hémisphères;  cependant 
on  éprouve  quelque  difficulté  sur  le  bord  qui  réunit  leur  face 
interne  à la  convexité,  et  il  est  rare  que  la  surface  des  circon- 
volutions ne  soit  pas  artificiellement  lésée  dans  ce  point.  Les 
circonvolutions  dures  et  étroites  qui  forment  la  pointe  occipi- 
tale des  hémisphères  sont  réunies  par  des  adhérences  serrées  qui 
ne  permettent  jamais  à la  sérosité  de  s’y  infiltrer,  et  rendent 
l’enlèvement  des  méninges  fort  difficile.  On  peut  dire  qu’en  gé- 
néral les  méninges  se  séparent  avec  d’autant  moins  de  peine  de 
la  superficie  du  cerveau,  qu’elles  renferment  une  plus  grande 
quantité  de  sérosité;  aussi,  je  donnerai  le  conseil,  quand  le 
cerveau  a été  retiré  du  crâne,  de  les  détacher  le  plus 
promptement  possible,  et  avant  que  la  .sérosité  de  la  pie-mère 
se  soit  écoulée  (1). 


fl)  La  séparation  des  méninges  et  du  cerveau  eu  une  des  parties  les  plus 
imporiantes  et  en  môme  temps  les  plus  difficile,  de  raulopsie  de  l’encépliale. 
Voici  comment  je  procède  à cette  opération.  Après  avoir  fendu  .avec  pré- 
caution^ le  crâne  avec  im  marteau  traiicliaut  et  un  peu  lourd  , je  soulève  U 
durj-mère  avec  des  pinces  lï  di.sseclion,  je  fais  une  petite  incision  su  r lepli 
et  J introduis  dan, s la  cavité  de  12aracIinoïde  un  bistouri  boutonné,  ou  .simple- 
ment des  ciseaux  mousse*  qui  coupent  crucinlemeiit  la  dure-mère  ; il  faut 
avoir  soin  dïnirodiiirc  les  cisenuxbà  pial,  depeurde  lé.serla  .superficie’du  cer- 
veau. M.  Roeboux  a l’habitude  d’ixarainer  et  d’inciser  le  cerveau  sur  place  -• 
je  préfère,  avec  M.  Cruveilliier , le  deïaclier  en  le  .soulevant  avec  précaution 
d avant  en  arrière  , coupant  avec  im  «cal)'c!  les  vaisseaux  et  les  nerfs  qui  1« 
reiieiim-ni  è la  base  du  crâne,  puis  incLsani  la  protubérance  i sa  partie 
raoyomie,  ( e manière  à examiner  isolément  le  cerveau  , puis  le  cervelet  avec 
a moelle  alloneée,  11  est  absol.iment  indi.spensable,  si  l'on  veut  tirer  quelqu® 


AiUr.  (A^^T.  VATH.) 

Ursc|ue  la  snpcificie  du  cerveau  se  décliire  sous  la  pie-mère 
I fout  chercher  distinguer  si  cela  vient  de  ce  que  la  cohésion 
de  la  substance  cérébrale  étant  diminuée  cède  aux  adhérences  na- 
turellcs  de  la  pie-mère, oude  ce  que  cesdernièressontplus  intimes 
qu  a Tetat  naturel.  Celte  distinction  n’est  pas  toujours  aisée  à 
laire. En  général,  dans  le  ramollissement  aigu  , excepté  lorsque 
la  maladie  était  fort  récente,  j’ai  cru  trouver  de  véritables  adhé- 
rences entre  la  pie-mère  et  le  point  ramolli  ; mais  je  n’ai  jamais 
vu  les  adhérences  s’étendre  au-delà  de  ce  point.  Elles  étaient  en 
général  peu  prononcées  , consistant  simplement  en  une  aggluti- 
nation assez  intime  de  la  pulpe  ramollie  à ia  pie-mère  ; j’ai  ra- 
rement distingué  quelques  filaments  blanchâtres  de  lymphe 
plastique. 


En  résumé,  le  ramollissement  aigu  du  cerveau  est  caractérisé 
spécialement  par  une  diminution  de  consistance  de  la  pulpe 
céiébrale,  sans  désorganisation,  avec  rougeur,  par  injection  ou 
par  infiltration  de  sang  ou  par  simple  coloration  uniforme,  par- 
tielle ou  geneiale  de  la  pulpe  ramollie,  de  plus,  avec  tumé- 
faction et  adhérences  aux  membranes  dans  la  plupart  des  cas 
ou  il  occupe  la  superficie  du  cerveau. 

Avant  de  soumettre  ces  altérations  à une  analyse  approfon- 
die, je  vais  rapporter  une  série  d’observations  propres  à mon- 
trer les  principales  variétés  qu’elles  peuvent  présenter,  et  qu’il 
serait  impossible  d’exposer  fidèlement  dans  une  description  gé- 
nérale. 


ARTICLE  SECOND. 

OBSERVATIONS  DE  RAMOLLISSEMENT  AIGU. 

Ces  observations  sont  divisées  en  deux  séries,  destinées  à faire 
connaître  le  ramollissement  aigu  de  la  substance  médullaire  et 

fruit  de  1 examen  d’un  cerveau,  d’en  séparer  avec  le  plus  grand  soin  la  pie- 
mère  qui  1 enveloppe  : la  chose  offre  souvent  de  grandes  diflîcuUés.  Il  ne 
('auI  jamais  se  servir  de  ses  doigts,  mais  seulement  de  pinces  à disséquer  : 
.quelque  imparfait  que  soit  cet  instrument,  dans  ce  sens,  c’est  le  seul  que  nous 
possédions.  On  ne  doit  procéder  à l'inspcftiou  de  rinie'rieiir  du  cerveau 
()u’après  avoir  entr  ouvert  et  examiné  soigneusement  chaque  anfractuosité. 
Je  signale  comme  les  points  les  plus  im|)ortaiits,  le  lobule  du  corps  strié , et 
les  anfractuosités  d«  la  pointe  occipitale. 


2/» 


celui  de  la  aubslance  cor,,«dc  , c à n.onuov  l'injeclim.  de  l’une 
et  la  simple  culora.iouiose  de  l’autre,  coudu.sant,  degres  par 
degrés  , à tes  ramollisseiueuts  considérables  ou  1 on  voit,  com- 
binée ou  non  avec  dn  sang  épanché  , la  substance  nerebrale  de 
plus  eu  plus  altérée  dans  son  organisation,  tendre  gradnelle- 
ment  vers  ces  transtomiations  qui  constituent  le  ramollissement 
chronique. 


S I Observations  pour  faire  connaître  le  ramollissement  aigu  dans  la  sub- 
^ ‘ stance  médullaire,  avec  injection , puis  avec  infiltration  sanguine. 


Observation  i.  - Pneumonie,  stupeur,  faiblesse  du  bras  droit  avec 
conservation  de  la  sensibilité;  le  troisième  jour,  resolution  et  insensi- 
bilité complète  à droite , mort.  -’  RamollissemeDl  rougeâtre  superfi- 
ciel peu  étendu  de  deux  circonvolutions  de  la  partie  interne  de  1 hé- 
misphère gauche  ; injection  très  vive  de  toute  la  substance  médullaire 
voisine.  Disposition  remarquable  du  corps  strié.  Etat  crible  du  cer- 
veau (i). 


La  nommée  Meunier,  âgée  de  80  ans,  présentait  depuis  quel- 
ques jours  les  signes  d’uue  pneumonie  au  second  degré  de  la 
partie  moyenne  du  poumon  droit  ; (matité,  absence  de  respira- 
tion sans  râle...)  Une  saignée  avait  été  pratiquée.  Le  21  mars 
1840,  elle  fut  trouvée  dans  l’état  suivant  : 

Etat  général  de  stupeur-,  la  malade  reste  dans  le  décubitus 
dorsal,  ne  donnant  aucun  signe  de  douleur,  parlant  à peine; 
la  langue  est  sèche.  Elle  ne  peut  soutenir  son  bras  droit  en 
l’air,  sans  pourtant  le  laisser  retomber  comme  dans  le  cas  de 
résolution  complète  ; le  bras  gauche,  au  contraire,  peut  se  main- 
tenir élevé  ; déviation  de  la  bouche  à gauche  à peine  prononcée. 
Pas  de  chaleur  à la  tête.  Pupilles  un  peu  dilatées.  La  sensibilité 
est  conservée  ; l’intelligence  n’est  pas  abolie,  mais  1 état  de  stu- 
peur empêche  d’obtenir  beaucoup  de  réponses.  Legeres  inter- 
mittences dans  le  pouls. 

Même  état  le  lendemain. 


(1)  Il  est  rare  de  trouver  des  ramollis.scnients  exactement  circonscrits  dans 
la  substance  blanclie  ou  grise  du  cerveau.  Je  range  ici  les  laits  dans  lesquel.s 
les  phe'nomènes  anatomiques  les  plus  importants  se  sont  passés  dans  la  sub- 
•lance  tnédnllaire. 


0 4 

^ Al/’ T- 

(anat.  PATH.) 

un  compte  I rllr  '*"  '^>»s 

ou  le  pincer  avec  force  sans  ohm"  >’"1"'=‘' P''ofond|!inent 

Mort  la  nuit  suivante  ' 

Autopsie  34  heures  après  la  mort  Le  crânp  n(T  - • 
tres-considérable.  On  trouve  -i  1-,’  f une  épaisseur 

t^roiie,  une  e.ostose  éhn  ' n ù 

o^e  A ’sa  smS  "co  , rre’  t ,""  7'  — 'on- 

Sï  Sï 

^uneusLs.  Les  circonvolutions  sont  rénéralemem  n-51»  . 

'Olmmncnses,  médiocrement  écartées  les  ,71  T , 

l’io-o.è.e  s’en  sépare  facile, nent  “ 

volt,u7l\î,“li:777"'  Je  I■|.é,„isphére  gauche,  deux  circon 
senl  PI  ^lout  le  Jîord  les  sépare 

rtliemtele  :;r£,7hl  " t de 

™.n,ne  une  ,'.tee  de  c,“":,  t^Vl  t' 

prennent  Cf u’une  partie  de  1”  • i V ne  com- 

ieur  fond  est  cVnn,.  ' ^1^  la  substance  corticale  ; 

snperte  e dl  " "'■>■  " P“"‘  <>'-■  '■“«Séuf  A la 

T ‘.“^^'^'-ulutions  environnantes. 

.uisp7,e  dlo,i‘“'""°  ■nJdoliaire  dn  même  hé- 

senm  coT  TîT’"" 

voit  un  très  -rand  7 1 1 '■  “““  ^‘“<*"0, 0“ 

«U  moins  Inné  ^ ^ J®  plus 

Pin7,.x  'o,  s 7 "'h'"'""'  '-J-’  do  pVils 

liéliés  » iento  ""  '““11°  °‘  représentant  des  vaisseaux 

comme'ltne  l::”,r7l  ï T""*  ‘r  ™“ 

rji  I ^^®t  de  compacité  du  tissu  injecté. 

Toute  la  snbstauce  corticale  avoisinante  est  d’un  ronge  assez 

Jl  ;.'  r P^foude^de  son 

p.  , dans  quelque,  point,  on  distingue  au  miliett  de  celte 


OBSERVATIONS. 


25 


rougeur  de  petites  taches  rouges  et  même  quelques  vaisseaux 
bien  distincts.  Au  niveau  des  points  e'rodés  par  la  pie-mère  se 
trouve,  dans  une  petite  étendue,  un  léger  ramollissement  qu’un 
filet  d’eau  soulève  en  chevelu,  sans  en  entraîner  de  fragments. 

Vers  la  partie  externe  du  corps  strié,  on  trouve  un  petit  foyer 
hémorrhagique,  de  la  grosseur  d’un  noyau  de  cerise,  contenant 
un  petit  caillot  noir  un  peu  mol  ; les  parois  en  sont  parfaite- 
ment lisses  et  nettes  sans  aucune  coloration.  Ce  corps  strié  pré- 
sentait en  outre  quelque  chose  d’assez  remarquable  ; on  voyait 
sur  chacune  des  coupes  qu'on  y pratiquait,  un  grand  nombre  de 
trous  bien  arrondis,  quelquefois  un  peu  allongés  dans  un  sens, 
à circonférence  bien  nette,  sans  aucune  coloration,  ayant,  les 
plus  grands,  plus  d’un  millimètre  de  diamètre.  Ces  trous,  qui  pa- 
raissaient d’abord  indiquer  l’existence  de  lacunes  nombreuses 
dans  le  corps  strié,  on  reconnut  avec  assez  de  difliculté  que  ce 
n’etait  autre  chose  que  les  orifices  de  canaux  vasculaires  très- 
dilatés,  par  suite  sans  doute  de  la  dilatation  des  vaisseaux  re- 
venus sur  eux-mêmes  dans  l’état  de  vacuité.  Le  corps  strié  de 
l’autre  côté  n’olfrait  presque  rien  de  semblable.  On  découvrit 
encore  dans  la  substance  médullaire  des  deux  hémisphères  un 
certain  nombre  de  criblures  semblables,  mais  plus  petites  et 
plus  rares,  et  tenant  également  à la  dilatation  dos  vaisseaux. 

Rien  à noter  dans  l’hémisphère  droit,  non  plus  que  dans  le 
cervelet  et  la  moelje  allongée  ; point  d’in  jection.  Quelques 
cuillerées  de  sérosité  limpide  dans  les  ventricules. 

Observation  2.  — Affaiblissement  de  l’intelligence  et  des  mouve- 
ments; faiblesse  plus  prononcée  du  bras  gauche.  Mort  le  deuxième 
jour.  — Congestion  sanguine  des  deux  bémispbères  du  cerveau.  Très- 
léger  ramollissement  de  la  substance  médullaire  du  lobe  antérieur 
droit. 

Une  femme  âgée  de  72  ans,  d’un  embonpoint  très-considé- 
rable, se  plaignait  souvent  de  la  tête  depuis  un  mois.  Elle  vint, 
vers  le  dO  novembre  1839,  passer  quelques  jours  à l’infirmerie, 
accusant  des  douleurs  vagues  dans  les  membres,  surtout  dans 
les  reins  et  dans  la  tête.  On  constata  qu’il  n’y  avait  du  re.sle 
aucun  symptôme  cérébral;  les  mouvements  paraissaient  bien 
libres,  et  l’intelligence  était  en  très-bon  état. 

Le  26  novembre,  cette  femme  revint  à l’infirmerie.  Je  ne  la 


n AMOU.ISSÏMKNT  AIGU.  (aNAT.  I*ATM.) 

vis  pas  moi-méme  le  ieudeinain  luaiin.  Elle  étaii  plongée  dans 
un  assez  grand  affaissement,  parlant  avec  difficulté,  le  bras 
gauche  manifestement  affaibli.  On  appliqua  trente  sangsues  au 
col. 

Voici  dans  quel  état  je  la  trouvai  à dix  heures  du  soir  : 

Elle  était  encore  plus  affaissée  que  ce  matin,  couchée  .sur  le 
dos,  demeurant  à peu  près  immobile,  les  jambes  un  peu  rele- 
vées ; la  tête  seulement  se  remuait  assez  vivement.  De  temps 
en  temps  elle  éloignait  ses  couvertures  et  restait  découverte, 
presque  nue.  Elle  était  pâle,  l’air  hébété.  Les  pupilles  étroites 
dans  l’obscurité,  se  rétrécissaient  encore  à l’approche  d’une  lu- 
mière. La  bouche  était  très-légèrement  relevée  à droite;  l’aile 
du  nez  non  déviée.  Elle  éprouvait  delà  difficulté  à s’exprimer, 
et  demandait  qu’on  la  fît  parler  plus  aisément;  cependant, 
quand  elle  se  fut  un  peu  animée,  elle  parvint  à prononcer 
quelques  phrases  assez  nettement.  L’intelligence  ne  semblait 
■qu’engourdie  : elle  comprenait  lentement,  mais  finissait  par 
répondre. 

Les  mouvements  des  bras  étaient  lents  et  pénibles  ; elle  par- 
venait, bien  qu’avec  peine,  à les  porter  à la  tête;  après  bien  desi 
essais,  elle  finit  par  serrer  la  main  avec  une  certaine  force  ; l’in- ■ 
certitude  et  l’affaiblissement  étaient  toujours  plus  prononcés  aui 
membre  supérieur  gauche.  Les  membres  inférieursavaientmieux. 
conservé  leurs  mouvements;  la  sensibilité  était  intacte  partout.. 

La  langue,  bien  mobile,  était  couverte  d’un  enduit  très-sec: 
et  noirâtre.  Chaleur  modérée  à -la  peau,  sans  sueur.  Pouls  dé-* 
veloppé,  très-intermittent,  à 94  ; 33  respirations  assez  paisibles.. 

Celte  femme  mourut  à la  fin  de  la  nuit. 

Autopsie.  Epaisseur  considérable  des  os  du  crâne.  La  dure— 
> mère  se  déchire  et  demeure  adhérente  à la  voûte  crânienne. 
Le  feuillet  arachnoïdien  est  très-opaque  et  épaissi  ; il  est  éloignée 
du  cerveau  par  une  grande  quantité  de  sérosité  claire  et  inco- 
lore, infiltrée  entre  les  mailles  de  la  pie-mère.  Les  circonvolu- 
tions sont  peu  écartées  les  unes  des  autres.  On  trouve  à la  base 
du  crâne  une  grande  quantité  de  sérosité'  limpide,  mêlee  de 
sang  sorti  des  vaisseaux. 

La  pie-mère  offre  une  injection  assez  considérable  portantl 
également  sur  les  grands  et  sur  les  petits  vaisseaux,  et  vers  la^ 
paftie  postérieure  de  l’hémisphère  gauche,  un  peu  de  suffusioaa 


On'THVVTlOKS. 


ÎT 


Baaguine.  Elle  n'adhère  en  aucun  point  à la  surface  du  cerveau. 

La  superheie  du  cerveau  ne  présente  à noter  qu  un  ratatme- 
ment  général  des  circonvolutions,  surtout  prononce  sur  les  par- 
des  meyenne  e>  externe  des  hémisphères.  Elles  ne  sont  plus 
lisses  et  arrondies,  inaisun  peu  inégales  et  rugueuses  au  toucher, 
•très-pâles  ratrophie  sénile).  La  couche  cort.ca  e des  circonvo- 
lutions a,  dans  son  épaisseur,  sa  couleur  na^relle. 

La  substance  médullaire  présente  une  injection  tres-vive, 
grand  nombre  de  pedts  points  rouges  et  violacés  dont  on  n 
peut  guère  faire  sortir  de  sang  liquide-,  les  vaisseaux  sont  gé- 
néralement dilatés,  on  en  distingue  quelques-uns  vides  de  sang 
(état  criblé.)  Celte  injection  occupe  à peu  près  egalement  es 
différents  points  delà  substance  médullaire  et  des  deux  cotes. 
Vers  le  milieu  du  lobe  antérieur  droit,  on  trouve,  dans  un  es- 
pace grand  comme  une  amande  dépouillée  de  son  enveloppe, 
la  substance  médullaire  rarédée;,  molle,  comme  eraïUeeÿ  ce 
point  ramolli  offre  un  très-léger  redel  rougeâtre:  il  n y a 
pas  plus  d’injection  à l’entour  qu  ailleurs. 

Les  corps  striés  et  les  couches  optiques  ne  présentent  pas  e 
même  degré  de  congestion  sanguine  que  la  substance  medu  - 
laire.  On  y trouve  plusieurs  petites  lacunes  pisiformes  , dans 
une  ou  deux  desquelles  se  distingue  une  membrane  fine.  Point 
d’altération  de  couleur  à l’entour.  Les  ventricules  latéraux  sont 
dilatés,  surtout  dans  leur  partie  postérieure;  des  vaisseaux  vo- 
lumineux et  pleins  de  sang  se  dessinent  sur  leur  membrane  in- 
terne. Le  cervelet  est  vivement  injecté.  La  consistance  de  la 
pulpe  nerveuse  est  normale,  et  sans  aucune  augmentation. 

Les  poumons  sont  engoués  d’une  assez  grande  quantité  de 
sang  qui  colore  tout  leur  parenchyme  en  rouge.  Le  cœur  est  vo- 
lumineux, ses  cavités  larges  et  pleines  de  sang  liquide  : état 
normal  de  ses  parois  et  de  ses  orifices.  La  vésicule  biliaire  cachée 
sous  de  nombreuses  adhérences  celluleuses,  est  réduite  au  vo- 
lume  d’une  noisette  ; ses  parois  ont  leur  texture  normale.  Sa 
cavité  presque  vide  est  cependant  perméable  à la  hile  ; les  ca- 
naux biliaires  sont  dilatés. 


Ces  deux  observations  sont  fort  curieuses,  puisqu’elles  nous 
permettent  de  surprendre  en  quelque  sorte  le  ramolbssemeiit 
cérébral  au  moment  même  où  il  se  forme , nu  sein  d’un  tissu 


28 


ramollissement  aigc.  (anat.  patu.) 

injecté.  Ce  ne  sont,  à proprement  parler,  que  des  cas  de  con- 
gestion cérébrale  ; car  des  ramollissements  aussi  légers  ne  sau- 
raient prendre  encore  aucune  part  à la  production  des  symp- 
tômes, ni  à l’issue  des  maladies  ; mais  ces  faits  nous  font  voir, 
a n’en  pas  douter,  comment  les  choses  avaient  dû  se  passer  dans 
les  cas  m'i  la  date  plus  avancée  de  l’altération  la  montre  sous  un 
aspect  différent. 

Observation.  3.' — Maladie  organique  du  cœur.  Inflammation  dm 
tissu  cellulaire  du  bras  , à la  suite  d’une  saignée.  Délire  pendant  lest 
derniers  jours  delà  vie.  — Injection  vive  et  ramollissement  léger  du  i 
lobe  antérieur  gauche. 

Le  nommé  Jean  Bouchard,  âgé  de  G5  ans,  maçon,  présentant 
encore  les  indices  d’une  forte  constitution  , entra  le  1 1 juillet 
l83o  .à  l’infirmerie  de  Bicêtre  , avec  tous  les  signes  d’une  lésion 
organique  du  cœur,  dont  voici  les  principaux  traits.  Respiration 
pénible  et  fréquente,  œdème  général  peu  considérable;  la  ma- 
tité du  cœur  est  assez  étendue,  son  impulsion  un  peu  forte; 
sous  le  sternum,  à l’épigastre  et  à droite  du  mamelon , un  bruit 
de  souffle  fort  accompagne  le  premier  bruit  ; le  second  bruit 
s’entend  à peine  ; plus  haut,  c’est-à-dire  au-dessus  de  la  cin- 
quième côte  et  plus  <à  gauche,  les  deux  bruits  s’entendent  à peu 
près  également  bien , nets  et  sans  aucun  souffle.  Le  pouls  est 
petit,  peu  fréquent,  le  visage  bouffi,  livide.  Les  pours  suivants 
il  y eut  de  fréquentes  hémoptysies,  l’orthopnée  alla  toujours  en 
augmentant.  (Potion  éthérée  avec  teinture  de  digitale.)  Cette 
dernière  est  bientôt  suspendue,  parce  que  le  malade  présente  un 
peu  de  disposition  au  délire. 

Le  29  j U illet  on  pratique  une  saignée  de  d eux  palettes.  Pendant 
le  jour  Bouchard  est  agité,  inquiet,  la  nuit  il  délire,  parlehaut. 
Deux  jours  après,  le  bras  saigné  est  gonflé,  douloureux,  parcouru 
par  des  ligues  rouges  et  tendues  ; l’oppression  devient  plus  vive, 
le  délire  est  continuel;  il  succombe  dans  la  nuit  du  2 au  3 août. 

Autopsie.  — La  pie-mère  est  infiltrée  de  sérosité.  A 
l’extrémité  antérieure  de  l’hémisphère  gauche,  le  cerveau 
présente  une  coloration  rose  foncée,  dans  une  étendue  de  quatre 
à cinq  centimètres  carrés.  Celte  coloration  occupe  la  substance 
médullaire  : dans  quelques  points  elle  empiète  un  peu  sur  la 
.substance  corticale,  et  dans  deux  endroits  .s’étend  à la  surface  du 


OBSEHV  AXIONS. 


!29 


cerveau.  Voici  ce  que  présente  une  coupe  perpendiculaire  du 
siège  de  cette  coloration.  On  voit  un  certain  nombre  de  taches 
jj’mj  rouge  vif,  à peu  près  arrondies  j depuis  le  diametie  d une 
grosse  tête  d’épingle  jusqu’à  un  point  imperceptible,  entourées 
d’une  auréole  d’un  rose  tendre  qui»  dans  plusieuis  points , s é— 
tend  assez  loin  dans  la  substance  médullaire.  Quelques  taches 
rouges,  des  plus  larges , se  détachent  nettement,  sans  être  en- 
tourées d’aucune  coloration.  La  substance  ceiebrale  est  légère- 
ment ramollie  dans  toute  cette  étendue. 

En  examinant  à la  loupe  , on  reconnaît  que  ces  taches  rouges 
sont  formées  par  un  peu  de  sang  coagulé,  aplati  enferme  de 
disque , et  qu’à  chacune  vient  aboutir  un  petit  vaisseau  injecté , 
qui  semble  l’avoir  produite  par  sa  rupture.  Dans  leurs  inter- 
valles se  distinguent  également  un  grand  nombre  de  petits  vais- 
seaux rouges,  invisibles  a l ceil  nu.  La  teinte  rose  unifoime  ne 
présente  rien  de  particulier  a la  loupe. 

Le  cerveau  généralement  un  peu  mou  (la  température  est 
très-élevée  ) ne  présente  pas  autre  chose  à noter. 

Le  cœur  est  très-volumineux  , ses  cavités  dilatées, sans  hyper- 
trophie des  parois.  L’orifice  auriculo-ventiiculaire  gauche  est 
considérablement  rétréci , pouvant  à peine  laisser  passer  le  petit 
doigt,  allongé  transversalement.  Tout  le  bord  libre  de  la  val- 
vule offre  un  épaississement  de  un  à deux  centimètres  , dû  à la 
déposition  d’un  tissu  fibreux  sur  sa  face  inférieure,  et  dans  l’inter- 
valle des  tendonsqui  s’y  attachent,  de  sorte  qu’ayant  perdu  toute 
mobilité,  elle  ne  peut  ni  se  fermer  ni  s’ouvrir  un  peu  largement. 

Sérosité  épanchée  dans  les  plèvres  et  le  péritoine.  Les  pou- 
mons ne  sont  que  légèrement  engoués  , si  ce  n’est  le  droit  qui 
présente  à sa  base  un  noyau  apoplectique. 

Rien  à noter  dans  l’abdomen  Le  tissu  cellulaire  sous-cutané  du 
bras  droit  est  gonflé,  friable  et  grisâtre.  Les  veines  sont  saines. 

Cette  observation  sert  en  quelque  sorte  de  transition  entre 
les  premières  où  le  ramollissement,  à sou  début,  existait  encore 
à peine,  et  les  suivantes  qui  nous  le  montreront  dans  tout  son 
développement. 

Orservatkja  4.  — Rainollissemeut  d’un  des  hémisphères.  Vive  in 
jection del'anti c.  Mouvements  couv-ulsifs.  Étal  coinalcusledernierjoui . 


•jÜ  HAMOIiLlSSEMEax  AUiU.  ( AKAT.  PATH.) 

Une  femme  de  vingt-sept  ans  présentait  depuis  une  quinzaine; 
de  jours  des  signes  de  congestion  cérébrale,  céphalalgie  fron-- 
tale,  étourdissements,  rougeur  de  la  face , engourdissement  de: s 
membres,  insomnie  (saignée,  trente  sangsues  à l’anus  , sann 
aucun  soulagement),  lorsqu’elle  fut  prise  tout  à coup  de  con-- 
vulsions  violentes  dans  le  membre  thoracique  gauche  ; ces  con 
vulsions  se  répétèrent  sept  ou  huit  fois  le  premier  jour,  puis  he 
lendemain  gagnèrent  la  face  et  enfin  les  quatre  membres.  D’a 
bord  le  mouvement  dans  leurs  intervalles,  et  l’intelligence  et  Ite 
sentiment  se  conservèrent  intacts  ; mais  bientôt  une  profonde.' 
stupeur  survint , les  convulsions  cessèrent  et  la  malade  ne  tardai 
pas  à succomber  dans  le  coma , comme  asphyxiée. 

Juiopsie.  — Une  sérosité  légèrement  trouble  infiltre  la  pie- 
mère.  Les  circonvolutions  sont  saines.  A deux  pouces  envirom 
au-dessous  du  fond  des  anfractuosités,  entre  l’extrémité  anté- 
rieure de  l’hémisphère  droit  et  le  corps  strié,  non  loin  de  lai 
scissure  interlobaire,  la  pulpe  cérébrale  est  notablement  ramol- 
lie. Là  où  elle  a perdu  sa  consistance,  elle  est  en  même  temps> 
d’un  rouge  assez  foncé;  ce  ramollissement  peut  occuper  environ; 
un  pouce  cube.  Autour  de  lui,  la  substance  cérébrale  estt 
assez  vivement  injectée.  Dans  le  lobe  antérieur  de  l’hémi- 
sphère gauche,  à peu  près  au  même  endroit,  on  observe  unee 
injection  tellement  forte  du  cerveau,  que  sa  substance  paraîh 
ecchymosée  ; dans  ce  point  si  fortement  hyperémie,  elle  a d’aill- 
leurs  conservé  sa  consistance.  Le  reste  de  l’encéphale  est  assez: 
vivement  injecté. 

On  ne  trouve  rien  de  remarquable  dans  les  autres  organes  (1). 

« Notez,  dit  l’auteur  de  cette  observation  , que  le  ramollis- 
sement a ici  une  couleur  rouge  très-prononcée,  et  qn’autour  de; 
lui  existe  une  vive  injection  de  la  pulpe  nerveuse.  On  est  donc, 
porté  à admettre  que  cette  rougeur  et  cette  injection  ont  pré- 
cédé le  ramollissement  ; si  la  vie  se  fût  prolongée  , il  est  infini- 
ment vraisemblable  qu’on  eût  trouvé  aussi  privée  de  sa  consistance 
la  portion  ecchymosée  de  l’hémisphère  gauche.  » Il  est  impos- 
sible de  préciser  avec  plus  d’exactitude  le  mode  de  formation 
du  ramollissement  : seulement  il  importe  de  généraliser  ce  que' 
M . Andral  applique  ici  à un  cas  particulier. 

(t)ÂHdr  al,  Clinique  mc’dicalc , r.  v,  p.  427. 


OBSEKVATÏOJSS. 


31 


n.»,vAi.o»  5.  - Paralysie  iu  bras  gauche;  perle  incomplète  de 
la  naroTe  roc.  au  bout  de  du,  jours.  Aii.érieiiremen,  a, laques  epl- 
éo,  O mes  - Pamollisseiuent  étendu  de  l'hénuspliere  droit , surtout 
derircontlutious;  rougeur  et  infiltra, ion  sanguine  de  la  subsunce 
corticale, injection  delà  médullaire. 

La  nommée  Rateau,  âgée  de  quatre-vingt-six  ans , fut  ap- 

uortée  àl'inamierie  le  18  août  1840.  On  nous  apprit  que  cette 
femme  forte,  etbien constituée,  pai  aissaitavoir  conserve  touleson 
intelligence  ; on  ii’avait  jamais  rien  remarque  du  cote  des  mouve  - 
ntnis  ou  de  la  parole , si  ce  n'est  que  de  temps  en  temps  tous 
les  deux  mois  ou  toutes  les  six  semaines,  elle  éprouvait  des  at- 
taques épileptiformes;  elle  reslait  sans  connaissance  pendant 
une  demi-heure  ou  davantage , s'agitait  convulsivement , n ccu- 
malt  pas...  hc  18  août,  à 5 heures  du  matin,  elle  se  leia  dans 
son  dLloir,  puis  ne  put  remonter  sur  son  lit , il  fallut  aider. 

Elle  demeura  toute  la  journée  très  allaissce , parlant  a peine. 

Elle  ne  fut  portée  à l’infirmerie  que  le  soir. 

Vue  à 7 heures  par  l’interne  du  service  , elle  paraissait  avoir 
toute  sa  connaissance,  s’exprimait  difficilement  mais  pouvait 
se  faire  comprendre.  Elle  se  plaignait  de  mal  de  tête,  et  indi- 
quait surtout  le  côté  droit.  Son  bras  gauche  demeurait  flasque 
et  étendu  près  d’elle  ; soulevé,  il  retombait  rapidement-  pince, 
il  restait  immobile;  mais  tout  à coup,  au  moment  où  on  s y 
attendait  le  moins,  elle  le  leva  d’elle-même  au-dessus  de  sa  tete, 
et  répéta  deux  ou  trois  fois  ce  mouvement.  Une  large  saignee 
fut  pratiquée. 

Le  lendemain  malin  je  la  trouvai  couchée  sur  le  dos,  la  tete 
un  peu  tournée  à droite  , l’air  hébété  , la  face  assez  rouge , la 
bouche  légèrement  déviée  à droite.  Les  yeux  sont  égaux  , 
ouverts  , les  pupilles  assez  étroites  et  mobiles.  Elle  ne  parle  pas, 
mais  elle  murmure  quelques  s3dlabes  inintelligibles.  Elle  lire 
la  langue,  droite  et  sèche,  lorsqu’on  le  lui  demande. 

Le  bras  gauche  est  flasque  et  complètement  paralysé.  Lors- 
qu'on enfonce  une  épingle  profondément  dans  l’avant-bras  , il 
demeure  immobile,  et  elle  ne  donne  aucun  signe  de  sensibilité  ; 
mais  lorsqu’on  le  fait  à la  paume  de  la  main  , celle-ci  se  re- 
tire légèrement  et  elle  témoigne  mi  peu  de  douleur.  Il  n’y 
a rien  à noter  dans  la  jambe  gauche  ni  dans  les  membres 


32 


KAaiüLLISSUMKM’  aigu,  (4WAX.  1-AXH.) 

du  côte  droit.  Le  pouls  est  assez  développé , de  fréquence  nor- 
nale;  les  La.ten.cnis  du  cœur  assez  LL  Un  pL  de  êh 
eu,  a la  peau.  ( Trente  sangeues  an  col,  lacement  purgatif .) 

-20  ^'>""'=>‘“‘l^°"<‘aa,.ne„,,  pas  de  selul  ' 

rn;è  an  absoluineiule  inèuie.  (Gomme- 

eu-, e 30  ce, U.  Çlane  un  julep  ) Selles  abondantes,  involontaires. 

21  _ Afta,bl,s»eu,ent  plus  profond,  grande  pâleur,  bouche 
tout  à fait  dessecl.ee  ; pouls  petit,  filiforme.  Même  état  des 
inenibies.  ( Vésicatoire  à la  nuque,  ] 

Mort  dans  la  mut  suivante. 

yiutopsie  trente  heures  après  la  mort.  - Beaucoup  de  sang 
iqui  e dans  les  sinus  de  la  dure-rnère.  La  cavité  de  rarachnoïde 
contient  un  peu  de  sérosité  du  côté  droit , aucunement  à gauche 

injectée;  épaississement  des  parois  des 

Les  circonvolutions  de  l’hémisphère  droit  sont  aplaties  • 
celles  du  lobe  moyen  sont  considérablement  tuméhées,  quelques- 
unes  ont  manifestement  plus  du  double  de  celles  du  côte^  op- 
pose; on  remarque  à leur  surface  quelques  taches  d’un  rouge 
violet  fonce  ; deux  situées  au  sommet  d’une  circonvolution  ont 
le  diamett-e  d’une  pièce  de  dix  ou  de  vingt  sous;  une  autl^e 
beaucoup  plus  etendue  occupe  toute  une  anfractuosité;  elles 
sont  formées  d un  grand  nombre  de  petits  points  noirs  entourés 
d une  rougeur  vive.  Toutes  les  circonvolutions  du  lobe  moyen 
celles  de  la  partie  antérieure  du  lobe  postérieur  et  externe  du 
obe  anterieur  sont  ires-ramollies  Quelques-unes  ont  leur  cou- 
leui  habituelle,  d’autres  une  teinte  rose  uniforme;  toutes, 

leTvdnT'  ''  , présentent  une  cou- 

l’én  • corticale  dont  elle  occupe  toute 

paisseur.  Cette  rougeur  est  mêlée  de  petits  points  plus  foncés 

dans  \r  “e  voit  point  ces  derniers 

substance  médullaire.  Très-déliés,  ils  sont  tous  dirigés 
lansversalement  ou  obliquement  et  ne  peuvent  être  suivis  que 
dans  un  court  trajet.  Quelque  ramollies  que  soient  ces  circon- 
vo  utions,  elles  ont  cependant  toutes  conservé  leur  forme  ; mais 
la  pie-mere  entraîne  avec  elle  la  couche  superficielle  d’un  bon 
nombie  d entre  elles.  Un  courant  d’eau  les  pénètre  , les  soulève 
en  lambeau , les  éparpille. 

Au  dessous  de  toutes  ces  circonvolutions,  la  substance  mé- 


OBSERVAIIOSS. 


dullaire  est  ramollie  , presque  jusqu’au  ventricule.  Dans  beau- 
coup de  points  ce  ramollissement  n’est  appréciable  qu’au  tou 
cher,  et  ne  se  laisse  pas  pénétrer  par  un  courant  d’eau  ; dans 
d’autres,  c’est  une  pulpe  molle  et  déliquescente.  Dans  une 
partie  de  son  étendue , elle  n’olFre  ni  rougeur  ni  injection  ; ail- 
leurs une  couleur  rose  assez  foncée,  ou  bien  une  injection 
vive  , des  vaisseaux  longs  et  volumineux , un  pointillé  rouge. 

On  trouve  dans  la  couche  optique , dans  un  espace  grand 
comme  un  noyau  de  cerise,  un  pointillé  rouge , fin  et  très-serré. 
Ce  pointillé  qui  paraît  au  premier  abord  tenir  à une  injection 
vasculaire,  est  attribué  à une  petite  infdlratiou  sanguine,  à 
cause  de  sa  disposition  neiteinent  circonsciile , de  la  régularité 
de  ses  limites  qu’aucun  point  ne  dépasse.  Aucune  altération  de 
couleur  ni  de  consistance  autour  ou  dans  l’intervalle  des  points 
rouges. 

Dans  le  corps  strié  se  remarquent  plusieurs  petites  cavités  ir- 
régulières, tapissées  par  une  membrane  très-fine  , vasculaire  et 
cjui  se  laisse  aisément  détacher.  Couleur  et  consistance  normales 
autour  d’elles. 

L’autre  hémisphère  ne  présente  rien  à noter  ; il  est  d’une 
consistance  assez  ferme  , peu  injecté  ; peu  de  sérosité  dans  les 
ventricules. 

La  partie  postérieure  des  deux  poumons  est  fortement  en- 
gouée ; leurs  lobes  inférieurs  sont  infiltrés  de  sang.  On  v re- 
marque plusieurs  noyaux  noirs,  mais  sans  dureté;  bien  qu’ils 
contiennent  peu  d’air,  aucun  point  n’est  friable  et  ne  va  au  fond 
de  l’eau.  Cœur  peu  volumineux , sain , sang  liquide  dans  1rs  ca- 
vités droites. 


OBSEnvATioN  6.  — Hémiplégie  subite  ; coma  le  lendemain  , mort  le 
troisième  jour.  — llamollisseinent  aigu  avec  infiltiation  sanguine  de 
l’hémisphère  gauche. 


La  nommée  Marie  Doucet,  âgée  de  soixante-un  ans,  fut 
prise  toutà  coup,  pendant  la  nuit,  d’une  violente  céphalahde 
avec  hémipléi;iegauchc  complète  et  subite.  Le  lendemain,  coina,^ 
dehre  taciturne,  réponses  tardives  mais  assez  satisfaisantes,  cé- 
phalalg.c  orbitaire  très-intense  , urines  involontaires;  héini- 
plfgie  gaiiclic  ; par  lulervallcs  trisimis  cl  soubresauts  des  ten- 

.3 


hamoi.lissiîmknt  aigu.  (anat.  path.) 

dons,  mouveincms  involontaires  des  membres  du  côté  droit, 
sentimeiu  de  froid  général,  pouls  petit , irrégulier.  Le  jour  sui- 
vant, coma  profond.  Mort  le  troisième  jour. 

Aulopsie.  Arachnoïde  vouge,  ramollissement  pultacé  de 
presque  tout  l’hémisphère  gauche,  substance  corticale  violette, 
ecchymosée  par  intervalles,  plus  pâle  dans  d’autres  j vers  la 
par  tie  inferieure , la  substance  médullaire  du  cerveau  partici- 
pait à cet  état  et  contenait  des  ecchymoses  de  la  grosseur  d’une 
noisette.  Dans  l hémisphère  droit , vers  la  partie  antérieure  et 
moyenne,  on  tiouva  un  kyste  jaunâtre,  assez  volumineux  , en* 
touié  d une  substance  blanchâtre  moins  compacte  que  le  reste 
du  cerveau  (I \ 


Obseiivation  7.  — Hémiplégie  ciroile,  altération  remarquable  des  fa- 
cnilés  intellectuelles,  disparition  incomplète  de  ces  symptômes  au  bout 
de  deux  ans;  huit  ans  après,  retour  des  mêmes  accidents.  Mort  le 
luiitième  jour.  — Lésions  multiples  appartenant  au  ramollissement 
chronique,  dans  l’hémisphère  gauche;  ramollissement  aigu,  et  infdtra- 
tion  sanguine  des  circonvolutions. 

La  nommée  Reydleux,  âgée  de  soixante  ans  , est  entrée  le  8 
novembre  1838,  au  n®  1 de  la  salle  Saint-Antoine  (Salpétrière), 
afïectée  d’une  hémiplégie  incomplète  du  côté  droit.  Voici  quel- 
ques détails  sur  ses  antécédents. 

Celte  lemme  ( fabricante  de  couvertures)  paraissait  jouir 
d’une  bonne  santé,  se  plaignant  de  temps  en  temps  d’étourdis- 
sements et  de  céphalalgie,  lorsque,  au  mois  de  juillet  1830,  elle 
s’aperçut  un  jour,  en  se  levant  de  sa  chaise,  que  sa  jambe  droite 
était  devenue  tout  à coup  très  lourde,  comme  si  elle  traînait 
quelque  chose  de  pesant  après  elle.  Elle  put  aller,  avec  l’aide 
d’un  bras  , chez  un  pharmacien  du  voisinage  qui  lui  conseilla 
de  s’appliquer  des  sangsues.  Elle  n’en  fit  rien  ; le  lendemain 
matin  elle  tomba  sans  connaissance,  frappée  d'hémiplégie  droite. 
Une  saignée  fut  pratiquée,  et  elle  recouvra  promptement  les 
sens  et  la  parole.  Quelques  jours  après,  elle  fut  vivement 

(t  ) Roslan,  liechcrchcs  sur  le  ramoLlissemcnl  du  cerveau,  Obs.  xv.  2«  e'd. 
Il  y il  eu  .sans  doute  dans  celle  observation  une  erreur  de  re'dacliou  , car  le 
1 amol  li.ssemenl  ))ullacc  accoinpiignc' d’ecchyuio.ses  , est  indifiué  du  lucrne 
côté  que  l’Iiéniiple'gie , qu’il  a sans  aucun  doute  déierminc'e.  Si  le  fait  se  fût 
jMSse!  aiu.-.i,  il  ii’eùl  jias  niaïujué  d’atlirer  Pallenlioii  de  l'milciir. 


OUSERVATIOX 


ellVayée  par  mi  lasseinblement  d’ouvriers,  et  son  iiilelügeuce 
en  demeura  fort  altérée.  Pendant  les  deux  années  suivantes,  au 
rapport  de  sa  fille,  elle  fut  comme  en  enfance,  restant  des 
journées  entières  assise,  sans  exprimer  aucune  sensation,  aucun 
besoin  ; elle  parlait  peu , marchait  en  traînant  sa  jambe  droite , 
et  se  servait  à peine  de  son  bras  paralysé.  Au  bout  de  ce  temps, 
elle  commença  à reprendre  ses  facultés  : elle  montra  plus  d’ac- 
tivi.»i,  d’intelligence  ; ce  fut  à cette  époque  qu’elle  fut  admise  à 
la  Salpétrière. 

A son  entrée  à l’infirmerie,  au  mois  de  novembre  J 838,  elle 
put  nous  donner  elle-même,  avec  beaucoup  de  détails  et  une 
grande  précision,  une  partie  de  ces  renseignements  que  sa  fille 
nous  confirma  depuis. 

On  voit  à quel  point  elle  avait  recouvré  sa  mémoire  et  son 
intelligence.  Elle  nous  raconta  de  plus,  que  (juatic  jours  avant, 
elle  était  tombée  comme  une  masse  , et  que  sa  jambe  droite 
était  restée  beaucoup  plus  faible  qu’auparavant  ; elle  pouvait  à 
peine  la  remuer  et  soulever  les  orteils. 

Les  mouvements  du  bras  droit  étaient  faibles  et  incomplets; 
les  doigts  ne  pouvaient  se  fléchir  complètement  ; il  n’y  avait  du 
reste  aucune  raideur,  ni  aucune  douleur  dans  les  membres  pa- 
ralyses. La  parole  était  facile,  la  bouche  non  déviée.  La  sensi- 
bilité était  bien  conservée  du  côté  paralysé;  le  pouls  présen- 
tait de  la  force  et  de  la  fréquence;  la  malade  se  plaignait 
d’étourdissements.  (Saignée  du  bras,  sinapismes  aicx  pieds,  pur- 
patif  huileux.) 

Quelques  jours  après,  elle  se  plaignit  de  douleurs  vives  dans 
tous  les  membres  paralysés,  d'abord  dans  l’épaule,  puis  dans 
la  jambe  : il  ne  survint  pas  de  railleur,  cependant  le  mouve- 
ment lepaïut  dans  le  membre  inferieur  droit,  et  elle  put  mar- 
cher dans  la  salle  , appuyée  sur  un  bras  on  se  tenant  aprèsl  es 
lits 

Le  8 decembic,  en  la  menant  faire  sa  courte  promenade  , 
onia  trouva  plus  faible  et.plus  lourde  qu’A  l’ordinaire. 

Le  9 au  matin,  elle  ne  pouvait  aucunement  sc  tenir  sur  ses 
jambes  ; celles-ci  fléchissaient  aussitôt  sous  elle  sans  la  moindre 
1 esistance  ; alors  elle  se  mettait  a pleurer  , et  se  plaignait  de 
ressentir  des  étourdissemenis.  Elle  parlait  encore  avec  assez  de 
iieltete.  Je  la  fis  aussitôt  coucher  , avec  des  siiia])ismes  aux  jaiu- 


llAMOLUSSIiMJiûx  AIGU  (anAX.  PAXII.) 

bes.  Dans  la  matinée  on  la  vit  plusieurs  fois  pleurer  et  rire  sans 
laison.  Dans  1 après-midi,  on  put  à peine  en  obtenir  une  parole: 
elle  pleurait  au  heu  de  répondre,  et  refusa  obstinément  de  boire, 
it-lle  urina  sous  elle  pour  la  première  fois. 

Le  10  , la  physionomie  présente  une  impassibilité  extraordi- 
naire; les  questions  les  plus  pressantes  ne  paraissent  l’impres- 
sionner en  rien  ; seulement  son  regard  hébété  prend  de  temps 
en  temps  1 expression  du  rire  et  du  pleurer.  Cependant  elle 
présente  la  main  gauche  lorsqu’on  la  lui  demande.  Le  bras 
droit  se  soulève  avec  peine,  les  doigts  sont  tremblants  et  à peine 
mobiles;  la  jambe  droite  demeure  complètement  immobile, 
mémo  lorsqu’on  la  pince  , bien  que  les  contractions  de  la  face 
et  les  mouvements  des  membres  gauches  témoignent  que  la 
sensibilité  n’est  pas  abolie.  La  face  est  très  rouge  , la  peau 
chaude  et  moite , le  pouls  fréquent  et  développé  {Saignée  du 
bras,  potion  avec  gomme-gutte  , 6 décigrammes  ).  On  obtient  peu 

de  sang  par  la  saignée.  ( 30  sangsues  aux  malléoles.  Vésicatoires 
aux  cuisses.  ) 


e 11  , elle  est  toujours  dans  le  même  état  de  silencieuse 
impassibilité.  Elle  relire  un  peu  sa  jambe  droite  quand  on  cha- 
touille la  plante  du  pied  ; lorsqu’on  la  pince  la  face  s’anime  un 
instant.  Sa  fille  est  venue  la  voir  : elle  a un  peu  pleuré,  mais 
sans  paraître  autrement  la  reconnaître.  Du  reste  , elle  semble 
toujours  entendre  ; le  pouls,  de  fréquence  médiocre,  offre  assez 
de  résistance.  Selles  involontaires  assez  abondantes.  Les  sang- 
sues ont  bien  donne.  {Saignée  de  deux  palettes.) 

Le  12  , même  état.  Les  yeux  sont  presque  toujours  ouverts  , 
un  peu  mobiles  ; les  pupilles  sont  normales.  Malgré  l’immobi- 
ité  presque  absolue  qu’elle  garde  constannnent , il  n’y  a pas 
d assoupissement , à peine  un  peu  de  sommeil  la  nuit.  Quand 
on  s’approche  d’elle,  on  voit  scs  traits  se  contracter  légèrement, 
tandis  qu’on  la  saignait  elle  tournait  le  lancetier  entre  ses  doigts; 
elle  ramène  sur  elle  ses  couvertures  lorsqu’on  la  découvre. 
Pouls  un  peu  fréquent  , peu  développé  , régulier;  pas  de  sel- 
es.  Sang  assez  séreux,  sans  couenne.  {Gomme-gutte,  6 dé- 
cigrammes. ) 

Le  13  , aucun  changement,  ]jas  de  selles;  elle  n’a  avalé  que 
ia  moitié  du  sa  potion  {Sangsues  au  cou). 

Lu  1 1,  elle  a cionnu  quehiuu-  signes  de  connaissance.  Hier, 


OllSEKVATlOKS. 


elle  a paru  voir  ses  enfants  avec  plais  r;  mais  elle  garde 
toujours  un  silence  aussi,  absolu  : la  constipation  persiste, 
( Gomme-gutte,  6 décigrammes .) 

16.  Depuis  hier  elle  est  plus  profondément  affaissée  , et  ne 
donne  plus  aucun  signe  de  connaissance  ni  d’attention.  Ce 
matin  à neuf  heures,  elle  tombe  tout  à coup  dans  un  corna  pro- 
fond , avec  résolution  de  tous  les  membres  , respiration  fré- 
quente , un  peu  ronflante , quelques  gémissements  : la  jambe 
gauche  se  retire  un  peu  quand  on  chatouille  la  plante  du  pied. 
On  peut  pincer  et  piquer  tous  les  autres  points  du  corps  sans 
qu’elle  donne  aucun  signe  de  sensibilité.  Mort  à trois 
heures. 

Autopsie  quarante-quatre  heures  après  la  mort  { forte  gelée). 
Os  du  crâne  fort  épais  , dure-mère  adhérente  ; sérosité  abon- 
dante infiltrée  dans  la  pie-mère  , circonvolutions  écartées  ; in- 
jection assez  notable  des  vaisseaux , épaississement  et  opacité 
des  artères  de  la  base. 

Les  méninges  se  détachent  assez  facilement  ; mais  à la  partie 
interne  de  la  convexité  du  lobe  moyen  de  l’hémisphère  gau- 
che , près  de  la  grande  scissure  , la  pie-mère  entraîne  avec  elle 
des  lambeaux  considérables  de  substance  cérébrale  mollasse  et 
rougeâtre  ; le  bord  interne  de  cet  hémisphère  , dans  la  grande 
scissure,  paraît  au  travers  des  membranes  comme  marbré  de 
rouge.  Celles-ci  enlevées  avec  soin  , on  voit  que  toute  sa  partie 
interne  est  très  molle  , marbrée  de  points  et  de  stries  rouges  ; 
quelques  anfractuosités  présentent  une  coloration  d’un  rouge 
vif , due  à une  combinaison  du  sang  avec  la  substance  céré- 
brale, qui  lui  donne  l’apparence  de  fraises  écrasées.  Cette  co- 
loration s'étend  profondément  jusque  dans  la  substance  blan- 
che. Quant  au  ramollissement,  il  occupe  en  profondeur  pres- 
que la  moitié  interne  de  l’hémisphère  ; la  substance  médullaire 
ramollie  formait  un  détritus  blanc  ou  grisâtre  , plus  ou  moins 
injecté. 

A la  face  supérieure  du  lobe  postérieur , la  surface  corticale 
d’une  anfractuosité  et  des  circonvolutions  environnantes  était 
détruite  et  remplacée  par  une  membrane  jaunâtre  , mince  et 
vasculaire  ; au-dessous , la  substance  médullaire  était  à une  pe- 
tite profondeur  molle  et  grisâtre  ; cette  altération,  en  suivant  la 


I>*1,0I.USSEME»T  *ICU.  (an*T.  PAtH.) 

; la  baae  du  lohe  p„a- 

Dans  le  même  l.é.nispl,è.e,  la  membrane  renlriculaire  élail 

nuéen'à  ''  “"e  assez  grande  éleudue,  dissé- 

-im  e par  une  destrucuon  assez  profonde  de  la  substance  blan- 

e krss^ant  une  cavité  traversée  par  des  brides  celluleuses , et 
I emplie  d un  liquide  lait  de  chaux. 

Aliéiation  semblable,  mais  moins  étendue,  du  corps  strié, 
ans  ces  deux  points  , la  membrane  ventriculaire  , libre  sur 
ses  eux  faces,  était  jaunâtre  et  inégalement  éjiaissie.  Petites 
cavités  irrégulières  dans  le  corps  strié  droit.  Le  cervelet  et 
la  moelle  allongée  sont  intacts.  La  moelle  épinière  est  saine 
et  symedique  dans  ses  deux  moitiés. 


Cette  observation  intéressante  nous  fait  assister  successive- 
ment aux  suites  de  deux  altérations  , sans  doute  de  même  na- 
Uire.  mais  dont  l’une  a été  arrêtée  par  la  mort  en  peu  de  jours, 
tandis  que  1 autre  a pu  passer  à l’étal  chronique  , et  parcourir 
ses  diverses  périodes.  Les  lésions  anatomiques  qui  caractéri- 
saient cette  dernière  appartiennent  spécialement  à cette  période 
ultime  du  ramollissement.  Les  symptômes  paraissent  avoir  été 
les  memes  ^ns  les  deux  circonstances  : deux  fois  l’on  a ob- 
serve une  hémiplégie  droite,  accompagnée  d’une  altération  des 
facultés  intellectuelles  , curieuse,  insolite,  et  qui  semble  s’être 
montrée  à deux  reprises  sous  le  même  aspect.  On  a pu  remar- 
(]uer  que  les  lésions  anciennes  étaient  multiples  , comme  les  at- 
taques l’avaient  été  au  début  ; quant  à celle  dont  la  date  ré- 
cente permettait  d’apprécier  plus  facilement  la  nature,  le  sang 
infiltré,  1 injection  vasculaire,  le  ramollissement,  tout  annon- 
ça suffisamment  une  congestion  , accompagnée  d’infiltration 
sanguine  et  suivie  du  développement  d’une  inflammation. 
Blalgre  la  ressemblance  que  sous  ce  dernier  rapport , cette  ob- 
servation présente  avec  la  précédente,  la  marche  des  accidents 
a etc  bien  différente,  puisqu’ils  ont  apparu  graduellement  dans 
un  cas,  tandis  que  dans  l’antre  ils  se  sont  montrés  de  la  ma- 
nière la  plus  instantanée , 

Jbsciivaïio.s  8.  — Rnmollixscmeiit  aigu  avec  infiltration  .sanguine 
chez  11(1  joimc  enfaiil. 


OBSERVATIONS. 


39 


Un  enfant  de  trois  ans  fut  pris  tout  à coup  de  faible.sse  dans 
le  bras  gauche  et  de  douleurs  de  tête  ; il  voulut  se  lever  , et 
tomba  aussitôt  sur  le  côté  gauche.  Dès  lors  hémiplégie  com- 
plète , mais  du  mouvement  seulement,  dans  les  membres  gau- 
ches. ’he  premier  jour,  agitation,  cris  , pendant  lesquels  le  cote 
droit  de  la  face  se  contracte  seul  ^ grande  mobilité  de  la  langue 
et  des  paupières  , intégrité  de  la  vue  et  des  fonctions  intellec- 
tuelles , vomissements,  pas  de  fièvre;  fièvre  le  sixième  jour  , 
diarrhée  saignée  , sinapismes  ; plus  l&i  à émetique , 

noix  vomique).  Le  vingt-sixième  jour,  après  la  troisième  prise 
de  ce  médicament , mouvements  convulsifs  -,  dans  leurs  inter- 
valles , raideur  marquée , surtout  dans  les  membres  paralyses  . 
perte  absolue  de  connaissance.  Ces  accidents  ne  se  repioduisent 
plus  avant  les  derniers  jours  de  la  vie  ; mais  il  survient  une 
double  pneumonie  , des  symptômes  d’entérite.  Mort  le  trente- 
troisième  jour. 

yiutopsic  vingt-huit  heures  apres  la  mort.  Sinus  de  la  dure- 
mère  remplis , surtout  le  longitudinal  supérieur  , de  caillots  de 
sang  très  volumineux  et  d’une  matière  comme  fibrineuse,  grisâtre 
et  ramollie  à son  centre , qui  paraissait  réduite  en  putrilage  ; 
vaisseaux  delà  pie-mère  très  injectes,  surtout  à droite  ; espèce 
de  suffusion  sanguine  dans  plusieurs  points  de  la  surface  de  cet 
hémisphère , et  même  épanchement  de  plusieurs  caillots  de 
sang  près  du  sinus  longitudinal  supérieur  ; circonvolutions  des 
lobes  antérieur  et  moyen  de  cet  hémisphère  (droit),  afiaissées 
supérieurement , et  tellement  adhérentes  à l’arachnoïde,  qu’on 
ne  pouvait  enlever  cette  membrane  sans  arracher  en  même 
temps  la  substance  grise.  Dans  presque  toute  l’elendue  de  la 
surface  supérieure  du  lobe  moyen  , elle  offrait  un  épanchement 
ou  plutôt  une  infiltration  de  sang  en  caillot , intimement  mé- 
langé à la  substance  cérébrale  ; cette  infiltration,  qui  ne  s’éten- 
dait pas  à un  pouce  de  profondeur,  paraissait  avoir  eu  lieu 
d’abord  dans  plusieurs  points  isolés,  et  s’être  réunie  ensuite. 
Ces  circonvolutions,  ainsi  que  la  substance  cérébrale  voisine  , 
jusqu’au  ventricule  latéral,  étaient  extrêmement  molles,  comme 
diffluentes  et  putrilagineuses  ; chaque  incision  y faisait  aperce- 
voir une  multitude  de  petits  points  rouges,  résultant  de  la  di- 
vision des  vaisseaux  capillaires  sanguins  dilatés.  Le  lobe  anté- 
rieur de  riiémisphèrc  droit  contenait  une  autre  altération  re- 


'«  K'xm.ussEvia,!  xir.u.  ph„.) 

niisnhèn*  (î/i  t r '■  ponion  saine  de  chaque  hé- 

n pl.u  ela.t  loi-,  mjecée,  smuout  du  cô.é  droit,  et  vers  le, 

t icules  ; ceuxc,  ne  contenaient  que  peu  de  sérosité  la 

P»rç,  supérieure  du  droit  était  ramollie  ,1’arachnoïde  Xi  îa 

brablc  dè"''  i""”'» 

11  *^°**^*^  louges  , surtout  vers  le  septum  iucidum  et  le 

COI  ps  calleux  ; les  vaisseaux  des  plexus  choroïdes  étaient  gorgés 

< e sang;  nen  a la  base  du  crâne  ni  dans  le  cervelet (1) 

(Ubsermion  communiquée  par  M.  Thibert.) 


La  paralysie,  ajoute  M.  Lallemand,  commença  brus- 
quement et  sans  avoir  etc  précédée  d’aucun  symptôme  spas- 
modicpie  et  nous  trouvâmes  du  côlc  droit  du  cerveau  une  es- 
pece d infiltraiion  ou  d’épanchement  de  sang  dans  la  substance 
grise  des  circonvolutions,  une  suffusion  sanguine  de  la  pie- 
meie  qui  es  lecouvre , alte'rations  qui  ne  peuvent  avoir  été  pro- 
duites que  par  une  congestion  hémorrhagique  : celle-ci  s’est  re- 
nouvelée plusieurs  fois  , et  coup  sur  coup,  comme  le  prouve  la 
succession  des  phénomènes  paralytiques,  et  l’altération  offre  des 
traces  non  équivoques  de  plusieurs  efforts  hémorrhagiques. 

Les  memes  symptômes  prouvent  que  la  congestion  s'est  opé- 
lee  plus  rapidement  que  dans  les  inflammations,  et  cependant 
d une  manière  moins  brusque  et  moins  violente  que  dans  les 
iicmorrhagies  complètes  et  qui  constituent  les  apoplexies  ordi- 
naires : aussi  le  sang  était-il  autant  infiltré  qu’épanché  dans  la 
sub'-tauce  grise.  » 


L est  avec  intention  que  j’ai  rapproché  ces  deux  observations, 
gi  ressemblantes  sous  le  rapport  anatomique  , et  recueillies  ce- 
]iendant  chez  un  individu  âgé  et  chez  un  enfant  : je  saisirai 
tonies  les  occasions  de  faire  de  semblables  rapprochements, 
pour  montrer  que  le  ramollissement  cérébral , comme  la  mé- 
ningite, comme  la  pneumonie,  etc.,  est  une  même  maladie  dans 
les  diffci  ents  âges  de  la  vie,  chez  les  enfants,  les  adultes  et  les 
vieillaids,  en  un  mot  que  rien  n’autorise  à voir  dans  le  raniol- 


(t)  Lfiüemaïul,  Lettre  IH',  n»  <2, 


OBSERVATIONS. 


il  - 


lissement  des  vieillards  , une  affection  spécifique  , comme  on  l’a 
dit. 

Nous  avons  eu  beaucoup  de  peine  a montrev  le  i amollisse- 
ment aigu  limité  exactement  à la  substance  blanche  : il  est  fort 
rare  en  effet  de  rencontrer  cette  disposition  que  1 on  ne  trouvera 
presque  jamais  mentionnée  dans  les  observations  un  peu  détail- 
lées. Nous  allons  passer  à l’étude  du  lamollissement  dans  la 
substance  grise.  Nous  suivrons  le  même  ordre  que  dans  /les  ob- 
servations précédentes  : nous  présenterons  d abord  les  cas  ou 
le  ramollissement  vient  de  se  former  a peine  dans  la  substance 
grise  fortement  congestionnée,  puis  ceux  où  une  infiltration 
sanguine  considérable  s’unit  à la  congestion,  et  où  le  ramollisse- 
ment, plus  avancé,  se  prépare  à ces  désorganisations  de  tissu  qui 
le  caractérisent  à l’état  chronique. 


5 II.  Observations  pour  faire  connaître  le  ramollissement  aigu  dans  la  sub- 
stance corticale , avec  coloration  rose,  puis  avec  infiltration  sanguine. 

Observation  g.  — Entérite  chronique.  Coma  profond  , résolution 
générale,  sensibilité  obtuse,  mort  au  bout  de  vingt  heures  à peu  près. 
— Infiltration  sanguine  ])artielle , rougeur  et  léger  ramollissement  de 
presque  toute  la  périphérie  du  cerveau  et  des  parois  des  ventricules. 
Tuméfaction  de  quelques  circonvolutions;  adhérences  générales  de  la 
pie-mère. 

La  nommée  Farge  Domange,  âgée  de  soixante  dix-neuf  ans, 
était  couchée  depuis  deux  mois  dans  une  salle  de  gâteuses,  af- 
fectée d’une  entérite  chronique.  Elle  s’affaiblissait  beaucoup, 
mais  n’avait  jamais  présenté  aucun  symptôme  cérébral.  Le 
4 juin  1838,  on  la  trouva  le  matin  dans  l’état  suivant,  dans  le- 
qued  elle  était  tombée  on  ne  sait  à quelle  heure  de  la  nuit.  Coma 
profond  , respiration  fréquente  ( trente-six  inspirations  par 
minute),  légèrement  ronflante;  paupières  abaissées;  pupilles 
immobiles,  dilatées,  la  droite  plus  que  la  gauche;  point  de 
déviation  de  la  face  ; résolution  générale  avec  flaccidité  des 
membres;  sensibilité  obtuse,  grimaces  lorsqu’on  la  pinçait 
avec  force.  La  peau  était  assez  chaude,  le  pouls  à quatre-vingt- 
six,  plein  et  fort.  Domange  demeura  toute  la  journée  dans  le 
même  état;  le  soir,  à neuf  heures,  la  circulation  ne  se  faisait 
plus  sentir,  une  sueur  froide  et  abondante  couvrait  toute  la 
peau  ; elle  expira  bientôt  après  sons  mes  yeux. 


«amollissement  aigu.  (anat.  PATH.) 

Autopsie  trenle-six  heures  après  la  mort.  Infiltraiion  «élati- 
tornie  r>l  1 1 . . . 6'^iau 


mfonue  et  .nject.on  .nédiocre  de  la  pie-mère,  adhérences  1 
nerales  de  cette  membrane,  mais  faciles  à détacher.  Les  circon- 
volatmns  des  deux  hémisphères  présentent  la  plupart  une  co- 
loration d un  rose  vif,  ou  d’un  jaune  peu  foncé,  avec  une  foule 
de  nuances  miermédiaires;  sur  quelques-unes,  et  surtout  au 
fond  des  anfractuosités,  on  remarque  des  plaques  formées  d’un 
pointillé  d un  rouge  vif  ou  noirâtre  (infiltration  sanguine)  ova- 
laires ou  irrégulièrement  arrondies.  Presque  toute’ la  surface 
e u cerveau  est  d’une  mollesse  remarquable,  mais  sans  dif- 
lluence.  Quelques  circonvolutions  colorées  en  rose,  sont  très- 
volumineuses  et  évidemment  tuméfiées.  Ces  diverses  altérations 
plus  prononcées  à droite  qu’à  gauche,  occupent  surtout  la  partie 
moyenne  de  la  convexité  de  chaque  hémisphère,  mais  descen- 
dent un  peu  vers  la  base.  Les  parois  des  ventricules  latéraux 
sont  très-molles  à leur  superficie,  avec  une  légère  coloration 
jaunâtre  des  corps  striés  et  des  couches  optiques.  La  coloration 
rosée  des  circonvolutions  n’occupe  que  leur  couche  corticale.  La 
substance  médullaire  présente  peu  d’injection,  mais  un  peu  plus 
e mollesse  qu’à  l’ordinaire.  La  moelle  allongée  et  le  cervelet 
n’offrent  rien  à noter.  Inflammation  très-vive  de  tout  le  canal 
intestinal. 


y ___ 

Obsekvation  JO.  — Cé|)halalgie,  étourdissements  ; plus  tard  , gêne 
de  la  parole,  puis  tout  à coup  coma,  paralysie  du  mouvement  des 
membres  droits;  abolition  presque  complète  des  fonctions  sensoriales 
du  même  côté  ; intelligence  à peu  près  intacte;  mort  le  troisième  jour. 

Rougeur,  gonflement  et  tendance  au  ramollissement  des  circonvo- 
lutions en  haut  et  à gauche  ; ramollissement  du  corps  strié  gauche  ; 
injection  par  places  de  la  substance  blanche. 


La  nommée  Fort,  âgée  de  soixante-douze  ans,  éprouve  habi- 
tuellement, depuis  deux  ans,  de  la  céphalalgie  et  des  étourdis- 
sements ; elle  a ressenti  pour  la  première  fois,  il  y a trois  mois, 
une  grande  difficulté  à s’exprimer,  qui  s’est  dissipée  sans  trai- 
tement, au  bout  d’une  quinzaine  de  jours.  Elle  se  portait  par- 
faitement bien,  lorsque  le  9 octobre  1838,  étant  au  lit,  on  s’a- 
perçut tout  à coup  qu’elle  était  paralysée,  et  on  la  transporta  à 
1 infirmerie,  où  elle  présenta  l’état  suivant  : 

Femme  grasse,  bien  constituée,  plongée  dans  un  coma  pro- 


OBSERVATIONS. 


43 


fond  ; la  joue  droite  se  laisse  distendre  à chaque  expiration  ; la 
bouche  n’est  pas  déviée-,  la  langue  est  un  peu  tournée  à droite. 

Le  bras  droit  est  résolu  sans  raideur  ; cependant,  quand  on  la  ' 
pince,  il  exécute  quelques  niouveinenls  ; la  jambe  de  ce  côté 
est  aussi  fort  peu  mobile.  Le  côté  droit  de  la  face  est  beaucoup 
moins  sensible  que  le  côté  gauche;  il  est  de  même  de  la  con- 
jonctive et  de  la  pituitaire  droites.  La  malade  ne  voit  un  peu 
que  de  l’œil  gauche  (elle  a été  opérée  de  la  cataracte  à droite). 

Le  pouls  est  fort  inégal , irrégulier,  à quatre-vingt  p.,  seize  in- 
spirations inégales  et  irrégulières;  peau  naturelle,  pas  de  rougeur 
de  la  face,  pas  de  vomissements.  La  malade  entend,  mais  n’obéit 
que  lentement  aux  ordres  qu’on  lui  donne.  {Limon. , vingt  sang- 
sues derrière  les  oreilles,  lav.  avec  trois  gouttes  d’huile  de  croton.) 

10  octobre.  Pendant  la  nuit,  agitation,  plaintes  inarticulées. 
Déviation  de  la  bouche  à gauche;  quelques  mouvements  faibles 
à droite  ; mouvements  presque  continuels  des  membres  gau- 
ches et  des  jeux.  Stertor,  écume  à la  bouche  ; l’intelligence  pa- 
raît toujours  conservée.  {Saignée  de  quatre  pal.). 

11  octobre.  Hier  soir,  affaissement  profond,  gêne  extrême  de 
la  respiration  ; des  sinapismes  diminuent  ce  dernier  symptôme. 
La  nuit  est  assez  calme.  Ce  matin,  la  respiration  n’est  plus  ster- 
toreuse,  bien  que  très-fréquente  (quarante  inspirations  par  mi- 
nutes). Le  pouls  est  à quatre-vingts. Mort  à troiss  heures  du  soir- 

Autopsie,  quarante  et  une  heure  après  la  mort.  Les  os  du  crân  e 
contiennent  beaucoup  de  sang;  les  sinus  de  la  dure-mère  sont 
remplis  de  sang  liquide  et  coagulé.  La  pie-mère  ne  contient  pas 
de  sérosité  ; ses  veines  sont  considérablement  dilatées  et  rem' 
plies  de  sang,  un  peu  plus  à gauche  qu’à  droite  ; bien  qu’elle 
offre  une  couleur  rouge  presque  uniforme,  il  n’y  a pas  d’extra- 
vasation de  sang  hors  des  vaisseaux. 

La  pie-mère  très-friable  s’enlève  facilement  et  ne  paraît  pas 
plus  adhérente  d’un  côté  que  de  l’autre.  L’hémisphère  gauche 
est  plus  volumineux  que  le  droit.  Ses  circonvolutions,  tuméfiées 
et  pressées  les  unes  contre  les  autres  , sont  d’une  couleur  rose 
très-vive  , surtout  à la  partie  antérieure  , moyenne  et  ex- 
terne de  l’hémisphère.  Au  milieu  de  la  rougeur  la  plus  vive,  on 
voit  de  petites  plaques  claires  où  la  substance  grise  a conservé 
sa  couleur  normale  : la  coloration  rouge  occupe  toute  l’épais- 
seur de  la  substance  corticale.  Les  circonvolutions  semblent  un 


‘ i RA:wolussemekt  aigu.  (anat.  païii.) 

peu  mollasses  au  toucher;  cependant  un  filet  d’eau  ne  les  pé- 
nétré pas,  seulement  il  dessine  quelques  franges  sur  le  bord, 
d une  coupe  faite  à la  substance  corticale.  La  substance  blanche 
présente  un  piqueté  assez  serré;  il  ne  s’écoule  pas  de  sang  à la- 
coupe,  mais  on  y voit  de  larges  plaques  rosées.  Le  corps  strié 
est  beaucoup  plus  volumineux  que  celui  du  côté  opposé  : il  estt 
à sa  surface  et  dans  son  épaisseur  d’une  couleur  rougeâtre  sem- 
blable a celle  des  circonvolutions.  Il  ne  paraît  aucunement  dés- 
organisé; cependant  quand  on  le  touche  on  éprouve  une  sensa- 
tion de  mollesse,  de  rénitence,  assez  semblable  à celle  d’une- 
gelée  un  peu  ferme  ; la  substance  blanche  voisine,  quoique  à uni 
moindre  degré,  présente  à peu  près  la  même  altération.  La  pro- 
jection d un  jet  d eau  un  peu  fort  produit  sur  le  corps  strié  uni 
phénomène  assez  curieux  : c’est  une  énucléation  presque  corn-- 
plète  de  ce  corps,  de  l’espèce  de  coque  qui  le  renferme,  et  une 
dissection  très-déhcate,  sans  déchirure  apparente,  des  fibres 
blanches  qui  le  traversent;  à part  cela,  le  jet  d’eau  altère  à peine* 
le  noyau  du  corps  strié  lui-même.  La  couche  optique  n’est  pas; 
sensiblement  altérée.  L’hémisphère  droit  ne  présente  de  remai*- • 
quable  qu’une  injection  assez  prononcée.  Petite  quantité  de  sé- 
rosité limpide  dans  les  ventricules  et  à la  base  du  crâne.  Con- 
gestion assez  prononcée  du  cervelet  et  du  bulbe  rachidien. 
Epaississement  des  artères  cérébrales.  Cœur  volumineux.  Pou-  • 
mon  infiltré  de  sang. 


OiisERVATioN  11.  — Perle  de  la  connaissance  et  de  la  parole  ; para- 
lysie du  mouvement  du  bras  droit,  du  sentiment  de  la  moitié  droite 
de  la  face.  Mort  au  bout  d’une  trentaine  d’heures.  — Rougeur  et  tu- 
mefaclion  d une  partie  des  circonvolutions  de  l’hémisphère  gauche  ; 
rougeur  du  corps  strié;  mollesse  gélatiniforme  de  ces  parties.  Injection 
générale  de  la  substance  médullaire. 

Une  femme  âgée  de  soixante-dix  à soixante-quinze  ans  , de 
beaucoup  d’embonpoint,  était  entrée  le  12  janvier  1840  à l’in- 
firmerie ; elle  se  plaignait  d’étouffements,  de  maux  de  tête  dont 
elle  souffrait  très- modérément  , et  qui  furent  attribués  .à  une 
pléthore  accidentelle.  Interrogée  sur  ses  antécédents,  elle  ne 
paraît  jamais  avoir  éprouvé  d’accidents  cérébraux  graves.  Il  pa- 
raît c[uedans  la  nuit  du  19  au  £0  janvier  , son  état  prit  tout  à 


OBSEnvAXlOXà. 


coup  uii  aspect  inattendu  , et  nous  la  trouvâmes  le  lendemain 
matin  dans  l’état  suivant  : 

Elle  est  couchée  sur  le  dos  , la  face  tournée  à gauche  , repre- 
nant cette  direction  chaque  fois  qu’on  la  déplace.  Les  paupières 
sont  fermées,  à gauche  un  peu  moins  complètement  qu’à  droite  ; 
de  temps  en  temps  elles  s’entr’ouvrent  un  peu.  Les  pupilles  sont 
égales , de  dilatation  moyenne  , toutes  deux  paraissent  très-lé- 
gèrement contractiles.  La  bouche  est  à peine  deviée  à gauche  ; 
l’aile  du  nez  ne  l’est  aucunement;  les  mâchoires  sont  très-for- 
tement serrées  ; il  n’est  pas  possible  de  les  séparer. 

Le  bras  droit  est  résolu,  mais  incomplètement  ; il  exécute  de 
temps  en  temps  de  légers  mouvements  spontanés  , et  quand  on 
le  pince  , il  se  retire  vivement.  Il  y a au  coude  comme  une 
certaine  tendance  à la  raideur.  Les  deux  jambes  sont  également 
mobiles  et  sensibles.  Le  bras  gauche  présente  une  motilité  et 
une  sensibilité  normales;  il  ramène  la  couverture  dès  qu’on 
découvre  la  malade.  Il  se  place  presque  toujours  sous  la  tête.  La 
main  droite,  quoique  dans  le  lit,  est  très-froide  , tandis  que  la 
gauche  toujours  découverte  paraît  à la  température  générale  du 
corps. 

Le  côté  droit  de  la  face  , jusqu’à  la  ligne  médiane  , est  tout  à 
fait  insensible  à des  piqûres  profondes  avec  une  épingle.  La 
conjonctive  et  la  pituitaire  de  ce  côté  sont  presque  tout  à fait  in- 
sensibles Les  deux  côtés  de  la  poitrine  ont  leur  sensibilité  na- 
turelle. On  ne  peut  expérimenter  la  déglutition  à cause  de  la 
raideur  des  mâchoires.  La  malade  ne  donne  ancun  signe  de 
connaissance,  si  ce  n’est  les  mouvements  de  la  main  gauche 
ramenant  le  drap  sur  elle.  Les  sens  paraissent  tout  à fait 
abolis. 

Le  pouls  est  à 62,  très-irrégulier , d’une  force  ordinaire. 
Rien  de  particulier  à l’auscultation  du  cœur.  Vingt  inspirations 
par  minute  , inégales  , se  faisant  également  par  les  deux  côtés 
de  la  poitrine  ; la  respiration  est  un  peu  bruyante,  sans  stertor, 
accompagnée  d un  peu  de  raie  trachéal.  La  poitrine  est  sonore 
partout  ; on  y entend  un  peu  de  ronchus  grave  , sans  râle  mu- 
queux. 

Mort  la  nuit  suivante. 

Jiilopsie  trente-deux  heures  après  la  mort.  Petite  quantité  de 
séiosité  limpide  dans  la  cavité  de  rarachiioide.  Injection  géiié- 


* ^ ^-A.^IOLL]SSi\MK]VX  AIGU.  (AJVAT#  TATH.j 

raie  de  la  pie-mère,  assez  vive  et  égale  partout  ; un  peu  desuf- 
(usion  sanguine  dans  quelques  points.  Cette  membrane  est  à 
peu  prb  sèche  et  ne  contient  presque  pas  de  sérosité.  Les  parois 
des  artères  de  la  base  sont  blanches  et  très-épaisses,  sans  ossifi- 
cation. 

La  pie-mère  s’enlève  avec  beaucoup  de  difficulté  de  la  con- 
vexité de  l’bémisplière  gauche;  on  peut  à peine  la  détacher  de 
la  substance  cérébrale  sous-jacente;  elle  se  déchire  en  très-petits 

lambeaux  et  entraîne  çà  et  là  des  portions  minces  de  substance 
cérébrale. 

Les  circonvolutions  de  cet  hémisphère  , surtout  celles  de  la 
lace  supérieure  et  de  la  face  interne,  présentent  généralement 
de  la  tuméfaction  , de  la  rougeur  et  de  la  mollesse.  Celte  rou- 
geur est  répandue  sous  forme  de  marbrures  çà  et  là  dissemiirées, 
allant  en  se  fondant  sur  leur  bords  , formant  des  plaques  irré- 
gulières plus  foncées  et  plus  étendues  au  fond  des  anfractuosi- 
tés. Quelques  circonvolutions  présentent  en  outre  un  léger  re- 
flet jaunâtre.  Presque  toutes  sont  renrarquableinent  tuméfiées  , 
surtout  celles  de  la  partie  moyenne  de  la  convexité. 

Toutes  ces  circonvolutions  sont  mollasses  au  toucher  et  don- 
nent précisément  la  sensation  d’une  gelée  assez  bien  prise  ; un 
courant  d’eau  projeté  de  haut  glisse  sur  elles  sans  en  altérer  la 
forme  , et  pénètre  seulement  légèrement  les  éraillures  produi- 
tes par  l’enlèvement  de  la  pie-mère , sans  eu  faire  flotter  de 
débris.  La  mollesse  et  la  tuméfaction  ne  sont  nulle  part  exacte- 
ment liées  à la  rougeur.  Cette  rougeur  occupe  partout  l’épais- 
seur entière  de  la  couche  corticale,  qu’elle  ne  dépasse  nulle 
part  ; elle  se  montre  dans  son  épaisseur,  dans  des  points  dont 
la  surlace  n’était  nullement  colorée. 

La  substance  médullaire  offre  une  consistance  normale,  mais 
elle  est  partout  vivement  injectée  ; dans  quelques  points  on  y 
trouve  un  pointillé  rouge  assez  serré. 

Le  corps  strié  est  de  couleur  rose  ; il  présente  une  mollesse 
gélatiniforme  semblable  à celle  des  circonvolutions.  Dans  un 
point  seulement  voisin  du  ventricule,  il  est  jaunâtre,  beaucoup 
plus  mol , et  flotte  sous  un  filet  d’eau  ; on  distingue  un  grand 
nombre  de  petits  vaisseaux  injectés  parmi  les  fibres  soulevées. 
La  couche  optique  ne  participe  point  à cette  altération. 

La  pie-mère  s’enlève  presqu’aussi  difficilement  de  la  sujierficie 


OBSERVATIONS. 


■47 


de  l’hémisphère  gauche  , (sans  cloute  à cause  de  sa  sécheresse,) 
mais  la  couche  corticale  au-dessous  est  intacte.  Légère  injection 
de  la  substance  médullaire.  Intégrité  parfaite  de  l’hémis- 
phère. 

Rien  à noter  au  cervelet  ni  à la  moelle  allongée. 


Ces  observations  nous  font  voir  le  ramollissement  de  la 
Substance  corticale,  tout  à fait  à son  début,  comme  les  pre- 
mières nous  avaient  montré  le  ramollissement  de  la  substance 
médullaire  , à la  même  période  : dans  l’une  injection  pénicillée 
et  pointillée  des  vaisseaux  , dans  l’autre  rougeur  uniforme;  dans 
la  première  leshbres  nerveuses  semblent  se  raréfier  et  se  laissent 
fendiller  par  un  filet  d’eau,  dans  la  seconde  elles  ofi’rent  une 
mollesse  gélatiniforme  tout  à fait  caractêristicjue.  Dans  les  deux 
cas  nous  trouvons  une  congestion  cérébrale  forte  , partielle,  cir- 
conscrite , et  de  plus  quelque  chose  qui  constitue  la  première 
apparition  du  ramollissement,  qui  annonce  le  début  d’un  nou- 
vel état  pathologique  autre  que  la  congestion.  Il  me  paraît  cu- 
rieux de  rapprocher  des  faits  précédents,  une  observation  de 
ramollissement  aigu  des  circonvolutions,  chez  un  petit  en- 
fant. 

Observation  12.  — Ramollissement  aigu  des  circonvolutions  chez  un 
petit  enfant. 

Un  enfant  mâle  d’un  an , ayant  les  fontanelles  ossifiées , ne 
pouvait  soutenir  sa  tête  dont  le  volume  s’était  singulièrement 
accru  depuis  quelque  temps.  Il  eut  à plusieurs  reprises  des  accès 
de  mouvements  convulsifs  avec  raideur  générale , stupeur  lé- 
thargique , de  courte  durée.  Ces  accès  devinrent  plus  rappro- 
ches , et  il  mourut  dans  le  coma  et  de  violentes  convulsions  té- 
taniques. 

Autopsie.  Os  du  crâne  minces,  compléteinent  ossifiés.  La 
dure-mère  leur  est  fortement  adhérente.  Les  vaisseaux  de  la 
pie-mère  sont  extraordinairement  gorgés  de  sang.  Quelques 
gros  de  sérosité  limpide  dans  les  ventricules  et  à la  base  du 
crâne.  La  substance  corticale  du  cerveau  est  dans  toute  sou 


48 


HA.MOLl.lSSK.\lEr«X  AlUU.  (aa’At.  rAlH.) 


OiisF.nvATioN  i5.  •— Allaiblissernement  de  l’intelligence;  attaques 
de  temps  en  temps.  A la  suite  d’une  opcratioiî  légère,  assoupissement 
coma  , resolution  générale.  Mort  quatre  ou  cinq  jours  après.  ^ Ramol- 
lissement chronique  à la  partie  postérieure  de  l'hémisphère  gauche. 
Ramollissement  partiel,  rougeâtre  et  superficiel  des  circonvolutions  des 
deux  hémisphères.  La  pie-mère  entraîne  les  parties  ramollies. 

La  nommée  Suzanne  Lharminot,  âgée  de  soixante-quatorze 
ans,  maigre,  sèche  et  pâle,  entra,  dans  les  premiers  jours  de 
mars  1838,  dans  le  service  de  chirurgie,  pour  subir  l’extirpa- 
tion d’une  petite  tumeur  de  la  paupière  inférieure  gauche.  L’in- 
cision nécessitée  pour  cette  opération  avait  tout  au  plus  6 ou  7 
millimètres  de  longueur.  Voici  les  renseignements  que  j’ai  pu 
obtenir  sur  ses  antécédents.  Depuis  un  an  elle  était  sujette  à des 
attaques  légères  : elle  perdait  tout  à coup  connaissance,  ne  pru- 
vait  plus  parler;  on  la  mettait  sur  son  lit,  et,  au  bout  de  di.x 
minutes,  d’un  quart  d’heure,  tout  était  passé.  On  assure  qu’il 
lui  était  resté  une  faiblesse  assez  prononcée  du  bras  gauche. 
Depuis  les  grands  froids  de  l’hiver  passé,  elle  était  comme  en 
enfance  ; ses  paroles  étaient  sans  suite  et  ne  répondaient  pas 
aux  questions  qu  on  lui  adressait.  Cependant  elle  se  levait  tous 
les  jours,  se  promenait,  mangeait  elle-mcme...  Ces  accidents 
n’avaient  jamais  été  assez  forts  pour  la  forcer  à entrer  à l’infir- 
mer ie. 

Le  lendemain  de  son  operation , elle  tomba  dans  un  assou- 
pissement avec  faiblesse  de  mouvements,  qui  ne  tarda  pas  à se 
changer  en  un  coma  profond,  avec  résolution  générale  et  com- 
plété des  membres.  Depuis  lors  elle  ne  profère  pas  une  parole, 
pas  une  plainte  : couchée  sur  le  dos  , la  bouche  ouverte  , elle 
demeure  privée  de  sentiment  comme  de  mouvement.  La  respi- 
ration est  fréquente,  un  peu  slertoreuse;  le  pouls  naturel.  La 
peau  est  sèche,  d’une  température  normale.  Elle  meurt  dans 
cet  étal,  quatre  ou  cinq  jours  après  le  début  de  ces  accidents. 

Autopsie.  Les  sinus  de  la  dure-mère  contiennent  une  assez 
grande  quantité  de  sang  liquide  et  de  caillots  allongés.  La  ca- 


(t)  Ralkem,  Mcnioirc  cite,  20'-'  Ohsn-\ aiion. 


OBSERVATXOXS. 


iO 

vite  de  l’arachnoïde  renferme  un  peu  de  sérosité  limpide.  La 
pie-mère  ne  présente  rien  à noter;  mais  lorsqu’on  l’enlève  de  la 
convexité  des  hémisphères,  elle  entraîne  après  elle  (malgré 
qu’elle  n’ait  qu’un  degré  médiocre  d’adhérence)  la  superficie 
d'un  bon  nombre  dé  circonvolutions.  Un  filet  d’eau  étant  pro- 
jeté sur  la  superficie  du  cerveau,  on  voit  que  beaucoup  de  cir- 
convolutions, surtout  de  l’hémisphère  gauche,  et  seulement  de 
la  convexité  , présentent  à leur  sommet  un  ramollissement  peu 
profond  et  facile  à limiter.  Les  points  ramollis  sont  rosés  îon 
distingue  sur  quelques-uns  d’entre  eux  de  petites  taches  rouges 
et  même  de  très-petits  caillots  sanguins. 

A la  partie  externe  du  lobe  postérieur  gauche,  on  voit  cinq 
ou  six  circonvolutions  entièrement  détruites  et  réduites  en  une 
bouillie  d’un  jaune  légèrement  fauve.  (Ramollissement  chro- 
nique.) Un  filet  d’eau  pénètre  profondément  ce  ramollissement 
qui  s’étend  presque  jusqu’au  ventricule,  dont  une  lame  mince 
de  tissu  cérébral  sain  le  fépare  seule.  La  partie  moyenne  du 
centre  ovale  de  l’hémisphère  gauche  présente  aussi,  dans  une 
laigeui  de  3 centimètres,  un  ramollissement  sans  changement 
de  couleur  , et  qui  va  rejoindre  deux  circonvolutions  ramollies 
de  la  convexité.  Rien  à noter  du  reste.  Les  ventricules  contien- 
nent quelques  cuillerées  de  sérosité  limpide. 


Observation  4.  — Démence.  Coma  subit  ; hémiplégie  gauche  avec 
contracture.  Mort  au  bout  d’une  vingtaine  d’heures.  — Adhérences  de 
la  ]ne-mère  à la  surface  de  l’hémisphère  droit,  avec  ramollissement 
roupatredela  plupart  des  circonvolutions;  ramollissement  avec  in- 
jection de  la  substance  médullaire  du  lobe  postérieur. 


La  nommée  Leroux,  âgée  de  quarante-sept  ans,  très-maigre 
de  faible  constitution,  était  dans  la  division  des  aliénées  de  la 
Salpétrière  depuis  l’année  1 822.  Elle  se  disait  la  sainte  Vierge, 
et  entrait  en  conversation  avec  les  saints. 

Le  14  octobre  1839,  elle  se  plaignit  d’un  peu  de  malaise, 
d inappétence  ; elle  resta  au  lit  toute  la  journée.  Le  15,  il  n’y 
avait  pas  de  fièvre,  la  langue  était  pâteuse,  blanchâtre;  pas 

d appétit,  un  peu  d’affiiissement;  diarrhée , point  de  pêne  de  la 
respiration. 

Le  soir,  à sept  heures,  elle  ne  présentait  rien  de  particulier. 

4 ' 


50 


HAMOLUSSEMSNT  AIGU.  (ANAT.  PATH.) 

Le  lendemain  matin  on  la  trouva  dans  l’état  suivant,  dans 
lequel  elle  était  tombée  on  ne  sait  à quelle  heure  de  la  nuit  .• 
Coma  ; aucun  signe  de  connaissance  ; bouche  déviée  à droite  ; 
joue  gauche  soulevée  à chaque  mouvement  respiratoire;  salivé 
spumeuse,  lèvres  brunâtres.  Paupière  supérieure  droite  abais- 
sée, pupille  contractée  ; à gauche,  occlusion  complète  de  l’œil. 
Pupille  gauche  dilatée  ; la  vue  semble  abolie.  La  sensibilité  tac- 
tile de  la  conjonctive  paraît  détruite. 

Les  membres  du  cote  gauche  sont  paralysés  du  sentiment  et 
du  mouvement.  Le  bras  soulevé  retombe,  lentement  il  est  vrai. 
Raideur  au  coude  et  à l’épaule , contracture  des  doigts , raideur 
dans  l’articulation  du  genou.  Le  membre  inférieur  soulevé  re- 
tombe comme  une  masse  inerte;  aucun  indice  de  sensibilité  par 
le  chatouillement  de  la  plante  du  pied.  Le  mouvement  et  le 
sentiment  sont  bien  conservés  à droite. 

La  respiration  est  fréquente,  haute,  un  peu  trachéale;  pas  de 
rougeur  à la  face;  pouls  petit,  un  peu  fréquent  ; pas  de  chaleur 
à la  peau.  (Seize  sangsues  à l’anus  y 'vésicatoire  à la  cuisse.  ) 

A cinq  heures  du  soir,  la  respiration  est  plus  embarrassée 
et  plus  fréquente  ; la  tête  est  renversée  en  arrière  ; le  nez , les 
les  pieds  sont  très -froids  et  violacés.  Mort  dans  la  soi- 
rée (1). 

Autopsie  quarante  heures  après  la  mort.  La  dure-mère  est  un 
peu  tendue.  L’arachnoïde  ne  contient  pas  de  sérosité,  non  plus 
que  la  pie-mère.  Celle-ci  est  très-mince,  ses  vaisseaux  sont  assez 
injectés,  également  des  deux  côtés. 

La  pie-mère  s’enlève  aisément  de  la  convexité  de  l’hémis- 
phère droit;  seulement  elle  détache,  sur  deux  circonvolutions 
du  lobe  antérieur,  deux  petits  fragments  moins  larges  qu’une 
pièce  de  25  centimes,  et  comprenant  une  partie  de  l’épaisseur  de 
la  couche  corticale,  sans  aucune  altération  de  couleur.  La  plu- 
part des  circonvolutions  de  la  partie  interne  de  l’hémisphère 
offi’ent  une  teinte  rougeâti’e  et  adhèrent  aux  méninges  ; cette 
rougeur  est  due  sur  quelques-unes  à une  sorte  de  marbrure  , 
sur  d’autres  à un  pointillé  plus  ou  moins  serré.  Leur  forme  et 
leur  volume  ne  semblent  point  modifiés.  La  rougeur  occupe 


(1)  Ces  détails  m’ont  été  Ko^muniqués  par  mon  confrère  le  docteur  M«s- 
€a^el,  médecin  à GhatellerauL 


OBSERVATIOKS. 


51 


plutôt  les  cii'convolutions  elles -mêmes  que  les  anfi  actuosite's  , 
et  est  limitée  à la  coucbe  corticale.  Eu  meltne  temps,  elles  sont 
mollasses,  se  laissent  érailler  par*  la  pie-mère  qui  en  enlève  une 
couche  mince  et  inégale,  et  pénétrer  légèrement  par  un  filet 
d’eau.  Toutes  les  circonvolutions  des  faces  interne  et  inférieure 
du  lobe  occipital  sont  également  rouges  et  ramollies.  Sur  deux 
d’entre  elles,  dans  toute  leur  longueur,  la  couche  corticale  en 
suivant  la  pie-mère  se  retourne  tout  d’une  pièce,  de  manière  à 
montrer  à découvert  la  surface  qui  était  adhérente  à la  subs- 
tance médullaire,  d’un  gris  blanchâtre  et  tomenteuse,  et  de  l’an- 
tre côté  à décortiquer  ces  deux  circonvolutions,  nettement  dé- 
pouillées de  leur  couche  grise.  Toute  la  substance  médullaire 
du  lobe  postérieur,  jusqu  au  ventricule,  est  ramollie  et  se  laisse 
penetrer  par  un  filet  d eau,  sans  qu’il  s’en  détache  aucun  frag- 
ment; elle  présenté  un  très -grand  nombre  de  vaisseaux  rouges 
et  déliés,  qui  y forment  un  beau  réseau  d’in  jection,  et  dans  les 
intervalles  desquels  elle  a conservé  une  grande  blancheur.  Tout 
le  reste  de  l’hémisphère  est  fort  injecté. 

Les  ventricules  latéraux  contiennent  environ  100  grammes 
de  séiosite  limpide  et  un  peu  rougeâtre-  Du  côté  droit,  le  corps 
strié  est  uni  au  corps  calleux  par  des  adhérences  celluleuses, 
blanches,  faciles  à détacher;  on  en  trouve  de  semblables  au-des- 
sus de  la  corne  d’Ammon.  Les  parois  du  ventricule  présentent 
une  arborisation  rouge  très-prononcée,  et  à la  partie  postérieure, 
quelques  marbrures  rougeâtres. 

L’hémisphère  gauche  est  un  peu  injecté,  surtout  dans  son 
lobe  postérieur.  Le  ventricule  présente,  comme  l’autre,  des  ar- 
borisations rouges,  sans  marbrures,  et  aussi  quelques  adhéreu- 
ces^du  corps  strié  au  corps  calleux. 

Rien  à noter  dans  le  cervelet,  ni  dans  la  moelle  allongée. 


Observation  i5.  — Perte  de  connaissance  et  hémiplégie  gauche. 
Mort  au  bout  de  deux  jours.  — Ramollissement  aigu  du  corps  strié  et 
de  la  couche  optique  du  côté  droit. 

Un  homme,  âgé  de  quarante-trois  ans,  affecté  d’une  hyper- 
trophie considérable  du  cœur,  et  d’une  dégénérescence  tuber 
culeuse  des  testicules,  sujet  aux  étourdissements,  présentait  de- 
puis quelques  jours  une  tendance  remarquable  à l’assoupisse 


K.VMOI,Llî,Sl:;.''.ri.;-ST  AIGC.  TAISAi.  PAïll.'', 


menl,  saus  ci^phalalgic,  lorsqu’un  inaliu  lo  pouls,  liabituellemrnl 
lorl  peut,  présenta  un  développement  et  une  durclé  excessive, 
la  peau  une  chaleur  inaccoutumée.  Le  soir,  il  perdit  momenta- 
nément connaissance,  et  le  lendemain  on  lui  trouva  les  mem- 
bres gauches  complètement  paralysés,  sans  contracture,  presque 
insensibles,  la  bouche  déviée  adroite.  (Saignée  de  500  gram, 
purgatif,)  succomba  deux  jours  après  à une  asphyxie  gra- 
duelle, sans  aucun  accident  cérébral  ; jusqu’au  dernier  moment 
1 intelligence  avait  conservé  toute  sa  lucidité.  ’ 

Autopsie.^  Les  méninges  nolfraient  rien  de  remarquable  : la 
rabstance  cérébrale , enlevée  par  tranches  minces,  fut  trouvée 
parfaitement  saine  jusqu’au  niveau  des  ventricules  latéraux.  A 
droite,  le  corps  strié  et  la  couche  optique  n’existaient  véritable- 
inent  plus.  A leur  place  on  trouvait  une  bouillie  d’un  blanc 
légèrement  rosé  en  plusieurs  points,  jaunâtre  en  d’autres. 
Cette  altération  atteignait,  dans  l’étendue  d’un  à deux  pouces,  la 
substance  nerveuse  qui  borne  en  dehors  le  corps  strié  et  la 
couche  optique  ; on  n’y  voyait  aucune  trace  d’épanchement 
sanguin.  Aucune  autre  lésion  n’existait  dans  le  reste  de  l’encé- 
phale. 

Les  poumons  étaient  infiltrés  d’une  prodigieuse  quantité  de 
sérosité  spumeuse  (1). 


Ces  dernières  observations  nous  montrent  le  ramollissement 
un  peu  plus  avancé  que  dans  les  précédentes;  les  points  ramollis 
se  laissent  arracher  par  la  pie-mère,  pénétrerpar  un  filet  d’eau,  ils 
ressemblent  à de  la  bouillie....  Dans  ces  cas  il  y avait  bien  rou- 
geur des  parties  ramollies,  mais  pas  de  sang  notablement  inlil- 
tré.  On  verra  au  contraire  , dans  les  observations  suivantes  , le 
ramollissemeiU  de  la  substance  grise  accompagné  d’une  infiltia- 
l,ion  assez  considérable  de  sang. 


Observation  1 6. — Hémiplégie  subite.  Mort  quaranle-lmit  heures 
parés.  — Ramollissement  avec  infiltration  sanguine. 

Une  femme  de  soixante-quinze  ans,  qui  auparavant  ne  mar- 


(I)  Amlrol,  Clinique,  t.  v,  p.  483. 


OBSERVATIONS. 


cliait  qu’eu  Iremblanl,  laissait  aller  sous  elle,  mais  se  servait 
librement  de  ses  bras,  fut  prise  tout  à coup  de  paralysie  de  la 
lanfjue  avec  déviation  de  la  bouche  à gauche , rigidité  et  im- 
mobilité du  bras  droit , intégrité  de  !a  sensibilité,  de  l’intelli- 
gence et  du  mouvement  des  membres  inférieurs.  Le  second 
jour  elle  perdit  tout  à coup  connaissance;  le  pouls  était  faibb; 
et  fréquent,  les  extrémités  froides;  elle  mourut  quarante-huit 
heures  après  le  début  des  accidents. 

Autopsie.  — Ramollissement  de  la  substance  grise  de  plu- 
sieurs circonvolutions  et  anfractuosités  de  l’hémisphère  gauche, 
en  bouillie  lie  de  vin  ou  rouge  violet  foncé,  fraises  écrasées,  se 
laissant  enlever  par  les  membranes.  iJans  quelques  points,  ra- 
mollissement blanc  de  la  substance  médullaire  sous-jacente.  Vc 
lobe  antérieur  lui-même  était  remarquable  par  son  aspect  po- 
reux et  le  développement  de  quelques  vaisseaux  (1). 


OüSEav.cTJOK  ly.  — Hémiplégie,  mouvements  convulsifs  du  coté 
opposé.  Mort  très  rapide.  — Ramollissement  avec  infiltration  san- 
guine. 

Une  jenne  fille  de  vingt-deux  ans  éprouva  une  vive  frayeur 
qui  détermina  la  suppression  des  règles,  puis  de  la  céphalalgie, 
des  nausées,  un  ictère.  La  céphalalgie  persista  pendant  trois 
mois,  accompagnée  d’idées  tristes  et  de  rêves  eflVayanls  ; à 
cette  époque  elle  redoubla  d’intensité,  puis  il  survint  un  jour 
des  ctourdissemenls , des  vomissements;  le  lendemain  le  côté 
gauche  du  corps  était  entièrement  paralysé,  la  sensibilité  con- 
sei\ce,  les  memhics  di oits  étaient  lesiege  de  mouvements  con- 
vulsifs continuels;  la  malade  poussait  des  cris  étouffés  et  ne 
répondait  pas  aux  questions  qu’on  lui  faisait.  Le  pouls  était 
plein  et  fort,  peu  fréquent.  Malgré  un  Iraitcmeut  énergique  mis 
en  usage  ce  jour-l.i  seulement , la  malade  succomba  dans  la 
soirée. 

Autopsie.  — Toute  la  partie  externe  des  lobes  moyen  et 
postérieur  droits  du  cerveau  est  ramollie.  Vers  les  limites  de 
ce  ramollissement,  et  superficiellement,  on  trouve  de  petits 
épanchements  miliaires;  un  d’eux  offre  le  volume  d’un  pois  ; au 

(t)  Criu-cilhier,  Anat.  pal/i.  (ht  corjis  himaiii,  avec  lig.  20'  livraison. 


I’AMOLLISSEMENT  AIGTJ.  ANAT.  PATH.; 

centre  , la  substance  grise  est  transformée  en  une  bouillie  rouge 
tnelee  de  caillots  de  sang;  profondément , les  parois  de  la  moitié 
Inférieure  du  ventricule  latéral  droit  offrent  l’altération  décrite 
sous  le  nom  de  ramollissement  blanc.  On  trouve,  dans  la  partie 
s^terne  du  corps  strié,  et  dans  le  lobe  antérieur,  près  de  la 
àcissure  de  Sylvius  , un  noyau  rouge  ramolli , de  l’épaisseur 
tâ’une  noisette  (1). 


' - 

CHAPITRE  II. 

APPRÉCIATION  DES  ALTÉRATIONS  ANATOMIQUES  DANS  LE  RAMOLLIS- 
SEMENT AIGU. 

En  analysant  avec  soin  les  lésions  anatomiques  que  nous  pré- 
sentent les  observations  de  ramollissement  aigu  consignées  dans 
cet  ouvrage,  nous  trouvons  que,  généralement  caractérisées 
par  la  rougeur  , la  tuméfaction , la  mollesse  et  les  adhérences 
des  méninges,  elles  nous  offrent  trois  éléments  essentiels  : la 
«ongestion,  l’infiltration  sanguine,  l’inflammation. 

Ar  rêtons-nous  un  instant  sur  chacun  de  ces  états  morbides, 
«onsidéré  comme  lésion  anatomique  particulière,  et  recherchons 
quel  il  rôle  joue  dans  l’altération  complexe  que  nous  étudions 
§ous  le  nom  de  ramollissement  aigu  du  cerveau 

§ 1.  Congestion. 

La  congestion  cérébrale  se  caractérise  anatomiquement  par 
des  altérations  que  nous  retrouvons  expressément  dans  les 
observations  précédentes  : dans  la  substance  grise , coloration 
rose  uniforme;  dans  la  substance  blanche,  injection,  pointillé 
rouge , quelquefois  marbrures  rougeâtres.  La  congestion  céré- 
brale se  rencontre  rarement  sur  le  cadavre  dans  un  état  de  par- 
faite simplicité  ; d’une  mobilité  remarquable  , elle  se  dissipe 
en  général,  même  après  avoir  débuté  de  la  fagon  la  plus  ef- 
frayante , spontanément  ou  sous  l’influence  des  moyens  théra- 


Nivet,  JBul.  de  la  soc.  anat.  Avril  IC36,  il»  année. 


CONGESTION  CIÈRÉBRALE.  55 

peutiques  , et  si  elle  persiste  quelque  temps  . elle  se  localise  or- 
dinairement et  se  montre  à l’autopsie  accompagnée  ou  même 
complètement  remplacée  par  un  état  de  ramollissement  du  cer- 
veau. 

Cependant  nous  possédons  assez  d’observations  pour  établir 
<îue  ce  qui  distingue  essentiellebient  la  congestion  de  l’inflam- 
mation, dans  le  cerveau  comme  dans  les  autres  parties  du 
corps,  c’est  la  conservation  ou  une  légère  augmentation  de  la 
consistance  naturelle  de  l’organe.  Ainsi  dans  les  cinq  obser- 
vations de  congestion  cérébrale  rapportées  par  M.  Andral, 
dans  sa  clinique  médicale  , il  est  expressément  noté  que  la  con- 
sistance du  cerveau  était  normale  ; ainsi  dans  nos  deux  pre- 
mières observations,  l’injection  partielle  de  la  substance  mé- 
dullaire se  montrait  sans  aucune  modification  de  consistance  , si 
ce  n’est  dans  les  deux  points  circonscrits  où  le  tissu  injecté 
commençait  à se  ramollir. 

D’après  M.  Bouillaud,  la  congestion  cérébrale  s’accompagne' 
rait  habituellement  d’une  augmentation  de  consistance  de  la 
pulpe  nerveuse  : « La  première  période  de  la  cércbrite , dit-il , 
est  caractérisée  par  la  congestion  , la  fluxion  sanguine  , sans  lé- 
sion notable  de  structure  de  la  substance  cérébrale.  La  sub- 
stance cérébrale  est  comme  injectée  de  sang  rouge,  tuméfiée  et 
sensiblement  plus  /erme  qu’à  l’état  normal  (1).  » Cette  augmenta- 
tion de  consistance  dans  la  congestion  est  du  reste  loin  d’être 
constante  : si  je  l’ai  trouvée  notée  dans  plusieurs  des  observa- 
tions de  M.  Bouillaud  (2),  de  M.  Gendrin  (3),  et  dans  d’autres 
publiées  isolément , elle  n’existait  dans  aucune  des  observa- 
tions de  M.  Andral , ni  dans  les  faits  que  j’ai  observés  moi- 
même  ou  d’autres  plus  nombreux  recueillis  dans  les  auteurs. 

La  tuméfaction  est  encore  un  phénomène  qui  s’observe  quel- 
quefois dans  la  congestion  simple.  Notée  spécialement  par 
MM.  Bouillaud  et  Lallemand , c’est  à elle  qu’est  due  la  séche- 
resse des  méninges  que  l’on  peut  voir  accompagner  les  conges- 
tions fortes  et  très-aiguës,  tandis  que  les  congestions  lentes  et 
moins  considérables  entraînent  au  contraire  une  augmentation 

(1)  Boiiill.iiid,  Diction,  de  méd.  et  de  chir.  prnt.  t.  vu,  ]>,  272. 

Bien  que  prc'sentée  .'i  propos  de  la  oerél)rite,  celle  description  n’en  appar- 
tlcnl  pas  moins  évidemment  à la  congestion  elle.-mcme. 

(2)  Bouillaud,  Traitd  de  l’ encéphalite, 

(3)  Gendrin,  Hisl,  anal  des  inflammations. 


xiQD. 

'“  -“7^  « 

compagne  égalemcu  la  sin,ple Tge'srn  'a^gnbri^^p'pLx- ' 
« la  pne„,„„„ie;  co.n.ne  clans  les  tu, -es  o,gater;pa;e?mp,': 
I ans  la  conjonctive,  qui  se  gonfle  également  et  quand  le  contLt 

cl  un  corps  etranger  fait  brusquement  affluer l sang  dZ  se. 

^a.sseaux  , et  dans  les  infiltrations  sanguines  traumatiques  et 
aa  s la  conjonctivite  aigue  , quelle  qu’en  soit  la  cause  ’ 
Kougeur  et  tuméfaction , tels  sont  donc  , dans  le  ramollisse- 
ment aigu,  les  cléments  qui  doivent  être  rapportés  à la  con- 
gesüon  mais  les  seuls  qui  puissent  lui  appartenir;  et  nous  de- 
vions chercher,  hors  de  la  congestion , l’explication  des  autres 
circonstances  anatomiques  que  nous  avons  notées.  C’est  ce 
qu  ont  parfaitement  exprimé  MM.  Delaherge  et  Monneret  en 
disant , a propos  de  la  coloration  rouge  uniforme  qui  caractérise 
1 hypereime  de  la  substance  corticale  : . la  consistance  de  la 
paitie  ainsi  colorée  reste  normale  , et  cette  circonstance  est  très- 
imimrtaniea  noter,  puisqu’ elle  seule  peut  faire  distinguer  cette 
i.spece  d hyperemie  du  ramollissement  cérébral.  Toutes  les  fois 
que  le  cerveau  est  ramolli  dans  le  point  occupé  par  la  conges- 
tion, on  n a pas  afîaue  à une  hyperémie  pure  et  simple...  (I),  .. 

1 

5 II-  Infiltration  sanguine. 

I.es  diverses  altéiatioiis  que  les  troubles  rapides  de  la  rbcii- 
latrou  peuvent  laisser  dans  le  tissu  d'un  organe,  peuvent  en 
geneial  etre  rapportées  aux  quatre  formes  suivantes  : conges- 
tion sanouiue;  infiltration  sanguine,  hémorrhagie  par  épanche- 
ment et  inflammation.  Ces  divers  états  s’observent  journelle- 
ment soit  isolés,  soit  unis  ensemble,  dans  la  plupart  de  nos 
organes,  et  en  particulier  dans  le  cerveau.  Un  d’eux,  l’infiltra- 
tion  sanguine,  a été  jusqu’ici  fort  peu  étudié  dans  l’encéphale  , 
et  comme  le  rôle  qu’il  joue  dans  le  ramollissement  cérébral  est 
de  la  plus  haute  importance,  nous  allons  nous  arrêter  quelques 
instants  a tracer  les  principaux  traits  de  son  histoire.  L’on  par- 
domiera  la  longueur  de  celte  digression  , en  raison  de  la  gra- 
vite , peut-être  de  la  nouveauté  du  sujet  ; et  d’ailleurs  ce  cha- 


I)  DHübcrgc  et  Monneret,  Compçndiwn  de  médecine...  t.  i,  p,  229. 


J^FlLXRAXiON  .SAîiGlj|^E, 


è7 

pitié  peut  être  momentanément  laissé  de  côté  , ci  l’on  tient  à 
suivre  sans  interruption  les  faits  qui  appartiennent  directement 
à l’histoire  du  ramollissement  aigu. 

Étudiée  d’abord  sous  le  nom  d’apoplexie  capillaire  par 
M.  Cruveilhier  (1),  qui  ne  la  vit  que  dans  le  ramollissement 
cérébral  , indiquée  ensuite  dans  le  ramollissement  par  M.  Ros- 
tan,  dans  l’encéphalite , par  M.  Lallemand , plus  tard  par 
M.  Fanlonelli  (2),  ellen’aété  étudiée  à part  et  comme  altération 
distincte,  que  par  MM.  Bravais  (3) , Dance  (4) , et  Diday  (5). 
Ces  travaux,  auxquels  on  peut  ajouter  quelques  observations 
dues  à MM.  Gendrin  (G),  Denonvilliers  (7),  Malgaigne  (8,\  etc., 
ont  été  analysés  récemment  par  MM.  Monneret  et  L.  Fleury, 
qui  sont  arrivés  à celte  conséquence  : que  l’infdtralion  san- 
guine du  cerveau  ne  serait  qu'un  phénomène  particulier  de  l’en- 
céphalite (9)  ; proposition  que  du  reste  ils  ont  eux-  tnèiues  for- 
mellement contredite  dans  des  passages  subséquents. 

J’ai  en  I8>i0  réuni  dans  ma  thèse  inaugurale  (10) , tous  les 
faits  que  possédait  la  science  sur  ce  su  jet  et  d’assez  nombreuses 
observations  recueillies  par  moi.  Ce  chapitre  est  presque  entiè- 
rement extrait  de  ce  travail. 

(1  CruveîJhier,  Diction,  de  mdd.  et  chir.  prat,  t.  n,  art.  .\poplexie,  cl 
yînat.  path.  du  corps  humain,  avec  fig.  Liv.  20,  24,  etc. 

(2)  Fanlonelli,  Qaz.  me'J.  t.  vi,  p.  103. 

(3)  Bravai.»!,  il/e/noire  sur  T hémorrhagie  de  la  couche  corticale  du  ceireau 
( Revue  médicale,  mars  1827,  ).  Ce  travail  e.sl  le.  premier  où  l’infiltralion 
sanguine  du  cerveau  ait  e'ie'  bien  décrite  , et  exactement  apprécie'e  dans  .sa 
nature,  ,Ie  regrette  de  ne  l’avoir  point  cité  dans  ma  ilièsc  ; mais  je  ne  le  con- 
naissais pas  encore,  à l’époque  où  elle  a été'  publiée.  Je  m’empre.sse  de  ré- 
parer aujourd’hui  celle  omission. 

(4)  D.-mce,  ohseivations  sur  une  forme  particulière  d’apoplexie  ( Archives 
g£n.  de  niéd.  Mars,  1832.) 

(5)  Diday,  Mémoire  sur  C apoplexie  capillaire  ( Gaz.  niéd.,  22  n\  r.l837.) 

(fi)  Gendrin,  Histoire  anat.  des  inflammation^, 

(7)  Denonvillier.s,  Gaz.  méd.  1833,  p.  62. 

(8)  Malgaigne,  Gaz.  méd. 

(9)  Monneret  cl  L.  Fleury  , Compendium  de  médecine  pratinue,  r.  iii 

p.  274.  ’ ’ ' 

(10)  Durand-Fardel,  Recherches  anatomico-  palhologit/ues  sur  t in  filtration 

(angvine  et  l'inflammation  'aiguë  du  reiycaii:  TIicscs  de  Paris  1810 
n.  261.  ■ 


58 


ramollissement  aigü.  (anAt.path  .) 

L’infiltration  sanguine  , nom  que  je  [crois  préférable  à celui 
d apoplexie  capillaire,  proposé  par  M.  Cruveilhier , se  montre 
tantôt  unie  au  raïuollissement , tantôt  seule  et  jouissant  d’une 
individualité  bien  évidente,  ainsi  que  dans  le  poumon  l’infiltra- 
tion sanguine,  tout  en  accompagnant  souvent  Tinflammation , 
s’observe  isolée  et  bien  indépendante  de  cette  dernière  , sous  le 
nom  d^apoplexie  pulmonaire.  Bien  que  nous  ayons  ici  plutôt  à 
nous  occuper  de  1 infiltration  sanguine  considérée  comme  épi- 
phénomène du  ramollissement , qu’à  faire  son  histoire  en  l’en- 
visageant comme  une  lésion  spéciale  et  indépendante,  je  crois 
utile  de  signaler  sous  ce  dernier  point  de  vue  les  principaux 
traits  d une  alteration  qu’il  est  intéressant  de  rapprocher  de 
celle  qui  constitue  le  ramollissement  aigu. 

L infiltration  sanguine  se  montre  sous  des  aspects  très-divers  : 
tantôt  ce  sont  de  petits  foyers  ou  de  petites  taches , plus  ou 
moins  volumineux  qu’un  grain  de  millet  , répandus  çà  et  là 
dans  le  cerveau  ou  groupés  ensemble,  le  plus, souvent  en  forme 
de  plaques  à la  surface  des  circonvolutions  ; tantôt  ce  sont  des 
noyaux  assez  arrondis , à peu  près  du  volume  d’une  noisette  , 
uniques  ou  multiples  ; dans  une  troisième  forme  enfin  , qu’on 
peut  appeler  infiltration  diffuse  , cette  dernière  n’a  pas  d’ap- 
parence déterminée  et  présente  les  plus  grandes  variétés  d’as- 
pect et  d’étendue  : toutes  ces  formes  sont  caractérisées  par  la 
présence  du  sang  en  nature , hors  des  vaisseaux , dans  la  pulpe 
cérébrale , non  réuni  en  foyer , mais  mêlé  et  plus  ou  moins 
intimement  combiné  avec  les  molécules  de  la  substance  ner- 
veuse. 

Cette  division  que  j’ai  suivie  dans  ma  thèse , dans  l’exposé  des 
faits , ne  repose  que  sur  une  apparence  extérieure  et  à laquelle 
je  n’accorde  qu’une  importance  d’arrangement  ; elle  nous  inté- 
resse beaucoup  moins  qu’une  autre , basée  sur  la  consistance 
des  parties  infiltrées  : or,  nous  trouvons  que  cette  dernière  est 
tantôt  normale,  tantôt  augmentée  et  tantôt  diminuée. 

Je  vais  rapporter  ici,  ou  simplement  indiquer  les  faits  prin- 
cipaux d’après  lesquels  il  m'a  été  permis  de  faire  de  l’infiltra- 
tion sanguine  une  étude  spéciale  et  plus  complète  qu’on  n’a- 
vait  fait  jusqu’ici,  faute  d’un  nombre  suffisant  d’observations. 


INFILTRATION  SANGUINE. 


59 


A.  Infiltration  sanguine  avec'conservation  delà  consistance  normale  du 

cerveau. 

Obs.  18.  — Fille  de  quarante  ans,  mal  réglée;  tout  à coup 
convulsions  épileptiformes , générales , se  répétant  pendant 
trois  jours  par  accès  rapprochés,  sauf  quelques  rémittences.  Mort 
au  bout  de  ce  temps. 

A la  surface  du  cerveau , trois  petites  taches  ressemblant  à 
une  légère  ecchymose.  On  trouve  à la  partie  supérieure  de 
l’hémisphère  gauche  une  portion  arrondie  de  substance  céré- 
brale , d’une  couleur  rouge  brun,  parfaitement  circonscrite  , du 
volume  d’une  noix  et  entourée  de  substance  cérébrale  saine  ; 
elle  ne  paraissait  pas  différer  par  sa  structure  et  sa  consistance  , 
des  autres  parties  du  tissu  cérébral.  La  surface  d’une  section 
pratiquée  au  travers  de  cette  partie  malade,  présentait  une  mul- 
titude innombrable  de  petits  points  rouges  entourés  de  points 
jaunes Dans  la  partie  exactement  correspondante  de  l’hé- 

misphère droit , se  trouvait  une  lésion  tout  à fait  identique,  si 
ce  n’est  qu’elle  était  légèrement  i-amollie  à son  centre  (1). 


Obs.  19.  — Femme  de  vingt-cinq  ans,  morte  dans  le  coma, 
après  avoir  présenté  pendant  quelques  jours  du  délire  et  de  l’as- 
soupissement. 

Tout  le  corps  calleux  était  sablé  de  points  rouges  de  la 

grosseur  d’une  tête  d’épingle  ordinaire,  répandus  uniformément 
dans  toute  l’étendue  et  l’épaisseur  de  cette  portion  centrale  du 
cerveau.  L’aspect  qui  en  résultait  ressemblait  assez  bien  à celui 
d’une  surface  blanche  qu’on  aurait  finement  aspergée  d’un  coup 
de  pinceau  chargé  de  matière  colorante  rouge.  Examinés  toute- 
fois de  près,  on  ne  pouvait  pas  dire  que  ces  points  fussent  du 
sang  épanché , car  il  n’y  avait  pas  de  caillots  visibles  à leur 
surface;  ce  n’était  pas  non  plus  du  sang  sortant  immédiatement 
des  vaisseaux,  comme  il  arrive  lorsqu’il  y a simple  engorge- 
ment cérébral;  car  la  pression  exercée  au  voisinage  n’y  faisait 
pasafiluer  de  sang  et  n’augmentait  pas  la  valeur  des  taches; 
c était  un  mélange  intime  de  sang  avec  la  substance  cérébrale  , 
sans  (ju  on  pâl  apercevoir  de  ramollissement  ou  de  destruction  dans 

(1)  Des  maladie»  Trad.  d«M.  Geudria; 

p.  105,  1)5.  XXIV.  , 


’^amolussement  (anat.  path.) 

rni'^  f petitesse  des  tadies.  Cette  aîié- 

lou  e ait  jornee  presque  exclusivement  au  corps  calleux  (1). 

ntr?r'  ~ soixante-neuf  ans,  atteinte  d’une 

affection  du  cœur,  fat  trouvée  un  matin  plongée  dans  le  coma 
avec  lesolution  generale  , et  succomba  bientôt. 

On  trouva  du  sang  et  de  la  sérosité  sanguinolente,  dans  la  ca- 
de  1 arachnoïde.  Dans  le  lobe  antérieur  droit  il  y avait  un 
ponctue  rouge  de  trois  lignes  d’étendue  , gagnant  supérieure- 
ment toute  la  hauteur  de  la  lame  médullaire  qui  pénétrait  dans 
cuconvolution,  et  lui  restant  exactement  limité.  Chacun 
des  points  qui  concouraient  A le  former  égalait  ù peu  près 
corps  dune  cpmgle  ordinaire.  Au  milieu  de  la  protubé- 
rance on  vu  un  petit  nojau  rouge,  résultat  d’un  poimilié 
ties-fin  et  tres-serré;  il  fut  impossible  d’apprécier  s’il  était 
plus  ferme  ou  plus  mou  que  les  parties  voisines. 


Oas.  21.  Une  femme  de  soixante-quinze  ans  succomba  h 
une  entente  compliquée  de  pneumonie.  Elle  était  dans  le  ma- 
rasme, etn’avait  jamais  présenté  de  symptômes  du  côté  du  cer- 
veau. 

La  partis  postérieure  et  interne  de  la  couche  optique,  le 
corps  genouillé  interne,  et  le  tubercule  quadri-jumeau  anté- 
rieur du  côté  gauche  présentaient  à leur  superficie  une  co- 
loration d’un  rose  vif,  due  à la  réunion  d’un  grand  nombre 
de  petits  points  roses,  parmi  lesquels  on  en  voyait  ressoriir 
quelques  uns  j>lus  larges  et  plus  foncés.  Cette  coloration  s'éten- 
dait prolondemcnt  dans  presque  toute  l’épaisseur  de  la  couche 
optique  et  dans  le  centre  de  la  protubérance;  on  la  retrouvait 
dans  le  tubercule  (piadri-jumeau  droit  qui  était  blanc  à sa 

sui-lace.  Il  n';)-  avaU  pas  dans  ces  points  d'altération  nppréciuUe 
de  consistance. 


Ods.  22.  — Cliez  un  homme  de  tvente-denx  ans,  mort  dans 
une  ancinie  profonde  , à la  suite  d’bémorrhagies  buccale  et  na- 
sale. on  trouva  l’altération  suivante. 

Le  cervelet  présentait  un  très-grand  nombre  de  petites  taches 

(1)  Dance,  Mémoire  cité,  page  ^32. 


l>FILTn\T10X  SA.RGM NE. 


61 


rosi.s,  rondes,  ayant  .à  peu  près  un  inillimèlre  de  diamètre. 
Klles  occupaient  prescpie  toutes  la  substance  {pise  de  ses  la- 
melles , soit  à leur  surface,  soit  dans  leur  épaisseur  où  elles  sc 
montraient  en  nombre  infini;  il  y en  avait  à peine  cinq  ou 
six  dans  la  substance  médullaire.  Lorsqu’on  cherchait  à en- 
lever une  de  ces  taches  avec  la  pointe  d’un  scalpel , on  ne  dis- 
tinguait aucun  vaisseau  dont  elle  semblât  provenir  : elles  for- 
maient les  unes  une  petite  plaque,  les  autres  comme  un  petit 
globule  rouge  et  assez  dense,  sans  aucune  coloration  de  la 
pulpe  environnante.  11  y en  avait  un  petit  nombre  de  semblables 
dans  le  cerveau , en  particulier  dans  la  substance  blanche.  La 
consistance  du  cerveau  et  du  cervelet  était  partout  normale  (1). 


^ J’ai  observé  des  altérations  analogues  chez  une  aliénée  de  la 
Salpetrierc,  et  M.  Duplay  a également  rencontré  des  pétéchies 
dans  la  substance  cérébrale,  chez  un  homme  mort  de  maladie 
hémorrhagique  (2). 

Ces  laits  se  rapprochent  beaucoup  de  ceux  de  simple  couges- 
üon  où  la  consistance  naturelle  du  tissu  cérébral  est  conservée. 
Seulement  il  y a de  plus  que  dans  la  congestion  , du  sang  sorti 
des  vaisseaux  et  en  contact  immédiat  avec  la  pulpe  nerveuse, 
avec  aquelle  il  s’est  combiné.  L’absence  de  toute  modification 
dans  la  consistance  des  tissus  malades,  démontre  avec  certi- 
tude que  1 infiammation  ne  joue  encore  aucun  rôle  dans  ces  al- 
terations. 

ration  sanguine  avec  augmenialion  de  la  consistance  normale 
du  cerveau. 

Po  d,e,  , ,l  me  bonne  santé  et  ne  présentant  aucune  trace  d’af- 
c ion  ceie  irale , tomba  tout  à coup  sans  connaissance  le  17 
3ep,e.„b,e  1838.  Poctée  aussitôt  à l'inlinnetie . je  la  Umve  u 
bout  de  vingt  minutes  , dans  4’élat  suivant  ; 

drd  e à 

mol  les  '"“  ouverts,  tlirigds  du  tnêtne  côlé  et  im- 

tobiles.  La  respirât, on  est  normale , il  n'j  a pas  eu  de  votnis- 

(t)  li  ochüu,  Hullclinsde  lu  soc.  anal  , 18  tO,  n”  (J. 

(2)  Duphty,  .Irchivcs,  r.  i , 2«  série,  page  178  ’ 1 833. 


62 


ramollissement  aigu.  (anat.  path.) 

sements.  Le  bras  gauche  est  raide,  tout  à fait  immobile,  la  sen- 
sibilité y est  conservée.  La  jambe  droite  est  très-raide,  étendue, 
et  ne  se  laisse  fléchir  qu’avec  beaucoup  de  peine  ; elle  se  relire 
un  peu  quand  on  la  pince,  ou  qu’on  chatouille  la  plante  des 
pieds.  Malgré  ses  efforts  apparents  pour  parler,  la  malade  ne 
peut  proférer  un  son  ; sa  physionomie  est  sans  expression  : 
lorsqu  on  lui  dit  de  montrer  sa  langue , elle  ouvre  la  bouche  , 
mais  sans  la  tirer  au  dehors.  La  bouche  est  légèrement  déviée 
à droite  5 les  pupilles  sont  très-dilatées  et  immobiles.  Elle  meut 
son  bras  droit  qui  n’offre  aucune  raideur.  Deux  heures  après 
elle  agit^  la  tête,  remue  les  yeux , pousse  quelques  plaintes 
inaiticulées  lorsqu  on  l’excite  ; dès  qu’on  la  laisse  en  repos,  ses 
yeux  se  ferment  et  elle  semble  s’assoupir;  le  pouls  est  plein  , 
fort,  légulier  {Saignée  du  bras).  Le  soir,  même  état;  les  pu- 
pilles se  resserrent  à l’approche  d’une  lumière. 

Le  lendemain  elle  demeure  plongée  dans  le  coma,  bien  que 
donnant  de  temps  en  temps  quelques  légers  signes  de  con- 
naissance. Le  troisième  jour  la  raideur  disparaît  au  bras  gau- 
che qui  leste  en  resolution  complété,  et  se  montre  seulement 
à la  jambe  ; elle  est  moins  profondément  engourdie.  Les  jours 
suivants  elle  prononce  quelques  paroles,  remue  un  peu  la 
jambe  gauche , ne  sort  que  par  instants  d’’un  assoupissement 
assez  profond.  Secheresse  de  la  langue,  quelques  vomissements, 
embarras  de  la  respiration , pouls  irrégulier,  plus  faible  ; le 
septième  jour,  elle  tombe  dans  un  coma  complet,  et  meurt  le 
neuvième  au  matin. 

Autopsie.  : Un  peu  de  sérosité  dans  l’arachnoïde.  La  pie- 
mere  est  infiltrée  d une  certaine  quantité  de  sérosité,  un  peu 
plus  à droite  qu  a gauche.  Elle  présente  au-dessus  de  l’hémi- 
sphère droit  une  suffusion  sanguine  qui  lui  donne  dans  pres- 
que toute  son  étendue  une  coloration  rougeâtre  : la  pie-mère 
s’enlève  avec  la  plus  grande  facilité.  Les  circonvolutions  ont 
leur  couleur  naturelle,  et  ne  présentent  rien  à noter  dans  l’hémi- 
sphère gauche.  Du  côté  droit,  celles  de  la  corne  sphénoïdale 
sont  volumineuses,  rougeâtres  et  ramollies,  sans  que  la  pie- 
mère  leur  paraisse  plus  adhérente  qu’aux  autres  points  de  la 
superficie  du  cerveau.  Au-dessous  de  leur  couche  corticale  , la 
substance  blanche  présente  sa  coloration  normale,  seulement 
un  peu  de  mollesse,  et  une  dilatation  notable  de  ses  vaisseaux. 


INriLTRATION  SANGUINE. 


6$ 


A la  partie  interne  et  inférieure  du  lobe  antérieur,  immédiate- 
ment au-dessous  de  la  couche  corticale  des  circonvolutions,  on 
trouve  un  ramollissement  de  couleur  grisâtre , s’étendant  en 
arrière  et  en  dedans  jusqu’à  la  partie  externe  du  corps  strié  , et 
ayant  à peu  près  le  volume  d’une  grosse  noix.  Près  du  corps 
strié  , on  trouve,  au  milieu  de  la  substance  ramollie,  deux 
points,  chacun  du  volume  d’une  noisette,  rouges,  fermes, 
paraissant  formés  par  une  combinaison  intime  du  sang  et  de  la 
substance  cérébrale  , et  offrant  une  ressemblance  remarquable 
avec  les  noyaux  d’apoplexie  pulmonaire.  Ces  infiltrations  san- 
guines sont  parfaitement  limitées  ; la  substance  ramollie  qui  les 
environne  est  seulement  un  peu  jaune  dans  leur  voisinage,  et 
ne  présente  pas  une  vascularité  plus  prononcée  qu’ailleurs. 

Pneumonie  au  second  degré  et  passant  au  troisième,  de  tout 
le  lobe  inférieur  du  poumon  gauche;  engouement  du  poumon 
droit.  Rien  à noter  au  cœur,  si  ce  n’est  un  peu  d’épaississement 
et  une  légère  ossification  de  la  valvule  aortique. 


La  présence  simultanée  de  trois  altérations , les  noyaux  d’in  - 
filtration  sanguine , le  ramollissement  rougeâtre  des  circonvo- 
lutions de  la  corne  sphénoïdale,  le  ramollissement  grisâtre 
de  la  substance  médullaire  sous-jacente,  rendent  ce  fait 
un  peu  compliqué.  11  est  évident  cependant  que  les  acci- 
dents apoplectiformes  du  début  doivent  être  rapportés  à l’in- 
filtration sanguine  en  noyaux,  et  que  le  ramollissement  rou- 
geâtre de  la  couche  corticale  des  circonvolutions  s’est  formé 
consécutivement,  et  peut  servir  à expliquer  l’aggravation  des 
symptômes. 

Il  ne  saurait  y avoir  de  doute  que  pour  le  ramollissement 
grisâtre  plus  profond;  sa  couleur  grisâtre,  qui  ne  se  rencontre 
guère  dans  la  première  période  du  ramollissement  (1),  m’a  fait 
penser  qu’il  pouvait  bien  préexister  aux  autres  altérations,  et 
rentrer  dans  la  classe  de  ces  lésions  latentes  qu’il  est  si  ordi- 
naire de  rencontrer  chez  les  sujets  avancés  en  âge.  Mais  j’avoue 
que  je  ne  crois  pas  pouvoir  affirmer  ce  fait. 

(1)  Si  ce  n est  lorsqu  il  y a suppuration  ; mais  je  ne  pense  pas  qu’il  en  fût 
ainsi  dans  ce  cas. 


6-i  RAMOLLISSEMKVt  aigü.  (a>-at.  patu.) 

Obs.  24.  — Un  jeune  homme  mourut  le  cinquième  jour 
d une  aftcction  fébrile  , ayant  offert  tous  les  signes  d’une  inflam- 
mation enceplialiqnc  (céphalalgie,  insomnie,  délire,  rigidité, 

coma , etc.  ). 

Sérosité  lactescente  dans  la  pie-mère.  Le  cerveau  est  un  peu 
plus  consistant  cju’à  l’état  normal.  Les  couches  optiques  des 
deux  côtés  sont  criblées  d’une  multitude  de  points  noirâtres  qui 
permettent  a pemc  de  distinguer  la  substance  du  cerveau.  Elles 
ressemblent  beaucoup  à une  partie  gangrenée  ou  ecchymoséc  ; 
cependant  la  consistance  normale  a paru  un  peu  augmentée.  Le 
cervelet  est  également  criblé  d’une  infinité  de  petits  points  noirs, 
sorte  d'épanchements  capillaires  bien  plus  prononcés  dans  la 
substance  grise  (1). 


Obs.  2j.  --  Une  femme  de  soixante-dix  ans,  hémiplégique 
a droite  depuis  quatre  ans,  fut  prise  d’une  demi-perte  de  con- 
naissance, avec  paralysie,  raideur  et  insensibilité  du  membre 
gauche.  Les  jours  suivants,  l’intelligence  s’éclaircit,  la  sensibilité 
reparut  dans  le  bras  gauche.  Mais  la  mort  arriva  le  quatorzième 
joui,  avec  les  symptômes  d’un  engouement  pulmonaire. 

Le  cerveau  était  dense  et  répandait  beaucoup  de  sang  sous  le 
scalpel.  Sur  une  circonvolution  de  rhémisphère  droit,  dans  la 
largeur  d’une  pièce  de  dix  sols , pointillé  d’un  rouge  brunâtre 
très-serré  avec  augmentation  de  densité  et  légère  tuméfaction  de 
la  substance  cérébrale.  Aucun  point  de  cette  lésion  n’était  en- 
core décidément  ramolli.  Du  côté  gauche  , altération  ancienne 
que  l’auteur  considère  comme  un  ramollissement  guéri  (2). 


0ns.  26.  — Une  femme  de  soixante  ans  eut,  à la  fin  de  sep- 
tembre 1824,  une  attaque  d’apoplexie,  avec  une  hémiplégie 
droite  incomplète  et  qui  se  dissipa  promptement  à l’aide  d’une 
saignée.  Le  8 octobre,  nouvelle  attaque,  sans  perte  de  connais- 
sance, suivie  d’une  hémiplégie  gauche  qui  devint  graduelle- 
ment complète.  Elle  paraissait  souffrir  dans  le  côté  droit  de  la 

(1)  Ilaspd,  Blcnioirc  sur  le  rainolltssemcnl  de  la  pulpe  nerveuse  ; {Jouni, 
flcsconn.  mecl.-chir,,  r.  ly,  page  182.) 

(2)  Decliaaibre,  Me’.noirc  sur  lu  curubilivc  du  ramollissement  cérébral 
( Gaz,  mdd.,  J 9 mai  183S.) 


lM-lLTr.AïIOJ<  SANGülMi. 


6^ 
O 


tête  ; la  coustipatioii  était  opiniâtre.  Les  forces  diminuèrent  peu 
à peu,  et  la  mort  arriva  le  26  décembre  , après  une  semaine 
passée  dans  le  coma  , dans  laquelle  la  malade  perdit  la  faculté 
d’avaler. 

La  dure-mère  adhérait  solidement  au  cerveau,  vers  le  centre 
et  la  partie  supérieure  de  l’hémisphère  gauche  ; la  substance 
cérébrale  sous-jacente  semblait  plus  ferme  que  dans  l’état  natu- 
rel : incisée,  elle  fut  trouvée  d’un  rouge  vif.  Cette  partie  malade 
avait  environ  un  pouce  et  demi  en  tous  sens  ; la  substance  céré- 
brale environnante  semblait  plus  vasculaire  que  le  reste  du 
cerveau.  Plus  profondément,  dans  le  tissu  cérébral,  on  trouva 
une  portion  malade  , du  volume  d’une  noisette  5 elle  était  d’un 
rouge  plus  foncé  que  l’autre.  Le  corps  strie'  du  meme  côté  était 
d’une  couleur  rouge  presque  purpurine,  son  tissu  était  ramolli  ; 
d .se  présenta  à la  surface  de  l’incision  qui  divisait  cette  partie, 
un  grand  nombre  de  points  vasculaires.  L’hémisphère  droit 
était  sain.  Les  vaisseaux  de  la  surface  de  l’hémisphère  gauche 
et  ceux  qui  rampaient  entre  ses  circonvolutions  étaient  très- 
gorgés  de  sang  , et  même,  dans  quelques-unes  des  circonvolu- 
tions les  plus  profondes , il  y avait  une  légère  apparence  d’ec- 
chymose (1). 


Ces  cas  sont  un  peu  moins  simples  que  les  précédents  , puis- 
qu  ils  nous  ollrent  un  changement  dans  la  consistance  du  tissu  cé- 
rébral. Elle  était  augmentée.  L’induration  primitive  de  la  pulpe 
cérébrale  est  un  fait  trop  important  et  trop  peu  étudié  jusqu’ici, 
poui  que  nous  ne  nous  y arrêtions  pas  quelques  instants. 

Dans  nos  quatre  observations,  l’infiltration  existait  sous  for- 
me de  points  isolés,  ou  de  plaques  à la  surface  du  cerveau,  ou 
de  noyaux  dans  son  intérieur.  Dans  un  cas  la  durée  de  la  mala 
die  avait  été  de  cinq  jours,  dans  un  autre  de  neuf,  dans  le  troi- 
sième de  quatorze  jours,  dans  le  dernier  de  plus  de  deux  mois. 

Ces  dates  si  rapprochées  dans  un  cas  , si  éloignées  dans  un 
autre  , du  début  de  l’altération  , montrent  que  dans  l’infiltra- 
tion  sanguine  , l’induration  peut  d’une  p.art  se  montrer  dès  le 
c ebut , d’une  autre  part  persister  pendant  un  temps  indéler- 
nnne.  Elles  montrent  qu’elle  peut  préexister  au  ramollissement, 
et  aussi  ne  pas  y aboutir  nécessairement. 

())  Abercroaibic,/oo.  cil.  p.  Il2  , Obs.  xxui. 


66 


ramollissement  Aigu.  (anAt.  pAth.) 

Ceüe  espèce  d induration  avait  été  fort  bien  remarquée  par 
M.  Cruveilhier  ; mais  l’attribuant,  à tort,  je  crois,  à l’inflamma- 
tion , il  la  compare  à l’induration  rouge  des  autres  tissus  , pé- 
riode de  leur  inflammation  queM.  Lallemand  dit  être  toujours 
remplacée,  dans  le  cerveau,  par  le  ramollissement.  Il  cite  le  fait 
suivant  (1)  : Ln  homme  sur  lequel  on  n’obtint  aucun  rensei- 
gnement, fut  apporté  dans  un  état  comateux  , ronflement,  su- 
pination, paralysie  du  côté  gauche,  air  hébété  ; il  ne  paraît  pas 
comprendre  les  questions  qu’on  lui  fait,  ou  du  moins  ne  peut 
y répondre.  Il  meurt  au  bout  de  cinq  à six  jours.  Le  lobe  anté- 
rieur gauche  présentait  une  induration  rouge  , au  centre  de  la- 
quelle était  une  substance  molle  , jaunâtre  , parsemée  de  vais- 
seaux sanguins,  qui  occupait  une  grande  partie'  du  lobe  anté- 
rieur. Le  même  auteur  cite  encore  l’ob.servation  suivante , 
empruntée  au  livre  de  M.  Lallemand  lui-même  ( lettre  I,  n"  2). 
IJn  homme  de  soixante-huit  ans  est  apporté  à l’IIôtel-Dieu  dans 
un  état  simulant  une  fièvre  ataxique,  avec  affaiblissement 
des  sens,  délire  sourd,  légère  hémiplégie  à gauche  avec  rigi- 
dité dans  les  muscles  ; respiration  et  pouls  naturels.  Le  malade 
reste  six  jours  dans  cet  état , puis  tombe  dans  le  coma  et  meurt. 
On  trouva  au  milieu  de  l’iiémisphère  droit  une  portion  de  la 
substance  médullaire  réduite  en  putrilage  ; la  circonférence  de 
cette  espèce  de  foyer  était  injectée  , d’un  rouge  amaramhe , en- 
durcie, enflammée. 

Ce  n'est  point  cette  circonférence  qui  était  enflammée  ; tout 
y annonçait  seulement  un  baut  degré  de  congestion  et  d’infil- 
tration sanguines  ; mais  c’était  la  partie  centrale , réduite  en 
putrilage  , qui  avait  réellement  subi  un  travail  inflammatoire. 

Il  ne  sera  peut-être  pas  hors  de  propos  de  rechercher  ici  si 
l’induration  de  la  pulpe  cérébrale  doit  être  réellement  consi- 
dérée comme  une  altération  appartenant  à l’encéphalite  aigue. 
Cette  question  me  paraît  devoir  être  résolue  par  la  négative.  Je 
ne  parle  pas  de  cette  augmentation  légère  de  densité  qu’une 
congestion  cérébrale  intense  ]>eul  déterminer  dans  la  totalité 
du  cerveau,  et  que  M.  Bouillaud  a particulièrement  notée, 
mais  d’une  induration  partielle,  circonscrite  , semblable  à celle 
que  nous  voyons  se  former  dans  les  autres  organes  , semblable, 


(1)  Dittiçnn,  de  mdd.  et  de  chir,  prat  , tome  it.  art.  cité. 


rWFlLTRÀTlON  SA^GÜINE. 


67 


en  un  mot , à celle  dont  les  deux  observations  citées  par 
M.  Cruveilhier  nous  offrent  un  exemple.  On  sait  que  le  profes- 
seur Lallemand  nie  qu’il  puisse  en  êlre  ainsi  , se  fondant  sur 
l’absence  du  tissu  cellulaire  dans  le  cerveau.  Celte  raison  a peu 
de  valeur  , je  crois  , car  la  pulpe  cérébrale  contient  une  assez 
grande  quantité  de  tissu  cellulaire,  comme  le  démontre  souvent 
le  ramollissement  chronique  qui  le  dissèque  et  le  prépare  , pour 
ainsi  dire  , de  la  manière  la  plus  évidente.  Pour  éclairer  cette 
question  , il  suffit  d’en  appeler  à l’observation.  Si  l’inflamma- 
tion aiguë  du  cerveau  , à une  certaine  période  de  son  dévelop- 
pement, s’accompagnait  d’induration  , celle-ci  se  rencontrerait 
souvent  dans  ces  cas  de  plaie  de  tète  , de  méningite,  d’encé- 
phalite , où  la  mort  arrive  avec  assez  de  promptitude  pour  qu’il 
soit  permis  de  saisir  rinflammation  du  cerveau  à sa  naissance  ; 
elle  s’observerait  aux  limites  des  encéphalites  plus  avancées,  car 
on  sait  que,  dans  les  inflammations  partielles  que  l’on  a occa- 
sion d^bserver,  tandis  qu’elles  font  encore  des  progrès , rien 
n’est  plus  ordinaire  que  de  trouver  leurs  degrés  rangés  , si  je 
puis  ainsi  m’exprimer,  les  uns  à côté  des  autres , depuis  la 
simple  congestion  jusqu’à  la  suppuration.  Or,  je  n’ai  rien 
trouvé  de  semblable  dans  les  nombreuses  ob.servalions  rappor- 
tées par  MM.  Lallemand,  Bouillaud,  Rostan  , Andral , non 
plus  que  dans  les  histoires  de  plaies  de  tète  , de  contusions  du 
cerveau,  etc.  Dans  les  cas  nombreux  d’encéphalite  à tous  les 
degrés  que  j’ai  pu  observer  , je  n’ai  jamais  rien  noté  de  ce 
genre.  Enfin,  MM.  Monneret  et  L.  Fleury,  dans  l’excelleiUe 
description  qu’ils  ont  faite  de  l’anatomie  pathologique  de  l’en- 
céphalite aiguë , d’après  les  meilleurs  auteurs  (1),  n’ont  point 
trouvé  de  place  pour  l’induration.  Le  ramollissement,  au  con- 
traiie,  a toujours  été  signalé  comme  le  critérium  de  l’inflam- 
mation (aiguë)  de  la  pulpe  nerveuse  ; ou  ne  voit  point  d’in- 
flaimuation  là  où  il  n’existe  pas  ; enfin  quelques-uns  même  ont 
cru  voir  de  l’inflammation  partout  où  il  se  montrait. 

Il  me  paraît  donc  naturel,  si,  dans  les  cas  rares  où  l’on  a 
vu  une  induration  partielle  et  circonscrite  du  cerveau  se  for- 
mer rapidement , cette  induration  s’est  toujours  trouvée  liée 
à une  infiltration  sanguine  , d’attribuer  cette  induration  , non 

(t)  T«me  m du  Compmdium  de  mdd.  pral.,  «rt.  ENcÉroAutt. 


68  lîAVOLUSSKAltM'  AlGi;.  (\AAT.  X-A-Ill.) 

pas  a 1 lunaiimiatiou  , mais  à l’iiilihraûon  sanjjuino , surtout 
SI,  ans  cl  autres  organes,  nous  voyons  cette  dernière  , indé- 
pem  ante  de  rinaaimnation  , donner  lieu  à un  phénomène  seni- 
Dlable.  ( Apoplexie  pulmonaire.  ) 

On  me  permettra  de  rapporter  ici , à l’appui  de  ma  manière 

de  voir,  le  passage  suivant,  extrait  du  Compendium  de  méde- 
cine pratique  : « Dans  la  première  période  de  l’infiltration  san- 
guine , la  substance  du  cerveau  subit  une  espèce  de  condensa- 
tion, surtout  dans  les  points  où  elle  est  altérée  clans  sa  couleur  : 
elle  semble  avoir  subi  une  légère  induration;  son  tissu  est 

moins  visqueux,  plus  sec ( p.  268).  Nous  avons  vu  que  le 

premier  eflet  de  1 infiltration  sanguine  était  d’augmenter  la  den- 
sité de  la  substance  cérébrale  dans  le  point  où  elle  avait  lieu. 
M.  Ciuveilliiei  legai de  cette  induration  rouge  comme  caracté-  ■ 
risant  seule  la  période  de  rinflammation  de  la  pulpe  cérébrale, 
et  comme  étant  immédiatement  suivie  , sans  aucun  état  anato- 
mique intermédiaire,  de  la  formation  du  pus.  La  plupart  des 
auteurs  pensent  au  contraire,  que  cet  efiet  n’est  que  passager, 
et  que  la  structure  du  cerveau  s opposant,  au-delà  d’une  cei  taine 
limite  , a 1 extension  et  a la  continuation  de  l’infiltration  , le 
sang  infiltré  qui  ne  peut  être  repris  par  le  système  circula- 
toire , ni  instantanément  résorbé  , détermine  au  bout  de  peu  de 
temps  , pai  sa  piesence  , une  diminution  dans  la  consistance  de 
la  pulpe  cérébrale.... (p.  269).  L’observation  démontre,  d’une 
manière  qui  nous  paraît  incontestable  que,  dans  le  cerveau  , 

1 induration  rouge  est  séparée  de  la  suppuration  par  le  ra- 
mollissement, >•  (p.  271).  Il  me  semble  résulter  bien  clai- 
rement de  ce  passage  que  , dans  l’opinion  de  MM.  Monnerct 
et  L.  Fleury  , d une  paît , 1 induration  rouge  primitive  du 
cerveau  est  un  des  caractères  de  l’infiltration  sanguine  ; d’une 
autre  part,  cette  induration  rouge  n^^ppartient  pas  à l’inflam- 
mation. S’il  en  est  ainsi,  la  contradiction  est  flagrante;  et  si 
ces  messieurs  admettent  un  état  anatomique  tout  à fait  prop'e 
à l’infiltration  sanguine,  et  non  point  à l’inflammation  , ils  ne 
peuvent  plus  dire  que  « l’on  n’a  décrit  sous  le  nom  d’apoplexie 
capillaire  ejue  des  altérations  déterminées  , soit  par  une  inflam- 
mation de  la  substance  cérébrale  , soit  par  une  congestion  céré' 
braie  très  intense,  n ( p.  274.)  (1) 


(1)  Article  cite'. 


INriLXlUTlON  SA>(1L'1MK. 


C.  Inliltration  sanguine  avec  diminution  de  la  consistance  normale  du 

cerveau. 

Obs.  27.  — Une  vieille  femme  gâteuse  , à la  Salpétrière  , 
mourut  le  jour  de  son  entrée  dans  les  salles  du  professeur  Cru-* 
veilliier,  sans  avoir  été  observée,  au  mois  d’avril  1839.  Cette 
femme  était  plongée  dans  cet  état  de  torpeur  des  fonctions  sen- 
sitives et  musculaires  , dont  ces  gâteuses  offrent  souvent  des 
exemples.  On  ne  put  avoir  de  renseignements  précis  sur  son 
compte. 

Voici  ce  qu'on  trouva  à l’autopsie  de  l’encéphale.  La  dure- 
mère  est  fortement  tendue  j les  sinus  sont  remplis  par  des 
caillots  rougeâtres  , friables  , quelques-uns  jaunâtres  , et  pré- 
sentant de  petites  masses  assez  semblables  à du  pus  conci'et  ou 
inliltré.  Dans  quelques  points  ces  caillots  sont  adhérents  aux 
parois  des  sinus  , qui  ne  paraissent  pas  elles  - mêmes  al- 
térées. 

L’arachnoïde  ne  contient  presque  pas  de  sérosité.  Les  grosses 
veines  de  la  pie-mère  sont  distendues  par  du  sang  coagulé, 
tout  à fait  semblable  à celui  qui  remplissait  ceux  de  la  dure- 
mère.  La  pie-mère  est  à peine  humide  de  sérosité , mais  infil- 
trée de  sang  de  chaque  côté,  sur  la  partie  moyenne  de  la  con- 
vexité des  deux  hémisphères,  et  latéralement.  On  trouve  à la 
surface  des  circonvolutions  plusieurs  plaques  rouges  disposées 
ainsi  qu’il  suit  : 

A la  partie  externe  et  moyenne  de  la  convexité  de  l’hémi- 
sphère gauche  , on  voit  une  placjue  plus  large  qu’une  pièce  de 
cinq  francs,  mais  non  régulièrement  arrondie.  Cette  placjue  est 
formée  d'un  ])iqueté , ou  phrlôt  d'un  moucheté  noir  très- 
serré , dans  les  intervalles  duquel  la  substance  cérébrale  est 
d’un  rose  faible  ou  d’un  rouge  ponceau  , ou  violacé  ; dans  un 
point,  elle  est  tout  à fait  noire  ; le  sang  infiltré  a presqu’entiè- 
rement  pris  la  place  do  la  substance  cérébrale.  Les  boids  de 
cette  placjue  sont  dessinés  par  une  ligne  \iolette,  d’un  ou  deux 
millimètres  de  large,  sinueuse  et  irrégulière,  et  représentant 
parfaitement  ces  lignes  coloiiéos,  ejui  sur  les  cartes  de  geogra- 
pliie,  indiquent  le  contour  des  îles. 

Lnc  placjue  à px;u  près  semblable  occupe  la  partie  moyenne 
de  l autre  bemisphère.  D’auires  platjues  moins  larges  se  mon- 


70 


RAMOLUSSEUTEIS-T  aigu.  (AlfAT.  PATM.) 

trent  sur  d autres  points  de  la  convexité  des  hémisphères.  Pres- 
que toutes  sont  limitées  par  une  ligne  sinueuse  semblable  à 
celle  que  ] ai  décrite.  Quelques  unes  de  ces  lignes  sont  seule- 
ment formées  par  un  pointillé  fin  et  serré,  disposé  en  forme 
-e  ruban.  Elles  sont  en  général  , d’autant  plus  larges  et  plus 
foncées,  que  la  plaque  est  plus  foncée  elle-même.  Plusieurs  de 
ces  plaques  , étroites  et  placées  au  sommet  d’une  circonvolu- 
tion, présentent  un  pointillé  très-fin,  autour  duquel  la  substance 
cérébrale  est  cà  peine  colorée  en  rose.  Quelques-uns  de  ces 
points  se  trouvent  même  jetés  çà  et  là  sur  des  circonvolutions 
demeurées  saines. 

Les  deux  plaques  les  plus  foncées  présentent  une  espèce  de 
boursouflement  parfaitement  limité  à leur  circonférence.  C’est 
au-dessus  d’elles  surtout  que  la  pie-mère  est  infiltrée  de  sang. 

La  substance  cérébrale  offre  au  niveau  des  plaques  une  mol- 
lesse d autant  plus  grande,  qu’elles-mêmes  sont  plus  intime- 
ment combinées  avec  le  sang  ; en  même  temps  la  pie-mère  pa- 
raît plus  adhérente  et  en  enlève  même  quelque  part  la  super- 
ficie. 

Il  y avait,  en  outre,  un  foyer  hémorrhagique  assez  considé- 
rable, cieuse  dans  1 épaisseur  de  l’hémisphère  gauche,  au-des- 
sous des  circonvolutions  (1). 


Si  je  ne  me  trompe , la  présence  du  sang  en  nature  dans  la 
substance  cérébrale,  dont  il  avait,  dans  quelques  poinis, 
piesque  enlieieinent  pris  la  place,  et  d’ou  il  s'était  répandu 
dans  la  pie-mère,  ces  plaques  circonscrites,  ces  lignes  bien  des- 
sinées, ces  poinis  épars,  constituent  des  altérations  que  l’on  ne 
saurait  rapporter  à rinflainmation , et  dans  lesquelles  on  ne 
peut  voir  que  du  sang  purement  et  simplement  infiltré-  Il  y 
avait , il  est  vrai , du  ramollissement,  mais  il  ne  me  paraît  être 
que  le  résultat  mécanique  de  l’interposition  du  sang  entre  les 
molécules  cérébrales,  et  son  intensité  se  trouvait , sur  chaque 
point,  en  rapport  avec  la  quantité  de  sang  infiltré. 

Obs.  28.  — Femme  de  soixante-neuf  ans.  Tout  à coup  perle 
de  connaissance,  stertor,  écume  à la  bouche,  résolution  com- 


(t  ) M.  Cruveilhier  ayant  emporté  ce  cerveau  pour  le  faire  dessiner,  je  n’ai 
pu  l’étudier  dans  ses  parties  profondes. 


INFItTRÀTIOIÏ  SANCmiNE.  <* 

plète  du  bras  droit,  rigidité  du  bras  gauche,  état  analogue  des 
jambes.  Quelques  contractions  spontanées  à gauche  ; insensibi- 
lité absolue.  Mort  trente-six  heures  après. 

La  substance  grise  de  toutes  les  circonvolutions  et  anfractuo- 
sités occipitales,  de  la  convexité  de  l’hémisphère  gauche  à l'ex- 
ception des  circonvolutions , présente  la  couleur  hortensia  vio- 
lacée. Elle  a subi  un  ramollissement  mou  , qui , toutefois,  n’est 
pas  porté  jusqu’à  la  diffluence;  aussi  les  méninges  ont-elles  pu 
être  enlevées  sans  déchirement  de  la  substance  cérébrale.  Mais 
l’immersion  dans  l’eau  , le  moindre  contact  suffisent  pour  dé- 
tacher la  couche  superficielle  ramollie.  La  substance  grise  du 
corps  strié  avait  également  subi  le  ramollissement  violacé. 
Même  altération  de  la  superficie  de  trois  ou  quatre  circonvolu- 
tions de  la  convexité  de  rhémisphère  droit.  La  substance 
blanche  au-dessous  est  plus  abond.a murent  pénétrée  de  sucs, 
comme  œdémateuse  et  d’un  œil  jaunâtre  (1). 

Des  cas  semblables  sont  à coup  sûr  beaucoup  plus  difficiles  à 
interpréter  que  les  précédents.  Si  le  ramollissement  est  le  ca- 
ractère spécial  de  l’inffammation  de  la  pulpe  cérébrale , ne 
faut-il  pas  attribuer  à cette  dernière  la  diminution  de  consis- 
tance que  nous  trouvons  notée  dans  ces  observations , et  les 
, faits  de  ce  genre  ne  doivent-ils  pas  rentrer  dans  la  classe  des 
ramollissements  aigus  précédemment  étudiés?  Mais  si  l’on 
songe  qu’il  est  une  série  de  faits  où  la  conservation  ou  bien  la 
simple  augmentation  de  la  consistance  normale  du  cerveau  , 
dans  les  points  infiltrés  de  sang,  ne  permet  d’attribuer  aucune 
part  à l’inflammation  dans  la  production  de  cette  infiltration  ; 
que  dans  les  deux  exemples  qui  précèdent , le  cerveau  offrait 
évidemment  bien  plutôt  une  apparence  d’hémorrhagie  cjue  d’in- 
flammation ; que  la  diminution  de  consistance,  par  le  lait  d’une 
simple  infiltration  , peut  fort  bien  s’expliquer  par  la  séparation 
des  molécules  nerveuses  auxquelles  le  sang  vient  s’interposer; 
on  ne  refusera  ]>as,  sans  doute,  d’admettre  au  nombre  des  infil- 
trations sanguines  simples  , des  cas  où  il  existe  une  certaine  di- 
minution de  consistance. 

Si  le  ramollissement  s’étend  au-delà  des  limites  précises  de 

(t)  Cruveilhier,  ylnat.  pulhol,^  20*  livraison. 

P' oyez  aussi  les  Observations  des  mémoires  de  M.  Diday,  de  M Bra- 
vais, etc. 


- ■AMou.issnuai  a, eu, 

l'ùrtoÀu  ^ cdlcc: 

Z..  O »“  ™ 

iîstanc  e il  7 diminution  de  cou- 

ramollisÀe  ^ P'olntbilné  que  l’on  aura  affaire  à un 

•.•0™^  X ’ ‘■“'■■"P^lind  d’inQllraiion  san- 

„ c,  est-a  dire  a une  affection  inflam.natoive  et  non  nas  une 

ftcction  simplement  hémorih.sgique;  mais,  si  au  contraire  la 
dnninution  de  consistance  est  légère  et  tout  à fait  limitée  è l’i,'. 
(il  latioii  sanguine,  s'il  n’y  a aucune  adhérence  des  méninges 

s;  les  parues  environnantes  paraissent  tout  à fait  saines,  iU,è 

s agira  sans  doute  que  d’une  infiltration  sanguine  simple  et  pri- 

mttive , eoinnie  dans  les  cas  où  la  consistance  du  cerveau  est  de- 
meui’ee  normale. 

^ Je  regarde  l’infiltration  sanguine  , telle  qu’elle  s’est  présentée 
a nous  dans  les  observations  précédentes,  comme  le  résultat 
dune  congestion  sanguine  accompagnée  de  la  rupture  de 
quelques  vaisseaux.  Voici  de  quelle  manière  elle  lui  succède  • 
Lorsqu’une  congestion  se  lait  dans  le  cerveau , quelque  in- 
tense qu  elle  .soit , le  sang  peut  demeurer  dans  les  vaisseau.x  sans 
en  sortir  et  alors  si  la  mort  n’arrive  pas  immédiatement,  les  ac- 
cidents disparaîtront  aussitôt  que  le  sang  aura  repris  son  cours 
et  II  ne  restera  aucune  trace  de  la  maladie;  mais  lorsqu’elle 
existe  a un  certain  degré,  ou  qu’elle  se  fait  d’une  certaine  ma- 
niéré, ou  pour  inieux  dire,  lorsqu’elle  trouve  le  cerveau  dans 
certaines  conditions,  les  vaisseaux  se  rompent  et  il  en  résulte  ou 
une  hemoiTliagie  en  foyer,  ou  une  infiltration  sanguine.  Je  crois 
que  cet  efïet  différent  tient  à ce  que,  dans  un  cas,  il  y avait  déjà 
maladie  du  tissu  cérébral  ou  de  ses  vaisseaux  , tandis  que  dans 
1 autre , il  n’y  avait  aucune  altération  antécédente.  Mais  je  me 
contente  d’énoncer  cette  proposition , si  l’on  veut  même  d’une 
maniéré  douteuse  , parce  que  je  ne  veux  pas  m’engager  ici  dans 
une  discussion  en  quelque  sorte  étrangère  à mon  sujet,  et  qui 
poumnt  nous  mener  trop  loin.  Ce  qui  se  passe  dans  le  cerveau 
lorsqu  à la  suite  d’une  violente  fluxion , les  vaisseaux  se  rom- 
pent et  laissent  le  sang  s’infiltrer,  s’observe  aussi  dans  d’autres 
organes,  en  particulier  dans  les  poumons,  lorsqu’à  la  suite  d’un 
accès  de  colère,  on  voit  des  individus  rejetter  le  sang  par  la 
bouche,  et  .succomber  atteints  d’apoplexie  pulmonaire,  quelque- 
fois même  pe'rir  instantanément  et  avant  que  le  sang  ail  pu  se 


1NFI.AMM,\.T10X. 


73 

faire  jour  au  dehors,  si  l’infiltrallon  sauguine  est  très-étendue  (1). 
Remarquons  du  reste  que  Y infiltration  est  presque  le  seul  mode 
d’hémorrhagie  des  organes  parenchymateux  autres  que  le  cer- 
veau. 

Le  sang  une  fois  infiltré  dans  la  substance  cérébrale , il  se  dé- 
veloppe en  general  de  l’inflammation  à l’enlour  de  lui.  Cette  in- 
flammation peut  se  former  de  deux  manières  : soit  que  la  con- 
gestion , inflammatoire  dès  sou  principe , suive  sa  marche  qui 
la  conduit  naturellement  à l’inflammation  , soit  que  le  sang  y 
agisse  comme  corps  étranger  et  irrite  le  tissu  qui  le  retient. 

Une  fois  l’inflammation  développée,  l’infiltration  sanguine 
n’est  plus  en  général  qu’une  altération  secondaire,  et  son  étude 
rentre  dans  celle  de  l’encéphalite , du  ramollissement  dont  elle 
suit  les  périodes  successives. 

Les  observations  de  ramollissement  aigu  accompagné  d’infil- 
tration sanguine,  rapportées  dans  cet  ouvrage,  montrent  les  di- 
vers aspects  que  revêt  cette  dernière,  lorsqu’elle  se  trouve  mêlée 
au  ramollissement,  et  peuvent  être  utilement  comparées  aux 
observations  que  nous  venons  de  présenter  comme  exemples 
d’infiltration  sanguine  simple  et  non  inflammatoire. 

§ III.  Inllaniniation. 

Une  altération  qui  débute  toujours  par  une  congestion  ou 
une  infiltration  sanguine,  cjui  se  caractérise  essentiellement  par 
du  ramollissement  et  s’accompagne  souvent  de  tuméfaction  , 
d’adhéi’ences,  etc.,  ne  saurait  être  considérée  autrement  que 
comme  une  inflammation , d’après  les  idées  que  l’on  attache 
généralement  à ce  mot. 

Celte  proposition,  qui  ne  saurait  être,  je  pense , le  sujet 
d’une  discussion  sérieuse,  nous  permet  d’établir  la  suivante  : le 
ramollissement  cérébral  est  une  maladie  de  nature  inflamma- 
toire , puisque  dans  la  période  d’acuité,  il  présente  l’ensemble 
des  phénomènes  qui  caractérisent  l’inflammation. 

Ici  il  importe  de  bien  s’entendre,  et  afin  d’éviter  toute  confu- 
sion , je  reviendrai  sur  ce  que  j’ai  établi  dans  les  premières  pages 
de  ce  travail. 

(t)  Ollivic.r  d’Angers,  Archives^  tome  i,  2e  scric,  — Alpli,  Devcrgie,  huU, 
<h  VAcml.  (h  nuiil,  12  juin  ISIH. 


74 


«amollissimknt  aigu.  (awat.  path.) 

Je  n entends  pas  étudier  ici  le  ramollissement , pris  comme 
synonyme  de  diminution  de  consistance  de  la  pulpe  nerveuse  : 
je  veux  parler  de  cette  maladie  qui  a été  déjcà  maintes  fois  étu- 
diée sous  le  nom  de  ramollissement  cérébral,  parce  que  la  mol- 
lesse du  tissu  du  cerveau  en  a paru  au  premier  abord  le  carac- 
tère le  plus  frappant  ; qui , se  montrant  à tous  les  âges  de  la  vie 
est  surtout  commune  dans  un  âge  avancé,  dont  lès  premièreè 
descriptions  enfin  ont  été  faites  dans  des  hospices  de  vieillards. 
Ceci , je  crois,  pose  nettement  la  question  , et  je  puis  dire,  avec 
la  certitude  d’être  compris  : 

Le  ramollissement  cérébral , le  ramollissement  qu’on  observe 
spécialement  chez  les  vieillards,  est  une  encéphalite;  je  ne  crois 
pas  que  l’on  puisse  admettre  la  division  du  ramollissement  blanc, 
et  du  ramollissement  rouge  ; je  nie  qu’il  puisse  être  considéré 
comme  une  altération  essentiellement  liée  aux  progrès  de  l’âge, 
comme  le  résultat  de  la  diminution  de  la  circulation  , comme 
une  lésion  sui  generis,  etc.;  je  crois  que  tous  les  faits  présentés 
dans  ce  sens  doivent  être  rapportés  à rinflammation , et  j’espère 
le  démontrer. 

Non  pas,  remarquez  bien,  que  je  nie  qu’il  soit  possible  que 
le  cerveau  vienne  a se  ramollir  sous  quelque  influence  autre  que 
1 inflammation  ; mais  je  dis  que  les  cas  de  ce  genre  sont  tout  ex- 
ceptionnels. complètement  en  dehors  de  la  grande  classe  de 
faits  auxquels  je  fais  allusion,  qu’ils  n’appariiennent  pas  à la 
maladie  observée  par  M.  Rostan  et  connue  sous  le  nom  de  ra- 
mollissement cérébral...  Aux  résultats  de  mon  observation  gé- 
nérale que  j’essaie  d’exposer  dans  ce  livre  , il  faudrait  opposer 
une  série  de  faits  contradictoires  ; je  dis  une  série,  car  un  fait 
unique  que  l’on  exhumerait  à grand-peine  d’un  cahier  d’obser- 
vations , se  récuserait  de  lui-même.  Il  n’est  à peu  près  aucune 
donnée  générale  en  pathologie,  à laquelle  il  ne  soit  pas  possible 
d’opposer  quelques  contradictions  isolées  : s’arrêter  à chacune 
de  ces  dernières , ce  serait  renoncer  à dogmatiser  la  science. 
Lorsqu’une  proposition  s’appuie  sur  un  certain  nombre  de  faits 
qui  se  lient  et  s’enchaînent  ensembe  , il  n’est  généralement  per- 
mis de  lui  opposer  qu’un  autre  ordre  de  faits,  également  réunis 
par  une  observation  multiple  et  intelligente  ; et  remarquez  bien 
qu’il  ne  s’agit  pas  ici  de  chiffres , de  statistique , mais  simple- 


IMFLAMMATIOtf. 


7S 


ment  de  l’emploi  des  premiers  éléments  indispensables  pour  ap- 
puyer une  idée  générale. 

Ainsi , que  l’on  me  démontre  que  les  doutes  que  j’exposerai 
plus  loin  sur  l’existence  d’un  ramollissement  piimitivement 
blanc,  ne  sont  pas  conformes  à l’observation,  que  l’on  me  cite 
des  exemples  authentiques  de  cette  espece  de  ramollissement 
que  je  n’ai  jamais  rencontrée,  je  suis  très-disposé  a reconnaître 
que  mon  observation  est  demeurée  incomplète  sur  ce  point , et 
que  les  cas  de  ce  genre  sont  plus  certains  ou  un  peu  moins  rares 
que  je  ne  pensais  : mais  je  ne  verrais  nullement  dans  ce  fait  la 
preuve  que  j’aie  eu  tort  d’avancer  que  le  ramollissement  des 
vieillards  est  une  encéphalite;  sur  ce  point,  je  n’accepterais 
l’argumentation  que  sur  les  faits  contenus  dans  cet  ouvrage  , 
presque  tous  observés  chez  des  vieillards,  ou  encore,  par 
exemple,  sur  ceux  rapportes  par  M.  Rostan  et  par  M.  Andral  : 
il  ne  s’agirait  pas  de  me  démontrer  qu’il  existe  quelques  faits 
dont  je  n’ai  pas  eu  connaissance,  et  qui,  par  exception,  ne  rentre- 
raient pas  dans  la  grande  classe  de  faits  que  j ai  lente  de  dogmati- 
ser ; il  faudrait  prouver  que  la  doctrine  que  je  soutiens  est  enta- 
chée d’erreur,  et  que  je  me  suis  trompé  sur  la  nature  des  laits  que 
j’y  ai  soumis. 

Poursuivons  donc  l’examen  des  faits,  car  c’est  d’eux  seuls 
que  l’on  doit  attendre  la  justification  des  propositions  que  je 
viens  d’émettre. 

Or  les  faits  nous  apprennent  que  le  ramollissement  aigu  est 
essentiellement  caractérisé  par  la  rougeur  des  parties  ramollies, 
et  le  ramollissement  chronique  par  l’ahsence  de  rougeur. 

Ces  deux  faits  sont  en  quelque  sorte  la  clé  de  l’histoire  du 
ramollissement  ; occupons-nous  d’abord  de  les  bien  constater,  et 
cherchons  à apprécier  la  valeur  des  exceptions  qu’ils  présentent, 

11  est  difficile  d’assigner  des  limites  très-précises  au  passage 
du  ramollissement  aigu  à l’état  chronique  ; il  est  dans  le  cer- 
veau comme  dans  les  autres  organes,  des  lésions  qui  bien,  que 
de  même  nature,  tantôt  marchent  avec  lenteur,  tantôt  parcou- 
rent leurs  périodes  avec  une  giande  rapidité.  Cependant  pre- 
nant pour  limite  l’espace  qui  sépare  le  vingtième  du  trentième 
jour,  on  peut  dire,  relativement  à la  rougeur,  qu’il  est  fort  rare 
qu’elle  disparaisse  avant  le  vingtième,  ou  qu’elle  se  montre 
au-delà  du  trentième. 


7G  ®AMOI,LISSf,XIE«T  AIGU,  (AXAT.  PATn.) 

On  se  rappelle  quels  sont  les  caractères  de  celle  rougeur- 
formée  par  une  simple  injection  , ou  par  une  infiltration  san- 
guine, ou  par  une  coloration  uniforme  , ou  des  marbrures  iso- 
lées J très-vive  ou  peu  prononcée  ; occupant  une  partie  ou  la 
totalité  de  l’altéralion  ; mais  quelle  qu’en  soit  la  forme  ou  l’in- 
tensité, nous  la  retrouvons  toujours,  comme  trace  de  la  con-r 
gestion  sanguine  qui  nous  paraît  l’origine  constante  du  ramollis- 
sement. 

Il  y a des  cas  cependant  où  un  l'amollissement  aigu  se  montre 
sans  lougeui.  Dans  ces  cas,  tantôt  on  trouve  une  coloration 
jaune,  tantôt  de  la  suppuration. 

Nous  savons  maintenant  que  la  coloration  jaune  de  la 
substance  cérébrale  est  l’indice  certain  de  la  présence  du 
sang  à une  époque  quelconque,  dans  le  point  colore  : lors 
donc  que  nous  rencontrerons  un  ramollissement  aigu  avec 
une  teinte  jaune  , nous  en  conclurons  nécessairement  qu’il  était 
infiltré  ou  injecté  de  sang  à son  début  (l). 

Lorsqu’un  ramollissement  vient  à suppurer,  il  est  très-rare 
qu’il  conserve  sa  rougeur,  et  cependant  il  est  impossible  qu’il 
n’en  ait  pas  présenté  au  commencement,  puisque  l’idée  de  sup- 
puration est  inséparable  de  celle  de  la  congestion  sanguine 
qu’entraîne  nécessairement  avec  elle  toute  inflammation.  Le 
cerveau  présente  cela  de  commun  avec  d’autres  organes,  et 
rien  n’est  plus  ordinaire  que  de  voir  une  pneumonie  , au  bout 
de  peu  de  jours,  lorsqu’elle  est  passée  à l’état  d’hépatisation 
grise,  ne  plus  offrir  aucune  trace  de  la  rougeur  qui  y était  si 
vive  à son  début, 

\oici  donc  deux  exceptions  apparentes  qui  rentrent  dans  la 
règle  que  j’ai  établie  : mais  il  n’est  pas  toujours  facile  d’appré-  ' 
cicr  si  les  faits  rapportés  par  les  auteurs  y peuvent  être  rame- 
nés, car  d’une  part  on  voit  souvent  noter  l’absence  de  rougeur 
d’un  ramollissement,  sans  qu’il  soit  indiqué  s’il  offre  ou  non 
quelqu’autre  coloration  ; et  d’un  autre  côté  les  cararteres  de  la 
suppuration  sont  loin  d’etre  toujours  clairement  definis  (1). 

Rcste-t-il  maintenant  des  cas  de  ramollissements  aigus,  sans 
rougeur,  sans  coloration  jaune  et  sans  suppuration  ? Je  consa- 

(I  ) V oy.  Cil.  I,  § III,  Une  étude  de  la  couleur  jaune  dans  le  cerveau. 

(2)  Un  me'decin  allemiuid  , M.  Fuclis , prétend  que  l’on  doit  conside'rcr  le 


I 


INFLAMMATION. 


77 


crerai  un  chapitre  parilculier  à l’exainen  de  celte  question,  et 
à l’étude  des  faits  qui  ont  été  présentés  comme  tels  : quanta 
moi,  je  déclare  que  je  n’en  ai  jamais  rencontré. 

J’ai  dit  que  le  ramollissement  chronique  était  caractérisé  jiar 
l’absence  de  rougeur  (I). 

On  ne  découvre  souvent,  dans  les  ramollissements  anciens , 
aucune  trace  de  vascularisation;  dansla  plupart  cette  dernière  est 
infiniment  peu  prononcée  ; quelques-uns  cependant  présentent 
des  vaisseaux  nombreux  et  bien  développés.  Il  ne  paraît  donc 
y avoir  rien  d’impossible  à ce  qu’on  y trouve  c|uelquefois  une 
rougeur  plus  ou  moins  analogue  à celle  qui  se  rencontre  cons- 
tamment dans  le  ramollissement  aigu  ; le  fait  est  cependant  in- 
finiment rare,  comme  on  va  le  voir  par  les  relevés  suivants,  et 
le  petit  nombre  d’exceptions  qui  se  présentent  encore  à cette 
règle,  ne  diminuent  en  rien  l’importance  que  nous  avons  cru 
devoir  lui  attacher. 

Afin  que  l’on  puisse  apprécier  immédiatement  la  valeur  des 
propositions  que  je  viens  d’émettre,  je  vais  exposer  les  résultats 
que  donne,  sous  ce  point  de  vue,  l’analyse  de  mes  observations, 
de  celles  de  M.  Rostan,  de  M.  Andral,  de  la  première  lettre  de 
M.  Lallemand  et  du  mémoire  de  M.  Raikem  ; ce  cpii  donne  une 
masse  de  plus  de  deux  cents  observations. 


ramollissemcni  grisâtre  comme  la  forme  primitive  ; le  ramollissement  rou- 
geâtre doit  être  regardé  comme  compliqué  avec  la  congestion.  Suivant  lui, 
la  rougeur  ne  résulterait  jamais  d une  injection  vasculaire,  mais  seulement 
d’une  extravasation  du  sang.  Les  différentes  couleurs  du  cerveau  doivent 
ctre  atitibiiecs  au  sang  cpanclic  , qui  subit  les  memes  mélamorpboses  que 
dans  les  cccliymoscs.  G est  aussi  la  cause  qui  fait  que  le  cerveau  ramolli  est 
blanc  dans  les  cas  qui  liiiissent  par  une  mort  subite,  et  qu’il  se  trouve  co- 
loré si  la  mort  est  lente.  L’auteur  qui  rejette  toujours  l’inllainmation  comme 
cause  du  ramollissement,  regarde  la  douleur  , etc.,  comme  réaction  des  par- 
ties saines.  Ce  travail  serait  fait  d’après  les  propresobservations  de  M.  Fuchs. 
Il  est  impossi’olc  de  rien  trouver  de  plus  opposé  que  les  conclusions  de  ce 
travail,  arec  ce  que  j’ai  vu  et  ce  qui  paraît  avoir  été  généralement  observé 
en  France.  ( Bcobachlungcn  über  Geliivnenvcichung.  Leipz.,  1838, Ex- 

trait des  Arohh>e.i  gén.  de  me'd.,  juin,  I 840,  page  219. 

(1)  -M.  Carswell  dit,  en  termes  exprès  : « Lorsipie  la  rougeur  qui  accom- 
pagne le  raraollissemenl  vient  de  la  présence  de  sang  épanché,  on  peut  être 
certain  que  le  ramollissemcut  est  de  date  réçcule.  » ( The  cyclop.  ofpracl. 
med.  T.  iv,  page  o.) 


78 


ramollissement  aigu.  (anat.  patm.) 

Parmi  les  trente  premières  observations  de  l’ouvrage  de 
M.  Rostan , la  couleur  du  ramollissement  n’est  indiquée  que 
dix-sept  fois  : neuf  fois  il  y avait  de  la  rougeur,  huit  fois  une 
couleur  dilférenle. 


Voici  l’indication  de  chacun  de  ces  faits  ; nous  commencerons 
par  ceux  où  l’on  a noté  de  la  rougeur;  tous  paraissent  avoir  suivi 
une  marche  aiguë. 


Obs.  XI.  — Une  femme  chez  laquelle  on  n’avait  jamais  rien 
remarqué  qui  pût  indiquer  une  affection  du  cerveau , tomba 
tout  à coup  dans  un  coma  profond  avec  raideur  des  bras , et 
mourut  le  troisième  jour. 


Obs.  XV.  Une  femme  venait  d’être  traitée  pour  une  pé~ 
ricardite , pendant  laquelle  on  n’avait  rien  observé  du  côté  du 
cerveau.  Elle  fut  prise  subitement  d’hémiplégie  , et  mourut  le 
lendemain. 


Obs  xviii.  — Une  femme  était  entrée  à l’inSrinerie  pour 
une  gastrite  chronique  sans  rien  de  cérébral.  Tout  à coup  hé- 
miplégie droite  , mort  le  surlendemain. 

Obs.  xxiii.  — Point  de  symptômes  antérieurs.  Perte  de 
connaissance,  hémiplégie  droite.  Mort  le  sixième  jour. 

Obs.  XXVI.  — Perte  de  connaissance,  hémiplégie,  mort  le 
surlendemain.  Les  renseignements  n’indiquent  que  de  la  diffi- 
culté à mouvoir  les  jambes,  ce  que  la  malade  attribuait  à d’an- 
ciennes attaques  de  goutte. 

Obs.  IX.  — Céphalalgie  depuis  longtemps.  Perte  subite  de 
connaissance,  hémiplégie.  Mort  au  bout  de  huit  jours. 

Obs.  VII.  — Toul-à-coup  céphalalgie,  déliré,  puis  coma,  in- 
sensibilité et  résolution  générale.  3Iort  au  bout  de  24  heures. 

Obs.  X.  — Il  y a quatre  ans , hémiplégie  gauche  complète- 
ment dissipée  au  bout  d’un  mois.  Depuis  lors,  sujeite  aux  ver- 
tiges. Tous  les  ans  elle  éprouve  une  congestion  cérébrale  avec 
perte  de  connaissance.  Depuis  quelque  temps  l’intelligence  fal- 
blii  ; cependant  elle  est  toujours  gaie  et  ne  se  plaint  jamais. 
Perte  subite  de  connaissance  , suivie  d’hémiplégie  gauche  avec 
contracture;  mort  au  bout  de  seize  jours. — Traces  d’ancien 
épanchement  dans  la  substance  blanche  et  le  cervelet.  Couche 
optique  en  bouillie  ; substance  environnante  rose  et  injectée  ; 
substance  corticale  rosée  (du  côté  droit).— Il  me  parait  certain 


INFLAMMATION. 


79 


que  les  accidents  qui  ont  terminé  la  vie  de  cette  femme  étaient 
de  même  nature  que  ceux  qui  lui  survenaient  au  bout  de  chaque 
annéej  seulement,  plus  intenses  celte  fois,  ils  ont  été  au-delà 
de  la  simple  congestion , et  ou  a trouvé  du  ramollissement. 

Obs.  XIV.  — Altération  de  l’intelligence,  paral^ysie  gra- 
duelle du  bras  gauche  5 mort  le  quinzième  jour.  — Il  y avait 
un  ramollissement  jaunâtre  de  l’hémisphère  droit , mais  la  sub- 
stance corticale  offrit  des  marbrures  rouges. 

Cas  dans  lesquels  il  n’y  avait  point  de  rougeur. 

Obs.  I.  — Depuis  un  an,  engourdissements  et  affaiblissement 
des  membres  inférieurs;  affaiblissement  de  l’intelligence...., 
bouillie  grisâtre  à la  superficie  du  cerveau. 

Obs.  V. — Depuis  plusieurs  mois,  la  malade  se  servait  *du 
bras  gauche  préférablement  au  bras  droit , ce  qu’elle  ne  faisait 
pas  auparavant.  Mort  à la  suite  d’accidents  aigus.  — Ramollis- 
sement avec  aréole  jaunâtre  du  corps  strié  gauche.  C’est  surtout 
cette  disposition  aréolaire  du  ramollissement  qui  annonce  ana- 
tomiquement son  ancienneté. 

Obs.  VI.  — Ancienne  attaque  d’apoplexie,  depuis  laquelle  la 
malade  éprouve  souvent  de  vives  douleurs  avec  perte  des  mou- 
vements dans  le  bras  droit. — Dans  l’hémisphère  gauche,  trace 
d’ancien  épanchement , entouré  d’un  ramollissement  jaune- 
verdâtre,  grisâtre  à sa  circonférence. 

Obs.  XII. — Démence  sénile  , hémiplégie  ancienne.  — Dou- 
ble ramollissement  jaune. 

Obs.  XXI.  — Incertitude  sur  le  début.  — Ramollissement 
jaunâtre  à l’entour  d’un  ancien  kyste. 

Obs.  XXIV.  — Absence  de  tous  renseignements.  — Ramollis- 
sement jaunâtre. 

Obs.  XXVIII.  — Accidents  datant  de  vingt  jours  , mais  surve- 
nus chez  une  aliénée  paralytique. — Couleur  brune  noirâtre 
du  ramollissement. 

Obs.  xvi.  — Mort  auboutd^une  quinzaine  de  jours  ; ( cause 
traumatique).  — Ramollissement  jaune-verdâtre,  paraissant 
contenir  du  pus. 

Sur  les  trente-trois  observations  rapportées  par  M.  Andral 
dans  sa  clinique,  on  trouve  de  la  rougeur  notée  douze  fois.  Je 
vais  indiquer  rapidement  chacune  de  ces  observations. 


80 


iîAmolljssement  Aigu.  (anat.  patit.) 

Ohs.  — Mort  le  troisième  jour. 

Obs.  xr.  Mort  vers  le  seizième  jour. 

Obs.  xin . Mort  au  bout  de  vingt  jours. 

Obs.  XXII.  — Mort  le  septième  jour, 

Obs.  XXV.  Moitié  troisième  jour. 

Obs.  XXVI.  — Mort  le  treizième  jour. 

Obs.  XXVII.  — Mort  au  bout  de  peu  de  jours. 

Obs.  xxviii.  — Mort  le  deuxième  jour. 

Obs.  XXIX.  — Mort  le  troisième  jour. 

Dans  1 observation  x , la  mort  arriva  au  bout  de  deux  mois. 
Un  des  lobes  antérieurs  se  trouvait  réduit  en  une  bouillie  sem- 
blable à du  lait  caillé  contenu  dans  du  petit  lait  non  clarifié. 
Voici  un  ramollissement  bien  évidemment  chronique.  La  sub- 
stance grise  était  convertie  en  une  substance  d’un  blanc  sale  , 
légèrement  rosée.  11  est  probable  que  l’altération  de  la  superfi- 
cie était  plus  récente  que  celle  de  la  substance  médullaire  : 
cependant , il  faut  noter  que  le  sujet  de  cette  observation  a suc- 
combé à une  eschare,  sans  avoir  présenté  de  phénomènes  céré- 
braux dans  les  derniers  temps  de  sa  vie. 

Obs.  XII. — Hémiplégie  droite  graduelle  depuis  plusieurs  mois. 
Quelques  jours  avant  la  mort, délire,  mouvements  tétaniques 
a gauche  suivis  de  paralysie. — llamollisseinent  de  couleur  cho- 
colat eu  dehors  de  la  couche  optique  gauche  j dans  le  lobe  an- 
térieur, ramollissement  en  bouillie  rosée,  au-dessus  duquel  l’a- 
l'achnoide  était  d’un  rouge  intense^  ramollissement  d’un  jaune 
rougeiàtre  dans  le  corps  strié  droit.  — Il  est  naturel  de  rapporter 
l’hémiplégie  ancienne  au  ramollissement  chocolat , et  les  ac- 
cidents recents  aux  ramollissements  rosés.  Le  siège  même  de  ces 
lésions  est  en  rapport  avec  cette  interprétation. 

0ns.  XXXI II.  — Hémiplégie  gauche  survenue,  il  y a un  an  , 
par  degrés,  et  sans  perte  de  connaissance.  — Trois  ramollisse- 
ments rougeâtres  dans  les  hémisphères.  — Ici  il  u’y  a pas  à 
douter  de  la  date  de  ces  altérations,  et  c’est  le  premier  fait  qui 
nous  présente  un  exemple  évident  de  ramollissement  chronique 
avec  couleur  rougeâtre. 

Dans  les  treize  cas  suivants,  il  n’y  avait  point  de  rougeur  et 
la  marche  de  la  maladie  fut  évidemment  chronique  » 

0ns.  I.  — Ramollisseinentblanc  sale, — ramollissement  latent. 

ÜBSi  U.  — llamollissemenl  blanc , — ramollissemenl  latent. 


TNfLASiMATXO». 


81 


Obs.  III. —Ramollissement  blanc  sale, —ramollissement  latent. 

Obs.  VI.  — Ramollissement  blancliûtie,  - trente-cinq  jours. 

Obs.  vu.  — Ramollissement  jaunâtre,  — trente  jours. 

Obs.  viii,  — Ramollissement  jaunâtre,  — plusieurs  mois. 

ÜBS.  IX.  — Ramollissement  blanc  grisâtre,  — de  deux  à trois 
mois. 

Obs.  XIV.  — Ramollissement  gris  sale,  — trente-cinq  jours. 

Obs.  XV.  — Ramollissement  gris  et  jaunâtre,  — un  an. 

Obs,  XVI.  — Ramollissement  blanchâtre,  — > huit  mois. 

Obs.  XVII.  — Ramollissement  gris  sale, — ancien. 

Obs.  XIX.  — Ramollissement  grisâtre,  — deux  ans. 

Obs.  xxiit.  — Ramollissement  jaunâtre, — quarante-sept 
jours. 

Deux  fois,  observation  iv,  ramollissement  latent,  et  obser- 
vation xxxii,  ramollissement  de  trois  ans,  on  a note  seulement 
l’absence  de  rougeur. 

Dans  l’observation  xxx , ramollissement  gris,  on  n’a  eu  au- 
cun renseignement  sur  le  début  de  la  maladie,  et  dans  l’obser- 
vation XXXI,  ramollissement  gris  et  jaune  , la  date  en  est  fort  in- 
certaine , bien  que  i-emontant  sans  doute  à plus  d’un  mois. 

Dans  les  observations  xx  et  xxi,  ramollissement  jaune,  la  ma- 
ladie datait  de  dix-neuf  jours  et  d’un  mois. 

Dans  l’observation  xxiv,  datant  de  six  jours,  la  couleur  de  la 
substance  ramollie  ne  paraissait  pas  altérée,  mais  il  y avait  un 
grand  nombre  de  points  rouges  dans  les  deux  hémisphères. 

Enfin,  dans  la  xvme  observation,  où  la  mort  arriva  le  cin- 
quième jour,  la  substance  ramollie  avait  conservé  sa  couleur 
naturelle,  sans  aucune  injection.  C’est  le  seul  cas  de  ramollisse- 
ment où  l’on  ait  constaté  l’absence  de  toute  injection  ou  rou- 
geur, avec  des  symptômes  franchement  aigus. 

La  première  lettre  du  professeur  Lallemand  contient  vingt- 
une  observations  : nous  laisserons  de  côté  les  quatre  dernières, 
empruntées  à Morgagni , et  trop  incomplètes  pour  que  l’on 
puisse  en  tirer  quelques  conclusions.  Dans  treixe  cas , on  a 
trouvé  de  la  rougeur  unie  à une  marche  rapide  : 

IN'o  1.— Mort  au  bout  de  quelques  jours.  Couche  optique 
gauche  ramollie  mêlée  d’une  humeur  sanguinolente. 

jN»  2.  — Durée  de  six  à huit  jours.  Substance  médullaire  ré- 
duite en  un  putrilage  rouge  et  ainaranthe. 


6 


*2  HAMOLLISSKMENT  AIGTÎ.  (anat.  path.) 

N®  3.  — Mort  au  bout  de  quelques  jours.  Sorte  de  putrilage 
dont  la  circonférence  est  rouge,  rosée  ou  brune. 

N»  4.  — Trois  jours.  Rainollisseinent  avec  infiltration  de 


■ang. 

N"  5.  — Huit  jours.  Surface  du  cerveau  ramollie  et  d’un  rouge 
foncé  en  plusieurs  points. 

N”  6.  — Vingt  jours.  Ramollissement  couleur  lie  de  vin, 

N°  7.  Douze  jours.  Ramollissement  avec  deux  petits  épan- 
chements sanguins. 

Douze  jours.  Ramollissement  contenant  au  centre 
du  sang  moitié  infiltré,  moitié  épanché. 

Huit  jours.  Infiltration  sanguine  dans  un  point; 
ramollissement  dans  un  autre,  dont  la  couleur  n’est  pas  indi- 
quée. 

No  12.  Treize  jours.  Infiltration  sanguine  dans  le  corps 
strié  ; ramollissement  sans  changement  de  couleur  de  la  substance 
médullaire  voisine. 


N”  13.  — Quatre  jours.  Ramollissement  brunâtie. 

Douze  jours.  Substance  cérébrale  très-rouge.  Dans 
le  corps  strié , espèce  de  foyer  d’une  bouillie  grisâtre , d’un 
jaune  verdâtre  à la  circonférence  ( aucun  renseignement  sur  les 
antécédents). 

No  16.  Trois  jours.  Ramollissement  des  circonvolutions 
mêle  çà  et  là  de  quelques  gouttes  de  sang. 

L’observation  9 est  un  cas  assez  compliqué  : la  maladie,  con- 
sécutive à une  contusion  de  la  tête  , chez  un  jeune  homme,  pa- 
raissait dater  de  deux  mois;  marche  irrégulière  ; foyer  de  pus  ; 
ramollissement  amarautlie  ; foyer  de  sang. 

Dans  1 observation  10  , il  n est  pas  question  de  ramollisse- 
ment. 

Dans  l’observation  15,  mort  dix-sept  jours  après  une  der- 
niere  attaque  , corps  strié  , réduit  en  une  pulpe  grisâtre. . . Il  y 
avait  eu  déjà  auparavant  des  symptômes  cérébraux  assez  carac- 
térisés , et  l’auteur  de  l’observation  prévient  qu’d  n’ose  garantir 
Vexactitudc  des  renseignements,  ses  idées  étant  fort  peu  suivies 
à l’époque  où  il  les  a recueillis.  On  ne  saurait  donc  tenir  compte 
de  ce  fait. 

L’observation  17  paraît  fournir  un  exemple  certain  de  ramol- 
lissement de  la  protubérance  qui,  après  un  jour  et  demi,  était 


inflammation.  83 

réduite  eu  une  bouillie  blanchâtre  âu-dessus  , grisâtre  au-des- 
sous. 

Raikem  (1),  dans  son  mémoire  sur  quelques  maladies  de  l’en- 
céphale , rapporte  douze  observations  de  ramollissement.  Sur 
ces  douze  , nous  devons  laisser  de  côlé  la  neuvième , qui  est 
tout  à fait  incomplète. 

Dans  six  cas,  on  a noté  de  la  rougeur,  et  la  maladie  a suivi 
une  marche  aiguë. 

Obs.  I — Mort  en  dix  jours.  Ramollissements  partiels  offrant 
une  agglomération  de  petits  points  rouges. 

Obs-  V.  — Mort  en  deux  ou  trois  jours.  Ramollissement  lie 
de  vin. 

Obs.  VIII.  — Mort  au  bout  de  trois  jours.  Ramollissement  lie 
de  vin. 

Obs.  XIV.  — Mort  en  quelques  jours.  Ramollissement  par- 
semé de. points  rouges  nombreux  et  très-rapprochés. 

Obs.  XV.  — Mort  vers  le  deuxième  jour.  Corps  calleux  fort 
, injecté  , transformé  en  une  substance  rougeâtre,  ramollie. 

Obs.  XX.  — Mort  à la  suite  de  convulsions.  Ramollissement 
rosé  de  la  substance  corticale. 

Dans  deux  cas,  obs.  vi  et  vu,  où  la  maladie  datait  de  plu- 
sieurs mois  , le  ramollissement  était  très-rouge. 

Dans  les  obs.  ii  et  x,  le  ramollissement  était  ancien  et  jau- 
nâtre. 

Enfin , dans  I’obs.  xiii  , la  mort  survint  en  quelques  jours.  Il 
y avait  suppuration  des  méninges  et  des  ventricules  : la  voûte, 
le  septum  et  les  couches  optiques  étaient  transformés  en  une 
substance  pultacée , blanche,  semblable  à du  fromage  à la 
ciéine.  Mais  il  est  dit  que  le  cerveau  était  plus  injecté  que  de 
coutume  , et  que  les  parois  des  ventricules  latéraux  étaient  par- 
semées de  ramifications  vasculaires  gorgées  de  sang. 

Dans  cent  vingt  cas  de  ramollissement  observés  par  moi,  j’ai 
toujours  trouvé  le  ramollissement  rouge  dans  le  premier  mois, 
privé  de  rougeur  au-delà  de  cette  époque  , sauf  deux  cas;  dans 
l’un  , datant  de  vingt  jours,  le  ramollissement  était  jaunâtre  (2)  • 
dans  l autre,  ramollissement  latent,  et,  par  conséquent,  comme 

(t)  Raikem,  Répertoire  général  d’anal,  et  de  physiol.  t826,  tome  i. 

(î)  Observation  87. 


nous  le  cliroiis  pins  loin,  cei  taiiieincnt  cljionique;  les  paili(  > 
j'aiiiolües  étaient  d’un  ronjje  vil’(I^\ 

Ainsi  , sur  plus  de  deux  cents  laits  de  ramollissement , noi  | 
ne  trouvons  que  quatre  exemples  évidents  de  ramollissemeM 
clironique,  accompagné  de  rougeur  (Andral , Raikem  et  moi  ; 
et  trois  cas  seulement  de  ramollissement  aigu,  sans  rougeui' 
sans  couleur  jaune,  et  sans  suppuration  (Andral,  Lallemand  « ; 
Raikem  ) ; encore,  dans  le  cas  de  Raikem,. y avait-il  des  tracte 
non  équivoques  de  congestion  ou  cerveau  , et  du  pus  dans  Itc 
méningés  , s il  ne  paraissait  pas  y en  avoir  dans  la  pulpe  rainoli 
lie  elle-même. 

Cette  analyse  porte  sur  des  cas  assez  nombreux,  je  croisa 
pour  fournir  un  appui  sufiisant  aux  propositions  que  j’ai  émisti 
sur  la  signification  de  la  rougeur  dans  le  ramollissement  céré 
bral.  Je  ne  pouvais  entreprendre  un  semblable  travail  sur  tou 
les  faits  publies  jusqu’à  ce  jour  sur  le  ramollissement  : moin 
encore  à cause  de  sa  longueur  qu’à  cause  de  l’incertitude  on 
l’on  est  sur  le  degré  de  confiance  que  méritent  le  plus  granoi 
nombre  des  observations,  que  l’on  rencontre  dans  de  semblable.: 
recherches.  J’ai  dû  me  contenter  de  recourir  aux  recueils  lei; 
plus  recommandables,  pour  mettre  le  lecteur  à même  de  jut- 
ger  jusqua  quel  point  les  résultats  généraux  de  l’observatioi'i: 
â 5 auteurs  étaient  d accord  avec  ma  propre  observation. 


CHAPITRE  III. 

SlfllPïÔMliS  nu  KAMOLLISSEMtKT  AIGU. 


ARTICLE  1er. 


Si  les  lésions  anatomiques  dans  le  ramollissement  aigu  peu- 
vent être  facilement  rapportées  à un  type  général  qui  ne  pré- 
sente guère  que  des  variétés  du  plus  au  moins,  nous  n'en  sou— 


{ Übservatîoa  109. 


ODSKRYATlOy?. 


85 


rions  clive  autant  dessynipUmies,  qui  nous  oftVent  les  diflerences 
les  plus  tranche'es,  les  plus  complètes  , et  dont  il  serait  vérita- 
blement impossible  de  généraliser  la  description. 

Tous  les  faits  de  ramollissement  aigu  peuvent  être  , sous  le 
rapport  des  symptômes,  rangés  en  deux  groupes  : l’un  caracté- 
I isé  par  l’affaiblissement  ou  l’abolition  des  fonctions  cérébrales; 
l’autre  par  la  perversion  ou  l’excitation  de  ces  mêmes  fonctions. 
C’est  tantôt  la  marche  de  l’hémorrhagie  cérébrale,  tantôt  celle 
de  la  méningite.  Puis  viennent  d’autres  faits  qui,  présentant  un 
mélange  des  cai'actères  de  ces  deux  groupes , peuvent  être  ran- 
gés à peu  près  indifféremment  clans  l’un  ou  dans  l’autre. 

.1 

Il  est  à remarepter  que  nous  trouvons  ici  parfaitement  isolés, 
dans  des  faits  distincts,  les  deux  ordres  de  symptômes  qcie  les 
auteurs  classiques,  ayant  surtout  en  vue  l’cncéplialite  trauma- 
tique , nous  ont  montrés  caractérisant  l’inllammation  du  cer- 
veau par  leur  apparition  sucesssive;  l’excitation  d’abord,  puis 
a2')rès  l’abolition  des  foxrctions  cérébrales. 

Cette  distinction  dans  les  symptômes  de  l’encéphalite  n’est 
pas  nouvelle,  et  M.  Lallemand  a,  en  particulier , insisté  .sur 
elle,  attribuant  ceux  d’excitation  à l’inflammaiion  des  ménin- 
ges, ceux  d’aftaiblissentent  ù l’inflammation  du  cerveau  lui- 
même.  Jliais  cet  auteur  s’est  assurément  abusé  lorsqu’il  a cru 
])ouvoir  etendre  cette  interprétation  à la  généralité  des  faits  , et 
nous  en  citerons  un  bon  nombre  qui  prouvent  cjue  , contraire- 
ment à ses  assertions  , le  délire  et  les  autres  phénomènes  d’ex- 
citation cérébrale,  sont  souvent  complètement  indépendants  de 
toute  altération  des  ménitiges , et  le  produit  de  l'inflammation 
du  tissu  cérébral  lui-même. 


Mais  il  ne  suffit  pas  de  considérer  isolément  chacun  de  ers 
.symptômes , comme  résultat  de  raiTaihüssemcnt  ou  de  l’excita- 
tion des  fonctions  cérébrales  ; ry  qu’il  importe  surtout  de  faire, 


c’est  d’étudier  séjxarément  les  groupes  parfaitement  distincts 
([u’ils  forment  par  leur  réunion  , et  de  classer  les  faits  de  ra- 
mollissement aigu  suivant  la  marche  générale  qu’ils  suivent  , 
suivant  que  domine  ou  l’im  ou  l’autre  de  ces  deux  modes  de 
lésions  lonctionnelles  du  cerveau.  On  verra  qite  cette  division, 
paifaitemcnt  naturelle  , est  lesetd  moyen  que  nous  ayons  d’ap- 
poiter  un  peu  d’ordre  et  de  clarté  dans  une  description  aiiss  i 


86 


ramollissement  aigu,  (symp.) 

nécessairement  confuse  que  celle  des  symptômes  du  ramollisse- 
ment aigu. 

^ Je  propose  d’appeler  ces  deux  formes,  V une  apoplectique  ^ 
V&ntie  ataxique , ces  deux  mots  rendant  parfaitement  par  l’i- 
dée qu  on  y attache,  comme  ils  l’indiquent  par  leur  étymolo- 
gie, le  caractère  distinctif  de  chacune  d’elles.  Je  commencerai 
par  rapporter  quelques  exemples  des  nombreuses  variétés  que 
peuvent  offrir  ces  formes  symptomatiques  , avant  de  me  livrer 
à leur  description  générale. 

S I' . Première  forme  ( Apoplectique.  ) — Affaiblissement  ou  abolition  des 

fonctions  cérébrales. 

A.  Développement  rapide  ou  instantané  des  symptômes. 

Observation  ag.  Perte  subite  et  incomplète  de  connaissance  5 hé- 
miplégie  droiteavec  contracture  lepremier  jour,  puis  simple  résolution; 
plus  tai  d,  raideur  du  bras  gauche.  Mort  au  bout  de  cinquante-quatre 
heures.  Rougeur  et  ramollissement  superficiels  des  circonvolutions 
de  1 hémisphère  gauche,  avec  adhérence  de  la  pie-mère  et  tuméfaction 
à peine  prononcée. 

Thérèse  Perchereau,  agee  de  soixante-dix-sept  ans,  ne  portait 
aucune  trace  d affection  cercbrale.  Sa  santé  était  généralement 
bonne;  elle  ne  se  plaignait  pas  de  la  tête,  son  intelligence  était 
bien  conservée  ; elle  s’occupait  habituellement  à filei-,  et  mar- 
chait sans  l’aide  d’une  canne.  Le  13  octobre  1838,  elle  allait  sor- 
tir, lorsque  tout  à coup  elle  tomba  sans  connaissance  ; je  la  vis 
une  heure  après,  elle  était  dans  l’étal  suivant  : 

Demi-coma,  pâleur,  face  hébétée  ; les  paupières  entr’ouvertes 
ne  se  referment  pas  quand  on  en  approche  le  doigt  ; la  narine 
droite  est  affaissée , la  bouche  un  peu  déviée  à gauche  ; la  face 
est  tout  à fait  paralysée  à droite.  Le  bras  droit  est  fléchi  sur  la 
poitrine,  dans  un  état  de  contracture  assez  forte  ; on  n’en  ob- 
tient aucun  mouvement,  même  en  le  pinçant  fortement,  bien 
que  la  sensibilité  soit  à peu  près  conservée,  comme  l’indi- 
quent alors  les  mouvements  du  bras  gauche.  La  jambe  droite 
est  moins  raide  et  un  peu  plus  mobile.  Du  côté  gauche,  les 
mouvements  paraissent  assez  libres  , bien  qu’il  y ail  un  peu 
de  raideur.  La  malade  paraît  entendre , elle  tourne  la  télé  et 
les  yeux  du  côté  de  la  voix  qui  frappe  son  oreille,  et  essaie 


OBSERVATIONS. 


87 


même  quelques  réponses  inarticulées.  Les  mâchoires  fortement 
contractées  ne  laissent  pas  voir  la  langue  et  permettent  à peine 
d’introduire  quelques  cuillerées  de  tisane  qui  sont  avalées  sans 
beaucoup  de  difficulté.  Le  pouls  est  petit,  régulier,  à 74;  la 
respiration  normale  , la  peau  froide  ; il  n’y  a pas  eu  de  vomisse- 
ments au  début.  (12  sangsues  au  cou  ) huile  de  ricin,  50  grammes) 

Le  soir , le  bras  droit  est  dans  un  état  de  résolution  complète  ; 
la  raideur  n’y  reparaît  pas. 

14.  Quelques  légers  signes  de  connaissance,  l’assoupissement 
n’est  pas  très-profond.  Quelques  selles;  émission  involontaire 
des  urines.  Le  pouls  est  un  peu  plus  fréquent  et  plus  déve- 
loppé qu’hier  ; la  peau  chaude,  sans  sécheresse.  Du  reste, 
même  état  qu’hier  soir.  {Looch  avec  kermès,  §r.  'u/.  vèsic.  au- 
devant  du  sternum.) 

Le  soir,  coma  profond,  même  résolution  du  bras  droit; 
beaucoup  de  raideur  à gauche  ; sensibilité  conservée  partout 

15.  — Il  y a toujours  de  la  raideur  à gauche.  La  respira- 
tion est  un  peu  râlante,  d’une  fréquence  normale.  De  temps 
en  temps  la  bouche  se  remplit  de  mucosités  spumeuses  qui  ne 
sont  rejetées  qu’avec  peine  ; alors  la  malade  porte  la  main 
gauche  à sa  bouche  et  essaie  d’en  arracher  ce  (|ui  s’oppose  au 
passage  de  l’air  ; cependant  à peine  si  la  face  se  colore  dans  ces 
instants;  le  pouls  conserve  encore  un  peu  de  force.  Mort  à 
deux  heures  après  midi. 

JiUopsie  vingt  heures  après  la  wor/.  — Une  quantité  assez 
considérable  de  sang  liquide  s’échappe  des  sinus  de  la  dure- 
mère.  L’arachnoide  contient  à peine  quelques  gouttes  de  sé- 
rosité; la  pie-mère  n’en  est  aucunement  infiltrée,  mais  forte- 
ment injectée  de  sang;  les  vaisseaux  également  distendus  des 
deux  côtés.  Elle  adhère  à presque  toutes  les  circonvolutions  et 
anfractuosités  de  l’hémisphère  gauche  par  de  petiis  filkments 
nombreux  ; dans  beaucoup  de  points,  elle  enlève  presque  toute 
l’épaisseur  de  la  substance  corticale.  La  surface  des  circonvo- 
lutions paraît  inégale,  comme  tomenteuse,  par  suite  de  ses 
adhérences  avec  la  pie-mère;  elles  présentent  çà  et  là  de  petites 
plaques  d’un  rouge  assez  vif  qui  pénètre  jusqu’à  la  substance 
blanche  ; ce  sont  surtout  ces  points  dont  la  pie-mère  a emporté 
des  lambeaux.  Quelques  circonvolutions  paraissent  un  peu 
plus  volumineuses  que  celles  du  côté  opposé.  La  substance 


qq 

I \5r.IT. 

corticale  est  rose  dans  toute  son  épaisseur,  très-légèrement 
I amollie  a sa  surface  ; un  filet  d’eau,  projeté  sur  une  coupe  des 
circonvolutions,  en  détache  les  bords  en  forme  de  franges. 
Presque  toutes  les  anfractuosités  de  la  convexité  présentent 
une  coloration  framboisée  avec  un  ramollissement  assez  pro- 
noncé. La  substance  blanche  est  un  peu  injectée,  d’une  consis- 
tance normale  j le  corps  strié  et  la  couche  optique  sont  tout  à 
fait  sains.  Rien  à noter  dans  l’autre  hémisphère.  Quelques  cuil- 
lerées de  sérosité  dans  les  ventricules.  Le  cervelet,  la  moelle  al- 
longée et  la  moelle  spinale  sont  à l’état  normal. 

Poumons  engoués.  Un  peu  d’hypertrophie  concentrique  du 
ventricule  gauche  du  cœur. 


OnscRVATios  00.  — Cancer  del  ulérus.  Perte  de  connaissance  sans 
symptômes  précurseurs  ; abolition  complète  dusentiment  et  du  mou- 
vement a droite,  sans  roideur  ; mort  au  bout  de  quarante  heures  à peu 
p'’èsi  dans  un  coma  profond  , avec  résolution  et  insensibilité  générales. 

Rougeur,  lumélaclion,  ramollissement  superficiel  des  circonvolu- 
tions de  l'hémisphère  gauche  ; infiltration  sanguine;  adhérences  de  la 
pie-mère. 

La  nommée  Gougy,  âgée  de  cinquante-un  ans  , était  couchée 
au  n 19  de  la  salle  Sainte-Marthe  : affectée  d’un  cancer  de  l’uté- 
rus très-avance',  elle  sonfirait  excessivement  et  de  fortes  doses 
d opium  lui  procui'aient  a peine  un  peu  de  soulagement.  Le 
12  août  18Ô8,  on  la  trouva  dans  l’étal  suivant,  qui  pouvait 
être  survenu  la  veille  dans  la  journée.  Coma  profond,  la 
lace  est  légèrement  contractée,  la  bouche  un  peu  déviée  à 
gauche  , la  narine  droite  aflaissée.  Les  pupilles  sont  normales, 
peu  contractiles  ; les  paupières  s’abaissent  lentement  lorsqu’on 
en  approche  la  main  brusquement;  les  conjonctives  sont  éga- 
lement sensibles;  mais  la  pituitaire  droite  semble  tout  à fait 
insensible  au  toucher  : résolution  complète  avec  insensibilité 
du  bras  et  de  la  jambe  droite  ; partout  ailleurs  le  moindre  at- 
touchement détermine  des  signes  d’une  vive  impatience.  La 
malade  ne  piofère  aucune  plainte;  l’ouïe  parait  totalement 
abolie.  La  respiration  est  haute,  peu  fréquente,  égale  des  deux 
cotés;  la  peau  est  assez  chaude,  le  pouls  peu  développé  , d’une 
ireqiicuce  normale.  On  ne  peut  obtenir  de  renseignements  pré* 


0nSF.RVAT10SS. 


89 


fis  sur  la  manière  dont  ces  accidents  ont  débuté;  il  paraît  que 
la  veille,  dans  la  journée,  on  a remarqué  qu’elle  cessait  de  parler, 
de  se  plaindre  ; mais,  par  négligence  , on  n’a  pas  appelé  l’eleve 
de  garde.  Le  soir,  même  état.  Le  lendemain  malin,  coma  plus 
proVond  encore,  résolution  et  insensibilité  générales,  respiration 
fréquente  et  stertoreuse,  circulation  presqu’éteinte  : mort  à dix 

heures. 

Autopsie  Angl-ciuq  heures  après  la  mort.  — Une  grande  quan- 
tité de  sang  s’écoule  des  sinus  de  là  dure-mère.  La  cavité  de  1 a- 
rachnoïde,  bien  que  très-humide,  ne  laisse  pas  écouler  une  quan- 
tité appréciable  de  sérosité.  Les  vaisseaux  delà  base  sont  sains. 
La  pie-mère  présente  une  injection  sanguine  prononcée,  surtout 
à gauche,  sans  infilli’ation  sereuse. 

L’hémisphère  gauche  paraît  plus  volumineux  que  le  droit  ; 
les  circonvolutions  sont  tassées  et  aplaties.  La  pie-mère  adhère 
généralement  à la  surface  du  cerveau,  et  entraîne  avec  elle  une 
partie  de  la  substance  corticale.  Les  circonvolutions  sont  beau- 
coup plus  volumineuses  que  celles  du  côté  opposé,  moins  con- 
sistantes, maispeu  ramollies, ^car  un  filet  d’eau  les  pénètre  à peine; 
cette  altération  occupe  à peu  près  les  deux  tiers  de  ces  circonvo- 
lutions,  surtout  celles  de  la  partie  moyenne  de  la  convexité,  et 
en  dehors,  celles  qui  avoisinent  le  lobule  du  corps  strié  , et  ce 
lobule  lui-même.  On  trouve  au  fond  de  plusieurs  anfractuosités 
quelques  plaques  formées  par  un  pointillé  d’un  violet  presque 
noir  (apoplexie  capillaire);  quelques  plaques  semblables  se  ren- 
contrent sur  la  convexité  de  l’hémisphère  droit,  qui  ne  présente 
aucune  autre  espèce  d’altération.  La  coloration  rose  et  le  ramol- 
lissement ne  s’étendent  nulle  part  au-delà  de  la  substance  corti- 
cale, dont  ils  ne  paraissent  pas  occuper  toute  l’épaisseur.  La 
substance  blanche  est  un  peu  poiritillée  , d’une  consistance  nor- 
male. Les  ventricules  contiennent  une  petite  quantité  de  sérosité, 
et  leurs  parois  sont  saines,  à part  un  peu  de  ramollissement  su- 
perficiel et  légèrement  rosé  du  corps  strié  et  de  la  couche  op- 
tique gauche. 

Poumons  fiasques,  à peine  engoués,  un  peu  de  mucus  opaque 
dans  les  bronches.  liC  cœur  est  d’un  petit  volume,  les  orifices 
parfaitement  libres.  Dégénérescence  squirrheuse  considérable 
du  corps  de  l’utérus  et  du  vagin. 


^AMOILISSIMBIIT  AlOU.  (SYMI*T.) 

Observation  3i.  - Hémiplégie  droite  incomplète  depuis  un  bu 

Mort'a'u  blut  > contracture  du  bras  droit.' 

avec  désorganisation  du  lobo'ânL^LTgauc heTo!gTurr  ' 
-nollissement  superOciel  et  adbérencelvec  la’pilX:  “Z: 
lutions  voisines. 

Vautlet  àgee  de  53  ans , bien  constituée,  a été  Ti  appée  pour  la 
première  fois  d hémiplégie  droite,  il  y a un  an;  cette  paralysie  se 
dissipa  peu  à peu  et  se  renouvela  siibiieinent,  il  y a six  mois- 
depuis  cette  epoque,  il  reste  de  la  faiblesse  du  côté  droit  sans 
céphalalgie.  Le  12  août  1853,  dans  la  soirée,  Vaudet,  causant 
gaiement  avec  ses  parents,  tombe  toiità  coup  sans  connaissance. 
Un  la  trouve  le  lendemain  matin  dans  l’état  suivant. 

Elle  est  plongée  dans  un  coma  profond,  couchée  sur  le  dos 
tout  à fan  immobile  r aucune  parole,  aucun  gémissement  n’est 
proféré.  La  bouche  est  légèrement  déviée  à gauche  ; les  paupiè- 
res, entr’ouvertes,  se  referment  lorsqu’on  approche  des  yeux 
un  corps  étranger;  les  pupilles  sont  normales.  L’ouïe  paraît 
complètement  abolie.  Il  y a. de  la  raideur  et  peu  de  mobilité  à 
droite  ; les  mouvements  sont  libres  à gauche  ; la  sensibilité  est 
obtuse.  La  respiration  est  fréquente,  vingt- huit  inspirations  par 
minute;  le  pouls  est  large,  plein  , fréquent,  à cent  p.  Pas  de 
vomissements  au  début.  (Saignée  du  bras,  .lw.,  purg.J 

14.  Le  bras  clro  t,  qui  hier  n’élait  qu’un  peu  raide,  est  au- 
jourd’hui le  siège  d’une  forte  contracture,  qu’on  dit  s’étre  déjà 
montrée  au  moment  de  l’attaque. 

(Quarante  sangsues  derrière  les  oreilles,  vésic.  aux  jambes  J 

15.  Même  état  à peu  près;  la  pituitaire  droite  est  tout  à fait 
insensible  à l’ammoniaque  qui  paraît  agir  fortement  sur  la 
gauche.  Le  pouls  est  fort,  très-irrégulier;  la  peau  brûlante. 

16.  Un  peu  moins  de  raideur  à droite,  f Saignée,  lav.  purg.) 

17.  Respiration  bruyante  , embarrassée  , se  suspendant  par 
intervalles;  la  raideur  a presque  disparu  à droite;  encore  un 
peu  de  sensibilité  à gauche  ; pouls  petit,  très-irrégulier.  Mort 
dans  la  journée. 

Autopsie  vingt-deux  heures  après  la  mort. — Un  peu  de  séro- 
sité sanguinolente  dans  la  cavité  de  l’arachnoïde.  Les  artères  de 
l’encéphale  sont  partout  souples  et  exemptes  d’ossification;  mais 
celles  qui  se  rendent  â la  partie  aaténeuve  de  l’hémisphère 


OBSBBYATIOIfS. 


91 


gauche,  c’est-à-dire  la  carotide  interne  et  ses  principales  bran- 
ches, sont  remplies  par  un  caillot  rougeâtre  assez  ferme  qui  les 
oblitère.  Tout  le  lobe  antérieur  de  cet  hémisphère  est  afïaissé, 
tout  à-fait  déformé  , profondément  ramolli  ; partout  ailleurs  , 
mais  surtout  à la  partie  interne  et  moyenne  de  la  convexité  de 
ce  même  hémisphère,  les  circonvolutions  sont  pressées  et  apla- 
ties. Toutes  celles  qui  avoisinent  le  ramollissement  sont  très- 
volumineuses,  d’une  couleur  rose,  et  un  peu  ramollies,  mais 
très-superficiellement;  la  pie-mère  qui  les  recouvre  leur  est  no- 
tablement adhérente,  tandis  qu’ailleurs  elle  s’enlève  avec  la 
plus  grande  facilité.  Le  ramollissement  du  lobe  antérieur  est 
jaunâtre  à l’extérieur,  blanc  plus  profondément,  et  il  occupe 
toute  l’épaisseur  du  lobe  qui  est  converti  en  une  véritable 
bouillie.  Le  corps  strié  et  la  moitié  de  la  couche  optique  sont  le 
siège  d’un  ramollissement  de  couleur  de  rouille;  la  surface  ven- 
triculaire du  corps  strié  est  étroite,  aplatie,  froncée.  Peu  de  sé- 
rosité dans  les  ventricules,  rien  de  remarquable  dans  l’héini- 
sphère  droit,  si  ce  n’est  un  piqueté  assez  prononcé  du  centre 
ovale.  Le  cervelet  et  le  bulbe  rachidien  sont  à l’état  normal.  Les 
poumons  et  le  cœur  ne  présentent  rien  à noter. 


Cette  femme  est  affectée  à trois  reprises,  dans  le  cours  d’une 
année,  d’une  hémiplégie  droite.  Ces  trois  attaques  que,  d’après 
leur  simple  indication,  ou  même  la  description  qui  est  donnée  de 
la  troisième, on  serait  tenté  de  rapporter  à des  hémorrhagies  cé- 
rébrales, résultaient  pourtant  de  trois  ramollissements  bien  dis- 
tincts. La  nature  de  ces  altérations  n’est  pas  douteuse,  puisque 
l’on  ne  trouve  ni  cavité,  ni  cicatrice. 

Le  ramollissement  du  lobe  antérieur,  probablement  le  plus 
ancien,  était  blanc  dans  son  centre,  ce  que  nous  verrons  être  or- 
dinaire dans  le  ramollissement  chronique,  la  rougeur  de  la 
substance  inédullaiie,  dans  la  période  aiguë,  n’étant  pas  habi- 
tuellement assez  vive  pour  laisser  des  traces  ineffaçables;  mais  à 
l’extérieur  ce  ramollissement  était  jaunâtre , indice  de  la  rou- 
geur primitive  de  la  substance  corticale,  rongeur  semblable  sans 
doute , à une  certaine  époque,  à celle  que  nous  a présentée  le 
ramollissement  le  plus  recent. 

C’est  pour  la  même  raison  que  la  couche  optique  «t  le  corps 


9? 


nAMOU.lSSEMKNT  AlfiU.  (s\mpt.) 

Strie,  très  vascuiaires  et  formés  en  {grande  partie  de  substance 
f lise,  oflraient  un  ramollissement  couleur  de  rouille,  qui  sans 
doute  avait  été,  à son  début,  le  siège  d’un  certain  degré  d’inf.b 
tration  sanguine. 

OESEitvATiON  5a.  — Paralysie  subite  du  bras  droit  et  du  côté  droit  de 
la  face;  perte  de  la  parole;  raideur  légère  dans  l’articulation  du  coude- 
pneumonie  ; mort  au  bout  de  cinq  jours.  — Ramollissement  des  cir- 
convolutions et  de  la  substance  médullaire  dans  l’hémisphère  gauche 
sans  changement  de  couleur,  sauf  quelques  marbrures  rougeâtres  ; in 
filtration  sanguine  de  la  couche  optique. 

La  nommée  Minard,  âgée  de  soixante  seize  ans,  d’un  asse* 
grand  embonpoint  et  bien  conservée  pour  son  âge,  est  d’un  ca- 
lacteic  taciturne , elle  passe  une  grande  partie  de  ses  journées  â 
l’église  et  ne  parle  presque  jamais.  On  n’a  jamais  remarqué  chez 
elle  d’aft’aiblissement  ni  d’altération  notable  des  facultés  intellec- 
tuelles. Elle  paraît  se  bien  porter,  et  ne  fait  aucun  usage  des 
excitants.  Sa  fille  rapporte  qu’elle  a toujours  vu  sa  nièré  sujette 
aux  coups  de  sang;  elle  était  sanguine,  la  face  colorée,  et  per- 
dait souvent  connaissance.  Ces  attaques,  devenues  très-rares 
dans  ces  derniers  temps,  et  dont  la  dernière  remonte  à deux 
ans,  n’auraient  jamais  été  accompagnées  de  mouvements  con- 
vulsifs, ni  suivies  de  paralysie. 

Le  1er  décembre  18.39,  après  avoir  passé  une  bonne  nuit,  elle 
alla,  suivant  son  habitude  à l’église,  de  grand  matin.  Elle  n’a- 
vait présenté  rien  de  particulier  les  jours  précédents.  De  retour 
dans  son  dortoir,  elle  alla  demander  son  déjeuner  à la  surveil- 
lante, et  s’assit  près  de  son  lit.  Mais,  comme  elle  commençait  à 
manger,  on  s’aperçut  tout  à coup  qu’elle  se  laissait  aller  sur  sa 
chaise;  elle  ne  pouvait  plus  parler,  et  son  bras  droit  semblait 
paralysé.  Un  quart-d’lieure  apres  j’étais  auprès  d’elle. 

.Te  la  trouvai  assise  sur  son  Ut,  tournant  la  tête  de  côté  et 
d’autre,  toussant  et  rejetant  par  des  efforts  de  vomissements 
des  matières  alimentaires;  elle  avait  la  face  assez  colorée,  les 
yeux  ouverts,  les  pupilles  égales  et  inoyenueinent  dilatées.  La 
bouche  et  l’aile  du  nez  étaient  fortement  déviées  à gauche;  elle 
faisait  des  mouvements  de  mastication.  La  physionomie  n’avait 
aucune  expression.  Quand  on  lui  parlait,  elle  ne  paraissait  faire 
auruTj  effort  pour  répondre , et  ne  prononçait  pas  tme  syllabe; 


üüaliiiVMlUiSS. 


ns 

cependant  eile  entendait,  car  elle  essayait  de  üier  la  langue,  à 
la  vérité  sans  pouvoir  y parvenir:  grincements  de  dents,  mâ- 
choires serrées.  Le  bras  droit  était  pendant  auprès  du  corps, 
flasque,  résolu  ; cependant  quand  on  le  pinçait  il  se  relirait  avec 
assez  de  vivacité,  et  la  main  gauche  s’y  portait  aussitôt.  Il  n’y 
avait  nulle  part  de  raideur.  Il  n’y  avait  rien  à noter  aux  mem- 
bres inférieui  s ni  au  côté  gauche. 

Le  pouls  était  régulier  à 70  {Saignée  de  3 pal.  40  sangsues  au 
cou  ; julep  avec  gomme-gutte,  8 décigr.).  Elle  demeura  jusqu’au 
lendemain  dans  le  même  état.  De  temps  en  temps  la  respiration 
devenait  un  peu  bruyante.  Elle  ne  laissa  point  aller  sous  elle  ; 
mais  deux  fois  on  la  fit  descendre  sur  la  chaise  où  elle  urina 
copieusement.  Il  n’y  eut  point  de  selles,  bien  que  la  potion  eût 
été  prise  toute  entière. 

2.  Le  bras  droit  est  étendu  près  du  corps;  quand  on  le  .saisit, 

11  présente  une  raideur  assez  forte  au  coude , mais  qui  cède 
promptement,  et  il  redevient  flasque  et  immobile.  Cependant,, 
si  l’on  tient  la  main  quelque  temps  sur  lui , on  sent  de  légers 
mouvements  spontanés  qui  le  déplacent  un  peu.  La  déglutition 
se  fait  bien.  L’œil  droit  demeure  toujours  fermé;  le  gauche  est 
larmoyant  et  enlr’ouvert;  les  pupilles  sont  très-légèrement  mo- 
biles à une  lumière  diffuse  , peu  intense.  Elle  fait  effort  pour 
parler,  pour  sortir  la  langue  de  la  bouche,  mais  sans  y parve- 
nir. Le  pouls  est  à 74,  comme  hier.  Les  battements  du  cœur  sont 
réguliers,  accompagnés  d’une  impulsion  médiocre:  les  bruits 
sont  brefs  et  secs , comme  si  l’on  frappait  sur  un  morceau  de 
bois  -,  chaleur  assez  grande  de  la  peau,  égale  des  deux  côtés. 

Le  sang  n’est  pas  couenneux;  le  caillot  est  large  et  entouré 
de  sérosité.  Les  sangsues  ont  bien  coulé.  {Julep  avec  jalap  , 

12  décigram. , aloës,  3 décigrammes). 

Le  soir,  le  bras  droit  présente  toujours  quelque  résistance  k la 
flexion;  à part  cela,  il  demeure  tout  à fait  immobile.  La  peau 
est  couverte  partout  d’une  sueur  abondante,  assez  chaude,  vis- 
queuse et  odorante  à la  paumé  des  mains.  Le  pouls  est  à 72.  Il 
n’y  a pas  eu  d’évacuations  dans  la  journée  ; mais,  dans  la  soirée, 
la  malade  gâte  abondamment.  La  vessie  ne  contient  pas  d’u- 
rine. 

3.  11  n y a rien  de  nouveau  {Julep  avec  aloës,  3 décigrammes). 

Dans  la  soirée,  le  pouls  prend  plus  de  développement  : ch?i- 


94 


uàmollissement  Aigu,  (sympt.) 

leur  et  sueur  à la  peau  ; même  état  du  reste.  Elle  reconnaît  sa 
fille  et  donne  des  signes  évidents  d’intelligence,  mais  toujours 
sans  prononcer  un  mot.  Quand  on  parle  aupi  ès  d’elle,  elle  lève 
un  peu  la  tête  et  prend  une  pose  d’attention  , qui  donne  un  sin- 
gulier caractère  à cette  face  déviée,  immobile  et  sans  regard  j 
( l’œil  droit  demeure  toujours  fermé  et  le  gauche  à peine  en- 
tr ouvert).  La  tête  est  toujours  tournée  du  côté  gauche,  mais 
elle  se  porte  à droite  quand  on  appelle  de  ce  côté. 

Selles  involontaires  et  abondantes  (Saignée  de  4 pal.). 

La  saignée  est  pratiquée  sur  le  bras  paralysée,  qui  fait  quelques 
efforts  accompagnés  de  raideur  comme  pour  se  dégager. 

4.  La  face  est  très-pâlej  elle  exprime  raffaissement  et  même  la 
souffiance.  Le  bras  droit  ne  se  retire  qu’à  peine  quand  on  le 
pince  : les  membres  inférieurs  répondent  plus  faiblement  aux 
excitations.  Il  n’y  a plus  de  raideur.  La  déglutition  est  plus  dif- 
ficile, les  mâchoires  sont  serrées.  La  malade  paraît  avoir  con- 
servé sa  connaissance.  Le  pouls  est  plus  faible  ; peu  de  chaleur 
à la  peau.  On  l’a  entendue  tousser  pour  la  première  fois,  et  la 
respiration  semble  un  peu  gênée.  Le  côté  droit  de  la  poitrine  en 
arrière  est  un  peu  moins  sonore  ; le  bruit  respiratoire  s’y  en- 
tend très-faiblement  et  mêlé  d’un  peu  de  râle  muqueux  5 à gau- 
che, grande  sonorité,  bruit  vésiculaire,  large  et  sans  râles. 

Le  caillot  est  étroit,  couvert  d’une  couenne  jaune  , molle  et 
assez  épaisse. 

5.  Les  yeux  sont  fermés,  la  bouche  très-ouverte,  sèche,  les 
narines  pulvérulentes,  la  face  très-pâle.  La  respiration  est  fré- 
quente et  assez  bruyante,  sans  stertor.  Elle  éloigne  et  ramène 
sans  cesse  ses  couvertures  delà  main  gauche;  l’avant-bras  droit 
se  meut  encore  très  légèrement  quand  on  le  pince  avec  force. 
Pouls  fréquent,  intermittent;  chaleur  modérée  à la  peau,  sans 
sueur. 

Mort  le  soir. 

Autopsie  quarante  heures  après  la  mort  (temps  de  gelée). 

Il  n’y  a point  de  raideur  dans  les  bras;  raideur  des  jambes 
dans  l’extension  ; point/de  rougeur  ni  de  tuméfaction  de  la 
tête. 

Li  s 03  du  crâne  sont  minces  ’effragiles  , peu  injectés  ; il  y a 
peu  de  sang  dans  les  sinusjcrâniens  ; la  dure-mèi'e  est  tendue 
également  des  deux  côtés. 


observations. 


95 


La  cavité  de  l’araclinoide  laisse  écouler  seulement  quel- 
ques gouttes  de  sérosité  limpide,  un  peu  plus  à droite  qu’à  gau- 
che; à travers  son  feuillet  viscéral,  qui  ne  présente  que  de  lé- 
gères opacités,  on  voit  les  circonvolutions  rapprochées  les  unes 
des  autres,  sans  être  aplaties,  un  peu  plus  à gauche  qu’à  droite, 
et  la  pie-mère  infiltrée  d’une  très-petite  quantité  de  sérosité 
limpide  et  incolore.  Cette  membrane  est  assez  vivement  injectée, 
également  des  deux  côtés;  cette  injection  porte  surtout  sur  les 
vaisseaux  les  plus  déliés.  On  trouve  à la  base  du  cerveau,  sur 
les  parois  des  grosses  artères,  des  plaques  jaunâtres,  qui  ne  sont 
ni  osseuses , ni  cartilagineuses. 

Une  incision  pratiquée  sur  la  ligne  médiane  sépare  les  deux 
hémisphères  : les  parois  des  ventricules  paraissent  intactes;  on 
y trouve,  ainsi  qu’à  la  base  du  crâne,  une  très-petite  quantité 
de  sérosité  incolore. 

La  pie-mère  s’enlève  parfaitement  et  par  larges  lambeaux  de 
toute  la  superficie  de  l’hémisphère  gauche;  cependant  les  cir- 
convolutions externes  des  lobes  moyen  et  supérieur  et  celles  de 
l’insula  sont  remarquablement  molles;  elles  ne  sont  ni  défor- 
mées, ni  diffiuentes,  un  filet  d'eau  ne  les  pénètre  pas,  et  la  pie- 
mère  n’en  entraîne  aucune  portion , mais  elles  se  déchirent  à la 
moindre  traction,  et  offrent  au  toucher  quelque  chose  degélati- 
neux.  Rien  de  semblable  ne  se  remarque  en  aucun  autre  point 
de  la  surface  de  cet  hémisphère,  ni  de  celui  du  côté  opposé.  Ces 
mêmes  circonvolutions  présentent  à leur  sommet  des  mar- 
brures d’un  rouge  livide  peu  foncé,  et  au  fond  de  deux  anfrac- 
tuosités on  découvre  des  taches  peu  étendues  de  couleur  lie  de 
vin.  Des  coupes  minces,  pratiquées  dans  ces  divers  points,  mon- 
trent que  ces  marbrures  et  ces  taches  pénètrent  toute  l’é- 
paisseur de  la  couche  corticale  , les  premières  n’offrant  qu’une 
simple  coloration,  les  secondes  une  combinaison  manifeste  du 
sang  avec  la  substance  cérébrale. 

Au-dessous  de  ces  points,  Ja  substance  blanche  est  molle, 
comme  poreuse;  le  doigt  y pénètre  sans  peine;  un  filet  d’eau 
y creuse  un  grand  nombre  de  fentes  sinueuses,  mais  sans  en  en- 
traîner aucune  portion.  La  teinte  générale  de  cette  partie  ra- 
mollie est  d un  blanc  mat,  sauf  quelques  marbrures  rosées  qui 
s en  détachent  i plus  prononce  au  centre  qu’à  la  périphérie,  ce 


RAMOlLLSSliMliax  Alüli.  (SiMPX.) 

rauioUissemeut  occupe  toute  la  partie  moyenne  et  externe  des» 
lobes  moyen  et  postérieur. 

La  couche  optique  est  le  siège  d’une  iulillration  sanguine 
ayant  le  volume  d’une  petite  noix,  et  empiétant  un  peu  sur  le 
corps  strié.  On  y voit  une  foule  de  petites  taches  rouges  ou 
noires,  d’autant  plus  foncées  et  plus  rapprochées  quelles  sont 
plus  au  centre  de  l’altération;  dans  leurs  intervalles,  on  retrouve 
la  substance  cérébrale  avec  sa  couleur  grise  naturelle,  ou  rou-- 
geàtre,  ou  rosée,  ou  jaunâtre;  au  niveau  de  cette  infiltration,, 
qui  s’étend  un  peu  dans  la  substance  blanche,  la  mollesse  est. 
assez  grande,  sans  difïlueuce.  La  partie  de  la  couche  optique’ 
qui  avoisine  la  ventricule  est  intacte  ; le  reste  de  l'hémisphère 
n’offre  qu’une  légère  injection. 

Dans  riiémisphère  droit,  la  substance  médullaire  est  assez 
fortement  injectée,  surtout  à sa  partie  moyenne.  On  remarque 
une  rougeur  assez  vive  et  uniforme  de  la  couche  optique  à sa 
partie  exteixie,  dans  le  point  qui  répond  précisément  à l’infil- 
tration sanguine  du  coté  opposé. 

On  ne  trouve  dans  aucun  point  de  l’encéphale  de  traces 
d’anciennes  altérations;  il  n’y  a rien  à noter  dans  la  protubé- 
rance, ni  dans  la  moelle  allongée.  Le  cervelet  est  volumineux, 
ferme;  ses  enveloppes  et  sa  substance  sont  assez  vivement  injec- 
tées. 

Le  poumon  droit  est  rouge  et  infiltré  de  sang  liquide  et  spu- 
meux, excepté  à sa  partie  antérieure  et  à son  sommet  ; tout  le 
centre  du  lobe  inférieur  est  d’un  rouge  livide,  très-friable,  et  ne 
contenant  pas  un  atome  d’air  ; le  poumon  gauche  est  un  peu 
rougeâtre,  et  iuliltre  de  sérosité  oans  scs  pailies  déclives;  les 
bronches  sont  rosées  â leur  surface. 

Le  cœur  est  flasque  et  volumineux,  presque  vide;  il  n \ a 
point  de  plaques  blanches  sur  sa  face  extérieure;  ses  cavités 
droites  ne  contiennent  qu’un  peu  de  sang  noirâtre,  épais  et  un 
petit  caillot  blanchâtre  non  adhèrent;  a gauche,  ou  tiouve  un 
peu  de  sang  noir,  liquide  et  épais;  les  parois  du  cœur  sont  min- 
ces, ses  cavités  irès-élargies  , les  orifices  et  les  appareils  valvu- 
laires sont  entièrement  sains;  point  d’altération  des  pai ois  de 
l’aorte. 

L’abdoruen  , examiné  avec  soin, {ne  présente  rien  à notei. 


0BSERVA.X10K9. 


97 

J’ai  raijporté  ce  fait  avec  tous  ses  détails,  parce  qu’il  est  rare 
de  pouvoir  suivre  avec  autant  de  précision,  dès  leur  début,  les 
allections  cérébrales  de  ce  genre.  Arrêtons-nous  un  instant  sur 
quelques  points  importants  de  cette  observation. 

Une  femme  a été  sujette  pendant  une  grande  partie  de  sa  vie 
à des  coups  de  sang  ; le  dernier  date  de  deux  ans.  Aucun  de  ces 
accidents  n’a  laissé  de  traces  matérielles  appréciables  dans  le 
cerveau,  d’où  il  est  permis  de  conclure  que  ce  n’étaient  que  de 
simples  congestions.  Une  nouvelle  attaque  survient;  mais,  au 
lieu  de  se  dissiper  rapidement,  la  paralysie,  la  perte  de  la  pa- 
role, persistent  jusqu’à  la  mort,  qui  survient  le  cinquième  jour. 
Ce  dernier  accident  n’est  sans  doute,  comme  les  pre'cédents, 
autre  chose  qu’une  congestion  cérébrale,  mais  qui,  plus  grave 
que  les  autres,  ou  dominée  par  des  circonstances  particulièrei 
qui  nous  échappent,  a déterminé  une  infiltration  sanguine; 
cette  he'morrhagie  a dû  se  faire  tout  à coup,  puisque  l’attaque  a 
été  sul)ite;  la  congestion  qui  l’a  produite  ne  paraît  pas  avoir  été 
précédée  de  symptômes  précurseurs  ; enfin,  à la  suite  de  cette 
congestion  et  de  cette  infiltration  sanguine  s’est  développée  de 
l’inflammation  , du  ramollissement. 

On  a remarqué  la  rougeur  que  présentait  la  couche  optique 
dans  l’autre  hémisphère,  au  point  qui  répondait  exactement  au 
siège  de  l’infiltration  sanguine.  Il  n’est  pas  très-rare  de  voir, 
dans  les  affections  aiguës  du  cerveau,  les  deux  mêmes  points  se 
prendre  d’inflammation  dans  les  deux  hémisphères  , mais  l’un 
ordinairement  moins  gravement  que  l’autre. 

La  marche  des  symptômes,  observée  soigneusement,  pourra 
être  étudiée  avec  fruit.  Je  signalerai  spécialement  l’instantanéité 
du  début,  la  paralysie  toujours  limitée  au  bras  droit,  au  côté 
droit  de  la  face,  à la  parole,  la  raideur  du  coude  droit.  On  a 
remarqué  sans  doute  que  les  symptômes  cérébraux  n’avaient 
subi  presque  aucune  modification  depuis  le  début  jusqu’à  la  fin, 
la  paralysie  ne  s’étant  aucunement  étendue,  l’intelligence  même 
ayant  paru  s’exercer  un  peu  jusqu’au  dernier  jour.  On  en  a dû 
conclure  que  la  mort  n’avait  pas  été  le  résultat  des  progrès  de 
l’affection  cérébrale  , mais  de  l’invasion  de  la  pneumonie , que 
l’on  avait  pu  reconnaître  pendant  la  vie  : on  l’a  vue,  en  effet, 
s’annoncer  le  soir  du  troisième  jour  par  un  mouvement  fébrile’ 

7 


RAMOLI;lj5£;vU,M  i AlGü.  (SYMPT.)  ' 

et  le  lendeui  iin  pur  le  clianjfemenl  fiappaul  qui  s’était  opéré 
dans  l’étal  général  de  la  malade. 

Observation  53. — Céphalalgie,  affaiblissement  général;  tout  à coup 
perte  de  la  parole,  puis  coma  ; résolution  complète  du  bras  droit  ; sen- 
sibilité obtuse;  mort  au  bout  de  trois  jours  à peu  près.  — Ramollisse- 
ment superficiel  des  circonvolutions  de  l’hémisphère  gauche , d’une 
circonvolution  de  l’hémisphère  droit  ; injection  de  la  substance  médul- 
laire sous  jacente. 

La  nommée  Moirin  , âgée  de  quatre-vingt-u^  ans,  fut  appor- 
tée à l’infirmerie  le  23  février  1838.  Voici  le  peu  de  renseigne- 
ments que  j’ai  pu  me  procurer  sur  elle.  Depuis  deux  ans  à la 
Salpêtrière  , on  me  dit  que  son  intelligence  paraissait  passable- 
ment conservée;  qu’elle  ne  présentait  aucun  signe  de  paralysie, 
si  ce  n’est  qu’elle  avait  un  œil  fixe  et  la  bouche  de  travers.  (Tl  y 
avait  une  opacité  complète  de  l’une  des  cornées,  et  l’absence 
d’une  grande  partie  des  dents  avait  déformé  la  bouche.)  Depuis 
six  semaines  elle  était  affectée  d’un  tremblement  général  des 
membres. Au  commencement  de  lévrier,  elle  avait  passé  une 
quinzaine  de  jours  à l’infirmerie  dans  un  autre  service.  Elle  se 
plaignait  beaucoup  de  la  tête  et  de  douleurs  vives  par  tout  le 
corps.  On  lui  avait  donné  de  la  poudre  de  Dower  et  des  pédi- 
luves  sinapisés.  On  n’avait  pas  remarqué  de  signes  de  paralysie; 
seulement  elle  n’avait  aucune  sûreté  dans  les  mouvements,  et 
elle  laissait  souvent  tomber  ce  qu’elle  tenait  entre  les  mains.  Il 
paraît,  du  reste,  qu’elle  avait  été  assez  mal  examinée. 

Elle  avait  été  renvoyée  à son  dortoir  le  16  lévrier.  Là  on 
ti'ouva  qu’elle  avait  l’air  plus  malade  que  lorsqu’elle  était  allée 
à l’infirmerie;  on  remarqua  qu^elle  soutenait  îon  bras  droit 
avec  le  gauche,  comme  s’il  eût  été  paralysé. 

Le  22  février,  dans  la  soirée,  après  s’être  promenée  dans  son 
dortoir,  au  moment  de  se  mettre  au  lit,  ses  jambes  fléchirent, 
et  elle  se  trouva  mal.  Elle  revint  bientôt  à elle,  et  on  la  coucha. 
Le  lendemain  matin  elle  fut  portée  à l’infirmerie. 

Elle  avait  encore  sa  connaissance,  bien  qu’elle  parût  très- 
engourdie;  elle  essayait  de  parler,  mais  sans  pouvoir  se  faire 
comprendie  Le  bras  droit  était  complètement  paralysé,  sans 
raideur,  mais  offrait  encore  quelques  .signes  de  sensibilité.  Elle 


OBSEKVATlOaS.  99 

perdit  toute  connaissance  dans  la  journée,  et  eut  des  évacua- 
tions involontaires. 

.Te  vis  cette  femme  pour  la  première  fois  le  24,  à deux  heures. 

Elle  était  pâle,  sans  connaissance,  couchée  sur  le  dos,  la  pau- 
pière droite  abaissée,  la  cornée  opaque  ; la  paupière  gauche 
entr’ouverle,  la  pupille  légèrement  dilatée,  immobile  ; la  vue 
complètement  abolie.  La  bouche  entr’ouverte  et  sans  raideur 
des  mâchoires,  très-légèrement  déviée  à gauche,  ainsi  que  Laile 
du  nez  correspondante;  la  déglutition  très-difficile. 

Le  bras  droit  est  complètement  résolu.  Les  mouvements  pa- 
raissent libres  à gauche,  bien  qu’assez  faibles.  Lorsqu’on  meut 
le  bras,  on  éprouve  parfois  au  coude  un  peu  de  résistance,  que 
l’on  attribue  à une  simple  action  musculaire  sans  rapport  avec 
Lkat  cérébral.  La  sensibilité  est  bien  conservée  à gauche  et 
dans  le  membre  inférieur  droit,  qui  se  retire  aussi  vivement  que 
l’autre  quand  on  le  pince. 

Quand  on  pince  avec  force  le  bras  droit,  il  demeure  immo- 
bile ; mais  les  mouvements  de  l’autre  semblent  indiquer  que  la 
douleur  est  perçue.  Lorsqu’on  pique  profondément  avec  une 
épingle  la  paume  de  la  main,  il  se  fait  de  légères  contractions 
musculaires  ; mais  il  faut  pour  cela  que  l'épingle  pénètre  au- 
delà  du  derme. 

La  peau  est  chaude  , moite;  le  pouls  fort  et  fréquent. 

Le  soir  , tout  le  corps  est  couvert  d’une  sueur  froide  et  vis- 
queuse. Le  pouls  est  toujours  fort  et  fréquent , la  respiration  est 
râlante,  sans  siertor,  un  peu  fréquente  et  inégale.  Sensibilité 
obtuse  partout,  si  ce  n’est  aux  extrémités  inférieures,  qui  se  re- 
tirent très-vivement  dès  qu’on  chatouille  un  peu  la  plante  des 
pieds.  Quand  ou  a chatouillé  le  pied  gauche,  il  présente  un 
mouvement  d’oscillation  qu’il  conserve  pendant  près  d’une  mi- 
nute. et  qui  se  reproduit  chaque  fois  qu'on  répète  cette  expé- 
rience. Sensibilité  fort  obtuse  de  la  muqueuse  nasale,  normale 
des  conjonctives.  Les  paupières  se  soulèvent  à demi  d’eiles- 
inêmes,  et  également  des  deux  côtés.  La  pupille  gauche  se  con- 
tracte légèrement  à l’approche  d’une  lumière. 

25.  Pouls  petit,  respiration  fréquente,  sans  stertor.  Motilité 
à peu  près  éteinte  dans  le  bras  gauche,  piesque  insensible. 
Sensibilité  encore  assez  vive  dans  les  membres  inférieurs.  Mort 
à minuit. 


100 


RAMOLLISSLMENT  AIGU.  ( STMPT.) 

Autopsie  trente-quatre  heures  après  la  mort.  — Les  os  dui 
crâne  sont  épais  et  adhérents  à la  dure-mère.  On  trouve  un 
peu  de  sérosité  dans  la  cavité  de  l’arachnoïde.  La  pie-mère 
est  assez  injectée  de  sang  et  infillrée  d’une  quantité  notable  de 
sérosité,  également  des  deux  côtés.  Les  parois  des  artères  sont 
jaunâtres  et  très-épaissies. 

Les  circonvolutions  sont  assez  volumineuses,  un  peu  écartées' 
par  la  séi'osité,  nulle  part  aplaties.  La  pie-mère  s’enlève  par- 
tout avec  facilité,  si  ce  n’est  sur  les  circonvolutions  de  la  con- 
vexité de  l’hémisphère  gauche  qui  bordent  la  grande  scissuree 
et  celles  de  la  face  interne  de  cet  hémisphère  ; là  elle  entraîne^ 
avec  elle  la  superficie  de  ces  circonvolutions  qui  présentent  um 
ramollissement  considérable,  et  se  laissent  pénétrer  profondé- 
ment par  un  filet  d’eau.  Quelques-unes  des  circonvolutions' 
ramollies  paraissent  plus  volumineuses  que  les  autres.  Le  ra- 
mollissement s’étend  aux  anfractuosités  aussi  bien  qu’aux  cir-- 
convolutions  ; ses  bords  sont  assez  nettement  limités.  Il  occupe* 
soit  la  seule  superficie  des  circonvolutions,  soit  toute  l’épaisseurr 
de  la  substance  corticale,  soit  un  peu  de  la  substance  médul-- 
laire  sous-jacente.  La  couleur  de  la  substance  corticale  est  ài 
peine  altérée;  on  y trouve  quelques  taches  violacées  peu  éten- 
dues ; elle  est  un  peu  jaunâtre  dans  d’autres  points.  La  subslance* 
médullaire  sous-jacente  est  un  peu  ramollie,  bien  qu’elle  ne  se.' 
laisse  point  pénétrer  par  un  filet  d’eau  ; elle  présente  une  injec- 
tion fine  assez  serrée  ; de  plus,  au-dessous  des  parties  les  plus- 
malades,  on  voit  comme  de  petites  houppes  de  vaisseaux  très- 
fins,  injectés,  qui  donnent  une  coloration  légèrement  violacée 
aux  points  qu’ils  occupent,  et  qui  se  dirigent  vers  la  substance 
corticale  dans  laquelle  on  ne  peut  pas  les  suivre. 

Une  circonvolution  de  l’hémisphère  droit,  près  de  la  grande 
scissure,  présente  seule  un  peu  de  ramollissement  jaunâtre, 
semblable  à celui  que  je  viens  de  décrire. 

Le  cerveau  est  parfois  assez  vivement  injecté  ; il  n’y  a pas 
autre  chose  à noter.  Les  ventricules  contiennent  beaucoup  de 
sérosité. 

Le  cervelet  est  remarquablement  mou  à la  surface,  avec  une 
teinte  un  peu  jaunâtre,  sans  autre  altération  appréciable.  Lors- 
qu’on enlève  la  pie-mère,  au  devant  du  bulbe  rachidien,  elle 


OBSEnVATIONS. 


IQl 

en  entraîne  avec  elle  toute  la  superficie,  sans  que  la  blancheur 

en  paraisse  aucunement  altérée. 

Pneumonie  double  avec  suppuration.  Légère  courbe  pseudo- 
membraneuse  récente  à la  surface  des  points  hépatisés.  Le  cœur 
est  assez  volumineux.  11  ne  présente  d’autre  altération  qu’une 
ossification  de  l’anneau  fibreux  de  l’orifice  auriculo-ventriculaire 
gauche.  Calculs  delà  vésicule  biliaire. 


La  valeur  des  prodromes  qui  paraissent  avoir,  chez  cette 
femme,  précédé  l’apparition  rapide  des  symptômes  propres  au 
ramollissemeni , est  assez  difficile  à apprécier , surtout  à cause 
de  l’existence  d’une  pleuro-pneumonie  double  dont  le  début, 
ignoré,  peut  bien  avoir  précédé  celui  du  ramollissement.  Serait- 
ce  donc  à la  pneumonie  qu’il  faudrait  l'apporter  les  prodromes? 
Il  est  cependant  un  fait  qui,  s’il  avait  ete  bien  obseive,  appai- 
lenait  évidemment  au  ramollissement  et  pouvait  mettre  sui  la 
voie  du  diagnostic  : je  veux  parler  de  la  faiblesse  dubiasdioit, 
qui  paraît  avoir  été  remarquée  quelques  jours  avant  1 attaque. 
Je  dirai  en  effet  plus  loin  que,  lorsque,  parmi  les  signes  précur- 
seurs d’une  attaque  apoplectiforme  de  nature  douteuse , on  a 
observé  quelque  trouble  du  mouvement  d un  ou  de  deux  mem- 
bres du  même  côté,  on  peut  être  à peu  près  certain  qu’il  s’agit 
d’un  ramollissement.  La  couleur  jaune  des  circonvolutions  ra- 
mollies est  encore  une  raison  de  croire  qu’il  existait  dès  lors  une 
congestion  partielle  dans  le  lieu  qui  devait  etre  plus  tard  le 
siège  du  ramollissement  j car  il  eût  fallu  probablement  plus  de 
trois  jours  pour  qu’elle  remplaçât  la  rougeur  de  la  substance 
corticale  à laquelle  elle  succédait  sans  nul  doute. 

Quant  aux  symptômes  de  la  maladie  elle-même,  ils  ressem- 
blaient assez  à ceux  de  l’hémorrhagie  pour  que  l’on  n’ait  pu 
les  en  distinguer.  L’espèce  même  de  progression  graduelle  qu’a 
présentée  l’invasion  n’offrait  rien  de  caractéristique,  car  on  voit 
quelquefois  une  hémorrhagie  se  faire  par  secousses  brusques 
qui  déterminent  dans  les  symptômes  des  effets  tout  à fait  ana- 
logues à ceux  que  nous  avons  observés  dans  ce  cas. 

Orservation  34.  — Hémiplégie  droite  subite,  incomplète  le  premier 
jour  ; raideur  des  articulations,  abolition  presque  absolue  de  l’intelli- 
gence, conservation  de  la  sensibilité.  Mort  le  huitième  jour.  — Ra- 


^ AMOLLlRSRjVrSJXT  AlCU.  (rYMPT.) 

(uolIissecnflQt  de?  oU'CJonvoln lions  et  de  la  snhstance  blanche  de  la  par- 
tie moyenne  de  1 hémisphère  cli-oit.  Coloration  ronge  de  la  substance 
corticale  , injection  de  la  médullaire. 

Un  homme  âfjé  de  69  ans  était  entré  à la  clinique  dans  le  ser- 
vice deM.  Cloquet,au  mois  de  janvier  1839.  poursefaii-e  traiter 
d’un  ulcère  à la  jambe,  et  en  était  sorti  guéri  au  bout  de  trois 
mois.  Cet  homme  avait  alors  été  observé  avec  soin,  interrogé 
sur  ses  antécédents;  on  s’clait  assuré,  entre  autres  choses,  qu’il 
n’avait  jamais  présenté  de  trouble  des  fonctions  cérébiales. 

Il  fil  vers  le  mois  de  mai  un  voyage  de  deux  cents  lieues  à 
pied,  et  éprouva  de  vives  émotions.  L’ukère  se  rouvrit  et  sup- 
pura abondamment,  ainsi  qu’un  cautère.  Il  se  sécha  au  com- 
mencement de  juin,  et  le  malade  entra  alors  à la  clinique. 

Cet  homme  paraissait  bien  constitué  pour  son  âge  ; il  n’avait 
pas  une  constitution  apoplectique.  Il  se  plaignait  de  bourdon- 
nements d’oreille  et  d’étourdissements  ; il  n’ollrait  du  reste  rien 
de  particulier  ni  dans  la  physionomie  ni  du  côté  de  l’intelli- 
gence ou  des  membres.  {Fésicatoire.) 

Le  13,  il  eut  des  vomissements,  de  la  diarrhée  et  quelques 
selles  involontaires.  Le  lendemain  d allait  mieux,  on  lui  mit  un 
cautère  à la  cuisse. 

Le  18,  il  paraissait  assez  bien  le  matin.  A une  heure  de  l’après- 
midi,  il  tomba  tout  à coup  dans  l’état  suivant  r 

L’intelligence  est  presque  abolie,  il  ne  prononce  que  des  mots 
sans  suite.  La  bouche  et  les  yeux  sont  déviés  à gauche;  les  pu- 
pilles naturelles.  Les  membres  du  côté  droit  sont  incomplète- 
ment résolus,  sans  aucune  raideur.  Le  pouls  est  à 64.  Selles 
involontaires.  ( Fésicatoires  aux  jambes  , sinapismes , purgatif.) 

Le  soir  il  paraît  y avoir  un  mieux  notable;  le  malade  répond 
aux  que.il  ions.  Il  tombe  sur  la  tête  pendant  la  nuit. 

19i  L’hémiplégie  est  complète,  la  sensibilité  conservée. 

J Ipsçnsjbililé  de  la  conjonctive  et  de  la  pituitaire  à droite  ; 
stertor,.  hoquet.  ( Calomel  6 décigr.  ) 

20.  Agitation,  chaleur  vive  à la  peau,  pouls  à 76.  Tremblot- 
tement  de  la  main  gauche  ; raideur  du  coude. 

21.  Les  yeux  sont  fermés,  ils  s’agitent  en  tous  sens.  La  joue 

droite  fôt  très  colorée, bien  que  lemalade  soit  couché  du  côté 
opposé:  Il'ne  ï-épôbd  pas,  mais  paraît  comprendre.  Le  stertor  a 
6\s^dit\x: {Fésicatoire  à là  kI  ob  ;« 


OMERYATIOnS. 


lOS 

Les  jours  suivants  la  raideur  persiste  dans  le  braa  et  la  jambe 
droite;  l’affaissement  augmente.  Mort  le  huitième  jour. 

Autopsie.—  Raideur  cadavérique  seulement  à gauche.  Petites 
ossifications  de  l’arachnoïde  cérébrale;  suffusions  sanguines  de 
la  pie-mère,  non  aux  points  déclives;  vers  la  partie  moyenne  de 
l’hémisphère  gauche,  adhérences  intimes  de  la  pie-mère  au  cer- 
veau; elles  enlèvent  la  substance  cérébrale  dans  l’épaisseur  de 
quelques  millimètres  à la  convexité,  plus  eu  dehors,  de  plus  de 
trois  centimètres;  là  le  ramollissement  s’étend  jusqu’au  corps 
strié  qui  est  très-ramolli  ; la  couche  optique  ne  l’est  pas.  Toute 
la  substance  blanche,  dans  cette  étendue,  est  très-molle,  comme 
feutrée,  très-injectée  ; un  filet  d’eau  l’entraîne  en  lambeaux,  et 
au  bout  d’un  certain  temps  n’en  laisse  que  la  trame  vasculaire. 
La  couleur  de  la  substance  corticale  superficielle  et  du  corps 
strié  est  d’un  rouge  très-vif. 

Une  partie  de  la  substance  corticale  de  l’hémisphère  droit 
est  ramollie  et  rosée.  La  substance  médullaire  est  très  injectée. 

La  carotide  interne  gauche  est  remplie  par  un  caillot  rou- 
geâtre, dense,  friable,  adhérent. 

Le  reste  de  l’autopsie  n’est  point  pratiqué  (1). 

Observa Tios  35.  — Perte  du  mouvement  complète  à droite  , avec 
abolition  presque  complète  de  la  sensibilité.  Obtusion  des  sens  du 
même  côté  ; conservation  de  l’intelligence.  Mort  vers  le  septième  jour. 
— Ramollissement  général  de  l'hémisphère  gauche  ; teinte  jaunâtre  de 
la  substance  corticale  ; coloration  lilas  partielle  et  injection  pronon- 
cée de  la  substance  médullaire. 

Marie  Boursin,  âgée  de  45  ans,  couturière,  blonde,  d’un 
embonpoint  assez  prononcé,  visage  assez  coloré,  col  large,  fut 
apportée  à la  Pitié  le  20  août  1835.  Les  gens  qui  l'amenaient 
rapportèrent  qu’elle  avait  été  trouvée  paralysée  dans  sa  cham- 
bre, quatre  ou  cinq  jours  auparavant,  et  qu’elle  avait  perdu  la 
parole  la  veille.  Elle  avait  été  saignée  au  début.  Elat  actuel,  le 
21 . Décubitus  dorsal  ; la  tète,  tournée  à gauche,  ne  peut  être 
redressée  qu’en  faisant  des  efforts  douloureux  pour  la  malade. 
Face  légèrement  colorée,  mouillée  de  sueur;  bouche  relevée  à 
gauche  , paupières  fermées  aux  trois  quarts,  la  droite  un  peu 
plus  que  la  gauche.  Les  traits  sont  immobiles  à droite,  et  se 

\ Celle  obscrvalicn  a e'ié  recueillie  par  monjatni,  M.  Ernest  Boudel. 


RAMOLLISSEMKNT  aigu,  (sympt.) 

meuvent  ù gauche  ; la  langue  tirée  avec  difficulté  se  dévie  à 
droite. 

Le  mouvement  est  complètement  aboli  du  côté  droit.  Le 
bras  gauche  se  meut  bien  , mais  la  main  est  sans  force,  et  ne 
serre  que  très-faiblement.  Le  membre  inférieur  gauche  ne  se 
meut  qu’incomplètement  et  ne  peut  être  soulevé  d’une  pièce. 

A droite  la  sensibilité  paraît  presque  entièrement  abolie  dans 
les  membres  et  dans  la  moitié  droite  de  la  face  et  du  tronc;  ce- 
pendant un  fort  pincement  fait  contracter  les  traits.  A gauche, 
le  simple  chatouillement  est  perçu  sur  les  différentes  régions. 

La  pal  oie  est  nulle,  mais  l’intelligence  est  conservée.  La  ma- 
lade comprend  ce  qu’on  veut  lui  demander  , elle  essaie  de  ré- 
pondie,  bien  qu  elle  ne  puisse  produire  qu’une  espèce  de  bour- 
donnement, et  s’exprime  par  des  signes  de  tête  assez  intelligibles. 

La  vue  est  conservée  à droite,  mais  plus  faible.  Les  deux 
yeux  se  meuvent,  les  pupilles  se  contractent  des  deux  côtés 
également  ; elles  ont  deux  millimètres  de  diamètre.  L’ouïe  pa- 
raît meilleure  à gauche.  Du  tabac,  placé  sous  les  deux  narines 
et  sur  les  deux  côtés  de  la  langue  alternativement,  est  senti  des 
deux  côtés,  mais  mieux  à gauche. 

Mouvement  de  la  poitrine  égal  des  deux  côtés.  18  inspira- 
tions. Battements  du  cœur  réguliers,  faibles;  pouls  régulier, 
peu  fort,  à 96.  Température  égale  des  deux  côtés.  Déglutition 
très  difticile.  Evacuations  involontaires. 

(Saignée  de  300  grammes,  lavement  savonn.) 

Couenne  légèrement  grisâtre,  épaisse  de  deux  millimètres. 
1j6  22,  même  état  ; pouls  irrégulier,  à 104.  Un  peu  de  râle  tra- 
chéal. Le  soir,  le  râle  est  plus  fort.  Quand  on  s’approche  d’elle, 
elle  tire  ses  draps  et  cherche  à exprimer  qu’elle  ne  veut  pas 
qu’on  la  touche. 

IMorte  le  :â3,  à 8 heures  du  matin. 

AiaopsUi  36  heures  après  la  mort.  — Le  cuir  chevelu  est  for- 
tement adhérent,  sa  face  interne  rougie  par  le  sang. 

La  dure-mère  est  humide;  les  artères  méningées  moyennes 
assez  pleines  de  sang,  avec  un  peu  d’inibibition  des  parties  en- 
vironnantes. Sinus  longitudinal  supérieur  vide.  Pie-mère  non 
injectée,  infiltrée  d’une  assez  grande  quantité  de  sérosité. 

Cette  nieinhrane  s’enlève  sans  entraîner  de  substance  céré- 
brale à droite.  Au  lobe  moyen  de  l’hémi.sphère  gauche,  elle  en- 


observations. 


105 


traîne  une  poition  des  circonvolutions.  Palpée  en  masse,  la 
substance  cérébrale  est  moins  ferme  à gauche  qu’à  droite.  La 
substance  corticale  présente  à gauche  une  couleur  café  au  lait. 
Coupée  par  tranches,  la  substance  médullaire  paraît  occuper  un 
espace  moins  large  qu’à  droite,  comme  si  elle  avait  été  com- 
primée par  le  développement  de  la  substance  grise.  Superficiel- 
lement elle  offre  quelques  stries  d’une  teinte  lilas  *,  plus  pro- 
fondément elle  est  manifestement  plus  injectée  à gauche  qu’à 
droite.  A mesure  qu’on  s’approche  du  ventricule,  la  substance 
encéphalique  devient  plus  molle;  la  couche  optique  et  le  corps 
strié  gauches  sont  trois  fois  plus  mous  qu’à  droite.  Leur  couleur 
paraît  normale. 

Le  lobe  gauche  du  cervelet  paraît  plus  mou  que  le  droit,  et  se 
laisse  superficiellement  éroder  par  l’enlèvement  de  la  pie-mère. 

Les  plexus  choroïdes  sont  infiltrés  de  sérosité. 

^La  protubérance  et  la  moelle  alongée  sont  saines. 

Cœur  de  volume  et  d’épaisseur  normale,  sang  coagulé  dans 
toutes  ses  cavités.  Sérosité  dans  les  plèvres.  Poumons  bleuStres 
à l’extérieur.  Leur  tissu  est  souple  et  donne  issue,  le  long  du 
bord  postérieur,  à un  liquide  spumeux  assez  abondant  (1). 


Observation.  3C.  Céphalalgie  , hémiplégie  droite,  coma;  mort  an 
bout  de  deux  jours. 

Forget,  âgé  de  39  ans,  perruquier,  fut  pris  en  novembre 
1800,  à la  suite  de  chagrins,  de  maux  de  tète  violents,  et  après 
de  surdité  de  l’œil  gauche.  Il  se  plaignit  ensuite  de  malaise, 
d’une  sensation  de  froid  dans  le  dos. 

Le  28  avril  1801,  à deux  heures  du  soir,  sa  femme  s’aperçut 

qu’il  avait  l’air  défait,  qu’il  répondait  à peine  aux  questions 

il  avait  un  violent  mal  de  tête.  Au  milieu  de  la  nuit,  il  cessa 
tout-à-fait  de  parler,  devint  froid  et  pâle.  Le  lendemain  matin 
il  était  rouge  et  brûlant.  Il  se  leva  un  instant,  puis  à peine  re- 
couché, on  s’aperçut  lout-à  coup  que  l’œil  gauche  était  demi- 
fermé,  les  membres  droits  sans  mouvement;  la  connaissance 
etaitconservée.  Le  lendemain  il  était  pâle,  dans  un  coma  profond, 

la  bouche  tirée  à gauche,  tout  le  côté  droit  paralysé,  la  déglu- 
(t)  Je  doi.s  cfiup  ol).spr\,iilon  à l’obligeauce  de  M.  le  doctpur  Barlli. 


106 


HAMOLLlSSKMEltT  AUiU.  (STMPT.) 

tition  difficile.  Le  coma  augmenta,  la  respiration  devint  iitcr- 
toreuse,  il  se  couvrit  d’une  sueur  abondante,  et  mourut  le  jour 
suivant,  48  heures  après  le  d but  de  la  paralysie. 

^idopsie  — Los  vaisseaux  et  les  sinus  de  la  dure-mère 
étaient  gorgés  de  sang  noir,  fj’liémisplière  gauche  était  à 
sa  surface  sec  , luisant,  comme  vernissé  , les  circonvolutions 
aplaties,  comprimées — En  le  pressant  légèrement,  on  sentait 
de  la  fluctuation  à la  partie  latérale  et  moyenne  de  la  con- 
vexité. Les  couches  les  plus  supérieures  montrèrent  une  infinité' 
de  petits  points  rouges  de  diverse  étendue.  Quand  on  coupait 
quelques  portions  de  la  substance  cérébrale,  et  qu’on  cherchait 
à les  écraser,  elles  offraient  une  consistance  très  grande,  c[ui 
donnait  une  idée  de  celle  de  toute  la  masse.  Arrivé  au  niveau 
du  corps  calleux,  on  mit  à découvert  les  ventiicules  latéraux 
qui  ne  contenaient  que  peu  de  sérosité  : mais  étant  parvenu  à 
l’endroit  de  la  fluctuation  indiquée  plus  haut,  on  trouva  que 
la  substance  cérébrale  était  bien  loin  d’avoir  la  même  consis- 
tance: c’était  un  vrai  pulrilage  diffluent.  Lorsqu’on  en  eut  en- 
levé une  couche  de  l’épaisseur  d’une  ligne  environ,  on  décou- 
vrit une  tache  jaunâtre,  nuancée  de  rouge,  comme  si  elle  était 
le  résultat  d’une  ecchymose  causée  par  un  coup.  Cette  disposi- 
tion s’étendait  dans  une  épaisseur  considérable  de  la  pulpe 
médullaire.  Rien  à noter  du  reste  (1). 


B.  Développement  graduel  des  sj'mpiomes , 

Dans  certains  cas,  les  phénomènes  que  nous  venons  de  voir 
débuter  tout-à-coup  et  simultanément,  se  développent  peu  à peut 
et  successivement;  cette  vaiiété,  bien  que  plus  caractéristique* 
du  ramollissement,  est  beaucoup  moins  commune  que  la  pré- 
cédente. 

Observation  Sy.  — Développement  graduel  d une  hémiplégie  gau-- 
che  , avec  contracture  du  membre  supérieur.  Mort  au  bout  de  trente-- 

(t)  Leroux,  Cours  sur  les  généralités  de  la  ntedecine  praticju: , t.  vm  , 
page  202,  1825. 

La  date  de  celte  ob.servalion  , recueillie  en  1801  , la  rend  as.se?.  inlrres- 
sanle.  Sur  qiialre-vingts  observations  d’apoplexie  ou  de  paralysie  conte-- 
nues  dans  celle  partie  de  l’ouvrage  de  Leroux,  c’est  à peu  près  la  seule  où  il 
soit  question  de  ramollissement.  Du  reste,  l’auteur,  au  lieu  d’e’tudier  ceitet 


OBSSTITATION*. 


107 


cinq  jours,  des  progrès  d’une  phthisie  pulmonaira,  — Ramollissement 
d’une  partie  de  l’hémisphere  droit. 

Une  femme,  âgée  de  78  ans,  entra  à la  Pitié,  présentant  une 
liémiplégie  gauche  complété,  avec  contractuie  du  inetuhie  su- 
per enr.  Elle  raconta  qu’une  quinzaine  jours  avant  son  entrée 
à riiôpiial,  elle  avait  été  tout  étonnée  de  voir  l annulaire  et  le 
petit  doigt  de  la  main  gauche  se  fléchir  brusquement,  sans 
qu’elle  pût,  avec  tous  les  elToi  ts  de  sa  volonté,  les  ramener  dans 
l’exteiisioii  ; elle  nVprouva  lien  autre  chose  pendant  deux  ou 
trois  joui  s;  puis  toute  la  main  gauche  se  fléchit  avec  violence 
sur  l’avant-bias,  et  bientôt  celui-ci  à son  tour  fut  entraîné  vers 
le  bras;  en  même  temps  le  membre  abdominal  gauche  devint 
engourdi,  plus  pesant  que  l’autre,  et  enfin  il  se  paralysa  com- 
plètement, sans  que  jamais  il  lût  le  siège  d’aucune  conlractui-e. 
Il  n’y  avait  jamais  eu  ni  céphalalgie,  ni  douleurs  dans  les  mem- 
bres, ni  troubles  de  l’intelligence.  Cette  femme  était  alors  ar- 
rivée an  dernier  terme  d’une  phthisie  pulmonaire.  Elle  suc- 
comba au  bout  d’une  quinzaine  de  jours,  sans  qu’aucun  nou- 
veau phénomène  apparût  du  côté  du  système  nerveux. 

Autopsie.  — Un  peu  au-dessous  des  circonvolutions,  à l’u- 
nion des  lobes  antérieur  et  moyen  de  l’hémisphère  droit,  la 
substance  nerveuse  présentait  un  ramollissement  notable,  occu- 
pant un  espace  assez  grand  pour  contenir  largement  une  pomme 
d’api.  Aucune  injection  n’accompagnait  ce  ramollissement  ; il 
ressemblait  par  sa  couleur  et  sa  consistance  à une  forte  solution 
d’amidon  dans  de  l’eau  (1). 

Observation  3y  {bis).  — Agitation,  trouble  de  l’intelligence  puis  en- 
gourdissement, fourmillement,  contracture  et  paralysie  des  membres 
du  côté  gauche.  Mort  au  bout  de  quinze  jours. 

Une  femme,  âgée  de  83  ans,  à la  suite  d’une  forte  contrariété 
présenta  de  l’agitation  et  un  désordre  notable  de  l’intelligence; 

alteraion  qui  devait  être  nouvelle  pour  lui , n’en  parle  dans  ses  réflexions  , 
que  pour  chercher  sa  fdiaiion  à travers  quelques  circonstances  anle'céden- 
tes,  telles  que  .syphilis,  dartres  surdité',  etc. 

(I)  Andral,  loc  cil.,  pas-e  406.  Bien  que,  daps  celle  dernière  observation, 
le  rauiollissenient  ne  soit  |)lus  à l’état  aigu  , elle  ne  nous  en  offre  pas  moins 
un  exemple  intéressant  de  la  marche  qu’il  peut  suivre  durant  sa  première 
période. 


108 


RAMOLLISSEMENT  AIGU.  (sYMPT.) 

elle  urinait  dans  son  crachoir,  se  perdait  dans  sa  salle,  mena- 
çait de  battre,  même  de  tuer  les  personnes  qui  l’environnaient. 
Il  n’y  eut  pendant  plusieurs  jours  aucun  trouble  des  mouve- 
ments ; mais  bientôt  le  bras  gauche  commença  à s’engourdir,  il 
devint  le  siège  de  fourmillements  , puis  de  la  contracture  ; il 
resta  longtemps  dans  cet  état,  et  enfin  la  contracture  fut  sui- 
vie de  la  paralysie  complète  ; la  jambe  du  même  côté,  étrangère 
aux  accidents  pendant  les  premiers  jours  de  la  paralysie  du 
bras,  commençait  à ressentir  des  fourmillements  et  à se  con- 
tracter, lorsque  la  malade  mourut  le  14  février,  quinze  jours 
après  l’invasion  de  la  maladie. 

Autopsie.  — Le  lobe  poste'rieur  de  l’he'misphère  droit  était,  à 
sa  superficie,  réduit  en  une  bouillie  jaunâtre,  diffluente;  cette 
altération  pénétrait  à un  pouce  de  profondeur  environ  dans  la 
substance  de  ce  lobe  et  commençait  à s’étendre  en  dehors  du 
lobe  moyen  ; la  substance  corticale  du  reste  de  l’hémisphère  et 
celle  du  côté  opposé  présentaient  dans  plusieurs  points  des  mar- 
brures rougeâtres  (1). 


Voyez  encore  les  observations  1,  2 et  13,  déjà  rapportées  au 
chapitre  de  l’anatomie  pathologique. 

§ II.  Deuxième  forme  (Ataxique).  — Excitation  ou  perversion  des  fonctions 

cérébrales. 

De  même  que,  dans  les  observations  précédentes,  nous  avons 
vu  l’abolition  des  fonctions  cérébrales  porter  tantôt  sur  le  mou- 
vement seul,  l’intelligence  étant  bien  conservée,  tantôt  surtout 
sur  l’intelligence  et  les  sens , nous  allons  voir  également,  dans 
les  observations  qui  suivent , des  différences  analogues,  mais 
bien  plus  tranchées,  résulter  du  point  sur  lequel  aura  porté  le 
trouble  des  fonctions  cérébrales  ; ainsi  tantôt  on  observera  seu- 
lement du  délire,  tantôt  des  convulsions  épileptiformes  , d’au- 
tres fois  (les  modifications  variées  de  l’intelligence , du  senti- 
ment et  du  mouvement  , en  un  mot,  avec  des  lésions  anatomi- 
ques toutes  semblables  en  apparence,  lesformessymptomatiques 
les  plus  différentes,  les  plus  opposées. 


(»)  Rostan  , loc.  cit,,  page  63. 


obseuvations. 


ion 


ÜBSEnvATiON  38.  — Pneumonie  ; délire  , mort  trois  jours  après.  — 
Ramollissement  aigu  de  la  couche  corticale  de  quelques  circonvolu- 
tions. 

La  nommée  Marie  Magrod,  âgée  de  75  ans,  entra  le  1''  mai 
1838  à l’infirmerie.  Elle  avait  une  douleur  aiguë  sous  le  sein 
droit,  de  la  fièvre,  de  l’oppression.  En  avant  et  à droite,  ma- 
tité incomplète,  souffle  tubaire,  bronchophonie,  quelques  bul- 
les de  râle  crépitant  {saignée  de  trois  palettes).  Le  lendemain, 
la  physionomie  est  étrange,  animée  ; la  malade  a eu  hier  beau- 
coup d’agitation,  de  délire,  elle  s’est  levée  plusieurs  fois  ; elle 
dit  être  dans  la  salle  depuis  plusieurs  mois  j elle  parle  presque 
constamment.  Le  pouls  est  petit  et  fréquent  {Tartre  stibié  50 
centigr.)  Le  jour  suivant,  l’intelligence  est  toujours  égarée,  mais 
la  malade,  plongée  dans  un  abattement  profond,  garde  le  si- 
lence. On  n’observe  rien  de  particulier  du  côté  des  mouvements 
ni  de  la  sensibilité  générale.  Le  pouls  est  très  petit  et  très  fré- 
quent. Il  n’y  a pas  eu  d’évacuations.  ( Tartre  stibié,  75  centigr., 
selles  nombreuses.)  Morte  le  4 au  malin,  dans  une  forte  pros- 
tration, sans  coma. 

Autopsie.  — Rien  de  remarquable  aux  méninges.  A la  partie 
externe  et  antérieure  de  l’hémisphère  gauche,  trois  ou  quatre 
circonvolutions  présentent  une  coloration  rose  assez  prononcée, 
et  un  rainoliissement  notable,  appréciable  au  toucher  et  surtout 
à l’aide  d’un  filet  d’eau.  La  rougeur  et  le  ramollissement  sont 
tout-à-falt  superficiels  et  ne  pénètrent  pas  au-delà  d’un  ou 
deux  millimètres  ; ils  n’occupent  pas  les  anfractuosités,  mais 
seulement  le  sommet  des  circonvolutions.  La  pie-mère  offre 
quelques  adhérences  molles  à leur  niveau.  Le  reste  du  cerveau 
est  sain.  Un  peu  de  sérosité  limpide  dans  les  ventricules. 

Pneumonie  à droite  avec  commencement  de  supputation. 


Observation  39.  — Délire  aigu  accompagné  de  fièvre.  Mort  le  qua 
trième  jour.  — Ramollissement  superficiel , avec  rougeur  et  adhé- 
rences de  la  pie-mère  sur  un  grand  nombre  de  circonvolutions  de  l’hé- 
misphère gauche.  Sérosité  limpide  abondante  dans  les  ventricules  et 
la  pie-mère. 

La  nommée  Gillet,  âgée  de  80  ans,  de  forte  constitution,  ne 
paraît  pas  avoir  jamais  rien  présenté  du  côté  du  cerveau.  Le 


110 


rAmollissemejnt  Aigu,  (sympt.) 

18  mars  1840,  elle  sortit  de  l’hospice  (Salpêtrière)  et  passa  la 
journée  à Paris.  Elle  rentra  le  soir,  se  plaignant  de  frisson. 

Elle  fut  amenée  le  lendemain  à rinfmnerie.  Il  n’y  avait 
point  de  fièvre,  point  de  céphalalgie.  Toutes  les  fonctions  céré- 
brales semblaient  en  bon  état. 

Le  20,  dans  la  journée,  elle  commença  à délirer,  chercha  à 
s habiller,  à se  lever — les  paroles  étaient  sans  suite,  loquacité, 
tête  chaude,  face  rouge,  langue  sèche.  {Saignée  de  3 pal.) 

21.  Même  état.  On  est  obligé  de  lui  mettre  la  camisole,  pour 
la  retenir  au  lit.  {Laaement  purgatif.) 

Le  meme  état  persista  le  lendemain  j le  pouls  irrégulier,  fré- 
quent , la  langue  sèche,  le  front  brûlant;  l’agitation  était 
glande,  elle  parlait  toujours.  (40  sangsues  au  col.)  Elle  mourut 
le  23  dans  la  journée.  On  ne  remarqua  rien  du  côté  du  mouve- 
ment et  de  la  sensibilité. 

Autopsie.  — 11  s’écoule  peu  de  sang  du  côté  des  sinus  de  la 
dure-mère.  Il  s’échappe  une  certaine  quantité  de  sérosité  lim- 
pide de  la  cavité  de  l’arachnoïde,  le  feuillet  viscéral  de  cette 
membrane  est  opaque  dans  presque  toute  son  étendue,  surtout 
près  de  la  ligne  médiane.  La  pie-mère  est  infiltrée  d’une  grande 
quantité  de  sérosiié  limpide  qui  écarte  les  anfractuosités  ; elle 
est  assez  finement  injectée  au  niveau  du  tiers  postérieur  de  l’hé- 
misphère. Elle  se  détache  généralement  avec  la  plus  grande  fa- 
cilité, excepté  sur  l’hémisphère  gauche,  où  elle  entraîne  avec 
elle  une  partie  de  la  pulpe  cérébrale,  par  plaques  très  minces, 
de  la  largeur  d’une  lentille.  — Là.  le  tissu  cérébral  est  rougeâtre 
et  ramolli,  mais  non  diffluent  sous  un  jet  d’eau. 

La  substance  médullaire  paraît  saine  et  nullement  injectée. 
Les  ventricules  latéraux  sont  remplis  et  élargis  par  une  grande 
quantité  de  sérosité  limpide.  Le  septum  est  distendu  et  comme 
prêt  à crever. 

L’aqueduc  de  Sylvius  est  évidemment  élargi. 

Le  cervelet  est  sain. 

Il  s’écoule  une  assez  grande  quantité  de  sérosité  du  canal  ra- 
chidien. 

On  ne  remarque  aucune  lésion  dans  la  poitrine  et  l’abdomen. 


Oi»ia»Ari«»  4o*  — Déraenuf.  Accèc  ppilrptiformc»  suivit  d'hénii- 


OBSEUVAïlOWS. 


111 


pk'gie;  mort  quarante-huit  heures  après  leur  première  apparition. — 
Ramollissement  chronique  du  lobe  postérieur  de  l’hémisphère  droit; 
inflammation  aigue  des  circonvolutions  voisines. 

La  nommée  Beaufils,  âgée  de  62  ans,  en  démence  depuis 
plusieurs  années,  était  tombée  dans  un  état  d’imbécillité  com- 
plète. Elle  ne  présentait  aucun  signe  de  paralysie,  si  ce  n’est 
une  légère  difficulté  de  la  parole,  et  depuis  trois  mois,  l’émis- 
sion involontaire  de  l’urine  et  des  fecès. 

Le  2'  août  1838,  elle  fut  prise  tout  à coup  d’une  attaque  d’é- 
pilepsie bien  caractérisée;  les  muscles  des  membres  et  de  la 
face  étaient  agités  de  fortes  secousses  convulsives,  surtout  à 
gauche  ; la  bouche  fortement  tirée  de  ce  côté  ; la  face  tuméfiée 
et  violacée.  Une  écume  sanguinolente  sortait  de  la  bouche. 
Plusieurs  attaques  semblables  se  reproduisirent  dans  la  jour- 
née, durant  un  quart  d’heure,  une  demi-heure  et  furent  suivies 
d’un  état  complet  de  résolution  et  d’insensibilité.  Le  pouls  était 
très-petit  et  il’une  grande  fréquence. 

Le  lendemain,  coma  profond  sans  aucun  signe  de  connais- 
sance; pupilles  immobiles  et  un  peu  resserrées;  hémiplégie  gau- 
che sans  raideur  ; insensibilité  générale  presque  absolue  ; respi- 
ration fréquente,  râle  trachéal,  pouls  à peine  sensible. 

Moitié  23,juste*48  heures  après  l’apparition  des  accidents 
épileptiformes. 

Autopne  36  heures  après  la  mort.  — Les  sinus  contiennent 
un  peu  de  sang  liquide  et  en  caillots.  Les  vaisseaux  de  la  base 
du  crâne  sont  sains.  La  cavité  de  l’arachnoïde  contient  une  assez 
grande  quantité  de  sérosité  ; son  feuillet  viscéral  est  très  trans- 
parent. Un  peu  d’infiltration  séreuse  de  la  pie-mère,  avec  une 
injection  sanguine  très-vive  et  qui  dessine  parfaitement  ses 
vaisseaux  les  plus  déHés.  Tout  le  lobe  postérieur  de  l’hémis- 
phère droit  est  converti  en  une  bouillie  blanche  à l’intérieur 
d’un  jaune  fauve  à l’extérieur,  comme  infiltrée  d’un  liquide 
blanchâtre,  lait  de  chaux.  Les  circonvolutions  sont  tout  à fait 
déformées.  Le  ramollissement  s’étend  profondément  jusqu’à  la 
partie  postérieure  du  venti’icule  latéral,  dont  les  parois  elles- 
mêmes  sont  intactes. 

Au  fievant  de  cette  altération,  on  voit  plusieurs  circonvolu- 
tions de  la  convexité  colorées  en  rose  assez  vif,  volumineuses  et 
largement  arrondies  , superficiellement  ramollies.  Cette  colo- 


ramollissement  Aigu  (sympt.) 

ration  rose  et  ce  léger  ramollissement  n’intéressent  que  la  su- 
perficie de  la  substance  corticale.  La  pie-mère,  qui  partout  ail- 
leurs s’enlevait  avec  une  grande  facilité  , présentait  au  niveau 
du  ramollissement  blanc  du  lobe  postérieur,  des  adhérences  in- 
times et  impossibles  à détacher,  et  au  niveau  des  circonvolu- 
tions rouges  et  tuméfiées,  des  adhérences  nombreuses  , molles, 
et  qui  en  laissaient  la  surface  inégalé  et  comme  tomenteuse. 

Un  peu  de  sérosité  dans  les  ventricules.  Rien  à noter  dans 
le  cervelet,  la  moelle  alongée  et  la  moelle  épinière. 

Poumons  sains,  à part  une  infiltration  sanguine  de  la  base 
du  poumon  gauche. 


Observation  — Céphalalgie,  faiblesse  des  membres  inférieurs 
depuis  plusieurs  mois.  Signes  d’une  maladie  du  cœur.  Tout  à coup 
convulsions  épileptiformes.  Mort  au  bout  de  trois  jours.  — Tumeurs 
fibreuses  de  la  dure-mère.  Ramollissement  aigu  du  cerveau. 

Un  homme  âgé  de  cinquante-neuf  ans  éprouvait,  depuis 
onze  mois,  de  la  céphalalgie,  des  vertiges,  des  pesanteui  s de 
tête;  puis  ses  jambes  se  sont  infiltrées;  en  même  temps  il  avait 
des  palpitations,  de  la  dyspnée.  Depuis  plusieurs  mois,  il  rete- 
nait diflicilement  ses  urines,  et,  depuis  trois  mois,  il  éprouvait 
une  grande  faiblesse  dans  les  membres  inférieurs.  Un  jour  il 
fut  pris  tout  à coup  de  convulsions  épileptiformes  : distorsion 
des  traits,  contorsion  des  membres,  écume  à la  bouche,  perte 
de  connaissance,  etc.  Le  calme  se  rétablit  après  quelques  in- 
stants. Le  lendemain,  ces  convulsions  épileptiformes  se  mon- 
trèrent passagèrement  dans  la  journée,  mais  beaucoup  plus 
intenses  le  soir.  Le  troisième  jour,  stupeur,  paralysie  du  bras 
gauche  presque  complètement  insensible,  contracture  de  la 
jambe  ; l’inlelligence  n’est  pas  tout  à fait  abolie.  Mort  quelques 
heures  après. 

yfutopsie.  — Végétations  fibreuses  de  la  dure-mère  implan- 
tées la  plupart  sur  la  face  externe  et  reçues  dans  des  dépres- 
sions correspondantes  des  os  du  crâne.  Une  autre  considérable 
pénètre  dans  la  partie  supérieure  et  postérieure  de  l’iiémis- 
pbère  droit  du  cerveau  ; les  parois  de  la  cavité  cérébrale  qui 
reçoit  cette  tumeur  sont  ramollies  dans  une  épaisseur  de  quel- 
ques lignes,  où  la  substance  nerveuse  est  réduite  en  une  pulpe 


OBSERVA  nONS. 


1 15 

rou[;eàtre.  Eugouemenl  Iiyjiostatique  des  poianoas.  Insuiïisaucc 
des  valvules  auiiculo-ventiiculaires  tlu  cœur  (1). 


Obskrvatiok  42.  — Céphalalgie,  agitation,  assoupissement,  rauleur 
saccadée  des  membres  des  deux  côtés;  conservation  de  la  sensibilité. 
Mort  au  bout  de  quatre  jours.  — Ramollissement  dans  le  lobe  posté- 
rieur droit  du  cerveau. 

La  nommée  Coutard,  âgée  de  quatre-vingt-trois  ans,  était 
entrée  à l’infirmerie  le  29  janvier  1838,  pour  une  bronchite 
chronique.  On  n’avait  jamais  rien  remarqué  chez  elle  qui  dût 
fixer  l’attention  vers  l’état  du  cerveau. 

Le  16  février,  elle  lut  prise  de  douleurs  par  toute  la  tête. 

Le  lendemain , cette  céphalalgie  augmenta  ; le  front  devint 
chaud,  les  yeux  s’animèrent,  la  malade  s’agita  beaucoup,  sur- 
tout pendant  la  nuit;  elle  cherchait  à.  se  lever  ; elle  avait  un 
déhre  en  action  très-prononcé.  11  s’y  joignit  dans  la  journée 
quelques  paroles  incohérentes;  cependant  la  face  n’était  pas  in- 
jectée ; la  vue , l’ouïe  , la  sensibilité  générale , n’avaient  subi 
aucune  altération,  mais  la  parole  était  devenue  difficile,  em- 
barrassée ; le  pouls  était  plein,  large,  à 90.  La  poitrine  ne  fut 
examinée  qu’en  arrière,  et  l’on  ne  remarqua  rien  de  particu- 
lier dans  la  manière  dont  .s’y  faisait  la  respiration.  (Seize  sang- 
sues derrière  les  oreilles). 

Les  jours  suivants  , même  état  ; la  respiration  paraît  plus  dif- 
ficile. (16  sangsues  aux  tempes.)' 

20.  — Assoupissement  profond,  plus  de  réponses.  Tremble- 
ment dans  les  muscles  inférieurs  de  la  face;  les  deux  joues  se 
laissent  gonfler  et  affaisser  alternativement  par  le  passage  de 
l’air.  Les  membres  ne  sont,  à proprement  parler,  ni  paralysés, 
ni  contracturés , mais  ils  n’exécutent  plus  aucun  mouvement 
bien  coordonné,  et  lorsqu’on  cherche  à les  étendre  ou  à les  flé- 
chir, on  éprouve  de  légères  résistances  par  saccades:  du  reste, 
la  sensibilité  est  conservée.  Les  pupilles  sont  contractées.  Le 
pouls  est  de  90  à 95,  beaucoup  moins  développé.  La  respira- 

(t)  l'ovgel,  Recherches  clinù/ues  sur  le  degré  de  certitude  du  diagnostic 
dans  Uis  muhcLes  de  L'appareil  cérébro-spinal.  Gazette  méd. , 183&  , 
n"  (4  . 


8 


114  ramollissement  aigü.  (sympt.) 

lion  est  fréquente  (à  32);  la  langue  est  sèche.  Mort  ^ans  la 
soirée. 

Autopsie  3G  heures  après  la  mort.  — Quantité  assez  considé- 
rable de  sérosité  sous  l’arachnoïde;  quelques  taches  opalines  sur 
cette  membrane;  point  d’injection  de  la  pie-mère.  Plaques 
calcaires  sur  les  principaux  troncs  des  artères  cérébrales.  La  pie- 
mère  s’enlève  irès-aisément  de  la  superficie  du  cerveau  , si  ce 
n’est  au-dessus  du  lobe  postérieur  gauche  où  elle  entraîne  avec 
elle  une  couche  mince  du  substance  corticale  ramollie.  On 
trouve  dans  l’épaisseur  de  ce  lobe  un  ramollissement  de  la  sub- 
stance médullaire,  occupant  un  espace  de  5 centim.  d’avant  en 
arrière,  de  3 centim.  de  haut  en  bas,  séparé  du  ventricule  par 
une  lame  mince  de  tissu  non-raniolli.  Un  filet  d’eau,  projeté 
sur  la  partie  malade,  la  réduit  instantanément  en  grumeaux 
qui  sont  entraînés  par  le  liquide , ou  qui  flottent  encore  adhé- 
rents aux  parties  voisines.  La  substance  ramollie  est  blanche, 
mais  présente  par  endroits  une  teinte  légèrement  rosée.  Les  au- 
tres parties  de  l’encéphale  u’offrent  aucune  lésion. 

Deux  noyaux  de  pneumonie  lobulaire,  rouges  et  hépatisés  , 
à la  partie  antérieure  du  poumon  gauche.  Un  peu  d’engouement 
à la  partie  postérieure  des  poumons.  Rien  au  cœur.  Aorte  tiès- 
dilatée,  mais  uniformément  à son  origine  et  à sa  crosse.  Les  or- 
ganes de  l’abdomen  sont  tout-à-fait  sains. 


OusERvATtoN  43.  — Agitation,  mouvements  désordonnés  dans  tout 
le  système  musculaire , suivis  de  paralysie  dans  la  moitié  gauche  du 
corps.  Mort  vers  le  huitième  jour.  — Ramollissement  dans  le  lobe  pos- 
térieur droit. 

La  nommée  Bézard,  âgée  de  80  ans,  maigre  et  sèche,  fut  ap- 
portée à l’infirmerie  le  11  janvier  1838,  dans  un  état  de  demi- 
connaissance  qui  ne  lui  permettait  pas  de  parler.  Il  y avait  un 
peu  de  fièvre.  {Saignée  de  2 pal.) 

Le  lendemain,  le  visage  présentait  un  air  de  stupeur  ; les  ^œux 
étaient  brillants,  mais  le  regard  vague  et  indécis  ; la  parole 
aussi  embarrassée  que  la  veille.  Chaleur  au  front,  mouvements 
désordonnés,  agitation,  fréquence  dans  le  pouls,  langue  sèche. 
Les  membres  offraient  de  la  raideur  quand  on  cherchait  à les 
étendre , ce  quipouvaitêtrcdûà  une  résistance  volontaire.  {Sina- 


observations.  11’5 

pismes,  25  sangsues  au  col  ; lav.  purgatif. )he  jour  suivant,  sai~ 
gnée  de  2 palettes,  'vésicatoire  à la  nuque. 

14.  Somnolence;  raideur  !dans  le  bras  droit,  face  contractée 
à droite,  paralysie  de  la  joue  gauche. 

16.  Somnolence.  Hémiplégie  gauche.  Le  bras  soulevé  re- 
tombe comme  une  masse,  mais  le  pincement  y provoque  de  lé- 
gères contractions  musculaires;  raideur  des  membres  droits. 
La  vue  et  l’ouïe  ne  sont  point  abolies;  les  pupilles  sont  peu 
mobiles.  La  malade  répond  avec  peine  à quelques  questions; 
elle  dit  souffrir  beaucoup  dans  tout  le  côté  gauche,  que  tout  ce 
côté  est  écorché. 

Mort  le  surlendemain,  sans  avoir  rien  présenté  de  nouveau. 

Autopsie.  — Ramollissement  de  la  partie  inférieure  et  pos- 
térieure de  riiémisplière  droit,  large  de  6 centim.  environ  en 
tous  sens,  de3  centim.  de  profondeur;  la  substance  ramollie 
était  convertie  en  une  sorte  de  détritus  rosé  ou  rougeâtre,  aussi 
peu  consistant  qu’une  bouillie  épaisse.  Les  membranes  offraient 
dans  le  point  correspondant , une  teinte  rouge  uniforme. 

Un  peu  d engouement  à la  partie  postérieure  du  poumon 
droit. 


Observation  ik.  _ Céphalalgie,  délire,  fièvre.  Paralysie  et  rigidité 
du  bras  droit  ; soubresauts  de  tendons.  Mort  le  dixième  jour.  — Piou- 
geur  vive  et  générale  des  méninges  ; ramollissement  du  lobe  gauche 
du  cerveau  et  du  cervelet. 

Un  jeune  homme  de  18  ans  fut,  après  avoir  éprouvé  diverses 
émotions  morales , pris  de  frisson  avec  violente  céphalalgie , 
douleurs  dans  les  membres  et  fièvre. 

Le  8^  jour,  la  langue  et  les  dents  sont  sèches  et  noirâtres,  les 
yeux  fixes;  il  y a du  délire,  des  soubresauts  de  tendons;  le 
pouls  est  fréquent,  facile  à déprimer,  ventre  tendu,  épigastre 
douloureux  ; décubitus  sur  le  dos. 

Le  9'’ jour,  face  animée,  pupille  droite  plus  dilatée  que  la 
gauche,  paupières  abaissées  et  ne  s’ouvrant  que  dans  les  mo- 
ments de  forte  douleur;  ailes  du  nez  agitées,  mouvements 
spasmodiques  des  lèvres  ; délire  violent , cris  plaintifs  , impos- 
sibilité d’articuler  un  seul  mot;  agitation  du  larynx;  soubre- 
sauts de  tendons,  surtout  dans  le  bras  gauche,  qui  est  toujours 


RAM0LLIS$1ÎME??T  AIGL'.  ( svmpt.) 

en  mouvement;  rip^idité  du  bras  droit,  fléchi  sur  le  ventre;  ab- 
domen douloureux,  diarihee  involontaire;  pouls  très  fréquent 
et  régulier. 

Mort  le  lendemain,  dans  un  coma  profond. 

Autopsie.  — Sinus  de  la  dure-mère  gorgés  de  sang  noir. 
L’arachnoïde  est  partout  rouge, épaisse  et  se  détache  facilement 
sans  se  rompre.  Les  ventricules  ne  contiennent  pas  de  sérosité. 

La  pulpe  cérébrale  est  généralement  très  injectée.  La  face 
supérieure  et  interne  du  lobe  moyen  et  gauche  du  cerveau  pré- 
sente à sa  superficie  une  portion  de  sa  substance  ramollie  , rou- 
geâtre, dans  une  étendue  de  sept  à huit  lignes  de  largeur,  sur 
deux  d’épaisseur.  Le  lobe  gauche  du  cervelet , dans  toute  sa 
circonférence  antérieure  et  externe,  est  ramolli  dans  une  éten- 
due de  quatre  à cinq  lignes. 

Tous  les  organes  du  ihorax  sont  sains.  La  mucfueuse  intes- 
tinale est  parsemée  de  plaques  rouges  élevées,  de  végétations 
ulcérées,  principalement  au  cæcum  et  au  colon  (1). 


Observation  45. — Pneumonie;  hémiplégie  gauche  complète  au 
bout  de  deux  jours  , puis  diminuant  graduellement,  l emplacée  par  de 
la  contracture  ; perte  incompiète  de  la  parole,  conservation  de  1 intel- 
ligence. Mort  an  bout  de  vingt-huit  jours,  — Légère  exsudation  san- 
guine à la  surface  de  l’arachnoïde.  Piamollissement  purulent  de  l’hé- 
niisphère  droit. 

La  nommée  Tondiit,  âgée  de  66  ans,  avait  été  affectée,  il  y a 
quatre  ans,  d’une  hémiplégie  droite,  survenue  subitement  sans 
perte  de  connaissance,  et  qui  avait  fini  parue  lui  laisser  qu’un 
peu  de  faiblesse  dans  le  côté  droit.  Elle  entra  à l’infirmerie  le 
18  avril  1839,  dans  le  service  de  M.  Dalmas  , pour  une  pneu- 
monie droite.  Le  20 , il  y avait  les  signes  d’une  hépatisation 
avec  épanchement  à la  base  du  poumon  gauche;  trois  saignées 
de  180  gram.  chacune  avaient  été  praticjuées  ; il  survint  vers 
deux  heures  de  l’embarras  dans  la  parole  , et  un  subdelirium 
léger.  A six  heures,  la  bouche  était  déviée  à droite,  la  parole 
peu  intelligible,  le  pouls  toujours  fort  et  fréquent. 

21.  Même  état  de  la  parole  et  de  l’intelligence.  L’œil  gauche 

(Ij  Pareut-Diichtttflct  et  MHriinet,  Ti'aîtc  Je  la  nitfniiiÿiic,  page  L2'.‘. 


0BSF.HV.tT10.>'5. 


117 


i'6st6  fcvuiéj  ItiS  deux  pupilles  sont  e^sles  ^ coiitiîictiles  ^ un  peu 
dilatées;  la  langue  n’est  point  déviée.  Hémiplégie  gauche  in- 
complète ; il  faut  pincer  la  peau  de  ce  côté  avec  beaucoup  de 
force  pour  que  la  malade  perçoive  quelques  douleurs.  Elle 
soulève  un  peu  le  bras^  mais  ne  peut  fléchit  les  doigts.  Pas  de 
selles  depuis  deux  jours.  ( Eau  de  Sedlitz.  ) 

22.  Le  bras  gauche  est  tout-à-fait  paralysé.  Selles  involon- 
taires. f Saignée.) 

23.  Agitation,  cris  pendant  la  nuit.  (5  sangsues  derricra  cha- 
que oreille.) 

Les  jours  suivants,  les  mouvements  reparaissent  graduelle- 
ment dans  le  membre  supérieur  gauche,  les  doigts  seuls  de- 
meurent immobiles;  les  yeux  sont  également  ouverts,  la  parole 
un  peu  mieux  articulée.  H J a plus  de  calme,  et  l’intelligence 
paraît  assez  nette. 

2 mai.  Air  d’hébétude,  bien  que  la  malade  essaie  de  ré- 
pondre aux  questions;  les  deux  bras  s’agitent  à peu  près  égale- 
ment ; la  main  gauche  serre  avec  quelque  force.  La  sensibilité  a 
tout  à fait  reparu.  Des  eschares  se  forment  au  siège  et  aux  tro- 
chanters. Les  signes  locaux  de  la  pneumonie  diminuent  ; il  y a 
moins  de  fièvre. 

10  mai.  Contracture  du  bras  gauche;  cris  et  agitation  conti- 
nuelle ; elle  dit  qu’elle  soufiVe  partout.  Les  yeux  sont  fixes  et 
tournés  à droite,  ainsi  que  la  tête.  Pouls  fréquent,  langue  sèche, 
jaune,  fendillée.  Les  eschares  s’étendent,  et  finissent  par  occuper 
presque  tout  le  siège.  Les  mêmes  phénomènes  se  reproduisent 
pendant  plusieurs  jours,  puis  la  malade  tombe  dans  une  pros- 
tration profonde,  et  meurt  le  18,  ayant  conservé  sa  connaissan* 
ce  jusqu'à  la  fin. 

Jutopsie  trente  heures  après  la  mort.  — Le  feuillet  pariétal  de 
l’arachnoïde  présente  dans  plusieurs  points,  à la  base  et  à la  con- 
vexité, et  des  deux  cotés,  une  lame  mince  de  sang  rouge,  coa- 
gulé. L’arachnoïde  offre  en  outre  un  grand  nombre  de  petites 
plaques  blanchâtres  suivant  les  vaisseaux.  Commencement  d’os- 
sification des  artères  de  la  base. 

Sur  la  face  externe  de  1 hémisphère  droit,  à la  réunion  du 
tieis  postérieur  .avec  les  deux  tiers  anteiàeurs,  on  trouv'o  une 
surface  assez  étendue,  de  couleur  jaune  grisâtre,  très-molle,  et 
dont  on  ne  peut  détacher  la  pie-mère  sans  en  entraîner  la  ru- 


118 


RAMOLLISSEMENT  A[GU.  (SYMPT.) 

perfide.  Ce  ramollissement,  paraissant  formé  d’un  mélange  de 
pus  avec  la  substance  cérébrale,  pénètre  en  profondeur  jusqu’au 
ventricule  laiéral  dont  les  parois  sont  demeurées  intactes.  Toute 
la  partie  ramollie  est  pulpeuse,  se  laissant  pénétrer  profondé- 
ment et  entraîner  par  un  courant  d’eau,  et  d’une  teinte  grisâtre; 
elle  est  traversée  par  un  grand  nombre  de  vaisseaux  injectés. 
Rien  à noter  à l’hémisphère  gauche  ni  au  cervelet. 
Pneumonie  de  la  base  du  poumon  droit,  passant  à l’état  chro- 
nique. 


ARTICLE  SECOND. 

ANALYSE  DES  OBSERVATIONS  PRÉCÉDENTES. 

Après  avoir  présenté  une  série  d’observations  suffisante,  je 
ci*ois,  pour  faire  connaître  les  variétés  princi|)ales  du  ramollis- 
sement aigu,  je  vais  analyser  ces  observations  et  soumettre  à 
une  étude  spéciale  chacun  des  points  de  leur  histoire  sympto- 
matique. 

Je  ne  ferai  porter  cette  analyse  que  sur  les  faits  qui  m’ap- 
partiennent et  qui  sont  au  nombre  de  trente-deux , savoir  : 
vingt-quatre  déjà  rapportés  et  huit  autres  qui  trouveront  leur 
place  dans  le  cours  de  cet  ouvrage  (1). 

Je  mettrai  cependant  en  regard  des  résultats  que  nous  don- 
nera l’analyse  de  ces  faits,  ceux  obtenus  par  MM.  Rostan,  An- 
dral  et  Lallemand  , car  il  ne  suffit  pas  de  faire  assister  le  lecteur 
à ma  propre  observation , il  importe  d’en  rapprocher  celle  des 
auteurs  qui  m’ont  précédé  dans  cette  carrière.  Mais  il  ne  faut 
pas  oublier  que,  dans  leurs  résumés,  ils  ont  à peu  près  constam- 
ment négligé  de  distinguer  le  ramollissement  aigu  du  ramollis- 
sement chronique  : aussi  m’a-t-il  fallu,  pour  obtenir  des  termes 
exacts  de  comparaison,  m’adresser  non  pas  aux  analyses  néces- 
sairement confuses  et  infidèles  qu’ils  ont  dû  faire  sur  des  don- 
nées aussi  incertaines  , mais  à leurs  observations  elles-mêmes  , 
en  sépai’ant  soigneusement  celles  qui  présentaient  une  marche 
àiguë  , de  celles  qui  semblaient  appartenir  au  ramollissement 
chronique. 

(0  Observations  58,  65,  66, 69,  70,  78  et  <03. 


PB.0DTV0M1ÎS. 


119 


§ I.  Prodromes. 

.<  On  peut  distinguer  deux  périodes  bien  tranchées  dans  le 

ramollissement  cérébral,  dit  M-  Rostan  : la  première  se  com- 
pose de  phénomènes  précurseurs,  tels  que  céphalalgie,  vertiges, 
affaiblissement  de  l’intelligence,  modificatioii  du  caractère,  ten- 
dance au  sommeil,  engourdissements,  fourmillements, quelque- 
fois raideur  et  douleurs  dans  les  membres , d’autres  fois  du  dé- 
lire , de  l’agitation  ; enün  l’aliénation  mentale,  la  démence  sé- 
nile, précèdent  souvent  le  ramollissement  du  cerveau  (1  ). 

« A cela  il  faut  ajouter  la  diminution  de  la  vue,  même  la  cé- 
cité complète  , des  tintements  d oreilles,  etc.... 

« Dans  la  deuxième  période,  le  malade  perd  tout  à coup  ou 
graduellement  l’usage  de  quelques  uns  de  ses  membres....  » 

Cet  auteur  n’ayant  pas  distingué  le  ramollissement  aigu  du 
ramollissement  chronique  , il  est  évident  que  cette  division  des 
symptômes  en  deux  périodes  doit  être  fautive  en  quelque  chose, 
si  l’on  considère  la  maladie  en  general  ; s applique-t-elle  plus 
spécialement  à l’une  de  ces  formes? 

TS^ous  verrons,  en  étudiant  le  ramollissement  chronique,  que 
ce  qui  paraît  répondre  à la  première  période;  de  M.  Rostan 
n’est  autre  chose  que  l’état  aigu  de  la  maladie. 

Quant  au  ramollissement  aigu , suit-il  réellement  les  deux 
périodes  qu’indique  cet  auteur?  ^ 

Parmi  les  symptômes  que  M.  Rostan  confond  dans  sa  pre- 
mière période,  dite  de  phénomènes  précurseurs,  il  en  est  certains 
qui  appartiennent  au  ramollissement  lui-même,  c’est-à-dire  qui 
annoncent  que  cette  altération  est  déjà  formée  : ainsi  le  délire  , 
la  raideur  dans  les  membres,  la  perte  de  la  vue.... 

Il  en  est  d’autres  qui  constituent  de  véritables  prodromes , 
c’est-à-dire  qui  précèdent  l’époque  à laquelle  le  ramollissement 
se  forme  et  s’annonce  par  des  signes  caractéristiques.  Le  ramol- 
lissement cérébral  présente  cela  de  commun  avec  la  plupart  des 
maladies  aigues.  Ces  prodromes  se  montrent  immédiatement 
avant  sou  début,  comme  la  céphalalgie,  les  vertiges  ,1a  ten- 
dance au  sommeil  , les  engourdissements,  etc....  Mais  ce  n’est 
pas  là  une  période  de  la  maladie  , ce  sont  des  prodromes  qui  peu- 
vent manquer  ou  exister. 

(t)  Roïlan,  RecJiendirs. png.  t2  et  .suiv. 


«AMOLUSSKMEWT  AIGU.  (sYMPT.) 

Quelques  individus  frappés  de  ramollissement  étaient  sujets 
depuis  longtemps,  depuis  des  années  peut-être,  à des  maux  de 
tete,  a des  étourdissements,  à des  pertes  de  connaissance,  etc. 
Veirons-nous,  dans  cette  céphalalgie,  dans  ces  signes  de  con- 
gestion cérébrale,  des  prodromes  de  ramollissement  ? non,  cer- 
tainement, pas  plus  que  nous  ne  verrions,  dans  des  bronchites 
répétées,  dans  un  étoulFement  habituel , les  prodromes  d’une 
pneumonie  qui  viendrait  à éclater  à leur  suite  : des  bronchites 
antérieures  peuvent  faciliter  la  production  d’une  pneumonie  , 
comme  des  congestions  cérébrales  peuvent  prédisposer  au  ra- 
mollissement, mais  ce  ne  sont  pas  là  des  prodrômes  : encore 
moins  y verrons-nous  une  première  période  de  la  maladie. 

Quant  U la  demence  senile,  à l’aliénation  mentale,  à une 
apoplexie  ancienne  et  dont  les  traces  existeraient  encore,  à un 
ramollissement  chronique  dont  les  symptômes  auraient  précé- 
dé ceux  du  1 amollissement  aigu,  il  est  de  toute  évidence  que,  si 
ces  états  pathologiques  se  trouvent  liés  à l’existence  d’un  ra- 
mollissement , ils  ne  sauraient  en  être  considérés  comme  les 
prodromes  ni  comme  une  période  particulière  (1). 

Il  résulte  de  tout  ceci  que  M.  Ptcstan  a eu  tort  de  faire  une 
période  particulière  du  ramollissement,  de  ces  divers  phéno- 
mènes, dont  la  plupart  ne  sont  même  pas  de  véritables  pro- 
dromes. 

Les  prodromes  proprement  dits  dont  nous  venons  de  parler, 
et  qui  ne  consistent  qu’en  un  état  de  congestion  du  cerveau  , 
ont-ils  beaucoup  de  valeur  par  eux- mêmes,  comme  signes  pré- 
curseurs du  ramollissement?  Je  ne  le  crois  pas,  car,  si  je  ne  me 
trompe,  il  n’est  pas  une  altération  aiguë  de  l’encéphale  qu’ils 
ne  puissent  précéder,  depuis  le  coup  de  sang  (qui  n’est  lui- 
même  qu’une  congestion  brusque  et  intense),  jusqu’à  l’hémor- 
rhagie.  Mais  nous  reviendrons  avec  détail  sur  ce  sujet,  au 
chapili  c du  diagnostic. 


(I)  Dans  lin  aiiLrc  passage  de  son  livre  , M.  Rostan  convient  (pie  la  dr- 
mcnce  .se'nile , l’aliénation  menlnle  qu’il  avait  dit  précéder  souvent  le  ra- 
mollissciîiciit,  pourraient  bien  ii’èlre  autre  chose  que  les  symptômes  de  cette 
allérallon  lutenlo  et  clironiquc  ( page  217).  Je  ferai  seulement  observer 
(ju’ime  akeration  ([ui  déicrmine  une  aliénation  mentale  ne  saurait  être  con- 
sidérée comme  une  nllér.ation  la  ente. 


rnoBROMKS, 


121 


Si  de  tels  symptômes  avant-coureurs  se  montrent  fréquem- 
ment dans  les  autres  maladies  aiguës  de  l’encéphale,  leur  cons- 
tance peut-elle  au  moins  servir  à caractériser  le  ramollisse- 
ment? 

Voyons  d’abord  quels  résultats  nous  donneront  les  faits  con- 
tenus dans  le  livre  de  M.  Rostan. 

M.  Rostan  divise  les  trente  observations  de  ramollissement 
qu’il  rapporte,  en  deux  séries  : dix-huit  cas  de  ramollissement 
suivant  une  marche  reguZ/ere,  douze  cas  de  ramollissement  pré- 
sentant un  état  anomal. 

Dans  ces  douze  derniers,  nous  voyons  totalement  manquer 
les  symptômes  précurseurs.  Dans  trois  ou  quatre,  il  s agit,  il  est 
vrai,  de  femmes  alïectées  de  démence  sénile  ou  d alienation 
mentale,  mais  nous  n’avons  pas  besoin  de  répéter  que  ce  ne 
sont  pas  là  des  signes  précurseurs.  Daus  tous  ces  cas,  la  maladie 
a débuté  par  une  perte  de  connaissance  ou  par  une  paralj'sie 
subite. 

Dans  les  dix-huit  observations  ayant  suivi  une  marche  régu- 
lière, nous  trouvons  encore  des  cas  de  ce  genre  : ainsi  dans  les 
quinzième,  seizième  et  dix-huitième,  la  maladie  a débute  de  la 
façon  la  plus  subite  et  sans  aucun  prodrome.  Dans  une  autre,  on 
s’apercevait  seulement  depuis  quelques  jours  que  la  malade 
ne  marchait  pas  aussi  facilement  qu’à  l’ordinaire;  dans  l’obser- 
vation neuvième,  l’attacjne  subite  avait  seulement  été  précédée 
de  maux  de  tête  ; enfin,  dans  plusieurs  observations,  entre  au- 
tres la  quatrième,  les  malades  avaient  eu  d’anciennes  attaques 
d’apoplexie  dont  elles  conservaient  des  ressentiments,  et  cjni 
avaient  laissé  des  traces  matérielles  dans  le  cerveau. 

Tout  cela  ne  saurait  en  rien  caractériser  une  première  pé- 
riode du  ramollissement,  et  si  l’on  veut  en  excepter  le  cas  où 
il  y a eu  des  maux  de  tête,  nous  ne  voyons  pas  que  de  véritables 
prodromes  aient  été  observés  dans  aucun  de  ces  faits. 

De  sorte  que  , si  nous  comptons  bien  , nous  trouverons  que  , 
sur  toutes  les  observations  de  M.  Rostan  prises  ensemble,  les 
symptômes  précurseurs  ont  manqué  dans  un  nombre  de  cas 
plus  considérable  que  ceux  où  ils  ont  été  observés. 

J’insiste  sur  ceci,  parce  que/  faute  d’avoir  étudié  les  obser- 
vations avec  soin,  on  a basé  presque  tout  le  diagnostic  du  ra- 
mollissement sur  un  fait  qui,  à proprement  parler,  n’existe  pas. 


122 


nAMOLLlSSEMENT  AI&U.  (sYMPT.) 

Le  ramolUsseinent  cérébral  peut,  comme  toutes  les  maladies  , 
être  précédé  de  phénomènes  précurseurs,  mais  il  n’est  pas  vrai 
que  ces  derniers  lui  constituent  une  période  particulière,  ca- 
ractéristique. 

C’est  ce  que  démontrent  encore  mes  observations. 

Sur  trente-deux  cas,  nous  trouvons  que  les  sujets  des  obser- 
vations deuxième,  dixième,  trente-troisième,  trente-quatrième 
et  cinquante-huitième,  éprouvaient  habituellement  de  la  cépha- 
lalgie, des  étourdissements  ; dans  l’observation  onzième,  il  est 
question  d’une  céphalalgie  légère  ; dans  la  cinquième,  d’atta- 
ques épileptiformes  qui  se  répétaient  de  temps  en  temps  ; dans 
la  cent  troisième,  nous  voyons,  quinze  jours  avant  l’attaque,  des 
étourdissements,  et  depuis,  un  air  de  souffrance;  le  sujet  de 
l’observation  treizième  éprouvait  de  temps  à autre  des  attaques, 
l’intelligence  s’affaiblissait,  mais  c’étaient  les  symptômes  d’un 
ramollissement  chronique,  existant  depuis  longtemps,  lorsqu’il 
s’est  développé  un  ramollissement  aigu  ; celui  de  l’observation 
septième  éprouva  des  étourdissements  et  des  douleurs  dans  des 
membres  anciennement  paralysés  ; enfin  ceux  des  observations 
soixante-cinquième,  soixanle-dixième  et  soixante-douzième, 
avaient  présenté  de  la  céphalalgie  et  d’autres  symptômes  céré- 
braux, mais  c’étaient  aussi  les  symptômes  d’un  ramollissement 
chronique.  L’affaiblissement  général  noté  dans  l’observation 
soixante-dix-huitième,  tenait  sans  doute  aux  lésions  anciennes 
dont  le  cerveau  s’est  trouvé  le  siège. 

Dans  tous  les  autres  cas,  la  maladie  a débuté  tout-à-fait  su- 
bitement ou  au  moins  avec  une  grande  rapidité,  et  s.ans  qu’au- 
cun prodrome  ait  jamais  été  noté.  Je  sais  que,  dans  quelques- 
uns  où  les  malades  ont  été  réduits  tout-à-coup  à l'impossibilité 
de  témoigner  de  leur  état , des  prodromes  ont  pu  exister  et 
n’être  pas  perçus  de  ceux  qui  entouraient  alors  nos  malades  : il 
est  même  très-probable  qu’il  en  a dû.  être  ainsi  plus  d’une  fois  ; 
mais  est-il  donc  permis  d’attacher  une  si  granJe  valeur  à un 
phénomène  dont  on  est  réduit  à supposer  l’existence , si  l’on  ne 
veut  pas  accorder  qn’il  ne  se  montre  que  dans  le  petit  nombre 
des  cas?  Je  signalerai  comme  oftrant  le  plus  de  certitude,  .sous 
le  rapport  des  antécédents  , les  observations  neuvième,  vingt- 
troisième,  vingt-neuvième,  trentième,  trente-deuxième,  etc. 

M.  Andral  ne  paraît  pas  non  plus  attacher  une  grande  impor- 


123 


DÉBUT. 

tsnc6  îiux  signus  prccurscurs  du.  ramollisscmuiit.  •*  Le  ianiollis“ 
sement  des  hémisphères,  dit-il,  peut  avoir  un  prodrome.  Celui- 
ci  est  constitué  soit  par  les  différents  phénomènes  qui  appar- 
tiennent à la  congestion  cérébrale  , soit  par  de  la  céphalalgie  , 
soit  par  des  troubles  légers  du  côté  du  sentiment  ou  du  mou- 
vement, comme  l’engourdissement  ou  la  faiblesse  d un  mem- 
bre..., etc.  » (1). 

Au  commencement  de  son  ouvrage,  M.  Rostan,  comme  nous 
l’avons  vu,  présente  les  phénomènes  précurseurs  comme  cons- 
tituant un  des  caractères  essentiels  du  ramollissement  (p.  12). 
Il  paraît  cependant  avoir  reconnu  combien  cette  assertion  était 
exagérée^  car  plus  loin  il  dit  qu’ils  peuvent  manquer,  tout  en 
paraissant  regarder  ce  fait  comme  très-rare  ( p.  79)  ; et,  plus  loin 
encore,  il  dit  que  les  phénomènes  Yuéeurseurs  manquent  sou- 
vent dans  le  ramollissement  ( p.  396). 

Lorsque  bon  compare  un  grand  nombi’e  d’obsei'vations  de 
ramollissement  et  d’hémorrhagie  cérébrale,  on  ne  voit  pas  que 
les  prodromes  présentent  de  caractères  bien  particuliers  dans 
l’une  ou  l’autre  de  ces  maladies  : cependant  l’engourdissement, 
les  crampes,  les  fourmillements,  la  faiblesse,  lorsqu’ils  demeu- 
rent circonscrits  à un  côté  du  corps  et  surtout  à un  seul  mem- 
bre, sont  de  tous  ces  signes  ceux  auxquels  on  peut  accorder  le 
plus  de  valeur,  comme  prodromes  du  ramollissement.  Seule- 
ment il  faut  dire  que,  lorsqu’ils  s’observent,  ils  appartiennent 
habituellement  au  ramollissement  déjà  formé,  et  que,  par  con- 
séquent, ils  n’existent  que  rarement  à l’état  de  prodromes. 

Il  est  encore  une  remarque  importante  à faire  : c^est  que, 
lorsque  des  symptômes  aigus  viennent  à se  montrer  chez  un  in- 
dividu qui  se  trouvait  sous  l’influence  d’un  ramollissement 
chronique,  il  est  très-probable  qu’ils  tiennent  à un  ramollisse- 
ment aigu  , parce  qu’il  est  très-rare  de  voir  une  hémorrhagie 
se  faire  dans  de  telles  circonstances. 

§ II.  Début. 

Si  les  prodromes  du  ramollissement  nous  paraissent  avoir 
beaucoup  moins  d’importance  qu’on  ne  leur  en  avait  accordé  , 
soit  à cause  de  leur  absence  fréquente,  soit  à cause  de  leur  peu 

(t)  Audial , Clinifiw,  i.  v,  page  582.  Ces  divers  phe'uoinèncs  appar- 
tiennent tous  égnlemcnt  à la  congestion  ce'rébrale. 


flAMOLLJSSnME.\'r  AIGU.  (SYMPT.J 

«3e  signification,  nous  verrons  qu'il  n’en  sera  pas  de  meme  du 
début,  dans  un  certain  nombre  de  cas. 

Quelquefois  en  effet  le  ramollissement  débute  par  un  affai- 
blissement général  ou  partiel  des  facultés  cérébrales,  de  l’intelli- 
gence, du  mouvement,  du  sentiment,  etc.,  ou  par  quelques 
troubles  variés  de  la  sensibilité.  Ces  phénomènes  conduisent 
graduellement  ou  par  secousses  brusques  à l’anéantissement  de 
ces  facultés,  que  l’on  observe  presque  constamment  à un  degré 
plus  avancé  de  la  maladie  (1), 

Voilà  une  marche  bien  caractéristique,  dont  on  trouvera  des 
exemples  dans  neuf  de  ces  observations,  première,  deuxième, 
cinquième,  septième,  treizième, quarante-cinquième, cinquante- 
huitième,  soixante-douzième  et  cent  troisième. 

Dans  les  cas  de  ce  genre.  Userait  souvent  possible  de  diviser 
la  marcbe  du  ramollissement  en  deux  périodes,  lorsqu’à  un  af- 
faiblissement graduel  des  facultés  cérébrales  vient  brusquement 
succéder  une  abolition  complète  de  ces  facultés,  autrement 
dit  une  attaque  apoplectiforme  ; mais  il  faut  noter  que  cette 
pieinieie  période  ne  se  composerait  plus,  comme  celle  de 
M.  Rostan  , de  phénomènes  précurseurs. 

D autres  fois  , les  symptômes  du  ramollissement  débutent 
d’une  manière  instantanée  , et  l’on  voit  alors  paraître  à la  fois  , 
piecédcc  ou  non  de  prodromes,  cette  série  de  phénomènes  que 
nous  avons  dit  tout  à riieure  pouvoir  se  développer  graduelle- 
ment. 


Dans  certains  cas  alors  le  ramollissement  s’annonce  dès  le 
coinincnceinent  par  des  phénomènes  d’excitation,  des  symptô- 
mes spasinodicjues,  liés  ou  non  à ceux  de  collapsus  ou  de  para- 
lysie : ces  phénomènes  pouvant  affecter  les  fonctions  seules  de 
l’intelligence,  comme  dans  les  observations  troisième,  trente- 
huitième,  trente-neuvième,  ou  celles  du  mouvement,  et,  par 
exempie,  consister  en  des  attaques  épileplifonnes,  comme  dans 
l’observation  quarantième.  Les  plus  grandes  variétés  s’observent 
du  reste  sous  ce  rapport. 

Mais  il  s’en  faut  que  des  phénomènes  de  ce  genre  se  montrent 
dans  le  plus  grand  nombre  des  cas. 


(I)  Nous  verrons  plus  loin  que  l’iiémorrliagic  me'trnge'e  suil  (juelquefois 
une  marcbe  semblable  ; mais  1er.  cas  de  ce  genre  sont  assez  rare.s  pour  qu’il 
ne  re.sle  que  peu  decliances  à rerrour. 


DÉBUT. 


i2h 

Nous  voyons  en  ert’et  que,  sur  nos  vingt-quatre  premières  ob- 
servations. dix-sept  se  rapportent  à la  première  forme  ou  apo- 
plectique, et  que,  sur  ces  dix-sept,  douze  fois  le  début  a été  tout- 
à-fait  subit,  et  immédiatement  caractérisé  par  la  perte  de  con- 
naissance et  la  paralysie. 

De  plus , sur  trente  et  une  observations  de  ramollissement 
chronique,  où  j’ai  assisté  au  commencement  de  la  maladie,  ou 
pu  recueillir  dés  renseignements  sur  son  début , vingt  fois  ce 
dernier  a été  apoplectique  , onze  fois  il  a suivi  une  marche  dif- 
férente. 

IjCs  observations  de  M.  Rostan  nous  donnent  exactement  les 
mêmes  résultats.  Sur  dix-neuf  cas  où  la  maladie  paraît  avoir  suivi 
une  marche  aiguë  , quatre  fois  le  déve  loppement  des  accidents 
s’est  fait  assez  graduellenient;  douze  fois  il  y a eu  des  symptô- 
mes apoplectiques,  c’est-à-dire,  consistant  en  une  perte  soudaine 
du  mouvement  et  presque  toujours  de  la  connaissance  , précé- 
dée ou  non  de  prodromes;  trois  fois  le  début  paraît  avoir  af- 
fecté cette  forme,  mais  les  détails  ne  sont  pas  suHisamment  ex- 
plicites. 

Les  observations  de  M.  Andral  ne  sont  pas  conformes  aux 
précédentes  : en  elï  t,  sur  vingt-huit  cas  aigus  ou  chroniques  , 
où  le  début  de  la  maladie  a été  indiqué,  dix  fois  seulement  elle 
a suivi  une  marche  apoplectique. 

J’ai  analysé  sous  ce  point  de  vue  trente-cinq  observations  em- 
pruntées à différents  auteurs,  et  présentant  des  indications  suf- 
fisantes, et  j’ai  vu  que  vingt  avaient  présenté  au  début  une 
forme  apoplectique,  et  quinze  une  forme  différente.  Je  n’ai  tenu 
compte  que  des  cas  où  le  ramollissement  semblait  s’être  déve- 
loppé spontanément,  je  veux  dire  sans  cause  traumatique,  sans 
méningite  ni  lésion  organique  ancienne. 

En  réunissant  tous  ces  faits  au  nombre  de  cent  trente-sept, 
nous  voyons  que  , dam  soixante-dix-neuf  cas,  le  ramollissement 
a suivi  à son  débntune  marche  apoplectique,  que  cinquante-huit 
fois  il  s’est  accompagné  à cette  époque  de  phénomènes  dif- 
férents. 

On  a remarqué  sans  doute  la  différence  que  présentaient  mes 
observations  et  celles  de  M,  Rostan,  recueillies  presque  exclu- 
sivement chez  de.s  vieillards  , avec  celles  de  M.  Andral  et  des 
autres  auteurs,  prises  chez  des  sujets  de  différents  âges  : j’ai  dû 


126 


ramollissement  Aigu,  (sympt.) 

me  demander  si  cela  ne  tenait  pas  à ce  que  la  forme  apoplecti- 
que du  ramollissement  serait  plus  commune  dans  un  âge  avan- 
ce. C est  aussi  ce  qu  il  parait  possible  de  conclure  des  observa- 
tions que  je  viens  de  citer  : sur  \ingl-neuf  cas  de  ramollisse- 
ment ayant  suivi  une  marche  apoplectique,  empruntés  àM.  An- 
dial  et  a divers  auteurs,  on  ne  trouve  que  onze  individus  au- 
dessous  de  soixante  ans , tandis  que  sur  trente-deux  faits 
présentant  un  autre  début,  vingt-quatre  n’avaient  |>as  encore 
atteint  cet  âge.  Je  remarque  en  outre  que,  tandis  que,  parmi  les 
premiers  , on  ne  trouve  pas  un  sujet  de  moins  de  vingt  ans , il 
s’en  rencontre  six  parmi  les  seconds. 

Je  me  résume  en  disant  que  le  ramollissement  cérébral  affecte 
à son  début  une  forme  apoplectique  dans  le  plus  grand  nombre 
des  cas.  Il  est  probable  qu’il  n’en  est  ainsi  que  parce  ce  que  le 
ramollissement  est  une  maladie  plus  commune  au-dessus  qu’au 
qu’au-dessous  de  soixante  ans  ( il  importe  de  ne  pas  oublier  que 
je  parle  seulement  du  ramollissement  développé  hors  des  cir- 
constances que  j’ai  déjà  maintes  fois  signalées!  : car,  chez  les 
individus  au-dessous  de  cet  âge,  il  suit  le  plus  souvent  une 
marche  différente. 

§ III.  Troubles  du  mouvement. 

Dans  presque  tous  les  cas  de  ramollissement,  on  observe  la 
paralysie,  ordinairement  limitée  à un  côté  du  corps,  quelque- 
fois a un  membre.  Complété  ou  incomplète,  elle  s’accompagne 
quelquefois  de  contracture.  Celle-ci  peut  n'être  qu’une  raideur 
légère,  ou  bien  consister  en  une  contracture  énergique  que  l’on 
a la  plus  grande  peine  â surmonter.  La  raideur  des  articula- 
tions peut  se  montrer  du  côté  non  paralysé  5 il  faut  prendre 
garde  alors,  ou  bien  quand  la  paralysie  est  tiès-incomplète,  de 
prendre  pour  une  raideur  pathologique  une  contraction  volon- 
taire, ou  simplement  automatique,  si  l’intelligence  est  profondé- 
ment engourdie. 

Au  lieu  de  paralysie,  on  peut  observer  des  convulsions,  quel- 
quefois générales  et  simulant  l’épilepsie,  quelquefois  partielles  ; 
ce  sont  d’autres  fois  des  contractions  tétaniques,  un  simple  trem- 
blement musculaire,  etc. 

Ces  divers  troubles  des  mouvements  peuvent  alterner  avec  la 
paralysie,  la  précéder  ou  la  suivre,  ou  se  montrer  sans  elle. 


TROUBLES  DU  MOUVEMENT. 


127 


Quelquefois  on  les  observe  seulement  du  côté  opposé  à la  pa- 
ralysie. 

Nous  avons  rencontré  la  paralysie  dans  vingt-trois  cas  sur 
trente-deux  observations  de  ramollissement  aigu. 

Cette  paralysie  a été  notée  générale  deux  fois  (obs.  9 et  13); 
dans  un  troisième  cas  (obs.  78),  il  y avait  plutôt  affaiblisse- 
ment général  du  mouvement  que  véritable  paralysie.  Six  fois  la 
paralysie  était  limitée  aubra.s;  quatorze  fois  elle  occupait  tout 
un  côté  du  corps.  Je  n’ai  jamais  vu  la  jambe  plus  complètement 
paralysée  que  le  membre  supérieur,  tandis  que  le  contraire 
s’observait  assez  fréquemment.  Excepté  dans  l’observation  32, 
j^ai  remarqué  que  la  paralysie  limitée  au  bras  coïncidait  avec 
un  certain  degré  de  conservation  de  la  connaissance,  ou  avec 
un  début  un  peu  graduel.  Dans  les  deux  cas  où  la  résolution 
fut  générale,  dès  le  principe,  il  y avait  obtusion  complète  de 
toutes  les  facultés;  dans  l’observation  78,  où  il  y avait  seule- 
ment affaiblissement  général  du  mouvement,  toutes  les  facultés 
offraient  un  état  d’obtusion  analogue. 

La  marche  de  la  perte  du  mouvement  suit  habituellement 
celle  de  la  perte  de  l’intelligence.  Quand  la  maladie  débute 
par  une  perte  subite  de  la  connaissance,  en  général  l’hémiplé- 
gie est  subite  et  complète,  ou  à peu  près. 

Dans  sept  cas  seulement  (obs.  14,  23,  29,  31,  32,  45,  78), 
nous  avons  observé  de  la  raideur  dans  les  membres  paralysés; 
cinq  fois  elle  s’est  montrée  au  début  et  a augmenté  (obs.  31,  32), 
diminué  (obs.  25),  ou  même  disparu  (obs.  29,  78)  dès  le  len- 
demain ; dans  l’observation  45 , elle  n’est  survenue  que  le 
vingtième  jour,  et  à l’époque  d’une  récrudescence  ; car  à la 
première  apparition  de  la  paralysie,  plus  tard  incomplètement 
dissipée,  il  n’y  avait  pas  eu  de  raideur;  dans  l’observation  78, 
elle  était  fort  légère  et  n’occupait  que  les  membres  gauches, 
bien  que  l’affaiblissement  de  la  motilité  parût  également  pro- 
noncé des  deux  côtés  du  corps. 

Une  fois  (obs.  11)  nous  avons  noté  seulement  une  tendance  à 
la  raideur.  Dans  l’observation  34  , on  a observé  de  la  raideur 
dans  le  côté  non  paralysé,  le  tioisième  jour.  Dans  les  observa- 
tions 65  et  70,  il  y avait  une  raideur  générale  sans  paralysie. 
Dans  une  de  nos  observations,  que  nous  n’avons  pas  rapportée, 
nous  avons  observé  des  convulsions  générales,  le  second  jour, 


12&  nAjMOLLlSSEMüJNT  AIGL.  ( SYMPT.) 

«onséculiveinent  à une  hémiplégie  subite  qui  s’élait  montrée  le 
premier. 

Sur  dix-neuf  cas  rapportés  par  M.  Rostan,  et  qui  paraissent 
avoir  suivi  une  marche  aigue,  trois  fois  on  a noté  de  la  raideur 
dans  les  membres  paralysés,  une  fois  des  mouvements  convul- 
sifs généraux  , une  fois  on  a noté  du  trismus  ; quatorze  fois 
enfin  la  paralysie  s’est  montrée  sans  raideur. 

M.  Andral  pense  que  l’on  a établi  d’une  manière  beaucoup 
trop  générale  que  le  ramollissement  produisait  dans  le  plus 
grand  nombre  des  cas  la  contracture  des  membres.  « L’obser- 
vation nous  a démontré,  dit-il  ( et  il  fait  allusion  à la  fois  et  au 
ramollissement  aigu  et  au  ramollissement  chronique  ),  que 
cette  contracture  manque  peut  - être  aussi  souvent  qu’elle 
existe  (1).  » Sur  neuf  des  observations  qu’il  rapporte  , où  la 
rougeur  du  ramollissement  et  la  marche  des  symptômes  car-ac- 
térisenl  une  affection  aigue,  on  a noté  quatre  fois  absence  de 
contracture  dans  les  membres  paralysés;  mais  dans  un  de  ces 
cas  il  y avait  alternative  de  mouvements  tétaniques  ; quatre 
fois  on  a noté  de  la  contracture  ; une  fois  il  y a eu  des  convul- 
sions sans  paralysie. 

M.  Lallemand  a obtenu  des  résultats  très  différents  de  ceux 
de  M.  Rostan  et  des  miens  : c’est  dans  le  plus  petit  nombre  des 
cas  qu’il  a rencontré  la  paralysie  des  membres  sans  contrac- 
ture; encore,  dans  presque  tous,  l’apjwrition  graduelle  de  la 
résolution  des  mouvements  donnait-elle  à cette  dernière  un  ca- 
ractère particulier.  — La  contracture  précédait  ordinairement  la 
p.aralysie  ; d’autres  fuis  elle  survenait  quelque  temps  après  son 
début.  — Souvent  il  y eut  des  convulsions,  soit  partielles  et  al- 
ternant ou  non  avec  la  paralysie,  soit  générales  et  simulant  des 
attaques  d’épilepsie. 

Il  ne  faut  pas  oublier  que  M.  Lallemand  a recueilli  ses  ob- 
servations sur  des  individus  de  tout  âge,  sur  des  enfants,  et 
surtout  sur  des  adultes  ; que  beaucoup  .sont  relatives  à des  en- 
céphalites suppuratives  ou  consécutives  à des  méningites  puru- 
lentes ; que  quelques-unes  sont  traumatiques....  toutes  circon- 
stances qui  établissent  de  notables  différences  entre  ces  faits  et 
ceux  observés  par  M.  Rostan  et  par  moi. 


(I)  Audral , loc.  ctt.,  page  556. 


tholbles  vu  müuvemeist. 


129 


Il  faut  remarquer  encore  que  le  plus  grand  iioiul)re  des  ob- 
servations de  IVI.  Lallemand  ne  lui  appartiennent  pas  j oi , il  est 
certain,  et  ceci  soit  dit  sans  mettre  aucunement  en  doute  la 
bonne  foi  de  ce  savant  écrivain,  à laquelle  personne  ne  rend  ne 
hommage  plus  sincère  que  moi,  C|ue  par  un  sentiment  involon- 
taire, on  accueille  plus  volontiers  les  observations  étrangères 
qui  cadrent  avec  ses  propres  idées,  que  les  autres  : et  il  est  in- 
contestable que  le  livre  du  professeur  Lallemand  a été  écrit 
sous  l’influence  d’idées  théoriques  très  arrêtées , et  qu’il  n a 
peut-être  pas  su  assez  bien  accommoder  aux  faits. 

Quoi  qu’il  en  soit , les  observations  de  M.  Lallemand  ne  sau- 
raient en  rien  diminuer  la  valeur  de  celles  de  M.  Rostan  et  des 
miennes,  dont  on  a remarqué  la  concordance  parfaite. 

M.  Andral  remarque  que  l’on  ne  trouve  pas,  dans  les  ou- 
vrages de  MM.  Bouillaud,  Lallemand  et  Rostan,  d’observations 
où  il  n’v  ait  point  eu  de  troubles  du  mouvement  (1),  tandis  que 
cette  fonction  ne  paraît  avoir  été  aucunement  lésée  dans  ses 
quatre  premières  observations  et  dans  quelques  autres  de  MM. 
Raikem  (2),  Lalesque  (.3),  Fabre  (d).  H en  a été  de  même  dans 
nos  obseï  vations  3,38,  39  et  69,  où  les  facultés  intellectuelles  ont 
paru  seules  altérées. 

Dans  plus  de  deux  cents  observations  de  paralysie  dépendant 
de  diverses  causes,  nous  avons  toujours  vu  la  perte  du  mouve- 
ment siéger  du  côté  opposé  à la  lésion  du  cerveau.  Le  contraire 
paraît  cependant  avoir  été  observé;  on  peut  consulter  à ce  sujet 
un  mémoire  de  M.  Decliambre  (5),  et  quelques  faits  réunis  par 
M.  Bayle  (6).  Plusieurs  personnes  paraissent  disposées  à n’ac- 
cepter aucun  de  ces  faits  ; dans  tous  les  cas  , il  faut  convenir 
qu’ils  ne  constituent  que  de  bien  rares  exceptions.  Je  ne  com- 
prends guère  comment  iM.  Rostan  aurait  pu  dire  assez  lécem- 

ment  : « Aujourd’hui  nous  comptons  dans  la  science  huit 

ou  neuf  cas  qui  suHisent  pour  nous  montrer  c|ue  souvent  la  pa- 

(1)  Andral,  loc-  cit.,  page  ÔSO. 

(2)  Raikem,  loc.  cit.  ' 

(3)  Lalesque,  Journ.  hebJoin.,  t.  iv,  page  270. 

(4) Falire,  r/ièse.  1832,  n»  133. 

(5)  Decliambre,  Bulletin  clinique,  1'^  août  183K. 

(6)  Bayle,  Revue  medicale,  janvier  1821,  et  Traild  des  maladies  du  cei<m 
veuiti  page  318. 


9 


Ï30  RA.M0LL1SSEMEMT  AIGU.  ( SYMPT.  ) 

lalysie  peut  résider  du  même  côté  que  l’hémorrhagie  (1).  » Je 
pense  que  ce  mot  souvent  vient  d’une  rédaction  infidèle  des  le- 
çons de  ce  professeur. 

§ IV.  Troubles  de  la  sensibilité. 

/ 

Rien  n’est  plus  difficile  que  l’appréciation  de  la  sensibilité 
dans  les  affections  cérébrales  aigries;  rien  n’est  plus  capricieux, 
si  je  puis  ainsi  dire,  que  les  lésions  de  cette  fonction,  et  ce  n’est 
qu’à  l'aide  d’une  observation  aussi  patiente  qu’attentive  qu’il 
est  possible  de  les  apprécier  avec  exactitude.  Il  arrive  souvent 
en  effet  de  voir  successivement  renaître  et  disparaître  dans  le 
même  point  des  signes  de  sensibilité,  et  des  observateurs  diffé- 
rents obtenir  les  résultats  les  plus  opposés,  suivant  l’heure  à la- 
quelle ils  s’approchent  du  malade.  Il  faut  noter  en  outre  la 
difficulté,  dans  certains  cas,  de  distinguer  des  mouvements  sim- 
plement automatiques,  de  ceux  que  provoque  la  douleur,  les 
plaintes  arrachées  par  la  souffrance,  de  ces  sons  inarticulés  que 
les  malades,  sous  l’influence  d’une  attaque  apoplectiforme,  lais- 
sent souvent  échapper  quand  on  est  autour  d’eux. 

Les  manières  les  plus  usitées  de  rechercher  l’état  de  la  sensi- 
bilité sont  le  pincement  de  la  peau,  la  flexion  forcée  de  la  der- 
nière phalange  des  doigts  sur  la  première,  la  piqûre  à l’aide 
d’une  épingle,  le  contact  de  l’eau  froide  (2) , le  chatouillement 
de  la  plante  des  pieds,  etc.  Il  faut  avoir  soin  de  commencer 
par  les  plus  doux  de  ces  moyens,  et  de  ne  pas  insister  sur  leur 
emploi  quand  ils  paraissent  déterminer  de  la  souffrance  ou  de 
l’irritation.  Outre  l’inhuinanilé  qu’il  y aurait  à agir  autrement, 
il  est  plus  important  qu’on  ne  pense,  lorsque  l’on  veut  faire  avec 
fruit  et  exactitude  l'étude  de  ces  sortes  de  malades,  de  se  ména- 
ger leur  bonne  volonté;  lors  même  qu’ils  sont  dans  le  coma,  dès 
qu’il  leur  reste  un  peu  de  connaissance  ou  de  sensibilité,  ils  sont 
très-susceptibles  de  docilité  ou  au  contraire  de  résistance  aux 
soins  c^u’on  peut  leur  donner,  ou  aux  expériences  auxquelles  on 
veut  les  soumettre. 

(1)  Gazelle  des  hôpitaux^  i2  juin  i 841,  Ctâiïçue  de  t Hôtel-Dieu. 

(2'i  J’ai  eutendu  dire  à M.  le  docteur  Valleix  qu’il  avait  obtenu  des  ré- 
sullair,  assez  posii'.fs  de  ce  dernier  moyen,  que  j’ai  moi-mémefort  rarement 
cmiiloyc- 


TROUBLES  DE  LA  SENSIBILITÉ. 


131 


Il  faut  bien  distinguer  la  sensibilité  de  la  peau,  de  celle  des 
tissus  plus  profonds.  Il  faut  étudier  cette  fonction  sur  le  tronc, 
la  face,  en  ayant  soin  de  rechercher  sur  la  ligne  médiane  les  li- 
mites des  altérations  qu’elle  peut  présenter,  sur  la  conjonctive, 
la  pituitaire,  la  langue  où  l’on  pourra  expérimenter  successive- 
ment la  sensibilité  tactile  et  la  sensibilité  spéciale... 

La  sensibilité,  développée  d’une  manière  quelconque  dans  un 
me*i)bre  paralysé,  peut  se  traduire  de  différentes  manières  : soit 
par  des  plaintes,  des  grimaces  et,  ce  qui  est  encore  plus  carac- 
téristique, par  le  rapprochement  du  bras  du  côté  sain,  soit  par 
les  mouvements  du  membre  paralysé. 

Un  physiologiste  anglais , M.  Marshall-Hall , a parfaitement 
démontré  que  ces  mouvements  ne  prouvaient  pas  toujours  la  con- 
servation de  la  sensibilité;  ils  sont,  dans  un  grand  nombre  de  cas, 
le  simple  résultat  de  l’excitabilité  de  la  moelle  épinière,  et  n’ont 
besoin  pour  se  produire  de  mettre  en  jeu  ni  la  sensibilité,  ni  la 
volonté,  dont  le  point  de  départ,  le  cerveau,  est  censé  frappé 
d’inertie.  Toutes  les  fois  qu’il  pourra  s’éiablir  au  point  excité 
un  double  courant  d’aller  et  de  retour,  passant  par  la  moelle 
spinale  {excilo-motor  sjstem  ),  ces  mouvements  se  produiront; 
ils  ij’exigent  que  l’intégrité  de  la  moelle  [trne  spinal  System), 
et  des  nerfs  qui  établissent  la  communication,  mais  nullement 
celle  du  cerveau.  Mais  ces  phénomènes  ne  se  produisent  pas 
également  bien  sur  tous  les  points  du  corps  ; ils  s’observent  sur*- 
tout  aux  extrémités,  au  niveau  des  sphynciers,  des  orifices, 
comme  la  glotte,  les  paupières,  etc. 

Telles  sont  les  idées-mères  d’un  système  que  ce  physiologiste 
a exposé  dans  une  série  de  mémoires  que  l’on  ne  connaît  peut- 
être  pas  assez  en  France  (I). 

Il  est  certain  que  dans  un  bon  nombre  de  cas  où  la  sensibi- 
lité et  la  motilité  étaient  assez  complètement  éteintes  dans  la 
continuité  des  membres  ])Our  qu’une  épingle  pût  être  enfoncée 
impunément  dans  les  chairs,  de  toute  sa  longueur,  j’ai  vu  des 
mouvements  se  produire  alors  qu’on  répétait  la  même  expé- 

(t)Marîhall-Hall,  Lectures  on  ihe  nerwus  System  and  its  diseuses,  London. 
1 8.36.— TtZemo/Vs  on  tiie  ncivous  syslem,  London,  1837,  in-4“.  — itfemo/r/ÔK 
some  pvincipLes  qf  pallioloÿy  in  tlie  netvous  system  , London,  ISS'Jijin-S, 
traduit  par  M.  Gariel,  dan.s  Areluves  gah.  de  mcd.,  janvier  1840. 


1 62  IlAMOI,LISSKM.E>T  AIGU.  (SVMPT.) 

riencesur  la  paume  <les  mains,  à la  planle  des  pieds,  ou  même 
à la  face  interne  de  l’avant-bras,  ou  autour  des  malléoles  ; mais 
presque  toujours,  outre  le  léger  mouvement  de  retrait  du  mem- 
bre , les  malades  donnaient  quelques  signes  de  sensil:dllté, 
comme  des  plaintes,  et  surtout  le  mouveirent  du  bras  opposé 
qui  cbercliait  à se  rapprocher  du  point  irrité.  Il  est  important 
de  faire  ces  remarques,  puisqu’elles  supposent  une  liaison  entre 
la  sensibilité  et  la  volonté,  et  d’une  autre  part  la  production 
de  ces  mouvements.  11  m’est  arrivé  cependant  plusieurs  fois , 
comme  dans  les  expériences  de  M.  Hall,  de  ne  pouvoir  saisir 
aucun  signe  qui  laissât  soupçonner  la  moindre  conscience  des 
mouvements  qui  s’opéraient. 

La  perte  de  la  sensibilité,  ou  anesthésie,  se  montre  ordinai- 
rement, dans  le  ramollissement  aigu,  avec  celle  du  mouvement; 
mais  cependant  un  peu  moins  souvent.  Ainsi,  sur  vingt-trois  cas 
de  paralysie,  dans  le  ramollissement  aigu,  j’ai  vu  neuf  fois  la 
sensibilité  demeurer  intacte;  dans  ces  neuf  cas,  moins  un,  la 
paralysie  était  ou  incomplète,  ou  accompagnée  de  raideur.  Deux 
fois  l’anesthésie  n’a  paru  que  le  deuxième  jour,  lorsque  l’hémiplé- 
gie est  devenue  complète  ; une  autre  fois,  au  contraire,  je  l’ai 
vue  disparaître  le  second  jour  avec  la  paralysie.  L’anesthésie 
ne  se  montre  pas  toujours  également  dans  tous  les  points  para- 
lysés; dans  l’observation  11 , où  la  paralysie  occupait  le  bras  et 
la  face,  l’insensibilité  ne  fut  notée  que  dans  cette  dernière  ; dans 
l’observation  34,  où  il  y avait  une  hémiplégie  incomplète,  la  pi- 
tuitaire et  la  conjonctive  étaient  seules  insensibles.  Ce  dernier 
fait  est  curieux,  car  les  muqueuses  ne  perdent  généralement 
leur  sensibilité  que  les  dernières,  et  dans  les  cas  les  plus  graves; 
aussi  leur  anesthésie  esi-elle  d’un  fâcheux  pronostic. 

Du  reste,  on  peut  établir  qu’en  général,  dans  le  ramollisse- 
ment comme  dans  les  autres  affections  aiguës  du  cerveau, 
l’anesthésie  suit  à peu  près  la  marche  de  la  résolution  du  mou- 
vement et  de  l’intelligence  ; comme  la  paralysie  du  mouvement, 
elle  se  montre  plus  tôt  et  plus  habituellement  dans  les  membres 
supérieurs  que  dans  les  inférieurs;  enfin,  je  ne  sache  pas  qu’elle 
ait  jamais  été,  dans  la  maladie  qui  nous  occupe,  observée  indé- 
pendamment de  toute  altération  du  mouvement,  ce  qui  arrive 
souvent  dans  les  affections  de  la  moelle  épinière. 

La  sensibilité , comme  les  autres  fonctions  cérébrale»,  nous 


TROtiRU.S  DR  I-A  SENSlim.né.  133 

offre  à étudier,  dans  le  ramollissement,  non  seulement  son  af- 
faiblissement,  mais  encore  son  excitation. 

Cette  dernière  peut  consister  simplement  en  des  sensations 

insolites,  ou  aller  jusqu’à  la  douleur. 

On  observe  rarement  une  exagération  de  la  sensibilité  cu- 
tanée ou  d.  s douleurs  dans  la  profondeur  des  membres,  dans  le 
ramollissement  aigu  ; nous  verrons  que  ces  phénomènes,  si  com- 
muns dans  l’innammation  de  la  moelle  et  de  ses  membranes, 
se  rencontrent  plus  souvent  dans  le  ramollissement  chronique. 
Cependant  nous  trouvons  des  douleurs  dans  le  coté  paralyse 
notées  dans  notre  observation  43  ; la  malade  disait  avoir  ce  cote 
écorché.  Dans  une  observation  rapportée  par  M.  Gaste,  la  ma- 
ladie paraît  avoir  commencé  par  une  douleur  vive  dans  l’epaule 
gauche  et  le  bras,  semblant  suivre  le  trajet  des  nerfs;  elle  par- 
tait de  la  partie  postérieure  du  col,  retentissait  fortement  au 
coude  et  jusque  dans  les  doigts  (1).  Le  sujet  de  l’observation 
21  de  M.  Rostan  accusait  une  vive  sensibilité  dans  la  peau 
d’un  bras  paralysé:  dans  les  observations  25  et  27  du  même 
auteur,  des  douleurs  dans  les  membres  paraissent  avoir  précédé 
l'invasion  de  la  maladie;  une  semblable  indication  se  trouve 
dans  la  13*  observation  de  M.  Andral  ; mais  il  n y avait  dans 
ces  derniers  faits  rien  de  bien  caractérisé.  Dans  l’observation  8 
de  la  première  lettre  de  M.  Lallemand,  on  voit  que  le  huitième 
jour  la  malade  éprouva  dans  tout  le  côié  paralysé  des  douleurs 
violentes  qui  lui  arrachaient  des  cris  et  des  gémissements  con- 
tinuels; quand  on  essayait  de  mouvoir  les  meiiibies,  les  douleuis 
devenaient  excessives.  Le  sujet  de  1 observation  10  ressentait 
des  douleurs  aiguës  et  des  picotements  dans  l’épaisseur  des 
muscles,  augmentant  par  la  pression  et  les  mouvements  com- 
muniqués; en  meme  temps  la  peau  était  insensible.  Ces 
douleurs  s’accompagnent  ordinairement,  mais  non  toujouis, 
de  contracture  ; elles  peuvent,  comme  dans  l’observation  du 
docteur  Gasté,  ne  se  trouver-liées  à aucune  lésion  du  mouve- 
ment. 

11  est  certaines  modifications  delà  sensibilité  qui  se  montrent 
beaucoup  plus  fréquemment  dans  le  ramollissement  aigu  et 

(t)  Docteur  Gaalc,  .7o((/7in?  KinVenci  des  sciences  ineJicaks , i.  xxviit  ^ 
1822. 


134 


RAMÛLLI8SEMEKT  AIGU.  (SYMPT.) 

nous  offrent  par  conséquent  plus  d’intérêt  à étudier  : ce  sont 
tantôt  des  engourdissements  semblables  à ceux  que  produit  la 
compression  ou  la  contusion  d’un  nerf,  des  fourmillements,  des 
picotements  incommodes  ou  même  douloureux , ayant  leur 
siège  soit  dans  les  membres,  soit  dans  la  face,  rarement  dans  le 
tronc. 

Ces  phénomènes  se  monli-ent  tantôt  avant  l’invasion  du  ra- 
mollissement , tantôt  au  moment  de  sa  production,  tantôt 
à une  époque  plus  avancée,  c’est-à-dire  qu’ils  peuvent  être 
considérés  ou  comme  prodrômes  ou  comme  symptômes  de 
début  ou  d’état  du  ramollissement. 

Nous  avons  vu  que  les  engourdissements,  les  fourmillements 
dans  les  membres  accompagnaient  quelquefois  la  céphalalgie, 
les  étourdissements,  etc.,  et  les  autres  symptômes  qui  peuvent 
se  montrer  comme  précurseurs  du  ramollissement,  beaucoup 
moins  fréquents  que  ces  derniers,  ils  ne  paraissent  être,  comme 
eux,  que  le  lésubat  d’un  état  de  congestion  du  cerveau  qui  peut 
aboutir  soit  au  coup  de  sang,  soit  à l’hémorihagie,  soit  au  ra- 
mollissement ou  encéphalite;  ils  ont  en  même  temps  plus  de 
valeur  dans  le  diagnostic,  et  il  est  certain  que  des  engourdisse- 
ments ou  des  lourmillements  prononces,  et  limités  à un  côté 
du  corps  ou  à un  membre  seulement,  annoncent,  dans  le  plus 
grand  nombre  de  cas,  l’imminence  d’un  ramolli.ssement. 

Nous  avons  vu,  en  étudiant  les  prodromes,  combien  on  ob- 
serve rarement  celui-ci  en  particulier  dans  les  cas  où  les  symp- 
tômes propresauramollissementdébutent  tout  <à  coup  ;mais  lors- 
qu’ils se  développent  graduellement,  dans  presque  tous  les  cas, 
on  voit  la  paralysie  précédée  d’engourdissements,  de  fourmille- 
ments; et,  bien  qu’il  soit  difficile  de  préciser  l’instant  même  où 
se  développe  le  ramollissement,  on  peut  les  considérer  ici  plu- 
t ôt  comme  symptômes  de  début  que  comme  phénomènes  pré- 
curseurs (1). 

(t)  Ces  phénomènes  étaient  bien  connus  des  anciens,  comme  le  témoigne 
1 e passage  suivant  : Hx  torporibus  et  stuporibus  pnrtium  singularum  in  statu 
clironico,  Coi  jam  medici prœsagiebant  apoplexiam.  j4lio  denique  loco  iiia- 
nuum  prceprunis  slupoves  cuin  cœteris  signis  pronoslicis  allegui  uni  tanquam 
prodromos  hujus  mali  : quod  confirniaverunl  Celsus  et  Paulus  OEgenita.  Stu- 
porem  cutis  cuin  formicationis  quodam  sensu  et  cœteris  apoplexiœ  prodromû 


CÉPHALALGIE. 


i3â 


Les  etiPourdissemenis  et  les  fourmillements  peuvent  encore 
se  montrer  à une  époque  plus  avancée,  lorsque  la  paralys.e  est 
incomplète,  ou  bien  encore  quand  elle  vient  a diminuer.  Cest 
le  plus  souvent  dans  le  côté  correspondant  de  la  face  qu  ou  es 
voit  persister  après  l’invasion  de  la  paralysie;  il  est  rare  de  les 

observer  dans  le  côté  opposé  du  corps  (1). 

Il  arrive  quelquefois  que,  lorsque  la  paralysie  d un  membre 
devient  complète,  les  engourdissements , les  douleurs,  enfin  les 
diverses  sensations  morbides  dont  il  se  trouvait  le  siege  aupara- 
vant disparaissent  entièrement  pourse  montrer  de  nouveau  plus 
tard,  si  la  paralysie  vient  à diminuer.  Ce  qu’il  y a de  plus  re- 
marquable dans  ce  phénomène,  c’est  qu’il  s’observe  même  dans 
des  cas  où  la  sensibilité  spéciale  de  la  peau,  la  sensibilité  tactile 


n’a  éprouvé  aucune  altération. 

Je  ne  dois  pas  oublier  de  mentionner  une  sensation  fort  com- 
mune au  début  du  ramollissement;  c’est  celle  d’un  froid  pro- 
fond dans  les  parties  paralysées  ; quelquefois  même  cette  sensa- 
tion se  montre , avant  l’appariiion  de  tous  les  autres  phéno- 
mènes caractéristiques  du  ramollissement,  dans  les  membres 
qui  doivent  être  le  siège  de  la  paralysie.  C’est  un  prodrome  qui 
n’est  pas  sans  valeur,  lorsqu’il  accompagne  des  signes  encore 
vagues  de  congestion  cérébrale. 


§ V.  Céphalalgie. 

Il  est  encore  une  modification  spéciale  de  la  sensibilité  à la- 
quelle nous  devons  toute  notre  attention  : c’est  la  céphalalgie. 
On  attache  généralement  beaucoup  d’importance  à ce  phéno- 


ohservarunt  pvcecipuè  epjerus  et  Forestus,..,  yDisserlalio  inauguralis 
medica  de  progiiosi  apoplexice,  auclore  Cavolo  Joseplio  Millier^  Halce.) 

(t)  On  observe  queUiuefois,  en  parliciilier  chez  les  individus  âgés,  des  en- 
gourdissements, des  picotemenls  dans  les  membres  , et  surtout  à leurs  ex- 
irérailés,  qui  n’ont  aucun  rapport  avec  le  cerveau  et  sont  liés  .à  quelques 
modifications  du  .système  capillaire  ou  du. système  nerveux  de  la  périphérie. 
Il  peut  être  fort  difficile,  surtout  s’il  e.xiste  en  même  temps  de  la  céphalal- 
gie , de  distinguer  la  cause  véritable  de  ces  phénomènes.  Le  diagnostic  en  est 
cependant  fort  important,  car  s’ils  tiennent  à une.  gène  de  la  circulation  ca- 
pillaire, on  les  fera  disparaître  au  moyeu  de  toniques,  tandis  que,  s’ils  tien- 
nent à un  étal  de  congestion  du  cerveau,  ils  indiqueront  des  moyens  bien  dif- 
férents, tels  que  la  saignée,  les  révtilsifs..,. 


RAMOI.USSKMENT  Alfiu.  (SY.VrPT.) 

mèoe  comme  signe  du  ramollissement-,  mais,  pour  lui  comme 
pour  bien  d’autres,  il  faut  se  garder  de  confondre  le  ramollisse- 
ment chronique  avec  le  ramollissement  aigu  : car,  s’il  se  montre 
Iréquemment  dans  le  premier,  nous  allons  voir  qu’il  est  loin 
d’en  être  ainsi  à l’état  aigu  de  la  maladie. 

En  effet , sur  nos  trente-deux  observations  de  ramollisse- 
ment aigu,  nous  ne  trouvons  la  céphalalgie  notée  que  sept  fois: 
les  sujets  des  observations  2,  58  et  66  éprouvaient  depuis  long- 
temps de  la  céphalalgie  ; celui  de  l’observation  72  s’en  plaignait 
également  avant  l’apparition  des  symptômes  du  ramollisement 
aigu 5 mais  il  fiut  noter  qu’il  était  affecté  de  ramollissement 
chronique.  Le  sujet  de  l’observation  5 accusait  de  la  céphalalgie 
dès  1 invasion  rapide  de  la  maladie  et  paraissait  indiquer  le  côté 
de  la  tête  opposé  à la  paralysie.  Dans  l’observation  45,  il  est  dit 
que  deux  jours  avant  le  début  des  symptômes  cérébraux,  la 
malade  se  plaignait  de  céphalalgie;  mais  elle  avait  une  pneumo- 
nie, une  fièvre  intense,  et  1 on  ne  peut  attacher  aucune  impor- 
tance a ce  symptôme,  etcela  d autant  plus  que,  malgré  la  longue 
duree  de  la  maladie,  sa  forme  ataxique,  la  conservation  de  l’intel- 
ligence et  de  la  sensibilité  générale,  il  n’est  plus  question  de 
céphalalgie  que  pour  noter  son  absence.  Enfin,  le  sujetdel’obser- 
valion  10  était  depuis  plusieurs  années  sujet  à la  céphalalgie. 

Sur  dix-neuf  observations  de  ramollissement  aigu  de  M.  Ros- 
taiijla  céphalalgie  n’est  notée  que  quatre  fois.  Dansl’observation 
22,  elle  se  montra  très-vive  avant  l’invasion  du  ramollissement, 
en  même  temps  que  des  symptômes  gastriques  qui  précédèrent 
cette  dernière  de  plusieurs  jours  ; dans  l’observation  13,  on  l’ob- 
serva au  début,  en  même  temps  qu’une  hémiplégie  subite;  dans 
l’observation  18,  on  voit  que  la  malade  montrait  son  front  et 
paraissait  souffrir  de  la  tête  ; dans  l’observation  7,  la  céphalal- 
gie lut  le  premier  symptôme  5 on  a noté  encore  que  le  sujet  de 
l’observation  19,  privé  de  connaissance,  portait  continuellement 
la  main  à son  front. 

Dans  douze  observations  de  ramollissement  aigu  dues  à 
I\I.  Andral,  la  céphalalgie  a été  notée  six  fois.  Dans  trois  cas  où 
les  malades  pouvaient  rendre  compte  de  leurs  sensations,  son 
absence  est  indiquée  expre.ssément  (obs.  5,  24  et  25).  Dans  ces 
deux  séries  d’individus,  ayant  ou  non  présenté  de  la  céphalalgie. 


CÉPHALALGIE.  137 

le  nombre  de  ceux  ayant  dépassé  soixante  ans  était  justement 

égal  à celui  des  individus  moins  âgés. 

Sur  sept  observations  prises  chez  différents  auteurs,  chez  des 
sujets  âgés  de  moins  de  soixante  ans,  et  ayant  presque  tous 

présenté’ des  phénomènes  ataxiques,  la  céphalalgie  n’a  été  no- 
tée que  deux  fois;  dans  aucun  de  ces  cas,  il  n’y  avait  de  mé- 
ningite. 

.<  La  céphalalgie,  dit  M.  Lallemand,  est  un  des  symptômes 
précurseurs  les  plus  constants  de  1 encéphalite.  Elle  peisiste  en- 
core pendant  la  première  période  de  la  maladie  ; mais  elle 
semble  diminuer  et  disparaître  meme  entieiement  a me  suie 
que  les  m ilades  tombent  dans  rassoupissemeiit,  perdent  con- 
naissance..., etc.  » (l). 

On  voit  combien  cette  assertion  est  en  désaccord  avec  les  faits 
que  je  viens  de  réunir,  puisque,  sur  soixante-sept  cas,  nousn  a 
vons  vu  la  céphalalgie  notée  que  dix-huit  fois,  et  cju  elle  semblait 
tenir  quelquefois  soit  à la  préexistence  d’un  ramollissement 
chronique,  soit  à quelque  circonstance  accessoire.  D’où  vient 
cette  dilléience? 

Il  faut  d’abord  tenir  compte  de  l’âge,  dont  l’influence  ne  doit 
jamais  être  oubliée  lorsqu’il  s’agit  de  manifestations  symptoma- 
tiques : les  individus  d’après  lesquels  M.  Lallemand  a avancé 
cette  proposition,  étaient  généralement  pliisjeunes  que  les  sujets 
des  observations  de  M.  Rostan  et  des  miennes;  il  est  vrai  que 
quelques  relevés  cités  précédemment  donnent  à penser  que  la 
céphalalgie  ne  se  rencontre  pas  beaucoup  plus  souvent  au-des- 
sous qu’au  dessus  de  soixante  ans.  Mais  surtout  il  faut  remar- 
quer que,  dans  la  plupart  des  observations  rapportées  par  cet 
auteur,  le  ramollissement  s’est  montré  accompagné  et  sans  doute 
précédé  d’une  méningite;  car  l’inflammation  ne  marche  pas  habi- 
tuellement du  cerveau  vers  les  méninges;  or  l’on  sait  qu’un  des 
phénomènes  les  plus  tranchés  et  les  plus  constants  de  l’inflam- 
mation des  méninges,  c’est  la  céphalalgie.  M.  Lallemand  a très- 
bien  démontré  lui-même  cjue  les  phénomènes  de  douleur  et 
d’excitalion  sont  beaucoup  plus  facilement  produits  par  les  lé- 
.sions  des  membranes  que  par  celles  du  cerveau, qui,  s’attaquant 
à la  source  même  des  fonctions , tendent  plutôt  à leur  abolition 


(t)  L.iUemand,  TMIir  11 , page  242, 


138 


RAMOLLISSEMENT  AlGU.  (SYMPT,) 

qu’à  leur  perversion  ; seulement  il  a eu  le  tort  de  présenter 
comme  constant  un  fait  qui  n’est  que  général.  Il  faut  remar- 
quer encore  que,  dans  un  grand  nombre  de  ses  observations,  il  y 
avait  des  lésions  organiques , des  maladies  des  os , des  causes 
traumatiques  , enfin  un  grand  nombre  de  ces  circonstances  qui 
ôtent  au  ramollissement  ce  caractère  de  simplicité,  que  nous 
cherchons  pour  en  tracer  une  histoire  exacte.  Il  ne  faut  pas 
oublier  enfin  que  cet  auteur  paraissait  connaître  à peine  ces  cas 
si  nombreux,  où  le  ramollissement  aigu  suit  tout  à fait  la  marche 
foudroyante  et  destructive  de  l’apoplexie,  et  où  la  céphalalgie 
ne  saurait  exister  ni  surtout  se  montrerai!  dehors. 

Lorsque  nous  tiaiierons  du  ramollissement  chronique,  nous 
étudierons  avec  de  plus  grands  détails  les  caractères  particu- 
liers que  petit  revêtir  la  céphalalgie  dans  celte  affection.  Dans  le 
ramollissement  aigu,  elle  est  habituellement  peu  violente,  au 
moins  chez  les  vieillai  ds,  et  occupe  presque  toujours  le  front 
ou  le  sommet  de  la  tête.  « Quand  on  interroge  suffisamment 
les  malades,  dit  M.  Rustan,  on  les  voit  porter  péniblement  à la 
tête,  du  côté  opposé  à la  paralysie  , le  membre  sain  (i).  » Il 
n’est  pas  exact  de  présenter  ceci  comme  un  fait  généi-al  : je  suis 
tout  à fait  convaincu  que  la  céphalalgie  est  très  rarement  limi- 
tée au  côté  de  la  tête  correspondant  an  siège  du  ramolli.sse- 
ment.  C’est  avec  plus  de  raison  que  cet  observateur  ajoute  : 
« Ce  signe  qui  indique  un  travail  local  est  de  la  plus  haute  im- 
portance ; il  suffit  presque  seul  pour  caractériser  le  ramollisse- 
ment. » Il  ne  faut  pas  oublier  cependant  que  la  céphalalgie 
locale  accompagne  quelquefois  aussi  les  tumeurs  du  cerveau  ou 
des  méninges  ; mais  ce  sont  là  des  affections  chroniques.  MM. 
Parent  et  Martinet  ont  vu,  dans  la  méningite,  la  céphalalgie  se 
limiter  à un  côté  de  la  tête , sans  qu’elle  répondît  pour  cela  tou- 
jours exactement  au  siège  de  la  lésion  (â).  Il  faut  .savoir  encore 
que  la  céphalalgie  peut  se  montrer  du  côté  opposé  à la  lésion 
du  cerveau  ; M.  Raikem  a réuni  plusieurs  cas  de  ce  genre,  ap- 
partenant, il  est  vrai , à des  encéphalites  chroniques  (3)  ; mais 
toutes  les  personnes  qui  ont  observé  des  malades  affectes  de  ra- 

(t)  Roslan,  Recherches,...,  page  242. 

(2)  Parent  et  Martinet,  de  l’Arachnitis,  page  55. 

(3)  Raikem,  Mémoire  cite',  Réperl,  geVi...,  t.  u. 


139 


TIlOUBLES  DE  L IIîTELUGENCÈ. 

mollissement  cérébral  savent  que,  lorsqu  on  leur  demandes  ils 
ne  souffrent  pas  plus  d’un  côté  de  la  tête  que  de  l’autre  , ils 
commencent  beaucoup  plus  souvent  par  indiquer  le  côté  de  la 
paralysie  , que  le  côté  opposé. 

M.  Carswell  dit  que  la  céphalalgie  ne  dépend  pas  du  lamol- 
lissement  lui-même  de  la  substance  cerebrale ; quelle  est  la 
conséquence  de  l’irritation  ou  de  l’excitation  iiiorbide  du  cer- 
veau (1).  Cette  manière  de  s’exprimer  m a étonne  de  la  pai  t d un 
auteur  qui  admet  que , dans  le  plus  grand  nombre  des  cas  au 
moins, le  ramollissement  cérébral  est  de  nature  inflammaloiie. 
Si  les  points  ramollis  sont  enflammes,  il  est  évident  que  la  dou- 
leur peut  venir  tout  aussi  bien,  ou  meme  doit  venir  plutôt  en- 
core d’eux-mêmes  que  des  parties  environnantes  ; il  n en  sau- 
rait être  autrement  que  dans  les  cas  où  le  ramollissement  a en- 
traîné une  telle  désorganisation  , que  toute  manifestation  fonc- 
tionnelle soit  devenue  impossible  dans  la  partie  malade. 

De  l’analyse  des  observations  qui  m’appartiennent  ou  qu’ont 
déjà  publiées  d’auti’es  auteurs,  il  me  paraît  résulter  ; que  la  cé- 
phalalgie ne  mérite  pas,  dans  l’histoire  du  ramollissement,  l’im- 
portance qu’on  a l’habitude  de  lui  attribuer  ; elle  manque  sou- 
vent dans  le  ramollissement  aigu  , aussi  bien  à l’époque  des 
phénomènes  précurseurs  que  pendant  la  durée  de  la  maladie  , 
et,  lorsqu’elle  existe,  elle  n’offre  généralement  rien  de  particu- 
lier dans  sou  siège  ni  dans  sa  nature.  Si  M.  Lallemand  a vu  le 
contraire , c’est  que  la  plupart  des  observations  qu’il  a rassem- 
blées offrent  des  complications. 

Il  est  certain  cependant  qu’une  céphalalgie  un  peu  intense  , 
persistante  , limitée  surtout  à un  point  de  la  tête,  peut  être  un 
moyen  précieux  pour  découvrir  soit  l’imminence,  soit  l’exis- 
tence même  d’un  ramollissement. 

§ VI.  Troubles  de  l’intelligence. 

Les  altérations  de  l’intelligence  sont  un  des  phénomènes  les 
plus  intéressants  du  ramollissement  aigu  5 mais  elles  se  mon- 
trent sous  des  formes  très  variées,  et  plus  ou  moins  caractéris- 
tiques. 

Quelquefois , plusieurs  jours  avant  le  début  du  ramollisse- 


I 


(1)  Carswell , 77ie  cyclopeâia.,.,  vol.  iv,  page  9, 


140 


lUMOLLlSSrMKXT  AIGU.  (sYxMPT.) 

ment , le  caraclère  ou  les  facultés  de  rinlelligence  présenlent 
quelques  modifications  appréciables;  ainsi  un  peu  d’engourdis- 
sement ou  de  confusion  dans  les  idées,  de  lajtristesse  ou  au  con- 
traire de  I irascibilité  : voilà  ce  que  l’on  a pu  constater  dans 
certains  cas  de  ramollissement  aigu. 

Lorsque  la  maladie  se  développe  graduellement,  on  voit  sur- 
venir peu  à peu  un  affaiblissement  des  facultés  qui  peut  aller 
jusqu’à  un  état  d’hébétude  complète  et  de  véritable  coma 
(obs.  2).  D’autres  fois,  au  contraire  , c’est  plutôt  du  trouble  que 
de  1 affaiblissement  dans  les  idées  : alors  tantôt  on  observe  de 
1 agitation  , de  l’exaltation  , de  la  loquacité:  tantôt  un  délire 
plus  tranquille,  un  délire  d’action  très-fréquent  chez  les  vieil- 
lards , et  auquel  M.  Prus  attache  justement  beaucoup  d’impor- 
tance. 

A la  Salpêtrière  , nous  voyons  presque  constamment , dans 
cette  forme  de  délire,  les  vieilles  femmes  se  lever  la  nuit,  puis 
aller  se  coucher  dans  le  lit  de  leurs  voisines  : c’était  en  général 
le  premier  signe  d’un  dérangement  dans  les  facultés  de  l’intel- 
ligence. Le  lendemain  elles  niaient  que  cela  leur  fût  arrivé, 
répondaient  lentement  aux  questions,  s’habillaient  et  se  lais- 
saient déshabiller  vingt  fois  , si  leurs  vêtements  restaient  à leur 
portée,  s’occupaient  à défaire  et  à rouler  leur  couverture , se 
laissaient  tomber  de  h ur  lit  : ce  délire  qui  s’accompagne  sou- 
vent de  bcaucofip  de  douceur  et  d’une  sorte  de  patience  dans 
ses  actes  de  déraison,  n’est  parfois  que  le  prélude  d’une  exal- 
tation plus  grande  et  quelquefois  furieuse  ; mais  plus  souvent  il 
conduit  à l’hébétude  et  au  coma. 

Le  com;j,  dans  d’autres  circonstances,  survient  brusquement  , 
et  se  montre  dès  le  cominencement  à son  plus  haut  degré 
(obs.  29,  30,  3l , 32,  etc.  ).  Cela  s’observe  bien  plus  souvent  que 
ne  le  pensait  M.  Rostan  : « La  somnolence  , le  coma  ou  le  carus 
ne  se  montrent  guère,  dit-il,  que  vers  la  deuxième  période  de  la 
maladie  (I)».  Quelquefois,  il  disparaît  aubout  de  peu  de  lemj)s  et 
il  peut  n’y  avoir  eu  qu’une  perle  de  connaissance  passagère;  quel- 
quefois il  diminue  simplement,  et  les  malades  donnent  quelques 
signes  de  connaisance  sans  être  pour  cela  sortis  du  coma.  Il  faut 
faire  attention  en  effet  que  le  coma  ne  comporte  pas  nécessaire- 


(I)  Ilostan,  Rrchrrcltcs.,.,  paee  2l.*î. 


141 


TIIÜLBLES  Dli  L Xû'TELIjIGE&'CE . 

mtnl  l’abolition  coinplèle  de  l’intelligence.  Ainsi,  dans  l’ob- 
servation 34,  la  malade,  quoique  endormie,  faisait  effort  pour 
exécuter  ce  qu’on  lui  demandait,  se  laisser  lever  et  meure  sur 
le  bassin  ; dans  les  observations  1 et  55,  nous  voyons  l’intelli- 
gence  se  conserver  malgré  la  perte  de  la  parole  et  du  mouve- 
ment ; dans  les  observations  5 et  23,  il  y avait  de  1 hébétude,  un 
demi-coma;  mais  l’intelligence  s’exerçait  encore,  bien  que  dans 
un  cercle  très-rétréci.  Le  sujet  de  l’observation  16  pleurait  et 
riait  sans  raison.  Dans  les  observations  9,  lO,  11  , l4,  29,  30, 
31, 33,  35,  le  coma  fut  complet,  ou  à peu  de  choses  près.  Cet 
état  est  du  reste  presque  constant  à la  fin  de  la  vie,  dans  toutes 
les  formes  du  ramollissement. 

M.  Bouillaud  dit  que,  dans  l’encéphalite  partielle  (ramollis- 
sement), l’intelligence  se  conserve  intacte,  quand  un  seul  brims- 
pbère  est  malade,  parce  que  l’autre  le  ^upplée.  Il  opfiose  à ceux 
qui  ont  vu  le  contraire  l'opinion  de  Lallemand  (lettre  II),  qui 
attribue  cela  à la  compression  de  l’iiém-splière  sain  par  la  tu- 
méfaction de  rbémispbère  enflammé  (1).  Ni  l’explication,  ni  le 
fait  ne  sont  exacts.  Le  trouble  de  rinielligence  est  un  phéno- 
mène babilnel  dans  l’encéphalite  partielle  , et  peut  être  indé- 
pendant de  la  tuméfaction,  bien  que  l’influence  de  ceile-ci  soit 
incontestable,  lorsqu’elle  existe.  L’intelligence  est  presque  con- 
stamment altérée  profondément  à la  fin  de  la  maladie  , bien 
que  la  tuméfaction  disparaisse  toujours  au  bout  d’un  certain 
temps  ; et  d’ailleurs  l’intelligence  n’est-elle  pas  souvent  lésée 
dans  le  ramollissement  chronique  partiel,  dont  l’atrophie  est, 
comme  nous  le  verrons,  un  effet  habituel?  M-  Rosian  paraît 
disposé  à attribuer  l’extinction  des  fonctions  de  l’intelligence  et 
des  sens,  qui  se  manifeste  dans  les  derniers  moments  de  la  vie, 
à la  collection  de  sérosité  qui  se  forme  dans  les  mé.iinges  ou 
les  ventricules  : mais  les  épanchements  séreux  manquent  trop 
i souvent  pour  pouvoir  servir  à une  explication  générale. 

La  maladie  peut  débuter  par  une  hémiplégie  subite  sans 
aucune  altération  des  facultés  intellectuelles  ; ce  cas  est  assez 
rare,  moins  cependant  que  dans  l’hémorrhagie  cérébrale,  où  on 
l’observe  également  (2).  Aussi  MM.  Delaberge  etMunneret  ont 

’ (t)  Bouillaud,  Truité  de  VencéphaLilc,  page  263. 

(2)  Voyez  le  chapitre  du  diagnostic. 


i42 


ramollissement  aigu,  (sympt.) 

eu  tort  de  dire  que:  presque  toujours  la  connaissance  et  l’in- 
telligence demeurent  libres  (1). 

C’est  le  début  fréquent  du  ramollissement  par  la  perte  de 
connaissance  et  le  coma  qui  a fait  comprendre  cette  maladie 
dans  1 apoplexie  , par  les  anciens  auteurs  et  même  par  beaucoup 
d auteurs  modernes,  en  particulier  les  médecins  anglais  : ainsi 
Cullen,  Cooke,  Copland,  etc.  Portai  dit  qu’il  ne  donne  le  nom 
d apoplexie  qu’à  l’affection  soporeuse  la  plus  profonde,  surve- 
nue subitement  et  dans  laquelle  la  respiration  a été  plus  ou 
moins  siertoreuse  (2).  Maison  voit,  par  ses  observations,  qu’il 
suffit  que  la  mort  ait  été  précédée  de  coma,  pour  qu’il  appelle 
la  maladie  apoplexie.  Son  apoplexie  inflammatoire  n’est  autre 
chose  que  l’encéphalite  ou  la  méningite. 

Nos  observations  3 , 38, 39 , 65  , 69  prouvent  que  le  délire 
peut  etre  le  seul  symptôme  du  l'amollissement.  Dans  les  cas 
de  ce  genre  , il  peut  présenter  des  formes  très-variées , mais 
il  se  caractérise  habituellement  par  une  loquacité  opiniâtre  avec 
insomnie,  et  s’accompagne  souvent  d’hallucinations. 

« Il  me  sera  facile  de  vous  prouver  jusqu^à  l’évidence,  dit 
M.  Lallemand,  qu’on  n’observe  jamais  le  délire  dans  les  inflam- 
mations du  cerveau,  exemptes  de  complications;  que  ce  sym- 
ptôme appartient  exclusivement  aux  inflammations  de  l’arach- 

no'de (3).  » On  verra  , en  consultant  nos  observations,  que 

l’absence  de  toute  altération  des  méninges  est  notée  dans  quel- 
ques-unes d’entre  elles  ; attacbera-t-on  une  grande  importance, 
dans  les  autres  , à un  état  de  simple  injection  de  la  pie-mère,  si 
naturel  quand  le  cerveau  est  enflammé  lui- même  ; à de  la  séro- 
sité accumulée  en  grande  quantité  à la  base  du  crâne  , ou  au- 
tour du  cerveau  , chez  des  vieillards  où  cette  circonstance  est  si 
commune;  chez  des  individus  dont  le  cerveau  est  fortement 
congestionné , l’augmentation  de  l’exhalation  séreuse  étant  un 
résultat  fréquent  et  facile  à comprendre  des  congestions  encé- 
phaliques (4);  enfin  dans  un  de  ces  cas,  il  y avait  un  œdème  des 
membres  , par  suite  d’une  maladie  du  cœur.  Quelle  valeur  ac- 

(■))  Compendium  Je  mdd.  pmt.,  x.  ii,  page  156. 

(2)  Portai,  Traitd  de  r apoplexie,  page  307. 

(3)  Lallemand , Lettre  II,  page  24G. 

(4)  Portai , Moulin,  Abercrombio,  Gcadrin.... 


ÉTAT  DE  LA  FACE. 


143 

cordera-t-on  aux  opacités  de  l’arachnoïde , si  l’on  songe  que 
presque  tous  les  cerveaux  de  vieillards  en  offrent  à un  degré 
quelconque  ? Enfin,  dans  aucune  de  nos  observations  nous  n’a- 
vons trouvé  cette  sérosité  un  peu  louche,  qui  est  le  premier 
signe,  mais  aussi  le  plus  certain,  d’une  véritable  inflammation 
des  méninges.  Et  enfin  comme  dans  les  cas  auxquels  je  fais  al- 
lusion l’intelUgence  seule  s’est  trouvée  lésée  (excepté  toutefois 
dans  l’observation  65,  où  il  y a eu  quelques  troubles  vagues  du 

mouvement),  leur  appliquer  les  idées  de  M.  Lallemand  ce  se- 
rait dire  : Que  l’altération  si  tranchée,  si  profonde  même  du 
cerveau  n’aurait  déterminé  aucun  symptôme,  tandis  que  les 
phénomènes  graves  et  mortels  observés  durant  la  vie  auraient 
résulté  de  l’altération  très-légère  ou  même  douteuse  des  mé- 
ninges. 

5 VIL  Etat  de  la  face. 

Les  modifications  que  peut  nous  présenter,  dans  le  ramollis- 
sement aigu  , l’état  de  la  face  , sont  liées  et  aux  altérations  du 
mouvement  et  à celles  de  l’intelligence,  c’est-à-dire  que  nous 
devons  en  étudier  et  la  physionomie  et  les  déformations. 

Lorsque  les  symptômes  du  ramollissement  se  développent 
graduellement , la  physionomie  fournit  en  général  de  bonne 
heure  des  indications  importantes , par  l’expression  d’étonne- 
ment, d’indifférence,  puis  de  stupeur  et  d’hébétude  qui  s’y  peint: 
je  ne  saurais  trop  recommander , dans  la  médecine  des  vieil- 
lards, cette  étude  de  la  physionomie,  où  un  observateur  attentif 
trouvera  fréquemment  la  première  notion  d’une  altération  com- 
mençante de  l’encéphale;  D’autres  fois  c’est  au  contraire  de  l’é- 
garement, de  l’irascibilité,  une  mobilité  très-vive  dans  les  traits; 
mais  ceci  s’observe  beaucoup  moins  sans  doute  chez  les  vieillards 
qu’à  un  âge  moins  avancé. 

Il  est  un  autre  phénomène  beaucoup  plus  important  encore  : 
c’est  un  commencement  de  déviation  de  la  face.  Ainsi , lorsque  ^ 
l’on  voit  un  sourcil  se  relever  légèrement,  la  bouche  se  tirer  un 
peu  dans  le  même  sens,  quand  le  malade  parle  ou  rit,  la  paupière 
du  côté  opposé  recouvrir  un  peu  plus  le  globe  de  l’œil  comme 
si  son  poids  était  plus  lourd  , on  peut  avoir  une  certitude  pres- 
que entière  de  l’imminence  ou  plutôt  du  début  du  ramollisse- 


144 


RAMOLLISSr,AtEKT  AIG-XT.  (sïMPT.) 

ment.  Celte  déviation  de  la  face  peut  coïncider  avec  l’affaisse- 
inent  de  l’intelligence  dont  nous  venons  de  décrire  l’expression, 
et  qu’elle  finit  presque  toujours  par  accompagner,  avec  de  la  cé- 
phalalgie, de  l’embarras  dans  la  langue...  Mais  tous  ces  signes 
peuvent  manquer,  et  la  déviation  de  la  bouche  ne  perd  pour 
cela  rien  de  sa  valeur. 

Il  faut  du  reste  faire  attention  que,  lorsque  la  mâchoire  se 
dégarnit  de  ses  dents,  la  bouche  perd  habituellement  toute  sy- 
métrie, et  se  tire  ou  plutôt  s’abaisse  du  côté  où  les  dents  sont  le 
moins  nombreuses.  J’ai  vu  plus  d’une  personne  embarrassée,  ou 
même  induite  en  erreur  par  cette  circonstanct . 

Lorsqu’une  hémiplégie  se  montre  soit  au  début  soit  dans 
le  cours  du  ramollissement,  elle  s’accompagne  naturellement 
de  paralysie  du  côté  correspondant  de  la  face  : déviation  sou- 
veni  extrême  de  la  bouche,  de  l’aile  du  nez,  élévation  du  sour- 
cil , abaussement  ordinairement  incomplet  de  la  paupière  du 
côté  opposé  ; à ce'a  se  joint  ou  une  anesthésie,  ou  des  fourmille- 
inents,  ou  une  sensation  d’engourdissement.  La  face  revêt  alors 
celte  expression  d’hébétude  ou  d’indift’érence,  ou  plutôt  cette 
absence  d'expression  que  présentent  ordinairement  les  hémi- 
plégiques : la  conservation  ou  le  retour  d’une  partie  des  facultés 
intellectuelles  est  même  en  général  impuissant  à se  peindre 
sur  les  traits,  dont  l’immobilité  et  la  déformation  contrastent 
quelquefois  de  la  façon  la  plus  singulière  avec  dés  attitudes 
d’attention  ou  des  mouvements  d’intelligence. 

Lorsqu’att  lieu  d’une  simple  ré.solutiou,  il  y a une  forte  con- 
tracture dans  un  côté  du  corps  , la  face  peut  participer  à cette 
contracture,  et  se  trouver  ainsi  déviée  du  côté  qui  répond  aux 
membres  privés  du  mouvement  volontaire;  mais  cela  s’observe 
beaucoup  plus  rarement  dans  le  ramollissement  aigu  que  dans 
le  ramollissement  chronique.  Les  convulsions  sont  également 
rares  dans  la  face  comme  dans  les  membres. 

Le  regard  est  quelquefois  brillant,  égaré  , quand  il  y a,  ou 
même  quand  il  va  y avoir  du  délire  ; plus  souvent  terne  et 
sans  expre.ssion.  Il  y a quelquefois  du  strabisme  ; d’autres  fois 
les  yeux  sont  fixes  et  demeurent  immobiles,  souvent  également 
déviés  : ceci  s’observe  surtout  quand  il  y a une  forte  contracture 
des  membres , cl  les  yeux  sont  tournés  du  côté  des  membres 


ÉTAT  PE  EA  FACE.  145 

coniracluvés.  JJans  ces  cas  aussi,  la  lète  est  souvent  tournée  du 
côté  opposé,  par  la  contraction  du  sterno-mastoïdien. 

M.  Rostan  paraît  avoir  souvent  observé  la  rougeur  de  la  face 
chez  les  individus  affectes  de  ramollissement.  J’ai  été  beaucoup 
moins  frappé  de  la  fréquence  de  ce  phénomène.  M.  Rostan  dé- 
crit une  rougeur  particulière  qui  s’étendrait  au  cou  et  cesserait 
quelquefois  brusquement  à la  partie  supérieure  de  la  poi- 
trine (1). 

« Ce  symptôme,  dit-il,  se  présente  quand  le  ramollissement 
est  dénaturé  inflammatoire,  et  surtout  dans  les  paroxysmes.  Il 
n’indique  autre  chose  qu’une  congestion  sanguine  vers  la  tète  : 
aussi  le  reirouve-t-on  dans  l’apoplexie  , la  méningite  , la  con- 
gestion sanguine  , etc.  « La  face  est  souvent  très-pâle  et  dans 
riiémorrhagie  cérébrale  , et  dans  la  congestion  sanguine  , et  la 
rougeur  de  la  face  ne  peut  pas  plus  servir  à reconnaître  le  ra- 
mollissement inflammatoire  qu’à  distinguer  , comme  on  disait 
autrefois,  l’apoplexie  sanguine  de  l’apoplexie  .séreuse. 

Il  est  un  phénomène  assez  remarquable  et  sur  lequel  je  ne 
sache  pas  que  l’atleniion  ait  encore  été  fixée  , qui  s’observe  fi’é- 
quemment  dans  le  ramollissement  aigu  , dans  la  congestion  et 
aussi  dans  l’hémorrhagie  cérébrale,  mais  moins  souvent,  je 
crois.  Je  veux  parler  d’une  augmentation  notable  de  la  sécré- 
tion des  follicules  de  la  bouche  et  de  l’ail.  Souvent , en  effet, 
clîiz  ces  individus  (je  n’ai  lait  cette  observation  que  sur  des 
vieillar(h)  vous  verrez  une  humeur  extraordinairement  abon- 
dautes’écoulei  des  paupières,  se  sécheresur  leurs  bords,  les  irriter 
et  quelquefois  s’amasser  sous  la  paupière  inférieure  ; chez  d’au- 
tres, mais  moins  fréquemment , c’est  un  mucus  glaireux,  filant, 
incolore,  qui  s’écoule  incessamment  de  la  bouche  , ou  une  cou- 
che jaunâtre,  é()ai.ssc  et  vistjueuse  qui  recouvre  la  langue  et  le 
palais,  et  se  reproduit  dès  qu’on  l’a  enlevée.  Ceci  ne  tient  pas 
à l’amas  de  la  salive  ou  des  larmes,  quand  la  déglutition  a cessé 
de  se  faire  et  les  paupières  de  se  mouvoir;  car  on  l’observe 
au.ssi  bien  sur  l’œil  mobile  que  sur  l’œil  paralysé,  et  je  l’ai  vu 
aussi  prononcé  que  possible  dans  des  cas  de  délire.  Chose  très- 
remarquable,  des  qu  il  survient  du  mieux,  que  le  délire  se  calme 
ou  que  la  connaissance  reparaît , ces  secrétions  morbides  dimi- 


(I)  Rostan,  Ivc,  cù,, page 2-16 


10 


146 


nAMOLUSSEMENT  AIGU.  (SYMPT.) 

nuent  elles-mêmes  , pour  se  montrer  de  nouveau  , si  l’amélio- 
ration vient  à cesser. 

§ VIII.  Etat  de  la  parole. 

La  parole  est  presque  constamment  altérée  dans  le  ramollis- 
sement aigu.  Lorsque  les  symptômes  se  développent  graduelle- 
ment, il  s’y  joint  habituellement  un  embarras  de  la  prononcia- 
tion, une  sorte  de  lourdeur  de  la  langue,  que  l’on  voit  augmenter 
chaque  jour.  Engénéral,  quand  l’hébétude  et  l’hémiplégie  sont 
devenues  complètes,  l’articulation  des  sons  est  tout  à fait  impos- 
sible ; ce  qui  arrive  dès  le  début,  lorsque  la  maladie  s’annonce 
par  une  perte  subite  de  connaissance  accompagnée  de  paralysie. 
Plus  tard  les  malades  recouvrent  ordinairement  la  faculté  d’ar- 
ticuler quelques  mots,  de  se  faire  un  peu  comprendre,  si  l’ob- 
tusion des  facultés  ne  demeure  pas  absolue. 

Le  délire  ou  l’agitation,  joints  ou  non  à la  paralysie,  s’accom- 
pagnent quelquefois  de  difficulté  ou  d’impossibilité  d’articuler  : 
cela  donne  lieu  à un  langage  fort  bizarre,  au  milieu  duquel  on 
distingue  souvent  des  syllables  ou  des  mots  , mais  comme  pio- 
duits  par  le  hasard.  Quelquefois  les  malades  ont  perdu  non  pas 
la  faculté  d’articuler,  mais  la  conscience  du  sens  des  mots,  et 
prononcent  même  avec  volubilité  des  paroles  sans  ordre,  sans 
suiteetsans  aucune  signification  : ordinairement  alors  les  mêmes 
mots  ou  les  mêmes  phrases  reviennent  presque  incessamment. 
Tantôt  ces  malades  parlent  comme  au  hasard,  tantôt  ils  parais- 
sent vouloir  réellement  exprimer  une  idée  , mais  sans  pouvoir 
trouver,  sans  même  paraître  chercher  le  mot  propre. 

Quelquefois  ils  semblent  avoir  perdu  non  seulement  la 
faculté  d’articuler,  mais  encore  celle  de  proférer  même  un  son  : 
ils  ne  font  pas  entendre  une  plainte  , et  demeurent  dans  le 
silence  le  plus  absolu.  Ceci  ne  se  montre  pas  seulement  chez 
des  individus  plongés  dans  le  coma  ; ce  silence  absolu  , et  que 
l’on  prendrait  quelquefois  pour  l’effet  d une  volonté  opiniatie, 
a été  un  des  symptômes  les  plus  saillants  de  1 observation  si 
curieuse  de  la  femme  Reydleux  ( obs.  16  ). 

§ IX.  Etat  des  sens. 

Loi  sqiic  les  malades  sont  plongés  dans  un  coma  complet,  les 
sens  participent  à l’obtusion  ou  à l’abolition  générale  des  facul- 


état  des  pupilles. 


147 


tés.  A part  ces  cas,  où  l’on  constate  moins,  du  reste,  l’abolition 
des  sens  que  celle  de  la  conscience  des  impressions  qu’ils  peuvent 
transmettre  et  de  la  faculté  de  l’exprimer  au  dehors,  il  est  rare 
que  les  sens  présentent  quelques  lésions  bien  notables  dans  le 
ramollissement  aigu. 

1::  Je  ne  crois  pas  avoir  jamais  observé  de  surdité , lorsque 
les  malades  n’avaient  pas  perdu  connaissance.  Quant  à la  vue, 
quelquefois,  mais  rarement,  on  la  trouve  perdue  du  côté  qui 
répond  à l’hémiplégie  ; il  ne  faut  pas  oublier  qu’elle  peut  être 
parfaitement  conservée  , malgré  l’immobilité  des  pupilles  (1). 
L’odorat  et  le  goût  sont  fort  difficiles  à expérimenter;  j’ai  pu 
cependant  constater  deux  ou  trois  fois  la  perte  du  goût,  du  côté 
correspondant  à la  paralysie.  On  observe  beaucoup  plus  sou- 
vent l’anesthésie  ou  la  perte  de  la  sensibilité  tactile  sur  une  des 
pituitaires  ou  sur  une  des  moitiés  latérales  de  la  langue. 

L’état  de  la  pupille  doit  fixer  un  instant  notre  attention.  Je, 
ferai  d’abord  remarquer  qu’à  l’état  normal,  les  vieillards  ont 
généralement  les  pupilles  étioites,  quelquefois  infiniment  res- 
serrées, et  dans  ce  dernier  cas  il  est  impossible  cl’j  percevoir* 
aucun  mouvement  de  contraction.  Ceci  tiendrait-il  à des  adhé- 
i-ences  de  l’iris  au  cristallin?  Je  ne  m’en  suis  jamais  assuré  par 
l’examen  direct. 

M.  Lallemand  attache  à l’étude  de  la  pupille  une  importance 
qui  ne  me  paraît  pas  justifiée  par  les  faits  : « L’état  de  la  pu- 
pille, dit-il,  mérite  d’autant  plus  d’attention  que,  dans  presque 
toutes  les  observations  de  ramollissement  où  il  en  est  fait  men- 
tion, elle  était  contractée,  tandis  que  dans  les  apoplexies  elle  est 
généralement  dilatée  (2).  » 

Cet  auteur  dit  ensuite  que  le  resserrement  des  pupilles  coïn-« 
eide  ordinairement  avec  la  contraction  des  membres,  et  que  plus 
tard  elles  se  dilatent,  cjuand  survient  la  résolution  générale. 

(t)  Je  trouve  l’explication  de  ce  fût  dans  l’ouvrage  re'cemment  publie'  jiar 
M.  Flourens.  En  effet,  ce  savant  physiologiste  paraît  avoir  reconnu  que  la 
perception  delà  vue  résidait  dans  le  cerveau,  et  que  les  mouvements  de  l’iris 
avaient  leur  point  de  déjiart  dans  les  tubercules  quadrijumeaux  , et  il  a pu  , 
dans  ses  expériences,  isoler  complètement  ces  deux  phénomènes. f'5ecàe/r /tes 
expérimenlales  sur  les  propriétés  et  les  fonctions  du  système  nerveux  dam 
les  animaux  vertébrés.  \ 842. 

(3)  Lallemand,  Lettre  II,  page  272. 


U8 


KAMOLI.JSSK.MKAT  AIGU.  (SYMl-T.) 


C.ii'swell  (lit  que  la  pupille  est  coulractée  seulement  pendant  la 
première  p(îi  iode  du  raïuoliissi’inent,  ou  quand  ce  clianyeineut 
[this  change)  s’accompagne  d’irritation  du  cerveau  ; et  pendant 
la  deuxième  période,  ou  quand  il  y a ramollissement  sans  irri- 
tation subséquente,  elle  est  dilatée  (1). 

L’état  des  pupilles  a été  noté  dans  17  de  mes  observations 
voici  dans  quels  termes  : 

Trois  fois  elles  étaient  normales } 

Une  fois  contractées  ( obs.  42)  ; 

Une  fois  étroites  ( obs.  2)  ; 

Trois  fois  médiocrement  contractées  ou  un  peu  étroites  (obs. 
30,  5 et  40  ) ; 

Une  fois  contractées  du  côté  non  paralysé , dilatées  du  côté 
paralysé  ( obs.  14)  ; 

Une  fois  irès-dilatées  (obs.  23)  ; 

iZ*(.(i^^‘Ciin(p  fois  dilatées  ou  moyennement  dilatées  (obs.  1,9,  32, 
103); 

Deux  fois  dilatée  du  côté  non  paralysé,  la,  cornée  étant  opaque 
du  côté  opposé  ( obs.  29  et  33  ) ; 

Six  fois  seulement  elles  ont  été  notées  immobiles. 

Dans  aucune  des  observations  où  les  pupilles  ont  été  notées 
contractées  ou  un  peu  étroites , il  n’y  a eu  de  raideur  ni  de 
mouvements  convulsifs. 

Il  y a eu  de  la  contracture  dans  l’observation  32,  où  les  pu- 
pilles étaient  moyennement  dilatées,  dans  l’observation  23  , où 
elles  étaient  très-dila,tées.  Dans  l’observation  14  cependant  , la 
pupille  du  côté  paralysé  et  contracturé  était  contractée,  celle  du 
côté  sain  était  dilatée. 

La  forme  des  pupilles  est  indiquée  dans  6 des  observations  de 
ramollissement  aigu  de  M.  Rostan. 

Deux  fois  très'dilatées  ( contracture  dans  un  de  ces  cas  ) ; 

Une  fois  modérément  dilatées; 

Une  fois  peu  dilatées  ( contracture  ) ; 

Une  fois  il  est  dit  que  la  pupille  du  côte  sain  était  plus  dila- 
tée et  moins  contractile  ; 

Une  fois  seulement  les  pupilles  sont  notées  contractées  (bémi- 
plégie  sans  contracture  ). 

(t)  Cai's^'Cll , lü'y>  cit  ) '!• 


Leur  immobllilc  n’est  imUqace  que  deux  lois.  ^ 

M Andral , dans  ses  observations  de  rainolUssement  aigu, 
n’a  noté  que  trois  fois  l’état  des  pupilles  ; 

Une  fois  très-dilatées,  mobiles-,  convulsions  tétaniques  (obser- 
vation 13); 

Une  fois  médiocrement  dilatées  -,  contracture  des  membres 

( obs.  28  ) ; - I ' 

Une  fois  la  droite  contractée  , la  gauche  un  peu  dilatée;  hé- 
miplégie droite  sans  raideur  ( obs.  32). 

On  voit  que  dans  le  ramollissement  aigu,  les  pupilles  ne  sont 
pas,  comme  l’a  dit  M.  Lallemand , habituellement  contractées, 
et  que  leur  contraction'  ou  leur  dilatation  n offre  pas  de  rap- 
ports bien  constants  avec  la  résolution  ou  la  contractuie  des 
membres.  Faisons  remarquer  en  outre  que,  dans  tous  ou  pres- 
que tous  les  faits  que  nous  venons  de  citer,  c est  pi  ecisement  au 
commencement  de  la  maladie  qu  a ete  fait  1 examen  des  pu- 
pilles, à l’époque  oîi,  suivant  MM.  Lallemand  et  Carswell,  elles 
seraient  généralement  contractées. 

M.  Lallemand  dit  encore  que  les  pupilles  sont  généralement 
dilatées  dans  l’apoplexie  (hémorrhagie  cérébrale).  On  va  voir 
si  cette  proposition  est  plus  juste  que  celle  qu’il  a avancée  , à 
pr  opos  du  ramollissement.  J’ai  fait  le  relevé  de  30  observations 
d’hémorrhagies  cérébrales , dans  lesquelles  l’état  des  pupilles 
est  noté  ; 10  appartiennent  à M.  Rochoux,  21  ont  été  recueillies 
par  moi. 

Observations  de  M.  Rochoux  : 

Pupilles  contractées , 4 ; 

— resserrées,  1 ; 

— dilatées,!; 

— également  dilatées,  1 ( ce  qui  parai  c vouloir  expri- 

mer plutôt  leur  égalité  que  leur  état  de  dilatation); 

*—  normales,  2. 

Dans  un  cas , l’une  des  pnpilles  était  dilatée , l’autre  con- 
tractée. 

Observations  qui  m’appartiennent  : 

Pupilles  très-contractées,  3 ; 

— contractées,  4 ; 

— étroites , 2 ; 

— plutôt  cpntractées  que  dilatée*,  1 ; 


150 


RAMOLLISSEMENT  AIGU.  (sYMPT.) 

— très-dilatées,  3 ; 

— dilatées,  1 ; 

— moyennement  ou  médiocrement  dilatées  , 3; 

■—  normales,  2. 

Deux  fois  1 une  d’elles  était  très-dilatée  , l’autre  un' peu  con- 
tractée (1). 

Ainsi,  sur  ces  trente  et  un  cas  nous  trouvons  les  pupilles  con- 
tractées , resserrées  ou  étroites , dix-huit  fois  ; dilatées  , neuf 
fois  (dans  trois  cas,  l’une  d’elles  était  contractée,  et  l’autre  di- 
latée) j quatre  fois  normales,  et  trois  fois  inoyeuneinenl  dilatées, 
ce  qui  équivaut,  je  crois,  à pupilles  normales. 

Ces  faits  nous  apprennent  que,  s’il  est  permis  de  tirer  quelque 
induction  de  1 état  des  pupilles,  nous  trouverons  dans  leur  res- 
serrement plutôt  une  raison  de  soupçonner  une  hémorrhagie 
qu’un  ramollissement  : mais  nous  pensons  que  la  conclusion  la 
plus  sage  sera  que  l’examen  des  pupilles  ne  saurait  servir  au 
diagnostic  différentiel  du  ramollissement  et  de  l’hémorrhagie. 

§ X.  Circulation. 

On  a généralement  des  idées  fort  peu  arrêtées  sur  l’influence 
que  les  altérations,  et  en  particulier  l’inflammation  de  l’organe 
central  de  l’innervation  exercent  sur  la  circulation,  sur  le 
pouls.  Cela  suffit  pour  prouver  que  cette  influence  doit  être  peu 
prononcée  et  fort  inégale  dans  ses  résultats. 

Le  docteur  Copland  dit  que,  dans  la  célébrité , le  pouls  est 
d’abord  fort  et  fréquent,  puis  il  devient  tout  à coup  faible  , ir- 
régulier, intermittent  (2).  Ailleurs,  il  dit  que  les  symptômes  de 
la  cérébrite ressemblent,  au  début,  à ceux  du  ramollissement, 
mais  qu’ils  s’en  distinguent  par  un  mouvement  fébrile  (p.  232). 
Ceci  donne  un  exemple  de  la  clarté  et  de  la  vérité  des  distinc- 
tions  que  l'on  a voulu  établir  entre  le  ramollissement  et  l’en- 
céphalite. 

M.  Bouillaud  annonce  qu’il  n’y  a pas  de  fièvre  dans  l’inflam- 
mation du  cerveau.  « Cet  organe,  dit-il,  n’agit  pas  directement 
sur  la  circulation.  Lorsque  celle-ci  est  altérée  dans  l’encépha- 

( , 

(t)  Dans  toutes  ces  observations,  l’e'tat  des  papilles  a e’té  noté  le  premier  ou 
le  second  jour  de  l'attaque. 

(2)  Copland,  loc.  cit.,  page  2.34. 


CinCüLATION. 

lite,  c’est  par  suite  du  trouble  de  la  respiration,  qui  tient  lui- 
même  à l’état  du  cerveau.  Ce  qui  le  prouve,  c’est  que  les  trou- 
bles de  la  circulation  suivent  ceux  delà  respiration  (1).  » 

Suivant  M.  Lallemand  , la  circulation  ne  serait  pas  sensible- 
ment influencée  par  l’inflammation  du  cerveau.  La  fièvre 
s’observe  rarement  dans  celte  maladie,  et  lorsqu’elle  existe,  elle 
est  due  à quelque  complication,  comme  l’inflammation  de  la 
muqueuse  de  l’estomac,  des  intestins  ou  de  la  vessie  (2). 

M.  Garswell  dit  aussi  que,  dans  le  ramollissement  du  cerveau, 
le  pouls  ne  présente  habituellement  aucune  altération  remar- 
quable (3). 

Dans  la  plupart  de  nos  observations  , nous  ne  trouvons  au- 
cune modification  bien  notable  du  pouls  : quatre  fois  seule- 
ment, dans  les  observations  2,  31,  33  et  35,  il  y avait  une  fièvre 
assez  forte.  On  a trouvé  une  pneumonie  en  suppuration  dans 
l’observation 33;  mais,  dans  les  trois  autres,  où  le  pouls  était  au 
début,  à 94,  à 100,  à 96,  on  n’a  pas  trouvé  de  complication  à la- 
quelle on  pût  rattacher  cette  circonstance  : les  poumons  étaient 
plus  ou  moins  enf-oués , mais  c’était  là  un  phénomène  consécu- 
tif, et  que  l’on  ne  voit  pas  habituellement  s’accompagner  de 
mouvement  fébrile.  Il  est  vrai  que,  dans  aucun  de  ces  cas , il 
n’est  fait  mention  de  la  muqueuse  gastro-intestinale  ; mais  nous 
ne  saurions  y attacher  beaucoup  d importance,  et  ainsi  nous  ne 
doutons  pas  que  chez  la  femme  Vaudet  (obs.  31),  qui,  quelques 
heures  avant  son  attaque,  paraissait  se  très-bien  porter,  et  pré- 
sentait plusieurs  heures  après,  lOO  pulsations,  la  fièvre  ne  ré- 
sultât uniquement  de  l’altération  du  cerveau.  Je  n’ai  pas  tenu 
compte  des  cas  où  le  ramollissement  débutait  dans  le  cours 
d’une  autre  maladie,  une  pneumonie  , par  exemple,  accompa- 
gnée de  fièvre  : il  ne  m’a  semblé , dans  les  faits  de  ce  genre  , 
exercer  aucune  influence  sur  l’état  de  la  circulation.  Le  pouls 
m’a  souvent  encore  paru  accéléré  au  début  du  ramollisse- 
ment ; mais  en  l’absence  d’un  étal  fébrile,  il  est  impossible  de 
rien  conclure  des  cas  où  la  fréquence  habituelle  chi  pouls  n'a- 
vait pu  être  appréciée  avant  l’invasion  des  symptômes  céré- 
braux. 

(t)  Boulllaud,  Traité  de  l’cncc!/>halile,  page  304. 

(2J  Lallemand,  Lettre  II,  page 29.9  els'iiv. 

(3)  Larswell,  Inr.  cit. , page  9. 


152 


HAHOI.LlSSEMËNa'  XUJU.  (sY.VI^T.) 

M.  Jlostan  dit  siinpleinenl  que  , dans  le  ramollissement,  le 
pouls  est  quelquefois  plus  fréquent  et  pi  us  fort  que  de  coutume. 

M.  Andial  s’est  assuré  que,  contrairement  à l’opinion  de 
MM.  Lallemand  et  Bouillaud,  l’inflammation  du  cerveau  pou- 
vait, en  l’absence  de  toute  complication  , s’accompagner  de 
fièvre;  mais  il  regarde  cette  circonstance  comme  due  simplement 
à une  disposition  individuelle  (1). 

- Ce  qu’il  y a d’assez  curieux  dans  ce  passage,  c’est  que  M.  Au- 
dral  paraît  oublier  que  plus  haut  il  a distingué  avec  soin  l’in- 
flammalion  du  cerveau  de  son  ramollissement,  celui-ci  pouvant 
très-souvent  n’être  pas  inflammatoire  : en  effet  il  oppose  aux 
idées  de  MM.  Lallemand  et  Bouillaud,  sur  V encéphalite,  ses 
propres  observations  de  ramollissement,  celles  de  M.  Rosian,et 
un  gland  nombre  de  faits  de  ramollissement  empruntés  çà  et 
là,  aveu  involontaire  de  l’impossibilité  de  séparer  le  ramollisse- 
ment de  l’encéphalite. 

S XI.  Respiration. 

La  lespiration  n’est  jiresque  jamais  lése'e  primitivement  dans 
le  ramollissement  aigu  ; lorsque,  dès  le  début  cependant,  les  sym- 
ptômes annoncent  un  état  de  compression  considérable  de  Ten- 
et phale,  elle  est  souvent  alors  accélérée,  bruyante,  stertoreuse. 

L état  de  paralysie  ne  m a pas  généralement  paru  exercer  une 
influence  notable  sur  les  mouvements  delà  poitrine,  et  je  n’ai 
jamais  vu  le  thorax  se  soulever  d’un  coté  seulement,  circon- 
stance qui , suivant  M.  Serres,  accompagnerait  habituellement 
Thcmiplégie  (2). 

Je  n’ai  guère  rencontré  non  plus  , même  dans  les  cas  où  le 
cerveau  paraissait  le  plus  fortement  comprimé,  si  ce  n’est  à la 
lin  de  la  vie,  cette  respiration  apoplectique  qui,  suivant  un  au- 
teur allemand,  consisterait  en  un  mouvement  instinctif  du  dia- 
phragma, avec  inaction  du  thorax  (3). 

A la  fin  de  la  vie,  la  respiration  s’embarrasse  toujours,  et 
c’est  même  souvent  une  coniplicatiou  survenant  du  côté  du 
poumon  qui  détermine  la  mort,  lor'sque  les  accidents  céré- 

(t)  Andra! , Clinique.,  pnp;o  ;577  et  suiv. 

(2)  Serres,  Antmaire  ücs  hôpitaux,  tSIi). 

(3)  Itoclciir  iloppe  de  Berlin  , Sur  la  respiration  des  apoplectiques,  in 
Jl.'ist’s  uia'^azin.  { (ônz.  uietL,  31  jnille.l  îSil  .) 


KUTRITIOV, 


Ï53 


braux  ne  devaient  pas  par  eux-inêines  entraîner  encore  une  fin 
funeste.  Tantôt  c’est  une  pneumonie,  tantôt  un  simple  engoue- 
ment des  poumons,  tantôt  une  accumulaiion  de  mucus  dans  les 
canaux  bronchiques,  accident  surtout  fréquent  chez  les  vieil- 
lards déjà  affectés  de  bronchite  ou  de  simple  bronchorrhée.  .Te 
reviendrai  du  reste,  à propos  du  ramollissement  chronique, 
sur  ces  complications  que  je  me  contente  d’indiquer  ici  (1). 

§ XII.  Nutrition. 

« Dans  tous  les  cas  d’affection  du  cerveau , a dit  Bi  oussais  , 
l’estomac  entre  en  sympathie,  et  cette  sympathie  produit  le  vo- 
missement,- mais,  pour  que  ce  symptôme  se  manifeste,  il  est  ne- 
cessaire que  la  sensibilité  ne  soit  pas  parfaitement  éteinte,  car 
je  crois  que  les  malades  qui  sont  frappés  d’insensibilité  com- 
plète ne  commencent  à vomir  que  quand  ils  commencent  à re- 
couvrer une  partie  de  leurs  sens.  » Cette  assertion  ne  doit  pas 
cire  aussi  généralisée  que  l'a  fait  cet  illustre  écrivain.  Le  vo- 
missement peut  manquer  dans  toutes  les  formes  du  ramollisse- 
ment. Ce  symptôme,  qui  ne  s’observe  guère  qu’au  début  de  la 
maladie,  m’a  paru  tenir  en  général  à des  circonstances  tout 
éventuelles,  comme  l’état  actuel  de  l’estomac,  sa  réplétion  sur- 
tout, la  dispo'ition  p.irticulière  des  individus,  etc....  Aussi,  ce 
signe  n’a,  je  crois,  à peu  près  aucune  valeur  dans  le  diagnostic 
ou  le  pronostic  du  ramollissement. 

Le  ramollissement  est  quelquefois  précédé,  pendant  plusieurs 
jours,  de  ces  symptômes  gastriques  qui  peuvent  servir  de  pro- 
dromes à presque  toutes  les  affections  aiguës,  et  qui  paraissent 
généralement  emprunter  leur  physionomie  beaucoup  moins  à 
la  maladie  qui  les  suit  qu’à  la  disposition  particulière  de  l’indi- 
vidu. On  trouve  parmi  les  observations  de  RI.  Rostan  quelques 
cas  de  ce  genre. 

Lorsque  le  coma  est  profond,  la  paralysie  complète,  la  déglu- 
tition est  souvent  difficile,  ou  nrème  impossible.  Cette  difficulté' 
de  la  déglutition  tient  le  plus  souvent  à la  raideur  des  mâ- 
choires, à l’immobilité  ou  à l'impui.ssance  des  muscles  que  la 
volonté  emploie  dans  la  déglutition.  Il  faut  alors  enfoncer  pro- 
fondément dans  la  l.’oiiche  une  cuiller  ou  un  verre  : d*s  que  le 

(t)  Voyez  cliap,  X. 


154 


ramollissement  AiGtJ.  ( SYMPT.) 

liquide  a touché  le  fond  de  la  gorge,  les  muscles  du  pharynx  et 
l’œsophage  entrent  en  contraction.  Dans  des  cas  plus  rares,  ces 
organes  sont  eux-mêmes  frappés  de  paralysie,  et  la  déglutition 
est  tout  à fait  impossible. 

Dans  presque  tous  les  cas,  ces  phénomènes  s’observent  dans  la 
dernière  période  de  la  maladie.  ^ 

Souvent,  au  moment  de  l’attaque,  il  y a des  évacuations  in- 
volontaires d’urine  et  de  matières  fécales.  Cette  incontinence 
persiste  en  général  pendant  toute  la  durée  de  la  maladie,  et  le 
retour  ou  la  conservation  des  facultés  intellectuelles  ne  suffit  pas 
toujours  pour  l’éviter. 

Lorsque  les  accidents  se  développent  graduellement,  les  éva- 
cuations involontaires  n’ont  ordinairement  lieu  qu’à  une  époque 
plus  avancée,  si  ce  n’est  c^nelquefois  la  nuit,  pendant  le  som- 
meil On  sait  que  l’écoulement  spontané  de  l’urine  coïncide 
presque  toujours  dans  ces  cas  avec  la  réplétiou  de  la  vessie,  et 
de  quelle  importance  il  est  alors  de  pratiquer  avec  soin  le  ca- 
thétérisme. M.  Lallemand  a particulièrement  insisté  sur  les 
inconvénients  d’une  stagnation  de  l’urine  dans  la  vessie  ; il  a 
fait  voir  que,  pour  avoir  négligé  le  cathétérisme,  on  avait  sou- 
vent laissé  se  développer,  du  côté  de  la  vessie,  les  complications 
les  plus  fâcheuses.  Les  accidents  de  ce  genre  sont  du  reste  beau- 
coup moins  à craindre  chez  les  femmes  que  chez  les  hommes. 

Il  y a habituellement  de  la  constipation  dans  le  ramollisse- 
ment aigu. 

La  marche  de  la  maladie  est  ordinairement  trop  rapide  pour 
exercer  une  influence  bien  appréciable  sur  la  nutrition  géné- 
rale. 

Il  faut  noter  seulement  la  facilité  avec  laquelle  des  eschares 
se  forment  au  siège,  circonstance  qui  hâte  toujours  la  mort  des 
malades,  et  quelquefois  empêche  seule  le  ramollissement  de  pàs- 
ser  à l’état  chronique.  Ces  eschares,  favorisées  par  le  contact  in- 
cessant de  l’urine,  se  forment  surtout  aisément  chez  les  iiulivi- 
dufe  très-maigres  ou  au  contraire  d’un  grand  embonpoint. 
Chez  les  vieillards,  à la  suite  d’un  décubitus  un  peu  prolongé  et 
dans  une  immobilité  absolue  , il  se  forme  quelquefois  au  talon 
une  phlyctène  large  et  épaisse,  et  à la  rupture  de  laquelle  suc- 
cède une  eschare  profonde;  d’autres  fois,  c’est  à la  suite  de  sina- 
pismes, de  l’application  d’une  boule  d’eau  chaude  que  l’on  voit 


DURÉE. 


155 


,e  former  des  phlyctènes,  puis  des  eschares  aux  pieds.  Je  n'ai  pas 
besoin  d’insister  sur  les  soins  et  les  précautions  que  nécessite 
impérieusement  une  semblable  prédisposition. 

La  température  de  la  peau  présente  rarement  quelque  chose 
de  particulier  : la  peau  esthabduellement  chaude  etmo.te  chez 
les  individus  chez  lesquels  le  ramollissement  s’accompagne  de 
phénomènes  fébriles.  Lorsque  la  maladie  débute  par  de  1 agita- 
tion, du  délire,  on  remarque  quelquefois  de  la  chaleur  au 

M.  Plus  m’a  dit  avoir  plusieurs  fois  trouvé  une  chaleur  plus 
grande  dans  le  côté  du  corps  paralysé  et  contracturé.  Je  n’ai  nen 
vu  de  semblable  dans  le  ramollissement  aigu  : dans  un  cas  au 
contraire,  j’ai  trouvé  que  le  côté  paralysé,  bien  qu’éteniu  pi  es 
du  corps,  sous  les  couvertures,  paraissait  au  toucher  plus  froid 

que  les  membres  mobiles  et  découverts. 

A la  fin  de  la  vie  , la  peau  se  couvre  presque  toujours  d une 

sueur  abondante. 

§ XIII.  Durée. 


Le  ramollissement  aigu  suit  habituellement  une  marche  as- 
j sez  rapide. 

Dans  vingt-sept  observations  recueillies  par  moi,  où  la  duree 
i de  la  maladie  a pu  être  exactement  appréciée , la  mort  est  ar- 
! rivée  : 

Deux  fois  en  moins  de  vingt-quatre  heures  ; 

Sept  fois  en  deux  jours  ; 

Neuf  fois  de  trois  à cinq  jours  ; 

Deux  fois  de  cinq  à six  jours  ; 

Trois  fois  de  six  à huit  jours  ; 

Deux  fois  de  neuf  à dix  jours  5 
Une  fois  le  vingtième  jour  ; 

Une  fois  le  trentième  jour.  .. 

Sur  seize  observations  de  M.  Rostan  : 

Une  fois  en  deux  jours  •, 

Trois  fois  de  trois  à cinq  jours  ; 

Trois  fois  de  cinq  à six  jours  ; 

Trois  fois  de  six  à huit  jours; 

Deux  fois  de  huit  à douze  jours  ; 

Une  fois  en  treize  jours  ; 


l 


1.56 


RAMOLL1SSEME3ÎT  AIGU.  (SYAIPT.) 

Trois  fois  an  bout  d’une  vingtaine  de  jours. 

Sur  seize  observations  de  M.  Andral  : 

Une  fois  en  vingt  heures  ; 

Deux  fois  en  quatre  jours  ; 

Une  fois  le  cinquième  jour; 

Trois  fois  le  sixième  ; 

Une  fois  le  septième  ; 

Deux  fois  le  huitième  ; 

Deux  fois  le  dixième; 

Deux  fois  le  vingtième  et  le  vingt-cinquième; 

Une  fois  le  trentième  jour. 

Ainsi,  sur  cinquante-neuf  cas,  la  mort  est  arrivée  : 

Onze  fois  pendant  les  deux  premiers  jours  : 

Vingt-six  fois  avant  le  cinquième  jour  ; 

Quarante-trois  fois  avant  le  neuvième  jour; 

Sept  fois  du  neuvième  au  vingtième  jour  ; 

Neuf  fois  du  vingtième  au  trentième  jour. 

S XIV, 

J’ai  dû  étudier  successivement  les  divers  symptômes  du  ra- 
mollissement aigu,  rechercher  leur  fréquence,  décrire  leurs  va- 
riétés, donner  une  idée  de  leur  valeur  séméiologique.  Il  me  fau- 
drait maintenant  résumer  ces  faits  épars,  leur  donner  un  corps, 
le  revêtir  des  couleurs  qui  lui  appartiennent;  passer  enfin  de 
Tétude  analytique  à l’étude  descriptive. 

J’aurais  à montrer  alors,  traçant  un  tableau  type  de  l’attaque 
d’apoplexie,  ces  individus  perdant  tout  à coup,  à la  suite  de 
souffrances  vagues  ou  sans  que  rien  put  le  faire  prévoir,  Tusage 
du  mouvement , de  la  parole , de  l’intelligence  ; ils  restent  cou- 
chés sur  le  dos,  la  face  hébétée,  les  traits  déviés,  les  paupières 
fermées  ou  à peine  en tr’ou vertes;  il  ne  sort  pas  un  son  de  leur 
bouche,  et  quelques  murmures  plaintifs  viennent  seuls  té- 
moigner qu’ils  ne  sont  pas  entièrement  morts  à la  vie  extérieure. 
D’un  côté  du  corps,  leurs  membres  paralysés,  inactifs,  restent 
étendus  et  flasques  auprès  d’eux,  ou  fléchis  et  inutilement  con- 
tractés, presque  toujours  privés  de  sensibilité;  les  membres  du 
côté  opposé  s’agitent  au  contraire,  soit  dans  le  vague,  soit  pour 
témoigner  de  la  sensibilité  qu’on  y éveille,  soit  pour  accomplir 
quelques  actes  qu’un  reste  de  volonté  leur  permet  d’essayer.  Au 


SYMPTOMES. 


O i 


bout  de  quelques  heures  ou  de  quelques  jours,  on  observe  or- 
dinaircLnent  une  légère  rémission  dans  ces  symptômes  ; les  yeux 
s’ouvrent,  un  certain  retour  à la  vie,  sinon  au  sentiment,  se 
peint  dans  le  regard,  quelques  mots  mal  articules  se  fout  en- 
tendre, les  membres  paralysés  retrouvent  un  peu  de  mouvement 

et  de  sensibilité Mais  bientôt  la  resjnration  s embarrasse,^  le 

siège,  fatigué  d’un  poids  incessant,  irrité  par  le  contact  de  1 u- 
rine  et  des  fèces,  rougit  et  s’écorche,  le  mouvement  et  le  senti- 
ment se  résolvent  de  nouveau,  mais  par  tout  le  corps-,  les  facul- 


tés de  l’intelligence  et  des  sens  disparaissent  sans  retour  , et 
la  mort  générale  ne  tarde  pas  à suivre  celle  des  fonctions  de  re- 
lation. Dans  d’autres  cas,  au  contraire,  j’aurais  à peindre  un 
engourdissement  graduel  de  1 intelligence  et  des  sens,  du  mou- 
vement et  du  sentiment,  s’étendant  comme  un  nuage  que  cha- 
que instant  épaissit,  mais  frappant  presque  toujours  une  des 
moitiés  de  l’individu  plus  que  l’autre.  A un  engourdissement 
général  se  joignent  habituellement  des  douleurs  ou  des  sensa- 
tions particulières:  ainsi,  une  céphalalgie,  quelquefois  limitée 
à un  côté  du  crâne,  plus  souvent  siégeant  sur  le  front  ou  par 
toute  la  tête  ; ainsi  des  picotements, ^des  fourmillements,  remon- 
I tant  des  extrémités  des  doigts  ou  des  orteils  aux  attaches  des 
membres,  occupant  un  côté  de  la  face,  tandis  que  lautie 
I se  dévie  graduellement  ; en  même  temps  la  langue  devient 


I inhabile  à exprimer  les  idées  que  l’intelligence  paresseuse  ne 
conçoit  plus  que  lentement,  puis  , peu  à peu,  ou  par  brusques 
secousses,  à l’hébétude  succède  la  somnolence,  le  coma,  comme 
à la  lourdeur  des  mehibres  la  paralysie,  comme  l’anesthésie  aux 


I engourdissements. 

Passant  ensuite  à d’autres  faits  bien  différents,  je  montrerais 
: commenta  des  maux  de  tête  intenses,  ou  bien  à une  agitation 

inquiète,  ou  bien  à un  léger  égarement  des  idées  peut  succéder 
tout  à coup  tantôt  un  délire  violent,  tantôt  une  attaque  d’épl- 
' lepsie,  tantôt  une  hémiplégie  subite  interrompue  par  des  con- 
tractions tétaniques,  ou  accompagnée  de  convulsions  dans  le 
I côté  non  paralysé. 


J’aurais  à peindre  l’isolement  ou  les  combinaisons  variées  de 
1 ces  divers  phénomènes  qui  peuvent  aussi  se  montrer  primitive- 
I tuent  cl  à les  faire  voir  aboutissant  presque  toujours  à celte  rc- 


158 


ramollissbment  aigu,  (sympt.) 

solution  générale  des  fonctions  qui  caractérisait  dès  leur  début 
tant  d’autres  cas  de  ramollissement. 

Je  devrais  enfin  montrer  que,  dans  des  cas  plus  heureux , 
quelle  que  soit  la  marche  qu’ait  suivie  dès  son  début  le  ramol- 
lissement, les  symptômes  de  cette  affection  peuvent  se  dissiper 
graduellement  pour  faire  place  ou  à une  santé  parf  ûte,  ou  à un 
trouble  léger,  mais  persistant,  de  quelqu’une  des  lésions  primi- 
tivement lésées,  ou  enfin  en  conservant  une  partie  de  leur  phy- 
sionomie première  ; dans  ce  dernier  cas  la  maladie  n’a  pas  guéri, 
mais  elle  a passé  à l’état  chronique,  et  le  malade  succombera  à 
une  époque  qu’il  est  impossible  de  déterminer,  soit  plus  ou  moins 
prochaine  , et  alors  aux  progrès  incessants  de  la  maladie  céré- 
brale, soit  très  éloignée,  et  alors  à une  complication  ou  à une  cir- 
constance fortuite  quelconque. 

Mais  si  je  devais  entreprendre  la  description  de  chacune  de 
ces  formes  de  ramollissement,  il  mefaudrait  presque  prendre  cha- 
cun des  faits  que  j’ai  rapportés  dans  ce  travail,  et  en  présenter 
l’analyse  succincte,  car  presque  tous  onlleur  physionomie  à part, 
leurs  traits  particuliers,  et  une  description  générale,  impuissante 
à les  contenir  tous,  n’en  rendrait  peut- être  pas  un  dans  le  tableau 
incomplet  ou  chargé  qu’elle  présenterait.  Je  renonce  donc  à cette 
tâche,  et  je  préfère  renvoyer  le  lecteur  aux  faits  eux-mêmes, 
parmi  lesquels  je  lui  indiquerai  ceux  seulement  dont  les  formes 
peuvent  le  mieux  servir  de  type  et  de  point  de  comparaison  pour 
les  faits  à venir  : 

Début  graduel,  1,2,  7,  1 3. 

Attaque  apoplectifonne,  9, 10,  11,  14,  32. 

— (Sans  prodromes),  29,  30,  31. 

Délire  seul,  3,  38,  39,  69. 

Agitation,  mouvements  désordonnés,  42,45. 

Attaque  épileptiforme,  40,  41. 


CHAPITRE  IV. 

APPRÉCIATION  DES  SYMPTOMES  DU  RAMOLLISSEMENT  AIGU. 

J’ai  cherché  à de'montrer,  en  étudiant  l’anatomie  patholo- 
gique du  ramollissement,  comment  celui-ci  se  formait,  ainsi 
qu’il  arrive  toujours  à un  travail  inflammatoire,  consecutive- 


CONGESTION  CÉRÉBRALE. 

ment  à une  congestion  sanguine,  comment  cette  dermere,  évi- 
dente dans  un  certain  nombre  de  cas  où  l’on  saisissait  la  maladie 
à son  début,  et  revêtue  de  tous  ses  éléments  essentiels,  perdait 
plus  tard  une  partie  des  caractères  qui  lui  sont  propres  ; mais 
comment  on  en  retrouvait  constamment  au  moins  quelques  tra- 
ces dans  la  rougeur  du  ramollissement  aigu,  et,  nous  le  montre- 
rons plus  loin,  des  indices  habituels  dans  la  couleur  jaune  du 
ramollissement  chronique. 

Nous  allons  trouver,  dans  l’étude  des  symptômes  du  ramol- 
lissement aigu,  une  démonstration  nouvelle  du  rôle  que  joue  la 
congestion  cérébrale  dans  la  production  de  cette  maladie. 

Ces  symptômes  peuvent  être  ranges,  comme  nous  l’avons  vu, 
en  deux  groupes  bien  distincts:  phénomènes  de  diminution  et 
d’affaiblissement,  phénomènes  d’excitation  ou  de  pei version: 
nous  pouvons  appeler  les  premiers,  phénomènes  de  compression^ 
les  seconds  phénomènes  d'irritation. 

Si  le  ramollissement  commence  , ainsi  que  nous  le  démontre 
l’analomie  pathologique,  par  une  congestion  sanguine,  à la  suite 
de  laquelle  se  développe  une  alteration  inflammatoire,  les 
symptômes  du  début  du  ramollissement  doivent  appaitenii  a 
la  congestion  cérébrale,  et  par  conséquent  levetir  les  caractères 
qui  appartiennent  à celte  dernière. 

Or,  il  est  certain,  et  nous  allons  en  fournir  des  exemples  suf- 
' fisants,  que  ces  deux  ordres  de  symptômes,  que  nous  venons  de 
voir  caractériser  le  ramollissement  aigu , se  montrent  sous  les 
mêmes  formes  et  avec  les  mêmes  variétés  dans  la  congestion  cé- 
rébrale. 

Comment  un  même  phénomène  anatomique,  la  congestion, 
peut-il  se  traduire  au  dehors  sous  des  formes  si  différentes? 

Lorsque  le  sang  se  porte  au  cerveau  en  plus  grande  quantité 
qu’à  l’ordinaire,  il  peut  agir  de  deux  manières  : ou  simplement 
gêner,  en  le  comprimant,  les  (onctions  de  1 organe,  ou  exciter  au 
contraire  et  modifier  celles-ci,  ainsi  déterminer  la  céphalalgie, 
les  convulsions,  le  délire..-  en  exagérant  la  sensibilité,  la  moti- 
lité, en  modifiant  l’intelligence Ces  divers  effets  peuvent  se 

produire  à peu  près  et  même  tout  à fait  instantanément. 

A quoi  tient  la  différence  de  ces  effets  de  la  congestion?  N’est- 
ce  qu’une  différence  du  plus  au  moins?  Il  en  est  certainement 
ainsi  quelquefois,  et  il  n’y  a jpas  à douter  qu’un  afflux  de  sang 


160 


IlAMOLUSSEHEiVT  AIGL".  (SVSIPT.) 

assez  considérable  pour  gonder  et  comprimer  de  toutes  paris 
1 organe  encéfibaÜque  ne  doive,  eu  lui  rendant  impossible  toute 
manifestaiion  fonctionnelle,  réduire  son  expression  symptoma- 
tique a la  négation  de  ses  fonctions.  Mais  nous  ignorons  com- 
plètement pourquoi  une  congestion,  moindre  ou  partielle,  donne 
lieu  tantôt  à un  simple  affaiblissement  de  ces  fonctions,  tantôt  à 
leur  surexcitation;  pourquoi  à telle  ou  telle  forme  de  cette  der- 
nière; sans  doute  il  y a là  des  conditions  de  siège,  de  quantité, 
de  qualité  dans  le  fluide  accumulé,  de  prédisposition  dans  l’or- 
ganisme malade,  qui  existent,  bien  que  leur  appréciation  ou 

même  leur  perception  nous  échappe Mais  enfin  nous  en 

sommes  leduits  a cet  egard  a de  simples  conjectures. 

Mais  si  l accumulation  rapide  ou  instantanée  du  sang  dans  le 
cerveau  peut,  en  comprimant  ou  en  irritant  cet  organne,  donner 
lieu  sur-le-champ  à des  phénomènes  de  compression  ou  d’irrita- 
tion , il  est cei  tain , d un  autre  cote,  qu  une  congestion  ne  sau rait 
être  aussi  immédiatement  suivie  du  développement  des  phéno- 
mènes anatomiques  qui  caract<^risent  l’inflammation.  Quelque 
rapidement  que  se  forment  ces  derniers,  ils  ne  sauraient,  comme 
le  peut  faire  une  manifestation  symptomatique  , suivie  instan- 
tanément l’appirition  d’ime  conge>-tion  ; ce  que  je  dis  là  peut 
s’appliquer  egah  ment  à tontes  les  alterations  que  con'-titue  une 
modification  intime,  moléculaire  du  tissu  'l’uii  organe.  Ainsi, 
je  prétends  qu’un  lainollisseiiient , de  quelle  manière  qu'on  ea 
conçoive  la  nature,  ne  peut  se  faire  instanianément  ; or  si,  à la 
suite  de  symptômes  dont  le  développement  a offeit,  pour  carac- 
tère le  plus  saillant,  l’instantanéité,  on  trouve  un  ramollisse- 
ment, il  est  de  toute  évidence  qu’il  y a eu  quelque  autre  chose 
cjui  a précédé  celui-ci.  Que  sera  cette  autre  chose,  sinon  une 
congestion  (1)?  Il  nous  est  d’autant  moins  possible  d’eu  douter, 
que  nous  en  retrouvons  habituellement  des  traces  évidentes  sur 
le  cadavre.  Ainsi,  les  symptômes  et  les  lésions  anatomiques  s’é- 
clairent et  s’harmonisent  merveilkusenient,  puisque,  de  quelle 

(1)  II  est  évident  qucccci  ue  s’apjilicjue  pa.s  aux  ramolUssemciils  quisepro- 
cîiiiseni  d’une  façon  mécanique:  ainsi,  à la  suite  d’uiie  contusion  du  cerveau, 
ou  meme  d’une  infiltration  san;;uine  spontanée,  celle-ci  pouvant,  ainsi  que 
je  l’ai  dit  ailleurs  , culraiuer  une  diminution  notable  de  consi.siance  de  la 
substance  cccébrak , par  le  mélange  iniiinc  du  sang  aux  uiokeulcs  de  la 
pulpe  nerveuse. 


I 


161 


COXCESllON  CÉllÉBRALK. 

mailicre  qu’on  IosiiiU;n'0(;o,  les  uns  viennent  loujours  flf  porter 
la  doinonsualioa  tle  ce  que  les  autres  avaient  fait  picsmner. 

Jïït  maintenant,  la  supposition  d’un  ramollissement  qui  se 
formerait  d’emblée,  lout-àcoup,  ne  liaraîl-elle  pas  à peu-près 
inadmissible  par  elle-même  ? C’est  une  hypothèse  que  non-seu- 
lement rien  ne  justifie,  mais  qui,  ce  me  semble,  répugne  meme 
à l’esprit.  Il  On  ne  conçoit  {;uèrc,  dit  le  professeur  Forget,  la  for- 
mation subite  d’un  ramollissement  » (1). 

La  connaissance  du  fait  que  je  viens  de  développer,  de  la 
part  que  prend  la  congestion  cérébrale  dans  la  production  du 
ramollissement,  eût  pu  dispenser  M.  Andral  d’avancer  une  pio- 
position  aussi  improbable. 

« Un  homme,  atteint  d’une  alVection  de  cœur  graves  rapporte 
cet  auteur , se  réveilla  un  matin  avec  un  bras  paralysé  et  un 
autre  contracluré  ; le  lendemain  , il  avait  une  hémiplégie  com- 
plète, sans  raideur,  et  il  mourut  trente  jours  après,  sans  avoir 
présenté,  à aucune  époque  , aucun  autre  symptôme  cérébral. 
On  trouva  la  couche  optique  et  le  corps  strié  du  côté  opposé  à 
l’hémiplégie,  transformés  en  une  bouillie  jaunâtre.  Dans  ce  cas 
comme  dans  les  autres,  ajoute  l’auteur,  il  est  évident,  d’après 
la  manière  brusque  dont  se  montra  la  contracture,  sans  qu’au- 
cun autre  accident  nerveux  précédât  la  lésion  du  mouvement, 
que  le  rainollissemenl  s’accomplit  tout-à-coup  » (2). 

C’est  précisément  cette  absence  d’aucun  phénomène  précur- 
seur qui  démontre  que  le  ramollissement  a été  précédé  par  une 
congestion  sanguine  : la  coloration  jaunâtre  est  l’indice  incontes- 
t.able  de  celte  congestion  sanguine  pariiellc,  accompagnée  sans 
doute  d’un  peu  d’infdtration  de  sang,  à la  suite  de  laquelle  seu- 
lement il  a pu  se  former. 

Si  la  congestion  cérébrale  peut,  dès  sou  début,  revêtir  les  dif- 
férentes formes  symptomatiques  que  nous  voyons  caractériser 
[ jusqu’à  la  fin  le  ramollissement,  il  est  évident  que  l’on  ne  pourra 
I plus  distinguer  le  moment  précis  où  celui-ci  se  produira,  ou 
I rinflammation  aura  succédé  à la  fluxion.  Il  n’en  est  pas  du 
) cerveau  comme  des  autres  organes  où  la  déformation,  la  dou- 
leur, la  percussion,  l’auscultation,  etc...,  nous  pormettcnl  de 

■( 


(1)  Forgfit , 3ic'moirc  ciid,  j a-c  780. 

(2)  AudruI,  Cliriifjuc,  T.  V,  l’iigc  413. 


11 


Ï62 


ramollissement  Aigu,  (sympt.) 

suivre  de  l’œil,  en  quelque  sorte,  et  avec  la  plus  grande  préci- 
sion, les  phénomènes  qui  se  passent  dans  la  profondeur  de  nos 
tissus.  L’observation  directe  n’est  presque  jamais  permise  dans 
les  maladies  du  cerveau  : il  n’est  possible  que  de  procéder  par 
induction,  et  n’assistant  que  de  loin  aux  modifications  qui  s’o- 
pèrent dans  la  pulpe  nerveuse,  nous  ne  pouvons  en  saisir  que 
l’ensemble,  sans  prétendre  toujours  en  suivre  exactement  les 
périodes  et  les  nuances. 

Que  le  ramollissement  débute  graduellement  par  un  affaiblis- 
sement ou  au  contraire  par  une  excitation  générale  des  facultés, 
ou  bien  qu’il  s’annonce  par  une  exaltation  soudaine  de  l’intelli- 
gence et  des  mouvements,  ou  par  un  collapsus  subit,  ces  divers 
groupes  de  symptômes  pouvant  persister  jusqu’à  la  fin,  ou  au 
contraire  se  remplacer  et  dans  un  ordre  varié,  il  est  évident  que 
nous  ne  pouvons  fixer  ce  qui  appartient  soit  à la  congestion 
primitive,  soit  au  ramollissement  consécutif;  que  l'apparition  de 
ce  dernier  pourra  ne  rien  ajouter  aux  symptômes  d’un  individu 
qui  délirait  ou  était  convulsé  dès  le  début,  que  le  développe- 
ment de  l’inflammation  pourra  demeurer  inaperçu  chez  un 
individu  plongé  dans  le  coma,  depuis  que  son  cerveau  se  trou- 
vait comprimé  par  une  fluxion  violente  et  générale. 

Cependant , si  l'on  considère  la  marche  qu’a  suivie  la  mala- 
die, dans  les  observations  que  j’ai  rapportées,  on  voit  qu’elle  a 
présenté  tantôt  une  tendance  à la  diminution,  tantôt  au  con- 
traire à l’augmentation.  Cela  tient  à la  forme  du  début. 

Si  la  maladie  se  développe  graduellement  et  par  une  lésion 
partielle,  il  est  évident  qu’une  fluxion  plus  grande  succédant  à 
une  légère  augmentation  de  la  circulation  , que  l’inflammation 
succédant  à la  fluxion,  l’altération  des  fonctions  ne  pourra  que 
s’accroître , à mesure  que  deviendra  plus  profonde  l’altération 
du  tissu. 

Biais  quand  la  maladie  a débuté  subitement  par  une  conges- 
tion brusque  et  générale,  il  est  certain  encore  que,  lorsqu’à  la 
fluxion  de  tout  l’organe  aura  succédé  une  inflammation  pres- 
que toujours  limitée  à un  seul  point,  que  lorsque  le  ramollisse- 
ment aura  remplacé  la  turgescence  passagère  du  début,  il  devra 
se  faire  une  certaine  diminution  dans  les  symptômes,  due  à la 
détente  de  l’organe,  à la  diminution  de  la  compression. 

Quelquefois  il  y aura  simplement  augmentalton  ou  diininu- 


C0NGEST10^  CÉUÉBHALE.  lOO 

lion  dans  les  accidents;  mais  quelquefois  il  s’opérera  aussi  un 
channement dans  leur  nature,  les  pliénonièues  de  compression 
succédant,  dansle  premier  cas,  àccux  d’excitation,  lesprécédant 
au  contraire  dans  le  second , selon  l’époque  à laquelle  le  degré 
de  compression  du  cerveau  permet  ou  empêclie  le  développe- 
ment de  tel  ou  tel  ordre  de  symptômes. 

Je  vais  maintenant  rapporter  des  observations  qui  prouvent 
que  toutes  les  formes  symptomatiques  du  début  du  ramollisse- 
ment se  rencontrent  également  dans  la  simple  congestion. 

On  trouvera  surtout  de  l’interet  dans  letude  de  ces  faits,  si 
on  les  considère,  ainsi  qu’ils  doivent  l’être  à mon  sens , comme 
se  rapportant,  non  pas  à une  maladie  autre  que  le  ramollisse- 
ment, mais  au  premier  degré  de  la  maladie  que  nous  avons  dé- 
crite dans  les  observations  précédentes,  et  qui  se  trouve  ainsi 
arrêtée,  dès  sa  première  période,  soit  par  la  mort,  soit  par  l’ef- 
ficacité du  traitement,  soit  par  une  tendance  spontanée  et  sou- 
vent difficile  à apprécier,  à ne  pas  poursuivre  scs  progrès. 

Obsebvation  46. — Etourdissements, engourdissements  dans  les  mem- 
bres, puis  hémiplégie  droite  complète.  — Congestion  sanguine  du  cer- 
veau et  de  ses  membranes . 

Une  femme  de  cinquante  ans,  affectée  d’ascite,  raconte  que, 
i depuis  une  dixaine  d’années  , il  ne  se  passe  guère  de  semaine 
i sans  qu’elle  ait  des  étourdissements  assez  forts  pour  l’obliger  de 
i cliercher  un  appui,  de  peur  de  tomber.  Ils  sont  accompagnés  de 
tintements  d’oreille  , et  souvent  suivis  de  picotements  inconi- 
I modes  dans  les  doigts,  qui  sont  engourdis.  Il  y a des  jours,  dit- 
I elle,  où  il  me  semble  que  les  objets  que  je  touche  sont  'séparés 
' de  ma  main  par  un  morceau  de  velours  (1).  On  lui  pratique  la 
ponction  ; trois  jours  après  elle  éprouve  un  étourdissement,  sans 
perte  de  connaissance,  mais  suivi  d’un  engourdissement  incom- 
mode des  deux  mains  et  persistant  toujours  à droite.  Quelques 
r heures  après,  elle  s’endort,  et  se  réveille  avec  une  hémiplégie 
I droite  complète.  La  sensibilité  et  l’intelligence  sont  bien  conser- 
I vées,  la  bouche  n’est  pas  déviée.  Elle  reste  dans  cet  état  trois 

j 

(1)  Une  femme  observée  par  M.  Roslan,  el  qu’il  considérait  comme  mena- 
cée d’un  ramollissement  cérébral,  lui  disait  qu’elle  ne  sentait  les  corps  qu’elle 
toucliait  qu’à  travers  une  espèce  d’élanune. 


r64 


Ti.VMOLUSSEMEN'T  AIGU.  (SYMP.) 

jours  : aucun  changement  dans  riicmiplégie.  Mais  alors  tout- 
à-coup  elle  perd  connaissance,  les  quatre  membres  sont  tout-à- 
lait  résolus,  et  la  mort  survient  promptement. 

Autopsie.  — Vaisseaux  des  membranes  gorgés  de  sang;  teinte 
rosée  très-remarquable  de  la  substance  grise  des  circonvolu- 
tions ; injection  insolite  de  la  substance  médullaire,  égale  des 
deux  côtés  ; partout  consistance  normale  du  tissu  nerveux...  (1). 


Observatiok  k’].  — Perte  de  connaissance  ; hémiplégie  droite,  insen- 
sibilité générale.  Mort  au  bout  de  vingt -quatre  heures  à peu  près.  — 
Rongeur  générale  de  la  pie-mère  avec  infdtration  séreuse  considérable; 
piqueté  léger  de  la  substance  médullaire  des  hémisphères.  Points  rou- 
ges nombreux  et  coloration  rose  uniforme  des  corps  striés  et  des  cou- 
ches optiques. 

La  nommée  Benoit,  âgée  de  soixante-huit  ans,  pâle,  maigre, 
habituellement  souffrante,  est  entrée  à l’infirmerie  le  28  oc- 
tobre 1838,  pour  un  catarrhe  pulmonaire.  Elle  dit  qu’elle  a 
toujours  toussé,  dès  son  enfance,  mais  surtout  depuis  l’âge  de 
vingt-sept  ans,  où  elle  a eu  un  fort  rhume;  elle  a quelquefois 
craché  du  sang  dans  sa  jeunesse.  La  respiration  est  souvent  gê- 
née, la  toux  est  fréquente,  l’expectoration  abondante.  On  ne 
trouve  rien  de  remarquable,  à l’examen  de  la  poitrine,  qu’un 
peu  de  résonnance  de  la  voix  et  de  diminution  de  la  sonoréité 
au  sommet  du  poumon  droit.  Quelques  jours  après,  il  survint 
un  peu  d’inflammation  de  la  muqueuse  buccale;  la  muqueuse 
de  la  bouche  , du  pharynx,  devint  rouge,  sèche,  et  se  couvrit 
de  petites  plaques  blanchâtres  ; il  y avait  quelquefois  un  peu 
de  fièvre.  ( Gargarismes  astringents , calomel  à petites  doses). 
L’oppression  et  la  toux  diminuèrent  un  peu  à la  suite  de  vomis- 
sements dus  à une  prise  d’ipécacuanha. 

Le  1 1 novetnbre,  elle  avait  une  grande  fièvre,  la  bouche  était 
rouge,  sèche,  le  pharynx  tapissé  d’un  enduit  jaunâtre  ; la  ma- 
lade se  plaignait  de  soufiVir  de  la  langue  . mais  point  d’autre 
chose.  Elle  fut  examinée  avec  quelque  soin,  auscultée,  sans  que 
l’on  rencontrât  rien,  hors  la  stomatite,  qui  parût  de  nature  à 
fixer  rallention.  Il  paraît  que,  dans  la  journée,  elle  tomba  dans 


(t)Andral,  C’/i/nV/uf,  i.  v,  page  233. 


CONGESTION  CÈUKBUALB. 


165 


un  état  (l’assoupissement  et  cessa  de  parler;  mais  il  fut  impos- 
sible d’avoir  des  renseignements  précis  sur  son  compte.  Voici 
dans  quel  état  je  la  trouvai  le  lendemain  : 

Décubitus  sur  le  dos,  immobilité,  face  un  peu  colorée;  point 
de  signes  de  connaissance,  si  ce  n’est  quelques  mouvements 
légers  des  traits  de  la  face  quand  on  lui  parle, avec  force  ; point 
de  déviation  de  la  bouche  ni  d’affaissement  des  narines  ; les  pu- 
pilles sont  très-contractées  et  immobiles.  Lorsqu’on  introduit 
un  liquide  dans  la  bouche,  il  reste  dans  le  pharynx  sans  le 
moindre  effort  de  déglutition.  La  respiration,  sans  êti'e  slerto- 
reuse,  paraît  embarrassée  , difficile.  Il  n’y  a nulle  part  de  rai- 
deur. Le  bras  droit  est  flasque  et  immobile  ; la  jambe  droite  est 
un  peu  revenue  sur  elle-même,  elle  ne  se  relire  pas  quand  on 
chatouille  la  plante  du  pied.  Les  mouvements  du  bras  gauche, 
bien  que  peu  étendus,  paraissent  libres  ; le  membre  inférieur 
de  ce  côté  se  relire  un  peu  par  le  chatouillement.  La  malade 
ne  donne  aucun  signe  de  sensibilité  lorsque  l’on  pique  la  peau 
des  membres  avec  une  épingle.  Le  pouls  est  petit,  fréquent,  un 
peu  inégal.  {F'ingt  sangsues  au  ccd,  potion  avec  gomme  gutte, 
quarante  centigrammes , vésicatoire  aux  cuisses,  sinapismes.) 

A midi,  coma  profond,  résolution  générale,  respiration  fré- 
quente, trachéale,  rougeur  violacée  de  la  face  ; plaques  rouges 
sur  la  peau  des  membres;  on  ne  sent  plus  le  pouls.  Mort  deux 
I heures  après. 

Autopsie  quarante  heures  après  la  mort.  — Une  assez  grande 
quantité  de  sang  s’écoule  des  sinus  de  la  dure-mère.  L’arach- 
I noïde  contient  peu  de  sérosité;  son  feuillet  viscéral  est  épaissi, 
i Couvert  d’un  grand  nombre  de  plaques  blanches  et  opaques  ; il 
! est,  ainsi  que  le  tissu  cellulaire  sous-arachnoïdien,  très-dense 
I et  difficile  à déchirer. 

La  pie-mère  est  infiltrée  d’une  grande  quantité  de  sérosité, 
également  abondante  des  deux  côtés  ; elle  présente  en  même 
temps  une  rougeur  vive  et  égale  partout , et  s’enlève  absément 
! de  tous  les  points  de  la  superficie  du  cerveau.  Les  circonvolu- 
tions sont  légèrement  aplaties;  nulle  part  la  sérosité  n’a  pénétré 
dans  leurs  intervalles. 

La  surface  du  cerveau  ne  présente  point  de  rougeur.  Il  y a 
un  piqueté  médiocrement  prononcé  de  la  substance  médul- 
laire, marqué  surtout  au  niveau  des  corps  striés  et  des  couches 


166 


RAMOT.I.rSSl-TVTKNT  AIGU.  (SYMPT.) 

optiques,  qui  pre'sentent  un  grand  nombre  de  petits  points  rou- 
ges, et  entre  eux  une  coloration  rose  uniforme. 

Sérosité  assez  abondante,  limpide  à la  base  du  crâne.  Quel- 
ques cuillerées  dans  les  ventricules. 

Rien  au  cervelet  ni  à la  moelle  allongée.  La  moelle  épinière 
paraît  être  saine  et  n’olFre  point  d’injection  anormale. 

Les  poumons  sont  fortement  engoués  et  contiennent  beau- 
coup de  sang.  Le  sommet  du  poumon  droit  est  adhérent  par 
des  brides  celluleuses,  denses  et  épaisses,  et  ne  peut  être  déta- 
ché sans  se  déchirer  profondément.  Tout  le  lobe  supérieur  est 
friable  et  présente  un  assez  gi'and  notnbre  de  points  noirâtres 
et  indurés.  On  trouve  dans  les  lobes  supérieurs  des  deux  pou- 
mons, de  petites  concrétions  dures  et  jaunâtres;  on  remarque  à 
la  surface  de  l’un  d’entre  eux  une  plaque  noire , comme  fron- 
cée, dure,  et  au-dessous  une  concrétion  dure  et  amorphe. 
Adhérences  générales  et  anciennes. 

Les  tubercules  sont  pleins  d’un  mucus  épais,  verdâtre,  pu- 
riforme,  qui  en  remplit  les  plus  petites  divisions , et  s’écoule 
d’un  grand  nombre  de  points  à la  coupe  des  poumons. 

Le  cœur  ne  présente  rien  à noter. 

Un  enduit  épais  et  jaunâtre  tapisse  une  parjiie  du  pharynx, 
sans  altération  notable  de  la  muqueuse.  Les  parois  de  l’œso- 
phage sont  tapissées  d’une  sorte  de  bouillie  grumeleuse , jau- 
nâtre, épaisse,  qui  ne  pénètre  pas  dans  l’estomac,  et  au-dessous 
de  laquelle  la  muqueuse  est  un  peu  violacée.  Rougeur  générale 
de  la  muqueuse  de  l’estomac. 

Les  reins  présentent  l’altération  suivante  : leur  volume  est 
normal.  Leur  enveloppe  étant  arrachée,  on  trouve  leur  surface 
externe  couverte  de  mamelons  d’un  blanc  grisâtre,  iiiéguliere- 
ment  arrondis,  isolés  ou  confluents  ; le  tissu  du  rein  parait  un 
peu  rougeâtre  dans  leurs  intervalles.  Une  section  est  pratiquée 
du  hile  à la  convexité;  la  substance  corticale  est  partout  rem- 
placée par  un  tissu  d’un  gris  blanchâtre  , homogène  , dense  , 
assez  ferme  à la  coupe,  en  tout  semblable  aux  mamelons  de  la 
superficie;  dans  plusieurs  endroits,  ce  tissu  empiète  sur  la  sub- 
stance tubuleuse  qui  a partiellement  disparu.  Là  plupart  des 
pyramides  sont  cependant  intactes,  d’üu  rouge  assez  vif,  et 
présentent  un  grand  nombre  de  petits  grains  jaunâtres  qui  pa- 
raissent de  petites  concrétions  contenues  dans  des  tubes. 


COWGESTIOR  C^RKBÎlàLB. 


Point  de  sérosité  dans  l’abdomen  ni  dans  le  tissu  cellulaire. 


Cette  observation  est  fort  intéressante  sous  plusieurs  rap- 
ports : je  me  contenterai  de  signaler  la  présence  des  concrétions 
dans  les  poumons,  traces  probables  d’une  ancienne  affection 
tuberculeuse  chez  un  individn  affecté  dans  sa  jeunesse  de 
rhumes  prolongés  et  d’hémoptysies  (1)  ; cette  lésion  des  reins  , 
semblable  à celles  qui  caractérisent  une  maladie  de  Brigth , à 
une  période  avancée  (2),  remarquable  par  1 absence  dhydro- 
pisie,  et  que  l’examen  des  urines  eût  rendue  plus  intéressante.^ 

L’observation  deM.  Andral  et  la  mienne  prouvent  que  l’hé- 
miplégie se  montre  aussi  bien  dans  les  congestions  simples  du 
cerveau  que  dans  les  ramollissements,  ce  que  nous  pouvions  du 
reste  conclure,  par  induction,  des  cas  ou  le  ramollissement  dé- 
termine d’abord  une  hémiplégie,  puisque  nous  savons  mainte- 
nant que  le  début  de  cette  affection  appartient  réellement  à la 
congestion  cérébrale.  M.  Gendrin  a donc  eu  tort  d affirmer  que 
l’apoplexie  due  à une  simple  hypéraimie  encéphalique  ne  dé- 
termine jamais  de  symptômes  de  paralysie  et  d’anesthésie  cir- 
conscrites (3). 

M.  Rochoux  a fait  remarquer  qu’un  des  caractères  les  plus 
saillants  du  coup  de  sang  ( qu’il  étudie  comme  synonyme  de 
congestion  cérébrale),  est  la  promptitude  avec  laquelle  les 
symptômes  disparai|sent,  et  surtout  cette  particularité  de  ne 
jamais  produire  de  paralysie  prolongée  (4).  L’observation 
de  M.  Andral  est  cependant  une  exception  à ce  fait  général, 
puisque  l’hémiplégie  a duré  trois  jours.  Cependant  il  faut  con- 
venir que,  dans  la  congestion  simple,  celle  qui  se  termine  le 
plus  souvent  par  la  guérison,  il  est  plus  ordinaire  d’observer 
des  phénomènes  généraux  que  des  symptômes  partiels  ; ce 
fait  certain,  bien  qu’on  en  ait  exagéré  l’importance  et  la  fré- 
quence, semblerait  annoncer  qu’une  congestion  partielle  est  plus 
grave,  et  conduit  plus  directement  au  ramollissement  qu’une 

(t)  C.  Rogén,  Essai  sur  la  curabilité  de  la  phthisie  pulmonaire,  jireh,, 
juin  fit  juillet  1 839. 

(2)  Desire,  Thèses  de  Paris,  18SS. 

(3)  Gendrin,  Traité  philos,  de  méd.  prat.,  t.  i,  p.  577,  1838. 

(AjRocboiix,  Diction,  de  deuxième  édit.,  art.  codpdeüwo. 


168 


K AMOI.LlSSEMFjST  AIGC.  (sVMPT.) 

cougestion  généralf.  l/observalion  suivante  est  un'exernple  du 
coup  de  sang  propieinent  (lit,  tel  (pie  l’a  diicrit  M.  Rochoux, 
tel  qu’on  l’obsei  vo,  je  crois,  dans  la  pliipai  l des  cas  : et  encore 
on  verra  que,  bien  que  les  pbtînoniènes  de  paralysie  et  d’anes- 
thésie aient  également  occupé  les  deux  moitii-s  du  corps,  ils 
paraissent  s’être  montrés  d’abord  du  côté  droit. 

OasKavATioN  48 Céphalalgie  et  étourdissements  habituels.  Perte 

subite  de  conuaissance  accompagnée  de  resolution  et  d’insensibilité  giî- 
nérales.  Disparition  assez  rapide  des  accidents. 

La  noinme'e  Valadon  est  une  femme  de  haute  taille , de  peu 
d embonpoint,  d’un  teint  bilieux,  âgée  de  soixante-treize  ans. 
Elle  a eu,  dit-elle,  pendant  toute  sa  vie  des  maux  de  tête,  et  a 
été  saignée  soixante  fois  pour  cela.  Il  s'y  joignait  aussi  des 
étourdissements,  mais  elle  n’a  jamais  éprouvé  d’accidents  plus 
graves,  n’a  jamais  perdu  connaissance.  Il  y a deux  ans  que  ces 
maux  de  tête  sont  devenus  plus  constants,  plus  intenses,  ac- 
compagnés d’étourdissements  fréquents  ; elle  n’éprouve  jamais 
de  didiculté  à s’exprimer,  et  ii’a  rien  ressenti  du  coté  des  mem- 
bi  •es.  La  céphalalgie  n’a  jamais  eu  de  siège  fixe. 

Le  7 août  1839  (la  chaleur  était  très-graïub?  depuis  plusieurs 
jours),  dans  la  soirée,  elle  se  trouva  assez  subitement  indispo- 
sée; elle  s’était  bien  portée  les  jours  précédents  : elle  se  plai- 
gnait d'étouffements,  de  céphalalgie,  portait  ses  mains  à sa  u'-te. 
A neuf  heures,  on  la  porta  à rinfirmerie  sur  un  brancard.  Elle 
avait  sa  connaissance,  mais  elle  étouffait  beaucoup,  me  dirent 
les  filles  qui  l’amenaient;  comme  on  rapprochait  de  son  lit , 
elle  parlait  encore,  se  plaignant  delà  tête,  et  disant  qu’elle 
avait  peine  à remuer  son  bras  droit.  Tout  à coup,  au  moment 
où  on  la  soulevait  pour  la  coucher,  sa  figure  se  convulsa  et  elle 
perdit  connais.sance  ; cela  fut  si  subit  (|ue  les  filles  qui  la  soute- 
naient s’enfuirent  .saisies  d’effroi.  J’arrivai  auprès  d’elle  deux 
ou  trois  minutes  après. 

Elle  était  couchée  sur  le  dos,  ne  donnait  aucun  signe  de  con- 
nais.sance, la  t(he  fortement  tournée  adroite;  celte  position 
n’éiait  pas  accompagnée  d(.‘  raideur,  mais  elès  qu’on  l’avait  dé- 
placée, elle  la  reprenait  aussitôt.  La  bouche  parai.ssait  nu  peu 
déviée  à droite,  elle  était  (Uitièrement  ouverte.  La  face,  très- 


CONGESTION  CÉHÉBEAI-E. 


169 


pâle,  avait  un  aspect  presque  cadavérique , les  yeux  entr’ou- 
veiTs  étaient  immobiles  et  tous  deux  tournés  à droite  ; les  pu- 
pilles étaient  très-dilatees,  égales  et  tout  à fait  insensibles  à 
l’approche  presque  immédiate  d’une  lumière. 

Les  bras  étaient  en  résolution  complète;  pincés,  ils  demeu- 
raient inimobdes  ; il  n’y  avait  aucune  raideur  dans  les  articula- 
tions. On  ne  reotarquait  d’autre  mouvement,  dans  tout  le  corps, 
que  le  soulèvement  des  parois  de  la  poitrine  qui  se  faisait  ega- 
lement des  deux  côtés.  La  respiration  était  égale,  naturelle  , un 
peu  fréquente;  il  paraît  qu’au  moment  de  la  perte  de  connais- 
sance, elle  avait  été  ronflante,  comme  stertoreuse,  mais  seule- 
ment pendant  quelques  instants.  Les  jambes  ne  furent  pas  exa- 
minées. Il  n’y  eut  pas  d’éva.cuations  involontaires. 

La  peau  était  partout  brûlante  et  sans  sueur.  Le  pouls  était 
régulier,  fort  et  plein,  de  85  à 90. 

J’ouvris  aussitôt  une  veine  au  bras  droit,  et  le  sang  en  jaillit 
avec  force  : en  même  temps  on  appliqua  des  sinapismes  aux 
pieds. 

Trois  palettes  de  sang  venaient  d’être  tirées,  sans  qu’aucun 
changement  pût  être  remarqué  dans  l’état  de  la  malade;  je  sus- 
I pendis  la  saignée,  et  je  me  disposais  à ouvrir  l’artère  temporale, 
lorsqu’elle  tourna  deux  fois  la  tête,  poussa  un  profond  .soupir, 
ouvrit  les  yeux,  et  jeta  autour  d’elle  des  regards  étonnés.  Ses 
deux  bras  se  levèrent,  et  elle  passa  ses  mains  sur  sa  tète.  J’ap- 
; proebai  une  lumière  desjyeux;  les  paupières  se  refermèrent  pour 
en  éviter  l’éclat,  mais  je  pus  cependant  reconnaître  que  les  pu- 
pilles avaient  beaucoup  perdu  de  leur  dilatation.  Je  laissai  alors 
j couler  de  nouveau  la  saignée  du  bras,  et  je  tirai  cinq  palettes  de 
sang.  La  malade  retirait  son  bras  et  demandait , à voix  faible  , 
mais  assez  distincte,  ce  qu’on  lui  voulait,  se  plaignait  de  la  tête, 

1 surtout  à la  partie  supérieure. 

Llle  soupirait  et  baillait  profondément;  ses  bras  avaient  re- 
I couvré  toute  leur  motilité,  .sa  physionomie  avait  repris  un  ca- 
ractère naturel;  elle  reconnut  plusieurs  personnes  qu’elle  n’a- 
I vait  pas  vues  depuis  longtemps  et  répondait  assez  juste  atix 
questions  qu’on  lui  adressait.  La  température  de  la  peau  et  le 
pouls  ne  subirent  aucun  changement.  La  sensibilité  cutanée  avait 
promptement  reparu  ; la  langue  se  lirait  librement.  La  face 
' était  toujours  aussi  pâle. 


170 


RAMOLLISSEMENT  AIGU.  (STMPT.) 

Je  la  revis  à minuit  ; le  pouls  était  un  peu  moins  fort , les 
joues  un  peu  plus  colorées.  Elle  fut  très-calme  pendant  toute  la 
nuit,  demandant  souvent  à boire  ; elle  dormit  quelques  heures. 

Le  lendemain,  elle  souffrait  beaucoup  de  la  tête,  plus  qu’hier 
et  que  cette  nuit,  rapportant  toujours  la  douleur  au  front  et  à la  t 
partie  supérieure.  Elle  n’éprouvait  ni  faiblesse  ni  engourdisse- 
ments dans  les  membres.  Le  pouls  était  moins  fréquent,  moins  i 
fort,  la  peau  moins  chaude.  L’auscultation  du  cœur  n’qffrait 
rien  de  particulier.  Une  couenne  jaune  assez  épaisse  recouvrait 
le  sang  tiré  de  la  veine, 

{Saignée  de  Irais  pal.  Emulsion  avec  j olap,  ungram,,  scam- 
monée,  tî'ente  centigrammes .) 

Il  resta  encore  pendant  quelques  jours  un  peu  de  céphalalgie, 
puis  cette  femme  quitta  l’infirmerie.  Deux  mois  après,  il  n’avait 
reparu  aucun  accident.  Les  facultés  intellectuelles  étaient  en 
aussi  bon  état  qu’auparavant. 


Je  me  suis  efforcé  de  rendre  aussi  fidèlement  que  me  l’ont 
permis  les  renseignements  que  j’ai  pu  me  procurer,  le  début  des 
accidents  si  graves  dont  on  vient  de  lire  la  description  ^ on 
peut  rapprocher  de  ce  fait  plusieurs  observations  de  ramollis- 
sement déjà  rapportées,  entre  autres  les  observations  32  et  33, 
où  cette  époque  intéressante  de  la  maladie  a été  également  étu- 
diée avec  soin.  Valadon  présente  les  conditions  les  plus  favo- 
rables ,nu  développement  d'un  ramollissement,  c’est-à-dire  une 
disposition  incessante  à la  congestion  cérébrale,  de  la  céphalal- 
gie et  des  étourdissements. 

Beaucoup  d individus,  qui  finissent  par  succomber  à un  ra- 
mollissement aigu,  étaient  dans  un  état  semblable,  depuis  nue 
époque  plus  ou  moins  éloignée;  c’est  ainsi  que,  dans  l’observa- 
tion x°  de  M.  Rostan,  il  est  question  d’une  femme  qui,  depuis 
quatre  ans,  éprouvait,  chaque  année,  une  forte  congestion  céré- 
brale avec  perte  de  connaissance  ; la  cinquième  attaque  entraîna  ! 
la  mort,  et  l’on  trouva  un  ramollissement  aigu. 

Dans  les  observations  que  je  viens  de  rapporter,  les  accidents  ( 
ont  débuté  rapidement,  comme  dans  une  attaque  apoplecti- 
forme  ; dans  le  cas  suivant,  ils  paraissent  avoir  suivi  au  con- 
traire une  marche  lente  et  graduelle,  propre  à certains  cas  de  * 


CONGESTION  CÉRÉBEA.EE.  * • * 

ramollissement,  et  dont  nous  avons  donné  un  exemple  bien  ca- 
ractérisé dans  l’observation  de  Lliarniinot  (obs.  13). 

Observation  4g.  — Affaiblissement  graduel  des  facultés.  Mort  au 
bout  d’un  mois  à peu  près.  — Congestion  sanguine  considérable  des 
deux  hémisphères  cérébraux. 

Une  femme  de  soixante-deux  ans  , d’une  énorme  obésité,  a 
eu,  à soixante  ans,  une  attaque  d’apoplexie,  dans  laquelle  les 
yeux  et  la  langue  furent  particulièrement  attaqués;  après  cette 
attaque,  la  tête  et  les  membres  étaient  douloureux  et  il  y eut 
de  l’oppression. 

Il  y avait  quinze  jours  qu’elle  était  tombée  dans  un  affaisse- 
ment général  qui  l’obligeait  à garder  le  lit,  lorsqu  elle  fut  ap- 
portée à la  clinique  interne,  le  5 février  1800.  Elle  avait  un  air 
he'bélé  et  stupide  ; la  face  et  surtout  les  lèvres  étaient  d'un 
rouge  violet  ; la  langue  sèche  et  blanchâtre-,  peu  de  soif.  Res- 
piration gênée  ; poitrine  sonore  partout  ; les  battements  du  cœur 
n’étaient  pas  sensibles.  Le  pouls  était  serré,  irrégulier,  sans  fré- 
quence ni  lenteur.  L’état  soporeux,  la  perle  presque  totale  du 
sentiment  et  du  mouvement , l’obesité  de  la  malade,  la  firent 
comparer  par  Corvisart  à un  énorme  polype. 

On  soupçonna  d’abord  une  affection  organique  du  cœur;  mais 
un  examen  plus  attentif  fit  présumer  qu’il  y avait  une  compres- 
I sion  de  l’origine  des  nerfs,  par  un  épanchement  cjuelconque. .. 

I Les  excitants,  les  vésicatoires  ne  purent  ramener  la  sensibilité; 
j elle  succomba  le  26  février. 

Autopsie.  — Méninges  gorgées  de  sérosité  sanguinolente.  En- 
céphale d’une  mollesse  extraordinaire  ; en  faisant  des  sections 
horizontales,  ses  parties  supérieures  laissaient  suinter  une  séro- 
sité sanguinolente.  A mesure  qu’on  enlevait  quelques  couches  , 
le  sang  plus  pur  sortait  par  gouttelettes  ; il  était  d’une  abon- 
dance extrême  clans  les  couches  inférieures  , mais  il  n’y  avait 
aucun  foyer  particulier  dans  lequel  le  sang  fût  amassé.  Il  n’y 
avait  aucun  épanchement  de  sang  ni  de  sérosité  dans  les  ven- 
tricules ni  à la  base  du  crâne. 

L’aorte  était  dilatée  à son  origine.  On  apercevait  quelques 
points  cartilagineux  à sa  sortie  du  ventricule.  Tous  les  autres 
organes,  tant  de  la  poitrine  que  de  rabdomeu,  étaient  sains  (I). 

(IJ  Leroux,  Cours  sur  les  géiéralités,,,.  i.  viu,  p.  <2f. 


172 


RAArOLLl.SSEMF.NT  AIGU.  (.SYMl>T.) 

« Corvisart  convint  (jue  c’était  le  premier  exemple  qui  s’of- 

raita  sou  observation  d’une  transsudation  san^juine  dans  l’en- 
cephale,  sans  épanchement  dans  un  foyer.  Il  lui  fut  facile 
d e.vphquer  les  phénomènes  qui  s’étaient  manifestés  du  vivant 
du  sujet,  par  la  pression  exercée  sur  l’origine  des  nerfs  , et  le 
long  temps  que  cette  transsudation,  presque  insensible  dans  le 
commencement,  avait  mis  à se  produire.  » 

La  mollesse  générale  du  cerveau  tenait  sans  aucun  doute , 
dans  ce  cas,  a cette  transsudation  sanguine  que  Corvisart  obser- 
vait  pour  la  première  fois  : aussi  ce  fait  se  rapproche-t-il  en 
quelque  chose  de  ceux  d’œdème  du  cerveau.  Mais  cette  circon- 
stance tenait  si  évidemment  à une  congestion  cérébrale  que  j’ai 
cru  pouvoir  le  ranger  ici. 

Les  observations  suivantes  vont  nous  faire  assister  à des  faits 
d’un  tout  autre  ordre,  et  caractérisés  spécialement  par  du  dé- 
lire, des  hallucinations. 

Observation  5o.  — Délire  aigu  accompagné  d’une  sécrétion  re- 
mai quable  des  muqueuses  iiuccale  et  palpébrale.  Emissions  sanguines, 
purgatifs,  guérison. 

La  nommée  Fay,  âgée  de  quatre-vingts  ans  , est  une  femme 
de  robuste  constitution,  vive,  active,  très-méchante  ; elle  passe 
depuis  longtemps  pour  ne  plus  avoir  sa  tête.  Depuis  quelque 
temps  surtout,  elle  est  devenue  très  difficile  à vivre,  et  bat  le* 
filles  chargées  de  la  soigner. 

On  la  fit  passer  à l’infirmerie  le  2 novembre  1839.  Le  lende- 
main à la  visite  on  la  trouva  un  peu  agitée,  parlant  beaucoup, 
disant  qu’elle  n’était  pas  malade  ; il  n’y  avait  pas  de  fièvie; 
elle  ne  demandait  pas  à manger.  Dans  la  journée  elle  se  leva  , 
résista  quand  on  voulut  la  recoucher,  frappa  les  filles  qui  l’en- 
touraient : sa  fureur  était  extrême,  il  fallut  deux  hommes  pour 
lui  mettre  la  camisole  de  force,  et  ils  ii’y  parviment  qu’avec 
beaucoup  de  peine.  Elle  passa  la  soirée  et  la  nuit  à crier. 

4.  La  face  est  rouge,  animée,  les  yeux  vivement  injectés;  la 
peau  est  chaude  , sui  tout  à la  tête.  Le  pouls  est  fréquent , sans 
être  très-développé ; la  langue  est  sèche;  ses  bords  sont  cou- 
verts de  mucosités  épaisses  et  filantes,  un  peu  verdâtres,  cou- 
vrant pareillement  le  voiie  du  palais,  et  remplissant  une  partie 
de  la  bouche.  Une  grande  quantité  de  raucosilés  épaisses  et 


C0NG1Î5T10IV  CÉnÉBUALE. 


173 


opnqucs  sc  montrent  aussi  aux  commissures  des  paupières,  et 
se  renouvellent  fréquemment  quand  on  les  a essuyées.  Elle 
parle  presque  constamment,  profère  des  injures  grossières,  veut 
qu’on  lui  ôte  la  camisole  dont  elle  cherclie  à sc  débarrasser  : 
elle  dit  ne  souffrir  nulle  part,  ne  désire  pas  manger,  mais  de- 
mande souvent  à boire.  Malgré  toutes  ses  divagations  , elle  ré- 
pond aux  questions  qu’on  lui  adresse,  montre  sa  langue Il 

n’y  a pas  eu  d’évacuations.  {Quarajite  sangsues  au  col  ; sina- 
pismes ; lavements  avec  séné  quinze  grammes  ; diète.) 

Elle  est  un  peu  moins  bruyante  après  l’application  des  sang- 
sues : cependant  on  n’ose  lui  ôter  la  camisole  pour  lui  donner 
le  lavement  prescrit.  La  nuit  se  passe  paisiblement  : on  retire 
la  camisole  le  matin. 

5.  La  face  est  encore  rouge,  la  parole  vive  etauime'e;  le  pouls 
assez  fréquent;  elle  demeure  paisiblement  couchée.  Il  y a 
moins  de  mucosite's  visqueuses  dans  la  bouche  ; les  jeux  sont 
encore  très-cbassieux.  {Potion  avec  senc,  huit  grammes  ; sulfate 
de  soude  et  miel  de  mercuriale,  chaque  seize  grammes;  diète.) 

Selles  abondantes.  Un  peu  de  bouillon  le  soir. 

Les  jours  suivants  la  malade  fut  très-raisonnable.  La  sécrétion 
muqueuse  de  la  bouche  et  des  paupières  cessa  complètement. 

La  semaine  suivante,  le  délire  reparut  sans  cause  appréciable 
et  sous  la  même  forme  ; il  fallut  de  nouveau  attacher  la  malade  ; 
mais  une  application  de  sangsues  et  un  purgatif  firent  proinp- 
; tement  cesser  ces  accidents.  Une  nouvelle  sécrétion  de  la  bou- 
I clic,  et  surtout  des  paupières,  se  montra  encore  avec  le  délire, 
! et  disparut  avec  lui.  La  malade  quitta  rinfirmerie  à la  fin  du 
! mois  dans  son  état  habituel. 


ÜBSF.UVAXION  5r . — Délire  aigu  avec  hallucinations  et  troubles  de  la 
parole.  Emissions  sanguines  et  purgatifs;  guérison. 

Legal  est  une  femme  de  soixante-dix-sept  ans,  de  peu  d’em- 
bonpoinl,  à face  babituellement  peu  colorée;  son  intelligence 
est  assez  bien  conservée  pour  son  âge;  elle  n’a  jamais  présenté 
de  phénomènes  analogues  à ceux  que  nous  allons  décrire.  Elle 
se  plaint  depuis  longtemps  de.  maux  de  letc.  Elle  n’a  jamais  eu 
d’attaque  île  paralysie  ni  de  perle  de  connaissance. 

Elle  fut  amenée  à l’mlirmerie  le  8 octobre  1839.  Elle  se  plai- 


174 


ramollissement  aigu.  ( SYMPT.) 

gnait  d^une  céphalalgie  à laquelle  elle  n’assignait  point  de  siège 
fixe.  On  ne  remarqua  aucune  modification  appréciable  de  l’in- 
telligence ni  de  la  physionomie.  Il  n’y  avait  pas  de  fièvre;  les 
diverses  fonctions  paraissaient  en  assez  bon  état.  (On  prescrivit 
orge  miel.,  pédil.  sjnap.,  Idv.  lax.) 

Dans  la  soirée,  elle  commença  à s’agiter,  à parler  à tort  et  à 
travers,  et  le  plus  souvent  sans  se  faire  comprendre.  Elle  se  leva, 
il  fallut  l’attacher  ; elle  ne  dormit  pas  de  la  nuit,  se  remua  et  se 
plaignit  constamment. 

9.  La  physionomie  est  agitée.  La  parole  offre  une  singulière 
altération  : la  malade  semble  toujours  parler  ; mais  ce  sont  des 
mots  qui  se  succèdent,  quelquefois  avec  une  sorte  de  volubilité, 
sans  qu’aucun  sens  les  réunisse,  à moins  que  le  hasard  ne  pro- 
duise quelques  phrases  bizarres  ; dans  d’autres  instants  , ce  ne 
sont  plus  des  mots,  mais  des  syllabes  qu’elle  marmotte  comme 
au  hasard.  Tout  cela  est  débité  d’une  façon  monotone  et  avec 
une  apparence  de  parfaite  insouciance.  Quand  on  l’interroge, 
elle  paraît  vouloir  répondre,  mais  dans  son  langage  inintelli- 
gible, et  sans  que  ses  gestes  ni  sa  physionomie  dénotent  qu’elle 
y attache  aucun  sens. 

Il  n’y  a aucune  trace  de  paralysie;  la  peau  paraît  également 
sensible  partout  ; les  yeux  sont  naturels  , dilatation  moyenne 
des  pupilles.  Point  de  déviation  de  la  face.  Point  de  chaleur  ni 
de  sueurs  à la  peau  , meme  à la  tète.  Pouls  régulier,  peu  fré- 
quent et  peu  développé.  {Saignée  de  cinq  pal.)  Le  sang  n’etait 
pas  couenneux. 

La  malade  est  plus  tranquille  dans  la  journée- 

10.  Elle  est  assoupie.  Lorsqu’on  lui  parle  fort  ou  qu’on  la 
touche,  elle  entr’ouvre  les  yeux,  mais  les  referme  aussitôt.  Elle 
prononce  de  temps  en  temps  un  mot  dépourvu  de  sens,  et  fait 
entendre  un  murmure  presque  continuel , tantôt  comme  plain- 
tif, ta#itôt  comme  une  sorte  de  chant.  Bâillements  répétés.  Elle 
tourne  souvent  la  tête  et  agite  les  bras  ; les  narines  sont  pulvé- 
rulentes. Apyrexie  complète.  Pas  de  chaleur  à la  tête.  On  ne 
parvient  à la  faire  boire  qu’en  lui  bouchant  les  narines.  {Trente 

sangsues  au  col-,  eau  de  Sedlilz  ; sinap.) 

11.  Elle  est  à peu  près  dans  le  même  état  qu  hier,  seulement 
elle  parle  un  peu  mieux,  mais  elle  dit  encore  un  mot  pour  un 
autre,  et  parvient  rarement  à en  réunir  deux  ou  trois  couve- 


CONGESTIOW  CÉRÉBRALE. 


175 


nables.  sangsues  au  col.  La(\  séné,  quinze  grammes.) 

Les  deux  jours  suivants,  il  y a un  mieux  notable  ; elle  est 
plus  éveillée,  parle  un  peu,  divague  encore  légèrement.  Elle  dit 
souvent  qu’elle  a mal  à la  tête  ou  à la  matrice  j mais  il  est  pro- 
bable qu’elle  se  trompe  de  mot.  Elle  a plusieurs  selles  ; on  la 
lève  et  on  l’asseoit  sur  le  bassin. 

14.  L’agitation  reparaît  ; la  malade  croit  qu’un  homme  est 
couché  sous  son  lit;  elle  craint  qpe  son  mari  n’arrive  dans  ce 
moment,  et  supplie  avec  pleurs  qu’on  l’en  délivre.  Elle  voit 
passer  devant  elle  beaucoup  de  monde  ; un  singe  est  assis  au 
pied  de  son  lit.  La  parole  n’est  nullement  altérée  , elle  s’ex- 
prime nettement  et  avec  vivacité.  Cris  pendant  toute  la  nuit. 

Le  lendemain,  les  hallucinations  continuent  avec  le  même 
caractère  ; elle  croit  avoir  quelqu‘’un  couché  dans  son  lit;  cris 
continuels  C’est  surtout  dans  l’après  midi  que  l’agitation  re- 
double ; alors  la  peau  se  couvre  de  sueur  ; le  pouls  prend  une 
grande  fréquence.  {Trente  sangsues  au  col-,  gomme  gulte , six 
décigrammes  dans  un  ptlep.)  Pas  de  selles,  nuit  très-agitée. 

16.  Elle  est  plus  tranquille,  bien  qu’elle  n’ait  pas  encore  re- 
couvré toute  sa  raison.  {Gomme  gutle,  six  décigrammes.)  Selles 
abondantes. 

17.  La  malade  ne  présente  plus  qu’un  peu  d’étonnement 
dans  la  physionomie.  Elle  se  plaint  de  la  tête  surtout  au  synci- 

i put.  Au  bout  de  quelques  jours,  l’intelligence  est  redevenue 
i tout  à fait  normale.  On  garde  encore  cette  femme  un  mois  à 
I l’inûrmerie,  sans  observer  aucun  retour  des  accidents  passés. 


' On  peut  rapprocherdeces  observations  les  3®,  38“  et  39°,  dans 
: lesquelles  on  a rencontré,  à la  suite  de  semblables  accidents,  un 
i ramollissement  aigu  du  cerveau  ; mais  surtout  l’observation  de 
; Prêtre  (obs.  69),  qui,  sous  une  forme  chronique,  présente  la  plus 
I grande  ressemblance  avec  celle  de  Legal.  Il  est  difiicile  de  pré- 
i ciser  avec  certitude  les  lésions  anatomiques  qui  ont  dû  exister 
dans  ces  cas  non  suivis  de  mort  ; mais  il  est  très-probable  qu’il 
' s’est  agi  de  congestions  cérébrales,  peut-être  avec  commence- 
1 ment  de  ramollissenient,  qu’un  traitement  énergique  a enrayées 
1 dans  leur  marche,  et  a empêché  d’arriver  à l’état  que  nous  ont 
révélé  les  autopsies  rapportées  précédemment. 


176 


CAMOLLISbEMliKT  AIUU.  (sYMPX.) 

Nous  avons  vu  plus  haut,  dans  les  observations  40  et  4l,(iue  le 
1 amollissement  aigu  s’annonçait  quelquefois  par  des  convulsions 
épileptiformes.  Les  faits  suivants  vont  nous  montrer  cette  même 
forme  symptomatique  se  développant  sous  ^influence  de  sim- 
ples congestions. 

ÜBSEnvATioîi  5'2.  — Convulsions  épileplirormcs  pendant  vingt-quatre 
heures.  Mort.  — Congestion  encéphalique. 

Un  homme  robuste  avait  éprouvé,  il  y a quatre  ans,  une  at- 
taque d’apoplexie,  suivie  d’une  faiblesse  à droite  (coup  desan, i[), 
dissipée  au  bout  de  peu  de  jours  par  des  évacuations  sanguines. 
Depuis,  il  avait  toujours  joui  d’une  bonne  santé. 

A la  suite  d’une  marche  fatigante,  il  tomba  tout  à coup  sans 
connaissance.  {Saignée,  sangsues  aux  tempes,  'vésicatoires  aux 
jambes.)  Ces  accidents  de  congestion  se  dissipèrent  assez  promp- 
tement, sauf  un  p.u  de  faiblesse  à droite. 

Mais,  huit  jours  après,  à la  suite  d’une  nuit  calme,  il  fut  pris 
tout  à coup,  cà  cinq  heures  du  matin  , de  mouvements  convul- 
sifs des  membres,  de  la  face,  des  paupières , de  la  langue,  avec 
sueur,  écoulement  de  la  salive,  respiration  précipitée  , face 
rouge,  battements  énergiques  des  carotides.  Ces  accès,  tout  à 
faitcpileptiformes,i  eviennent  toutes  les  dix  minutes  jusqu’à  neuf 
heures;  on  ne  remarquait  autre  chose,  dans  les  intervalles,  que 
de  la  difficulté  à mouvoir  la  langue  et  les  membres  droits.  {Dix 
sangsues  aux  jugulaires,  sans  cesse  renouvelées  ; sinap.  lav.  purg.) 
Diminution  des  accidents. 

A trois  heures  du  soir,  les  accidents  reparaissent  plus  violents 
encore,  cl  ils  .se  renouvellent  jusqu’’à  cinq  heures  du  malin,  où 
le  malade  succombe  dans  un  d’eux,  juste  vingt-quatre  heures 
après  la  première  apparition. 

Autopsie.  — Injection  considérable  des  téguments  crâ- 
niens, des  sinus  cl  des  méninges.  Substance  cerebialc  liès-con- 
sisiante,  oflVant  un  pointillé  rouge  serré,  d’où  suintent  des 
gouitelelUs  de  sang.  Rien  dans  la  poitrine  ni  dans  l’abdo- 
men (1). 

1 Oeservation  63.  — Perle  de  connaissance  suivie  de  convulsions  cpi- 
lepliformcs.  Moi  t au  bout  de  quaranlc-liuit  Iicurcs.— Congestion. 

'1^  Ila&pel,  Journal  des  ton.  tnc'd.  dur.,  l.  ui,  1>«  3'.*o,  t83G. 


CUNGESXlü.N'  CÉllÉBUALE. 


,77 


Un  adulte  de  forte  constitution  perdit  tout  à coup  connais- 
sance j la  face  était  bleuâtre;  les  pupilles  dilatées,  tout  à fait 
insensibles,  la  respiration  pénible.  Deux  saignées  furent  prati- 
quées : après  la  seconde,  il  survint  des  inouveinents  convulsils 
épileptiformes  qui  se  répétaient  fréquemment;  dans  les  inter- 
valles, abattement,  hébétude  complète.  [Sinnpisincs,  'vésica- 
toires aux  mollets.)  La  mort  survint  au  bout  de  quarante-huit 
heures,  précédée  des  mêmes  accidents. 

Jutopsic.  — Sinus  gorgés  de  sang  ; pie-mère  très-injectée  j 
pulpe  cérébrale  gorgée  de  sang  qui  s’écoule  par  un  grand  nom- 
bre de  gouttelettes.  Très-peu  de  sérosité  dans  les  ventri- 
cules (1). 


OusERVATioM  54.  — Accès  épileptifornics. 

La  nommée  Besançon,  cordonnière  , âgée  de  soixante-dix- 
neuf  ans,  se  plaint  habituellement  de  maux  de  tête  et  d’étour- 
dissements : du  reste,  ses  facultés  et  ses  forces  sont  bien  conser- 
vées pour  son  âge. 

Le  28  mai  1839,  elle  fut  prise  dans  la  journée  de  mouvements 
involontaires  du  pouce  et  de  l’indicateur  de  la  main  gauche.  Le 
lendemain  matin,  a cinq  heures  c-t  demie,  elle  se  leva  {)Our  uri- 
ner, et  rendit,  à ce  que  l’on  rapporte,  des  urines  très-claires  et 
mousseuses,  en  grande  quantité. 

A six  heures,  elle  fut  prise  tout  à coup  d’une  attaque  comme 
d épilepsie  : elle  devint  irès-rouge  ; il  y avait  des  mouvements 
convulsifs  des  deux  côtés  du  corps,  mais  surtout  dans  le  bras 
gauche  et  du  coté  gauche  de  la  face.  Les  deux  paupières  étaient 
également  convulsées  ; le  globe  de  l’œil  ne  l’était  pas.  Elle  ren- 
dait une  grande  quantité  de  mucosités  par  la  bouche  et  par  le 
nez.  Elle  ne  poussa  aucun  cri  ; elle  essayait  de  parier,  mais  ne 
faisait  entendre  que  des  sons  confus  et  inintelligibles;  cepen- 
dant elle  put  au  commencement  indiquer  par  signes  ce  qu’elle 
avait  éprouvé  la  veille  à la  main  gauche.  Il  n’y  eut  point  d’é- 
yacuations  involontaires.  La  langue,  qu’elle  lirait  aisément , 
étau  notablement  déviée  à gauche.'  Les  pupilles  se  contractaient 
et  ne  paraissaient  ni  resserrées  ni  tlilatécs.  Les  convulsions  se 


(I)  llaspcl,  cod,  toc. 


178  RA.MOLLISSEMJÎNÏ  MGU.  (SYMl*  X .) 

prolongèrent  d’une  à deux  lieures.  {Trente  sangsues  furent  ap- 
pliquées derrière  les  oreilles.) 

A dix  heures,  il  n’y  avait  plus  de  mouvements  convulsifs  ; les 
membres  gauches  étaient  complètement  paralysés  du  sentiment 
et  du  mouvement,  sans  raideur  ; rien  de  semblable  à droite. 
La  face  était  très-rouge,  couverte  de  sueur,  la  malade  couchée 
sur  le  dos,  l’air  hébété,  la  bouche  un  peu  déviée  à droite  , la 
langue  déviée  à gauche.  La  paupière  gauche  ne  peut  se  fermei 
complètement.  La  vue  n’est  point  abolie , car  les  paupières  s a- 
baissent  quand  on  approche  la  main  des  yeux  ; elle  tire  la 
langue  quand  on  le  lui  demande , mais  ne  répond  à aucune 
question.  Elle  essaie  de  parler  , et  répète  à tous  moments  : A 
boire,  j’ai  soif.  Le  pouls  est  à 80,  plein  et  legulier. 

A onze  heures,  la  physionomie  était  presque  naturelle,  la 
malade  put  me  donner  des  renseignements  précis  sur  le  début 
des  accidents  ; elle  se  plaignait  de  la  tête.  Les  membres  gauches 
étaient  dans  le  même  état.  Mais  à trois  heures,  ils  avaient  com- 
plètement recouvré  le  mouvement  et  le  sentiment.  Le  soir,  la 
malade  dormait  profondément.  Le  lendemain  , elle  ne  conser- 
vait plus  de  traces  de  ces  accidents. 

Elle  revint  à rinfirmerie  au  mois  de  juillet , pour  de  sem- 
blables phénomènes  -,  ils  se  dissipèrent  aussi  rapidement  à la 
suite  d’une  forte  saignée  et  d’une  application  de  sangsues  au 
col. 

Cette  femme  n’éprouve  de  semblables  accidents  que  depuis 
peu  d’années;  ils  se  reproduisent  trois  ou  quatre  fois  par  an. 
Dans  les  intervalles,  elle  souffre  beaucoup  de  la  tête  , surtout 
du  côté  gauche.  Elle  éprouve  là  comme  le  bruit  d’une  fontaine 
qui  coule.  Du  reste  , elle  ne  ressent  aucun  trouble  de  l’intelli- 
gence ni  des  mouvements;  elle  s’occupe  habituellement  a faiie 
des  souliers,  et  marche  sans  se  servir  de  canne. 

SU. 

Si  toutes  les  formes  symptomatiques  que  présente  le  i amol- 
lissement aigu  se  rencontrent  également  dans  la  congestion  cé- 
rébrale, il  n’est  pas  moins  certain  quelles  se  montrent  aussi 
dans  les  encéphalites  traumatiques  , dans  les  suppurations  du 
cerveau,  dans  les  ramollissements  qui  se  développent  à l’entour 
des  tumeurs  du  cerveau  et  des  méninges,  c’est-à-dire  dans  des 


KNCÉPHALlTJi. 


171) 


Ipsions  dont  la  iialure  inllnimnatoire  n’a  jamais  pu  être  l’objet 
d’aucun  doute.  La  chose  est  trop  évidente  pour  le  dé.lii  e,  les  con- 
vulsions toniques  ou  cloniques  , les  accès  épileptiformes^ pour 
que  j’aie  besoin  de  citer  des  faits  de  ce  genre  : il  suffit  de  par- 
courir les  ouvrages  de  M.  Bouillaud,  de  M.  Lallemand,  les 
traités  de  chirurgie,  pour  en  rencontrer  de  nouveaux  exemples. 

Nous  avons  vu  que  le  ramollissement  débutait  quelquefois 
encore  par  une  attaque  d’apoplexie,  tout  à fait  semblable  à celles 
que  détermine  l’hémorrhagie  cérébrale  ou  la  forme  de  conges- 
tion cérébrale  appelée  coup  de  sang.  On  trouvera  facilement , 
en  remontant  aux  sources  que  fj’indicjuais  tout  à l’heure,  des 
exemples  d’encéphalilcs  suivant  une  marche  semblable  ; mais 
comme  M.  Rostan  prétend  quelque  part  (1)  que  la  diminution 
de  la  contractilité,  de  la  sensibilité,  la  paralysie  , l’inertie  de 
de  l’intelligence,  «indiquent  une  altération  d’une  nature  tout 
opposée  à l’inflammation,  » je  vais  rapporter  des  exemples 
d’encéphalite  suppurante  ayant  débuté  par  des  attaques  d’apo- 
plexie toutes  semblables  à celles  qui  forment  si  souvent  le 
début  du  ramollissement. 

A.  Lfne  femme  de  trente-neuf  ans  ayant  éprouvé  un  retard 
dans  ses  règles,  ressentit  de  la  céphalalgie  , puis  le  25  octobre 
fut  prise  spontanément  d’hémiplégie  à gauche.  Ou  lui  donna 
! un  émétique  ; quelque  temps  après  elle  perdit  la  parole.  Le 
lendemain  26,  elle  était  sans  connaissance.  Elle  fut  amenée 
1 dans  cet  état  à l’Hôtel-Dieu  le  28  : face  un  peu  animée  ; con- 
I jonclives  injectées;  pupilles  immobiles,  un  peu  contractiles; 
bouche  déviée  à droite  ; paralysie  des  membres  du  côté  gauche; 
rigidité  des  extrémités  des  deux  cotes  ; sensibilité  conservée  ; 

■ pouls  résistant  ; respiration  bruyante.  Mort  dans  la  nuit. 

y4utopsÎ6.  — — Suppuration  de  la  pte-mere,  sur  la  convexité 
i des  deux  hémisphères.  Dans  l’hémisphère  droit,  à cinq  lignes 
1 de  profondeur  et  à un  pouce  dé  son  bord  interne,  .deux  foyers 
1 contenant  un  pus  grisâtre.  Ces  deux  foyers  , après  avoir  été 
! abstergés,  prcsenlèrent  un  grand  nombre  de  petits  points  rou- 
ges ^ ce  n était  nullement  ce  qu  on  appelle  le  cerveau  sablé  de 
sang,  mais  une  rougeur  générale  de  toute  la  surface  de  la  pulpe 


(I)  Kusla»,  Recherches....,  f>.  ttiü. 


\ 


1Î50  KAMOLLlSSliMENT  AIGU, 

en  suppuration.  Ce  phénomène  n’avait  lieu  que  dans  les  foyers, 
el  non  dans  les  autres  points  en  suppuration  (1). 

B.  Un  homme  âgé  de  42  ans,  pendant  la  lecture  d une  lettre 
qui  lui  donnait  de  mauvaises  nouvelles  , demeura  tout  à coup 
immobile,  comme  stupide,  la  face  se  dévia  à droite  ; deux  jours 
après  il  y avait  une  hémiplégie  gauche  complète.  Cet  homme 
demeura  dans  cet  état  pendant  trois  mois.  On  n’a  jamais  noté 
ni  contracture  ni  convulsions  ; seulement  la  noix  vomique,  que 
l’on  essaya  à deux  reprises  différentes,  donna  lieu  à des  halluci- 
nations el  à un  peu  de  délire  passager.  L’usage  delà  liqueur  de 
Van  Swiéten  commençait  cependant  à déterminer  une  améliora- 
tion notable  , à diminuer  Vidiotisme  et  la  paralysie,  quand  tout 
à coup  il  tomba  dans  un  coma  complet  avec  sterlor  , et  mourut 

trois  jours  après. 

A l’autopsie  en  trouva  de  la  sérosité  trouble  dans  le  ventri- 
cule latéral  droit  ; rhéinisphère  droit  était  affaissé , et  conte- 
nait plusieurs  foyers  purulents  à parois  grisâtres,  enduites  d une 
bouillie  purulente,  communiquant  entre  eux  (2). 

C.  Un  homme  de  55  ans  , de  bomie  santé,  éprouve  tout  à 
coup,  le  6 avril,  un  étourdissement  considérable,  tombe  à terre 
et  reste  un  quart  d’heure  sans  connaissance.  Use  relève  ensuite 
ayant  tout  le  côté  gauche  faible  et  engourdi , la  parole  et  les 
facultés  intactes.  Trois  jours  après,  nouvelle  attaque  plus  forte, 
précédée  de  vertiges  et  de  céphalalgie.  U perd  connaissance 
pendant  une  demi-heure,  et  ne  peut  plus  remuer  le  côté  gauche. 
Le  soir,  déviation  de  la  bouche  , face  rouge,  gaite  exallee...  le 
mouvement  reparaît  un  peu  et  revient  de  plus  en  plus  les  jours 
suivants.  Le  22  avril,  troisième  attaque  plus  forte,  perte  de  con- 
naissance plus  longue  , suivie  d’une  paralysie  complète  et  per- 
sistante à gauche,  déviation  de  la  bouche  et  de  la  langue  a 
droite.  Il  survient  les  jours  suivans  de  l’agitation,  des  douleurs 
dans  les  membres  paralysés,  surtout  dans  les  art.culaüons  , sans 
que  la  moindre  motilité  y reparaisse.  Mort  le  l5  mai. 

On  trouve  une  congestion  sanguine  des  méninges  et  dans 
l’hémisphère  droit,  deux  foyers  pleins  de  pus  semblable  a celui 

d’un  phlegmon  (3). 


,,  mciynasics  rl.oni./nes,  qualncme  ciU  , l.  u,  p.  -lOJ. 

(7.)  L'  iü  ix,  Cours  sur  ks  ^i^cnvrulitcs.-;  l-  vm,  p-  -im. 


181 


EVCliPHALlTE. 

D.  M.  Casimir  Broussais  a communiqué  à l’acatlcmie  de 
médecine  (séance  du  l'-- septembre  1840),  l’observation  d’un 
militaire  qui,  entré  dans  le  service  qu’il  dirige,  pour  une  affec- 
tion légère,  fut  pris  tout  à coup  d’une  hémiplégie  droite  , avec 
prostration  des  plus  marquées.  La  paralysie  se  transfoima  , au 
bout  de  quelques  jours,  en  une  contraction  qui  revenait  par 
intervalles.  On  observa  aussi  pendant  la  nuit  des  contractions 
épileptiformes.  Cet  état  dura  une  quinzaine  de  jours  ; puis  , 
après  quelques  jours  d’une  anielioi’ation  apparente  , il  tomba 
dans  le  coma  et  mourut. 

A l’autopsie,  on  trouva  dans  la  cavité 'de  l’araclinoide,  de  la 
sérosité  verdâtre  en  très-grande  quantité  et  des  adhérences;  un 
vaste  abcès  occupait  toute  la  superficie  de  1 hémisphère  céré- 
bral droit  ; on  ne  trouva  à gauche  qu’un  petit  abcès  également 
à la  surface  de  l’hémisphère  (1). 

La  méningite  peut  encore,  dans  quelques  cas  , suivre  une 
marche  analogue  à celle  que  nous  ont  présentée  les  observations 
précédentes. 

E.  Une  femme  âgée  de  soixante-quatre  ans  avait  eu  une  atta- 
que d’apoplexie  neuf  ans  auparavant.  Le  25  février  1820,  elle 
éprouva  un  étourdissement  en  se  levant,  un  matin , et  tomba  , 
sans  perdre  connaissance,  hémiplégique  [du  côté  gauche.  Il  y 
avait  de  la  fièvre,  de  la  céphalalgie,  les  excrétions  étaient  invo- 
lontaires. Le  23  février,  les  symptômes  prirent  un  caractère 
nouveau  de  gravité,  et  elle  succomba  le  27. 

On  trouva  le  feuillet  pariétal  de  l’arachnoïde  des  deux  côtés  , 
mais  surtout  à droite,  tapissé  d’une  couche  albumineuse  purm- 
lente.  Il  n’y  avait  autre  chose  dans  le  cerveau  que  les  traces  de 
l’ancienne  attaque  d’apoplexie  (2). 

F.  Une  femme  de  quarante  ans  commençait  à se  lever  , trois 
mois  après  une  amputation  de  la  jambe,  lorsqu’il  se  déclara 
une  affection  de  l’espèce  des  apoplexies.  La  diminution  du  sen- 
timent et  du  mouvement  dans  le  côté  droit  du  corps  était 
jointe  à du  délire  et  à des  convulsions.  Ces  accidents  empor- 
tèrent bientôt  la  malade. 

On  trouva  beaucoup  de  pus  stagnant  dans  le  ventricule 

(t)  Archives  gén.  de  med.,  octobre  \ 840. 

(2)  Rostan,  Recherches,, . , p.  316. 


182  RAMOLLISSEMENT  AIGU.  (SYMPT.) 

gauche  du  cerveau,  sans  aucune  lésion  dans  ce  viscère  lui- 
incme  (1). 

Dans  l’observation  suivante,  nous  verrons  qu’une  induration 
du  cerveau,  consécutive  à un  ramollissement,  n’avait  jamais 
donné  lieu  qu’à  une  paralysie  d’un  membre,  survenue  subite- 
ment. Je  cite  ce  fait  parce  que  la  présence  d’une  induration  éta- 
blit à elle  seule  de  fortes  présomptions  en  faveur  de  la  nature 
inflammatoire  de  la  maladie, 

G.  Une  jeune  femme,  entrée  depuis  longtemps  à l’Hôtel-Dieu 
pour  un  catarrhe  chronique,  était  convalescente  decelte  maladie  : 
elle  nous  appelle  un  jour,  et  nous  dit  que  son  bras  gauche  venait 
d’être  paralysé  : la  bouche  et  la  langue  n’étaient  point  deviées^ 
son  in  lelligence  était  parfaitement  conservée  ; elle  n’avaitrien  pré- 
senté qui  eût  pu  faire  prévoir  cette  nouvelle  affection  ; elle  était 
bien  portante  la  veille,  et  n’avait  point  éprouve  de  douleui's  de 
tête.  Il  y avait  l’ésolution  complète  du  membre  : nous  pensons 
à un  ramollissement.  Cette  femme  se  rétablit  peu  à peu  , et  au 
bout  de  cinq  mois,  il  restait  à peine  quelques  traces  de  ces  acci- 
dents. A quelque  temps  de  là  , elle  succombe  à des  accidents 
thoraciques. 

On  trouve  un  ramollissement  cremeux  du  corps  strie  , séparé 
du  reste  du  cerveau  par  de  la  substance  cérébrale  indurée  , au 
milieu  de  laquelle  il  était  logé  comme  un  séquestre  (2). 

J’ai  rapporté  tous  ces  faits  pour  faire  voir  que  la  paralysie  , 
l’anéantissement  des  facultés  de  l’intelligence,  1 apoplexie,  etc., 
pouvaient  très-bien  appartenir  a des  affections  inflammatoiies 
de  l’encéphale. 


CHAPITRE  V. 

DIAGNOSTIC  DU  RAMOLLISSEMENT  AIGU. 

Ces  divers  groupes  symptomatiques  que  forment  les  lésions 
des  fonctions  cérébrales  peuvent  s’observer  sous  les  mêmes  ap- 
parences, dans  une  foule  de  maladies  diflérentes  de  l encéphale. 
Nous  allons  prendre  successivement  les  diverses  forines  que 
nous  a présentées  le  ramollissement  aigu,  et  chercher  s’il  nous 

(t)  Morgagni,  LcUre  Ve,  n“  4. 

(2)  Trou.s.seati,  Guzellc  de»  hôpitaux,  2 février  184t. 


183 

DUGISOSTIC. 

sera  passible  d’établir  quelques  caractères  à l’aide  desquels 
nous  puissions  toujours  reconnaître  cette 

Nom  tâche  serait  facile  si , comme  l’a  prétendu  M.  Tanque 
rel  des  Planches,  il  était  vrai  que  « les  alterations  primitives  du 
cerveau  ne  donnent  en  général  naissance  qn’à  un  certain  nombre 
de  phénomènes  bien  déterminés;,  s il  nous  était  permis 
douW  avec  cette  observateur  distingué,  mais  qui  u _a  peut-être 
pas  assez  éludié  les  maladies  cérébrales,  . que  la  memealteia- 
tiou  anatomique  puisse  donner  tour  à tour,  d un  monwiit  a 
l’autre,  naissance  à l’exaltation,  puis  à l’abolition  du  sentiment, 

du  mouvement...  (^)*  « -o’  i 

Nous  ne  pouvons  malheureusement  que  repeter  avec  Pinel  : 

« Que  ne  reste-t-il  pas  encore  à rassembler  pour  établir  une  sorte 
de  correspondance  entre  Thistoire  des  symptômes  et  des  lésions 
particulières  de  l’organe  encéphalique  (2)!  » Au  bout  de  qua- 
rante ans,  la  science  accuse  encore  les  mêmes  difficultés , et  les 
progrès  en  anatomie  pathologique  n’ont  presque  servi  qu  a les 
accroître,  en  étendant  le  cadre  des  lésions  primitives  du  cerveau, 
sans  ajouter  à proportion,à  l’histoire  séméiologique  de  cet  organe. 


§1". 

La  forme  la  plus  caractéristique  du  ramollissement  est  celle 
dans  laquelle  cette  maladie  débute  par  une  altération  graduelle 
du  mouvement  et  de  l’intelligence,  accompagnée  de  troubles  de 
la  sensibilité , tels  que  céphalalgie,  engourdissements  et  sensa- 
tions diverses  dans  les  membres...  surtout  lorsque  quelques- 
uns  de  ces  phénomènes  sont  bornes  a un  coté  du  corps. 

S’il  est  vrai  que  le  ramollissement  cérébral  commence  par 
une  congestion,  il  semble  qu’il  n’y  ait  pas  de  diagnostic  à éta- 
blir entre  cette  dernière  et  le  ramollissement  à son  début  ; et  en 
effet  nous  avons  montré  tout  à l’heure  que  toutes  les  formel 
de  ramollissement  se  montraient  également  dans  la  simple 
congestion,  et  réciproquement.  C’est  généralement  la  prolon- 
gation des  accidents,  et  surtont  la  persistance  de  leur  gravité  , 
qui  annonce  qu’à  la  congestion  simple  a succédé  un  travail  in- 
flammatoire. On  a dit , et  j’ai  cru  longtemps  que  la  prédomi- 
nence  des  symptômee  d’un  côté  du  corps  était  un  signe  propre 
à faire  distinguer  le  ramollissement,  de  la  congestion;  mais 


(t)  Tanquerel  des  Planches,  Traité  des  maladies  de  plomb,  t.n,  p.  388 
(2)  Pinel,  Nosographie  philosophique,  4802,  U ii,  p.  486. 


(84 


HAMOLLlSSKMEÎiï  AIGU.  (SYMPT.) 

nous  avons  déjà  vu  que  cette  circonstance  n’avait  pas  une 
grande  valeur  dans  les  cas  où  la  maladie  débute  brusquement 
pai  une  attaque  apoplectique.  .Te  lui  en  attribue  davantage 
lorsque  les  accidents  se  développent  graduellement  : en  effet,  il 
est  fort  rare  qu’  alors,  s’ils  se  sont  montrés  dans  les  deux  moitiés 
du  coips,  on  trouve  autre  chose  à l’autopsie  qu’une  congestion 
sanguine  du  cerveau  ou  un  épanchement  séreux  des  méninges. 

Quant  a 1 hémorrhagie 'cérébrale,  rien  n’est  plus  rare  que  de 
voir  les  symptômes  qu  elle  détermine  suivre  une  mai  che  gra- 
duelle et  progressive.  Lorsque  l’hémorrhagie  ne  s’accomplit  pas 
tout  entière  du  premier  coup,  c’est  toujours  par  secousses 
brusques  que  s opèrent  ses  progrès  : aussi  je  regarde  comme 
complètement  erronée  l’opinion  du  docteur  Copland  qui,  dans 
sa  classification  de  l’apoplexie  , avance  que  dans  l’apoplexie 
graduelle  {the  graduallj  increasing  or  ingravescent  apoplexf), 
ou  trouve  toujours  une  hémorrhagie  (1).  D’un  autre  coté  cet 
auteur  rapporte  presque  exclusivement  au  ramollissement,  la 
lorme  d apoplexie  commençant  par  la  paralysie  , et  après  une 
période  indéfinie  , se  terminant  par  une  attaque  d'apoplexie  com- 
plète, forme  bien  souvent  observée  dans  les  hémorrhagies  qui 
n ont  pas  dès  le  principe  atteint  toute  leur  gravité.  Abercrom- 
bie  en  particulier  rapporte  un  certain  nombre  d’observations  de 
ce  genre,  et  en  a fait  sa  seconde  espèce  d’apoplexie  (2)> 

L’hémorrhagie  de  l’arachnoïde  suit  quelquefois  une  marche 
tout  à fait  semblable  à la  forme  de  ramolli.ssement  dont  nous 
nous  occupons  maintenant.  «Rien  ne  ressemble  plus  à cette 
maladie,  dit  M,  Rostan,  que  le  ramollissement  : même  marche 
graduelle,  identité  des  symptômes.  Lessignes  précurseurs  man- 
quent, eu  effet,  ?nais  cela  arrire  souvent  dans  le  ramollisse- 
ment (3).»  Il  faut  se  garder  de  généraliser  cette  assertion  comme 
le  fait  ce  professeur,  car  une  marche  graduelle  n’est  pas  celle  que 
suivent  le  plus  habituellement  le  ramollissement  aigu  ni  Thé- 
morrhagie  méningée;  et  d’ailleurs  les  trois  observations  d’hé- 
morrhagie méningée  rapportées  par  1\T.  Rostan  lui-même  dans 
son  livre  sur  le  ramollissement,  ont  présenté  précisément  une 
marche  tout  opposée  (4). 

(1)  Copland,  Diction,  on  prnet.  nied.,  I.  i,  p.  82. 

(2)  Abercromhle,  Lraduclioa  dlcc,  p.  322. 

(3)  Itoslan,  loc.  cit.,  p.  397. 

1^4)  OJ)ser\  al, ions  xc,  xi:i  cl  xenj 


diagnostic. 


18Ô 


Cependant  les  deux  observations  d’hcmorrhagie  de  l’ara- 
clinoide  de  M.  Andral  (1),  nous  fournissent  de  semblables 
exemples  ; mais  le  plus  frappant  est  celui  dont  M.  Longet  a 
fait  le  sujet  desa  ibèse:  il  s’agit,  en  effet, d’un  homme  de  cinquante 
sept  ans,  chez  lequel,  à la  suite  de  symptômes  de  congestion  céré- 
brale , il  survint  progressivement  de  l’afFolblissement  puis  une 
hémiplégie  complète  du  côté  droit,  et  en  même  temps  une  abo- 
lition graduelle  des  facultés  de  l’intelligence  (2).  J’avoue  cjue 
dans  les  cas  de  ce  genre  , il  me  paraît  à peu  près  impossible 
d’éviter  une  erreur  : ils  se  rencontrent  rarement  du  reste,  car 
l’hémorrhagie  méningée,  qui  n’est  pas  elle-même  une  altéra- 
tion fréquente,  suit  habituellement  une  marche  toute  différente. 
Sur  vingt-quatre  exemples  d’hémorrhagie  de  l’arachnoïde  que 
j’ai  rassemblés  , je  n’en  ai  trouvé  que  cinq  qui  fussent  dans  ce 
cas  (3). 

§ II. 

Dans  un  très  grand  nombre  de  cas,  le  ramollissement  débute 
par  un  anéantissement  plus  ou  moins  général , plus  ou  moins 
complet  des  facultés,  par  une  attaque  d’apoplexie. 

Cette  forme  symptomatique  est  très  commune  dans  les  ma- 
ladies aiguës  de  l’encéphale  : sans  parler  de  la  congestion  céré- 
brale , où  elle  porte  le  nom  de  coup  de  sang  , de  l’hémorrhagie 
qui  en  est  le  type  , elle  se  rencontre  encore  souvent  dans  l’hé- 
morrhagie méningée  (4) , dans  l’infiltration  sanguine  non-in- 
flammatoire du  cerveau  (5) , dans  les  épanchemens  séreux  (6)  et 


(1)  Andral,  loc.  cil.,  1.  v,  obs.  ni  et  iv. 

(2)  Longet,  Thèses  de  Paris,  1835,  n,  94. 

(3)  Les  deux  observations  de  la  clinique  de  M.  Andral,  celle  de  M.Longet, 
une  rapporte’e  par  M.  E.  Boudet  dans  son  mémoire  sur  l'hemorrbagie  des  mé- 
ninges, et  un  cinquième  cas  présente'  par  ce  dernier  à la  Société  anatomique. 

(4)  Lancette Jrançaise,  8 janvier  1831,  Observation  recueillie  dans  le  ser- 
vice de  M.  Breschet.  — Maneskas,  Gazette  mèd.,  6 janvier  1836.  — Ilostan, 
Tech,  sur  levain.,  obs.  xcu  — E.  Boudet , Mémoire  sur  Fhdmorrhasie  des 
méninges,  1839,  p.  S3,  etc. 

(5)  Diday,  Gazette  méd.,11  avril  1837.  — Abercrombic.  irud.  citée, 

p.  112,  obs.  XXVII Burand-Fardcl,  Thèses  de  Paris,  1840,  n.  261,  etc. 

(0)  Andral,  Cliniffuc  méd.,  t.  v,  obs.  xxii  cl  xxin  de  méningite. —Bou- 
vier, Bulletin  de  l’Académie  de  médecine , séance  du  23  mai  1838.  — Ro- 
olioux,  Traité  de  F apoplexie,  US»  ob.s.  — Morgagni,  Ep.  iv,  n.  7,  etc. 


186  IUMOLLISSEMENT  AIGU.  (SYMPT.) 

même,  bien  que  beaucoup  plus  rarement , dans  la  méningite 
purulente  (1).  Je  ne  m’arrêterai  point  ici  à chacun  de  ces  cas  : 
il  me  suffit  de  les  avoir  indiques,  car  c est  surtout  a 1 histoire  de 
l’hémorrhagie  cérébrale  qu’appartient  leur  rapprochemeut.  Je 
me  contenterai  d’entrer  dans  quelques  developpemens  a propos 


du  diagnostic  de  celte  dernière  et  du  ramollissement. 

L’étude  comparative  que  nous  allons  entreprendie  de  ces 
deux  affections  doit  porter  et  sur  leur  marche  considérée  en 
général , et  sur  quelques  faits  de  détails , pris  parmi  leurs  phé- 
nomènes les  plus  saillants. 

Le  ramollissement  cérébral  suit  dans  un  grand  nombre  de 
cas  une  marche  absolument  semblable  à celle  qui  caractérise 
l’apoplexie  , dont  le  type  a depuis  si  long-temps  été  popularisé 


par  les  auteurs  classiques. 

Ce  fait  déjà  bien  connu  depuis  plusieurs  années  (M.  Rochoux 
est,  je  crois,  un  des  premiers  qui  l’aient  signalé  (2),  et  dont  je 

pense  seulement  avoir  mieux  démontré  la  fréquence,  se  peut 
aisément  expliquer. 

Nous  savons  que  les  symptômes  du  début  du  ramollissement 
sont  dus  à la  congestion  qui  le  précède  nécessairement  : par 
conséquent  ils  doivent  être,  et  nous  avons  démontré  qu’ils  sont, 
en  effet,  tout-à-fait  semblables  à ceux  de  la  congestion  ceij- 
brale  elle-même.  Or,  on  sait  également  qu’il  est  une  forme  de 
la  congestion  qui  simule  parfaitement  une  hémorrhagie,  et  nous 
avons  fait  voir  que  l’on  ne  pouvait  attribuer  à la  presence  ou  à 
l’absence  d’hémiplégie,  l’importance  qu’y  ont  attachée  quelques 
personnes,  pour  la  distinction  de  ces  deux  affections. 

Cette  identité  d’expression  symptomatique  tient  a la  com^es- 
sion  également  exercée  sur  la  substance  cérébrale  par  un  afflux 
de  sang  considérable,  que  ce  dernier  demeure  dans  1 intérieur 
des  vaisseaux  ou  qu’il  s’épanche  en  foyer  dans  la  pulpe  ceie- 
brale;  car  il  n’est  pas  nécessaire,  pour  qu  il  se  produise  des 
phénomènes  de  compression,  de  la  paralvsie  et  une  paralysie 
partielle,  que  la  substance  cérébrale  soit  elle-menie  interessee , 
comme  l’avait  prétendu  M.  Serres  (3).  Je  n en  veux  d autre 


M)Roslaa,  /oc.  c/^..,  obs.  lxvu-  - P\ne\,  Nosographie  philos.,  U -, 

page  189,  deuxième  édition.  — Morgagni,  Lettre  V“,  n. 

(2)  V.  A.  Rochoux,  Thèses  de  Parts,  1812,  n.  76. 

(3)  Serres,  Annuaire  niddico-chirurgical  des  hôpitaux,  181  . 


DIAGNOSTIC. 


187 


preuve,  entre  tant  d’exemples  divers,  que  les  faits  d’hémorrha- 
gie de  l’arachnoïde  accompagnés  d’hémiplégie  (1). 

Lamarche  subséquente  du  ramollissement  et  de  1 hemoiiha- 
gie  nous  fournira  t-elle  des  données  plus  propres  à éclairer  le 
diagnostic? 

« Dans  un  certain  nombre  de  cas,  dit  M.  Cruveilhier,  1 inva- 
sion des  diverses  espèces  de  ramollissement  (2)  est  tout  aussi 
subite  que  l’invasion  de  l’apoplexie  avec  foyer,  et  les  symptô- 
mes assez  peu  dissemblables  pour  qu’il  y ait  doute  depuis  le 
premier  moment  de  l’apparition  de  la  maladie  jusqu  a sa  ter- 
minaison (3)  ». 

A priori,  l’on  a établi  que  le  ramollissement  devait  se  distin- 
guer de  l’hémorrhagie  à ceci,  que,  dans  cette  dernière,  les 
symptômes  acquéraient  dès  le  principe,  leur  maximum  d inten- 
sité, tandis  que,  dans  le  ramollissemei.*t,  ils  n’y  arrivaient  que 
par  degrés.  Cette  loi,  vraie  pour  un  certain  nombre  de  cas  seu- 
lement, rappelle  celle  quel.  L.  Petit  avait  posée,  mais  plus 
heureusement,  pour  le  diagnostic  de  la  commotion  et  de  la  com- 
pression du  cerveau,  à la  suite  des  plaies  de  tête. 

Mais,  nous  l’avons  déjà  dit,  lorsqu’une  congestion  générale 
s’est  faite  brusquement,  et  qu’un  ramollissement  partiel  se 
forme,  tandis  que  le  malade  est  encore  sous  le  coup  de  cette 
congestion , tantôt  la  mort  arrive  avant  que  cette  dernière  soit 
dissipée,  et  les  symptômes  propres  au  ramollissement  auront 
été  masqués  par  elle  ; tantôt  la  mort  surviendra  plus  tard,  et 
aux  symptômes  généraux  de  la  congestion  succéderont  les 
symptômes  partiels  du  ramollissement;  et,  dans  ce  dernier  cas 
surtout,  on  croira  à l’existence  d’une  hémorrhagie,  que  cette 
diminution  successive  des  accidents  aura  parfaitement  si- 
mulée (4). 

(1)  Morgagni,  Lettre  II»,  ù.  17.  — Lancette  française  , 8 janvier  1831  , 
service  de  M.  Breschct.  — Roslan  , Recherches.,.,  obs,  xc.  — Mémoire  de 
M.  E.  BouJet,  p.  47,  etc. 

(2)  C’esl-à-dire  le  rutnollissemenl  blanc  el  le  ramollissement  rouge  que 
ce  professeur  étudie  séparément. 

(3)  Cruveilhier,  Mnatomie  pathologique,  33«  livraison. 

(4)  Il  n’csl  pas  nécessaire  que  la  congestion  soit  générale  pour  que  les  cho- 
ses se  passent  ainsi.  Une  congestion  partielle,  lorscpi’elle  e.st  considérable  et 
s’accompagne  de  tuméfaction , peut,  par  suite  de  cette  dernière,  déterminer 


188 


RAMOLLISSEMENT  AIGU.  (SYMPT.) 

On  a attaché  une  grande  importance  aux  pliénoinènes  pré- 
curseurs dans  le  ramollissement,  et  c’cst  spécialement  sur  leur 
absence  ou  leur  présence  qu’a  été  fondé  le  diagnostic  différen- 
tiel de  riiémorrhagie  et  du  ramollissement.  J’ai  déjà  ti-aité  cette 
question  avec  détail,  et  j’ai  insisté  sur  la  distinction  qu’il  fallait 
faire  des  symptômes  précurseurs  proprement  dits,  et  de  ceux 
bien  autrement  caractéristiques  qui  appartiennent  au  début  de 
la  maladie  (1).  L’erreur  dans  laquelle  on  est  tombé  à ce  sujet 
vient  de  ce  que  l’on  a surtout  euvisagé  des  cas  où  le  ramollisse- 
ment, suivant  dès  le  principe  une  marche  chronique,  progres- 
sive, n’avait  acquis  que  peu  à peu  les  cai’actères  qui  sont  pro- 
pres à cette  maladie  : de  sorte  que,  au  moment  où  l’on  voyait 
apparaître  ces  derniers,  on  prenait  pour  des  prodromes,  pour 
des  phénomènes  précui’seurs,  ce  qui  n’était  que  le  premier  de- 
gré, que  la  période  première  de  la  maladie  elle-même. 

Quant  au  ramollissement  aigu,  il  en  est  autrement,  comme 
nous  l’avons  vu,  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas,  et  je  ne 
suis  pas  éloigné  de  croire  que  la  règle  établie  pourrait  être  re- 
tournée, et  que  les  prodromes  se  montrent  plus  souvent  avant 
l’hémoriAiagie  ; cependant  je  n’avance  ceci  qu’avec  réserve,  car 
c’est  précisément  un  des  points  que  les  observations  eclairent  le 
plus  difficilement. 

Notons  d’abord  que,  dans  ces  deux  cas,  les  prodromes  n’ont 
généralement  pas  de  caractère  spécial,  et  qu’ils  consislent  sim- 
plement en  des  signes  de  congestion  cérébrale  se  montrant  plus 
ou  moins  graves  et  à des  espaces  plus  ou  moins  rapprochés, 
mais  toujours  passagers.  Or,  nous  avons  vu  que  le  ramollisse- 
ment aigu,  dans  sa  forme  apoplectique  , avait  essentiellement 
un  caractère  d’instantanéité  , puisqu’il  se  développait  consécu- 
tivement à une  congestion,  et  que  l’instantanéité  est  elle— même 
un  des  caractères  de  la  congestion  aiguë.  Dans  les  autres  formes, 
le  ramollissement,  s’il  n’offre  plus  cette  brusquerie  dans  son  dé- 
veloppement, suit  au  moins  une  marche  analogue  à celle  des 

une  compression  à peu  près  ge'ne'rale.  Mais  celte  tuméfaciion  ne  persiste  Ja 
mais  que  pendant  un  certain  temps,  quelquefois  fort  court,  au  bout  duquel, 
si  la  mort  n’arrive  pas,  on  verra,  comme  dans  le  cas  précédent,  aux  symp- 
tômes généraux  de  la  compression  succéder  les  symptômes  partiels  du  ra- 
mollissement. 

(1)  Voyez  chap.  lH,  art.  II,  § 1.  • 


BlAGMÜSXIC. 


189 


maladies  aiguës  dans  les  autres  organes.  L’existence  de  pro- 
dromes semble  donc  bien  plutôt  étrangère  au  caractère  de  cette 
affection  que  nécessaire  à son  développement. 

Voici  seulement  ce  que  l’on  peut  observei  ; 

Il  est  certain  qu’une  congestion  au  cerveau  prédispose  a d au- 
tres congestions,  et  qu’un  individu,  âge  surtout,  étant  donné 
atteint  d’une  congestion  cérébrale  (développée  toutefois  hors  de 
toute  cause  externe),  il  y aura  toute  probabilité  pour  qu  il  ait 
eu  déjà,  ou  qu’il  ait  plus  tard  d’autres  congestions  cérébrales. 
Ceci  me  paraît  un  fait  incontestable. 

Or,  comme  une  première  congestion  n’est  pas  toujours  assez 
intense  pour  donner  lieu  à un  ramollissement,  il  arrivera  fort 
souvent  qu’un  individu  affecté  de  ramollissement  ait  éprouve 
déjà  une  ou  plusieurs  atteintes  de  congestion  cérébrale. 

Mais  ce  ne  solit  pas  là  réellement  des  prodromes  de  ramol- 
lissement. 

En  effet,  voyons  comment  les  choses  se  passent  dans  l’hémor- 
rhagie. De  deux  choses  Lune,  ou  l’hémorrhagie  cérébrale  recon- 
naît pour  cause  essentielle  une  altération  primitive  et  molécu- 
laire de  la  pulpe  cérébrale,  ou  elle  se  développe  dans  un  tissu 
tout  à fait  sain,  et,  dans  ce  dernier  cas,  la  congestion  est  assu- 
rément son  élément  essentiel.  Eh  bieni  dans  ces  deux  cas,  je 
dis  qu’il  y a au  moins  autant  de  raisons  pour  que  des  prodro- 
mes précèdent  Linvasion  de  la  maladie  que  dans  le  ramollis- 
sement. 

Car  s’il  y a une  altération  primitive,  hémorrhagipare,  quelle 
que  soit  sa  nature,  quelque  progressif  que  puisse  être  son  déve- 
loppement, il  se  fera  rarement  sans  que  quelques  signes,  légers 
au  moins,  témoignent  de  son  existence.  D’une  autre  part,  si 
une  altération  semblable  ne  préexiste  pas,  il  est  probable  que  ce 
ne  sera  guère  qu’après  plusieurs  atteintes  répétées,  qu’une  con- 
gestion deviendra  capable  de -surmonter  la  résistance  des  vais- 
seaux et  du  tissu  cérébral,  et  de  les  déchirer  dans  un  effort  hé- 
morrhagique. 

Or,  ceci  est  parfaitement  d’accord  avec  les  faits.  « Il  est  rare, 
ditM.  Gendrin,  que  les  hémorrhagies  encéphaliques  se  mani- 
festent sans  avoir  été  précédées  de  prodromes.  L’assertion  con- 
traire vient  de  ce  que  l’on  s’est  trop  exclusivement  arrêté  aux 
faits  rcctieidis  dans  les  hôpitaux,  sur  une  classe  de  personnes 


190 


ramollissement  aigu  (svmpt.) 

habituées  à négliger  beaucoup  de  symptômes,  dedéiangemeuts 
de  sauté  et  à en  mal  rendre  compte  (l)  ».La  plupart  des  auti  urs 
se  sont  étendus  avec  complaisance  sur  les  divers  prodromes  de 
l’apoplexie,  et  M.  Rochoux  est  presque  le  seul  qui  refuse  de  les 
admettre,  comme  le  cas  le  plus  ordinaire.  ♦ 

D’ailleurs,  cette  influence  de  congestions  antérieures  sur  la 
production  de  l’hémorrhagie  cérébrale,  démontrée  par  l’obser- 
vation  directe,  est  encore  prouvée  par  une  foule  de  faits  pris 
dans  l’histoire  de  cette  maladie  : ainsi  sa  fréquence  chez  les 
ivrognes,  sa  rareté  à la  suite  des  lésions  traumatiques  de  la  tête, 
son  absence  presque  absolue  chez  les  petits  enfants  , tandis 
qu’elle  est  si  commune  dans  un  âge  avancé,  etc. 

Maintenant,  que  l’on  consulté  les  observations  de  ramollisse  - 
ment aigu  de  M.  Rostan  et  les  nôtres,  et  l’on  verra  qu’il  en  est 
un  bon  nombre  dans  lesquelles  l’absence  de  tout  prodrome  ne 
saurait  faire  le  sujet  d’aucun  doute. 

Quant  à l’attaque  elle-même,  elle  est  ordinairement  tout  à fait 
subite:cependant  jel’ai  vue  plus  souvent  dans  rhémorrhagie  que 
dans  le  ramollissement,  précédée  de  malaises,  de  signes  légers  de 
congestion,  quelques  heures  avant  le  début.  Ces  signes,  précur- 
seurs de  l’hémorrhagie  cérébrale,  ne  représentent-ils  pas  le  mo- 
limen  hémorrhagique  des  auteurs? 

Si,  dans  la  forme  du  ramollissement,  franchement  apoplecti- 
que, à laquelle  nous  faisons  allusion,  la  marche  de  la  maladie 
peut  être  absolument  semblable  à celle  de  l’hémorrhagie;  si, 
dans  ces  deux  affections,  le  début  peut  être  également  sidiit, 
précédé  ou  non  de  prodromes  immédiats  ou  de  signes  précur- 
seurs éloignés  ; si,  dans  toutes  deux  également,  après  une  inva- 
sion rapide  et  comme  foudroyante,  les  symptômes  peuvent  su- 
bir une  certaine  rémission,  ou,  au  contraire,  conserver  leur 
gravité  jusqu’à  une  mort  prochaine,  chercherons-nous,  dans 
chacun  de  ces  derniers  en  particulier,  des  données  qui  puissent 
nous  éclairer  plus  sûrement  dans  ce  diagnostic?  Reprendrons- 
nous  successivement  chacun  des  phénomènes  séméiologiques 
que  nous  venons  d’éludier  tout  à l’heure  , pour  les  comparer 
aux  phénomènes  analogues  observés  dan-s  l hémorrhagie  ? No^i, 
sans  doute  : car  les  diverses  nuances  et  les  combinaisons  variées 

tt)  Gcndrin,  Traité  philos,  c/c  mc'd.  pral.,  l.  P*  3/8. 


/ 


DIAGNOSTIC. 


19J 


des  symptômes  qui  les  peuvent  accompagner,  présentent  à la  fois 
tant  de  ressemblances  dans  les  deux  maladies,  tant  de  variétés 
chez  chaque  individu,  que  je  n’hésite  pas  à avancer  que  leur 
comparaison  ne  saurait  nous  fournir  aucune  ressource  pour 
éclairer  ce  diagnostic. 

Exceptons-en  toutefois  les  mouvements  convulsifs  qui  sur- 
viendraient à la  suite  d’une  attaque  apoplectiforme  : mais  si 
c’était  à une  époque  un  peu  éloignée  du  début,  ils  pourraient 
tenir  au  développement  d’un  ramollissement  consécutif,  à l’en- 
tour d’un  foyer  hémorrhagique. 

Il  faut  l’avouer  avec  regret,  les  règles  que,  sur  la  foi  de  quel- 
ques auteurs  modernes,  on  avait  admises  pour  le  diagnostic  du 
ramollissement  et  de  l’hémorrhagie,  sont  la  plupart  imagi- 
naires, ou  au  moins  ne  sauraient  trouver  leur  application  dans 
le  plus  grand  nombre  des  cas.  Les  faits  se  multiplient  chaque 
jour  pour  démontrer  qu’au  lieu  de  s’efforcer  inutilement  de 
se'parer  des  formes  symptomatiques  en  tout  point  identiques,  il 
valait  mieux  remonter  à leur  point  de  départ,  admettre  fran  • 
chement  leur  identité  pour  en  étudier  la  raison,  et  chercher  si 
si  l’on  serait  plus  heureux  sur  le  terrain  de  la  pathogénie  que 
sur  celui  du  diagnostic  : c’est  ce  que  j’ai  tenté  en  démontrant 
que  les  symptômes  du  début  du  ramollissement  appartenaient  à 
la  congestion,  c’est-à-dire  à une  affection  qui  peut  simuler  par- 
j faitement  une  hémorrhagie , par  suite  de  la  compression 
I qu’exerce  indifféremment  le  sang,  qu’il  s’amasse  au  dedans  ou 
au  dehors  des  vaisseaux. 

I II  se  rencontre  bien  certaines  circonstances  qui  sont  plus  par- 
I ticulières  à quelqu’une  des  deux  affections  que  nous  cherchons 
I à comparer;  mais  ou  elles  n’ont  point  de  valeur  absolue,  ou 
I elles  sont  d’une  observation  difficile  et  se  rencontrent  rarement. 

I Ainsi  il  est  certain  que  la  conservation  de  la  connaissance  avec 
i une  hémiplégie  subite  et  complète  est  une  présomption  en  fa- 
I veur  du  ramollissement,  mais  une  présomption  seulement,  car 
il  ne  serait  pas  exact  de  dire  avec  M.  Trousseau  que  « la  con- 
servation de  l’intelligence  , au  moment  de  l’attaque , exclut 
toute  idée  de  congestion  ou  d’hémorihagie  (1)  La  onzième  ob- 
servation de  M.  Andral  et  la  vingt-cinquième  de  M.  Rochoux 

I (1)  Gazelle  des  hôpilaux,  2 février  1 84 1 . 


192  tlAiMOLLlSSEMENT  AIGU.  (SYMPl.  ) 

fournissent  des  exemples  d’hémonliagie  cérébrale  avec  conser 


vation  de  l’intelligence  au  début  des  accidents. 

Quelquefois,  dans  le  commencement  d’un  attaque  d’apo- 
plexie intense,  avecliémiplégie,  on  voit  survenir  de  petits  mou- 
vements ou  même  un  mouvement  unique  dans  un  des  membres 
qui  venaient  d’offrir  l’apparence  d’une  paralysie  complète;  je 
crois  que  l’on  peut  alors  diagnostiquer  un  ramollissement,  car]  ai 
rencontré  plusieurs  fois  cette  circonstance  dans  ce  dernier,  et  je 
ne  pense  pas  quelle  ait  jamais  été  observée  dans  l’iiémonbagic  ; 
ce  qui  s’explique  par  ce  fait,  que  la  compression  exeicee  pai 
l’épanchement  de  l’bémorrbagie  est  plus  complète  et  plus  irré- 
missible que  celle  produite  par  la  congestion  du  ramollisse- 
ment. 

M.  Cruveilliier  a fait  une  observation  analogue.  « Dans  le  ra. 
inollissement,  dit-il,  en  énumérant  les  circonstances  qui  peuvent 
servir  à le  distinguer  de  l’hémorrhagie,  les  symptômes  présen- 
tent des  oscillations.  Le  matin,  vous  croyez  le  malade  complète-  • 
ment  paralysé  d'un  membre,  le  soir,  il  le  remue  (1)  ».  Mais  ill 
s’en  faut  que  cela  s’observe  fréquemment. 

Nous  avons  vu  précédemment  que  l’on  ne  pouvait  tirer  au-- 
cun  parti  de  l’état  des  pupilles,  pour  le  diagnostic  qui  nous  oc- 
cupe (2).  . , 

L’état  de  la  sensibilité  cutanée  pourra-t-il  nous  offrir  quel- 
ques lumières?  Suivant  M.  Récainier,  cité  par  le  rédacteur  dui 
Journal  des  comiaissances  médico-chirurgicales,  « il  y aurait  or- 
dinairement ramollissement,  quand  il  y aurait  resolution  com- 
nlète  du  membre  et  perte  subite  de  la  motilité,  sans  diminu- 
tion et  même  avec  exaltation  de  la  sensibilité^  dans  la  partie  pri-,- 
vée  de  mouvement,  sans  altération  notable  de  1 intelligence  , il 
y aurait  liéinorrbagie  toutes  les  fois  qu’il  y aurait  perte  simu 
Lée  de  la  sensibilité,  de  la  motilité  et  de  1 intellipnce  (3)  ».. 

Les  observations  précédentes  ont  fait  voir  que  les  attaque. 

les  plus  foudroyantes,  les  plus  complotes , pouvaient  foi  t biei 

résuUerd’un  ramollissement.  L'exaltation  de  la  sensibilité  es- 
fort  justement  mise  par  M.  Récainier  au  nombre  des  signe. 


(lCruveilh  ier,  Analoinlc  j>atholoÿh/ue , 3:1"  livraison, 

pa^c  8i. 


DI.VG^OSXXC. 


li)3 

caracléristiques  du  lamollissemcnt.  li  est  certain  que,  chez  un 
individu  venant  d’avoir  une  attaque  apoplectique,  la  présence 
de  douleurs  spontanées  dans  les  membres  paralysés  ou  l'exal- 
tation de  la  sensibilité  de  la  peau  feront  diagnostiquer  avec 
certitude  cette  maladie.  Mais  ces  phénomènes  s’observent  bien 
rarement  dans  la  forme  de  ramollissement  qui  nous  occupe  ; 
ils  appartiennent  presque  excl.usivemmt  au  ramollissement  qui 
débute  graduellement  ou  s’annonce  sous  la  forme  ataxique. 

La  simple  conservation  de  la  sensibilité  cutanée  dans  les 
membies  pii\ea  de  mouvement  peut-elle  au  moins  servir, 
(omme  le  dit  M.  Hecamier,  a distinguer  le  ramollissement  de 
1 hcmoiihagie?  Les  releves  suivants  nous  apprennent  que  cette 
circonstance  est  tout  à fait  sans  valeur. 

.T’ai  dit  précédemment  que,  sur  ?.2  cas  de  paralysie  dans  le 
1 amollissement,  nous  avions  trouvé  neuf  fois  seultment  la  sensi- 
bilité intacte  (I).  J ai  ajouté  que  la  diminution  de  la  sensibilité 
m’avait  généralement  paru  en  rapport  avec  l’obtusion  du 
mouvement  et  de  l’intelligence.  M.  Lallemand  a vu  également 
que  la  paralysie  de  la  peau  suivait  en  général  la  même  progres- 
sion que  celle  des  muscles,  mais  avec  cette  dilférence  qu’elle 
commençait  plus  tard  et  paraissait  moins  intense  au  moins  pen- 
dant tres-longtemps  (2).  Ces  remarques  sont  vraies,  mais  pour 
toutes' les  maladies  cérébrales  qui  peuvent  s’accompagner  d’a- 
nesthesie,  et  non  pas  seulement  pour  le  ramollissement. 

M.  Rostan,  sur  10  cas  de  ramollissement  aigu  où  il  a noté 

état  de  la  sensibilité,  l’a  trouvée  intacte  cinq  fois  (3),  abolie 
ou  tres-obluse  cinq  fois  (4 1.  On  trouve  l’état  de  la  sensibilité  au 
début  de  la  maladie  indiqué  dans  dix-h«ii  des  observations  de 
M.  Andral;  elle  était  conservée  six  fois  seulement  (5),  abolie 
ou  tres-obtuse  douze  fois  (6). 

J'ai  voulu  compare,  ces  rAuItats  i ceuv  que  .louucrai,  l’cxa- 
men  des  laits  d l.emorrhaoie  cércinale;  mais  Télat  de  la  scosi- 
bdite  est  note  dans  uu  si  petit  nombre  d'observations,  ilans  les 

(1)  Voyez  cl).  art.  2,  § 2. 

(•^)  Lallemand,  Lellre  2,  p.  273. 

C'i)  'Obseivations  4,  !),  jy,  2o,  2(J. 

(4)  UZ-i.  7,  n,  20,  28. 


194 


UAMOLLISSEMEiST  AlGTi . (SYMPT.) 

ouvrages  de  MM.  Rochoux,  Anclral,  Rostan, Abercrombie,  etc., 
que  j’ai  dû  me  contenter  de  mes  propres  onservalions.  J’ai  noté 
avec  soin  l’état  de  la  sensibilité  vingt  et  une  fois  : je  la  trouve  abo- 
lie onze  fois,  conservée  ou  très-légèrement  obtuse  dix  fois. 

L’abolition  ou  la  conservation  de  la  sensibilité  eutanée  ne 
peut  donc  en  aucune  façon  servir  h distinguer  le  ramollissement 
de  l’hémorrliagie  (1). 

Un  seul  point  doit  encore  nous  arrêter  dans  l’étude  compa- 
rative du  ramollissement  et  de  l’hémorrhagie  : c’est  la  contrac- 
ture qui , suivant  la  plupart  des  auteurs,  serait  le  meilleur 
moyen  de  reconnaître  le  ramollissement  dans  les  cas  où  il  si- 
mule la  marche  de  l’hémorrhagie. 

On  n’a  encore  fait  presque  aucune  attention  à la  contracture 
dans  l’hémorrhagie  cérébrale  : ainsi  à peine  mentionné  par 
M.  Rochoux,  ce  symptôme  est  complètement  passé  sous  silence 
par  M.  Andral,  et  M.  Lallemand  paraît  indiquer  la  flaccidité 
comme  constante  dans  l’hémorrhagie  2).  Or,  les  faits  nous  ap- 
prennent que,  tandis  que  la  contracture  ne  s’observe  point  dans 
les  hémorrhagies  circonscrites  dans  l’épaisseur  des  hémisphères, 
ce  symptôme  ne  manque  presque  jamais  , au  contraire , dans  les 
hémorrhagies  avec  pénétration  du  sang  au  dehors  du  cerveau  ou 
dans  les  cavités  ventriculaires  ; et  je  ne  doute  pas  que  ces  der- 
nières hémorrhagies  ne  soient  plus  frequentes  que  celles  qui  se 
font  dans  l’épaisseur  des  hémisphères. 

On  a vu  plus  haut  que  sur  quarante-sept  cas  de  ramollisse- 
ment aigu  accompagné  de  paralysie,  pris  parmi  les  observations 
de  MM.  Rostan,  Andral  et  les  miennes,  la  contracture  ne  s’était 
montrée  que  treize  fois,  c’est-à-dire  dans  un  peu  plus  du  quart 
des  cas. 

Or,  sur  vingt-neuf  observations  d’hémorrhagie  cérébrale  re- 
cueillies par  moi,  je  trouve  la  contracture  notée  dix-neuf  fois, 
c’est-à-dire  dans  les  deux  tiers  des  cas. 

Il  paraît  résulter  de  ces  faits  que  la  contracture  est  précisément 
plus  fréquente  dans  l’hémorrhagie  que  dans  le  ramollissement. 

Ce  n’est  pas  ici  le  lieu  d’insister  sur  l’étude  de  la  contracture 

(1)  Je  n’ai  tenu  compte,  dans  les  relevés  qui  précèdent,  que  des  cas  oCi  le 
ramollissement  a déterminé  une.  attaque  apoplectique,  ou  au  moins  de  îa 
paralysie. 

(2)  Lallemand.  Lettre  2,  p.  259. 


/ 

IJIAGJNCIS'I  IC. 


i:jà 


dans  riiéinorrljagie  cércbiale,  sur  ce  fait ;;ciu r.;l,  sinon  cou  - 
tant,  (le  l’existence  de  la  conliacUire  dans  rinnno!  i linyie  ven- 
triculaire, de  sou  absence  dans  rbémorrbiijjie  limitée  và  l’épais- 
seur dcr.  héinispbères  ; je  me  contenterai  de  présenter  dans  la 
note  suivante  quelques  propositions  à ce  sujet  (1)  ; mais  je  dois 


(t)CVst  à M E.  Boiidet  ([u’appanieiU  la  première  ob.ser\ aiion  de  ce 
fait,  et  c’c.sl  au  passage  suivant  de  son  mémoire  sur  l’hc'morrliagie  des  nid- 
ninges,  (fue  je  dois  d’avoir  fixe' mon  allenüoii  .sur  la  coniraclure  dans  l’iir:- 
morrliagie  cérébrale  : « Toutes  les  fois,  dit  M Boudel,  que.  la  pulpe  céré- 
brale est  affectée  seule  dans  une  hémorrhagie,  tant  qu’il  ne  se  produit  pas 
d’inflammation  autour  du  foyc:r,  il  ne  .se  manifeste  pa.s  de  ountracture.Tou- 
les  les  fois  (pi’à  nue  lésion  de  la  pidjie  cérébrale,  il  se  joint  une  rupture  de> 
parois  des  ventricules  et  un  épaui.liemenl.  de  .‘’aeg  dans  ces  cavités  ou  à la 
surface  du  cerveau,  il  survient  de  I;:  cuiitraclure  ( p.  -It).  ) » 

C’est  de  celait,  que  je  crois  généralement  vrai,  que  découlent  les  sigues 
diagnostiques  de  l’iiémorrliagic  des  venlrieules. 

L’hémorrliagie  des  ventricules  (je  ne  iu’occiq>e  pas  ici  des  cas  rares  d'ex- 
balation  sanguine  à la  surface  de  ces  ca\ités,  sans  lésion  de  la  pulpe  céré- 
brale environnante  ) peut  se  faire  en  trois  temp.s  successifs;  lo  Epauclic- 
meul  da  sang  dans  la  substance  cérébrale  voisine  d’un  ventricule  j 2“  rup- 
ture du  foyer  dans  le  ventricule  correspondant  ; 3"  rupture  de  la  cloison  et 
épanchement  dans  cel  iidu  côté  oppo.sé. 

Les  deux  premiers  tcm[ïs  se  font  le  plus  souvent  a [>cu  près  simultanément  ; 
d’autres  lois  ce  sont  le.s  deux  derniers  qui  marchent  ensemble.  Quelquefois 
mais  plus  rarement,  tous  troi.'^  .se  produisent  eu  même  temps.  Or,  il  est  sou- 
vent facile  de  suivre,  d’après  la  marche  de  la  puraly.sie  et  le  mode  d’appa- 
rition de  la  conlraolure  , de  suivre  presque  de  l’œil  les  progrès  de  l’épan- 
chement dan.s  le  cerveau. 

Lor.sque  l’éiiancbemcnl  se  fait  dans  la  substance  voisine  d’un  ventricule  , 
il  y a résolution  du  côté  opposé  du  corps.  Lorstjue  ce,  foyer  vient  à ,se  rom- 
pre dans  le  ventricule  correspondant,  le  côté  paralysé  présente  de  la  con- 
tracture. Quand  le  .sang  pénètre  au-deià  de  la  cloison  , la  contracture  se 
montre  de  l’atare  côté  du  corps , mais  bienUk  après  la  résolution  devient 
générale. 

Telle  est  la  raarciie  régulière, 'pour  ainsi  dire,  de  l’hémorrliugie  des  ven- 
tricules et  des  symptômes  (jui  la  révèlent.  Mais  lorsijue  le  .sang  se  sera 
de  prime-abord  épanché  dans  un  ^ c.utrietde  . la  coulracture  se  montrera 
primitivement  du  côté  opposé  du  corps.  Lor.sque  la  cloison  .se  déchirera  dès 
la  rupture  du  foyer  primitif  dans  un  ventricule  , une  contracture  générale 
succtulera  (le  suite  .àl’liduiiplégie  qui  .s’élaii  montrée  dès  le  principe.  Lors- 
qu enhn  hcmorrhagie  fera  du  premier  coup  communiquer  le  foyer  qui  en 
aura  de  le  point  de  départ,  avec  les  deux  ;cnlrioulcs,..ily  aura  uitc  contrac- 
ture generale  dès  le  cotnmt  nceau'ul. 


JOG 


r AMOLLISSEMliNT  AIGU.  (sYMl’T.) 


(lire  jusqu’à  quel  point  la  connaissance  de  ce  fait  me  paraît  être 
de  nature  à éclairer  le  diagnostic  différentiel  du  ramollissement 
et  de  rhémorihagie. 

Si  l’iiémorrliagie  cérébrale  ne  détermine  de  contracture  que 
lorsque  le  sang  a pénétré  dans  l’intérieur  des  ventricules , 
comme  cette  condition  ne  peut  exister  sans  entraîner  les  signes 
d’une  compression  considérable  du  cerveau,  il  eu  resuite  que, 
lorsque  des  symptômes  apoplectiques  légers  se  montreront  ac- 
compagnés de  contracture,  il  sera  permis  de  diagnostiquer  un 
ramollissement. 

La  présence  de  la  contracture  éloignera  l’idée  d’une  liémor- 
rha  gie  limitée  à l’épaisseur  d’un  hémisphère  ; le  peu  d’intensité 
des  symptômes,  celle  d’une  -hémorrhagie  ventriculaire.  Il  fau- 
dra donc  admettre  un  ramollissement. 

Lorsqu’au  contraire  des  accidents  annonçant  une  compres- 
sion consitlcrable  ne  s’accompagneront  pas  de  contracture,  il 
sera  probable  que  l’on  aura  affaire  à un  ramollissement:  l’ab- 
sence de  contracture  ne  permettant  pas  de  supposer  une  hé- 
liionhagie  ventriculaire,  et  l’intensité  des  accidents  ne  sem- 
blant pas  en  rapport  avec  une  hémorrhagie  circonscrite. 

.Te  crois  que  l’on  trouvera  que  ces  signes  diagnostiques  ne 
sont  pas  très-rigoureux  et  sont  un  peu  minutieux  : ce  n’est  pas 
ma  faute,  et  je  voudrais  pouvoir  indiquer  mieux.  Cependant 
je  dois  dire  que,  dans  plusieurs  cas,  il  m’est  arrivé  de  dis- 
tinguer la  lésion  cause  d’une  attaque  apoplectique,  d’après  la 
réunion  des  seules  circonstances  dont  je  viens  de  présenter  la 
véritable  appréciation. 


Quoi  qu’il  en  soit  du  reste  de  la  valeur  que  Ton  veuille  atta- 
cher à cette  appréciation,  les  faits  sur  lesquels  elle  repose,  et 


Celle  eonlracUirc  se  montre  sous  des  formes  irès-varmes  : laulùt  c’csl 

• . . * «-n  C 


: laulôt  c’csl 


nUOMOSTlC. 


1!»7 


dont  je  puis  garantir  l’exactitude,  prouvent  que  si  la  contrac- 
ture peut  aider  en  quelque  chose  au  diagnostic  du  ramollisse- 
ment, ce  n’est  pas  par  sa  fréquence  dans  cette  maladie  (1). 

§ III. 

Lorsque  le  ramollissement  suit  la  forme  que  j’ai  appelée 
ataxique,  il  revêt  souvent,  par  la  combinaison  des  phénomènes 
de  paralysie  et  d’excitation,  un  caractère  particulier  et  qui  ne 
permet  pas  de  le  méconnaître.  Il  ne  peut  jamais  alors  être 
confondu  avec  riiémorrhagie  cérébrale  ; mais  ses  symptômes 
offrent  souvent  une  ressemblance  frappante  avec  ceux  de  la 
méningite. 

Dans  les  cas  où  le  ramollissement,  s’annonce  seulement  par 
du  délire,  comme  dans  nos  observations  3,  38,  39,  G9,  il  est 
assez  difficile  de  porter  un  diagnostic  certain  pendant  la  vie  : 
en  effet,  non-seulement  ce  symptôme  peut  appartenir  à d’autres 
maladies  que  le  ramollissement , mais  encore  il  arrive  fré- 
quemment que,  dans  des  circonstances  toutes  semblables  , il 
ne  laisse  aucune  trace  matérielle  sur  le  cadavre.  Ainsi,  chez  la 
femme  Magrod,  du  délire  survint  pendant  une  pneumonie  ; ce 
délire  n’offrait  rien  de  remarquable  ni  par  son  caractère  ni 
par  son  intensité;  sa  présence  ne  parut  pas  influer  d’une  ma- 
nière notable  sur  la  marche  de  l’afiection  de  poitrine  : à la 
mort,  on  trouva  un  ramollissement  avec  rougeur,  tuméfaction 
des  circonvolutions.  Mais  quel  est  le  médecin , ayant  observé 
un  certain  nombre  de  pneumonies  , qui  n’ait  rencontré  plus 
d’une  fois  un  semblable  délire,  sans  aucune,  lésion  appréciable 
des  centres  nerveux? 

Le  délire  est  quelquefois  le  seul  symptôme  que  fournisse, 
dans  la  méningite,  le  trouble  des  fonctions  du  cerveau.  Quel 
moyen  de  reconnaître  si  l’on  a affaire  à une  méningite  ou  à un 

(t)M.  Trousseau  a déjà  fait  une  remarque  semblable.  « PendaiU  le  lemp.s, 
disait-il  à une  de  scs  leçons  cliniques,  que  nous  passâmes  dans  le  service  de 
M.  Récamicr,  sur  quatorze  ou  quinze  malades,  nous  n’oliservâmcs  qu’un  seul 
cas  d’Jiémorrhagic,  tous  les  antres  étaient  des  ramollissemenis.  Dans  le  pre- 
mier cas,  la  paralysie  s’accompagna  de  contracture,  dans  les  autres  il  y 
avait  absence  de  ce  signe,  flaccidité  du  membre  , conservatiou  de  l’intelli 
genceetde  la  sensibilité.  » {GaztUe  des  hôiJi'taux,  2 févrierlSil.) 


198 


HAMOI,I,lSSE>tKNT  AIGU.  (SV.VIPT.) 

nimolliss''in(.'Ut  ? Je  n'ai  })as  observé  un  assez  grand  nombre 
de  ramollissements  caractérisés  seulemeirt  par  le  dtilire  , pour 
pouvoir  résoudre  cette  c)uestion  : cependant  je  crois,  d’après 
ces  faits  et  l’étude  de  ceux  que  je  n’ai  pas  observés  moi-même, 
que  les  phénomènes  généraux,  les  symptômes  fébriles  sont  en 
général  beaucoup  moins  prononcés  dans  le  ramollissement  et 
la  congestion  cérébrâie  que  dans  la  méningite  ; il  en  est  de 
même  de  certains  phénomènes  cérébraux  tels  que  la  cépha- 
lalgie, la  crainte  de  la  lumière,  etc,  ; le  délire  lui-même  est  ha- 
bituellement moins  intense,  plutôt  loquace  que  bruyant,  moins 
souvent  fiu-ieüx. 

J’ai  cependant  plusieurs  fois  reconnu  pendant  la  vie  le  ra- 
mollissement, dans  des  cas  de  ce  genre  , voici  pourquoi.  C’est 
que  la  méningite  aiguë  est  excessivement  rare  chez  les  vieil- 
lards : je  ne  l’ai  presque  jamais  rencontrée  à la  Salpêtrière,  au 
milieu  de  tant  d’affections  encéphaliques.  Tandis  cjue  chez  les 
enfants,  ces  affections  ont  une  tendance  constante  à se  localiser 
dans  les  enveloppes  et  la  superficie  de  l’encéphale  , il  est  certain 
que,  plus  on  avance  en  âge,  plus  elles  tendent  à se  développer 
dans  l’intérieur  de  la  pulpe  nerveuse  ellé-inême  ; et,  chez  les 
vieillards , onin’observe  presque  plus  de  lésions  aiguës  dans  les  mé- 
ninges. Aussi,  avais-je  pris  l’habitude,  à la  Salpêtrière,  de  ne  tenir 
presque  aucun  compte  de  ces  dernières,  quand  j’avais  à diagnos- 
tiquer une  affection  aiguë  de  l’encéphale.  Je  recommande  ce  fait 
d’observation,  lorsque  l’on  aura  affaire  à des  vieillards.  Du 
reste,  cette  forme  de  ramollissement  est  assez  rare,  surtout  chez 
les  adultes. 

Les  convulsions,  la  contracture,  le  tremblement  musculaire, 
les  douleurs  dans  les  membres,  l’affaiblissement  du  mouve- 
ment même,  se  montrent  trop  souvent  dans  la  méningite,  pour 
pouvoir  être,  par  eux-mêmes,  d’une  grande  utilité  dansledia- 
jfiiüslic  du  ramollissement. 

Néanmoins,  ces  phénomènes  acquièrent  une  assez  grande  va- 
leur, lorsqu’ils  sont  limités  à un  membre  ou  à un  coté  de  la  face 
iiu  de  tout  le  cot  ps;  car,  dans  la  méningite,  ils  sont  presque  tou- 
jours généraux.  Il  en  est  de  même  de  la  paralysie.  Lorsqu  elle 
se  montre  dès  le  coinmcitcement,  ([u’elle  demeure  limitée,  et 
siiitoul  qu’elle  ne  s’accompagne  pa.s  de  contracture,  onpeutà 


DIAGNOSTIC. 


199 


't' 

t»- 


peu  près  sûreuient  l’attribuer  à un  ramollissement.  Cependant 
il  y a encore  des  exceptions  à ce  fait  géne'ral. 

Ainsi  MM.  Parent  et  Martinet  appellent  l’attention  sur  l’hé- 
miplégie dans  l’arachnitis  ; <>  ils  l’ont  vue  plusieurs  fois,  disent- 
ils,  survenir  instantanément  dans  le  cours  de  la  première  pé- 
riode ou  de  la  seconde  ; mais  c’est  généralement  dans  l’arach- 
nitis  par  cause  externe  que  leurs  malades  l’ont  présentée  (1  ).» 

Ainsi,  dans  la  onzième  observation  de  méningite  de  M.  An- 
dral  (2),  on  voitchez  un  jeune  homme  de  dix-sept  ans  la  maladie, 
à la  suite  de  maux  de  tête,  débuter  par  un  affaiblissement  du 
membre  abdominal  droit;  cet  affaiblissement  augmente  gra- 
duellement, puis  gagne  le  membre  thoracique’;  plus  tard  sur- 
viennent de  l’assoupissement,  du  coma,  puis  des  mouvements 
convulsifs  de  la  face  ; à l’autopsie,  on  trouve  une  infiltration 
purulente  de  la  pie-mère,  égale  des  deux  côtés  ; mais  de  plus, 
une  congestion  partielle  de  l’extrémité  antérieure  de  l’hémis- 
phère gauche,  rougeur  uniforme  des  circonvolutions,  sans  mo- 
dification de  consistance.  Est-ce  à cette  dernière  circonstance 
qu’il  faut  attribuer  ce  développement  graduel  de  l’hémiplégie  , 
si  semblable  à ce  qui  se  passe  dans  le  ramollissement? 

Ajouterai-je  que  la  céphalalgie , les  douleurs  dans  les  mem- 
bres, l’exaltation  de  la  sensibilité  cutanée,  les  mouvements  con- 
vulsifs sont  plus  communs  dans  la  méningite  que  dans  le  ra- 
mollissement aigu  ? La  céphalalgie,  bornée  à un  côté  de  la  tête, 
que  l’on  a donnée  comme  un  signe  important  de  ramollissement, 
a même  été  notée  dans  deux  observations  de  méningite  de 
M.  Andral. 

Il  est  un  certain  nombre  de  cas  où  il  est  presque  impossible 
d’établir  des  règles  précises  pour  distinguer  la  méningite  du 
ramollissement,  de  même  que,  dans  des  faits  d’un  ordre  dif- 
férent , pour  distinguer  ce  dernier  de  l’hémorrhagie.  D’ahord 
il  y a quelquefois  en  même  temps  ramollissemenl  et  méningite. 
Mais  dans  les  cas  où  ces  deux  lésions  seront  isolées,  la  physio- 
nomie du  malade  et  un  peu  d’habitude  de  la  part  du  médecin 
aideront  plus  au  diagnostic  que  toutes  les  règles  que  l’on  aurait 
pu  tracer  d’avance. 

Je  disais  tout  à l’heure  que  la  forme  de  ramollissement  dont 


t)  Parent  et  Martinel  : dt  V Arachniiis^  page  60. 
(2)  Andral,  Clinique^  t.  v,  page  42. 


AK'.r.  (SVIIPT.) 

, nous  nous  occupons  niulntenant  no  pouvail  jamais  cire  con- 
onclue  avec  l’hémorr],agie.  Lorsqu’une  attaque  de  paralysie 
coïncide  avec  du  délire,  ou  surtout  a été  précédée  par  du  dé- 
lie, on  peut  être  certain  qu’il  s’agit  d’un  ramollissement.  Ce- 
pendant d faut  savoir  que,  dans  quelques  cas  d’hémorrhagie,  ou 
a vu  e malade,  lorsqu’il  reprenait  connaissance  à la  suite  d’une 
attaque  un  peu  prolongée,  présenter  du  délire  ; mais  ces  cas 
sont  infiniment  rares.  Maintenant  voici  un  fait  tout  exception- 
nel : c est^  une  hémorrhagie  cérébrale  donnant  lieu  à des  con- 
vulsions épileptiformes.  Je  ne  connais  aucun  autre  fait  de  ce 
genre.  Un  homme  de  soixante-neuf  ans,  ayant  eu  deux  fai- 
bles attaques  d’apoplexie  et  sujet  aux  étourdissements  avec 
perte  de  connaissance,  fut  pris  de  convulsions  épileptiformes 
partout,  surtout  à droite,  ûéeuhitus  dorsal  incliné  à droite, 
.secousses  vives  des  muscles,  saccadées,  avec  des  rémissions  \a- 
liable»;  salive  écumeuse  à la  bouche.  Les  convulsions  durent 
quatie  heures,  puis  coma,  stertor,  rigidité  des  membres.  Mort 
vingt-cinq  heures  apres  le  deliut.  Certaine  quantité  de  sérosité 
dans  la  pie-mère  ; l’hémisphère  gauche  se  rompt  dans  les  mains 
on  laissant  échapper  un  caillot  de  sang  entre  les  lobes  posté- 
rieur et  moyen  : par  celte  ouverture,  on  pénètre  dans  une 
vaste  poche  remplie  de  sang  coagulé,  et  ocupant  toute  la  paroi 
supérieure  et  externe  du  ventricule  gauche.  Dans  l’épaisseur 
de  la  couche  corticale,  une  dizaine  de  petits  grumeaux  de  sang 
épars  çà  et  là,  du  volume  d’une  tête  d’épingle,  de  la  même 
manière  qu’en  oflVaicnt  les  parois  du  foyer  hémorrhagique  (Ib» 

V 

(1)  Cra\aL<:,  Revue  medicah,  i8?7.  t.  i,  page  '102. 


DEUXIÈME  PAF»TIE. 

R A M 0 L L I s s E M E N T C H n 0 N I Q U E. 


CHAPITRE  VI. 

ANATOMIE  PATHOLOGIQUE  DU  KAMOLLISSEMÎiNT  CHRONIQUE. 

Le  ramollissement  chronique  se  présente  sous  des  formes  ana- 
tomiques bien  distinctes  et  qu’il  est  possible  de  rattacher  à des 
périodes  successives. 

Dans  la  première  périoile  que  l’on  peut  appeler  ramollissement 
à Vêtat pulpeux , ce  àevmer  ne  diffère  à peu  près  du  ramollissement 
aigu  que  par  l’absence  de  rougeur,  et  consiste  comme  lui  en  une 
simple  diminution  de  consistance  du  parenchyme  nerveux.  A 
cette  forme,  à laquelle  se  peuvent  rattacher  presque  toutes  les 
descriptions  de  ramollissement  cjue  nous  ont  transmises  les 
auteurs,  succèdent  des  altérations  de  texture  très-diverses  et 
très- variées,  des  désorganisations  dont  la  succession  me  paraît 
avoir  jusqu’ici  presque  complètement  échappé  à l’attention  des 
anatomo-pathologistes. 

La  deuxième  période  se  montre  sous  deux  formes  différentes, 
suivant  que  la  maladie  a son  siège  dans  la  couche  corticale  des 
circonvolutions  ou  dans  le  reste  du  cerveau,  soit  la  substance 
médullaire,  soit  la  substance  grise  centrale. 

A.  A la  surface  des  circonvolutions,  ce  sont  des  plaques  for- 
mées d’un  tissu  jaune,  d’une  épaisseur  variable,  dont  la  texture 
ressemble  à celle  d’une  membrane,  et  dont  la  densité  est  sou- 
vent supérieure  à celle  de  la  substance  corticale  saine  : c’est-à- 
dire  que,  très-mollasses  au  toucher,  elles  résistent  souvent  bien 
davantage  ou  à la  projection  d’un  jet  d’eau , ou  à la  pression 
avec  le  doigt,  ou  enûn  au  tiraillement  en  tous  sens  ; on  peut  les 
appeler  ^/laques  jaunes  des  circoiwolulions. 

I».  Dans  les  parties  les  plus  profondes,  il  se  fait  une  soi  le  île 
le.sorption  de  la  pulpe  nerveuse  ramollie,  que  paraît  remplacer 
mi  tissu  cellulaire  plus  ou  moins  serré,  trame  celluleuse  de 
I oi  ganc,  dont  les  mailles  sont  infiltrées  ou  forment  des  cavités 


202  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE.  (anAT.  PATH.) 

remplies  par  un  liquide  li'ouble,  blanchâtre  , désigné  par 
M.  Cruveilliier  et  M.  Decliambre  sous  le  nom  de  lait  de  chaux. 
Je  propose  d’appeler  celte  forme  de  ramollissement  infiltration 
celluleuse. 

Enfin  la  troisième  période  est  caractérisée  par  la  disparition 
de  la  pulpe  ramollie,  ou  plutôt  désorganisée,  par  des  déperdi- 
tions de  substance  que  l’on  doit  regarder  comme  le  résultat 
d’une  tendance  incessante  du  ramollissement  cérébral.  C’est  là 
la  période  ultime  de  la  maladie  : on  pourrait  l’appeler  période 
ulcéreuse,  si  cette  expression  était  de  nature  à s’appliquer  éga- 
lement aux  diverses  lésions  cju’elle  produit  ; car,  s’il'  en  résulte 
de  véritables  ulcérations  à la  surface  du  cerveau  , elle  donne 
lieu  aussi  à des  cavités,  à des  pertes  de  substance  dans  l’inté- 
rieur de  cet  organe,  que  l’on  ne  saurait  appeler  ainsi,  bien 
qu’elles  se  produisent  exactement  de  la  même  manière. 

Il  est  un  fait  très-remarquable  : c’est  qu’à  chacune  de  ces 
périodes,  le  ramollissement  peut  s’arrêter  indéfiniment,  sa 
marche  demeurer  stationnaire,  et  subir  ainsi  une  sorte  de  gué- 
rison analogue  à celle  des  foyers  apoplectiques  et  à laquelle  se 
rapporte  parfaitement  la  marche  des  symptômes.  Je  me  con- 
tente d’indiquer  ici  d’une  manière  générale  ce  fait;  à l’élude 
duquel  je  consacrerai  uu  chapitre  particulier. 

Quant  à Vinduration  de  la  pulpe  cérébrale  ramollie,  j’y  atta- 
che ici  beaucoup  moins  d’importance  que  ne  l’a  fait  M.  Lalle- 
mand, parce  qu’elle  est  certainement  bien  moins  commune  dans 
les  ramollissements  spontanés  que  j’ai  surtout  en  vue,  que  dans 
les  ramollissements  suites  de  lésions  traumatiques  ou  des  os 
du  crâne,  que  ce  professeur  a réunis  en  grand  nombre  dans  ses 
lettres.  Ainsi,  j’ai  rarement  observé  d’indurations  semblables  a 
la  plupart  de  celles  dont  il  a rapporte  des  exemples  , mais  j ai 
rencontré  l’induration  partielle  et  coinine  accessoire,  à toutes 
les  époques  du  ramollissement,  ainsi  dans  le  ramollissement 
pulpeux,  ainsi  à l’entour  des  infiltrations  celluleuses  ou  de  ces 
pertes  de  substance  auxquelles  aboutissent  en  général  ces  der- 
nières et  les  placjues  jauires  des  circonvolutions. 

Nous  avons  dit  que  la  rougeur,  caractère  constant  du  ramol- 
lissement aigu,  devenait  par  son  absence,  sauf  quelques  raies 
exceptions,  un  des  signes  distinctifs  du  ramollissement  chro- 
nique. Dans  le  plus  grand  nombre  des  cas,  cependant,  elle  laisse 


SUPPURATION  DU  CERVEAU. 


203 


dans  ce  dernier  des  traces  de  son  cxislence  primitive , sous 
forme  d’une  coloration  jaune  à peu  près  constante  dans  la 
substance  grise,  surtout  celle  des  circonvolutions,  très-fréquente 
dans  la  substance  blanche.  On  conçoit  l’importance  que  l’on 
doit  attacher  à ce  phénomène  qui  nous  permet,  à une  époque 
même  très-éloignée,  de  retrouver  des  indices  certains  des  élé- 
ments qui  constituaient  le  ramollissement  à son  début. 

Nous  allons  étudier  successivement  chacune  des  trois  périodes 
que  nous  venons  d’établir,  et  nous  consacrerons  à leur  des- 
cription des  détails  que  justifiera  peut-être  leur  nouveauté. 


ARTICLE  I". 

PREMIÈRE  PÉRIODE  DU  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE. 

( Ramollissement  pulpeux.  ) 

Lorsque  le  ramollissement  passe  à l’état  chronique,  il  consiste 
d’abord,  comme  le  ramollissement  aigu,'  en  une  simple  diminu- 
tion de  consistance  de  la  pulpe  nerveuse,  mais  il  s’en  distingue 
par  l’absence  de  rougeur. 

Le  laniollissement  ou  l’inflammation  de  la  pulpe  nerveuse 
peut  s’accompagner  de  suppuration  ; mais  cette  dernière  est  fort 
rare,  en  dehors  de  deux  circonstances  : les  lésions  traumatiques 
du  cerveau  et  les  altérations  des  os  du  crâne.  L’infiltration  pu- 
rulente du  cerveau  ne  se  voit  surtout  presque  jamais  à l’état 
chronique  : lorsqu’une  encéphalite  suppurante  se  prolonge,  le 
pus  se  réunit  en  abcès  , et  l’on  trouve  alors  des  collections  de 
pus,  tiès-faciles  à reconnaître,  crémeux,  d’un  jaune  verdâtre  ou 
d’un  blanc  grisâtre,  semblable  à celui  du  tissu  cellulaire. 

On  est,  je  crois  , aujourd’hui  généraltmeui  d’accord  sur  ce 
point,  que  le  professeur  Lallemand  se  trompait  lorseju’il  voyait 
du  pus  dans  presque  tous  les  ramollissements.  JNous  savons 
d’abord  que  la  couleur  jaune  est  l’imlice  de  la  présence  du 
sang,  et  non  pas  du  pus  Or,  comme  c’est  sur  l’interprétation 
(le  l'origine  de  cette  couleur  jaune  qu’est  basée  prescjuc  toute 
l’argumentation  de  cet  auteur,  et  (}ue  c’est  souvent  uniquement 
parce  qu’ils  présentaient  une  couleur  jaune  qu'il  soutient  que 


?04  T^AM0LL1SSEAIE>T  ClinON’lQ'L'E.  (AXAT.  TATII.) 

(les  rgmollissements  contenaient  on  avaient  contenu  du  pus,  on 
voit  qu’il  est  impossible  d’admettre  une  conclusion  dont  la  pré- 
misse est  elle-même  erronée.  On  ne  considérera  pas'davantage 
comme  un  indice  de  suppuration  la  teinte  blanche,  ou  plutôt 
l’absence  de  coloration  d’un  ramollissement.  Il  y a du  reste  une 
contradiction  évidente  entre  ces  diverses  assertions  de  M.  Lal- 
lemand, Si  le  pus  était  capable  de  communiquer  à la  pulpe 
nerveuse  une  teinte  jaune  aussi  prononcée  que  celle  qu’il  lui 
attribue  , comment  pourrait-il , dans  certaines  circonstances , 
exister  dans  la  substance  médullaire  sans  en  altérer  aucune- 
ment la  blancheur  ? 

Il  paraît  y avoir  un  moyen  tout  à fait  propre  à édifier  sur  ce 
sujet  : c’est  l’étude  microscopique  du  cerveau  ramolli.  Il  sem- 
ble au  premier  abord  que  rien  ne  doive  être  plus  facile  que  de 
reconnaître , à l’aide  du  microscope,  si  un  ramollissement  con- 
tient ou  non  du  pus.  Nous  ne  po.ssédons  encore  que  peu  de 
données  sur  ce  point. 

M.  Gluge  a publié  un  travail  intitulé  : Piecherches  microsco- 
piques et  expérimentales  sur  le  ramollissement  du  cerveau  (1).  Le 
nom  de  son  auteur  vend  ce  travail  digne  d’attention  , bien  que 
les  faits  qu’il  renferme  ne  soient  pas  très-nombreux  : on  me 
permettra  de  m’y  arrêter  quelques  instants.  Je  le  crois  d’autant 
plus  nécessaire  que  les  conclusions  de  ce  travail  n’étant  nulle- 
ment d’accord  avec  les  faits  qui  y sont  rapportés , nous  nous 
trouvons  obligé  de  laisser  de  côté  les  premières  pour  ne  nous 
occuper  que  des  seconds. 

M.  Gluge  présente  d’abord  les  principaux  résultats  de  ses  re- 
cherches sur  l’inflammation,  et  il  établit  : cjue  le  premier  degré  de 
l’inflammation  ou  congestion  est  caractérisé  par  la  réplétion  des 
vaisseaux  capillaires  et  le  ralentissement  de  la  circulation  ; le 
second  degré,  qu’il  appelle  engorgement,  se  caractei  ise  pai  1 ag- 
glomération des  globules  sanguins  qui  se  réunissent  au  nombie 
de  trente  ou  quarante,  et  arrêtent  la  circulation  en  obstinant 
les  vaisseaux.  Ces  agglomérations,  de  couleur  noiratie,  se  pie- 
sentent  sous  là  forme  de  grands  globules;  on  sépare  facilement 
]iar  la  compression  les  globules  (jui  les  composent.  JVI.  Gluge 
nomme  ces  covpwscvXes'glohules  composés.Ws  ont  1,30  de  milli- 

(1)  Gluge,  VKxpdrimcc,  30  avril  1810  ; Extrait  des  rfrehires  de  la  méde- 
cine belge,  janvier  cl  février  jSlO. 


SLi'riiuAxio*\  m;  cEuviiAi:. 


!20o 


mètre  et  plus  de  diamètre.  Comme  les  globules  de  pus  consti- 
tuent des  corpuscules  sphériques  de  1,100  de  millimètre  avec 
des  points  noirâtres,  il  est  impossible  de  confondie  ces  coips 
qui  appartiennent  à des  périodes  très-différentes  de  1 inflamma- 
tion. L’auteur  indique  brièvement  les  autres  degrés  de  1 inflam- 
mation, où  l’on  voit  la  fibrine  transsuder  dans  les  tissus  ( troi- 
sième degré,  ex.  hépatisation  rouge);  le  pusse  former  (quatrième 
degré),  etc. 

Il  dit  ensuite  que  la  substance  médullaire  du  cerveau  est 
composée  de  corps  cylindriques,  blanchâtres,  non  interrompus, 
élastiques,  et  qui  forment  par  cette  élasticité  même  des  renfle- 
ments assez  réguliers  de  1,100  de  millimètre  de  diamètre;  des 
réseaux  nombreux  de  vaisseaux  capillaires  remplissent  les  in- 
tervalles qui  séparent  ces  caiumx  nerv'eux.  La  substance  corti- 
cale contient  des  canaux  semblables  aux  précédents,  mais  plus 
étroits  et  entremêlés  de  corps  globuleux  pointillés^  et  des  vais- 
seaux capillaires  plus  nombreux. 

M.  Gluge  rapporte  ensuite  onze  cas  de  ramollissement  céré- 
bral, mais  dont  il  ne  présente  guère  que  les  circonstances  ana- 
tomiques, et  encore  avec  beaucoup  de  brièveté,  il  divise  les  ra- 
mollissements en  deux  classes  ; dans  l’une  ils  présentent  une 
teinte  rouge  jaunâtre  ; dans  l’autre  une  couleur  parfaitement 
blanche.  Dans  toutes  les  observations,  les  canaux  nerveux  sont 
trouvés  en  fragmenls,  comme  brisés.  Dans  sept  cas  il  y avait  en 
outre,  de  ces  globules  composés  dont  il  a été  parlé  plus  haut,  et 
dont  je  reproduis  la  description  telle  qu’elle  est  rapportée  dans 
la  première  observation  : les  fragments  de  canaux  nerveux  sont 
mêlés  de  corpuscules  de  la  forme  suivante  : spliériques  , peu 
transparents,  dix  fois  plus  grands  que  les  globules  de  pus;  ils 
sont  composés  par  des  globules  beaucoup  plus  petits,  comme  on 
peut  s’en  assurer  par  une  légère  compression,  de  manière  que 
ces  corps  présentent  une  agglomération  de  petits  globules.  Ces 
derniers  isolés  sont  sphériques  et  transparents. 

Ces  divers  ramollissements  n’étaient  point  traumatiques  : ils 
étaient  de  dates  fort  variées,  et  sont  indiqués  les  uns  rouges  ou 
rouge-grisâtres,  les  autres  sans  couleur  particulière. 

Dans  un  casf  obs.  8)  on  ne  trouva  pas  de  globules  composés  : 
l’auteur  se  contente  d’iiuliquer  cette  circonstance.  Le  ramollis- 
sement était  rougeâtre  et  jaunâtre,  et  datait  de  quatorze  jours. 


206 


R,VMOLLlSSE.\tENT  CUilOMQUE.  (anAT.  l’ATjl.j 

Dans  deux  observations  senlenient  la  présence  de  f;lobules  de 
pus  a été  constatée.  Dans  l’une  d’elles  ( obs.  7),  il  y avait  un 
double  l'ainollisseinent  dans  le  cerveau  et  dans  le  cervelet.  Le 
r imollisseinent  du  cerveau  était  fort  étendu  et  contenait  des 
globules  composés  sans  globules  de  pus;  celui  du  cervelet,  beau- 
coup plus  petit,  rouge-gris,  présentait  en  outre  beaucoup  de 
globules  de  pus.  Le  malade  avait  été  observé  pendant  dix-buil 
jours  , mais  on  manquait  de  renseignements  sur  ce  qui  s’était 
passé  auparavant.  Dans  l’observation  lO,  il  y avait  un  ramollis- 
sement blanc  d’une  grande  partie  du  cerveau,  avec  vive  injec- 
tion des  capillaires;  les  fragments  de  canaux  nerveux  étaient 
mêlés  d’un  nonibre  immense  de  globules  de  pus. 

Enfin,  dans  la  onzième  observation,  il  s’agit  d’un  ramollisse- 
ment traumaticjue  et  mécanic[ue,  contusion  du  cerveau  avec 
épanchement  de  sang , à la  suite  d’une  chute  d’un  premier 
étage.  L’époque  de  la  mort  n’est  pas  indiquée.  On  trouve  des 
fragments  de  canaux  nerveux  et  de  vaisseaux  capillaires  , sans 
globules  composés  et  sans  globales  de  pus. 

M.  Gluge  a examiné  les  parois  ramollies  de  foyers  apoplecli- 
cpes,  et  il  a reconnu  qu’elles  présentaient  des  fragments  de  ca- 
naux nerveux,  mais  sans  globules. 

L’auteur  a cherché  à développer  des  ramollissements  artifi- 
ciels chez  des  animaux,  et  il  a réussi  en  enfonçant  des  épingles 
dans  la  tète  de  lapins  : au  bout  de  huit  à quinze  jours  ces  ani- 
maux succombaient  avec  des  convulsions,  de  la  paralysie,  etc., 
et  l’on  trouvait  la  substance  cérébrale  ramollie , infiltrée  de 
sang,  présentant  des  fragments  de  canaux  nerveux  et  des  glo- 
bules composés,  mais  point  de  globules  de  pus. 

Telle  est  l’analyse  exacte  des  observations  faites  par  M.  Gluge. 

Des  circonstances  quelles  présentent,  on  peut  conclure  : que 
la  lésion  élémentaire,  dans  le  ramollissement,  serait  la  rupture 
des  canaux  nerveux  ; que  la  présence  des  globules  composés  ou 
inflammatoires  dans  1a  substance  ramollie  sciait  ensuite  le  phé- 
nomène le  plus  commun;  que  les  globules  de  pus  ne  se  rencon- 
treraient cjue  rarement. 

Voici  maintenant  comment  M-  Gluge  formule  lui-mème  ses 
conclusions  : 


SUPPURATION  DU  CERVEAU-  207 

< 1“  Le  ramollissement  blanc  offre  dans  un  grand  nombre  de 
cas  du  pus  ; , 

% Le  ramollissement  coloré , sans  épanchement  de  sang  , 
offre  les  produits  d’un  des  premiers  degrés  de  l’inflammation  , 
formation  de  globules  composés  ; 

3“  Le  ramollissement  coloré  avec  épanchement  de  sang  peut 
oflrir  les  productions  précédentes  ou  seulement  les  imbibiiions 
mécaniques  du  sérum  sanguinolent.  Ce  qui  est  le  cas  ordinaire 
dans  les  apoplexies  récentes.  » 

La  première  conclusion  n’est  nullement  d’accord  avec  les 
faits  contenus  dans  ce  mémoire  : sur  onze  observations,  il  n’a  été 
trouvé  que  deux  fois  du  pus.  Dans  l’un  de  ces  cas  (obs.  10  ),  le 
ramollissement  était  blanc  , bien  que  les  vaisseaux  capillaires 
fussent  extrêmement  injectés  ; dans  l’autre  (obs.  7),  il  é ait 
rouge-grisâtre.  Je  ne  vois  rien  là  qui  prouve  que  le  ramollisse- 
ment blanc  oftre  souvent  du  pusj  d'autant  plus  même  qu’un 
ramollissement  où  les  capillaires  sont  extrêmement  injec~ 
tés  (obs.  10)  n’est  nullement  ce  que  les  auteurs  ont  décrit  sous 
le  nom  de  ramollissement  blanc. 

J ai  fait  avec  mon  ami  le  docteur  Alfred  Becquerel  quelques 
expériences  dont  je  crois  devoir  consigner  ici  le  résultat. 

Nous  avons  pris  de  la  substance  cérébrale  saine,  et  nous 
l’avons  examinée  au  microscope  (avec  un  gro.ssissement  de 
250  fois) , délayée  avec  le  bout  du  doigt  dans  de  l’eau  distillée. 
On  voyait  d’abord  des  fragments  de  substance  cérébrale  formant 
ou  des  nuages  ou  des  points  irrégulier.s  ; deux  tigres  irrégulières, 
lineaiies,  bien  marquées,  traversant  le  champ  du  microscope  , 
formées  sans  doute  par  des  tubes  nerveux  ; quelques  globules 
de  sang,  et  aussi  quelques  globules  plus  larges  que  les  derniers, 
demi-opaques,  comme  pointillés  à h- ur  surface , irréguliers  sur 
leurs  bords  , framboisiés  , tout  à fait  semblables  à des  globules 
de  pus. 

En  ajoutant  quelques  gouttes  d’ammoniaque,  on  n’a  rien 

changé  à cet  aspect.  ' 

Nous  avons  trituré  la  même  substance  cérébrale  à l’aide 
d’une  molette  de  verre  ; après  une  trituration  légère,  il  n’y  avait 
aucun  changement.  Après  une  forte  trituration,  on  n’apercevait 
plus  aucun  de  ces  globules  semblables  aux  globules  de  pus  ; 
mais  seulement  des  fragments  peu  nombreux  de  formes  très- 


208 


rx\MOLLlSàEJ\tî;i\T  (.VNAT.  l'ATIl.) 

inégulièros,  semblant  des  fraf^meiits  de  substance  cérébrale  sé- 
parés ou  réunis  par  la  compression  ; plus  de  tubes  nerveux. 

Ce  que  nous  avions  obtenu  par  une  forte  trituration,  nous 
l’avons  également  observé  en  comprimant  la  substance  cérébrale 
simplement  délayée  au  moyen  d’une  lame  mince  de  verre  su- 
perposée : disparition  des  .«lobules,  fragments  irréguliers. 

]\ous  avons  pris  du  pus  conservé  dans  de  l’alcool,  et  aussi  du 
pus  récemment  retiré  d’abcès  ; nous  l’avons  mélangé  à de  la 
substance  cérébrale  saine  et  simplement  délayée,  et  nous  avons 
constaté  l’analogie  complète  de  ces  globules  avec  ceux  de  la 
substance  non  mélangée  de  pus  : seulement  ils  étaient  en  plus 
giandnombre.  Nous  avons  trituré  fortement  avec  une  molette 
et  nous  avons  vu  disparaître  les  vrais  globules  de  pus  comme 
dans  l’expérieucc  précédente  ; même  résultat  par  suite  de  la 
compression  à l’aide  d’une  lame  de  veri  e. 

Nous  avons  répété  à plusieurs  reprises  ces  expériences  et  nous 
avons  toujours  obtenu  les  memes  résultats  : seulement  la  tritu- 
ration ne  faisait  pas  toujours  aussi  complètement  disparaître  les 
globules  de  la  substance  saine. 

Nous  avons  une  fois  ajouté  de  la  potasse  causticjue  à de  la 
substance  cérébrale  saine  et  dans  laquelle  nous  avions  constaté 
la  présence  de  globules  semblables  aux  globules  de  pus;  cette 
addition  lit  disparaître  les  globules.  Nous  fîmes  également  dis- 
paraître les  globules  purulents  eu  mélangeant  de  la  potasse  avec 
du  pus. 

Nous  n’avons  pas  obtenu  de  résultats  notablement  dilîérents 
avec  la  substance  corticale  et  la  médullaire.  Nous  avons  opéré 
sur  des  cerveaux  diftérents,  pris  par  moi  à la  Salpêtrière,  sains, 
quelc|uefois  un  peu  injectés;  nous  avons  examiné  des  fragments 
où  l’œil  nu  n’apercevail  point  de  vaisseaux  injectés  ; nous  y 
avons  également  trouvé  des  globules  sanguins  et  jntrifermes. 
Nous  n’avons  examiné  que  la  substance  médullaire  des  hémis- 
phères cérébraux,  et  la  substance  corticale  des  circonvolutions. 

Il  semble  résulter  de  ces  observations  que,  si  la  substance 
cérébrale  saine  renferme  des  corps  tout  à fait  semblables  à des 
globules  de  pus,  ou  ne  doit  admettre  qu’avec  beaucoup  de  k'- 
serve  la  jtrésence  de  véritables  globules  de  pus  dans  la  sub- 
stance cérébrale  ramollie  ; cependant  je  a’eii  veux  tirer  iuicunc 
condusioii.  J’ai  dù  lapporicr  cc  (jue  j’avais  vu  cl  comme  je 


SUPPÜRAXlOxN  un  CERVEAU. 


,2üy 


l’avais  vu  ; mais  je  n’en  veux  encore  rien  conclure  , parce  que 
ces  expériences  ne  sont  pas  encore  assez  nombreuses,  parce 
que  l’observation  microscopique  trompe  très-facilement  ceux 
surtout  qui  n’en  ont  pas  une  extrême  habitude  ; enfin  , parce 
que  je  n’ose  trop  m’attacher  à des  résultats  aussi  différents  de 
ceux  obtenus  jusqu’ici  par  les  différents  micrographes,  qui  ont 
étudié  la  structure  de  la  substance  nerveuse  (1). 

Nous  avons  vu  plus  haut  que  la  rougeur  du  ramollissement 
aigu,  résultat  de  la  congestion  qui  précède  toujours  ce  dernier, 
était  constituée  soit  par  une  simple  injection  vasculaire  , soit  par 
une  infiltration  de  sang  ; nous  avons  vu  également  que  l’infiltra- 
tion sanguine  se  montrait  surtout  à un  degré  quelconque  dans  la 
substance  grise  et  particulièrement  dans  celle  des  circonvolutions. 

Il  résulte  de  là  que  lorsque  le  l amollissement,  dans  sa  période 
aiguë,  aura  été  le  siège  d’une  infiltration  sanguine,  il  en  con- 
servera pour  trace,  à l’état  chronique,  une  teinte  jaune  d’autant 
plus  prononcée  que  cette  infiltration  aura  été  plus  considé- 
rable; mais  lorsqu’il  se  sera  accompagné  d’une  simple  injection 
vasculaire,  celle-ci  disparaissant  toujours  au  bout  d’un  certain 
temps,  le  tissu  ramolli  devra  recouvrer  sa  couleur  normale. 

A mesure  qu’un  ramollissement  avance  en  âge,  non-seule- 
ment l’injection  inflammatoire  du  début  disparaît,  mais  la  vas- 
cularisation elle-même  diminue,  les  vaisseaux  cessent  souvent 
d’y  pouvoir  être  distingués,  et  dans  quelques  cas  ils  semblent 
dispaiaitre  en  effet  complètement.  C’est  à cela  sans  doute 
qu’est  dû  ce  fait  général,  que  le  ramollissement  chronique  ne 
présente  jamais  de  rougeur,  à part  toutefois  quelques  excep- 
tions infiniment  rares  ; c est  à la  même  circonstance  qu’est  duc 
la  rareté  des  hémorrhagies  dans  le  sein  de  ces  ramollissements. 
Il  m’a  paru  que  c’était  d’abord  au  centre  de  l’altération  que 
disparaissaient  les  vaisseaux  : de  là  probablement  la  teinte 
blanc  mat  que  présente  souvent  la  partie  centrale  du  ramollisse- 
ment pulpeux,  tandis  qu’à  une  époque  plus  avancée,  on  trouve 


(I)  Je  n’ai  rien  vu  de  semblable  aux  gros  globules  que  Müller,  d'aiirès  Va- 
lenlm,  a ddcrils  dans  la  substance  grise  du  cerveau,  de  la  moelle  épinière  et 

’■  ? ''"T  la  substance  blanche, 

r r ^ sy.iôrne  navcux,  t.  i , page  ‘.îi,  1840.)  Voye/.  à In 

rébral.''"'^*'’  "ii<;o. scopique  du  nuuglli;^cmej’i  cc- 


/ 


21Ü  RAMOLLISSEJIENÏ  CHRONIQUE.  ( ANAT.  PATH.) 

encore  des  petits  vaisseaux  membraneux  et  déliés  sur  les  pa- 
rois des  infiltrations  celluleuses  ou  des  cavités  qui  peuvent  suc- 
céder à ces  dernières.  Cependant  il  arrive  quelquefois  de  voir 
d’anciens  ramollissements  traversés  par  un  lacis  vasculaire 
formé  de  vaisseaux  longs  et  volumineux,  se  continuant  dans 
les  parties  saines  et  s’entrecroisant  ; mais  dans  leurs  intervalles, 
on  ne  rencontre  point  de  ces  petites  ramifications  qui  témoignent 
de  la  vascularisation  propre  d’un  tissu. 

C’est  encore  à cette  absence  de  vascularisation  qu’il  faut  at- 
tribuer la  création  du  ramollissement  blanc  des  auteurs,  comme 
espèce  à part,  non  inflammatoire,  et  distincte  du  ramollisse- 
ment rouge,  bien  qu’il  ne  soit  pas  difficile  de  démontrer  sa  fi- 
liation avec  ce  dernier.  Mais  c’est  qu’il  faut,  ainsi  que  l’ont  dit 
Cullen  et  Portai,  faire  plus  attention,  si  l’on  veut  apprécier  la 
nature  d’une  affection,  au  début  de  la  maladie  qu’aux  résultats 
fournis  par  l’examen  cadavérique  à une  époque  tardive. 

M.  Dechambre  s’est,  du  reste,  élevé  très-justement  contre 
cette  dénomination  de  ramollissement  blanc,  par  laquelle  on 
semble  supposer  que  le  ramollissement  de  la  substance  grise 
puisse  prendre  une  teinte  semblable  : il  est  certain  que  le  ra- 
mollissement blanc  des  auteurs  est  tout  simplement  le  ramol- 
lissement sans  changement  de  couleur,  gris  dans  la  substance 
corticale  comme  il  demeure  blanc  dans  la  medullaiie  (1). 

Le  ramollissement  chronique  pulpeux  se  rencontre  dans 
toutes  les  parties  du  cerveau  ; mais  il  s’observe  plus  rarement 
qu’ailleurs  à la  superficie  des  circonvolutions,  parce  que  leur 
couche  corticale  est.  de  tous  les  points  de  cet  organe,  celui  qui 
subit  le  plus  promptement  les  tranformations  consécutives  pro- 
pres au  ramollissement  chronique  (2).  Voisin  quelquefois  d un 
ramollissement  aigu,  il  se  montre  très-souvent  aussi  sur  les 
limites  de  ramollissements  plus  avancés  et  transformés  en  pla- 
ques jaunes,  infiltration  celluleuse,  etc. 

Sa  consistance  est  toujours  très-molle,  plus  encore  au  centre 
qu’à  la  circonférence,  coulant  quelquefois  comme  une  bouillie 
presque  liciuide,  de  manière,  s’il  est  situé  profondément , que 
l’on  sente  à la  superficie  du  cerveau  une  fluctuation  signalant 
une  collection  de  pus  ou  de  sang.  J’ai  suffisamment  insiste  , a 

(1)  Compendium  de  mdd.  pral.,  t.  n,  page  <“18. 

(2)  Voyeï  plus  loin.  Plaques  jaunes  de  circonvolutions. 


I 


RAM0LLIi>5EMi.«T  GÉNÉRAL.  îll 

propos  du  raœollisseinent  aigu,  sur  les  moyens  qui  sont  pro= 
près  à ëludier  le  degré  de  consistance  du  tissu  cérébral  ra- 
molli (1).  J'ajouterai  seulement  qu’un  des  caractères  qui  le  dis- 
tinguent du  ramollisseineiit  récent , est  de  se  laisser  beaucoup 
plus  facilement  détacher  en  lambeaux  sous  un  filet  d’eau. 

Nous  avons  dit  que  le  ramollissement  pulpeux  conservait 
quelquefois  la  couleur  naturelle  au  tissu  cérébral  : on  pourra 
s’assurer  avec  un  peu  d’attention  que  cette  circonstance  se 
rencontre  fort  rarement  dans  la  substance  corticale  et  surtout 
dans  celle  des  circonvolutions.  Sa  couleur  la  plus  commune  , 
presque  constante  dans  ces  derniers  points,  est  la  couleur  jaune  : 
quelquefois  celle-ci  est  très-prononcée,  d’autres  fois  on  aperçoit 
seulement  un  œil  jaunâtre  qu’un  examen  superficiel  peut  aisé- 
ment faire  négliger. 

Le  ramollissement  pulpeux  offre  parfois  une  couleur  gri- 
sâtre; celle-ci  est  presque  toujours  l’indice  de  son  passage  à 
l’état  d’infiltration  celluleuse.  J’ai  cité  précédemment  les  quatre 
seuls  faits  que  je  connaisse  de  ramollissement  pulpeux  chro- 
nique, accompagné  de  rougeur.  On  a noté  encore,  mais  bien 
rarement,  dans  le  ramollissement  la  couleur  brune  (Morgagui), 
chocolat  (.âiîdral),  etc.  Ces  diverses  nuances  me  paraissent  le 
résultat  d’anciennes  infiltrations  de  sang. 

Pour  son  étendue  comme  pour  son  siège,  le  ramollissement 
chronique  pulpeux  présente  toutes  les  variétés  du  ramollisse- 
ment aigu  ; il  faut  noter  cependant  qu’on  ne  lui  voit  guère  oc- 
cuper un  aussi  large  espace  que  le  peut  faire  Ce  dernier,  les 
ramollissements  aigus  très-étendus  déterminant  habituellement 
la  mort  avant  d’arriver  à l’état  chronique. 

On  paraît  cependant  avoir  observé  quelquefois  des  ramollis- 
sements de  la  totalité  de  l’encéphale  ; et,  suivant  M.  Dechambre 
ils  se  montreraient  assez  souvent  sous  forme  chronique. 

Cette  question  du  ramollissement  général  du  cerveau  m’a 
toujours  semblé  assez  obscure  et  elle  est  loin  d’être  aujourd’hui 
résolue  pour  moi.  Je  n’ai  rencontré  le  cerveau  ramolli  dans  toute 
son  étendue,  que  trois  fois  : dans  un  cas,  il  y avait  évidemment 
infiltration  séreuse  du  cerveau,  chez  un  bydropiqiie;  l’œdème 
du  cerveau,  sur  lequel  je  leviendrai  pins  tard,  est  un  état  pa- 


(0  Voyez  pag.  4. 


21i  llA-MÜLLlSSEJtENX  CIlUOmQUE.  (\NAÏ.  l'ATH.) 

tliologlque  bien  distinct  du  ramollissement,  et  l’on  doit  soigneu- 
sement éviter  de  le  confondre  avec  lui.  J’ai  rapporté,  page  6, 
un  cas  de  ramollissement  général  rencontré  chez  une  iemme 
morte  d’une  affection  organique  du  foie  sans  avoir  présenté 
aucun  phénomène  cérébral  ^ j’en  pourrais  ajouter  un  tioisieme 
exemple  tout  à fait  semblable.  J ai  déjà  dit,  a 1 endroit  piece- 
demraent  cité,  les  doutes  que  me  semblaient  devoir  inspirer 
les  faits  de  ce  genre,  et  avec  quelle  reserve  on  devait  admettre 
la  nature  pathologique  des  ramollissements  généraux  de  l’en- 
céphale, surtout  chez  les  individus  qui  n avaient  point  présente 
de  symptômes  du  côté  du  cerveau.  J’ai  énuméré  les  circonstances 
auxquelles  on  pouvait  attribuer  la  diminution  que  nous  pré- 
sente quelcjuefois  la  consistance  du  cerveau  après  la  mort , et 
l’on  a vu  qu’elles  étaient  toutes  de  nature  à agir  nécessairement 
non  sur  une  partie,  mais  sur  la  totalité  de  1 organe. 

Copland  admet,  d’après  Craigie,  un  ramollissement  général 
du  cerveau  par  simple  diminution  de  consistance  sans  change- 
ment de  structure  (^Mnlakencephalon).  «Dans  les  hydiopisies, 
dit-il,  dans  la  ^consomption  pulmonaire,  le  diabète,  on  trouve 
souvent  le  cerveau  flasque,  facile  à déchirer,  d une  moindre 
consistance  dans  toute  son  étendue.  C’est  un  état  analogue  à 
l’émaciation  générale...  (1).  >>  licite  ensuite  Meckel  qui  a trouvé 
qu’une  portion  de  cerveau  d’un  phthisique  pesait  un  quart  de 
grain  de  moins  que  chez  un  homme  sain  ; Monro,  qui  a trouve 
le  cerveau  de  deux  condamnés  très-mou  ; puis  d’autres  auteurs, 
Morgagni,  Greding,  etc.,  quiTont  vu  également  mou  chez  des 
aliénés.  Copland  ne  paraît  pas  éloigné  d’attribuer  cette  cir- 
constance  soit  à l’état  mental,  soit  à la  réclusion  de  ces  in- 
dividus. 

Carswell  ne  parle  du  ramollissement  général  du  cerveau  que 
chez  les  enfants,  mais  sans  donner  d’éclaircissements  sui  sa  na- 
ture : ..  On  trouve  quelquefois,  dit-il,  chez  les  enfants,  les  deux 
hémisphères  réduits  presqu^en  une  consistance  pulpeuse  ou 
fluide,  probablement  à cause  de  la  mollesse  naturelle  de  cet 
organe  à cet  âge,  prohahly  on  account  of  the  natural  bojtncss  of 
this  OTgan  in  themi^).  » 

M.  Foville  pense  que  le  ramollissement  général  du  cerveau 

(1)  Copland, o//^;ccl.  med-,  l.  i,  page  2t4. 

('2)  Carswell,  ihc  CycL  ofi>mct.  ined.,  vol.  iv,  page  15. 


RAMOLLISSEMENT  GÉNÉRAL. 


213 


doit  être  conside'ré  comme  une  altération  cadavérique  (1). 
Mentionnerai-je  ici  ce  ramollissement  observé  par  Billard  et 
Copland  dans  le  cerveau  des  nouveau-nés,  chez  qui  il  précé- 
derait quelquefois  la  naissance,  et  auquel  ils  auraient  trouvé 
une  odeur  d’hydrogène  sulfuré? 

Sur  cent  cinquante  cas  empruntés  à différents  auteurs , 
M.  Andral  n’a  trouvé  le  ramollissement  général  du  cerveau  noté 
que  quatre  fois  (2).  Il  n’en  a observé  lui-même  aucun  exemple. 
M.  Rostan  en  cite  un  seul  dont  voici  l’analyse  : 

Obssrvatioit  55.  — Pendant  plusieurs  jours  gêne  des  mouvements. 
— Mollesse  générale  du  cerveau.  Pneumonie. 

Une  femme  de  soixante  dix-buit  ans,  languissante,  affirmant 
n’avoir  jamais  eu  d’attaque  d’apoplexie,  gardait  le  lit  depuis  plu- 
sieurs mois,  se  plaignant  d’une  extrême  faiblesse  et  de  douleurs 
vives  dans  les  membres.  Le  1 septembre  1820,  il  survint  une 
gêne  plus  spéciale  (mais  beaucoup  moins  prononcée  le  lende- 
main) dans  les  mouvements  du  bras  gauche,  puis  de  l’engour- 
dissement et  des  douleurs  très-vives  dans  la  cuisse  gauche,  et 
la  veille  de  sa  mort  dans  le  membre  inférieur  droit.  La  faiblesse 
était  extrême,  l’amaigrissement  fut  rapide  ; la  parole  était  lente 
et  embarrassée.  Il  n’y  avait  du  reste  aucun  autre  symptôme  cé- 
rébral et  l’intelligence  était  bien  conservée.  La  mort  arriva  d’une 
façon  assez  inattendue  le  10  septembre. 

Autopsie.  — Pâleur  des  méninges , mollesse  générale  de  la 
pulpe  cérébrale,  mais  pas  assez  prononcée  pour  qu'on  puisse 
comparer  son  état  a celui  d une  bouillie.  Certains  points  sem- 
blent plus  affectés  que  le  reste  de  l’organe  ; défaut  de  consis- 
tance du  cervelet.  Engouement  du  poumon  droit;  commence- 
ment d’hépatisation  du  lobe  supérieur  (.3). 


Pour  qui  sait  quelle  marche  insidieuse  et  bizarre  peut  suivre 
la  pneumonie  chez  les  vieillards , et  combien  souvent  en  parti- 
culier elle  revêt  un  aspect  cérébral  analogue  à celui  qui  vient 
d être  décrit,  ce  fait  laissera  beaucoup  de  doutes  ; d’autant  plus 

(t)  Fovillc,  Dict.  Jemdd.  eide  chir.  praU, Txri,  Ramoitissement. 

(‘2)  Andral,  Clinique, page  833, 

(3)  Rostan,  fiecherches,..,  obs.  xxx. 


IH  ramollissement  CHRONIQL'E.  (anat.  path.) 

que  les  détails  de  ^autopsie  ne  paraissent  pas  eux-ineines  suffi- 
sants pour  convaincre  de  la  nature  pathologique  de  la  mollesse 
de  ce  cerveau. 

M.  Lallemand  a rapporté  une  observation  de  ramollissement 
général  à laquelle  peuvent  s’adresser  à peu  près  les  mêmes  re- 
marques. 

Observation  56.  — Péritonite , délire,  mouvements  convulsifs.  — 
Mollesse  générale  du  cerveau. 

U«e  jeune  femme  présenta  le  second  jour  d’un  accouche- 
ment prématuré,  provoqué  peut-être  par  des  manœuvres  cou- 
pables , quelques  signes  de  péritonite.  Le  troisième  jour  au 
„atin,  traits  altérés,  œil  inquiet , air  étonné,  comme  stupide; 
langue  muqueuse  , ventre  plus  souple  , moins  douloureux. 

( Émét.  deux  gr^ains.)  Le  soir  tout  était  changé  ; la  malade  n avait 
uresaue  pas  vomi,  mais  elle  avait  fait  des  efforts  considérables, 
suivis  bientôt  de  mouvements  convulsifs  et  de  dehre  violent.  Je 
la  trouvai  dans  un  état  de  stupeur  et  de  résoluuon  generale 
portées  au  dernier  degré  ; elle  ne  donnait  aucun  signe  de  con- 
paissance  ni  de  sensibilité  , et  n’articulait  pas  le  moindre  son. 

Mort  dans  la  nuit.  . . , 

autopsie.  - Le  cerveau  uu  peu  décolore  avait 
perdu  sa  consistance  ; il  était  partout  d une  mollesse  dtffluente. 

Péritonite  (1). 

M.  Lallemand  se  demande  si  cet  état  du  cerveau  était  réelle- 
ment pathologique,  et  si  c’est  fi  lui 

symptômes  observés  depuis  l’administration  de  1 “ 

fait  remarquer  que  l’autopsie  a praüquée  trente  lim^^^ 
leinent  après  la  mort,  et  par  une  tcmpeiature  p „ ujagjes 

renvoie  à une  observation  précédente,  ou.  dans  de  semblables 
icnvoie  a u niétro-peritomte 

circonstances  , c est-à-diie  uans  m 

nuernéralc,  un  ramollissement  partiel,  purifoime,  s «ait  <lev 
f J Mais  les  svinplôroes  cérébraux  avaient  ete  mieux  caiac- 
' ; on  à::u  *ervé  une  liémiplésie  pendant  trois  ,oms 
'.“.lis  que.  dans  le  faU  que  nous  ^ 

(I)  f,.ill«raand,  Lellre2,Ti°  17. 


RAMOLLISSEMKNT  GÉNÉRAL. 


214 


sans  qu’ils  paraissent  liés  à une  altération  organique  prononcée 
de  l’encéphale  (1).  Enfin  des  détails  anatomiques  aussi  concis  ne 
peuvent  laisser  que  du  doute. 

Le  fait  suivant,  emprunté  à M.  Louis,  est  plus  intéressant. 

Observation  5'].  — Symptômes  cérébraux  datant  de  trois  années. 
Ramollissement  de  la  totalité  du  cerveau. 

1 

Une  cuisinière  âgée  de  trente-huit  ans  avait  toujours  joui 
d’une  bonne  santé , peu  réglée  cependant , lorsqu’à  la  suite  de 
chagrins  profonds  elle  perdit  le  sentiment  et  le  mouvement , 
sans  altération  de  l’intelligence  ; au  bout  de  deux  mois  , dou- 
leurs dans  les  membres  et  retour  lent  des  mouvements.  Elle  ne 
put  reprendre  ses  occupations  qu’au  bout  de  huit  mois.  Elle  se 
porta  bien  pendant  six  mois  , puis  il  survint  un  érysipèle  à la 
jambe  gauche;  suppression  de  flueurs  blanches,  du  mucus  nasal, 
de  crachements  de  sang  et  d’un  épistaxis  habituels.  Pesanteur 
dans  les  sinus  frontaux , abolition  de  l’odorat  et  du  govit  ; perte 
de  la  gaîté. 

Elle  entra  à la  Charité  dans  cet  état  ; un  peu  de  céphalalgie , 
abolition  du  goût  et  de  l’odorat , intelligence  complètement  in- 
tacte, apyrexie,  faiblesse...  La  céphalalgie  disparut  presque 
complètement.  Rien  de  nouveau  ne  se  présenta.  Quelques  jours 
après,  24  février,  à dix  heures  du  soir,  elle  se  plaignit  d’éprou- 
ver de  la  chaleur,  du  malaise,  un  sentiment  de  gonflement  à la 
face.  A minuit  elle  était  morte.  Trois  années  s’étaient  écoulées 
depuis  l’apparition  des  premiers  symptômes  cérébraux. 

Autopsie  trente-deux  heures  après  la  mort.  — Le  cerveau  était 
pâle  , sans  la  moindre  injection  , d’une  mollesse  extrême  , pa- 
reille à celle  d’un  enfant  nouveau-né  dans  toute  sa  masse.  Les 
nerfs  olfactifs  et  la  membrane  muqueuse  des  fosses  nasales 
étaient  dans  l’état  le  plus  naturel  ; celle  des  sinus  frontaux  et 
maxillaires  avait  une  ligne  et  demie  d’épaisseur  , était  demi- 
transparente , comme  infiltrée,  très-ferme  et  d’une  couleur  de 
gelée  de  pommes.  Pas  de  mucus  desséché. 

On  trouva  quelques  tubercules  au  sommet  des  poumons,  un 

(t ) Chomel,  Z>jcL  deméd.,  2»  éd„  t.  xxm,  page  566.—  Kïxàtài. Clinique, 
t.  li,  page  649. 


UAMOLLISSEIIICKT  CHUONIQLE. 


2IC 

peu  d’engorgement  à leur  partie  postérieure...  On  ne  rencontra 
rien  qui  parût  pouvoir  se  rapporter  à la  mort  subite  (1). 


« Sans  revenir , continue  M.  Louis  , sur  chacun  des  symp- 
tômes éprouvés  par  la  malade  pendaiit  les  trois  années  qui  pré- 
cédèrent son  admission  à la  Charité  , nous  dirons  que  les  plus 
graves  d’entre  eux  indiquaient  par  leur  nature  autant  que  par- 
la cause  qui  y avait  donné  lieu,  une  affection  cérébrale  plus  ou 
moins  profonde  ; qu’un  degré  de  mollesse  du  cerveau , tel  que 
celui  qui  a été  observé,  doit  être  considéré  comme  une  lésion, 
et  qu’il  est  presque  impossible  de  ire  pas  croire  à une  dépen- 
dance entre  l’état  pathologique  de  cet  organe  et  les  symptômes 
dont  il  s’agit.  D’ailleurs  cet  état  n’explique  pas  la  mort  subite, 
car  nous  ignorons  ce  qu’il  faut  de  consistance  au  cerveau  pour 
l’entretien  de  la  vie  ; le  ramollissement  qui  nous  occupe  a sans 
doute  eu  lieu  d’une  manière  lente;  il  était  probablement  a peu 
près  au  même  degré  le  jour  de  la  mort  et  dans  les  quatre  ou 
cinq  derniers  de  l’existence.  » 

La  perte  du  goiit  et  celle  de  l’odorat  ne  sont  réellement  pas 
des  symptômes  cérébraux  bien  caractérisés , surtout  chez  un 
individu  qui  porte  une  maladie  aussi  prononcée  d’une  partie  de 
la  pituitaire.  Je  crois  donc  ne  pas  devoir  admettre  sans  quelque 
doute  la  manière  de  voir  de  l’honorable  médecin  auquel  je  viens 
d’eiu prunier  cette  observation.  Si  ces  symptômes  tenaient  à 
l’altération  du  cerveau,  il  faudrait  faire  remonter  celle-ci  à deux 
ans  , ce  cpii  ne  serait  pas  une  des  circonstances  les  moins  ex- 
traordinaires de  ce  fait.  Quant  aux  accidents  du  début,  bien 
plus  évidemment  cérébraux,  il  est  difficile  de  savoir  à quoi  les 
attribuer;  mais  il  est  certain  que  leur  guérison  a été  suivie^d  un 

intervalle  de  santé  de  huit  mois. 

M.  Dcchambre,  dans  une  note  qu’il  a communiquée  aux  au- 
teurs du  Compendium  de  médecine  pratique,  a.  émis  sui  le  la- 
mollissemenl  général  du  cerveau  des  idées  tout  à fait  extraor- 
dinaires et  que  je  ne  saurais  me  dispenser  de  consigner  ici. 

« M.  Dcchambre,  se  basant  sur  un  relevé  de  trente  observa- 
tions prises  avec  soin  , pense  (ju’il  importe  beaucoup  de  distin 

(I)  Louis,  Mc'innirc  siiv  !et  niorit  subites. 


217 


K AMOLLISSEMENT  TULPEOX. 

guer  deux  formes  principales  de  la  maladie.  Voici  quelles 
considérations  ilprésente  à ce  sujet  : — 1°  Dans  1 une  de  cesjfonnes 
de  ramollissement,  tbute  lu  musse  encéphuli(jue  est  d une  puleur 
et  d^’iine  mollesse  extrême.  Pour  peu  qu’on  y porte  le  scalpel  avec 
négligence  et  qu’on  entame  la  substance  nerveuse  plutôt  en 
jîressant  qu’en  sciant,  on  obtient  une  coupe  dont  la  couche  la 
plus  superficielle  est  inégale  et  réduite  en  bouillie.  C est  là  quel- 
quefois tout  ce  qu’on  observe,  mais  le  plus  souvent  la  mollesse 
augmente  de  plus  en  plus  en  différents  points,  et  l’on  peut  sui- 
vre ainsi  ses  divers  degrés  jusqu'à  la  l'éduction  de  la  pulpe  en 
un  liquide  blanc  pâle,  qui  occupe  alors  un  nombre  variable  de 
cavités  irrégulières  pour  la  forme  et  pour  la  grandeur. 

« 2°  Dans  la  seconde  forme,  lerumollissementestpartiel  et  bien 
circonscrit  ; il  existe  d’un  seul  ou  des  deux  côtés,  mais  le  reste 
de  sa  substance  conserve  sa  consistance  accoutumée  (1  ).  « 

Plus  loin,  M.Dechambre  étudie  les  symptômes  du  ramollisse- 
ment général. 

« Ce  sont  ordinairement  : 

« 1°  Un  affaiblissement  successif  de  l’intelligence,  accompagné 
ou  non  de  céphalalgie,  mais  sans  véritable  délire,  et  pouvant 
aboutir  à un  idiotisme  complet.  Il  a observé  pourtant , dans  un 
cas,  un  délire  violent,  avec  mouvements  désordonnés  de  tous 
les  membres,  et,  dans  un  autre  cas,  de  la  loquacité  et  une  viva- 
cité singulière  dans  les  réponses  (la  pie-mère  ne  présentait  au- 
cune altération); 

« 2“  Un  affaiblissement  graduel  de  la  motilité,  se  montrant 
d’abord  dans  les  membres  inférieurs  et  se  terminant  quelquefois 
par  une  véiilable  paralysie  générale , qui  ne  devient  pourtant 
complète  que  dans  les  derniers  jours,  quand  la  surabondance  de 
la  sérosité  vient  à distendre  les  ventricules. 

« Les  membres  restent  ordinairement  souples  pendant  toute  la 
durée  de  la  maladie.  Il  ne  faut  pas  tenir  compte  des  cas  où  le 
délire  rend  impossible  l’appréciation  de  cette  circonstance* 
Quelquefois  la  souplesse  fait  place  à la  contracture  , dans  les 
derniers  jours  seulement,  mais  alors  le  ramollissement  se  com- 
plique d’injection  sanguine. 

« 3°  La  sensibilité  reste  intacte  le  plus  souvent,  elle  ne  se  perd 

(1)  Compendium , t.  ii,  page  t49,  art,  Cerveaü  ( Ramollissemont  du). 


218  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE.  (aNAT.  PATH.) 

que  quand  le  cerveau  est  comprimé  par  une  abondante  sérosité; 
mais  plus  ordinairement  il  y a exaltation  dans  les  perceptions 
sensoriales.  Beaucoup  de  malades  éprouvent  tnême  dès  le  début 
des  douleurs  névralgiques  qui  acquièrent  parfois  une  extrême 
intensité  (1).  » 

Ailleurs  il  est  dit  queM.Dechambre,sur  quinze  cas  de  ramol- 
lissement général  du  cerveau,  n'en  a vu  que  deux  où  l’altéra- 
tion ait  marché  d’une  manière  aiguë  ; et  comme  il  avait  été  dit 
plus  haut  que  les  conclusions  de  M.  Dechambre  étaient  basées 
sur  un  relevé  de  trente  faits,  il  en  résulterait  que  le  ramollisse- 
ment général  du  cerveau  se  montrerait  dans  la  moitié  des  cas. 
D’un  autre  côté,  le  ramollissement  circonscrit  n’alfecterait  que 
rarement  la  forme  chronique;  il  se  terminerait  le  plus  souvent 
en  un  ou  deux  septénaires,  quelquefois  en  trois  ou  quatre 
jours  (p.  158).  Le  ramollissement  chronique,  si  l’on  s’en  rap- 
portait à ces  résultats,  serait  donc  rarement  circonscrit  et  le 
plus  souvent  général.  Je  n’ai  qu’une  objection  à faire  à ces  sin- 
gulières propositions  : c’est  que,  dans  toutes  les  observations  de 
ramollissement  chronique  que  renferme  cet  ouvrage,  et  aussi 
ceux  de  MM.  Rostan,  Lallemand  et  Andral,  on  ne  trouvera  que 
des  ramollissements  partiels  et  point  d’exemples  de  ramollisse- 
ment général. 

J’ai  exposé  tout  au  long  les  opinions  que  ces  passages  attri- 
buent à M.  Dechambre  sur  le  ramollissement  général  du  cer- 
veau, et  à cause  de  leur  cai'actère  exceptionnel,  et  pour  ne  plus 
avoir  à revenir  sur  ce  sujet;  mais  elles  sont  tellement  bizarres, 
en  désaccord  tellement  complet  avec  mon  observation  et  celle  des 
autres,  que  je  suis  porté  à croire  qu’elles  n’auront  pas  été  exac- 
tement rendues  par  U s auteui  s du  Compendium.  Notons,  en  ou- 
tre, qu’il  semble  résulter  de  plusieurs  endroits  de  ces  citations 
que  M.  Dechambre  aurait  confondu,  dans  plus  a un  cas,  1 hy- 
drocéphale avec  le  ramollissement. 

Je  vais  maintenant  rapporter  quelques  observations  de  ra- 
mollissement pulpeux,  propres  à faire  connaître  1 apparence 
habituelle  qu’il  présente,  apparence  beaucoup  plus  simple  que 
dans  les  autres  formes  de  ramollissement,  puisqu’il  ne  consiste 
que  dans  une  diminution  delà  consistance  normale  du  tissu  cé- 
rébral. 


(t  ) ArticU  citi,  page  \ 57 . 


219 


ramollissement  pülpeox. 

Observation  58.  — Céphalalgie,  étourdissements  habituels  ; hémi- 
plégie subite  à gauche  sans  raideur  ; agitalion,  subdelirium, h escare 
au  siège;  mort  au  bout  de  30  jours.  — Ramollissemeut  jaunâtre  de 
quelques  circonvolutions  du  lobe  moyen  droit. 

La  nommée  Colignon  (Marie),  âgée  de  soixante-dix  ans,  blan- 
chisseuse, grasse  et  charnue,  a toutes  les  apparences  d’une  forte 
constitution.  Elle  dit  avoir  éprouvé  depuis  longtemps,  par  suite 
des  fatigues  de  son  état , des  douleurs  dans  tous  les  membres  ; 
depuis  l’époque  du  choléra  , elle  a un  tremblement  et  un  en- 
gourdissement habituel  des  membres  inférieurs.  Depuis  deux 
ans,  elle  est  sujette  à de  grands  maux  de  tète,  et  éprouve  quel- 
quefois des  étourdissements  assez  forts  pour  la  faire  tomber. 

Le  17  avril  1838,  elle  fut  prise  , à deux  heures  du  soir,  sans 
cause  connue , d’un  étourdissement , avec  une  sensation  de 
froid  dans  la  jambe  et  la  main  gauches  et  impossibdité  de  s’en 
servir , en  même  temps  embarras  de  la  pai’ole  et  balbutiement 
passager. 

Le  lendemain,  la  face  est  très-congestionnée,  les  yeux  rouges. 
La  céphalalgie  est  depuis  plusieurs  jours  plus  intense  qu’à  l or- 
dinaire. La  langue  est  peu  humide,  large,  droite,  un  peu  rouge. 
Le  bras  gauche  ne  peut  exécuter  la  moindre  mouvement  ; la 
sensibilité  y est  légèrement  diminuée  ; on  dit  que  , lorsqu’on 
a porté  la  malade  à l’infirmerie,  il  a un  peu  remué.  Le  membre 
inférieur  de  ce  côté  ne  se  soulève  qu’avec  vme  peine  infinie , le 
genou  ne  peut  se  plier  complètement.  L’intelligence  et  la  mé- 
moire ne  paraissent  pas  sensiblement  altérées.  Pouls  fréquent 
et  développé,  matité  étendue  et  forte,  impulsion  au  cœur.  {Sai- 
gnée du  pied;  SO  sangsues  aux  malléoles;  eau  de  Sedlitz.) 

Le  soir,  la  rougeur  est  moindre  à la  face  et  aux  yeux;  la  ma- 
lade se  sent  la  tète  dégagée.  Selles  abondantes. 

19.  Les  mouvements  ont  presque  complètement  reparu  dans 
le  membre  inferieur.  Le  pouls  est  moins  fort  et  moins  fréquent. 
{Saignée  de  2 pal.) 

Il  survient  quelques  hallucinations  la  nuit  suivante.  La  ma- 
lade marche  en  traînant  la  jambe  gauche.  Elle  est  agitée  , parle 
beaucoup,  défait  son  lit,  il  faut  l’attacher.  Constipation.  Elle 
demande  à manger  avec  instances.  La  langue  est  rouge  et  sèche; 
le  pouls  est  toujours  fréquent  et  parfois  très-irrégulier.  Le  bras 


—tU  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQTJE.  (anAT.  PATH.) 

demeure  toujours  immobile.  {Eau  de  Sedlitz  à plusieurs  reprises-, 
soupes,  bouillon.) 

Le  même  état  persiste;  il  s’y  joint  seulement  une  appa- 
rence d’affaissement  profond  et  une  expression  souffrante  de  la 
physionomie,  bien  que  la  malade  n’accuse  aucune  douleur. 
Elle  demande  sans  cesse  à manger  et  à boire.  {Saignée  de  2 pal., 
vianne,  60  gramm.) 

Les  jours  suivants  , agitation  constante.  Alternatives  de  sub- 
delirium et  d affaissement.  Sueurs  habituelles  le  matin. 

Cependant  le  bas«ventre  se  tend,  les  urines  coulent  involon- 
tairement; on  en  retire  une  grande  quantité  parle  cathétérisme. 
Une  large  eschare  se  forme  au  siège.  i 

Le  6 mai,  coma  ; la  malade  ne  parle  plus  ; peau  légèrement 
humide,  pas  de  refroidissement  des  extrémités.  Pouls  petit,  ir- 
régulier. {Potion  de  quinquina.) 

Mort  le  lendemain  au  soir.  L’état  des  membres  était  resté  le 
même  jusqu’à  la  fin. 

Jutopsie.  — Sérosité  assez  abondante  dans  la  pie-mère  et  les 
ventricules  , limpide.  Artères  de  la  base  épaissies  et  jaunâtres. 

Ramollissement  avec  coloration  grisâtre  et  jaunâtre  de  cinq 
ou  six  circonvolutions  de  la  partie  moyenne  du  bord  externe 
de  l’hémisphère  droit  et  de  la  partie  externe  de  la  scissure  de 
Sylvius.  Les  circonvolutions  ramollies  se  laissent  éroder  par  la 
pie-mère  et  pénétrer  par  un  filet  d’eau;  elles  sont  à peine  dé- 
formées et  offrent  une  mollesse  pulpeuse  au  toucher.  Le  ra- 
mollissement s’étend  peu  profondément  dans  la  substance 
blanche. 

La  moelle  est  saine,  ainsi  que  ses  membranes. 

Poumons  très-sains , d’un  grand  volume  , un  peu  emphysé- 
mateux. Hypertrophie  considérable  du  cœur  , générale  , mais 
surtout  du  ventricule  gauche. 


Ce  ramollissement,  datant  de  vingt  jours  seulement,  est  pré- 
cisément sur  la  limite  de  l’état  aigu  et  de  l’état  chronique.  Une 
mort  aussi  pi’ompte  a été  certainement  due  au  développement 
d’une  lai’ge  escare  au  siège  , et  non  point  à l’affection  cérébrale 
dont  l’étendue  et  les  effets  observés  jusque-là  , ne  paraissaient 
nullement  incompatibles  avec  la  vie  et  avec  un  degré  quelcon- 


KAiUÜLLlSSliJUiAl’  PULPEUX. 


221 

que  d’amélioration.  Je  signalerai , parmi  les  jîhénomènes  ob- 
servés pendant  la  vie  , ces  légers  mouvements  qui  paraissent 
avoir  été  remarqués  dans  le  bras  paralysé  , au  moment  où  la 
malade  fut  apportée  à l’infirmerie  ; j’ai  dit  précédemment  que 
cette  circonstance  me  paraissait  assez  importante  pour  aider  à 
distingueHe  ramollissement  de  l’hémorrhagie. 

Observation  59.  — Hémiplégie'gauche  subite  accompagnée  de  vives 
douleurs.  Contracture  consécutive  dans  les  membres  paralysés;  mort 
au  bout  de  cinq  mois.  — Ramollissement  très-étendu  dans  l’hémis- 
phère droit  du  cerveau,  avec  coloration  jaune  des  circonvolutions. 

Préanet , âgée  de  soixante-deux  ans,  vive  et  bien  constituée, 
fut  fpappée  tout  à coup  d’hémiplégie  gauche  et  de  perte  de  con- 
naissance , le  20  janvier  1838  , dans  la  journée.  Portée  aussitôt 
à l’infirmerie,  elle  présenta  l’état  suivant  : 

La  connaissance  est  revenue.  La  malade  se  plaint  avec  beau- 
coup de  vivacité  de  douleurs  qu’elle  éprouve  dans  le  poignet 
droit  ; le  côté  gauche  est  complètement  paralysé  , sans  roideur 
et  incomplètement  insensible.  Langue  déviée  à gauche  , face 
assez  pâle.  La  tête  et  les  yeux  sont  fortement  déviés  à droite. 
Les  sens  sont  intacts,  l’intelligence  assez  bien  conservée;  il  y a 
un  peu  de  céphalalgie  géne'rale.  Le  pouls  est  presque  insensible, 
lent,  filiforme.  Respiration  naturelle.  Battements  du  cœur  fai- 
bles. (20  sangsues  au  cou  ; sinapismes.) 

Les  jom-s  suivants,  lavement  purgatif.^  vésicatoire  à la  nuque. 

Les  douleurs  s’apaisèrent , l’état  général  parut  meilleur.  Le 
pouls  prit  plus  de  développement,  à 72.  Il  n’y  eut  aucune  di- 
minution dans  la  paralysie  du  côté  gauche.  Les  facultés  de  l’in- 
telligence et  des  sens  conservèrent  toute  leur  intégrité. 

15  février.  Des  douleurs  vives  occupent  tout  le  côté  paralysé, 
même  la  face. 

28  mai.  La  malade  est  depuis  longtemps  dans  l’état  suivant  ; 
elle  ne  peut  quitter  le  lit , les  membres  gauches  sont  toujours 
aussi  paralysés , mais  contracturés  et  demi-fléchis  ; la  peau  n’a 
qu’une  sensibilité  obtuse  , mais  ils  sont  profondément  le  siège 
de  douleurs  constantes  dont  la  malade  se  plaint  vivement.  Rien 
d anormal  dans  le  côté  droit.  L’intelligence,  les  sens  sont  intacts  ; 
cependant  la  malade  demande  à se  lever,  à s’occuper.  Les  pu- 
pilles sont  étroites  et  mobiles  ; la  langue  légèrement  dévice  à 


222 


ramollissement  chronique,  (anat.  paxh.) 

gauche.  Les  pommettes  sont  très-coloiëes.  La  chaleur  de  la 
peau  est  naturelle,  il  n’y  a point  de  fièvre  le  soir.  Le  pouls  est 
à 75,  peu  développe.  Rien  à noter  au  cœur.  Toux  et  expecto- 
ration catarrhale.  Matité  absolue  et  absence  de  tout  bruit  res- 
piratoire dans  la  partie  gaucbe  et  postérieure  de  la  poitrine. 
Evacuations  involontaires.  Grande  faiblesse.  La  vie  se  prolon- 
gea encore  dans  cet  état  jusqu’au  10  juin,  cinq  mois  après  le 
début  de  la  maladie. 

Autopsie.  — Ils’écoule  une  assez  grande  quantité  de  sérosité  un 
peu  trouble  des  membranes.  Celles-ci  se  détachent  facilement  de 
la  superficie  du  cerveau,  si  ce  n’est  à la  partie  externe  de  l’hémis- 
phère droit,  où  elles  entraînent  avec  elles  des  lambeaux  d’un 
grand  nombre  de  circonvolutions  ramollies.  Cet  hémispLère 
présente  un  vaste  ramollissement  qui  en  occupe  toute  l’étendue 
antéro-postérieure,  sauf  trois  centimètres  en  avant  et  en  arrière, 
en  travers  s’étend  depuis  le  corps  sti  ié  et  la  couche  optique  jus- 
qu’aux circonvolutions  externes,  et  peut  avoir  de  trois  à quatre 
centimètres  de  hauteur.  Le  tissu  ramolli  est  blanc  dans  la  sub- 
stance médullaire,  mais,  dans  la  substance  corticale,  et,  eu  par- 
ticulier, celle  des  circonvolutions  , il  ofire  une  couleur  jaune 
très-prononcée.  Il  n’y  a aucune  trace  de  foyer  sanguin. 

Rien  à noter  dans  l’hémisphère  gauche,  la  moelle  allongée 
et  le  cervelet. 

Le  poumon  droit  est  sain  ; le  gauche  est  rouge  et  hépatisé 
dans  presque  toute  son  étendue.  Adhérences  intimes  du  péri- 
carde à toute  la  surface  du  cœur  ; rien  à noter  du  reste  dans  cet 
organe. 

L’abdomen  ne  présente  rien  de  particulier. 


Observation  6o.  — Hémiplégie  gauche  depuis  un  an.  Mort  lente 
dans  l’adynamie.  — lîamoîlissement  pulpeux  de  quelques  circonvolu- 
tions et  de  la  substance  médullaire  de  l’hémisphère  droit. 

Traveau,  âgée  de  soixante-treize  ans,  entra  , au  mois  de  dé- 
cembre 1838,  à l’infirmerie,  pour  une  hémiplégie  qui  lui  était 
survenue  subitement  un  an  auparavant.  .Te  la  vis  pour  la  pre- 
mière fois  le  !''■  janvier  1839. 

L’hémiplégie  était  presque  complète  à gauche;  il  n’y  avait  de 
possibles  que  quelques  légers  mouvements  des  extrémités;  sen- 


llAMOLLISSEMEMT  PULPEUX. 


223 


sibilité  très-obtuse  et  œdème  du  bras  paralysé.  Il  n’y  a aucune 
laideur.  L’intelligence  est  saine,  mais  participe  seulement  à un 
affaiblissement  profond  que  cette  femme  a subi  depuis  quelque 
temps.  La  parole  est  intacte,  les  sens  non  altérés.  Il  y a un  peu 
de  tendance  à l’assoupissement  ; les  pupilles  sont  égaies,  con- 
tractées, la  déglutition  facile  ; la  circulation  très-faible  , les  ex- 
trémités froides  et  bleuâtres.  Depuis  qu’elle  est  à l’infirmerie, 
les  évacuations  sont  involontaires. 

Dans  les  derniers  jours  de  la  vie,  il  y avait  une  soif  vive,  un 
léger  mouvement  fébrile  , un  air  de  souffrance  et  des  plaintes, 
bien  que  la  malade  n’indiquât  jamais  de  douleur  spéciale.  La 
prostration  fit  des  progrès  rapides,  la  respiration  s’embarrassa 
et  elle  mourut  le  7 janvier. 

Autopsie.  — Infiltration  séreuse  assez  considérable  de  la  pie- 
mère  ; les  circonvolutions,  à part  un  petit  nombre  d’entre  elles, 
sont  à peine  écartées  par  la  sérosité,  et  généralement  un  peu 
aplaties.  Les  vaisseaux  des  méninges  sont  passablement  injectés 
de  sang,  leurs  parois  à peu  près  saines.  Sérosité  très -abondante 
à la  base  du  crâne. 

La  pie-mère  s’enlève  aisément  de  la  surface  du  cerveau;  mais, 
à la  partie  antérieure  de  la  convexité  de  l’hémisphère  droit , 
elle  entraîne  avec  elle  la  superficie  de  quelques  circonvolutions 
ramollies.  Ces  dernières  ne  sont  aucunement  déformées  ; elles 
présentent  à leur  sommet  des  plaques  de  ramollissement  de  la 
largeur  d’une  pièce  de  dix  ou  de  vingt  sous.  Ce  ramollissement 
s’étend,  dans  quelques  points,  à trois  ou  quatre  millimètres 
dans  la  substance  médullaire;  dans  d’autres,  il  reste  limité  à la 
couche  corticale  : il  est  jaunâtre  et  se  laisse  délayer  par  un  cou- 
rant d’eau.  Mais,  plus  profondément,  la  substance  médullaire 
de  presque  tout  le  lobe  antérieur  est  molle,  raréfiée,  comme  cri- 
blée de  petits  espaces  vides.-La  substance  médullaire  de  l’autre 
hémisphère  présente,  dans  un  point,  trois  ou  quatre  petites  va- 
cuoles irrégulières,  sans  autre  altération. 

Dilatation  énorme  des  ventricules  latéraux  par  de  la  sérosité 
limpide.  La  tête  du  corps  strié  gauche  présente  un  peu  d’affais- 
sement avec  une  coloration  jaunâtre  superficielle;  pas  d’altéra- 
tion sensible  au-dessous. 

Infiltration  séro-sanguinolente  des  parties  déclives  des  pou- 


224 


RAMÜLUSSÏMEKT  CHROJMQUE.  (anAT.  PATH.) 

nions.  Le  cœur  est  sain.  L’abdomen  ne  présente  rien  de  remar- 
quable, mais  le  canal  gastro-intestinal  n’est  pas  ouvert. 

Il  est  probable,  bien  qu’on  ne  puisse  l’affirmer  , que  les  phé- 
nomènes qui  ont  précédé  la  mort  ont  été  dus  à une  exhalation 
séreuse  des  méninges  et  des  ventricules.  Une  circonstance  qui 
me  fait  croire  à la  date  récente  de  l’épanchement  de  cette  sé- 
rosité , c’est  le  rapprochement  et  l’aplatissement  des  circonvo- 
lution.s  ; j’ai  émis  précédemment  quelques  idées  à ce  sujet  (1). 

Ces  anciens  ramollissements  pulpeux  de  la  substance  médul- 
laire se  présentent  quelquefois  sous  iin  aspect  que  l’on  est  tenté 
de  rapporter  plutôt  à une  simple  raréfaction  de  tissu , à une 
sorte  d’absorption  interstitielle,  qu’à  un  ramollissement  propre- 
ment dit.  Je  ne  pense  pas  cependant  que  les  faits  de  ce  genre 
soient  d’une  autre  nature  : je  vais  en  rapporter  un  exemple 
décrit  assez  minutieusement. 

Observation  6i.  — Depuis  deux  ans  , deux  attaques  avec  perle  de 
connaissance,  sans  grande  lésion  des  mouvements.  — Ramollissement 
pulpeux  du  lobe  antérieur  droit.  Petites  cavités  multiples  dans  les 
hémisphères. 

Une  femme  .âgée  de  66  ans,  nommée  Marguerite  Roger, 
' entra  à l’infirmerie  au  commencement  du  mois  d’avril  1838. 
Elle  raconta  cj[u’au  mois  de  décembre  1836  elle  était  tout  à 
coup  tombée , privée  de  la  parole , mais  non  de  l’intelligence  ; 
il  y avait  un  affaiblissement  général  des  mouvements  ; on  ne 
peut  savoir  s’il  avait  été  plus  prononcé  d’un  côté  que  de  l’autre. 
La  parole  revint  assez  promptement.  Environ  un  an  après 
elle  eut  de  nouveau  une  attaque  à peu  près  semblable,  perte 
de  la  parole,  déviation  de  la  bouche  à gauche  ; pas  d’altération 
des  mouvements , dit-elle. 

Lorsqu’elle  entra  à l’infirmerie,  elle  était  epuisée  par  un  dé- 
voiement qui  durait  depuis  six  semaines}  la  langue  était  un  peu 
déviée  à droite,  la  parole  embarrassée;  point  de  céphalalgie. 
Les  mouvements,  la  sensibilité  et  l’intelligence  étaient  assez  bien 
conservés.  Mais  bientôt  ses  jambes  ne  purent  plus  la  porter  , elle 
tint  des  propos  incohérents,  délira  la  nuit,  sa  physionomie 
devint  hébétée,  le  dévoiement  ne  cessa  pas,  tous  les  symptômes 

(I)  Voyez  pajji  ... 


RAMOH.ISSEMENT  PULPEUX.  22  j 

d’une  fièvre  hectique  se  montrèrent,  et  elle  succomba  dans  une 
prostration  profonde  le  8 mai. 

yiiiLopsie.  — ■ La  pie-mère  était  assez  injectée,  infiltrée  d’une 
grande  quantité  de  sérosité;  les  parois  des  artères  de  la  base 
généralement  épaissies  sans  ossification.  Cette  membrane  s’en- 
lève aisément  de  la  superficie  du  cerveau  qui  paraît  saine, 

La  substance  médullaire  frésentc  une  injection  très  fine  et 
assez  serrée  , dans  les  deux  hémisphères  : la  consistance  géné- 
rale de  ces  derniers  est  bonne. 

La  substance  médullaire  du  lobe  antérieur  droit  présente  un 
ramollissement  dans  l’étendue  d’une  grosse  noisette  : au  pre- 
mier aspect  cette  altération  paraît  consister  plutôt  eu  une  sim- 
ple raréfaction  de  tissu  c|u’en  un  véritable  ramollissement,  bien 
que  l’on  puisse  constater  à l’aide  du  toucher  et  d’un  filet  d’eau 
une  diminution  notable  de  consistance.  En  effet  , à la  coupe, 
on  voit  qu’elle  se  compose  d’un  grand  nombre  de  petits  vides,  de 
petites  aréoles  irrégulières  qui  lui  doniient  un  aspect  feutré  ; 
à l’entour  d’elle  la  substance  cérébrale  paraît  moins  compacte 
qu’ailleurs,  comme  formée  de  filaments  moins  rapprochés, 
d’une  texture  moins  serrée.  Ce  tissu  est  tout  à fait  blanc  ; on  y 
distingue  à peine  quelques  vaisseaux  infiniment  déliés.  Si  l’on 
juojelte  des.sus  un  filet  d’eau , on  voit  le  liquide  le  pénétrer  fa- 
edement  et  en  ecaitei  les  fibres,  mais  sans  en  détacher  ni  même 
en  soulever  aucune  partie.  A la  partie  postérieure  de  ce  ramol- 
lissement, se  remarquait  une  petite  tache  jaune  de  deux  milli- 
mètres à peine  de  diamètre. 

On  trouva  en  outre  un  grand  nombre  de  petites  cavités  dans 
les  hémisphères.  Au  devant  et  au  dessus  du  corps  strié  gauche, 
on  vit  trois  petites  cavités  de  deux  millim.  de  diamètre  , dont 
les  parois  jaunâtres,  tapissées  de  petits  vaisseaux  , paraissaient 
formées  d’un  tissu  celluleux  condensé  plutôt  que  d’une  vérita- 
ble nieinbrane  ; on  n’y  découvrit  aucun  liquide.  Autour  de 
chacune  d’elles  la  substance  cérébrale  présentait  une  raréfaction 
toute  semblable  à celle  qui  a été  décrite  tout  à l’iieure.  On 
trouva  encore  dans  le  même  hémisphère  cimj  ou  six  autres 
cavités  toutes  semblables,  surtout  près  du  ventricule. 

Le  corps  strié  droit  est  un  peu  mou,  légèrement  atrophie*  et 
présenté  à sa  surface  des  adhérences  celluleuses  et  denses  avec 

1S 


226  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE.  (ANAT.  PATH.) 

le  corps  calleux.  Les  deux  corps  striés  renferment  de  petites 
vacuoles. 

Rien  de  particulier  dans  la  moelle  allongée  ni  dans  le  cervelet, 
qui  participe  toutefois  à l’injection  du  cerveau. 


Observation  62.  — - Hémiplégie  gauche  subite  sans  perte  de  connais- 
sance. Disparition  incomplète  des  symptômes  cérébraux.  Sept  ans 
api’ès^  mort  par  suite  d’un  cancer  utéro-vaginal.  Ramollissement 
pulpeux  sans  changement  de  couleur  dans  le  lobe  antérieur  dioit. 

La  nommée  Doutremont , âgée  de  cinquante-un  ans  , était 
entrée  à la  Salpétrière  au  mois  de  mai  1818  , pour  un  cancer 
utéro-vaginal  avancé  : elle  fut  immédiatement  transportée  à 
l’infirmerie. 

Cette  femme  nous  raconte  que,  sept  ans  aupai’avant,  elle  avait 
été  prise  d’une  hémiplégie  subite  du  côté  gauche  , sans  perte 
de  connaissance  j les  paupières  n’avaient  point  été  affectées. 
La  malade  bavait  et  parlait  avec  peine  au  commencement,  mais 
maintenant  elle  retient  bien  sa  salive,  elle  articule  nettement  ; 
l’intelligence  et  la  mémoire  paraissent  avoir  conservé  leur  in- 
tégrité. La  langue  est  droite  et  se  meut  librement.  L’hémiplégie, 
d’abord  complète,  a graduellement  diminué  ; la  malade  a pu 
marcher,  bien  qu’en  boitant,  elle  a pu  se  servir  un  peu  de  son 
bras  gauche.  H y a trois  ans  que  des  accidents  ont  commence 
à se  montrer  du  côté  de  l’utérus  ; il  est  survenu  des  pertes 
sanguines,  un  écoulement  blanc,  jamais  de  vives  douleurs  ; de- 
puis plusieurs  mois  il  y a du  dévoiement,  et  les  évacuations  se 
font  involontairement. 

Cette  femme,  lorsqu’elle  entra  à l’hospice,  était  dans  un  état 
de  grande  faiblesse  qui  fit  de  rapides  progrès,  et  elle  mourut 
au  bout  de  peu  de  jours.  Mais  les  fonctions  cérébrales  parais- 
saient en  très  bon  état  ; elle  nous  donna  avec  beaucoup  de 
netteté  les  détails  que  nous  venons  de  rapporter.  Quant  aux 
membres',  raftaiblissement  général  qui  deinns  longtemps  la 
forçait  de  garder  le  lit,  avait  augmenté  la  faiblesse  des  mem- 
bres autrefois  paralysés,  mais  nous  pûmes  nous  assm  er  qu’il  ne 
«'était  produit  aucune  lésion  nouvelle  des  lacullcs  cérébrales. 


nAMOLLISSEMEKT  PULPEt’X.  22Î 

Autopsie.  — Les  méninges  contienneiil.  une  cerlaiuc  quantité 
de  sérosité;  injection  normale  de  la  pie-mèie. 

Le  cerveau  ne  ]>résenle  rien  à noter  à l’extérieur.  On  trouve 
au  centre  du  lobe  antérieur  droit  un  ramollissement  de  la  sub- 
stance médullaire  , ayant  à peu  près  l’étendue  d’un  gros  œuf 
de  pigeon  5 il  est  limité  en  dehors  par  la  substance  corticale  qui 
est  saine,  eu  arrière  parle  corps  strié  ; l’altération  ne  s’étend 
pas  à ce  dernier,  non  plus  qu’à  la  partie  tout  à fait  antérieure 
de  l’hémisphère.  La  partie  ramollie  n’oflie  aucune  coloration 
et  paraît  même  dans  son  centre  d’une  blancheur  plus  mate  que 
la  substance  saine  ; on  n’y  distingue  pas  de  vaisseaux.  A son 
centre  également  la  substance  ramollie  est  d’une  mollesse  ex- 
trême , réduite  en  bouillie  ; aux  confins  de  l'altération,  on  voit  - 
celle-ci  se  fondre  dans  quelques  points  graduellement  avec  les 
parties  .saiues,  dans  d’autres  se  limiter  brusquement.  Le  reste 
du  cerveau  est  sain.  Les  ventricules  latéraux  contiennent  peu  de 
sérosité. 

Le  cœur  présente  un  commencement  d’ôssificalion  du  pour- 
tour de  l’orifice  aortique.  Les  poumons  sont  infiltrés  de  sérosité 
dans  leurs  parties  déclives.  La  vésicule  biliaire  est  atrophiée  ; le 
foie  est  sain. 

Le  col  de  l’utérus  est  transformé  en  une  bouillie  d’un  gris 
blanchâtre  remplissant  une  excavation  profonde  creusée  dans 
le  corps  de  l’utérus.  Le  vagin,  à sa  partie  supérieure,  participe 
un  peu  à cette  altération. 


Cette  observation  mérite  de  fixer  quelques  instants  notre 
attention.  Doutremont  avait  éprouvé  une  hémiplégie  subite, 
accompagnée  de  quelques  autres  troubles  des  fonctions  céré- 
brales. Ces  symptômes  s’étaient  peu  à peu  dissipés,  incomplète- 
ment, il  est  vrai , mais  assez  pour  qu’elle  pût  marcher  et  se 
servir  de  son  bras  paralysé.  Elle  mourut  au  bout  de  sept  ans, 
sans  avoir  à aucune  époque  éprouvé  quelque  ressentiment  de 
cette  attaque  : tout  semblait  annoncer  une  hémorrhagie  céré- 
brale ayant  suivi  .sa  marche  la  plus  simple,  la  plus  commune, 
giu-ne,  sauf  la  persistance  d’une  cicatrice  dont  la  présence  ex- 
pliquait un  reste  de  faiblesse  dans  un  côté  du  corps.  Or,  non- 


228  l.ÀMOlvl.JSatAiJÏJNX  CnUOMQLE.  (aKAT.  FATH.) 

seulement  il  fut  trouvé  un  ramollissement,  mais  encore  il  fut 
de  toute  évidence  qu’il  n’avait  jamais  pu  exister  là  un  épanche- 
ment de  sang. 

Je  n’ai  pas  besoin  de  revenir  ici  sur  la  manière  dont  je  conçois 
la  formation  de  ce  ramollissement  à l’aide  d’une  congestion 
sanguine  j celle-ci  seule  nous  rend  compte  parfaitement  de  la 
forme  de  son  débiit  et  de  la  marche  des  accidents  qui  ont  dû 
diminuer,  malgré  la  persistance  d’une  lésion  inflammatoire, 
lorsqu’à  diminué,  puis  disparu  la  fluxion  qui  existait  au  com- 
mencement. Ce  ramollissement  ne  nous  a pas  offert  de  couleur 
jaune  , comme  indice  de  cette  congestion  du  début  ; n’occupant 
pas  la  substance  grise , il  n’aura  sans  doute  été  le  siège  que  de 
celte  injection  vasculaire,  qui  peut  disparaître  elle-même  sans 
laisser  aucune  trace. 

Ce  cas  est  un  exemple  de  ceux  auxquels  je  faisais  allusion  pré- 
cédemment , en  disant  : que  le  ramollissemeut  pouvait  arrêter 
ses  progrès  à chacune  de  ses  périodes  et  permettre  à la  maladie 
de  subir  une  sorte  de  guérison  , qu’elle  manifeste  par  la  cessa- 
tion des  accidents  cérébraux  et  le  retour  des  fonctions  abolies, 
aussi  complet  que  le  permet  la  désorganisation  éprouvée  par  les 
fibres  cérébrales. 

Observation  65.  — Hémiplégie  ancienne  à droite  avec  contracture 
des  doigts  seulement.  Etat  curieux  des  facultés  intellectuelles,  accès 
épileptiformes.  — Ramollissement  jaunâtre  avec  atrophie  de  quelques 
circonvolutions  du  lobe  postérieur  gauche,  s’étendant  dans  la  substance 
médullaire  sous-jacente. 

Marie  Yaladier,  âgée  de  soixante-trois  ans,  avait  une  hémi- 
plégie du  côté  droit . dont  on  ignorait  le  début,  mais  qui  datait 
au  moins  d’une  année.  Lapara,lysie  était  complète,  sans  raideui 
des  articulations,  si  ce  n’est  aux  doigts  qui  étaient  fortement  con- 
tracturés , et  que  l’on  ne  pouvait  allonger  sans  causer  de  vives 
douleurs,  l^a  langue  était  un  peu  gênée  dans  ses  mouvements. 

Jja  malade  était  plongée  dans  un  état  d’hebetude  profonde 
qui  se  peignait  tout  entier  dans  sa  physionomie,  et  qui,  se  joi- 
gnant à un  air  de  souffrance  habituel,  laissait  parfois  place  à une 
sorte  de  gaîté  stupide.  Elle  ne  se  rappelait  son  nom  et  d’autres 
mots  que  lorsqu’on  en  avait  prononcé  la  première  syllabe;  elle 
se  souvenait  très-bien  des  airs  de  beaucoup  de  chansons  et 


RAMOLÏ-iISSEMRNT  PUI.PEÜX. 


2:29 


sait  quelquefois  la  nuit  à chanter.  Mais  elle  ne  pouvait  retrou- 
ver que  la  fin  des  vers  ou  des  couplets.  Ou  remarqua  jusqu’<à 
la  fin  de  la  vie  cet  état  particulier  de  la  mémoire.  Elle  ne  pronon- 
çait d’elle-même  que  certains  mots  : mon  Dieu,  ma  sœur,  bien 
sûr,  pourquoi  pas  , qu’elle  répétait  à tout  propos.  Elle  ne  savait 
dire  aucun  autre  mot  qu’en  chantant , soit  qu’elle  répétât  ce 
qu’elle  entendait  chanter,  soit  plus  rarement  qu'elle  le  fît  d’elle- 
même.  Elle  n’accusait  aucune  souffrance  spéciale.  La  dégluti- 
tion se  faisait  bien. 

Cette  femme  était  sujette  à des  accès  épileptiformes  : elle 
était  prise  de  temps  en  temps  de  convulsions  dans  le  bras  et  la 
jambe  paralysés,  moins  souvent  de  l’autre  côté;  la  face  se  conges- 
tionnait, se  convulsait  aussi-,  dans  les  derniers  temps  , il  venait 
une  éeume  abondante  à la  bouche.  Ces  attaques,  d’abord  assez 
éloignées  et  ne  se  répétant  ainsi  que  depuis  peu  de  temps,  se 
sont  peu  à peu  rapprochées,  et  à la  fin  se  succédaient  sans  re- 
lâche pendant  des  journées  entières.  Marie  Valadier  s’affaiblit 
peu  à peu  et  mourut  à la  fin  du  mois  de  mars  1838 , avec  une 
eschare  au  siège  et  dans  un  coma  profond. 

Autopsie.  — On  trouva  une  infiltration  séreuse  assez  consi- 
dérable sans  injection,  dans  la  pie-mère.  Au  niveau  de  la  partie 
externe  et  postérieure  de  l’hémisphère  gauche  , on  vit  un  creux 
capable  de  loger  un  œuf  de  pigeon  et  que  remplissait  de  la 
sérosité  infiltrée  dans  le  tissu  cellulaire  sous-arachnoïdien.  A 
ce  niveau  on  trouva  plusieurs  circonvolutions  jaunâtres,  dé- 
formées et  atropliiées,  ou  plutôt  ayant  presque  totalement  dis- 
paru ; la  couche  corticale  était  considérablement  amincie.  Elles 
étaient  très  molles,  se  laissant  pénétrer  et  fendiller  par  un 
filet  d’eau,  ainsi  que  la  substance  médullaire  sous-jacente  ; celle- 
ci  était  ramollie  assez  profondément,  mais  non  pas  jusqu’au 
ventricule,  dont  les  parois  étaient  saines  et  contenaient  un  peu 
de  sérosité.  L’hémisphère  droit  était  sain. 

Observation  64.  — Perte  graduelle  du  mouvement,  du  sentiment 
et  de  l’mtelligence  datant  de  plusieurs  années.  — Atrophie  et  ramol- 
lissement de  plusieurs  circonvolutions  de  I hémisphère  gauche,  limités 
à la  couche  corticale.  Induration  d’une  d’entre  elles. 

Billard,  âgée  de  quarante  à quarante-six  ans,  ancienne  cm- 


230 


ramot.ussfmf.wt  chronîqtjr.  (awat.  path.) 


ployée  des  hôpitaux,  avait  toujours  fait  preuve  d’une  intelli- 
gence vive  et  développée,  lorsque,  il  y a quelques  années, 
nommée  sous-surveillante  à Bicêtre  , elle  prit  l’habitude  des 
liqueurs  alcooliques.  Ses  facultés  commencèrent  alors  à s altérer, 
sa  démarche  devint  chancelante,  ses  mouvements  perdirent  toute 
force  et  toute  sûreté.  Ces  accidents  survinrent  progressivement 
et  paraissent  avoir  suivi  une  marche  assez  semblable  à celle  de 
la  paralysie  générale  des  aliénés.  Il  y avait  trois  ans  qu  elle 
avait  perdu  tout  à fait  la  faculté  de  s’exprimer  , que  son  intel- 
ligence, profondément  altérée,  comprenait  à peine  ses  besoins. 
Attachée  sur  une  chaise,  si  on  cessait  un  instant  de  la  soutenir, 
elle  tombait  aussitôt  d’un  côté  ou  de  l’autre.  Elle  ir  avait  pas 
perdu  toute  mémoire,  car,  trois  mois  avant  sa  mort,  elle  recon- 
nut des  personnes  qu’elle  n’avait  pas  vues  depuis  quelque  temps, 
et  témoigna  par  ses  cris  une  sorte  de  plaisir. 


Je  n’ai  observé  cette  femme  que  pendant  le  dernier  mois  de 
sa  vie.  Ses  membres  étaient  tous  retirés  : les  membres  inférieurs 
fortement  contractés  ne  se  laissaient  distendre  qu’avec  peine  et 
revenaient  aussitôt  sur  eux-mêmes  ; les  bras  étaient  fléchis  sur 
la  poitrine.  L’immobilité  et  l’insensibilité,  qui  avaient  parud  a- 
bord  affecter  plutôt  les  membres  du  côté  droit,  étaient  égalés  et 
complètes  des  deux  côtés  ; les  yeux  toujours  ouverts,  fixes  et 
brillants ^ la  physionomie  éteinte.  Cependant  quand  on  la 
pinçait  ou  qu’on  la  secouait  vivement  , qu’on  cherchait  enfin  a 
fixer  fortement  un  reste  d’attention  , un  sourire  hébété  venait 
un  instant  animer  ses  traits.  Souvent,  lorsqu’on  distribuait  la 
soupe,  Billard  poussait  des  cris  inarticulés  jusqu’à  ce  qu  elle  eut 
sa  part.  La  déglutition  se  faisait  passablement.  Je  trouvai  le  pouls 
petit  et  misérable;  une  eschare  énorme  se  formait  ausiege,  la 
prostration  fit  de  rapides  progrès,  et  Billard  mourut  le  8 avril. 

Autopsie.  — Les  méninges  étaient  infiltrées  de  sérosité.  Le 
cerveau  d’un  très  petit  volume , les  circonvolutions  petites  et 

pâles.  Vers  la  partie  moyenne  «le  la  convexité  de  l hem.spW 

i auche,  on  vil  cinq  ou  six  circouvobilioi.s  jaunâtres,  très -molles, 
nès-alropliiées,  à peine  prononcées;  une  d’elles,  un  peu  pus 
saillante  que  les  autres,  était  ferme,  mmee,  cl  oficaU  la  con- 
a’.m  cartilage  ,no«.  Ce  , amollissement  * “ 

partie  la  pl.»  superr.eielle  de  la  sobstanee  nteclullaue.  Ou  ne 


RÀMOT-USSKMF.NT  pompeux. 

trouva  lien  à noter  clans  le  reste  du  cerveau  , dans  la  moelle 
allongée  ni  le  cervelet. 

La  moelle  épinière  fut  trouvée  saine  et  d’une  bonne  con- 
sistance. 


Ces  deux  observations  nous  offrent  des  exemples  de  ramol- 
lissements pulpeux  limités  ou  siégeant  spécialement  aux  circon- 
volutions, et  durant  depuis  plusieurs  années,  car  il  est  probable 
que  la  maladie  de  Valadier  datait  bien  d aussi  loin.  En  gene- 
ral , les  ramollissements  qui  affectent  un  semblable  siège  se 
transforment,  au  bout  d’un  certain  temps  , en  plaques  jaunes  : 
aussi  est-il  plus  rare  qu’on  ne  le  pense  de  rencontrer  des  altera- 
tions semblables  à celles  que  je  viens  de  décrire  , et  aussi  an- 
ciennes. On  a remarqué  l’atrophie  qui  accompagnait  ces  deux 
ramollissements';  en  outre,  chez  Billard,  une  des  circonvolu- 
tions atrophiées , au  lieu  d’être  ramollie , se  présentait  à 1 état 
d’induration.  Cette  induration  était  elle-même  consécutive  à 
un  ramollissement  de  cette  circonvolution  , et  M.  Cruveilhier 
disait,  à propos  de  ce  fait,^qu’une  induration  semblable  pouvait, 
dans  d’autres  circonstances , être  considérée  comme  un  mode  de 
guérison  du  ramollissement.  , 


ARTICLE  SECOND. 

DEUXIÈME  PÉRIODE  DU  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE. 

J’ai  dit  et  montré  que  le  ramollissement  chronique  pouvait 
demeurer  presque  indéfiniment  dans  un  état  qui  caractérise  sa 
première  période,  et  ne  présente  qu’une  diminution  de  consis- 
tance, avec  ou  sans  altération  de  couleur  : l’observation  de  Dou- 
tremont  en  est  un  exemple. 

Mais  je  pense  que  ce  cas  est  le  plus  rare,  et  lorsque  le  ramol- 
lissement se  prolonge,  il  subit  habituellement  des  transforma- 
tions remarquables,  à la  description  desquelles  les  pages  sui- 
vantes seront  consacrées:  rien  n’est  plus  aisé,  nous  le  verrons, 
que  de  suivre  la  manière  dont  s’opèienlces  transitions,  soit 
sur  un  même  cerveau,  soit  dans  des  cas  isolés.  Il  nous  faudra 
étudier  séparément,  dans  cette  période,  le  ramollissemeut  de  la 


riMOLUSSEMEM  CHROXIQUB.  (aiXA.T.  PATH.) 

couche  corticale  des  circonvolutions  et  celui  des  parties  pro- 
fondes ; car,  pour  la  première  fois,  nous  le  verrons  revêtir  une 
tornae  tout  à fait  différente,  suivant  tpi’il  occupera  l’une  ou 
l’autre  de  ces  parties.  Nous  avons  déjà  indiqué  succinctement 
les  principaux  caractères  de  ces  deux  formes  de  rainollissemeut  : 
ou  a vu  à cjuel  point  elles  different  entre  elles.  D’où  vient  cela? 
La  substance  grise  centrale  se  comporte  absolument  comme  la 
substance  médullaire,  tandis  que  celle  des  circonvolutions  subit 
des  transformations  toutes  spéciales  et  qui  ne  se  retrouvent 
nulle  part  ailleurs.  .Te  n’en  cherche  pas  iqaintenant  l’explica- 
lion  ; elle  ne  pourra  sans  doute  être  donnée  satisfaisante  que 
lorsque  la  texture  anatomique  de  l’encéphale  sera  mieux  con  - 
nue ; car,  en  général,  la  connaissance  de  l’anatomie  normale  est 
une  des  conditions  les  plus  propres  à nous  éclairer  sur  le  mé- 
c.'inisme  de  la  transformation  des  altérations  pathologiques. 

Un  des  points  les  plus  intéressants  de  l’étude  de  ces  altéra- 
tions sera  de  montrer  qu’elles  ne  sont  en  quelque  sorte  qu’une 
nouvelle  période  de  transition,  dui’ant  laquelle  on  voit  souvent 
la  mort  arriver  par  une  cause  quelconque,  mais  qui  peut  me- 
ner, soit  en  poursuivant  sa  marche,  à une  destruction  complète 
de  la  substance  cérébrale , tendance  naturelle  de  la  maladie,  soit 
au  contraire,  en  arrêtant  ses  progrès,  à une  véritable  cic.atri.sa- 
tion.  Quant  à l’époque  à laquelle  elles  peuvent  se  montrer,  elle 
m’a  paru  assez  variable  •,  quelques  laits  nous  feront  voir  cepen- 
dant qu’elles  peuvent  s’accomplir  en  moins  de  deux  mois. 

5 I.  Deuxième  période  du  raïuollisscmcnt  chronique  dans  la  couche  corti- 
cale des  circonvolutions  ; {plaques  j aimes  des  circonvohtlions.) 

Celte  altération  se  montre  sous  la  forme  de  plaques  irrégu- 
lières, quelquefois  à peu  près  arrondies,îd’aulres  fois  plus  allon- 
gées et  suivant  le  fond  des  anfractuosités,  hiles  ont  rarement 
une  étendue  moindre  qu’une  pièce  d un  ou  de  deux  francs  , et 
peuvent  occuper  la  place  de  plusieurs  circonvolutions  : ces  der- 
nières se  trouvent  alors  remplacées  par  une  surface  aplatie  ou 
simplement  bosselée,  rarement  déprimée.  Elles  sont  mollasses 
au  touclier,  mais  possèdent  souvent  une  lorce  de  coliesion  remar- 
quable et  beaucoup  plus  grande  que  celle  de  la  substance  cerehrale 
saine:  ainsi  elles  ne  se  laissent  presque  jamais  érailler  par  un 


235 


PLAQÜES  JAUNES. 

filet  d’eau  (1)  ; elles  résistent  notablement  à une  traction  en 
sens  opposé  elles  fuient  sous  un  mauvais  instrument.  Quand 
on  passe  le  doigt  dessus,  ou  bien  encore  que  1 on  meut  le  cer- 
veau en  totalité,  leur  surface  se  plisse  à la  manière  d une  mem- 
brane. Leur  texture  paraît  singulière  j on  n’y  distingue  pas  d é- 
léments  divers,  pas  de  fibres  distinctes,  dans  quelque  sens 
qu’on  les  tiraille.  Les  mieux  formées  ressemblent  en  quelque 
sorte  à une  peau  préparée  un  peu  molle.  On  ne  trouve  rien  de 
semblable  dans  l’intérieur  du  cerveau  , si  ce  n’est  certaines  in- 
durations jaunâtres,  plus  rares  dans  la  sxibstance  blanche  que 
dans  la  grise,  et  dont  la  structure  m’a  semblé  n’être  pas  sans 
quelque  analogie  avec  celle  des  plaques  jaunes  des  circon- 
volutions. On  distingue  rarement  les  vaisseaux  dans  l’épaisseur 
de  ces  dernières;  mais,  en  général,  au-dessous  de  la  pie-mère, 
leur  surface  est  immédiatement  recouverte  par  une  lame  cel- 
luleuse très-mince,  sur  laquelle  se  dessinent  des  vaisseaux  fort 
déliés.  Leur  couleur  est  d’un  jaune  chamois  plus  ou  moins 
foncé,  mais  toujours  à peu  près  de  la  même  nuance.  Leur 
épaisseur  est  quelquefois  la  même  que  celle  de  la  couche  corti- 
cale des  circonvolutions;  habituellement  elle  est  un  peu  moin  - 
dre;  je  ne  pense  pas  qu’elle  soit  jamais  plus  grande.  Il  est  ordi- 
nairement assez  facile  d’enlever  la  pie-mère,  qui  passe  au-dessus 
d’elles,  sans  en  altérer  aucunement  la  surface  ; mais  quelquefois 
cette  membrane  y adhère  assez  fortement  pour  les  déchirer  ou 
les  entraîner  tout  entières  avec  elle.  Leurs  bords  tranchent  gé- 
néralement assez  nettement  sur  la  substance  corticale  environ- 
nante demeurée  saine  , et  dans  laquelle  elles  paraissent  enchâs- 
sées comme  des  cases  dans  un  damier.  Souvent  on  trouve  à 
l’entour  d’elles  un  ramollissement  moins  avancé;  d’autres  fols, 
au  contraire,  des  pertes  de  substance  plus  ou  moins  profondes, 
de  véritables  ulcérations  chroniques,  limitées  à l’épaisseur  de 
la  couche  corticale  ou  empiétant  sur  la  substance  blanche.  Ces 
ulcérations  ne  sont  autre  chose  que  le  dernier  degré  du  ra- 
mollissement chronique  ; elles  annoncent  que  le  travail  inflam- 

(1)  borsqu’elles  .sont  trè.Sjj-ôcenlc.s,  leur  densllc  est  beaucoup  moindre,  et 
on  peut  alors  le.s  dclruire  à l’aide  d’un  fort  courant  d’enu  ; d’un  autre  côté,  à 
une  1 ciiode  très-uv.incée  elles  peuvent  actiur'rir  une  véritable  dureté,  de  ma- 
nière à ne  SC  laisser  déchirer  qu’avec  jieiiie.  C’est  dans  ces  cas  seuleraent 
q I clics  me  paraissent  mériter  le  nom  de  cicatricct. 


534  ramoiussem?."tt  chrovique.  (anat.  path.) 

inatoire  qui  avait  prrsiJt’  à la  transfoi'matloii  du  raïuollisse- 
inent  en  plaques  jaunes  a été  au-delà  et  a marclié  jusqu’à  cette 
période  de  destruction,  de  disparition  du  parenchyme  cérébral, 
à laquelle  tend  incessamment  le  ramollissement  chronique.  S’il 
y arrive  rai'ement,  c’est  qu’il  se  trouve  arrêté  dans  sa  marche, 
soit  par  la  mort,  soit  par  la  suspension,  par  le  repos  spontané 
que  la  nature  prescrit  souvent  au  développement  des  altéra- 
tions chroniques. 

La  substance  médullaii-e,  au-dessous  des  plaques  jaunes],  est 
rarement  pax’faitement  saine,  presque  toujours  (plus  ou  moins 
ramollie,  quelquefois  jaunâtre  ou  bien  encore  rougeâtre,  si  elle 
est  devenue  malade  plus  récemment  que  la  substance  corticale 
sus-jacente.  On  y rencontre  souvent  des  cavités,  des  espèces 
de  cellules  traversées  par  des  fibres  comme  celluleuses  et  infil- 
trées de  liquide  lait  de  chaux.  C’est  ce  que  nous  allons  étudier 
tout  à l’heure  sous  le  nom  d’infiltration  celluleuse. 

Tels  sont  les  traits  les  plus  généraux  que  nous  présentent  les 
plaques  jaunes  des  circonvolutions , dont,  malgré  leur  fré- 
quence, on  chercherait  vainement  quelques  descriptions  dans 
les  auteurs.  A peine,  si  j’en  excepte  M.  Cruveilhier,  qui  les  a 
fait  parfaitement  représenter  dans  ses  planches  d’anatomie  pa- 
thologique (1),  et  M.  Bravais  (2),  les  trouve.t-on  mentionnées 
d’une  façon  un  peu  précise.  Je  ne  saurais  entrer  dans  le  détail  de 
toutes  les  variétés  qu’elles  m’ont  offertes  dans  plus  d une  cin- 
quantaine de  cas  où  je  les  ai  rencontrées,  je  me  contenterai  d’en 
présenter  quelques  exemples  dans  les  observations  suivantes. 

Observation  65.  — Affection  du  cœur.  A plusieurs  reprises,  délire, 
hallucinations,  mouvements  spasmodiques.  — Ramollissement  à diffé- 
rents degrés  des  circonvolutions  cérébrales. 

La  nommée  Akix,  âgée  de  soixante-quinze  ans,  couchée  au 
numéro  2 de  la  salle  Saint-Paul,  était  entrée  à l’infirmerie  le 
3 août  1838,  et  avait  présenté  depuis  lors  des  symptômes  du 
côté  du  cœur  et  du  côté  du  cerveau.  Yoici  dans  quel  état  je  la 
trouvai  le  janvier  1839,  époque  à laquelle  je  pris  le  service 
comme  interne. 

(t)  Cruveilhier,  Anatomie  pathologique,  üvrnuon  33,  pl.  2. 

(2)  Bravais,  Revue  médicale,  t,  i,  1827. 


PLAQUES  JAUNES. 

Maigreur  considérable,  pas  d’infiltration  des  membres  ; respi- 
ration fréquente,  un  peu  gênée;  elle  demeure  presque  toujours 
assise  sur  son  lit;  la  poitrine  est  sonore  en  arrière  , excepté  à la 
base  ; on  entend  partout  du  râle  sous-crépitant  et  du  râle  mu- 
queux; le  cœur  s’entend  dans  toute,  la  partie  anterieure  de  la 
poitrine  ; il  y a une  impulsion  très-forte  et  tres-étendue  ; les 
bruits  sont  sonores  ; le  premier  domine  un  peu  le  second;  il  ne 
s’y  mêle  aucun  son  anormal:  les  battements  sont  très-reguliers, 
d’une  grande  fréquence.  Le  pouls  est  irrégulier,  très-faible, 
filiforme.  L’intelligence  est  notablement  altérée , la  malade  di- 
vague presque  toujours;  elle  est  de  temps  en  temps  assez 
agitée. 

Yers  le  5 janvier,  l’agitation  augmente. 

Le  8,  elle  eut  des  ballucinations,  tint  les  discours  les  plus 
étranges  ; elle  était  prise  à chaque  instant  de  mouvements  spas- 
modiques des  avant-bras  et  de  la  face;  cette  dernière  grimaçait 
continuellement.  Il  y avait  des  soubresauts  de  tendons,  les 
membres  supérieurs  opposaient  souvent  une  résistance  assez 
forte  aux  mouvements  qu’on  cherchait  à leur  faire  exécuter; 
de  temps  en  temps  il  survenait  un  tremblement  général  très- 
fort  et  tout  à fait  semblable  à celui  qui  précède  souvent  un  accès 
de  fièvre  intermittente;  langue  humide  , pouls  faible,  pas  de 
chaleur  à la  peau.  {Trente  sangsues  au  cou.) 

Les  sangsues  coulèrent  abondamment.  11  survint  un  peu  de 
calme,  mais  la  malade  demeura  dans  un  état  de  subdelirium  ; 
la  voix  éteinte,  la  face  se  contractant  spasmodiquement,  la 
prostration  faisant  chaque  jour  des  progrès.  La  respiration  s’em- 
barrassa davantage,  et  elle  mourut  le  13  janvier.  ' 

Voici  quelques  renseignements  que  j’ai  pu  obtenir  sur  cette 
femme.  • 

Ses  enfants  me  dirent  qu’elle  se  plaignait  d’oppression  et  de 
palpitations  depuis  un  an  ou  deux  ; avant  cette  époque,  elle  ne 
toussait  pas , elle  avait  loulcs  les  apparences  d’une  bonne  .santé. 
Elle  était  entrée  à rinfirmerie  })our  sa  maladie  du  cœur;  on 
n’avait  jamais  trouvé  de  bruit  anormal  dans  ce  ilernier , mais 
seulement  une  grande  irrégularité;  on  n’avait  rien  remarqué 
du  côté  des  poumons.  De  temps  en  temps  l’oppression  devenait 
très-vive  ; on  avait  obtenu  d’assez  bons  résultats  du  vin  scilll- 
tique. 


2c6  nAMOLLlSSE.MKNT  CBRONIQtlE.  (aNAT.  PATH.) 

Elle  avait  été  prise  plusieurs  fois  d’accidents  cérébraux  tout 
à fait  semblables  à ceux  cjui  se  sont  passés  sous  mes  yeiix,  et  que 
j’ai  décrils,  caractérisés  surtout  par  del’exaljation,  du  délire,  de 
la  raideur  et  des  mouvements  spasmodiques  dans  les  membres. 
Des  sangsues  au  cou  dissipaient  en  général  promptement  ces  ac™ 
cidenls. 

Je  tiens  ces  détails  de  M.  Prus,  chef  du  service. 

Autopsie  'vingt-quatre  heures  après  la  mort.  — Epaisseur  nor- 
male des  os  du  crâne;  adhérences  de  la  dure-mère;  peu  d’opa- 
cités sur  l’arachnoïde  ; ti'ès-grande  quantité  de  sérosité  infiltrée 
dans  la  pie-mère,  écartant  très-profondément  les  circonvolu- 
tions de  la  convexité.  Celles-ci  ne  sont  point  affaissées , seule- 
ment les  espaces  qui  les  séparent  sont  considérablement  agran- 
dis. Il  y a une  grande  quantité  de  sérosité  à la  base  du  cerveau; 
opacités  et  épaississement  des  parois  des  artères.  Les  méninges 
s’enlèvent  avec  beaucoup  de  facilité  de  la  plus  grande  partie  de 
la  surface  du  cerveau. 

A la  partie  antérieure  du  lobe  postérieur  gauche  , sur  la  con- 
vexité, au  point  de  réunion  de  plusieurs  circonvolutions,  on 
trouve  un  ramollissement  de  la  substance  corticale  , pénétrant 
un  peu  dans  la  substance  médullaire.  Ce  ramollissement,  de 
couleur  rose,  présente  à sa  superficie  une  teinte  jaune  d’ocre 
inégalement  répandue.  La  pie-mère  adhérait  à ce  point  et  avait 
entraîné  une  petite  portion  du  tissu  ramolli.  A la  partie  posté- 
rieure de  ce  même  hémisphère , on  trouva  la  surface  de  plu- 
sieurs anfractuosités  convertie  en  une  sorte  de  membi’ane  jaune, 
épaisse,  sans  adhérence  à la  pie-mère,  lisse  à l’extérieur,  sem- 
blant remplacer  en  cet  endroit  la  couche  corticale  dont  il  ne 
restait  pas  d’autre  trace.  La  surface  profonde  de  ce  tissu  jaune 
membraniforme  était  comme  tomentense,  et  formait  la  paroi 
supérieure  de  deux  petites  cavités  pleines  de  lait  de  chaux  ,^à 
parois  très-denses.^  grisâtres,  vasculaires.  Autour  de  ces  der- 
nières, la  substance  médullaire  était  très-legèrement  ramollie 
dans  une  petite  étendue,  sans  changement  de  couleur.  Une  ou 
deux  circonvolutions  comprises  dans  l’intervalle  des  anfractuo- 
sités dont  je  viens  de  décrire  les  altérations  , étaient  atrophiées. 

Sur  le  lobe  postérieur  de  l’hémisphère  droit , et  à la  partie 
externe  du  lobe  moyen,  on  trouva  deux  ramollissements  cir- 
conscrits, superficiels,  occupant  deux  ou  trois  circonvolutions 


237 


ULAQUES  JAUiNES. 

et  anfiactuosités,  coinpienant  toute  l’épaisseur  de  la  substance 
corticale,  et  s’étendant  uu  peu  dans  la  substance  médullaire 
Süus-jacente.  Ce  ramollissement,  tout  a fait  semblable  a celui 
que  nous  avions  trouvé  sur  l’autre  hémispbère,  était  rose  comme 
lui  ,•  dans  deux  points  très-petits,  à la  partie  moyenne  , la  cou- 
leur rose  était  remplacée  aussi  par  une  teinte  jaune,  absolument 
de  la  même  nuance  que  la  plaque  jaune  du  lobe  antérieur  gau- 
che. Du  reste,  ces  deux  ramollissements  n’avaient  entraîne  au- 
cune déformation  ni  tuméfaction  appréciable  des  circonvolu- 
tions qu’ils  occupaient.  Un  courant  d’eau,  projeté  sur  eux,  en 
éraillait  légèrement  la  surface. 

Les  ventricules  latéraux  étaient  distendus  par  une  grande 
quantité  de  sérosité  ; les  plexus  choroïdes  en  étaient  tout  infil- 
trés. Etat  d’iiîtégrité  complète  de  toutes  les  parties  profondes 
de  l’encéphale  ; fermeté  assez  grande  et  injection  assez  pronon- 
cée de  la  substance  médullaire. 

Les  deux  poumons  étaient  très-adhérents,  infiltrés  de  séro- 
sité -,  leurs  lobes  inférieurs  rouges,  très-friables,  ne  contenaient 
pas  d^air. 

Le  péricarde  contenait  un  demi-verre  de  sérosité  ; le  cœur 
était  d’un  volume  considérable,  l’oreillette  droite  remarquable- 
ment épaissie  ^ ses  parois  tapissées  presqu’en  entier  de  colonnes 
charnues  à peu  près  aussi  développées  que  celles  du  ventricule 
droit.  \ entricule  gauche  dilaté  et  épaissi,  d’une  fermeté  re- 
marquable. Rien  à noter  aux  autres  cavités,  non  plus  qu’aux 
orifices. 


Le  cerveau  que  je  viens  de  décrire  dans  cette  observation 
nous  a présenté  deux  ordres  d’altérations  bien  distinctes  ; les 
unes  évidemment  récentes , les  autres  aussi  évidemment  an- 
ciennes. L’identité  de  siège  des  unes  et  des  autres,  leur  voisi- 
nage,  la  resseinLlance  des  accidents  qu’elles  avaient  déterminés, 
et  dont  les  apparitions  successives  coïncident  parfaitement  avec 
la  date  relative  de  leur  développement,  tout  annonce  qu’elles 
étaient  de  même  nature,  et  que  les  dilféreuces  d’aspect  sous 
lesquelles  elles  se  sont  présentées  ne  tiennent  qu’à  l’époque  diflé- 
reute  de  leur  forinalioii.  Du  reste,  s’il  était  possible  de  constr- 
vei  quelques  doutes  à CCI  egard,  la  coloration  jaune  qui  coin  ' 


238 


ramollissement  chroniqüb.  (anat.  pat.) 

mençail  à apparaître  siir  les  ramollissements  rosés,  et  qu’il  était 
facile  de  comparer  à celle  des  plaques  jaunes,  suffirait  pour  les 
faire  cesser  complètement. 

Observation  66.  — Paralysie  incomplète  du  bras  gauche,  sans  rai- 
deur ; point  de  perte  de  connaissance  ; signes  de  congestion  cérébrale  j 
mort  subite  au  bout  d’un  mois. — Ramollissement  avec  injection  vive  de 
la  substance  médullaire  de  l’hémisphère  droit  ; plaques  jaunes  des  cir- 
convolutions. 

Louise  Gachet,  âgée  de  soixante-dix-sept  ans,  est  une  femme 
d’un  embonpoint  énorme,  d’un  caractère  extrêmement  gai  ; son 
intelligence  paraît  s’être  ressentie  des  progrès  de  l’âge.  Elle  a 
habituellement  la  face  très-colorée  ; elle  aime  beaucoup  à boire 
de  l’eau-de-vie  et  du  vin  pur.  On  l’a  entendue  dans  ces  derniers 
temps  se  plaindre  quelquefois  de  la  tète:  du  reste,  elle  ne  pré- 
sentait aucun  signe  de  paralysie  , ne  perdait  jamais  connais- 
sance, et  ne  paraissait  pas  affectée  de  vertiges  ni  d’étourdis- 
sements. 

Le  22  décembre  1838,  elle  s’aperçut  dans  la  journée  que  son 
bras  gauche  était  devenu  plus  faible  et  plus  lourd  qu’à  l’ordi- 
naire ; elle  ne  semblait  pas  souffrir  davantage  de  la  tête,  et  ne 
voulut  pas  aller  à l’infirmerie. 

Ce  fut  le  28  seulement  qu’on  la  transporta  au  n“  19  de  la 
salle  Saint-Jacques. 

Elle  avait  la  face  très-rouge,  les  yeux  fort  injectés  ; elle  se 
plaignait  un  peu  de  céphalalgie.  La  langue  était  un  peu  em- 
barrassée; le  bras  gauche  était  lourd  et  les  doigts  se  mouvaient 
avec  peine.  Ce  membre  ne  présentait  aucune  raideur  dans  ses 
articulations,  et  n’était  le  siège  d’aucune  douleur.  Il  n’y  avait 
rien  de  semblable  à la  jambe.  La  face  n’était  pas  déviée.  L’état 
habituel  de  l’intelligence  empêchait  d’apprécier  exactement  les 
modifications  que  les  facultés  avaient  pu  éprouver. 

Une  saignée  du  bras  fut  pratiquée  et  un  mieux  notable  se 
montra  dès  le  lendemain.  On  pensa  n’avoir  affaire  qu’à  une 
simple  congestion  cérébrale. 

Cependant  la  face  et  les  yeux  annonçaient  toujours,  par  leur 
rougeur,  un  état  de  congestion  .sanguine  vers  la  tête;  il  y avait 
toujours  un  certain  degré  d’excitation.  Elle  ne  se  plaignait  pas 
beaucoup  de  céphalalgie,  mais  elle  accusait  un  peu  d’etouffe- 


plaques  jaunes.  239 

ment.  Il  y avait  de  la  chaleur  à la  peau,  de  la  force  et  de  la 
fréquence  dans  le  pouls.  La  langue  était  parfois  un  peu  sèche , 
et  offrait  une  coloration  noirâtre  qui  paraissait  lui  être  natu- 
relle. On  eut  recours  à plusieurs  reprises  aux  purgatifs  , aux 
émissions  sanguines  générales  ou  par  les  sangsues. 

On  parut  améliorer  un  peu  l’état  général  ; mais  les  mouve- 
ments du  bras  gauche  demeuraient  toujours  très-faibles  et  in- 
complets. 

Le  1 5 janvier,  dans  la  soirée,  elle  perdit  tout  à coup  connais- 
SîQice,  la  face  devint  très-pâle,  la  langue  s’embarrassa,  et  n’avait 
pas  encore  repris  ie  lendemain  matin  toute  la  liberté  de  ses 
mouvements.  Cette  attaque  fut  de  courte  durée  ; une  autre  du 
même  genre  se  montra  huit  jours  après,  mais  se  dissipa  plus 
promptement  encore. 

Malgré  ces  accidents , Gachet  paraissait  mieux  qu’au  com- 
mencement du  mois  : il  y avait  moins  de  congestion  à la  face  ; 
l’intelligence  semblait  en  meilleur  état.  Elle  portait  assez  libre" 
ment  son  bras  gauche  à sa  tête,  mais  elle  ne  pouvait  en  mou- 
voir les  doigts.  Le  membre , demi-paralysé,  n’oft'rit  jamais 
aucune  raideur  ; Insensibilité  y fut  toujours  intacte,  et  la  ma- 
lade n’y  ressentait  aucune  douleur.  On  la  levait  quelquefois 
dans  la  journée.  Le  reste  du  temps  elle  demeurait  fort  tranquille, 
un  peu  assoupie,  toujours  de  bonne  humeur,  mangeant  à peine, 
mais  demandant  du  vin  avec  instance. 

Le  26  janvier,  nous  la  trouvâmes  à la  visite  comme  à l’ordi- 
naire, ne  SC  plaignant  pas,  mais  un  peu  plus  sérieuse.  Une  demi- 
heure  après  elle  demand  i à boire,  et  tout  en  parlant  retomba 
sur  son  oreiller  sans  donne;'  signe  de  vie.  J’arrivai  presque  aussi- 
tôt auprès  d’elle  ; je  m’assurai  qu’elle  était  morte  ■ elle  était  très- 
pâle,  et  sans  raideur  dans  les  membres. 

Autopsie  vingt-quatre  heures  après  la  mort.  — Épaisseur  nor- 
male de.s  os  du  crâne.  Adhérences  de  la  dure-mère  qui  se  laisse 
déchirer  quand  on  enlève  la  voûte  crânienne.  Légères  opacités 
de  l’arachnoïde  ; la  déchirure  de  la  dure-mère  empêche  d’ap- 
précier la  quantité  de  sérosité  que  contient  sa  cavité,  La  pie- 
mère  est  infiltrée  d’une  très-grande  quantité  de  sérosité  limpide 
qui  lui  donne  un  aspect  gélatiniforme.  Commencement  d’ossi- 
fication des  vaisseaux  de  la  base.  Les  circonvolutions  sont  gené- 
ralcmcnl  écartées  par  la  sérosité.  ^ 


240 


RAMOLLlSbEMEMT  CHROKIQÜE.  (^ABAT.  PATH.) 

4u-dessus  de  l’iiémisplière  droit,  une  anfractuosité  transver- 
sale, que  l’on  remarque  liabituellement  sur  la  convexité  dont 
elle  décrit  la  largeur,  à peu  près  à la  réunion  des  lobes  moyen 
et  postérieur,  est  remplie  de  sçrosité,  et  beaucoup  plus  large  que 
banfracluosité  correspondante  de  Taulrc  bémispbère.  On  s’a- 
perçoit que  cet  élargissement  est  dû  à un  amincissement  consi- 
dérable des  circonvolutions  qui  en  forment  le  bord  postérieur. 
En  effet  tout  le  fond  et  les  parois  de  cette  anfractuosité  sont  d’un 
jaune  d’ocre  peu  foncé , mollasses  au  toucher,  sans  être  péné- 
trés par  un  filet  d’eau,  et  se  laissant  plisser  superficiellement  à 
la  manière  d’une  membrane.  La  pie-mère,  qui  partout  ailleurs 
se  séparait  avec  la  plus  grande  facilité  de  la  superficie  du  cer- 
veau, lui  adhérait  dans  ce  point  où  elle  présentait  une  injection 
beaucoup  plus  vive.  Une  ou  deux  anfractuosités  , voisines  de 
celle  que  je  viens  de  décrire,  offraient  la  même  altération.  Celte 
transformation  en  un  tissu  jaune,  membraniforme,  occupait 
toute  l’épaisseur  de  la  substance  corticale. 

Une  coupe  boiizonlale  étant  pratiquée,  on  vit  que  la  sub- 
stance médullaire  de  lout  le  lobe  postérieur,  d’une  partie  du 
lobe  moyen  et  de  la  partie  interne  de  l’bémispbère,  jusqu’au 
lobe  antérieur,  était  très-iamollie  et  d’une  couleur  rose-vil. 
Cette  altération  était  due  à une  injection  très-serrée  et  tout  à 
fait  limitée  à l’étendue  du  ramollissement.  Celui-ci  était  très- 
prononcé,  surtout  au  centre,  et  se  laissait  pénétrer  par  un  cou- 
rant d’eau.  Dans  la  partie  centrale  aussi,  la  partie  ramollie  pré- 
•sentait  une  légère  coloration  jaune,  tout  à fait  de  la  même 
nuance  que  celle  qui  se  montrait  à la  surface  du  cerveau.  Ce  ra- 
mollissement s’étendait  jusqu’à  buit  ou  dix  lignes  au-dessous  de 
la  substance  corticale  j il  occupait  plus  de  largeur  a sa  partie 
profonde  qu’à  sa  partie  superficielle.  A ses  limites  il  revenait 

peu  à peu  à la  consistance  normale. 

Le  reste  de  riiémispbère  paraissait  sain  ainsi  que  celui  du 
côté  opposé;  il  était  très-pâle;  cependant  les  vaisseaux  de  la 
substance  blancbe,  quoi([ue  vides  de  sang  , semblaient  plus  xo- 
lumineux  qu’ils  ne  le  sont  liabituellement.  Les  ventiicules  la- 
téraux contenaient  un  peu  de  sérosité  ; les  parties  avoisinantes 
étaient  tout  à fait  saines , ainsi  que  le  cervelet  et  la  moelle 

allongée.  j 

T-cs  poumons  étaient  un  peu  rouges , surtout  à la  partie  de- 


24.1 


PLAQUES  JAUKES. 

clive,  mais  sains  du  rcs!c , cL  ne  conLcnant  presque  pas  de  li- 
quide. 

Le  cœur  ctail  volumineux  ; son  tissu  musculaire  était  pâle, 
plus  ferme  qu’à  l’ordinaire,  et  présentait  dans  quelques  poipts 
un  peu  de  blauclieur.  Du  reste,  rien  à noter  aux  cavités  ni  aux 
orifices  de  cet  organe.  Les  cavités  droites  contenaient  une 
grande  quantité  de  sang  liquide  ; rien  dans  les  cavités  gaucLes. 


Le  ramollissement  avait  sans  doute  marché  de  dcliors  en 
dedans,  de  la  superficie  du  cerveau  vers  .sa  . profondeur’  j aussi, 
plus  ancien  dans  la  substance  corticale  des  circonvolutions  que 
dans  la  substance  médullaire  sous-jacente,  il  avait  déjà  revêtu 
dans  la  première  la  forme  de  plaques  jaunes,  dont  nous  con- 
naissons bien  maintenant  le  mode  de  formation. 

Il  est  difficile  de  dire  quelle  a été  la  cause  de  la  mort,  ài  la- 
quelle il  est  plus  que  douteux  que  le  cerveau  ait  pris  une  part 
directe.  La  seule  des  altérations  habituelles  des  morts  subites 
qui  existât  ici,  était  la  fluidité  du  sang  dans  le  cœur.  Mais  les 
autres  signes  d’asphyxie  qui  les’accompagnent  communément 
manquaient. 


ÜBSEnvATiojv  fiy.  — Hemipiégie  droite  avec  contracture.  Mort  un 
mois  après.  — Plaque  jaune  à la  base  de  l’hénrisphère  gauche. 


Une  femme  de  soixante-quinze  ans  a été  prise  tout  à coup.,  il 
y a un  mois,  d’hémiplégie  complète  à droite,  sans  perte  de  co  n- 
naissance.  Les  renseignements  pris  auprès  de  ses  voisines,  et 
d’elle-même  ont  constaté  Tabsence  de  tout  prodrome:  ni  cé- 
phalalgie, ni  étourdissements,  lii  faiblesse  dans  les  nrenabres. 
L’hémiplégie  s’est  accompagnée,  dès  le  principe,  d’une  «;ontrac- 
ture  qui  a disparu  pendant  les  trois  derniers  jours  de  la  rie.  La 
bouche  était  déviée,  la  parole  embarrassée,  rintellq’encc  et  les 
•sens  intacts.  La  malade  mourut  avec  dc.s  symptômes  fébri.l  les 
dans  un  profond  afl'aissement,  mais  sans  coma  ni  ré-solutiou 
nérale. 


J uLopsà’.  ~L-,i  cavité  de  l’arachnoïde  contient  qnclc  [ucs 
gouttes  de  sérosité;  un  peu  d’opacité  <le  son  feuillet  cérél:'  nal. 
Quantité  nolable  de  sérosité  limfiide  ialiluée  dans  la  pic-ir  œre 

16 


242  RAMOI.USSEMENT  CHRONIQUE.  (anAT.  PATH.) 

Sur  deux  points  de  la  convexité  de  chaque  hémisphère,  on  voit 
une  dépression  superficielle  , pleine  de  sérosité  , et  qui  paraît 
au  premier  abord  le  résultat  de  l’atrophie  des  circonvolutions  ; 
on's'assure  , après  avoir  enlevé  les  méninges  , qu’elles  s’étaient 
seulement  laissées  refouler  par  la  sérosité.  On  remarque  quel- 
ques adhérences  fines  et  molles  , qui  ne  paraissent  pas  vasculai- 
•res  , entre  la  pie-mère  et  le  cerveau  ; la  méninge  détachée  , on 
trouve  de  semblables  adhérences  entre  les  circonvolutions , au 
fond  des  anfractuosités. 

La  surface  du  cerveau  est  saine.  Seulement  à la  base  du  lobe 
postérieur  de  l’hémisphère  gauche,  on  trouve  une  surface  de 
trois  centimètres  carrés,  jaune  chamois,  mollasse,  membrani- 
fortne;  les  icirconvolutions  sont  tout  à fait  déformées  sur  ce 
point,  la  pie-mère  très-adhérente.  Cette  altération  de  couleur  et 
de  consistance  occupe  toute  la  couche  corticale  et  s elend  un  peu 
à la  substance  blanche  ; un  filet  d eau  glisse  sur  elle  sans  meme 
en  érailler  là  surface. 

Dans  le  centre  du  même  hémisphère  on  trouve  une  tache 
grisâtre,  de  la  grandeur  d’un  petit  haricot,  molle  et  se  laissant 
pénétrer  par  un  filet  d’éau.  Cette  altération  est  très-nettement 

circonscrite. 


Observation  68.— Infiltration  sanguine  et  plaques  jaunes  des  circon- 
▼ol  ut  ions. 

Un  homme  âgé'de  soixante  ans,  épileptique,  enfermé  depuis 
quinïe  ans  dans’la  division  des  aliénés  de  Bicètre  , mourut  le 
28'  avril  1824,  avec  des  eschares  au  siège.  • 

Autopste.  — Sérosité  trouble  , abondante  à l’entour  du  cer- 
veau. Le  cerveau  étant  lavé,  la  couche  corticale  offre  çà  et  là 
des  plaques  jaunâtres.' En  dépouillant  de  leurs  membranes  les 
circonvolutions  supérieures,  les  taches  jaunes  les  moins  pronon- 
cées ont  disparu.  Les  autres  s’affaiblissent  seulement;  elles  aflec- 
tent  la  couche  la  plus  superficielle  du  cerveau. 

En  arrière  de  la  scissure  de  Sylvius,  à droite,  on  trouve  trois 
ou  quatre  circonvolutions  infiltrées  de  sang,  dans  la  couche  cor- 
t'icale  seulement,  molles  et  s’enlevant  avec  la  pic-mcie.  Au  de- 
vant de  cette  lésion,  et  sur  le  penchant  d’une  cmonvolnlion,  se 


PLAQtJES  JAUMES.  243 

leucoutre  une  membrane  jaunâtre  de  la  largeur  et  de  l’épaisseur 
d’un  ceniiine.  Elle  occupe  toute  l épaisseur  de  la  couche  corti- 
cale : la  pie-mère  s’en  détaché  avec  facilite  j sa  surface  externe 
est  couverte  d’une  sorte  d’enduit  luisant,  élastique,  gelatini- 
forme. 

Infiltration  sanguine  des  circonvolutions  du  lobe  postérieur 
gauche  (1). 


Lorsqu’à  la  suite  de  la  formation  de  plaques  jaunes,  la  ma- 
ladie continue  de  niarcher,  et  qu’au  dessous  d’elles  se  développe 
un  ramollissement  étendu  de  la  substance  médullaire,  passant 
de  l’état  pulpeux  à l’état  d’infiltration  celluleuse,  en  général  les 
plaques  jaunes  s’amincissent  peu  à peu,  et  à la  place  de  cette 
sorte  de  tissu  qui  les  constitue  et  que  nous  avons  essayé  de  dé- 
crire, on  ne  trouve  plus  qu’une  couche  celluleuse  très-mince  , 
quelquefois  vasculaire,  semblable  à celle  que  nous  avons  dit  se 
rencontrer  souvent  entre  la  pie-mère  et  la  surface  externe  des 
plaques  jaunes. 

D’autres  fois  on  trouve  de  véritables  ulcérations  à bords  tail- 
lés à pic,  comprenant  justement  l’épaisseur  de  la  couche  corti- 
cale et  conservant  même  encore  dans  leur  voisinage  des  traces 
des  plaques  jaunes  qui  les  avaient  précédées  (2).  Au  lieu  de  sim- 
ples ulcérations  ainsi  limitées  à la  substance  corticale,  il  pourra 
y avoir  de  vastes  pertes  de  substance,  auxquelles  participera 
plus  ou  moins  profondément  la  substance  médullaire  sous-ja- 
cente (3). 

Dans  quelques  ramollissements  anciens,  on  ne  trouve  plus 
rien  de  semblable,  à la  superficie  de  la  substanèe  médullaire  ain^i 
convertie  en  infiltration  celluleuse.  Il  n’y  a ni  plaques  jaunes 
ni  cette  couche  celluleuse  mince  dont  nous  venons  de  parler  ni 
une  véritable  ulcération  à bords  nettement  tracés.  La  couche 
corticale  paraît  avoir  disparu  par  une  sorte  d’absorption,  mais  il 
en  reste  presciuo  toujours,  pour  trace,  une  teinte  jaune  delà 
surface  de  l’infiltration  celluleuse;  celte  teinte  jauue  peut  n’en 
occuper  exactement  que  la  superficie,  ou  s’étendre  à un  ou  deux 

(1)  Bnivaib,  loc  . cil. 

(2)  Fuyez  observa lionti  76,  77,  76,  etc. 

(3)  Voyez  observations  «t , 82,  63,  90,  91,  cLe. 


-il  KAMOLLlÜbl-MKST  CnUOJNIQLIi  (ajNAX.  PAXH.) 

niillimèlres  de  profoncleuiv,  dernier  indice  de  la  routeur  plus 
vive  dont  la  couche  corticale  avait  été  le  siège  au  début  de  la 
maladie. 

Je  n’ai  jamais  rencontre'  de  plaques  jaunes  à la  superficie  du 
cervelet  : peut-être  la  couche  de  substance  corticale  qui  revêt 
cet  organe  est-elle  trop  mince  pour  se  prêter  à leur  développe- 
ment ; mais  j y ai  presque  toujours  vu  le  ramollissement  chro- 
nique, pulpeux  ou  a 1 état  d infiltration  celluleuse,  présenter 
une  coloration  jaune  semblable  à sa  superficie. 

§ II.  Deuxième  période  du  ramollissement  chronique  dans  la  substance  mé- 
dullaire et  les  parties  profondes  du  cerveau.  {Infiltration  celluleuse.) 

INous  avons  vu  que  le  ramollissement  dans  la  pulpe  médul- 
laire pouvait  conserver  indéfiniment  ses  caractères  de  simple 
ramollissement  de  tissu,  sans  subir  aucune  transformation,  au- 
cun autre  travail  de  désorganisation.  Mais  j’ai  dit  en  même 
temps  que  cela  me  paraissait  le  cas  le  plus  rare  , et  que  presque 
toujours  il  venait  à éprouver,  au  bout  d’un  certain  temps,  do 
certaines  modifications  dont  je  vais  faire  la  description. 

Lorsque  l’on  étudie  des  ramollissements  arrivés  à ce  degré, 
voici  ce  que  l’on  trouve  : 

La  pulpe  médullaire  a disparu  daus  une  plus  ou  moins  grande 
étendue  , et  se  trouve  remplacée  par  un  tissu  cellulaire  lâche, 
laissant  entre  ses  Drailles  des  vides  irréguliers,  que  remplit  un 
liquide  trouble  et  blanchâtre,  mêlé  ou  non  de  flocons  qui  ne 
semblent  autre  chose  que  des  débris  de  substance  cérébrale. 

Nous  allons  passer  en  revue  successivement  le  siège  de  cette 
altération,  le  tissu  cellulaire,  le  liquide  qui  la  constituent,  l’état 
de  la  substance  cérébrale  environnante.  Nous  chercherons  en- 
suite à étudier  les  degrés  secondaires  qui  l’unissent,  et  d’un  côté 
au  simple  ramollissement  pulpeux,  et  d’un  autre  côté  à la  dis- 
parition complète  de  la  substance  cérébrale , que  nous  avons 
déjà  dit  être  le  terme  de  l’altération  anatomique  qui  constitue 
la  maladie  étudiée  sous  le  nom  de  ramollissement  cérébral. 

J’ai  donné  à la  transformation  morbide  dont  il  est  ici  ques- 
tion, le  nom  à' infilLralion  celluleuse , qui  rend  ses  deux  carac- 
tères constants  et  essentiels,  savoir,  l’isolement  du  tissu  cellu- 
laire ecrelji.d,  cl  son  infiltraiion  par  un  liquide  partieuliei. 
Quanta  sa  fréquenee  , elle  me  parait  assez  grande,  puisque  je 


INFH-TTIATION  CFT.LXJLEt’SE. 


24  5 

possède  plus  de  quarante  cas  où  elle  a élé  observée  bien  évi- 
demment, et  je  ne  doute  pas  qu’elle  ne  m’ait  échappé  plus  d’une 
fois,  à l’époque  où  je  commençais  à étudier  le  ramollissement 
cérébral,  comme  elle  a sans  doute  échappé  à la  plupart  des  ob- 
servateurs; car  nous  verrons  plus  loin  que,  paraissant  complète- 
ment ignorée  par  quelques-uns,  elle  a été  imparfaitement  ap- 
préciée par  la  plupart,  et  ne  s’est  trouvée  décrite  que  dans  des 
cas  rares  et  tout  à fait  isolés.  Aussi  j’avoue  que  je  m’attendais 
peu,  d’après  la  lecture  des  auteurs,  aux  résultats  que  m’a  don- 
nés mon  observation. 

Siège.  — On  rencontre  ordinairement  l’inlillration  celluleuse 
dans  la  substance  blancbe  des  hémisphères  ; souvent  aussi  dans 
les  corps  striés,  mais  très-rarement  sans  cloute  dans  les  couches 
optiques,  où  je  ne  crois  pas  l’avoir  jamais  rencontrée. 

Je  n’ai  pas  vu  un  seul  cas  où  la  couche  corticale  des  circon- 
volutions parût  y participer  elle-même.  Nous  avons  déjà  dit 
comment  cette  dernière  se  comportait  dans  les  cas  où  elle  en 
était  atteinte.  Nous  allons  trouver  l’occasion  d’en  donner  encore 
de  nombreux  exemples.  Je  déciirai  cette  même  altération  dans 
le  cervelet  ; je  ne  l’ai  jamais  rencontrée  dans  la  moelle  allongée 
ni  dans  ses  prolongements  ; mais  le  ramollissement  est  fort  rare 
dans  ces  parties.  Je  ne  l’ai  non  plus  jamais  vue  dans  la  moelle 
spinale;  mais  nous  citerons  quelques  observations  qui  ne  per- 
mettent pas  de  douter  qu’elle  n’y  ait  été  rencontrée. 

L’étendue  de  l’infdtration  celluleuse  peut  varier  beaucoup  : 
tantôt  du  volume  d’une  noisette,  rarement  plus  petite  , elle 
peut  occuper  un  ou  deux  lobes  , un  hémisphère  presque  entier, 
si  une  observation  rapportée  par  Abercrombie  s’y  rattache  réel- 
lement. Assez  souvent,  on  la  voit  s’étendre  de  la  superficie  du 
cerveau  à la  paroi  des  ventricules;  dont  elle  dissèque  en  quel- 
que sorte  la  membrane  interne 

Tissu  cellulaire.  — Le  tissu  cellulaire  qui  constitue  cette  al- 
tération paraît  être  la  trame  celluleuse  de  la  substance  céré- 
brale mise  à nu  par  la  disparition  de  la  pulpe  nerveuse  elle- 
même  , sorte  d’opération  chimique  qui  sépare  complètement 
deux  corps,  en  soumettant  l’un  d’eux  à une  sorte  de  décomposi- 
Uon,  de  fusion  qui  met  l’autre  tout  à fait  à nu.  Il  se  présente 
sous  forme  de  brides,  de  filaments,  s’entrecroisant  en  tous  sens 
dans  l’intérieur  de  l’espèce  de  foyer  qui  résulte  de  la  disparition 


246  BAMOLLISSF.MEKT  CHRONIQUE.  (aNAT.  PATH.) 

de  la  substance  cérébrale  , et  donnant  à ce  dernier  un  peu  de 
l’apparence  de  certaines  cavernes  tuberculeuses  que  traversent 
des  débris  de  tissu  cellulaire  , de  parencliyme  pulmonaire  j dé 
vaisseaux.  Presque  tout  à fait  blanc  dans  quelques  cas  , il  est 
plus  souvent  un  peu  grisâtre  ; parfois  il  présente  une  teinte  un 
peu  jaunâtre,  mais  toujours  très-claire,  et  jamais  de  coloration 
plus  prononcée.  Des  vaisseaux  l’accompagnent  quelquefois;  ils 
sont  en  général  volumineux  , on  n'y  rencontre  pas  toujours  de 
capillaires  appréciables  à la  vue;  la  plupart  suivent  les  filaments 
celluleux  , d’autres  les  abandonnent  et  traversent  seuls  les  es- 
paces que  ceux-ci  laissent  entre  eux. 

La  consistance  de  ce  tissu  cellulaiie  est  assex  variable.  Tantôt 
il  est  très-mol , et  n’offre  presque  aucune  cohésion  ; tantôt , au 
contraire,  il  est  fort  dense,  et,  dans  quelques  points  peut  offrir 
une  résistance  un  peu  fibreuse.  Ces  deux  extrêmes  me  parais- 
sent, en  général,  indiquer  également  une  altération  assez  an- 
cienne. Le  premier  cas  , au  moins,  semble  l’annonce  de  la  dis- 
parition prochaine  de  ce  tissu  cellulaire  lui-même,  par  suite  du 
progiès  continuel  de  la  cause  productrice  et  propagatrice  de  la 
maladie.  Le  second,  au  contraire,  signifie  que  sa  marche  s’ar- 
rête et  qu’elle  tend  à cet  état  d’induration,  qui  est  la  seule  gué- 
rison dont  soient  susceptibles  les  altérations  organiques  aussi 
avancées.  Il  faut  remarquer  cependant  que  l’étude  de  certaines 
cavités  dans  le  cerveau  semble  fournir  des  exemples  de  guérison, 
après  la  disparition  complète  de  ce  tissu  cellulaire.  Mais  cest 
qu’alors  la  maladie  était  demeurée  toute  locale,  et  avait  épuisé 
toutes  ses  périodes  sur  un  point,  sans  s’être  étendue  plus  loin. 

Par  leur  entrecroisement,  ces  bride.s  celluleuses  laissent  entre 
elles  des  vides  très-irrégullers  et  inégaux.  Le  progrès  de  la  ma- 
ladie consiste  réellement  dans  l’agrandissement  de  ces  espaces  , 
puisqu’ils  résultent  de  l’absorption  successive  et  du  tissu  ner- 
veux et  du  tissu  cellulaire  : aussi  leur  inspection  peut  donner 
une  idée  approximative  du  degré  auquel  est  parvenue  la  mala- 
die, mais  non  de  son  ancienneté,  car  elle  ne  marche  pas  dans 
tous  les  cas  avec  une  égale  rapidité. 

. JÀqiiide  lait  de  chaux.  — Ces  espaces  se  trouvent  remplis  par 
un  liquide  blanchâtre,  trouble,  séreuK,  comparé  par  le  profes- 
«eur  Andràl  à du  petit  lait,  àpp''lé  par  MM.  Cvuvedhier  et  De- 


INFILTRATION  CELLULEUSE.  ' 

chambre  lait  de  chaux  , nom  qui  en  rend  assez  bien  ks  quali- 
tés physiques. 

Ce  liquide  est  parfaitement  distinct  du  pus  par  sa  fluidité  , sa 
teinte  blanche  ou  grisâtre , et  qui  m’offre  jamais  les  nuances 
jaunes  ou  vertes  de  la  suppuration.  Il  n’offre  pas  non  plus  au 
toucher  cette  sensation  douce  et  onctueuse  du  pus.  Il  est  certain 
qu’il  a un  aspect  spécial  et  qui  ne  se  retrouve  point  ailleurs  : 
cependant  il  ressemble  à un  liquide  trouble  et  blanchâtre  que 
l’on  trouve  parfois  dans  ces  poches  fibreuses  voisines  des  con- 
crétions calcaires,  dont  elles  semblent  le  premier  degré,  et  qui 
se  rencontrent  auprès  des  tissus  fibreux,  par  exemple  aux  ori- 
fices du  cœur. 

Quelquefois  presque  limpide  , ordinairement  louche  , le  lait 
de  chaux  tient  eu  suspension  un  grand  nombre  de  petits  corps 
semblables  à une  sorte  de  poussière,  que  l’on  ne  sent  pas  au 
toucher,  et  que  l’on  ne  distingue  souvent  qu’en  plaçant  ce  li- 
quide, recueilli  dans  un  flacon,  entre  l^œil  et  la  lumière.  Quand 
on  le  laisse  reposer,  ces  petits  grains  se  précipitent  presque  tous 
dans  les  couches  inférieures  du  liquide. 

J’ai  reconnu  récemment  un  fait  assez  curieux^  et  qui  vient 
fortement  appuyer  l’opinion  que  j’émets  sur  la  nature  de  ce  li- 
quide : c’est  que,  lorsqu’on  broie  de  la  substance  cérébrale  dans 
de  l’eau,  celle-ci  devient  trouble  et  d’un  blanc  grisâtre  tout  à 
fait  semblable  au  lait  de  chaux. 

Ce  liquide  lait  de  chaux  peut  exister  en  grande  quantité  dans 
les  infiltrations  celluleuses  , lorsque  le  tissu  cellulaire  bien  dis- 
séqué, ou  même  déjà  en  partie  détruit,  laisse  de  larges  espaces  - 
entre  ses  mailles.  On  le  voit  quelquefois  s’écouler  abondamment 
à l’incision  du  cerveau.  D’autres  fois , il  est  tout  à fait  enve- 
loppé par  le  tissu  infiltré,  dont  il  faut  alors  l’exprimer  par  la 
pression. 

Quelquefois,  mais  non  toujours,  il  entraîne  avec  lui  des  flo- 
cons blanchâtres  désorganisés,  et  qui  ne  sont  autre  chose  que 
des  lambeaux  détachés  de  substance  cérébrale.  La  présence  de 
ces  flocons  que  le  doigt  écrase  par  la  moindre  pression  , ejt  dont 
on  distingue  quelquefois  l’intime  mélange  au  liquide  lajt,  t^e 
chaux,  semble  démontrer  que  ce  dernier  n’est  pas  le  résultat 
d’une  sécrétion  nouvelle  , mais  simplement  le  produit  d’une 
sorte  de  fusion,  d’une  véritable  liquéfaction  de  la  pulpe  ner- 


- R AMOI.USSKMKN  r CMROI'iiOtF..  (a\aï.  païh.  ; 

veuse.  Cela  me  paiaÎL  distiiifjucr  ce  liquide,  soil  dn  vériiabie 
pus,  soit  de  la  sérosité  qui,  dans  les  cavités  anciennes,  ne  semble 
exister  que  pour  remplir  le  vide  qu’elles  formenl,  et  est  certai- 
nement le  produit  de  la  secrétion  de  leurs  parois.  Le  lait  de 
chaux  n’est  pas  un  produit  de  secrétion,  de  la  sérosité  , mais  la 
substance  cerebrale  elle-même  licjuéliée. 

Etat  de  la  substance  cérébrale  enaircmnanle .[ — Lorsque  l’on 
prend  ces  infiltrations  celluleuses  au  degré  que  nous  étudions 
maintenant,  on  trouve,  eu  général,  la  substance  médullaire  en- 
vironnante , dans  une  plus  ou  moins  grande  étendue,  molle, 
pulpeuse  , ordinairement  blanche  ou  jaunâtre , plus  ou  moins 
vasculaire,  presque  jamais  rosée.  C’est  là  le  premier  degré  du 
ramollissement  chronique.  Cette  substance,  encore  seulement 
ramollie,  subira  à son  tour  la  transformation  celluleuse.  Lors- 
que cette  alteration  cle  la  substance  médullaire  s’étend  aux  cir- 
convolutions, la  substance  corticale  qui  se  trouve  alors  la  re- 
couvrir, présenté  habituellement  l’altération  que  j’ai  décrite 
Êous  le  nom  de  plaques  jaunes,  ou  elle  a complètement  disparu, 
ne  laissant  pour  trace,  ainsi  que  nous  l’avons  dit,  qu’une  teinte 
légèrement  jaunâtre , à la  superficie  de  l’altération  de  la  sub- 
stance médullaire. 

Les  parois  de  l’infiltration  celluleuse  sont  cjuelquefois  for- 
mées par  un  tissu  sain  ou  à peu  près.  Cela  se  voit  lorsque  la 
maladie  est  récente,  et  ne  s’est  pas  encore  étendue  aux  environs 
du  ramollissement  primitif  j ou  bien,  au  contraire,  lorsque,  très- 
avancée,  ses  progrès  se  sont  arrêtés  et  qu’elle  se  trouve  bien  li- 
mitée au  mijieu  de  la  substance  cérébrale  saine.  Dans  ce  derniei 
cas,  ordinairement,  celle-ci  présente  une  tendance  à lui  former 
des  parois  lis.ses,  analogues  à une  surface  séreuse,  indurées  quel- 
quefois, enfin  présentant  un  aspect  sur  lequel  nous  aurons  à 
revenir,  lorsejue  nous  étudierons  la  cicatrisation  du  ramollis- 
sement. 

Observation  (ig.  Délire  clironique  avec  e,\accrba lions.  — Ramollis- 
sement ronge  et  infiltration  sangainé  dos  circmivolntious  ; plaque.s 
■jaunes  des  .anfractuosités  ; ramollissémént  de  la  substance  médullaire 
sotis-jacente. 

La  nomipée  V‘  clri',  âgée  <le  soixaulc-dix-ueuf  ans  , entra,  le 


lNFTLTl\/VTION  CELLüLEL'SE. 


249 


22  novcmliro  1838,  an  iv  22  de  la  salle  Saint  Antoine , dans  le 
service  de  M.  Cruveilhier.  J’avais  eu  occasion  de  la  voir,  quel- 
que temps  auparavant,  dans  le  service  de  M.  Pins,  où  elle  était 
entrée  le  29  septembre.  J’avais  pris  alors  sur  elle  les  notes  sui- 
vantes : 

Agitation,  grande  loquacité,  divagation.  La  malade  passe  la 
nuit  à se  lever  et  s’aller  coucher  clans  le  lit  de  ses  voisines  ; 
cependant  elle  répond  assez  nettement  aux  questions  qu’on  lui 
fait  sur  son  état  actuel;  mais  il  est  impossible  d’en  obtenir  le 
moindre  renseignement  sur  ses  antécédents.  On  s'assure  que 
les  mouvements  delà  langue  et  des  membres  sont  entièrement 
libres.  La  poitrine  est  peu  sonore  partout  ; râle  sibilant  à droite  ; 
à gauche  et  à la  base,  râle  sous-crépitant  muqueux  assez  abon- 
dant. Matité  assez  étendue  à la  région  précordiale , battements 
du  cœur  assez  réguliers,  bruits  sourds  et  normaux.  La  peau  est 
moite  et  très-chaude  ; le  pouls  fort,  médiocrement  fréquent,  un 
peu  irrégulier.  Langue  chargée,  un  peu  rouge  ; diarrhée.  La 
maigreur  est  excessive  ; la  figure  est  grimaçante  et  la  physiono- 
mie complètement  dénuée  d’intelligence.  Une  sai.gnée  au  bras 
fut  pratiquée;  le  sang  était  un  peu  couenneux.  Quelques  lave- 
ments laudanisés  et  la  diète  firent  passer  le  dévoiement  et  ra- 
menèrent un  peu  de  calme.  La  malade  fut  renvoyée  dans  son 
dortoir  assez  tranquille,  mais  déraisonnant  toujours. 

Voici  en  quel  état  elle  revint  à l’infirmerie  le  22  novembre  ; 

Insomnie  complète  ; délire  continuel.  Ses  mains  s’occupent 
sans  cesse  à défaire  ses  couvertures,  à tortiller  son  linge  ; mais 
elle  ne  cherche  pas  à sortir  de  son  lit.  Elle  ne  cesse  de  parler 
un  seul  instant  du  jour  ou  de  la  nuit;  il  est  difficile  de  préciser 
sur  quels  points  porte  son  délire  : elle  se  croit  entourée  de  per- 
sonnes avec  lesquelles  elle  tient  les  conversations  les  plus  va- 
riées! Si  on  lui  adresse  la  parole,  elle  répond  aussitôt  avec  une 
certaine  vivacité  ; elle  se  plaint  de  souffrir  partout  ; elle  espère 
mourir  bientôt....  Si  l’on  précise  un  peu  les  questions,  on  n’ob- 
tient pas  de  réponses  raisonnables  ; du  reste,  elle  vous  demande 
toujours  des  nouvelles  de  votre  santé,  et  paraît  reconnaissante 
de  ce  qn’on  s’occupe  d’elle. 

Tel  fut  l’état  dans  lequel  demeura  cette  femme  jusqu'au 
8 décembre,  époque  où  elle  mourut.  Je  ne  lui  ai  jamais  vu  , 
pendant  cet  espace  de  temps,  un  instant  de  repos  ni  de  soin- 


250  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE.  (ANAT.  PATH.) 

meil  : elle  était  tombée  dans  un  état  de  marasme  et  de  mai- 
greur extraordinaire.  Dans  les  derniers  temps  de  sa  vie , sa 
voix  était  tellement  enrouée  et  affaiblie,  qu’on  ne  pouvait  plus 
distinguer  un  seul  mot.  Elle  laissait  aller  sous  elle. 

A son  entrée,  comme  elle  avait  de  la  force  et  de  la  fréquence 
dans  le  pouls,  que  la  peau  était  très-chaude,  plusieurs  saignées 
du  bras  furent  pratiquées  ; des  potions  avec  du  sirop  Diacode, 
avec  du  laudanum  de  Rousseau  (dix  gouttes),  furent  adminis- 
trées ; mais  on  n’obtint  à peu  près  aucun  effet  de  ces  moyens. 
Le  délire  paraissait  un  peu  moins  bruyant  pendant  quelques 
jours,  mais  il  ne  tardait  pas  à reprendre  son  caractère  habituel. 

Pendant  les  trois  derniers  jours  de  sa  vie,  elle  demeura  dans 
une  immobilité  complète,  ayant  à peine  de  respiration  et  de 
pouls.  Jusque  là  le  mouvement  et  le  sentiment  avaient  paru 
intacts. 

Autopsie. — Un  peu  de  sérosité  dans  la  cavité  de  l’arach- 
noïde. Sérosité  al)ondante  dans  la  pie-mère,  à sa  partie  dé- 
clive, grande  quantité  de  ce  liquide  transparent  à la  base  du 
crâne.  Pas  d’altération  des  vaisseaux . Injection  médiocre  des 
veines  de  la  pie-mère. 

En  retirant  cette  membrane,  on  enlève  la  superficie  de  quel- 
ques circonvolutions  de  la  convexité,  surtout  à gauche.  Ces 
points  sont  rosés,  très-mous  ; un  filet  d’eau  les  pénètre  jusqu  au- 
delà  de  la  substance  corticale;  on  y voit  par  place  un  peu  de 
pointillé  rouge  fin  et  serré.  Ce  ramollisseineni  s étend  à une 
ou  deux  anfractuosités. 

A l’extrémité  postérieure  de  l’hémisphère  gauche,  les  circon- 
volutions sont  réduites  en  une  bouillie  rosée  à 1 extérieur,  d un 
rouge  lie  de  vin  dans  quelques  points,  grisâtre  a 1 inteneur. 
La  couche  la  plus  superficielle,  entraînée  par  la  pie-mère,  laisse 
à découvert  une  cavité  profonde  creusée  dans  l’epaisseur  du 
lobe  cérébral , travei-sée par  quelques  brides  celluleuses,  et  pe. 
nétrant  presque  jusqu’au  ventricule.  Les  parois  de  cette  cavité  , 
d’un  blanc  grisâtre,  sônt  inégales,  comme  feutiées,  tiès  ino  e. 
jusqu’à  une  certaine  profondeur,  et  contiennent  un  liquide 
trouble,  d’un  blanc  grisâtre,  lait  oe  chaux.  Paimi  le.s  ciicon 
volutious  t. ès-ramollies  qui  recouvraient  cette  cavité,  on'  voyait 
dans  quelques  points  la  substance-  corticale  confondue  avec 
la  médulaire  en  une  bouillie  grisâtre  , dans  laquelle  ou  pou- 


INFILTRATION  CELLULEUSE. 

vait  supposer  la  présence  du  pus  ; elle  était  traversée  par  des 
vaisseaux  rouges,  dilatés,  assez  nombreux. 

Dans  quelques-unes  dès  anfractuosités  voisines  de  la  con- 
vexité de  l’hémisplière,  la  substance  corticale,  dans  une  assez 
grande  étendue,  était  transformée  en  un  tissu  jaunâtre  peau  de 
chamois,  mollasse  au  toucher,  et  pourtant  doué  d une  cei  laine 
consistance,  recouvert  par  une  membrane  fine  assez  dense  , 
un  peu  jaune , vasculaire,  adhérente,  et  qui  se  séparait  de  la 
pie-mère.  Les  circonvolutions  de  l’extrémité  postérieure  de 
l’hémisphère  droit  étaient  reunies  par  des  adhérences  ties- 
denses,  et  qui  criaient  presque  sous  le  scalpel.  Leur  tissu  était 
converti  en  une  substance  très-molle,  d’un  rouge  plus  ou  moins 
foncé,  suivant  les  points;  au-dessous,  la  substance  médullaiie 
était  molle  dans  une  petite  étendue  et  infilirée  d’un  liquide 
lait  de  chaux.  Au  fond  des  anfractuosités  voisines,  et  jusqu  a 
une  assez  grande  distance,  altération  de  la  substance  corticale 
semblable  à celle  que  nous  avons  décrite  dans  1 autre  hémi- 
sphère : tissu  jaune,  consistant,  meinbr.inilorine , recouvert 
d’une  couche  celluleuse  très-mince,  vasculaire. 

Les  parois  des  ventricules  étaient  saines,  sauf  des  adhérences 
assez  prononcées  au  fond  de  chacune  des  cavités  digitales.  Dans 
le  corps  sti'ié  gauche,  petite  cavité  pisiforme,  jaunâtre;  canaux 
vasculaires  assez  développés. 

Rien  au  cervelet  ni  à la  moelle  allongée. 

Le  lobe  inférieur  du  poumon  gauche  est  rouge , friable,  volu- 
mineux, infiltré  de  liquides  non  spumeux  et  sanguinolents.  In- 
filtration séro-sanguinolente  des  parties  déclives  dU  poumon 
droit.  Hypertrophie  énorme  du  ventricule  gauche  du  cœur.  Pe- 
tites végétations  fibreuses  sur  le  bord  libre  de  la  valvulé  sig- 
moïde. 


Prêtre  n’avait  présenté  qu’une  seule  forme  d’accidents , le  dé- 
lire, passé  à l’état  chronique,  ayant  duré  depuis  une  époque 
indéterminée  du  reste,  jusqu’à  la  mort,  et  s’éinnt  montré  d’une 
façon  continué,  sâuf  quelques  exacerbations  ; il  était  doilc  à pré- 
sumer que  les  lésions  multiples  qu’ofirail  sou  cervetui  n’étaient 
autre  chose  que  les  degrés  liivers  d’une  même  altération.  En 
efi'et,  nous  avons  trouvé  un  ramollissement  aigu,  rouge  et  in- 


r,Aw-)Tj.issi;.\TF.\T  cHROxrçTJr;.  (anat,  patit.)  - 

fihrc  desano-  aux  circoiivoluiions , un  ramollissement  pulpeux 
où  la  substance  corlicale  et  la  médullaire  se  trouvaient  confon- 
dues ensemble  sans  rougeur,  et  dans  un  état  assez  semblable  à 
la  suppuration;  des  plaques  jaunes;  enfin  une  infiltration  cellu- 
leuse, simplement  imprégnée  de  lait  de  chaux  dans  un  point, 
convertie  dans  une  autre  en  une  cavité  traversée  par  des  brides 
celluleuses.  Ainsi , presque  tous  les  degrés  du  ramollissement 
se  trouvaient  là  rangés  les  uns  à côté  des  autres , sous  les  di- 
verses formes  qui  caractérisent  chacun  d’eux , témoignant,  par 
cette  apparence,  que,  pendant  la  maladie  de  Prêtre,  le  ramol- 
lissement n avait  cessé  de  croître  dans  les  points  qu’il  occupait, 
et  de  se  propager  aux  parties  voisines. 

Ces  réflexions  sont  également  applicables  à l’observation  d’A- 
lais  (Obs.  65) , rapportée  précédemment  : à des  accidents  dont 
l’origine  ne  pouvait  non  plus  être  douteuse,  et  qui  .s’étaient 
montrés  à des  époques  successives,  répondaient  des  altérations 
semblables  à celles  de  Prêtre,  les  unes  aiguës,  ramollissement 
rouge  des  circonvolutions;  les  autres  plus  avancées,  plaques 
jaunes  et  infiltration  celluleuse. 

Observation  70.  — Accidents  cérébraux  apparaissant  à plusieurs  re- 
prises pendant  plusieurs  mois.  Mort  à la  suite  d’une  dernière  attaque. 
— Ramollissement  aigu  des  circonvolutions  ; ramollissement  pulpeux, 
plaques  jaunes;  infiltration  celluleuse. 

Une  femme  âgée  de  soixante-treize  ans  , nommée  Monlalant, 
avait  toujours  eu  une  bonne  santé,  sauf  un  flux  bémorrhoïdal 
qui  se  montrait  habituellement  plusieurs  fois  par  au.  Pendant 
les  six  premiers  mois  de  l’aunée  1839,  elle  éprouva,  à cinq  ou 
six  reprises,  des  accidents  caractérisés  par  un  afl’aiblissemeul 
plus  ou  moins  considérable  des  mouvements  des  tnembres  su- 
périeurs , des  engourdissements  et  des  fourmillements  aux 
doigts , un  peu  de  céphalalgie  frontale , de  1 embarras  de  la 
parole,  les  dernières  fois  même  de  l’assoupissement.  On  em- 
ployaiPun  traitement  antiphlogistique,  et  ces  symptômes  se  dis- 
.sipaient  : les  mouvements  seuls  ne  revinrent  qu’incomplète- 
ment.  Ces  accidents  furent  observés  par  ftl.  Uucrest,  interne  a 
la  Salpêtrière.  Une  dernière  attaque  eut  lieu  dans  les  derniers 
jours  du  mois  de  juillet  assoupissement,  raideur  générale, 
cris  aigus  quand  on  cherche  à étendre  les  coudes,  quelques 


IJiFILTUATlOK  CELLULEC612. 


■253 


niouveiuenls  spontanés  des  meinhi es  supérieurs , bouche  dé- 
viée à droite.  3Iort  au  bout  de  quelques  jours  avec  coma  pro- 
fond , résolution  et  insensibilité'  générales. 

Autopsie.  — La  pie-nière  est  infiltrée  d’une  assez  grande 
quantité  de  sérosité.  A la  partie  moyenne  de  riiéinisphère  droit, 
on  trouve  un  ramollissement , sans  changement  de  couleur, 
qui  s’étend  depuis  les  circonvolutions  presque  jusqu’au  ventri- 
cule , ayant  en  largeur  à peu  près  l’étendue  d’une  pièce  de 
cinq  francs.  Au-dessus  dece  ramollissement,  les  circonvolutions 
ont  tout-à-lait  disparu,  remplacées  par  une  substance  pul- 
peuse , informe  , d’un  blanc  un  peu  grisâtre , et  dont  la  couche 
la  plus  superficielle  se  laisse  entraîner  par  la  pie-mère  ; tout  à 
i entour  de  cette  altération,  la  couche  corticale  est  transformée, 
dans  une  certaine  étendue,  en  une  substance  jaune,  membrani- 
lorine  , mollasse  (plaques  jaunes). 

Au-dessus  de  l’hémisphère  gauche,  les  circonvolutions  ont 
conservé  leur  forme , mais  présentent  des  altérations  très- va- 
llées . quelques-unes  sont  saines;  d’autres  un  peu  molles  et 
lougeaties  dans  toute  1 épaisseur  de  la  substance  corticale,  sans 
tuméfaction  appréciable  ; d’autres  présentent  des  plaques  jau- 
nes dans  1 étendue  d une  pièce  de  cincj,  de  dix,  de  quinze  sols. 
Ces  plaques  ont  une  teinte  jaune  chamois  , un  peu  plus  minces 
que  la  couche  corticale  elle-même;  quand  on  les  touche  avec  la 
pointe  a un  scalpel,  elles  se  laissent  plisser  à la  manière  d’une 
membrane. 

Au-Dessous  de  chacune  de  ces  plaques , la  substance  médul- 
laire ese-ramollie  dans  une  étendue  assez  peu  considérable.  Sous 
la  plus  large,  à la  partie  moyenne  de  la  conve.xité , on  trouve 
un  espace  de  l’étendue  d’une  noisette,  formé  d’un  tissu  cellu- 
laire infiltré  de  lait  de  chaux.  Mais  ce  tissu  cellulaire  n’avait 
pas  toul-a-fait  l’apparence  ordinaire  : il  était  composé  de  nom- 
breux filaments  très-deliés  , finement  entre-croisés  , blancs, 
semblant  avoir  été  empruntés  à un  cocon  de  ver  à soie. 


Ubsekvauon  ^1.  Rainollisseinent  aigu  et  ranioUisseinenl  chroni- 
que a clilféi-cnts  degrés. 

Lue  vieille  femme  mourut  au  mois  de  janvier,  dans  le  ser- 
vice (le  M.  Cruveilhicr  J’ai  su  que  celte  h nime  paraissait  sûiis 


264  rAmollissemeint  chronique,  (anat.  path.) 

l’influence  d’une  alFeclion  ce'rélnale  chronique , lorsqu’elle  fut 
prise  d’accidents  cérébraux  aigus  et  rapidement  suivis  de  la 
mort.  Malgré  la  brièveté  de  ces  renseignements  , j’ai  cru  devoir 
consigner  ici,  dans  tous  ses  détails,  l’autopsie  de  cette  femme, 
que  j’ai  pratiquée  moi-même , et  dont  la  description  m’a  paru 
instructive  pour  noUe  sujet. 

Autopsie.  — La  dure-mère  paraît  un  peu  tendue;  petite 
quantité  de  sérosité  dans  l’arachnoïde  et  dans  la  pie-mère  ; les 
vaisseaux  de  cette  dernière  sont  très-injectés,  surtout  les  plu 
petits  qui  dessinent  en  certains  points  des  stries  rouges  très- 
serrées.  Les  artères  de  la  base  présentent  quelques  plaques  jau- 
nâtres, sans  ossification. 

A la  partie  externe  de  la  convexité  de  rhémisphère  droit , on 
trouve  un  ramollissement  de  l’étendue  d’une  pièce  de  cinq 
francs;  les  circonvolutions  ramollies,  très-légèrement  tumé- 
fiées , ne  sont  pas  déformées  ; le  ramollissement  n’occupe  que 
la  couche  corticale , et  suit  eu  partie  la  pie-mère  , sous  forme 
d’une  pulpe  mollasse  , inégalement  rougeâtre;  ses  bords  sont 
nettement  arrêtés.  On  trouve  deux  autres  ramollissements  tout 
semblables , mais  moins  larges  , au-dessus  des  lobes  antérieur 
et  postérieur.  Au-dessous  de  chacun  d’eux,  la  substance  blan- 
che, dans  une  profondeuV  de  trois  centimètres  à peu  près,  et 
dans  une  largeur  précisément  équivalente  à celle  de  l’altération 
de  la  couche  corticale,  présente  une  rougeur  assez  vive,  sans 
aucun  ramollissement  : on  y voit  un  grand  nombre  de  vais, 
seaux  routes,  infiniment  déliés  et  qui  paraissent  se  diriger  vers 
la  périphérie.  On  ne  voit  rien  de  semblablç  dans,. aucun  autre 
point,  {Ramollissement  aigu.) 

A la  partie  postérieure  et  un  peu  interne  du  lobe  postérieur, 
plusieurs  circonvolutions  avec  les  anfractuosités  correspondan- 
tes sont  d’un  très-petit  volume,  toutes  ratatinées,  d un  jaune 
safran  clair  ; la  pie-mère  leur  est  assez  adhérente , bien  qu  elle 
puisse  en  être  détachée  sans  en  altérer  la  surface.  Une  coupe 
perpendiculaire  faite  en  ce  point  montre  que  la  substance  coi- 
ticale  est  rem|)lacée  par  une  couche  jaunâtre , mcmbianifoime, 
non  vasculaire , ayant  à peu  près  la  moitié  de  son  épaisseur 
normale  : en  râclant  avec  le  scalpel , cette  couche  se  laisse  bien 
nettement  détacher  de  la  substance  blanche  à laquelle  elle  est 
superposée.  Celle-ci  est  cependant  ramollie  : dans  toute  la  moi- 


INFILTI\ATI0N  CELLliLEtlSE.  ^OO 

tié  postérieure  de  l’hémisphèrç,  elle  offre  la  consistance  et  l’as- 
pect d’un  fromage  mol,  très-blanche  non  vasculaire , se  lais- 
sant pénétrer  et  détacher  en  lambeaux  très-menus  par  un  filet 
à’ eau.  (Plagues  jaunes,  ramollis  s ement  pulpeux.) 

A fa  partie  externe  de  la  convexité  des  lobes  moyen  et  pos- 
térieur de  l’hémisphère  gauche  , dans  1 étendue  de  six  à huit 
centimètres  carres,  les  circonvolutions  ont  tout-a-fait  dispai u , 
remplacées  par  une  surface  plane  ou  plutôt  sans  forme  deteimi- 
née,  d’un  jaune  d’ocre,  se  plissant  tout  entière  à la  ihanière 
d’une  .membrane  , quand  on  en  touche  un  point , se  laissant 
déprimer,  comme  s’il  y avait  un  espace  vide  âu-dessons.  Cette 
couche  jaune  membraniforme  semble  s’attacher,  à sa  circonfé- 
rence, à la  couche  corticale  des  circonvolutions  demeurées  sai- 
nes, et  il  n’y  a aucune  transition  entre  la  surface  saine  et  la 
surface  malade.  La  pie-mère  sus-jacente  ne  présente  rien  à noter, 
non  plus  que  sur  les  plaques  jaunes  de  l’autre  hémisphère  ; seu- 
lement elle  est  séparée  de  cellcs-ci  par  une  membrane  celluleuse 
extrêmement  fine  etpareburue  par  de  petits  vaisseaux  très-dé- 
liés 5 en  sorte  qu’une  coupe  perpendiculaire  pratiquée  en  ce 
point  fait  voir  successivement  t la  pie-mère,  une  lame  celluleuse 
mince  et  Vasculaire,  une  plaque  jaune  -,  au-dessous  de  celle-ci 
qui  représente  la  couche  corticaile  dont  elle  a à peine  le  quart  de 
l’épaisseur,  la  substance  blanche  est,  dans  une  grande  profon- 
deur, convertie  en  uhé  sorte  de  réseati'de  fibres  entrelacées  , 
d’une  excessive  délicatesse  , semblables  aux  fils  d’une  toile  d’a- 
raignée , et  dont  on  exprime  une  assez  grande  quantité  d’un 
liquide  trouble,  grisâtre,  séreux  •(  iiijillration  celluleuse  ).  Gela 
est  d’autant  plus  prononcé  qu’on -s’approche  davantage  de  la 
substance  corticale  ; plus'  profondément  et  près  du  ventricule, 
la  substance  médullaire  est  seulement  plus  molle  qu’à  l’état 
normal , pulpeuse,  puis  elle  reprend^graduellement  son  appa- 
rence naturelle.  Il  n’y  a à l’cnlour  ni  rougeuiv  ni  vascularité  , 
ni  aucune  coloration.  Les  parties  inBltrées  de  lait  de  chaux  of- 
frent une  légère  teinte  grisâtre  : on  y distingue  quelques  pe- 
tits vaisseaux  très-déliés. 

Sur  la  convexité  du  lobe  moyen,  qiielques  circonvolutions 
sont  supei  ficielleinent  molles,  rougeâtres,  non  déformées,  toutes 
semblables  à celles  que  nous  avons  décrites  sur  l’autre  hémis- 
phère. 


25f)  RAMOLLlSSEMJiM  CHROWlQUt.  (a>AT.  I’ATH.) 

Il  n’y  a rien  à noler  dans  le  reste  de  rencéphale.  Légère  in- 
jection de  la  substance  nerveuse. 

Observation  72.  — Ramollissement  aigu  et  ramollissement  chroni- 
que à différents  degrés. 

La  nommée  Michon,  âgée  de  soixante-quinze  à quatre-vingts 
ans,  avait  éprouvé  depuis  quelques  années,  à plusieurs  reprises, 
des  accidents  cérébraux  assez  graves,  et  survenant,  à ce  qu’il  pa- 
raît , sous  l'orme  d’apoplexie.  On  n’a  pu  se  procurer  de  plus 
amples  renseignements. 

Vers  la  fin  du  mois  de  no)/embre  1 838,  elle  fut  portée  à l’in- 
firmerie, parce  que,  dans  sa  division,  on  lui  trouvait  l’air  souf- 
frant depuis  quelques  jours.  Elle  paraissait  fort  engourdie  ; elle 
me  dit  qu’elle  perdait  la  tête , qu’elle  ne  pouvait  se  rendre 
compte  de  son  état  : elle  ne  pouvait  dire  si  elle  avait  un  côté 
plus  faible  que  l’autre  ; elle  ne  répondait  en  général  que  lors- 
qu’on la  pressait  de  questions,  et  presque  toujours,  je  ne  sais 
pas.  Elle  se  plaignait  de  souffrir  par  toute  la  tête  , pleurait  et 
disait  que  son  mal’tournait  en  paralysie.  Sa  figure  était  hébétée, 
ses  mains  pouvaient  à peine  serrer,  qt  paraissaient  aussi  faibles 
d’un  coté  que  de  l’autre.  La  langue 'se  tirait  droite.  Le  pouls 
était  faible  et  peu  fréquent  ; peu  de  chaleur  à la  peau. 

Cette  note  fut  prise  le  20  novembre  : pendant  les  six  semaines 
suivantes,  on  s’occupa  fort  peu  de  cette  femme.  Elle  se  levait 
quelquefois  et  Jnarchait  dans  la  salle  sans  s’appuyer  ; mais  ha- 
bituellement elle  demeurait  plongée  dans  un  état  de  torpeur  re- 
marquable ; elle  mangeait  peu  , ne  se  plaignait  pas  , ne  parlait 
jamais  qu’on  ne  l’interrogeât,  et  l’epondait  très-brièvement  aux 
questions  qu’on  lui  adressait.  Elle  n’avait  de  fièvre  a aucune 
heure  de  la  journée. 

Le  14  janvier,  tà  la  visite  du  matin,  elle  ne  présenta  rien  de 
particulier.  A une  heure  de  l’après  midi,  elle  tomba  danslclat 
suivant: 

Forte  déviation  de  la  face  à droite;  contraction  énergique  du 
sterno-mastoïilicn  gauche.  Les  yeux  sont  ouverts,  immobiles  , 
déviés  à droite  et  un  peu  en  haut  les  pupilles  sont  i-galement 
et  moyemicmenl  dilatées.  Hémiplégie  iacomplèle  à gauche,  sans 


J j\  i l LT  liAX  1 0 B C L L L L I.EL  SK . 


267 


raideur;  sensibilité  un  peu  obtuse;  nioiivements  libres  à droite. 
La  respiration  est  lente  et  nalurelle.  Le  pouls  comme  à l’ordi- 
naire, sans  force  et  sans  fréquence.  L’intelli{;ence  ne  paraît 
pas  tout  à fait  abolie  : lorsqu’on  parle  fort  à la  malade,  elle  re- 
mue un  peu  les  lèvres  pour  essayei  de  répondre; sa  main  droite 
ramène  .sur  elle  les' couvertures.  ( Sinapismes.  ) 

Deux  heures  après , il  survient  une  réaction  assez  forte,  rou- 
geur de  la  face,  chaleur  moite  à la  peau,  force  et  fréquence  du 
pouls,  agitation  ( trente  sangsues  au  col  ).  Perle  de  sang  considé- 
rable, suivie  d’une  diminution  delà  fièvre  et  de  l’agitation. 

La  malade  vécut  encore  jusqu’au  9 au  matin,  c’est-à-dire  jus- 
qu’au sixième  jour,  sans  présenter  de  grands  changements.  Elle 
avait  l’air  hébété,  la  tête  toujours  déviée,  profondément  affais- 
sée, essayant  par  instants  quelques  monosyllabes  ; le  quatrième 
jour  elle  avait  vu  son  fils,  avait  paru  le  reconnaître  et  s’était  ef- 
forcée de  lui  parler,  puis  elle  était  tombée  presque  aussitôt  dans 
un  coma  profond.  Le  bras  gauche  avait  repris  une  partie  de  ses 
mouvements;  on  n’observa  jamais  de  raideur  dans  les  mem- 
bres. Les  pupilles  étaient  égales,  moyennement  dilatées  et  im- 
mobiles. La  fièvre  cessa  dès  le  second  jour,  et  le  pouls  reprit  de 
la  fréquence  seulement  à la  fin  de  la  vie. 

Julopsie  vingt-deux  heures  apres  la  mort.  — Infiltration  sé- 
reuse très-considérable  de  la  pie-mère,  écartement  profond  des 
circonvolutions,  épaississement  léger  des  artères.  Injection  vive 
de  la  pie-  mère,  surtout  à la  partie  postérieure  des  hémisphères. 
La  pie-mère  s’enlève  aisément  de  la  superficie  du  cerveau,  ex- 
cepté dans  les  points  que  j’indiquerai  plus  loin. 

Les  circonvolutions  sont  généralement  d’un  petit  volume  , 
inégales  à leur  surface  , comme  chagrinées  ; celles  de  la  partie 
moyenne,  de  la  convexité  surtout,  sont  ratatinées,  très-petites, 
sans  altération  de  couleur  ni  de  consistance;  l’épaisseur  de  la 
couche  corticale  ne  paraît  pas  sensiblement  diminuée.  Cette  al- 
tération superficielle  (atrophie  sénile)  occupe  aussi  bien  les  an- 
fractuosités que  les  circonvolutions  (I). 


(1)  Cetlc  inlillraliou  .séreuse  u’e.xistall  que  pour  remplir  le  vide  occasioimé 
parlereirail  des  drcouvolnlioiis  airopliices.  l/ixurlcmeul.  des  anfractuo- 
sités eu  auiione.iil  raiicienuelé  ; cepcudaiil  il  est  iiupossilde  de  dire  si  elle 
n était  pas  devenue  plus  coiisidéralilc  à la  lin  de  la  •.  ic. 


17 


258  IlAMOLLiSSEMEKT  CHUONIQUE.  (aNAT.  PATH.) 

A la  partie  externe  de  la  convexité  de  rhémisphère  droit,  à la 
réunion  des  lobes  moyen  et  postérieur,  on  trouve  cinq  ou  six 
circonvolutions  dans  un  état  de  mollesse  diffluente , se  laissant 
profondément  déchirer  par  l’enlèvement  de  la  pie-mèï-e.  Ces 
circonvolutions  sont  tuméfiées  , très-lègèrement  rosées  , dans 
quelques  points  un  peu  pâlies,  car  on  ne  distingue  plus  la  sub- 
stance grise  de  la  blanche.  La  couche  corticale  est  presque  seule 
réduite  en  bouillie;  la  substance  blanche, au-dessous,  est  un  peu 
ramollie,  comme  raréfiée,  sans  changement  de  couleur. 

A la  pointe  du  lobe  postérieur,  quelques  circonvolutions  sont 
jaunâtres  à leur  surface  , déformées  ; au-dessous  on  trouve  une 
cavité  assez  mal  circonscrite,  formée  par  un  tissu  cellulaire  très- 
lâche,  infiltré  de  lait  de  chaux.  A la  partie  externe  du  centre 
ovale,  petit  ramollissement  tout  à fait  blanc.  Rien  à noter  dans 
le  corps  strié  ni  dans  la  couche  optique. 

A la  partie  interne  de  la  convexité  de  l’hémisphère  gauche, 
on  trouve  plusieurs  circonvolutions  tout  a fait  déformées , et  a 
leur  place  une  dépression  formée  par  un  tissu  membraniforme, 
jaune,  dense,  parcouru  à sa  surface  par  de  petits  vaisseaux  et 
adhérent  à la  pie-mère.  Au-dessous  est  une  sorte  de  cavité  pro- 
fonde, parcourue  par  un  grand  nombre  de  filaments  et  de  lames 
celluleuses  qui  s’entrecroisent  en  tous  sens,  et  sont  intiltrés  de 
lait  de  chaux.  Le  fond  de  cette  cavité  est  irrégulier,  très-ferme, 
comme  induré  dans  quelques  points  , assez  mal  circonscrit  ce- 
pendant, et  ne  paraît  pas  tapisse  par  une  membrane.  Au-des- 
sous, la  substance  médullaire  est  molle  dans  une  certaine  éten- 
due , sans  altération  de  couleur. 

La  surface  du  corps  strié  est  jaunâtre  et  déprimée  : au-des- 
sous est  une  cavité  qui  occupe  presque  tout  son  corps  et  qui , 
tout  à fait  semblable  à la  précédente,  est  formée  de  tissu  cellu- 
laire infiltré  de  lait  de  chaux.  ^ 

La  substance  médullaire  est  généralement  assez  injectee.  Les 
ventricules  contiennent  une  assez  grande  quantité  de  sérosité 
limpide.  Rien  au  cervelet  et  à la  moelle  alongée. 

Un  peu  d’engouement  des  poumons  : hépatisation  rouge  du 
lobe  inférieur  du  poumon  droit.  Pas  de  pleurésie. 

Rien  à noter  au  cœur,  non  plus  que  dans  1 abdomen. 

Alalgré  rapparcnio  i om 


plicalion  de  ce  lait  , il  est  larde  d ap- 


INFILXllATlOW  CELLULEUSE. 


26d 


précier  la  valeur  de  cliaciine  des  alte'rations  qu’il  présente , 
car  nous  reiiouvous  làpi  esijue  toutes  celles  que  nous  avons  dé- 
crites sous  le  nom  de  ramollissement  aigu  , de  plaques  jaunes 
des  circonvolutions , d’infiltration  celluleuse — Depuis  long' 
temps,  bien  que  cette  femme  ne  présentât  aucune  paralysie 
nous  soupçonnions  chez  elle  l’existence  d’un  ramollissement 
clironique.  11  s’est  en  effet  rencontré  parfaitement  caractérisé,  et 
tout  semblable  aux  descriptions  f[ue  nous  eu  avons  faites.  Quan  t 
aux  circonvolutions  mollasses,  pulpeuses,  rosées  et  tuméfiées  de 
l’hémisphère  droit , leur  physionomie  tranche  nettement  avec 
celle  des  circonvolutions  anciennement  malades  ; elles  rendent 
aussi  bien  compte  des  accidents  qui  ont  terminé  la  vie,  que  les 
autres  altérations  expliquent  l’état  misérable  dans  lequel  Mi- 
chon  traînait  son  existence. 

Les  deux  observations  précédentes,  bien  qu’assez  dépourvues 
de  détails  symptomatiques  , n’offrent  pas  moins  d’intérêt  pour 
l’anatomie  pathologique,  car  elles  nous  montrent  aussi  les  di- 
verses périodes  du  ramollissement  dans  un  rapprochement,  qui 
ne  peut  laisser  aucun  doute  sur  la  nature  des  liens  qui  les 
unissent. 

Maintenant  que  nous  avons  assisté  en  quelque  sorte  à la  trans- 
formation des  premières  périodes  de  la  maladie  qui  nous  oc- 
cupe , ramollissement  aigu  , puis  pulpeux,  en  ses  périodes  plus 
avancées,  plaques  jaunes,  infiltration  celluleuse  , je  vais  rap- 
porter des  observations  qui  rrous  montreront  ces  dernrèrcs  iso- 
lées ou  liées  seulerirent  au  ramollissement  pulpeux,  et  nous  fe- 
ront connaître  quelques-unes  des  circonstances  si  variées  de 
forme  et  d’étendue  qu’elles  peuvent  présenter. 


Observation  70.  — Paralysie  ancienne  avec  raideur  du  bras  gauch» 
— Ramollissement  chronique  du  cerveau. 

La  nommée  Aubert,  portière,  âgée  de  soixante-dix-sept  ans, 
est  entrée  à la  Salpêtrière  en  1834,  paralysée  du  bras  gauche 
elle  paraissait  alors  marcher  facilement.  Au  mois  de  janvier 
1838,  on  la  fit  passer  à la  division  des  infirmes  , et  depuis  lors 
elle  ne  se  leva  plus.  Au  commencement  du  mois  de  mai  elle 
commença  à laisser  aller  sous  elle.  L’intelligence  de  ’cette 
femme,  toujours  peu  développée,  s’était  fort  aflaiblie  ; pendant 
le  deniicr  mois  de  sa  vie,  il  lallait  la  faire  manger.  J1  ne  paraît 


2G0 


UA.UüLLlSSEAUiiNi'  CUllONK^Lii;.  (.UWl.  l’ATlI.j 

])as  que,  pendant  sou  séjour  à la  Salpèlrièrc,  elle  ail  jamais  eu 
d’allaques. 

Elle  lut  apportée  à l’inünnerie  le  22  juillet  1838.  La  pliysio- 
noiiiie  exprimait  la  stupidité;  cependant  elle  répondait  passa- 
blement aux  questions  qu’on  lui  adressait  ; mais  sa  mémoire 
paraissait  totalement  perdue.  La  jambe  droite  était  également 
raide,  mais  sans  doute  par  suite  de  l’immobilité  habituelle  de 
de  cette  femme.  Les  mouvements  du  bras  droit  étaient  libres. 
La  sensibilité  bien  conservée  partout.  Celte  femme  s’affaiblit 
rapidement  : une  large  escare  se  forma  au  siège  ; la  langue  se 
sécha,  le  pouls  prit  de  la  fréquence  et  de  la  petitesse;  elle  mou- 
rut le  16  septembre.  La  respiration  était  demeurée  libre  jus- 
qu’il la  Gn. 

Julopsie.  — Le  crâne  est  très  épais,  et  la  pie-mère  lui  est 
intimement  adhérente.  Pie-mère  infdtrée  cl  une  assez  grande 
quantité  de  sérosité;  cerveau  peu  volumineux.  A la  partie 
moyenne  et  interne  de  la  convexité  de  1 liémisphère  droit, 
immédiatement  au-dessous  des  circonvolutions  demeurées 
saines  à leur  surface,  la  substance  médullaire  présente  un  es- 
pace, une  sorte  de  cavité,  pouvant  loger  un  œuf  de  poule  , 
formé  d’un  tissu  celluleux  lâche,  entrecroisé,  infdlré  d’un  li- 
quide grisâtre.  La  substance  cereljrale  environnante  est  blanche 
et  ramollie  dans  une  plus  ou  moins  grande  étendue  : quatre 
ou  cinq  millimètres  au  ])lus  de  substance  saine  séparent  celte 
altération,  de  la  superficie  de  l’hémisphère,  du  coté  de  sa  con- 
vexité et  de  sa  face  interne.  Un  peu  plus  en  arrière,  quelques 
circonvolutions  de  la  convexité  sont  un  peu  molles  et  jaunâtres. 


Observation  y4* — Infiltration  celluleuse  à lu  partie  inférieure  de 
l’hémisphère  gauche. 

Une  femme  âgée  de  quatre-vingt-un  ans,  Marie  \iaid, 
mourut  d’une  pneumonie.  Elle  était  à la  Salpêtrière  depuis 
plusieurs  mois.  Elle  ne  marchait  pas,  ne  pouv'ait  se  seivii  de 
ses  bras,  même  pour  manger.  On  avait  cru  remarquer  que  le 
coté  droit  était  encore  plus  faible  que  le  gauche.  Elle  dimguail 
beaucoup  ; elle  était  dans  une  salle  de  gâteuses. 

lutopsic.  — Les  os  du  crâne  sont  très- épais.  La  j>ie-mère  est 
mliltréc  d’une  assez  grande  ([uantité  de  sérosité.  i\  la  partie 


INFiLTnÀTîON  Cr.I.T.ULEUSli. 

inlerne  de  la  base  de  riié.nispbèie  {vauclie,  derrière  la  scissure 
de  Sylvius,  on  voit  un  enfoncement  assez  considérable,  dans 
lequel  pénètre  la  pie-mère  : celle-ci  enlevée,  ou  voit  que  cet 
eirfoncement  est  produit  par  la  destruction  de  plusieurs  cir 
convolutious.  Celles-ci  sont  remplacées  par  une  surface  jaunâtre, 
mollasse,  membranirorme,  ayant  à peu  près  trois  centimètres 
carrés  d’étendue,  et  deux  millimètres  d’épaisseur.  Celte  lame 
jaunâtre,  membraniforme,  semblant  tenir  lieu  de  la  couche 
corticale  des  circonvolutions,  est  séparée  du  ventricule  par  des 
fdaments  jaunâtres,  mous,  raréfiés,  infiltrés  de  lait  de  chaux.  En 
enlevant  ceux-ci  au  moyen  d’un  filet  d’eau  ou  avec  le  dos  d’un 
scalpel,  on  arrive  à la  face  externe  ou  adhéi'ente  de  la  mem- 
brane ventriculaire,  qui  se  trouve  ainsi  disséquée  naturellement 
dans  toute  sa  moitié  antérieure  ; la  destruction  de  la  substairce 
cérébrale  est  beaucoup  plus  étendue  en  largeur,  au  iriveau  du 
ventricule  que  des  circonvolutioirs.  La  nrembrane  ventriculaire 
est  dans  cet  endroit  notablement  épaissie  et  un  peu  opaque.  Le 
corps  strié  et  la  couche  optique  sont  sains.  Peu  de  sérosité  dans 
les  ventricules. 

Le  cœur  est  volumineux,  les  parois  du  ventricule  gauche 
épaissies.  La  crosse  de  l’aorte  est  irotablement  dilatée.  Pueii- 
inonie  ù gauche. 


Obskrvatiox  ^5.  — Destruction  d’une  partie  des  deux  hémisphères 
par  une  infiltration  celluleuse;  ulcération  d’une  circonvolution. 

Une  femme  âgée  de  soixante-c^uinze  ans  fut  apportée  à l’in- 
firmerie le  5 novembre  1838  ; elle  était  en  proie  à la  plus  vive 
oppression.  Un  épanchement  considérable  existait  à la  base  de 
la  poitrine  du  côté  droit  ; les  bronches  étaient  obstruées  par 
des  mucosités,  la  respiration  râlante  et  d’une  grande  fréquence  ; 
le  pouls  petit  et  fréquent.  Malgré  un  traitement  actif,  cette 
femme  succomba  le  lendemain  à ces  accidents  , c[ue  l’on  disait 
s’èlre  déclarés  presque  subitement  la  veille.  Pendant  le  peu 
d’instants  que  fut  examinée  cette  malade,  raitenlion  ne  se  fixa 
que  sur  l’état  de  la  poitrine,  et  je  ])us  seulement  remarquer 
quelle  répondait  d’une  voix  assez  nette,  quoitine  faible,  aux 
questions  qu’on  lui  adressait. 


-bv  RAMOU.I^srMF.lVT  CHP,0\IQUE.  (anAT.  PATH.) 

•Je  tlcmaniiai  des  leiuseigiioiuenls  au  fils  <le  celle  femme.  Tl 
me  dit  qu’elle  avait  eu,  deux  ans  et  demi  auparavant , une  at- 
taque d’apoplexie  dans  laquelle  elle  avait  perdu  la  connais- 
sance et  la  parole  pendant  deux  jours,  et  qui  lui  avait  laissé  une 
hémiplégie  droite  complète.  Cette  hémiplégie  avait  diminué 
un  peu,  le  bras  exécutait  quelques  mouvements  ; elle  pouvait 
se  traîner  sur  ses  jambes  quand  on  la  soutenait  sous  les  épaules. 
Depuis  six  mois  elle  gâtait  et  ne  quittait  le  lit  que  pour  être 
portée  dans  un  fauteuil  : son  intelligence,  altérée  depuis  son 
attaque,  allait  encore  en  s affaiblissant.  Cet  homme,  qui  n"'avait 
jamais  quitté  sa  mère  que  depuis  six  mois,  époque  où  elle  était 
entrée  à la  Salpêtrière,  m’affirma  alors  qu’elle  n’avait  jamais 
eu  d’autre  attaque  d’apoplexie  ni  de  paralysie-,  qu’elle  ne  se 
plaignait  ni  de  céphalalgie  ni  d’étourdissements.  Il  me  dit  ce- 
pendant le  lendemain  que,  trente  ans  auparavant,  elle  avait  eu 
une  attaque  d’apoplexie,  à la  suite  de  laquelle  elle  était  de- 
meurée hémiplégique  du  côté  gauche  pendant  dix-huit  mois, 
puis  avait  guéri  complètement. 

Autopsie.  — Quantité  assez  considérable  de  sérosité  limpide 
infiltrée  dans  la  pie-mère;  léger  écartement  de  quelques  cir- 
convolutions. La  partie  moyenne  de  la  convexité  de  l’hémi- 
sphère droit  est  creusée  d’un  enfoncement  profond  qui  semble 
résulter  d’une  atrophie  considérable  de  la  substance  cérébrale. 
En  effet,  toute  la  portion  de  l’hémisphère  qui  recouvre  le^ven- 
tricule  droit  est  convertie  en  un  tissu  lâche,  celluleux,  jaunâtre, 
et  des  mailles  duquel  on  exprime  un  peu  de  lait  de  chaux.  Su- 
périeurement, cette  altération  occu))e  près  des  deux  tiers  de  la 
convexité  de  l’hémisphère,  et  la  pie-mère  en  entraîne  avec  elle 
l.a  couche  la  plus  superficielle  : on  n’y  trouve  plus  aucune  trace 

do  substance  corticale.  Colle  inUllration  celluleuse  s’étend 
* 

jusqu’à  la  paroi  supérieure  du  ventricule  latéral  dont  la 
tiUMuLirane  se  trouve  dissét|U('e  dans  la  plus  grande  partie  de 
son  étendue  ; collo  membrane  est  aussi  bien  isolée  que  l’est  sur 
la  ligue  un’-iliane  le  huiillct  araclinoidieii  qui  tapisse  la  lace  in- 
férieure du  cerveau.  Du  reste,  ell(î  parait  jiarfaitcmeui  saine  , 
mince  et  très-tran.sparenle,  présentant  seulement,  quand  on  la 
regarde  du  côté  du  ventricule,  des  plissements  qui  résultent 
(le  ce  qu’elle  u'est  nlus  soutenue  par  la  substance  cérébrale. 
V ôici  quelles  étaient  les  limites  du  ratnolli.s.seinent  dans  l’épais- 


263 


1 N KU.T  R ATI  ON  i:  h.  1 . L D L J l,'  S F. . 

eeuv  de  l’iiéniisphère  : la  substance  mëdullaiic  se  montrait  assez 
brusquement  saine  et  sans  altération  de  couleur  et  de  consis- 
tance ; elle  était  séparée  du  ramollissement  par  une  couche  cel- 
luleuse, comme  pseudo-membraneuse,  d’un  blanc  jaunâtre,  et 
que  l’on  enlevait  en  lambeaux  comme  feutres,  mais  non  en  feuil- 
lets distincts.  La  portion  de  substance  saine  voisine  du  ramol- 
lissement était  parcourue  par  des  vaisseaux  manifestement  di- 
latés , presque  tous  dirigés  verticalement,  rouges  la  plupart, 
quelques-uns  tout  à fait  blancs  et  vides  de  sang. 

La  partie  inférieure  du  lobe  antérieur  de  l’hémisphère  gau- 
che présentait  précisément  la  même  altération  ; dépression 
profonde  de  la  superficie,  disparition  de  la  substance  corticale, 
dégénération  de  la  substance  médullaire  en  un  tissu  jau- 
nâtre , celluleux  et  infiltré  de  lait  de  chaux.  Cette  altération 
s’étendait  supérieurement  jusqu’à  l’étage  inférieur  du  ventricule 
gauche,  dont  elle  avait  disséqué  une  portion  de  la  membrane 
qui  le  tapisse,  aussi  parfaitement  que  nous  l’avons  vu  dans 
l’autre  hémisphère.  L’apparence  de  ces  deux  altérations  , la 
disposition  de  leurs  parois  étaient  parfaitement  semblables  de 
l'un  et  de  l’autre  côté. 

Sur  la  convexité  du  lobe  postérieur  gauche  se  remarquait 
une  ulcération  pour  la  description  de  laquelle  je  renvoie  au 
chapitre  de  la  dernière  période  du  ramollissement  (1). 

Les  ventricules  latéraux  étaient  distendus  par  une  grande 
quantité  de  sérosité  limpide.  Rien  à noter  dans  le  cervelet  ni 
dans  la  moelle  alongée. 

Les  poumons  étaient  sains,  mais  il  y avait  un  épanchement 
considérable  de  sérosité  dans  la  plèvre  droite.  Le  cœur  était 
volumineux  , sans  hypertrophie  ; il  y avait  un  peu  d’ossification 
de  l’anneau  fibreux  qui  entoure  les  orifices  aortique  et  àuriculo- 
ventriculaire  gauche,  sans  rétrécissement  de  ces  orifices. 


Les  premières  observations  d’infiltration  celluleuse  que 
nous  avons  rapportées  ^obs.  65,  69,  70,  7l,  72),  ne  peuvent  as- 
surément laisser  aucun  doute  sur  l’origine  de  cette  altération, 
soit  à cause  des  symptômes  qui  s’étaient  montrés  durant  la  vie. 


(1)  Voyez  art.  3 de  ce  chap.,  § 1,  obs,  80, 


264 


RAMOU.ISSIîWF.NT  aiRONlOIIE.  (a\AT,  I'ATH.) 

soit  par  le  lappioclieinent  qu’il  a été  possible  de  faire  sur  le 
cadavre,  entre  l’inliluatiou  celluleuse  d’une  part,  le  ramollisse- 
nient  aigu  et  le  ramollissement  pulpeux  de  l’autre.  Mais  il  est 
dans  les  observations  suivantes,  une  autre  circonstance  qui  dé- 
ïiiontre  avec  presque  autant  d’évidence  rimpossibilité  de  les 
rattacher  à une  liémorrbagie  ; et  la  plus  remarquable  dans  ce 
sens  est  certainement  la  dernière,  la  75«. 

Je  veux  parler  de  l’extension  de  rinfiltration  celluleuse  aux 
parois  des  ventricules  ou  à la  superficie  du  cerveau.  Tout  le 
monde  sait  en  effet  que,  lorsqu’un  épanchement  sanguin  a pa- 
gne quelques-unes  des  surfaces  soit  interne,  soit  externe  du 
cerveau,  le  sang  s’épanche  nécessairement  au  dehors,  soit  dans 
les  cavités  ventriculaires,  soit  dans  les  méninges  (1) . Ces  hé- 
morrhagies semblent  être  toujours  mortelles;  mais,  dans  le  cas 
même  Quelles  ne  délenuineraient  pas  elles-mêmes  la  mort,  il 
est  évident  que  l’on  devrait  retrouver  plus  tard  quelques  traces 
du  sang  épanché  au  dehors  des  hémisphères  et  de  la  déchirure 
de  ces  derniers.  Or,  dans  les  cas  dont  je  parle,  non  seulement 
je  n’ai  rien  vu  dans  les  cavités  ventriculaires  qui  pût  tenir  à 
une  ancienne  hémorrhagie  , mais  j’ai  toujours  trouvé  la  mem- 
brane qui  les  tapisse  intacte,  et  les  séparant  seule,  malgré  sa 
ténuilé,  de  l’altération  de  la  pulpe  cérébrale.  Je  demande  s’il 
est  permis  de  supposer  que  cette  membrane  soit  capable  de 
soutenir  l’eflorl  du  sang,  surtout  s’épanchant  dans  des  foyers 
amssi  étendus  que  ceux  dont  nous  retrouvons  les  traces,  et  sur- 
tout dans  la  75' observation,  où  nous  avons  vu  l’infiltration 
celluleuse,  occupant  toute  l’épaisseur  des  deux  hémisphères , 
depuis  h s ventricules  jusqu’à  leur  superficie,  limitée  seulement 
dans  un  sens  par  la  membrane  ventriculaire,  dans  un  autre 
par  la  pie-mère.  Il  est  bien  clair  que  ce  ne  sont  pas  des  foyers 
de  sang  qui  ont  produit  de  telles  altérations  : des  hémorrhagies 
capables  de  déterminer  de  tels  désordres  auraient  amené  né- 
cessairement l’irruption  du  sang  au  dehors  des  hémisphères  et 
une  mort  rapide. 

(i)  Il  n'est  cependant  i>as  iiupu.s.sible  ([u'iiiie  liéniorrliiii'ie.  sp  fasse  asspz 
près  d’mi  u’iitriciile,  pour  que  la  mcmhraae  \ pjiiricnlaire  so  iro  ive  sonlcvrc 
j)«r  lin  caillot  sîin  piin;  mais  ce  contact  ircxisle  jamais  que  p.ar  un  point  très- 
circoiiscril , et  je  no  connais  pas  un  füii  ilo  ce  genre  où  la  mort  ne  soit  iirri- 
\6c  à iineépoqiio  assoz  riipprocliéo  du  dc'lnil. 


INFILTPlATCON  CFI.LULUtJSK. 


Ou  dii-a  peut-èue  (lu’une  liéinorrliagie  a pu  exister  là  tlans 
le  principe,  plus  circonscrite,  et  que  les  lésions  trouvées  sur  le 
cadavre  lui  étaient  consécutives  ; mais  cette  hypothèse,  ce  ne  sau- 
rait jamais  être  en  effet  qu’une  supposition,  viendrait  précisé- 
ment à l’appui  de  notre  opinion  : car  si,  dans  ces  cas,  un  ra- 
mollissement plus  étendu  avait  succédé  à une  hemorrhapjie 
circonscrite,  il  est  évident  que  ce  serait  au  ramollissement  et 
non  à l’hémorrhagie-  qu’appartiendraient  les  lésions  trouvées 
sur  le  cadavre. 

Le  paragraphe  suivant  sera  consacré  à l’élude  des  foyers  hé- 
morrhagiques, considérés  sous  le  point  de  vue  qui  nous  occupe 
actuellement. 

Il  est  singulier  qu’une  altération  aussi  fréquente,  douée  de 
caractères  aussi  particuliers,  ait  jusqn’ici  presque  complètement 
échappé  à l’attention;  que  ses  rapports  avec  le  ramollissement 
aient  été  presque  entièrement  méconnus  : il  semble  que  l’infd- 
tration  celluleuse  n’ait  pas  été  rencontrée  par  la  plupart  des 
auteurs,  tandis  que  c’est  la  forme  sous  laquelle  le  ramollisse- 
ment «’ est  montré  le  plus  souvent  à nous.  Dans  l’ouvrage  de 
M.  Rostan,  fait  comme  le  nôtre  à la  Salpêtrière,  dans  l’ouvrage 
d’Ahercromhie,  il  n’en  est  aucunement  question  : ces  auteurs, 
et  surtout  le  premier,  n’ont  vu  dans  le  ramollissement  qu’une 
diminution  de  la  consistance  normale  du  cerveau  ; ils  s’en  sont 
tenus  au  sens  propre  de  ce  mot  de  ramollissement,  sans  paraître 
se  douter  de  la  part  que  certaines  altérations  de  texture  pou- 
vaient prendre  dans  la  maladie  qu’ils  étudiaient  sous  ce  nom. 
On  en  trouve  cependant  quelques  indications  dans  d’autres 
auteurs. 

M.  Lallemand  a vu  l’infiltration  celluleuse,  mais  toujours 
liée  à un  certain  degré  d’induration  ; nous  avons  déjà  indiqué 
cette  circonstance  dans  plusieurs  de  nos  observations  , et  nous 
avons  promis  d’y  revenir  en  nous  occupant  de  la  terminaison 
du  ramollissement.  Voici  comment  le  professeur  de  Montpel- 
lier explique  sa  formation  dans  sa  lettre  sur  les  indurations 
fibreuses  et  cartilagineuses  ; il  parle  du  travail  d’absorption  qui 
peut  suivre  les  premières  périodes  de  la  maladie  : « Si  l’absorp- 
tion continue  avec  assez  d’énergie  et  pendant  assez  longtemps 
|jour  enlever  les  matériaux  étrangers  déposés  dans  le  paren- 
cliymo  (le  1 organe,  ij  ne  reste  plus,  à la  fin,  qu’une  espèce 


266  RAMOLLISSF.MRXT  CHRONIQUE,  (aNAT.  PATH.) 

(le  réseau  celluleux  , à mailles  plus  ou  moins  dures  , plus 
ou  moins  larges , remplies  de  sérosité  (1).  » Il  en  donne 
quelques  exemples  bien  caractérisés...  « La  substance  blanche 
est  transformée  en  une  espèce  de  tissu  cellulaire  , à mailles 
distendues  par  une  sérosité  limpide  ; sur  les  parois  de  ces  cel- 
lules qui  donnent  à la  substance  médullaire  l’aspect  de  lames 
appliquées  les  unes  contre  les  autres  , on  voit  une  foule  de  pe- 
tits trous  capillaires.  Cette  transformation  occupe  presque  toute 
la  substance  blanche  d’un  hémisphère...  » A la  partie  pos- 
térieure de  la  face  supérieure  de  cet  hémisphère , dépression 
considérable.  L’arachnoïde  enlevée  dans  ce  point  laisse  voir  la 
substance  du  cerveau  convertie  en  une  sorte  de  tissu  cellulaire 
infiltré  de  sérosité.  Ce  mode  d’altération  s’étend  en  épaisseur 
jusqu’au  ventricule,  dont  la  paroi  supérieure  a,  dans  cet  endroit, 
trois  lignes  environ...  (2)  » 

Un  passage  de  M.  Gendrin  m’a  paru  se  rapporter  à l’infiltra- 
tion celluleuse  elle-même  : « Pour  peu  que  le  ramollissement 
inflammatoire  dure  depuis  quelque  temps  , dit-il , on  remarque 
des  traces  de  résorption  dans  son  épaisseur  et  surtout  à ses 
bords  ; de  petites  locules  remplies  de  sérosité  indiquent  le  com- 
mencement de  ce  travail  de  résorption (3)  » 

M.  Bouillaud  a parfaitement  décrit  l’infiltration  celluleuse, 
lorsqu’il  parle  « de  ces  cicatrices  imparfaites,  caractérisées  par  la 
présence  de  lames  celluleuses  et  de  filaments  vasculaires  entre- 
croisés, réunissant  les  parois  opposées  des  foyers  phlegmasiques, 
et  formant  des  aréoles  dans  lesquelles  on  rencontre  quelque- 
fois un  peu  de  sérosité  (4).  » Mais  on  ne  retrouve  plus,  dans 
le  reste  de  son  ouvrage,  aucune  mention  de  cet  état  patholo-. 
gique  dont  il  avait  si  bien  reconnu  l’origine.  Il  dit  seulement 
plus  loin  qu’il  est  tenté  de  croire  que  plusieurs  cicatrices , 
prises  jusqu’ici  pour  des  suites  d’épanchements  apoplectiques, 
doivent  réellement  être  considérées  comme  la  terminaison  de 
phlegmasies  cérébrales  (p.  238). 

« Au  lieu  d’être  pénétrée  d’une  quantité  .surabondante  de 

(1)  Lallemand,  Lettre  7,  page  <30. 

(2)  Lallemand  , Lettre^,  n°* 23-24. 

(3)  Gendrin,  Hist.  anat.  des  injlani. , t.  n,  pages  580  ei  siiiv. 

(4)  Bouillaud,  Traitd de  l’encéphalite,  page  220. 


INFH.TR^TION  CJBLUJCEUSE. 

sang,  dil  M.  Andral,  la  partie  vamollie  peut  Être  devenue  le 
siège  d’une  secrétion  morbide  qui  est  tantôt  simplement  sé- 
reuse, et  tantôt  purulente.  Dans  le  premier  cas,  on  trouve  la 
pulpe  nerveuse  comme  imbibée  d’une  sérosité  plus  ou  moins 
trouble,  qui  tient  en  suspension  des  flocons  blanchâtres  ou  gri- 
sâtres, seuls  fragments  de  la  substance  cérébrale  qui  aient  en- 
core conservé  quelque  consistance  (1).  » Dans  sa  24' observation, 
cet  auteur  rapporte  un  cas  d’infiltration  celluleuse  ; » ...  Tians* 
formation  de  tout  le  lobe  antérieur  de  l’hémisphère  droit  en 
une  bouillie  grisâtre,  dans  laquelle  on  voit  une  foule  de  gru- 
meaux blanchâtres  flotter,  comme  suspendus  au  milieu  d’un 
liquide  semblable  à du  petit  lait  trouble.  Le  corps  strié  et  la 
partie  antérieure  de  la  couche  optique  participent  à cette  alté- 
ration qui  n’a  respecté  que  les  circonvolutions  de  la  convexité, 
ainsi  que  celles  de  la  base. . . » * 

M.  Bayle  a rapporté  une  observation  curieuse,  qui  nous 
offre  une  double  altération^oute  semblable  à celle  qui  a été 
décrite  dans  notre  75'  observation  , c’est-à-dire  une  inflllra- 
tion  celluleuse  occupant  tout  l’espace  qui  sépare  la  paroi  in- 
férieure des  ventricules,  de  la  base  du  cerveau.  C’était  chez  un 
vieillard  de  cinquante-six  ans,  mort  dans  un  état  de  démence 
et  de  paralysie,  après  trois  ou  quatre  ans  de  maladie  : » On 
voyait  à la  base  de  la  masse  encéphalique,  sous  chaque  lobe 
moyen,  une  espèce  de  poche  irrégulière,  transparente  , molle  , 
ayant  une  forme  alongée,  plus  large  et  plus  distendue  on  avant 
qu’en  arrière,  libre  dans  la  partie  inférieure  qui  était  logée 
dans  la  fosse  latérale  et  moyenne  du  crâne,  adhérente  au  cer- 
veau dans  la  supérieure  ; elle  était  remplie  par  une  sérosité 
linipide,  et  l’on  remarquait  dans  son  intérieur  des  filaments  de 
tissu  cellulaire  qui  s’entrelaçaient  en  divers  sens,  et  dont  les 
aréoles,  infiltrées  du  même  fluide,  avaient  un  aspect  gélatineux. 
Une  membrane  peu  épais.se  séparait  en  haut  la  cavité  de  cette 
poche  de  celle  des  ventiicules  latéraux,  dont  la  substance  cé- 
rébrale qui  forme  leur  paroi  inférieure  avait  entièrement  dis- 
paru. Cette  cloison  était  |)crcée  dans  qtielques  endroits,  de 
maniéré  qu’il  existait  une  communication  entre  ces  dernières 
cavités  et  celle  de  la  poche  séreuse.  (Celle  communication  s’étail 


(D  Andral,  Clinique,  t.  v,  page.s  524-9.8. 


-()«  n aaiom.tssf.went  mnoNiQui;.  (anat.  path.) 

sans  (loule  0[)('-rf'e  arlütcielleinenl  depuis  la  mort  ou  pendant 
l’autopsie.)  La  substance  cérébrale  sur  laquelle  cette  poche  était 
appliquée,  était  ramollie  et  réduite  en  petits  fragments  blan- 
châtres. Les  ventricides  latéraux,  très-vastes,  étaient  énormé- 
ment distendus  par  la  sérosité....  » L’auteur  cherche  à inter- 
préter cette  alteration  , d une  façon  assez  singulière.  « Il  est 
assez  facile,  dit-il,  d’expliquer  la  formation  de  cette  espèce  de 
poche  : 1 accumulation  de  la  sérosité  se  sera  faite  primitivement 
dans  les  ventricules  latéraux  ; après  avoir  distendu  outre  me- 
sure ces  cavités,  elle  aura  usé  peu  à peu,  s’il  est  permis  de  parler 
ainsi  , la  substance  cérébrale  qui  forme  leur  paroi  inférieure , 
et,  perçant  1 arachnoïde  ventriculaire,  elle  se  sera  infiltrée 
dans  les  mailles  de  la  pie-mère  de  la  base  du  cerveau  , elle  se 
sera  amassée  ensuite  peu  à peu  dans  ce  réseau  cellulo-vascu- 
laire,  et  aura  détaché  progressivement  l’arachnoïde,  dont  elle 
aura  formé  une  sorte  d'enveloppe  séreuse.,.!!  (1)» 

M.  Gruveilhier  a assez  fidèlemqpt  décrit,  dans  son  grand  ou- 
vrage d’anatomie  pathologique,  les  plaques  jaunes  des  ciicon- 
volutions  et  l’infiltration  celluleuse  ; mais  il  paraît  les  considérer, 
dans  tous  les  cas,  comme  de  véritables  cicatrices.  Il  rapporte 
l’observation  d’une  vieille  femme  qui  avait  éprouvé  plusieurs 
attaques  apoplectiformes  : une  avec  hémiplégie  droite  côm- 
plètement  dissipée  , quinze  ans,  une  autre  avec  hémiplégie 
gauche,  deux  ans  et  demi,  une  dernière  enfin  deux  mois  avant 
sa  mort  ; les  lésions  du  mouvement  avaient  également  porté  à 
gauche. 

On  trouva  à l’autopsie,  dans  l’hémisphère  gauche,  trois  cir- 
convolutions occipitales  présentant,  au  lieu  de  substance  grise  , 
des  pellicules  peau  de  chamois,  dans  la  couche  optique,  deux 
petits  foyers  celluleux,  sans  coloration,  sans  kyste  distinct, 
contenant' un  liquide  lait  de  chau.x.  Dans  l’hémisphère  droit, 
grande  perte  de  substance  des  circonvolutions  occipitales  in- 
férieures, remplacées  par  nue  membrane  peau  de  chamois, 
très-adhérente  à la  pie-mère,  et  par  un  tissu  cellulaire  lâche , 
infiltré  de  sérosité  ; cette  perte  de  substance  s’étendait  a toute 
l’épaisseur  de  la  portion  rédéebie  du  ventricule  latéral  ; la  sub- 
stance blanclieciui  formait  le  centre  ou  noyau  du  lobe  présentait 


(t)  Biiylc,  Traite  des  maladies  du  cerveau,  1826,  page  1 2/ . 


IMlLTllAXiOIN  CliXl.ULIiLSE. 


2(39 


une  ciccLii  'icecchixlcuse  {infiltration  celluleuse)  inlillrée  de  laiule 
diaux  , et  auprès,  iiu  rainollissemenl  hortensia  clair....  Sous  la 
lueiiibrane  ventriculaire,  au  niveau  et  aux  dépens  de  la  couche 
op lîque,  pe tite  cavité,  traversée  par  des  filain ents  celluleux . . . . ( 1 ) . 

J’ai  dû  cheixher  si  le  ramollissement  de  la  moelle  épinière  ne 
présentait  pas  des  transformations  analogues  à celles  que  nous 
voyons  subir  au  ramollissement  cérébral  : les  deux  faits  sui- 
vants me  paraissent  des  exemples  d'une  altération  toute  sem- 
blable à celle  que  nous  venons  de  décrire  sous  le  nom  d’infil- 
tration celluleuse.  , 

Un  homme  de  quarante-quati  e ans,  portant  une  déviation 
du  rachis,  fut  atteint  d’une  paralysie  du  mouvement  des  mem- 
bres supérieurs,  sans  aucune  lésion  des  extrémités  inférieures 
ni  de  l’intelligence.  Il  mourut  sept  ans  après  l’apparition  de 
ces  acidents.  Les  membres  supérieurs  étaient  remarquablement 
contracturés. 

Dans  l’espace  de  six  à sept  pouces,  entre  les  deux  tiers  infé- 
rieurs de  la  région  cervicale  et  la  moitié  supérieure  de  la  région 
dorsale,  la  dure-mère  semblait  pleine  de  liquide. 

La  moelle  était  recouverte  de  sa  membrane  propre,  d’un 
gris  rougeâtre,  très-molle  ; l’ouverture  de  celle  membrane,  dans 
un  point  où  elle  présentait  une  fluctuation  sensible,  laissa  écou- 
ler un  liquide  presque  incolore,  mêlé  à quelques  petits  flocons 
de  matière  médullaire.  On  ouvrit  ensuite  largement,  par  une 
incision  longitudinale,  cette  partie  de  la  moelle,  qui  offrit  une 
cavité  alongée,  remplie  d’une  sorte  de  liquide  gris-rougeâtre , 
et  dans  laquelle  était  disséminée  une  grande  quantité  de  vais- 
seaux capillaires  sanguins,  soutenus  par  le  tissu  cellulaire  in- 
terne de  la  moelle...  La  structure  de  toute  la  partie  située  au- 
dessus  de  la  quatrième  paire  cervicale  était  intacte;  la  substance 
médullaire  avait  sa  blancheur  et  sa  consistance  ordinaires  ; 
mais  au-dessous  de  ce  point , cette  consistance  et  cette  blan- 
cheur changaient  subitement;,  et  la  moelle  semblait  convertie 
en  une  ccUulosité  infiltrée  d'une  sérosité  rose  pâle,  jusqu’à  la 
sixième  paire  cervicale,  lieu  dans  lec|uel  il  n’existait  plus 
qu’une  large  cavité  dont  les  parois  n’étaient  formées  que  par 

(1)  (auviùlliier,  Jiuii. iiathol,,  .'i'b  Hyr.,  paye  4. 


270  KAMOLLISSEMEWT  CHIIONIQUE.  (ahAT.  PATH.) 

les  enveloppes  membraneuses  de  la  moelle  et  les  restes  de  la 
substance  inédulla’ve  (1). 

Une  vieille  femme  demeura  paraplégique  à la  suite  d’une 
chute  d’un  lieu  élevé.  Quatre  mois  après  elle  succomba  à des 
accidents  cholériformes. 

On  trouva  une  fracture  de  la  première  vertèbre  dorsale-,  une 
pointe  osseuse  inégale,  faisant  une  saillie  de  trois  lignes  surla pa- 
roi antérieure  du  canal  rachidien,  était  due  tant  au  déplacement 
des  fragments  qu’au  volume  du  cal.  La  moelle,  saine  dans 
le  reste  de  son  étendue,  offrait  au  niveau  de  cette  saillie  une 
dépression  transversale  profonde,  qui  existait  aussi  bien  sur  la 
face  postérieure  que  sur  l’antérieure  : incisée  dans  ce  point,  on 
trouva  un  foyer  contenant  une  bouillie  semblable  à de  la  sub- 
stance médullaire  longtempsmacérée.dissoutedansde  lasérosité. 
Ce  foyer  était  limité  à sa  circonférence  par  des  brides  jaunâtres, 
plissées,  minces,  mais  dures  et  résistantes,  telles  quon  les  ren~ 
contre  dans  les  anciens  foyers  du  cerueau  (2). 


§ lll.  Elude  des  cavités  propres  au  ramollissement , comparées  aux  cavités 

hémorrhagiques. 

Les  altérations  que  je  viens  d’étudier  comme  propres  au  ra- 
mollissement cérébral  ont  été  jusqu’ici  considérées  en  général 
comme  la  trace  d’anciennes  hémorrhagies.  Je  crois  que  les 
observations  précédentes  ne  permettent  désormais  aucun  doute 
sur  ce  fait  ; que  ces  cavités  que  l’on  rencontre  si  souvent  dans 
le  tissu  du  cerveau,  à parois  blanches  ou  jaunâtres,  traversées 
par  des  brides  celluleuses  et  pleines  d’un  liquide  plus  ou  moins 
trouble  ou  limpide,  peuvent  appartenir  au  ramollissement.  Je 
dis  peuvent,  afin  de  rester  exactement  dans  la  limite  des  faits 
étudiés  jusqu’ici.  Nous  devons  maintenant  envisager  la  question 
sous  un  point  de  vue  nouveau  : sera-t-ihpermis,  dans  des 
circonstances  données,  d’attribuer  de  semblables  alterations  à 
riiémonhagie  cérébrale  Il  nous  faut  donc  étudier  un  instant 
l’hémorrhagie  cérébrale  dans  ses  périodes  consecutives,  et  sou- 


(1)  Ollivici’  (d’Angers)  , Traild  des  maladies  de  lu  moelle  épinière,  t.  ii, 

édit.,  OIISEKVAT.  LXXXV. 

(2)  G.  Keui’ud,  UisserluUon  inaitf^niale,  21*  avril  u.  t02, 


I 


CAVITÉS  HÉMOIIRHAGIQXJES.  271 

mettre  à la  critique  les  opinions  répandues  dans  la  science  sur 
ce  sujet  difficile. 

L’étude  des  cicatrices  , des  cavités  anciennes  du  cerveau  date 
d’une  époque  peu  éloignée  : décrites  d’abord  par  Morgagni , 
puis  par  Prost,  Marandel,  Rochoux , qui  les  premiers  ont 
cherché  à remonter  à leur  origine , elles  n’ont  réellement  fixé 
l’attention  générale  que  depuis  le  travail  de  Riobé,  intitulé  : 
L’apoplexie  est-elle  susceptible  de  guérison  (1)?  Mais  au  bout  de 
peu  de  temps,  cette  question,  que  ce  médecin  avait  eu  tort  de 
présenter  sous  forme  de  doute,  car  elle  avait  été  résolue  avant 
lui,  se  trouva  jugée,  et  dès-lors  tout  ce  qui,  dans  le  cerveau, 
parut  être  la  trace  d’une  altération  ancienne  et  transformée,  fut 
attribué  à d’anciennes  hémorrhagies. 

Le  ramollissement  était  encore  inconnu.  Lorsque  l’ouvrage 
de  M.  Rostan  et  d’autres  travaux  particuliers  eurent  commencé 
à faire  connaître  cette  maladie  , on  demeura  longtemps  encore 
sans  soupçonner  la  part  qui  lui  revenait  dans  la  production  des 
altérations  de  ce  genre.  MM.  Lallemand,  Andral,  Georget,  pa- 
rurent l’entrevoir  les  premiers'.  M.  Cruveilhier  professa  qu’un 
grand  nombre  de  cavités,  de  cicatrices  dans  le  cerveau  , étaient 
des  traces  d’anciens  ramollissements  et  en  rapporta  des  exem- 
ples dans  son  grand  ouvrage  d’anatomie  pathologique.  Enfin, 
M.  Dechambre  consaci'a  à cette  étude  un  mémoire  ex  professa^ 
et  depuis,  quelques  travaux  récents  ont  indiqué  la  tendance 
nouvelle  que  devaient  suivre  désormais  les  recherches  sur  cette 
partie  de  l’anatomie  pathologique  du  cerveau. 

Mais  cette  manière  de  voir  n’a  encore  été  acceptée  que  par 
un  certain  nombre  de  personnes  ; beaucoup  de  médecins  , et 
parmi  eux  des  plus  recommandables  , s’en  tenant  aux  idées 
transmises  par  Morgagni,  se  refusent  à déposséder  l’hémor- 
rhagie cérébrale  des  lésions  que  l’on  regardait  comme  son 
cortège  habituel,  hésitant  sans  doute  à refaire  une  doctrine 
qu’ils  croyaient  achevée  et  à l’abri  de  toute  critique. 

Je  ne  crois  pouvoir  mieux  faire , pour  pénétrer  immédiate- 
ment au  cœur  de  la  question,  que  de  prendre  le  livre  de 
M.  Rochoux,  et  d’analy.ser  les  faits  qu’il  nous  donne  comme 
exemples  de  cicatrices  de  foyers  hémorrhagiques.  Celte  ana- 

(t)  Kiube,  Thcscs  de  Paris,  ISHi,  u.  121. 


272 


nA.MOI.LlSsIi.\lE]NT  C;[lKONlQl31i.  (^ARAX.  rAl'U.) 

l;sc  luoilUcia  que  ce  que  j’ai  étudié  piécédemment  sous  Je 
nom  d’inliltiMlion  celluleuse  était  déjà  bien  connu,  bien  dé- 
crit,, mais  que  l’on  se  trompait  complclement  sur  la  nature  de 
cette  altération. 

Les  oJjseivations  de  M.  llocbou;;,  qui  nous  intéressent  ac- 
tuellement, sont  au  nombre  de  onze,  du  n”  36  au  n“  46. 

Dans  trois  d’entre  elles,  obs.  37,  39  et  44,  la  maladie  datait 
de  trois  mois  et  demi,  d’un  mois,  de  deux  mois,  le  sang  existait 
encore  en  nature  dans  le  fojer. 

Dans  cinq,  la  maladie  datait  de  plusieurs  années.  Voici  la 
description  textuelle  que  donne  l’auteur,  des  altérations  trou- 
vées dans  le  cerveau. 

0b5.  4o.  — « Hémiplégie  il  y a vingt  ans , presque  entièrement 
dissipée  au  bout  de  plusieurs  mois.  — A la  partie  antérieure 
et  interne  tlu  corps  strié  droit,  se  trouvait  une  légère  dépression 
irrégulièrement  arrondie,  alongée,  d’un  demi-pouce  carré  de 
surface,  d’un  jaune  rouge  pale.  En  incisant  perpendiculairement 
sur  cptte  surface,  on  découvrait  une  cavité  traversée  par  un 
grand  nombre  de  brides  celluleuses  faciles  à i ompre,  et  qui 
permettaient  de  rétablir  facilement  la  cavité  comme  celle-ci 
avait  dû  être  avant  cette  espèce  de  cicatrisation.  Du  côté  du 
ventricule,  les  parois  étaient  j.aunâtres  dans  toute  leur  épaisseur, 
qui  là  était  d’environ  un  quart  de  ligne.  Dans  tout  le  reste  de 
la,  surface  interne  de  l’ancien  foyer  hémorrhagique,  la  sub- 
staitce cérébrale  ne  présentait  aucune  altération  bien  sensible... 
llamollissement  à la  partie  postérieure  de  l’hémisphère  droit.» 

Übs.  46.  « Hémiplégie  droite  datant  de  neuf  ans  , incomplète. 
— Le  corps  .strié  gauche  présentait,  à la  réunion  de  son  tiers 
antérieur  avec  ses  deux  tiers  postérieurs,  au  devant  du  ventri- 


cule, im 


sillon  transversal  d’une  ligne  de  profondeur,  de  .sept  à 
huit  lignes  de  longueur,  dont  le  fond  était  d un  jaune  rouge- 
pâle.  Une  incision  pratiquée  sur  ce  sillon  conduisit  dans  une 
espèce  de  caverne  irrégulièrement  alongée,  d un  pouce  enviion 

de  longueur,  d’un  demi  de  largeur , traversée  par  un  grand 

nombre  de  liens  celluleux  et  vasculaire.s,  qui  contenaient , dans 
les  mailles  formées  par  leur  entre-croisement , quelques  gouttes 
de  sérosité  jaunâtre.  Cicatrisées  de  la  sorte,  ses  parois  olbaient 
une  couleur  d’acajou  pâle  dans  l’epaisseur  de  trois  a ([uatie  li- 
gues, et  là  la  substance  cérébrale  avait  une  grande  densité,  plus 


l.WllÉS  IlÉUOUllil\«.l(>VE'i.  -7a 

en  Heliois,  elle  reprenait,  son  organisation  ordinaiic.  nimollisse- 
iiienl  iiniuédiatcnient au  devant  de  cette  altération.') 

Avant  d’aller  plus  loin,  je  dois  dire  comment  l’existence  de 
ces  brides  filamenteuses  décrites  dans  toutes  les  observations  de 
M.  Rochoux  me  parait  en  opposition  avec  la  supposition  d’une 
lie'morrbagie.  Si  du  sang  épanché  ]>eut  se  résorber  assez  com- 
plètement pour  ne  point  laisser  de  traces  de  sa  présence,  il  doit 
former  le  plus  habituellement  une  cavité  bien  circonscrite,  tout 
à fait  libre,  et  au  niveau  de  laquelle  on  ne  retrouve  plus  rien  tlu 
parenchyme  cérébral.  Cependant,  si  scs  parois  se  rapprochent, 
elles  peuvent  se  réunir  au  moyen  de  quelques  adhérences  ; mais 
alors  celles-ci  les  maintiendront  rapprochées,  et,  au  lieu  d’une 
cavité,  il  se  formera  une  cicatrice  ; ou  bien  peut-être  quelcjues 
brides  peu  nombreuses  et  isolées  pourront  se  laisser  tendre  entre 
les  parois  du  foyer  : mais  il  y a loin  de  là  à 1 existence  d’un  tissu 
cellulaire  aussi  abondant  que  celui  que  nous  rencontrons  dans 
les  cavités  décrites. 

Je  sais  que  l’on  a considéré  ces  adhérences  comme  le  produit 
de  l’organisation  du  caillot  lui-même;  mais  c’est  précisément  là 
ce, qu’il  eût  fallu  prouver  : et , pour  cela  , il  eût  fallu  faire  as« 
sister  à cette  transformation  du  caillot  en  brides  celluleuses , 
comme  je  l’ai  fait  pour  le  ramollissement. 

L’élude  de  la  résorption  du  sang  dans  les  cavités  he'morrha* 
giques  nous  montre,  au  contraire,  que  les  choses  se  passent  tout 
dilFéreminent  ; nous  voyons,  en  effet,  tantôt  la  partie  solide  du 
sang  se  séparer  de  la  partie  liquide,  de  manière  à ce  que  l’on 
trouve  un  noyau  dur,  isolé  par  de  la  sérosité  des  parois  de  la  ca- 
vité qui  le  contient;  tantôt,'  au  contraire,  le  sang  se  convertir 
tout  entier  en  une  matière  boueuse  qui  se  liquéfie  et  se  résorbe 
peu  à peu,  sans  paraître  eh  aucune  manière  susceptible  d’or- 
ganisation, et  n’a  jamais,  que  je  sache,  été  prise  sur  le  fût  de 
ce  travail  supposé.  C’est  ainsi  que  les  choses  se  passent  dans  le 
plus  grand  nombre  des  cas,  et  l’on  voit  qu’il  est  difficile  de  con- 
cevoir comment  le  sang  parviendrait  à se  convertir  en  brides 
celluleuses.  Je  crois,  en  résumé,  qu’il  y a beaucoup  à rabattre 
de  la  faculté  d’organisation  des  caillots  épanchés  dans  I9  cer- 
veau, dont  on  a tant  parlé,  mais  que  l’on  serait  sans  doute  fort 
embarrassé  de  démontrer  (1  ). 

(I)  Ou  IruuuTa  dans  la  suite  de  ce  diui'ilre  un  ctrlaiii  iiyiiibre  d’exetu- 

18 


574 


RAMOLLISSEMEJNT  CHKOJMIQUE.  (\NAT.  PATH.) 


L’observation  suivante,  seule  entre  toutes  celles  que  j’ai  com- 
mencé à analyser,  me  paraît  pouvoir  être  légitimement  rappor- 
tée à une  ancienne  hémorrhagie.  On  sera  frappé  de  la  différence 
qu’elle  présente  avec  les  autres. 

Obs.  36.  « Hémiplégie  il  y a près  de  deux  ajis,  dissipée  complè- 
tement au  bout  de  peu  de  temps.  — Il  y avait  entre  la  couche  op- 
tique et  le  corps  strié  gauches  une  cavité  irrégulièrement  arron- 
die, de  six  à sept  lignes  de  diamètre  ; ses  parois,  appliquées  l’une 
contre  l’autre  et  parcourues  par  des  vaisseaux  qui  semblaient 
rompus,  avalent  un  aspect  villeux.  Elles  étaient  d’un  jaune  brun 
dans  l’épaisseur  d’un  quart  de  ligne,  légèrement  humectées  de 
sérosité.  Au*delà,  la  substance  cérébrale  n’était  pas  sensible- 
ment altérée.  » 

Remarquez  bien  l’absence  de  brides  celluleuses  dans  l’inté- 
rieur de  cette  cavité,  condition  qui  me  semble  nécessaire  pour 
admettre  un  foyer  hémorrhagique. 

Obs.  40.  — « Hémiplégie  suivie  de  douleurs  dans  les  membres 
paralysés,  datant  d’un  an. — Chaque  corps  strié,  à sa  partie  an- 
térieure et  interne,  présentait  une  dépression  jaunâtre,  large 
comme  l’ongle  sur  le  gauche,  d’pn  pouce  de  surface  sur  le  droit. 
Eu  incisant  la  première,  il  s’est  trouvé  au-dessous  une  petite 
cavité  qui  pouvait  loger  le  bout  du  doigt,  dont  les  parois,  jaunâ- 
tres dans  l’épaisseur  d’une  ligne  environ,  étaient  traversées  par 
de  petites  brides  filanientcuses , contenant  dans  leurs  mailles 
quelques  gouttes  d’un  liquide  puriforme  ; sous  la  deuxième  de- 
pression  , il  y avait  une  cavité  de  meme  aspect,  au  moins  quatre 
fois  plus  grande,  dont  les  parois,  formées  en  dedans  par  l’arach- 
noïde du  ventricule  seulement,  étaient  tres-niolles  dans  tout  le 
reste  de  sa  circonférence,  et  se  réduisaient  facilement  en  une 
sorte  de  bouillie;  altération  qui  occupait  au  moins  la  moitié  du 
corps  strié.  Elle  contenait  un  gros  de  liquide  puriforme.  » 

Il  me  semble  que  rien  ne  ressemble  plus  au  ramollissement 
cérébral  que  l’altération  du  corps  strie  droit.  Dans  ce  cas,  il  est 
vrai,  l’auteur  voit  un  exemple  de  ramollissement  consécutif , 
mais,  aux  réflexions  que  j’ai  faites  à propos  des  faits  précédents, 
l’ajouterai  ici  que  je  ne  crois  pas  qu  une  hémorrhagie  aussi  con- 
sidérable eût  pu  disparaître  en  un  an,  sans  laisser  aucune  tiacc 


pirs  lie  loyer.-'  in  \oii;  île 

•)p.  vinis  (l'avancer . 


ri'sori'lioii,  (|ui  justilioronl'ee  '|ur. 


C A vi  l ÉS  H lÎAlUn  U 11  AG  1 y L l.ü . 


du  sang  qui  l’avait  iormce.  Nous  revieudrous,  du  reste,  tout  à 
l’Jieuie  sur  ce  dernier  point. 

Obs.  41.  — <c  A la  partie  supérieure  et  interne  du  corps  strié 
droit  se  trouvait  une  dépression  couleur  d’acajou  pâle,  longue 
de  huit  à dix  lignes,  large  de  quatre  à cinq,  profonde  d’une 
ligne  tout  au  plus.  En  incisant  dans  cet  endroit , on  arrivait  à 
une  petite  cavité  irrégulièrement  alougée  , traversée  par  des 
portions  filamenteuses  très-rapprochées,  et  qui  contenait  quel- 
ques gouttes  d’un  fluide  jaunâtre La  propre  substance  du 

corps  strié,  dans  l’épaisseur  d’une  demi-ligne,  présentait  la  cou 
leur  dont  j’ai  parlé  plus  haut.»  ' 

On  remarquera  que  le  sujet  de  cette  observalion  avait  éprouvé, 
il  V a trois  ans  , une  paralysie  de.  la  langue,  avec  faiblesse  du 
côté  gauebe,  faiblesse  qui  augmenta  peu  à peu,  au  point  de  le 
forcer  à garder  le  lit.  Il  est  eei  tain  que  celte  marche  est  plutôt 
celle  du  ramollissement  que  de  l’apoplexie. 

Tous  ces  faits  peuvent  cependant  laisser  du  doute  dans  l’es- 
prit, à cause  du  long  espace  de  temps  qui  s’est  écoulé  entre  le 
début  de  ces  altérations,  et  l’époque  à laquelle  on  a pu  les  étu- 
dier, ce  qui,  à la  vérité,  rend  extrêmement  difficile  d’apprécier 
avec  certitude  leur  nature  et  celle  des  diverses  vicissitudes 
qu’elles  ont  dû  éprouver. 

Mais  nous  arrivons  maintenant  à un  ordre  de  faits  bien  plus 
faciles  à juger,  car  il  s’agit  d’altérations  datant  de  trente-cinq 
jours,  de  six  semaines,  de  neuf  mois.  M,  Rochoux  va  nous  pré- 
senter, dès  une  époque  aussi  rapprochée  du  début,  des  altéra- 
tions toutes  semblables  à celles  que  nous  venons  de  citer  , 
comme  des  traces  d’hémorrhagies.  Ici  notre  critique  sera  bien 
plus  à r.aise,  nos  inductions  plus  certaines,  nos  conclusions  évi- 
dentes, et  nous  ne  craindrons  pas  de  nier  qu’il  soit  possible 
tju’au  bout  des  époques  que  nous  venons  d’indiquer,  du  sang 
ait  pu  disparaître  complètement  d’un  foyer  hémorrhagique, 
pour  être  remplacé  par  des  brides  celluleuses.  Suivons  de  nou- 
veau M.  Rochoux  dans  l’exposé  de  ces  faits. 

Obs.  38.  — u Un  cordonnier,  âgé  de  cinquante  ans,  goutteux, 
fut  pris,  il  y a deux  mois,  d’un  grand  embarras  dans  la  parole, 
sans  perte  de  connaissance.  La  liberté  de  la  parole  revint  assez 
promptement,  et,  au  bout  de  peu  de  jours,  il  reprit  scs  occu- 
paliüii.'i  accoutumées.  Il  ne  lui  resta  <|u’uue  jgêue  considérable 


iîG  UA.MULUSSK.UI.XT  CHKUJNiyLili.  (aJNAX.  l'AlII.) 

de  la  respiration.  Le  novembre,  l’oppression  est  telle  qu’il 
est  obligé  de  garder  le  lit;  on  s’aperçoit  alors  qu’il  est  hémi- 
plégique du  côté  gauche.  Le  6,  les  idées  sont  assez  suivies,  on 
ne  remarque  aucun  autre  symptôme  cérébral,  si  ce  n’est  quel- 
que chose  d’un  peu  enfant  dans  l’expression  générale.  L’op- 
pression augmente  , et  il  meurt  le  5 décembre  , sans  avoir  rien 
présenté  de  nouveau.  A la  partie  postérieure  et  externe  du  corps 
strié  droit,  se  trouvaient  deux  petites  cavernes,  de  cinq  à six 
lignes  de  diamètre,  incomplètement  remplies  par  un  liquide 
trouhle  et  purulent.  Leurs  jrarois  étaient  molles  et  diffluentes 
dans  l’épaisseur  d’une  ligne  et  demie  ou  deux  lignes.  Le  corps 
strié  gauche  présentait,  à sa  partie  interne,  deux  petites  dépres- 
sions d’une  ligne  ou  deux  de  diamètre.  En  incisant  sur  ces  dé- 
pressions, on  pénétrait  dans  deux  petites  cavités  qui  pouvaient 
à peine  loger  le  bout  du  petit  doigt , contenant  quelques  gouttes 
d’une  sérosité  jaunâtre...» 

Il  y a eu,  dit  l’auteur,  deux  attaques  d’apoplexie,  la  première 
dans  le  corps  strié  .gauche,  caractérisée  par  l’embarras  de  la 
])arole  et  l’oppression , la  deuxième  dans  le  corps  strié  droit , 
par  l’hémiplégie  et  raugmentation  de  l’oppression. 

Nous  pourrions  nous  demander  si  la  marche  des  accidents 
justiFie  cette  expression  de  deux  attaques  d’apoplexie,  mais 
nous  nous  contenterons  de  faire  remarquer  qu’en  attribuant  â 
une  hémorrhagie  l’altération  si  facile  pourtant  à caractériser  du 
corps  strié  droit,  l’auteur  n’a  pas  fait  attention  sans  doute  que 
trente-cinq  jours  seulement  s’étaient  écoulés  depuis  son  début 
jusqu’à  la  mort,  ce  qui  rend  son  interprétation  complètement 
inadmissible. 

Obs.  43. — « Une  femme  de  soixante-trois  ans,  sujette  à de  lé- 
gers étourdissements,  en  éprouve  un  violent  le  20  décembre  1812, 
et  se  sent  affaiblir  du  côté  gauche,  llans  la  nuit,  déliré.  Les  jours 
suivants,  le  delire  continue,  la  malade  est  complètement  hémiplé- 
gique du  côté  .gauche.  Elle  meurt  sans  coma,  le  5 février  1813, 
au  bout  de  six  semaines,  après  avoir  présente,  jusqu’à  la  fin,  du 
délire  et  de  l’agitation.  — Dans  la  partie  antérieure  de  l’bémi- 
sphère  droit,  un  peu  au-dessus  du  niveau  du  corps  calleux  , se 
trouvait  une  cavilé  alongée,  inégale,  traversée  par  quelques 
brides  iilameiitcuses,  longue  d’mi  ponce  et  demi , Iar;;c  de  trois 
a quatre  lignes,  hupielle  < oiitenait  quelque  peu  d’un  liquide 


c\viT^;s  i]KMor.'£ViiA.r.ioxn;s . 


séreux,  qui  semblait  tenir  en  suspension  un  détritus  de  la  sub- 
stance médullaire.  Un  peu  en  avant  de  cette  caverne  , on  re- 
marquait trois  ou  quatre  autres  petites  cavités,  dont  une  était 
logée  dans  le  corps  strié,  les  autres  occupant  l’hémisphère,  et 
qui  toutes  étaient  remplies  par  un  liquide  analogue  à celui  de 
la  grande.  La  substance  cérébrale  environnante  était  ramollie 
et  comme  diffluenle,  dans  l’épaisseur  de  trois  à quatre  lignes. 
Plus  en  avant,  immédiatement  au-dessous  des  circonvolutions  , 
se  trouvait  une  cavité  alongée,  inégale,  dont  les  parois  rougeâ- 
tres, accolées  entre  elles,  avaient  environ  un  pouce  de  surface, 
contenaient  quelques  gouttes  de  sérosité , et  offraient  une 
assez  grande  f(^neté  dans  l’épaisseur  d’une  ligne,  » 

L’auteur  attribue  les  trois  ou  quatre  petites  cavités  à un  tra- 
vail de  ramollissement.  « Mais  il  serait  peu  raisonnable  de  ne  pas 
attribuer,  dit-il,  à un  épanchement  de  sang,  les  deux  grandes, 
surtout  celle  dont  les  parois  étaient  rouges.  » Il  est  très-vrai  que 
cette  dernière  , bien  différente  de  ce  que  nous  avons  vu  jtcs- 
qu’ici,  présentait  les  caractères  d’un  véritable  foyer  hémorrha- 
gique ancien.  Mais  comme  six  semaines  n’eussent  assurément 
pas  suffi  pour  lui  donner  ce  caractère , et  que  d’ailleurs  rien 
ne  ressemble  moins  à une  hémorrbagie  que  le  début  des  acci- 
dents (délire  au  commencement , hémiplégie  graduellement 
croissante),  il  est  probable  qu’elle  se  sera  formée  à une  époque 
antérieure.  Pour  l’autre  cavité,  longue  d’un  pouce  et  demi , 
traversée  de  brides  filamenteuses,  sans  coloration  de  ses  ])arois, 
il  ne  viendra  à l’esprit  de  personne  d’y  voir  un  foyer  bémor- 
rbagique  datant  de  six  semaines. 

Obs.  45.  — U Un  bomme  de  soixante-six  ans  éprouva  une 
perte  de  connaissance  subite  qui  ne  laissa  après  elle  qu’une 
perte  de  la  parole,  qui  reparut  promptement,  mais  incomplè- 
tement. Il  n’y  eut  point  d’autre  paralysie,  seulement  plus  tard 
il  perdit  la  vue,  tomba  en  enfance,  et  mourut  au  bout  de  neuf 
mois. — A la  partie  antérieure  et  externe  du  corps  strié  droit 
se.trouvait  une  dépression  alongée,  de  deux  lignes  de  profon- 
deur, En  incisant  sur  cette  portion  du  corps  strié,  on  pénétrait 
dans  une  petite  cavité  de  cinc[  ou  six  lignes  d’étendue  dans  son 
plus  grand  diamètre,  traversée  en  tous  sens  par  des  filaments 
vasculeux,  dans  les  intervalles  desquels  se  trouvait  un  ])cu  de 
sérosité  légèrement  brune.  Les  parois  de  cette  cavité  offraient 


‘27!^  n\i\roi.i.issF,Mi:NT  cnMONiotr.  ( anat.  path.) 

la  meme  couleur,  avec  une  densité  irès  j^rande,  dans  l’épaisseur 
d’une  ligne.  Tout  le  lobe  postérieur  gauche  était  réduit  en  une 
espèce  de  pulpe  jaunâtre  mêlée  de  pus,  rassemblé  en  petits 
foyers  irréguliers.  La  substance  corticale  avait  seule  éprouvé 
complètement  cette  sorte  de  dégénération , et  l’on  distinguait 
au  milieu  d’elle  des  portions  considérables  de  substance  mé- 
dullaire, irrégulièrement  disposées,  et  formant  des  espèces  de 
cloisons.  » 

On  a sans  doute  remarqué  l’absence  d’hémiplégie  au  début 
et  la  succession  des  phénomènes  consécutifs,  ce  qui  se  trouve 
tout  à fait  d’accord  avec  la  nature  de  l’altératioqjencontrée  dans 
le  cerveau,  un  double  ramollissement. 

J’ai  cru  devoir  donner  autant  d’étendue  à la  discussion  de 
ces  faits,  afin  de  mettre  le  lecteur  à même  de  mieux  juger  la 
question  , et  aussi  pour  qu’on  ne  puisse  m’accuser  d’avoir 
mis  de  la  légèreté  dans  l’opposition  que  je  fais  ici  à un 
savant  écrivain.  J’ai  exposé  largement  les  pièces  du  procès  , et 
il  m’a  fallu  quelque  confiance  dans  la  bonté  de  ma  cause  pour 
m’en  prendre  ainsi  à mon  excellent  maître,  à l’homme  qui  s’est, 
à si  juste  litre,  acquisle  plus  d’autorité  dans  les  questions  qui  se 
rattachent  à l’histoire  de  l’apoplexie.  Georget,  du  i-este , avait 
déjà  reproché  à M.  Rocboux  d’avoir  méconnu  la  nature  des  faits 
décrits  sous  les  numéros  éO,  41,  42,  4.3,  45  et  46,  dans  lesquels 
il  ne  voyait  lui-même  que  des  enci'phaUtes  locales  (1). 

Si  l’on  y fait  un  peu  d’attention,  on  s’expliquera  aisément 
l’erreur  dans  laquelle  est  tombé  , au  moins  pour  quelques- 
uns  des  faits  que  j’ai  cités  , ce  médecin,  ainsi  que  ceux  qui  ont 
suivi  les  mêmes  errements.  La  seule  manière  d’arriver  avec 
certitude  à la  connaissance  des  traces  que  peuvent  laisser  dan.s 
le  cerveau  d’anciennes  hémorrhagies,  était  de  prendre  des  hé- 
morrhagies récentes  et  de  les  suivre  dans  chacune  de  leurs  pé- 
riodes successives,  de  manière  à arriver  peu  à peu,  et  en  quel- 
que sorte  de  jour  en  jour,  à ces  translormations  prétendues  , 
dont  l’origine  nous  paraît  à tel  point  contestable. 

J’avais  cru  longtemps  que  ce  travail  avait  été  fait,  en  voyant 
l’assurance  et  les  détails  avec  lesquels  les  divers  articles  qui 

(I)  GeeSrget,  üict,  demed..  tn‘  étlil.,  l.  viii , 37,  ari.  E?(Cfa’iiA.urF.. 

— M.  Itouillaiid  a fait  la  mêinr.  reniariiui;  daii.s  .son  Traite  de  Tcncé/>h(dite, 

pagf  224. 


CAVITES  Hi^.M()iti!iiA(;iüiii;s. 


279 


Iralteut  de  l’apoplexie  déciivent  les  périodes  couscculives  de 
cette  altération, ses  périodes  de  résorption,  de  cicatrisation.  Mais, 
lorsque  pour  m’édiüer  sur  ce  point,  j’ai  consulté  les  ouvrages 
spécialement  consacrés  'à  l’étude  de  cette  maladie,  j ai  vu  que 
la  plupart  manquaient  des  premiers  éléments  propres  à éclairer 
la  question.  Voici  comment  l’on  procède  en  général. 

Unindividua  éprouvé, à une  époque  plus  ou  moins  éloignée, 
une  attaque  d’apoplexie  ou  quelque  chose  de  semblable , car  la 
plupart  du  temps  on  n’a  que  des  l'enseignements  très-vàgues  ; 
après  sa  mort,  on  trouve  une  certaine  altération  dans  le  cer-f 
veau,  trace  évidente  d’une  lésion  ancienne  et  U’ansfonnée,  et  l’on 
prononce  que  cette  altération  est  le  vestige  d’une  bémorrhagie 
cérébrale.  Je  n’ai  pas  besoin  d’insister  sur  le  peu  de  significa- 
tion de  la  préexistence  d’une  attaque  d" apoplexie , puisque  toutïe 
mondesait  maintenant  combien  souvent  le  ramollissement  revêt 
cette  forme.  Ce  qui  semblait  d’abord  faciliter  l’interprétation  de 
ces  faits,  c’est  qu’on  neVoyait  pas  autre  chose  que  l’hémorrhagie 
cérébrale  à quoi  l’on  pût  rapporter  ces  altérations  consécutives  ; 
on  ne  soupçonnait  en  rien  le  rôle  que  pouvait  jouer  le  ramol- 
lissement dans  la  production  de  ces  diverses  transformations  ; 
telle  est,  je  n’en  doute  pas,  la  cause  de  la  facilité  avec  laquelle 
on  s’est  rangé  aux  premières  opinions  émises  sur  cette  question 
de  pathogénie. 

Il  importe,  du  reste,  de  signaler  une  circonstance  qui  ne  per- 
met pas  d’observer  aussi  fréquemment  qu’on  le  pense  les  faits 
précisément  les  plus  propres  à éclairer  la  question  : c’est  qu’une 
attaque  d’apoplexie  ne  cause  presque  jamais  la  mort  que  dans 
sa  première  période  ou  à une  époque  éloignée  de  son  début,  et 
ce  n’est  généralement  qu’à  une  circonstance  fortuite,  à une  ma-^ 
ladie  accidentelle,  que  l’on  doit  de  pouvoir  l’étudier  sur  le  ca- 
davre, pendant  la  durée  de  temps  intermédiaire.  Ceci  s’observe 
aussi  dans  le  ramollissement,  mais  surtout  dans  l’hémorrhagie,  et 
l’on  rencontre  rarement  les  foyers  hémorrliagiques,  dans  le 
cerveau,  datant  de  peu  de  mois,  c'’est-à-dire  à l’époque  où  s’o-^ 
pèrent  ces  transformations  dont  le  travail  serait  si  important  à 
saisir.  Je  vais  cependant  rapporter  un  certain  nombre  de  faits 
de  ce  genre  que  j’ai  réunis,  non  sans  peine,  dans  le  but  de  con- 
naître quels  changements  s’opèrent  dans  le  sang  lui-même,  et 
au  bout  de  combien  de  temps  il  cesse  de  présenter  des  carac- 


580 


nAMOM.l'ÎSrMF.A’T  rnP.ONiOlîK.  (a\.4T.  path.) 

tères  fatilemeiil  recoimaissables  : on  conçoit  paiTailemcnt  quel 
intérêt  présente  celte  étude,  lorsqu’il  s’aj^it  de  distinguer  les 
altérations  propres  au  rainollisseinent  de  celles  qui  appartien- 
nent à riiemorrliagie. 

1.  Hémorrhagie  datant  d’un  mois.  — Foyer  contenant  un 
caillot  central  noir,  assez  ferme,  et  qui  ensuite  revêt  d’une 
couche  fibrineuse  les  parois  du  foyer.  (Duplay,  Arckwes.,  2e  sé- 
rie, t.  VI,  p.  481.) 

2.  Hémorrhagie  datant  de  trente-cinq  jours.  — L’intérieur  de 
la  couche  optique  ch’oite  forme  une  cavité  assez  vaste,  remplie 
d’un  caillot  très-dense,  plus  mou  et  très-rouge  aü  centre , d’un 
jaune  d’ocre  dans  les  couches  extérieures.  Une  membrane  assez 
épaisse,  jaunâtre,  tapisse  ce  foyer  ; à l’entour,  la  substance  cé- 
rébrale est  dans  une  petite  épaisseur,  jaunâtre  et  un  peu  molle... 
(Durand-Fardel,  Observation  inédite.) 

3.  Trente-sept  jours. — Dans  le  corps  strié  droit,  caverne  de 
trois  pouces  de  largeur,  irrégulièrement  alongée,  et  contenant 
à peu  près  trois  onces  de  sang  fibreux  et  dense,  qui  avait  pris 

une  couleur  assez  semblable  à celle  de  la  bure (Piochoux, 

Recherches...  Obs.  39.) 

4.  Six  semaines.  — Sang  ressemblant  à de  la  gele'e  de  gro- 
seille noire  et  consistante  ; les  parois  du  foyer  sont  tapissées 
par  une  trame  cellulaire  qu’on  détache  facilement  du  tissu 
cérébral.  (Andral,  Clinique  médicale,  t.  V,  obs.  11.) 

5.  Cinquante-deux  jours. — A droite,  entre  la  couche  optique 
et  le  corps  strié,  épanchement  considérable  peu  ancien.  Mem- 
brane jaunâtre,  épaisse,  très-bien  organisée,  autour  du  caillot... 
(llostan,  A’ec/«erc//ej. ..  Obs.  83.) 

G.  Deux  mois.  — Au  milieu  de  riiémispbère  droit  du  cer- 
veau, on  trouva  un  épanchement  d’à  peu  près  une  once  de 
.sang,  dont  la  couleur  était  pâle  et  d une  consistance  pidt.icee... 
(Leroux  , Cours  sur  les  généralités  de  la  méûecine  pratique  , 

t.  VIII,  n.  253.) 

7.  Deux  mois.  — A peu  près  deux  cuillerées  de  sang  caille 
au  centre  de  riiémisplière  droit  du  cerveau...  (Dan  de  la  Vau- 
terie.  Dissert,  sur  Tapoplexie,  obs.  8.) 

8.  Soixante-quinze  jours.  — Foyers  multiples  ; lès  plus  gros, 
du  volume  d’une  noisette...  les  plus  récents  présentaient  du 


cAvrn';s  HiÎMORnHAr.ioitïïs. 

sanp-  parfaitement  reconnaissable..  Dan»  les  autres,  ce  n était 
plus’  du  sang,  mais  une  matière  jaune,  filante  comme  bilieuse, 
qui  allait,  en  s’infiltrant,  colorer  quelques  points  des  parties 
environnantes...  {Observation  inédite,  extr.  des  Archives  de  la 
Société  anatomique.) 

9 2'rois  mois.  — A la  partie  moyenne  de  la  couche  optique, 
est  une  petite  cavité  pouvant  contenir  une  amande  sans  son 
enveloppe,  pleine  d’un  liquide  épais,  d’un  jaune  d’ocre  fonce, 
homogène  ^ une  membrane  très-mince  en  tapissait  les  parois 
qui  présentaient  la  même  couleur,  mais  seulement  à leur  sur- 
face. (Durand-Fardel,  Observation  inédite.) 

10.  Trois  mois  et  demi.  — Caverne  irrégulièrement  alougée, 
d’un  pouce  cube  de  capacité,  remplie  en  partie  d un  sang  cou- 
leur deterre  de  Sarguemines,  fibreux,  filamenteux...  (Rochoux, 
Recherches...  Obs.  37.) 

11.  Q«««re  mois.  — Caillot  très-consistant,  d’un  rouge  jau- 
nâtre, nageant  dans  deux  gros  de  sérosité  roussâtre;  surface  du 
foyer  citrine...  (Moulin,  Traité  de  l apoplexie.) 

12.  Sept  mois.  — Cavité  remplie  d’une  bouillie  dout  la  cou- 
leur est  celle  delà  rouille  de  fer  5 ses  parois  sont  tapissées  jiai 

une  membrane  celluleuse,  dense,  très-résistante,  vasculaire 

(Andral,  Clinique  médicale,  t.  A' , obs.  7.) 

13.  Huit  mois.  — Petit  caillot  d’un  rouge  clair,  humide  à. sa 
surface;  cavité  à parois  veloutees,  de  couleur  feuille  morte... 
(Moulin,  Traité  de  V apoplexie.) 

14.  Un  an.  — On  rencontre  entre  les  corps  striés  et  la  couche 
optique  une  cavité  revêtue  d’une  espèce  de  membrane  jau- 
nâtre, contenant  environ  une  aveline  de  sang  caillé,  d’un  gris 
violet,  résultat  d’uidancien  épanchement. (Rostan,  Recherches... 
Obs.  8.) 

1.).  Treize  mois. — Cavité  pleine  d’une  matière  qui,  par  sa 
couleur  et  sa  consistance,  l’essemble  à une  décoction  concentrée 
de  chocolat  ; aucune  fausse  membrane  n’est  étendue  sur  ses  pa- 
rois... (Andral,  Clinique...  Obs.  10.) 

1(5.  Vingt  et  un  mois.  — Cavité  ayant  dix  lignes  de  long  sur 
Luit  de  large,  pleine  de  sérosité  roussâtre,  tapissée  d’une  mem- 
brane jaune  fauve,  et  contenant  une  petite  quantité  de  sang 
noirâtre  et  coagulé. ..(lliobé.  Thèse...  Ohs.  8.) 


282  RAMOIXISSRMENT  CHRONIQUR.  (ANAT.  PATH.) 

17.  Chez  une  femme  hémiplégique  depuis  plusieurs  année, s, 
j’ai  trouvé  l’altération  suivante  : toute  la  partie  externe  de  l’hé- 
misphère droit  est  longée  par  une  cavité  longue  et  étroite,  dont 
les  deux  extrémités  ne  sont  guère  distantes  que  de  deux  centimè- 
tres de  celles  derhémisphère.  Cette  cavité  est  limitée  en  dehors 
par  les  circonvolutions , en  dedans  par  le  ventricule  latéral. 
Vers  sa  partie  moyenne,  où  elle  est  beaucoup  plus  large,  sa 
partie  externe  a à peine  deux  millimètres  d’épaisseur.  Elle  est 
remplie  d’une  sorte  de  détritus  semblant  formé  d’un  mélange 
de  substance  cérébrale  et  de  fibrine,  et  d’un  jaune  de  bile  pro- 
noncé. Ses  parois  sont  jaunes  dans  une  certaine  épaisseur, 
inégales  et  ramollies,  sans  fausse  membrane. 

Je  pourrais  “ajouter  à ces  faits  deux  autres  observés  par 
IVl.  Serres,  dans  lesquels  on  a trouvé  un  caillot  de  sang  de.ssé- 
ché  au  bout  de  deux  ans,  dans  un  cas,  à la  fin  de  la  troisième 
année  dans  l’autre  ; celui  de  M.  Trochon  (1),  où  , au  bout  de 
trente  ans,  du  sang  a été  retrouvé  dans  deux  petits  kystes  épais, 
sous  forme  d’une  matière  ferme,  d’un  noir  foncé,  s’écrasant  sous 
le  doigt,  et  dans  laquelle  M.  Guérard  a reconnu  les  caractères 
chimiques  du  sang. 

Assurément  ces  faits  ne  nous  permettent  pas  de  préciser 
jusqu’à  quelle  époque  on  peut  retrouver  du  sang  en  nature 
dans  l’intérieur  des  foyers  hémorrhagiques  du  cerveau  ; on 
conçoit,  du  reste,  que  cette  époque  doit  varier  d’après  une  in- 
finité de  circonstances,  telles  que  le  volume  du  foyer,  la  nature 
du  sang,  l’état  général,  peut-être  le  régime  ou  le  traitement 
auquel  est  soumis  le  malade,  etc.  Mais  il  résulte  évidemment  de 
ce  tableau,  qu’en  général,  au  bout  de  plusieurs  mois,  d’une  année 
même,  le  sang  épanché  dans  le  cerveau,  non-seulement  conserve 
des  caractères  facilement  reconnaissables,  mais  encore  paraît  bien 
éloigné  de  disparaître  complètement.  Comment  donc  M.  Ro- 
choux  a-t-il  pu  attribuer  à des  hémorrhagies  résorbées , des 
cavités  qui  dataient  de  trente-cinq  jours  (obs.  38,  citée  plus 
haut),  de  six  semaines  (obs.  47),  de  neuf  mois  (obs.  42)?  En- 
fin, et  ceci  surtout  est  important,  aucun  de  ces  faits  ne  nous 
montre,  dans  le  sang  épanché,  la  moindre  tendance  à revêtir 
une  apparence  analogue  à celle  de  l’infiltration  celluleuse. 

(1)  Bulletins  de  la  Société  anatomique,  <840,  n.  5. 


troisikme  période. 


?83 


ARTICLE  III. 

TROISIÈME  PÉRIODE  DU  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE  (DISPARITION 
DU  TISSU  ramolli). 

Si  Ton  a suivi  avec  attention  la  inarclie  du  ramollissement 
cérébral,  telle  que  nous  l’avons  présentée,  on  a dû  remarquer 
qu’elle  tendait  incessamment  à l’atropliie  et  à la  disparition  du 
tissu  ramolli. 

A l’état  aigu,  il  y a d’abord,  comme  dans  toule  inflamma- 
tion , appel  de  fluides,  tuméfaction  ; mais  bientôt  ce  gonflement 
disparaît  ; le  ramollissement  pulpeux  se  forme,  et  le  cerveau  est 
revenu  à son  volume  normal  ; puis  apparaissent  les  plaques  jau- 
nes à la  superficie,  les  circonvolutions  se  ratatinent  ou  même 
se  déforment  complètement , et  une  surface  plane  remplace  leur 
saillie;  lacouclie  corticale  s’amincit,  les  plaques  jaunes  qui  la  re- 
présentaient finissent  même  par  disparaître  souvent,  et  on  n’en 

retrouvepluspour  trace  qu’une  coloration  jaunâtre  et  superficielle 

de  la  substance  médullaire.  Dans  celle-ci,  à mesure  que  le  ramol- 
lissementfaitdes  progrès,  la  pulpe  nerveuse  disparaît,  il  s’y  forme 
des  vides  séparés  par  sa  trame  celluleuse  qui  persiste  seule  , et 
on  ne  trouve  plus  à sa  place  qu’un  fluide  laiteux , parfois  encore 
chargé  de  ses  débris  floconneux  : peu  à peu  ces  espaces  s’agran- 
dissent , et  l’élément  celluleux  va  sans  cesse  en  se  raréfiant , s’i- 
solant d’abord  plus  complètement  de  la  pulpe  nerveuse  envi- 
ronnante , et  finissant  lui-même  par  subir  l’effet  de  celle  ten- 
dance destructive. 

Voici  où  nous  en  sommes  restés,  et  nous  avons  à étudier 
maintenant  les  effets  de  cette  disparition  complète  de  la  pulpe 
cérébrale  ramollie.  Nous  arrivons  au  dernier  terme  de  ce  tra- 
vail pathologique  complexe,  (jui  commence  par  une  simple  di- 
minution de  consistance,  mais  subit  ensuite  une  foule  de  trans- 
formations auxquelles  le  nom  de  ramollissement  cesse  d’être 
justement  applicable,  bien  qu’il  ne  s’agisse  toujours  que  d’une 
même  maladie. 

Il  est  quelques  réflexions  ayant  trait  au  sujet  d’un  des  cha- 
pitres suivants,  à la  guérison  du  ramollissement,  que  ;e  ne  puis 
me  défendre  de  présenter  dès  à présent  ; car  une  des  raisons  qui 


n AMOr.T.lSSF.AlF.NT  C.nilOKJOIIF.  (\XAT.  PATII.) 

me  foju  aUadiei  unejjiamleiinportance  à laconnaissance  de  cette 
dernière  période  du  ramollissement,  c’est  la  liaison  étroite  qui 
existe  entre  son  étude  et  celle  delà  guérison  du  ramollissement. 

Lorsqu  un  ramollissement  circonscrit  poursuit  sa  marche  et 
subit  ses  diverses  transformations  sans  s’étendre  aux  parties  voi- 
sines , il  peut  parcourir  ses  périodes  successives  sans  déterminer 
d aciidents  moi  tels,  et  arriver  ainsi  a son  dernier  degré  , celui 
dont  nous  nous  occupons  maintenant.  11  est  clair  qu’alors  la 
portion  malade  ayant  disparu,  le  ramollissement  ne  pourra  al- 
ler plus  loin  , la  maladie  se  trouvera  à son  terme,  il  v aura  une 
véritable  guérison.  Et  remarquez  que  cette  guérison  aura  lieu 
par  un  mécanisme  analogue  à celui  de  la  guérison  des  foyers 
hémorrhagiques,  et  pourra  laisser  des  traces  fortsemblables  à ces 
derniers:  car  lorsqu’il  se  fait  un  vide  dans  la  substance  cérébrale  , 
quelle  qu’en  soit  la  cause,  ce  dernier  ou  laissera  une  cavité  , ou 
se  comblera  par  le  retrait  des  parties  voisines,  d’où  une  cicatrice. 

Si  au  contraire  , à mesure  qu’un  ramollissement  fait  des  pro- 
grès dans  un  point,  il  se  propage  aux  parties  voisines,  quelle 
que  soit  la  durée  de  la  maladie,  quel  que  soit  le  résultat  anato- 
mique de  la  marche  incessante  qu’il  aura  suivie  dans  la  portion 
primitivement  atteinte,  il  n’y  aura  point,  à proprement  parler, 
de  guérison,  bien  que  l’on  puisse  trouver  des  déperditions 
de  substance  semblables  à celles  que  nous  indiquions  tout  à 
l’heure,  comme  exemples]  d’une  termirtaison  heureu.se  de  la 
maladie.  Il  pourra  y avoir,  si  l’on  veut,  guérison  du  rainolUsH 
sement  dans  le  point  le  plus  anciennement  affecté,  ])arce  qu’une 
fois  la  substance  cérébrale  absolument  disparue  dans  ce  point , 
le  ramollissement  aura  nécessairement  cessé  d’exister,  mais  la 
maladie  elle-même  n’aura  pas  guéri , puisqu'elle  aura  continué 
de  mareber  et  de  s’accroître  à l’entour. 

Je  pense  que  l’on  a bien  compris  cette  distinction  sur  lai|uelie 
j’insiste,  parce  que  c’est  sur  elle  que  repose  la  véritable  inter- 
prétation du  mot  guérison  du  ramollissement,  \oici  , du  reste, 
une  comparaison  qui  rendra  encore  clairement,  mais  d’une 
autre  manière,  ma  jîensée  sur  ce  sujet  : 

Qu’un  poumon  se  tuberculisc  dans  un  point  circonscrit,  et 
(pie  celui-ci  suive  jusqu’au  bout  la  marclie  propre  aux  tuber- 
cules pulmonaires  , les  tubercules  se  ramolliront , puis  une  ca- 
verne se  formera  ; (pie  cette  dernière  vienne  à se  cicatri.ser  par 


•285 


XUUISIÈ-MK  riitllOUE. 

un  des  modes  quelconques  que  l’on  connaît  aujoui  d’hui,  et  dont 
la  condition  essentielle  est  l’exacte  chconscription  de  la  caverne 
au  milieu  d’un  tissu  sain  ou  induré  sans  dégénération  ; si  cette 
caverne  est  unique,  la  maladie  aura  guéri.  Si  au  contraire  des 
tubercules  se  sont  développés  et  ont  marclié  dans  les  parties 
voisines  pendant  que  cette  caverne  se  cicatrisait,  ce  point  spé- 
cial n’en  aura  pas  moins  guéri , et  cependant  la  maladie  n’aura 
pas  elle-même  subi  de  guérison , et  elle  pourra  marcher  jus- 
qu’au terme  fatal. 

Ainsi  il  faut  bien  distinguer  la  guérison  d’un  point  donné, 
par  arrêt  de  la  lésion  anatomique  dans  ce  point,  et  la  guérison 
de  la  maladie , qui  suppose  l’arrêt  da  mal  dans  la  totalité  de 
l’organe  affecté. 

Nous  allons  maintenant  donner  des  exemples  de  cette  der- 
nière période  du  ramollissement  : suivant  notre  habitude  , nous 
commencerons  par  des  faits  où  les  altérations  qui  lui  sont  pro- 
pres se  trouveront  unies  à celles  de  la  période  précédente,  afin 
qu’on  ne  puisse  douter  de  leur  origine  ; nous  les  montrerons 
ensuite  isolées. 

Nousles  étudierons  d’abord  à la  superficie  du  cerveau. Quand 
un  ramollissement  circonscrit  de  la  couche  corticale  des  cir- 
convolutions est  parvenu  à sa  dernière  période  , il  donne  lieu  à 
de  véritables  ulcérations. 


S 1.  Ulcérations  des  circonvolutions. 

Observation  76.  1 — 1 Démence;  ulcération  des  circonvoliitions  , pla- 
ques jaunes  à l’entour. 

La  nommée  Delorme  , âgée  de  80  ans,  entrée  à la  division 
des  aliénées  incurables  delà  Salpétrière  au  mois  de  mai  1838, 
avait  toutes  les  apparences  d’une  bonne  santé  ; elle  se  prome- 
nait librement  dans  les  cours , mangeait  beaucoup  et  digérait 
bien.  Elle  paraissait  se  rendre  assez  bien  compte  des  sensations 
qu’elle  éprouvait,  et  n’olï’rait  qu’un  affaiblissement  des  facul- 
tés intellectuelles  que  l’on  observe  souvent  à un  âge  aussi  avancé. 

Il  y a deux  mois  , elle  présenta  les  symptômes  d’une  périto- 
nite, et  fut  traitée  en  conséquence.  Il  y avait  nausées,  vouds- 
sements,  petitesse  et  concentration  du  pouls  , peau  cliaude, 
ventre  douloureux  et  ballonné,  très-sensible  à la  pression,  con- 


286  UAMOLUSSEMEax  CUlVOiNlQUE.  (AWAT.  PATH.) 

stipation.  Sous  l’influence  des  antiphlogistiques  employés  d’une 
manière  active , ces  accidents  se  dissipèrent  au  bout  de  quel- 
ques jours,  et  depuis  lors,  la  malade  sortait  et  se  promenait 
comme  à l’ordinaire,  lorsque,  le  24  juin  1859,  elle  mourut  le 
malin,  presque  subilemenl.  Elle  n’avail  rien  présenté  de  bien 
particulier,  si  ce  n’est  que  la  veille  elle  était  restée  couchée  con- 
tre son  habitude. 

Autopsie.  — Les  méninges  sont  notablement  épaissies  et  in- 
filtrées d’une  grande  quantité  de  sérosité  limpide  : il  y a des 
opacités  sur  le  feuillet  cérébral  de  l’arachnoïde.  La  pie-mère 
s’enlève  très-facilement  par  larges  lambeaux. 

Sur  la  convexité  de  l’iiémisphère  gauche,  près  du  bord  de  la 
grande  scissure , vers  la  réunion  du  tiers  postérieur  avec  les 
deux  tiers  antérieurs,  ou  trouve  une  Igrge  perte  de  substance, 
véritable  ulcération  irrégulièrement  arrondie,  de  l’étendue  à 
peu  près  d’une  pièce  de  deux  francs , de  5 ou  6 millimè- 
tres de  profondeur,  dont  le  fond  est  blanc,  assez  lisse,  un  peu 
grenu , nullement  ramolli.  Ses  bords  sont  taillés  perpendiculai- 
rement et  formés  par  la  couche  corticale  des  circonvolu- 
tions voisines.  Celles  qui  en  forment  le  bord  postérieur  sont 
transformées  en  plaques  jaunes,  semblables  à celles  qui  ont  été 
décrites  dans  les  observations  précédentes.  Au-dessous  de  ces 
altérations,  la  substance  médullaire,  presque  jusqu’au  ventri- 
cule, est  très-molle,  difiluenle,  se  laissant  pénétrer  profondé- 
ment par  un  jet  d’eau. 

Il  y avait  dans  l’épaisseur  de  ^l’épiploon  gastro-colique  une 
tumeur  aplatie,  du  volume  delà  moitié  du  poing,  dont  l’inté- 
rieur était  rempli  d’un  liquide  puriforme  assez  abondant , et 
dont  la  face  interne  était  rugueuse,  inégale , d’un  rouge  grisâ- 
tre. Par  sa  face  externe,  elle  adhérait  d’une  part  au  bord  coli- 
que de  l’estomac,  dont  les  parois  étaient  épaissies  dans  ce  point  ; 
d’une  autre  part,  à la  partie  moyenne  du  colon  transverse , avec 
lequel  elle  communiquait  par  une  ouverture  dans  laquelle  on 

introduisait  à peine  le  petit  doigt. 

Au  dessous  de  cette  ouverture , l’intestin  , dont  les  parois 
étaient  très-épaisses,  offrait  un  étranglement  circulaire,  qui  per- 
mettait encore  la  ciiculation  des  matières.  Enfin,  au  dessus  de 
cet  étranglement,  la  muqueu.se  était  boursouflée,  et  piésea- 
lait  des  vcgclations  fongueuses  et  rougeâtres. 


TKOISIÈME  PÉRIODE.  Î87 

Le  cœur  était  énorme,  rempli  de  sang  coagulé  ; le  ventricule 
gauche  épaissi,  les  valvules  ossifiées. 


Observation  77.  — Plaques  jaunes  et  ulcération  des  circonvolutionsj 
infiltration  celluleuse  du  cerveau  et  du  cervelet.  — Point  de  signes 
apparents,  pendant  la  vie,  de  lésions  cérébrales. 

Une  femme,  nomme'e  Thirion,  âgée  de  soixante-neuf  ans,  en- 
tra, le  20  novembre  1838  , au  numéro  16  de  la  salle  Saint- 
Antoine  (Salpétrière),  présentant  tous  les  signes  d’’une  affec- 
tion grave  du  cœur.  Elle  fut  examinée  avec  soin,  et  interrogée 
sur  ses  antécédents  ; malheureusement  l’absence  de  toute  alté- 
ration appréciable  de  la  parole,  des  sens,  des  mouvements  et  de 
l’intelligence,  m’empêcha  de  fixer  mon  attention  sur  l’état  céré- 
bral, et  je  ne  fis  aucune  recherche  dans  ce  sens.  Elle  me  dit  seu- 
lement qu’elle  était  sujette  aux  étourdissements  , ce  qui  n’était 
pas  fort  étonnant,  vu  la  nature  des  accidents  qu’elle  éprouvait. 
Elle  rapportait  à quinze  ans  le  début  de  sa  maladie  ; mais  de- 
puis dix  mois  l’oppression  était  devenue  fort  considérable..  Elle 
avait  de  l’embonpoint,  et  pas  d’œdème  dans  les  membres.  Elle 
mourut  asphyxiée,  le  6 décembre. 

Autopsie.  — Quantité  considéx'able  de  sang  dans  les  sinus  de 
la  dure-mère,  un  peu  de  sérosité  dans  la  cavité  de  l’arachnoide, 
infiltration  séreuse  très-abondante  dans  la  pie-mère,  injection 
assez  fine  de  ses  vaisseaux,  grande  transparence  de  l’arachnoïde, 
excepté  près  de  la  ligne  médiane,  où  elle  présente  beaucoup 
d’épaississement  et  d’adhérences;  beaucoup  de  sérosité  à la  base  ; 
toutes  les  artères  ont  leurs  parois  jaunâtres,  dures,  très-épaisses, 
sans  ossifications. 

Les  circonvolutions  sont  arrondies  comme  à l’ordinaire,  mais 
écartées  profondément  par  la  sérosité.  Une  de  celles  du  côté 
gauche,  près  de  la  grande  scissure,  est  affaissée  et  forme  à la  sur- 
face du  cerveau  une  sorte  de  godet  plein  de  sérosité. 

La  pie-mère  s’enlève  très  -facilement  de  tous  les  points  de  la 
superficie  du  cerveau,  même  à sa  base  ; seulement  les  circonvo- 
lutions de  l’extrémité  des  deux  lobes  postérieurs  présentent  en- 
tre elles  des  adhérences  serrées  et  difficiles  à détacher. 

A gauche,  dans  le  fonds  de  la  plupart  des  anfractuosités,  la 
couche  corticale  est  translormée  en  un  tissu  jaune,  mollasse  au 


l’(S8  UAMULLls.SliMliiM  C.lll’vÜIXlQLK.  (Aû'AT.  l'Alll.) 


lonclicr,  dL  cependant  doué  d’une  force  de  cohésion  assez  pro- 
noncée, ])lus  mince  ejue  la  couche  corticale  et  vasculaire  à sa 
surface.  Au  dessous  la  substance  blanche,  dans  cinq  ou  six  mil- 
limètres de  profondeur,  est  manifestement  ramollie,  ou  plutôt 
raréfiée;  sur  l’hémisphère  droit,  on  trouve  au  fonds  d’une  an- 
fractuosité la  couche  corticale  détruite  dans  toute  son  épaisseur 
et  dans  une  assez  grande  etenduej  les  bords  de  cette  ulcération 
sont  très-irrégulieis  et  nettement  découpés.  Elle  est  tapissée  au 
fonds  par  une  lame  celluleuse  jaunâtre,  vasculaire,  assez  unie  ; 
au  dessous,  la  substance  médullaire  est  très-ramollie  jusqu’au 
ventricule,  dont  la  membrane  se  trouve  comme  disséquée  au 
fonds  de  la  cavité  digitale.  La  substance  ramollie  est  blanche, 
infiltrée  d’un  liquide  lait  de  chaux.  Ses  parois,  mal  limitées, 

sont  assez  vasculaires.  , . , • 

Les  altérations  superficielles  que  je  viens  de  décrire  n attei- 
gnaient le  sommet  que  d’une  ou  dein:  circonvolutions  du  lobe 
postérieur  gauche.  Plusieurs  anfractuosités  des  lobes  postérieurs 
et'du  lobule  du  corps  strié,  des  deux  côtés,  étaient  légèrement 
érodées,  jaunâtres,  présentant  en  petit  les  altérations  que  nous 


venons  de  décrire.  ^ 

Le  corps  strié  gauche,  vu  par  le  ventricule,  présenté  près  de 

sa  queue  un  enfoncement  transversal,  comme  un  sillon  jaunâ. 
ire,  au  dessous  duquel  son  tissu  est,  dans  une  petite  épaisseur, 

ui/peu  ramolli,  ou  plutôt  raréfié  et  jaunâtre. 

Le  cervelet  présente  à sa  face  inférieure  et  à la  partie  interne 
de  spn  lobe  gauche  un  espace  pouvant  contenir  une  noix,  forme 
par  un  tissu  cellulaire,  jaunâtre,  très-lâche,  entre  croisé  en  tous 
sens,  vasculaire  et  limité  en  dehors  par  la  pie-mère-  Ses  parois 
sont  mal  limitées,  tapissées,  non  par  une  membrane,  mais  par 
un  tissu  cellulaire  plus  dense.  Au  delà,  la  substance  médullaire, 
dans  l’étendue  d’un  millimètre  à peu  près,  n est  pas  sensible- 
ment ramollie,  mais  moins  blanche,  et  comme  striee  de  lignes 


îuisâtres. 


0»si.nv  n,...  ,S.  - An>U,lisscmenl  g^..cr»l  taculte  |,cmlant  .... 

comnH-lo  coma.  — n.raollijscn,OTt  aign  , lougeatie  <lcs  ciicomolu- 
Zfuîâ.  aüo..  d'ooo  cU-co, .voie, ion  i ca.i.ca  moUiplcUms  Icco,-,» 
Striés.  Liât  criblé  du  cerveau. 

Lcclac,  â,jé  .le  üuixa,.le-.l.a-sci.t  a„s,  |,.cse..tan.  C., 


TUUlSlii.Mli  l'iLuiOJJJi. 


d’une  sanLe  robusle,  a été  porté  à l’inlîiineiie  de  Bicèlre,  le  21 
janvier  tS  lO.  On  ne  peut  avoir  sur  eut  lioinine  que  des  rensei- 
gnements fort  incomplets,  auprès  de  ses  camarades.  On  rapporte 
qu’il  ne  marchait  qu’avec  peine,  en  s’appuyant  sur  un  bâton, 
que  les  inouveiiientsdeses  bras  paraissaient  faibles  et  difficiles, 
qu’il  s’exprimait  avec  difficulté  et  que  parfois  on  avait  de  la 
peine  à le  comprendre. Son  intelligence  était  affaiblie,  il  pavillon- 
nait  (c’est-à-dire,  il  divaguait  parfois). 

A'^oici  une  note  prise,  à son  entrée  à rinfirinerie,  par  un  élève 
du  sèrvice  quia  bien  voulu  me  la  communiquer  : ■— Décubitus 
dorsal;  immobilité  presque  complète  ; réponses  lentes,  par  mo- 
nosyllabes, le  plus  souvent  inexactes;  il  est  comme  inattentif, 
mais  on  parvient  facilement  à le  tirer  de  cet  état  d’indifférence’ 
en  le  pressant  de  questions.  Faciès  un  peu  injecté , peau  assez 
chaude,  pouls  à 7â,  assez  régulier  et  plein  ; bruits  anormaux 
au  cœur.  Il  ne  peut  mouvoir  les  membres  qu’avec  beaucoup  de 
peine  et  incomplètement  ; il  ne  peut  lever  les  mains  et  saisir  les 
objets.  Légère  raideur  du  coude  et  du  genou  gauches;  les  bras 
soulevés  retombent  presque  comme  des  masses  inertes.  La  face 
paraît  un  peu  déviée  à droite.  Pandiculations  fréquentes.  La 
lete  est  deviee  à droite.  Respiration  régulière,  un  peu  fréquente. 

Le  lendemain  , Leclerc  était  plongé  dans  un  coma  profond  • 
la  respiration  fréquente,  stertorcuse,  la  peau  chaude  et  couverte 
d une  sueur  abondante  , le  pouls  fort,  à 100.  Résolution  et  in- 
sensibilité generales.  Mort  le  troisième  jour. 

Autopne.  - Un  peu  de  sang  de.ni-coagulé  dans  les  sinus  de 
a dure-mere.  Un  peu  de  sdiosilc  limpide  dans  raeacimoïde  • 
IcBeses  opacUes  de  celte  membiane.  Sli  ositéJimplde  assez  abonl 
drmte  dans  la  p,e-me.e  t elle  est  assez  Injectée  ; au-dessus  du 
lobe  poster, eut  d,o,t,  elle  offi-e  leger  redet  iauniU,e.  Les 
parois  des  vaisseaux  de  la  base  .<=ont  saines.  • 

La  pie-mère  s’enlève  en  général  assezfacileme.it  de  la  super 
ficie  duceiveau,  excepte  dans  quelques  points  où  elle  cm.-  ‘ 
avec  elle  la  couche  la  plus  superficielle  de  la  subslanreco  i’ 

-^es  points  ramollis  .‘•ont  une  circonvolution  de  l’h  > * 
gauche,  et  sept  ou  huit  de  la  convexité  de  1’],,'  ' , 
il»  «ont  , ouBcàltcs , c,  se  laissent  pé,,;:;,. 

par  un  lilcl  d’eau,  sans  qu’il  s’endéndic  ,1  I «««lever 

«ont  c.  le  ta,,,oll,ssc,,.c  .ln’  tm^ 

icicssuii  gucie  que  la  substance 

10 


290  ramollissememt  chronique,  (anat.  path.) 
corticale  ; dans  quelques  points,  ils  n’en  occupent  même  pas 


V.V1  VIV.CA1W  f '-J — r " 

toute  l’épaisseur;  dans  un  ou  deux  seulement,  ils  empiètent  un 
peu  sur  la  blanche, 

On  trouve  dans  une  anfractuosité  de  la  convexité  du  lobe 
postérieur  gauche  une  altération  d’une  date  toute  differente  : la 
Lbstance  corticale  a tout  à fait  disparu  dans  l’étendue  d’une 
pièce  de  2 francs  , mais  peu  régulièrement  arrondie  ; il  en  ré- 
sulte une  véritable  ulcération,  dont  les  bords,  assez  nettement 
découpés,  bien  consistants , ont  une  hauteur  équivalente  à 1 é-  . 
paisseur  normale  de  la  couche  corticale  ; le  fond  en  est  tapissé 
par  une  membrane  assez  dense  et  épaisse,  presque  incolore  ou 
d’une  teinte  jaunâtre  à peine  sensible  ; de  petits  vaisseaux  la 
parcouraient  dans  son  épaisseur.  La  pie-mère  n’avait  laisse  au- 
cune trace  d’adhérences  à sa  surfâce.  Au-dessous , la  substance 
blanche,  dans  l’épaisseur  d’un  ou  deux  millimètres , était  un 
peu  molle,  raréfiée,  présentant  des  fibres  blanches,  comme  cel- 
luleuses, entrecroisées. 

En  général,  les  circonvolutions  des  deux  hemispheres  étaient 
petites,  ratatinées,  inégales,  un  peu  rugueuses  à leur  surface. 
( Atrophie  sénile.  ) Au  milieu  du  ramollisse, nenl  rougeâtre  de 
l’hémisphère  droit,  une  circonvolution  présentait  à son  somuiel 
une  excava, ion  pouvant  contenir  un  gros  pois,  un  peu  tnfnn  ,- 
bulitorme,  dont  l’orifice  étroit  et  béant  à la  surface  de  la  circon- 
volution. tétait  dentelé  ; cette  petite  cavité  avait  des  parois  du- 
res et  tapissées  d’une  membrane  fine  et  jaune,  parcourue  de 
petits  vaisseaux  très-déliés.  Elle  ne  paraissait  rien  contenu . 

La  substance  blanche  était  asser  vivement  mjectee  ; on  y 
voyait,  surtout  au-dessous  des  circonvolutions , des  vaisseaux 
rouges,  longs,  volumineux,  consistants,  se  laissant  assez  disten- 
dre sans  se  Lnpre.  L’injcciion  paraissait  un  peu  plus  piononcee 
au-dessous  des  ramollissements  de  la  superficie.  On  trouva  en 
outre  la  substance  blanche  sous-jacente  aux  crconvolntions  , 
criblée  d’un  grand  nombre  de  petits  trous  ronds,  de  chacun  des- 
quels on  voyait  sortir  un  petit  vaisseau  ronge  ( état 
L parlies  profondes  des  hémisphères,  cette  disposition  était 
peine  prononcée,  si  ce  n'est  dans  le 

elle  était  assez  marquée,  coïncidence  remarquable  avec 

radon  qui  a été  décrite  à la  siipcrficie.  „,lllerées  d< 

Les  ventricules  latéraux  contenaient  quelques  cuilleiees 


TAOISIÈME  PÉRIODE. 


291 


sérosité  limpide.  La  surface  des  deux  corps  striés  était  aftaissée, 
un  peu  jaunâtre,  bosselée.  On  trouva  dans  chacun  d’eux  une 
cavité  du  volume  d’un  noyau  de  cerise  ou  d’une  amande  , ta- 
pissée par  une  membrane  fine,  vasculaire,  jaunâtre  ; les  parois 
de  la  plus  petite  étaient  rapprochées,  celles  de  la  plus  grande, 
séparées  par  un  peu  de  liquide  incolore.  Ces  cavités  offraient 
tous  les  caractères  de  cavités  hémorrhagiques.  Auprès  d’elles, 
le  reste  des  deux  corps  striés  offrait  un  certain  nombre  de  petites 
lacunes  sans  altération  de  couleur  ni  de  consistance,  de  la  sur- 
face desquelles  une  pince  fine  détachait  un  peu  de  tissu  cellu- 
laire contenant  de  très-petits  vaisseaux. 

Rien  à noter  dans  la  moelle  allongée  ni  dans  le  cervelet. 

Engorgement  léger  à la  base  du  poumon  droit.  Hépatisation 
avec  commencement  de  suppuration  du  lobe  inférieur  du  pou- 
mon gauche.  Cœur  très-volumineux. 


OusKRV,vTioN  79.  — Hémiplégie  gauche  datant  de  trois  ans.  — Amin- 
cissement de  la  dure-mère.  Ulcération  des  circonvolutions.  Infiltration 
celluleuse  de  la  substance  médullaire  sous-jacente  et  du  corps  strié. 

La  nommée  Meulier  Bossu,  âgée  de  soixante-treize  ans,  mou- 
rut le  26  juillet  1839  à l’infirmerie  de  la  Salpêtrière.  Cette 
femme,  dont  l’intelligence  était  bien  conservée,  et  qui  s’expri- 
mait avec  facilité,  disait  avoir  éprouvé,  trois  ans  auparavant, 
une  attaque  de  paralysie  du  côté  gauche.  Elle  pouvait  encore 
marcher,  lorsqu’une  seconde,  il  y a trois  mois,  vint  la  priver 
complètement  du  mouvement  de  ce  côté.  En  effet,  il  y avait 
une  hémiplégie  complète  à gauche , et  le  bras  demeurait  fléchi 
sur  la  poitrine  sans  presque  de  raideur.  Cette  femme  laissait 
aller  sous  elle  depuis  sa  dernière  attaque. 

Autopsie.  — Les  os  du  crâne  sont  épais  et  très-durs.  La 
dure-mère  est  remarquablement  amincie  ; au-dessus  des  lobes 
antérieurs,  elle  est  assez  transparente  pour  laisser  distinguer 
au-dessous  d’elle  la  forme  des  circonvolutions  et  la  vascularité 
de  la  pie-mère;  la  faux  du  ceiveau  est  à jour  comme  une  den- 
telle. 


qui  écarte  la  plupart  des  circonvolutions  jusqu’à  leur  base,  sur 


»AMOI,L1SôEA1ENT  CIUIOMQUE.  (anaT.  PATIl.) 

tout  au-dessus  des  lobes  moyens  et  postérieurs,  et  plus  à droite 
c|u  a gauche.  Cette  membrane,  assez  vivement  injectée  de  sang, 
se  détache  partout  avec  la  plus  grande  facilité  de  la  superficie  du 
cerveau. 

Les  circonvolutions  de  la  partie  externe  de  la  convexité  de 
l’hémisphère  droit  sont  considérablement  amincies , un  peu  iné- 
gales à leur  surface  et  comme  ratatinées  ; en  même  temps  beau- 
coup plus  denses  qu’à  l’ordinaire  et  que  celles  du  côté  opposé. 
Cette  diminution  de  volume  paraît  due  surtout  à l’amincisse-, 
ment  de  la  couche  corticale.  Au  sommet  d’une  de  ces  circonvo- 
lutions , est  un  petit  enfoncement  au  fond  duquel  on  trouve  un 
peu  de  tissu  cellulaire  jaunâtre. 

Du  côté  droit,  à l’extrémité  postérieure  et  supérieure  de  Tm- 
siila  , la  substance  corticale  a coniplètement  disparu  de  la  sur- 
face d’une  circonvolution  , dans  un  espace  grand  éoinme  une 
pièce  de  2 francs.  La  circonférence  de  cette  ulcération  est 
inégale,  dentelée,  coupée  à pic,  formée  par  la  substance  corti- 
cale et  un  peu  de  substance  blanche  ; elle  offre  une  densité  assez 
grande, sans  changement  de  couleur  : seulement,  à sa  partie  in- 
férieure , sur  le  lobule  même  du  corps  strié,  on  voit  que  trois 
ou  quatre  des  circonvolutions  qui  vont  former  ce  lobule  sont 
toutes  petites,  extrêmement  ratatinées  , d’une  couleur  jaune 
assez  foncée. 

La  pie-mère  n’offrait  aucune  adhérence  avec  l’ulcération;  le 
fond  en  était  blanc  et  tapissé  d’une  membrane  très-mince,  trans  • 
parente  et  vasculaire.  Cette  membrane  enlevée,  on  vit,  en  pro- 
jetant un  filet  d’eau  , flotter  un  grand  nombre  de  filaments , de 
lamelles  blanchâtres,  comme  celluleuses,  et  dont  on  ne  détachait 
rien  de  pulpeux  *,  seulement,  en  pressant  ce  tissu,  on  en  expri- 
mait une  petite  quantité  d’un  liquide  trouble  et  grisâtre,  dont  il 
était  imbibé. 

Cette  infiltration  celluleuse  s’étendait  profondément  jusqu’au 
corps  strie  ; latéralement,  elle  se  fondait  assez  graduellement 
dans  la  substance  médullaire  saine , qui  présentait,  au-dessous 
des  circonvolutions  de  la  convexité,  un  certain  nombre  de  per- 
tuis  assez  larges,  desquels  sortait  un  petit  vaisseau.  {État 
crible.) 

La  surface  ventriculaire  du  corps  strié  était  inégale  et  dé- 
primée, biirlout  vers  sa  7ucae.  Cnc  incision  pratiquée  sur  ce 


xnmsiiMF.  PÉiuonE. 


293 


point,  on  vit  que  son  tissu  était  très-mollasse,  jaunâtre  par 
places,  grisâtre  dans  d’autres  , et  laissant  écouler  une  certaine 
quantité  d’un  liquide  grisâtre,  trouble,  assez  semblable  à du  petit 
lait.  Cette  altération  allait  rejoindre  celle  que  nous  avons  tout  à 
riieure  décrite  au-dessous  des  circonvolutions.  Dans  sapartie  an- 
térieure ou  renflée,  le  tissu  du  corps  strié  était  à peine  altéré  , 
mais  cet  organe  se  trouvait  comme  isolé  de  la  substance  blanche 
envirortnanle  par  un  espace  où  l’on  ne  trouvait  que  des  brides 
lâches , d’un  jaune  assez  vif,  inflltrées  d’une  quantité 

d’un  liquide  jaunâtre  et  grisâtre,  et  parcourues  par  un  grand 
nombre  de  petits  vaisseaux  injectés.  Toute  la  tcie  du  corps  strié 
se  trouvait  très-nettement  disséquée  au  milieu  de  celte  infiltra- 
tion celluleuse.  La  couche  optique  était  un  peu  entamée.  Rien 
à noter  dans  l’autre  hémisphère. 


Observation  8o. — Ulcération  d’une  circonvolution. 

Le  sujet  de  notre  soixante-quinzième  observation,  qui  nous  a 
offert  une  infiltration  celluleuse  si  curieuse  et  si  étendue  des  deux 
hémisphères,  présentait  en  outre  une  ulcération  des  circonvolu- 
tions, dont  nous  avons  r éservé  la  description  pour  ce  paragraphe. 

Sur  la  convexité  du  lobe  postérieur  de  l’hémisphère  gauche, 
on  remarquait  une  ulcération  delà  superficie  du  cerveau,  qui 
se  présentait  ainsi  ; dans  un  espace  de  l'étendue  à peu  près  d’unç 
pièce  de  cent  sols,  mais  moins  régulièrement  arrondi,  occupant 
une  anfractuosité  et  le  rebord  de  deux  circonvolutions  voisines, 
se  trouvait  une  déperdition  de  la  substance  corticale,  dont  les 
bords  étaient  presque  aussi  nettement  taillés  à pic  que  ceux  de 
certains  ulcères  de  la  peau.  Le  fond  de  celte  ulcération,  qui 
n’allait  pas  au-delà  de  la  substance  grise  , était  jaunâtre  , ta- 
pis.sé  dans  une  partie  de  son  étendue  parurie  membrane  mince 
et  transparente,  à nu  dans  le  reste,  la  membrane  qui  le  recou- 
vrait dans  ces  points  ayant  sans  doute  été  entraînée  par  la  pie- 
mère.  Les  parties  qui  environnaient,  soit  les  bords,  soit  le  fond 
de  l’ulcération,  étaient  parfaitement  saines. 

L’origine  des  ulcérations  du  cerveau  me  paraît  très-facile  à 


294 


ramollissement  chronique,  (anat.  path.) 

saisir  d’après  les  observations  qui  viennent  d’être  rapportées. 
Dans  les  deux  premières,  elles  s’étaient  évidemment  dévelop- 
pées aux  dépens  des  plaques  jaunes  des  circonvolutions  ; dans 
l’observation  78,  l’ulcération  était  avoisine'e  par  des  circonvolu- 
tions ratatinées  et  jaunâtres  : or,  les  observations  65,  66, 
69,  etc,,  nous  avaient  déjà  démontré  que  ces  plaques  jaunes 
n’etaient  elles-mêmes  qu’un  degré  plus  avancé  du  ramollisse- 
ment rouge  des  circonvolutions.  Donc  les  ulcérations  que  nous 
venons  de  tfccrire  ne  sont  autre  chose  que  ce  ramollissement 
rpuge,  infiltré  de  sang,  des  circonvolutions,  parvenu  à sa  der- 
nière période,  à travers  les  transformations  que  nous  avons 
jusqu’ici  suivies  minutieusement.  Il  me  paraît,  du  reste  , n’y 
avoir  rien,  dans  cette  filiation,  que  de  très-naturel  et  de  très- 
conforme  aux  idées  généralemeni  reçues  en  patbogénie. 

On  a sans  doute  remarqué  la  ressemblance  de  ces  ulcérations 
dans  les  cinq  observations  que  j’ai  rapportées,  ressemblance 
telle  que  l’on  y retrouve  presque  les  mêmes  expressions,  malgré 
les  époques  difféi'entes  où  elles  ont  été  recueillies.  Elles  avaient 
toutes  une  largeur  variant  entre  celle  d’une  pièce  de  deux  à 
une  pièce  de  cinq  francs,  irrégulièrement  arrondies,  à bords 
nets  et  taillés  perpendiculairement  ; elles  comprenaient  à peu 
près  exactement  l’épaisseur  de  la  couche  corticale;  généralement 
tapissées  au  fond  par  une  membrane  toujours  lisse,  tantôtfineet 
transparente,  tantôt  plus  épaisse  et  vasculaire,  quelquefois  un  peu 
jaunâtre:,  la  pie-mère  les  recouvrait  toujourslsans  y adhérer  beau- 
coup, et  sans  présenter  elle-même,  non  plus  que  l’arachnoïde, 
rien  de  particulier  à leur  niveau.  La  substance  médullaire ‘sous- 
jacente,  toujours  blanche,  était  saine  où  présentait  un  ramol- 
lissement pulpeux  ou  une  infiltration  celluleuse  à une  profon- 
deur variable  (1). 

Nous  allons  étudier  maintenant  la  dernière  période  du  ra- 
mollissement, la  destruction  de  la  substance  cérébrale,  dans 

(1)  On  n’u  guère  décrit  sous  le  nom  d’ulccralion  du  cerveau,  que  des  al- 
téraiious  aigues.  Je  n'ai  jamais  rien  rencontre  de  .semblable  , et  la  plupart 
des  faits  de  ce  genre  m’ont  paru  ne  consi.ster  c|  l’en  des  érosions  artificielles 
produites  i>ar  l’arracliemenl  de  la  pie-mère.  Cependant  (juelques  auteurs,  et 
Lallemand  eu  particulier,  ont  rapporté  des  oliservatious  assez  semblables  à 
celles  qui  font  le  sujet  de  ce  paragraphe. 


TROISIÈME  PÉRIODE.  295 

la  substance  médullaire  et  les  pai-ties  centrales  du  cer- 
veau. 


§ II.  Disparition  d’une  partie  de  la  substance  médullaire. 

Obshkvation  8i. — Démence,  hémiplégie  gauche.  — Destruction 
d’une  grande  partie  du  corps  strié  du  côté  droit. 

La  nommée  Lemas,  âgée  de  soixante-deux  ans,  entra,  il  y a 
plus  de  dix,  ans  à la  Salpêtrière,  dans  une  division  d’indigentes 
infirmes.  Elle  était  paralysée  du  côté  gauche  et  marchait  avec 
une  béquille.  On  la  fit  passer  à la  division  des  aliénées  incu- 
rables le  26  juin  1829,  parce  que  la  nuit  elle  se  levait  pour  aller 
battre  ses  voisines  ^vec  sa  béquille.  On  rapporte  que,  depuis 
celte  époque,  elle  passait  alternativement  plusieurs  mois  dans 
un  état  d’intelligence  à peu  près  lucide,  parlant  assez  raisonna- 
blement, ne  gâtant  pas  ; puis,  un  laps  de  temps  à peu  près  sem- 
blable, très-agitée,  méchante,  délirant  sans  cesse  et  gâtant, 
c’est-à-dire  laissant  aller  sous  elle.  Dans  lé  commencement, 
elle  se  levait  encore  ; mais  depuis  longtemps , on  était  obligé, 
le  jour,  de  la  tenir  attachée  sur  une  chaise.  Dans  le  lit,  elle  de- 
meurait toujours  couchée  du  côté  droit.  Son  délire  avait  pris, 
dans  ces  derniers  temps,  un  caractère  érotique.  Elle  sut  tou- 
jours, jusqu’à  la  fin  de  sa  vie,  demander  ce  dont  elle  avait  be- 
soin. Elle  mourut  d’une  pleuro-pneuinonie,  le  16  février  1839. 

Autopsie.  — Le  crâne  est  très-mince.  La  pie-mère  est  infil- 
trée d’une  grande  quantité  de  sérosité  qui  sépare  profondément 
les  circonvolutions  ; elle  est  assez  vivement  injectée,  et  ses  vais- 
.seaux  paraissent  généralement  dilatés.  Elle  se  détache  aisément 
de  la  surface  des  circonvolutions,  dont  la  forme  et  la  couleur  ne 
présentent  rien  à noter  , si  ce  n’est  à la  partie  externe  de  l’hé- 
misphère droit. 

Le  lobule  du  corps  strié  (insula)  est  tout  à fait  détruit  : à sa 
place  est  un  enfoncement  profond  qui  occupe  toute  l’excavation 
dans  laquelle  il  est  placé.  La  pie-mère  qui  le  lecouvre  en  étant 
détachée  sans  aucune  difficulté,  on  trouve  au-dessous  une  mem- 
brane beaucoup  plus  fine,  vasculaii  e,  cjui  se  laisse  aussi  séparer 
facilement  de  la  surface  malade.  Celle-ci  est  formée  d’un  tissu 
mollasse,  d’un  jaune  un  peu  citrin,  et  tellement  mince  qu’une 


296  luwou.issuMrNT  r.nnnîs’iQüiî.  (ahat.  pâtit.) 

légère  iraclion  met  la  cavité  .l.i  ventiicnle  à découvert.  La  paroi 
t U ventricule,  dans  le  point  corresjiondant  au  corps  strié  dé- 
truit, a à peine  2 millimètres  d’épaisseur.  Il  ne  reste  plus  du 
corps  strié  que  l’extrémité  antérieure  , la  tête , qui  semble  seu- 
lement un  peu  mollasse  au  toucher.  La  couche  optique  est  in- 
tacte ou  à bien  peu  de  chose  près. 

Les  circonvolutions  qui  environnent  cette  altération  présen- 
tent 1 aspect  suivant  : la  pie-mère  enlevée,  on  les  trouve  formées 
d une  couche  jaune,  mollasse,  un  peu  vasculaire,  assez  dense, 
ayant  à peu  près  un  demi  - millimètre  d’épaisseur  (plaques 
jaunes).  Cette  couche , qui  s’enlève  comme  une  membrane,  se 
continue  en  dehors  brusquement  avec  la  couche  corticale  des 
circonvolutions  demeurées  saines  ; au-dessous,  la  substance  mé- 
dullaire est  un  peu  molle,  très-lé,j5èrement  jaunâtre. 

Point  d’autre  altération  dans  l’encéphal^. 


Observation  82.  — Ancienne  hémiplégie.  Mort  par  une  pneumonie 
chronique.  — Destruction  du  corps  strié  gauche  et  de  son  lobule. 

Jeanne  Gironad,  âgée  de  cinquante-un  ans,  était  paralysée 
depuis  sept  ans.  Les  membres  droits  étaient  presque  entière- 
ment privés  de  mouvement;  le  bras  offrait  une  flexion  avec  ri- 
gidité, que  l’on  ne  pouvait  vaincre  qu’avec  peine  et  douleur. 
La  sensibilité  était  intacte  ; la  malade  sentait  seulement  ses 
membies  comme  engourdis.  L intelligence  paraissait  assez  bien 
conseivee  ; la  malade  était  plongée  dans  une  mélancolie  pro- 
fonde ; sa  physionomie  exprimait  toujours  la  tristesse  et  la  souf- 
france, La  parole  était  singulièrement  altérée  ; certains  mots , 
comme  toujours,  il  y a,  etc.,  plusieurs  fois  répétés,  étaient  lia- 
bituellement  les  seules  expiassions  de  la  pensée  de  la  malade  ; 
cependant,  lorsqu’elle  était  un  peu  vivement  excitée,  irritée 
surtout,  elle  prononçait  quelquefois  d’autres  mots  , ou  meme 
des  phrases  entières.  La  langue  était  déviée  du  côté  sain.  Tl  y 
avait  une  surdité  très-grande.  Il  y avait  de  la  matité  et  du  souf- 
fle tubaire  au  sommet  des  deux  poumons,  eu  arrière.  Cette 
femme  s’afl, tissa  peu  à peu,  et  succomba  le  25  mai  lS3H. 

Autopsie. — Quelques  cuillerées  de  sérosité  dans  l’arachnoïde. 
Infiltration  séreuse  .assez  considérable  de  la  pie-mère,  llien  de 


TRnrSDblK  PÉRIODE. 


397 


remarquable  à la  convexité  îles  liémisplières.  Si  l’on  soulève  la 
partie  externe  de  la  scissure  de  Sylvius  du  coté  gauche  , oh 
voit  que  le  lobule  du  corps  strié,  totalement  détruit,  est  rem- 
placé par  une  surface  légèrement  déprimée,  formée  d’une  sorte 
de  membrane  jaunâtre,  assez  consistante,  ayant  de  deux  à trois 
centimètres  en  tous  sens.  Quelques  circonvolutions  à l’entour 
étaient  un  peu  jaunâtres;  du  côté  du  ventricule,  on  voyait  que 
le  corps  strié  n’existait  plus  que  dans  son  quart  ante'rieur,  et  que 
dans  le  reste,  complètement  disparu,  la  membrane  ventriculaire 
n’était  distante  que  de  deux  ou  trois  millimètres  de  la  couche 
membranifoi  ine  que  nous  avions  rencontrée  à la  superficie. 

On  trouva  au  sommet  des  deux  poumons  une  induration  gri- 
sâtre, très-ferme,  assez  e'tendue. 


Observation  83.  — Hémiplégie  gauche  datant  de  seize  mois.  Em- 
poisonnement par  1 opium. — Destruction  du  corps  strié  droit;  des- 
tiuction  partielle  de  la  substance  corticale  des  circonvolutions  et  pla- 
ques jaunes.  Méningite  spinale  chronique.  Hémorrhagie  de  l’arach- 
noïde. Infiltration  sanguine  des  poumons. 


Marie  Vévin,  âgée  de  trente-huit  ans,  travaillait  depuis  plu- 
sieurs mois  au  mercure  et  au  plomb,  lorsque,  il  y a seize  mois, 
elle  fut  prise  d’une  hémiplégie  à gauche.  Voici  comment  elle 
raconte  l’invasion  de  celte  paralysie. 

Elle  était  un  jour  occupée  à coudre,  lorsqu’elle  sentit  de  l’en- 
gourdissement et  une  sorte  de  fréi'nissement  dans  le  côté  'gauche 
du  corps;  d’abord  dans  le  pouce  et  dans  la  main,  puis  dans  le 

bras.  Lorsqu’elle  marchait,  il  lui  semblait  sa  jambe  s'en- 
foncait dans  la  terre,  et  elle  se  laissait  tomber.  Le  soir,  elle  .se 
coucha,  s’endormit,  puis,  le  lendemain,  se  trouva  paralvsée 
complètement.  ^ 

Les  notes  que  j’avais  prises.sur  cette  femme  ont  été  perdues  , 
sauf  les  lignes  précédentes  ; je  puis  seulement  indiquer  que  l’hé- 
DDplcgie  gauche  était  complète,  et  que  la  malade  éiait  aflèctée 
d incontinence  d’urine  et  des  matières  fécales.  L’intelligence 
J ait  pai  fai tement  conservée  ; mais  celte  femme  paraissait 
liabiluelleinent  plongée  dans  une  tristesse  profonde. 

leii  du  mois  d octobre  1838,  elle  se  jirocura  une  hou- 


298  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE,  (ANAT.  PATH.) 

teille  de  laudanum  de  Sydenham  et  en  avala  une  grande  quan- 
tité (au  moins  100  grammes).  C’était  la  nuit  : l’élève  appelé  la 
trouva  sans  connaissance,  avec  des  mouvements  convulsifs. 
Malgré  les  soins  qui  lui  furent  donnés,  elle  succonxba  quelques 
heures  après, 

Jutopsie.  — Le  cuir  chevelu  est  d’une  épaisseur  et  d’une  con- 
sistance extraordinaires  : il  offre  au  toucher  la  dureté  et  l’élas- 
ticité d’un  cartilage.  Très-adhérents  au  a-âne,  ses  vaisseaux  ne 
laissent  pas  écouler  une  goutte  de  sang.  Le  crâne  est  très-épais 
et  très  lourd.  Un  peu  de  sang  dans  les  sinus  delà  dure-mère. 

La  dure-mère  incisée,  on  voit  s’écouler  de  chaque  côté  de  la 
cavité  arachnoïdienne  une  ou  deux  cuillerées  de  sérosité  rouge  j 
à la  partie  postérieure,  on  trouve  aussi  des  deux  côtés  un  peu 
de  sang  coagulé  ; ce  coagulum  est  très-mince  et  n’adhère  pas 
aux  feuillets  séreux.  On  trouve  aussi  un  peu  de  sang  dans  l’a- 
rachnoïde qui  recouvre  le  cervelet.  La  pie  -mère  présente  une 
injection  médiocre  de  ses  vaisseaux.  Du  côté  droit,  elle  est  un 
peu  infiltrée  de  sérosité  et  adhère  médiocrement  à la  surface 
de  l’hémisphère. 

Vers  la  partie  moyenne  de  la  convexité  de  l’hémisphère  droit, 
une  anfractuosité  large  et  transversale  présente  une  coloration 
jaunâü'e,  avec  destruction  complète  de  la  substance  corticale , 
dans  presque  toute  son  étendue  ; la  substance  médullaire  est  à 
nu  et  recouverte  par  une  membrane  fine  et  vasculaire,  qui  de- 
meure après  l’enlèvement  de  la  pie-mère.  Cette  altération  se 
continue  jusqu’au  lobule  du  corps  strié,  le  long  de  cette  anfrac- 
tuosité qui  y aboutitj  ce  lobule  est  lui-:même  complètement 
atrophié  et  jaunâtre. 

La  surface  du  ventricule  présente,  au  niveau  du  corps  strié , 
une  dépression  due  à la  disparition  à peu  près  complète  de  ce 
corps  ; deux  millimètres  au  plus  d’épaisseur  séparent,  dans  cet 
endroit,  la  membrane  ventriculaire,  des  méninges. 

On  remarque  sur  plusieurs  anfractuosité  de  la  surface  de  cet 
hémisphère  une  destruction  de  la  couche  corticale , semblable 
à celle  qui  vient  d’être  décrite. 

La  pie-mère,  au-dessus  de  rhémisphère  gauche,  est  sèche, 
friable,  notablement  adhérente,  sans  plus  de  rougeur.  Cet  hé- 
misphère paraît  sain.  Consistance  normale  , point  d Injection 
de  la  substance  médullaire.  Un  peu  de  sérosité  dans  les  ven- 


troisième  période. 

tricules  et  à la  base.  On  ne  trouve  rien  de  particulier  dans  le 
reste  de  l’encéphale,  si  ce  n’est,  a la  partie  posterieuie  du  corps 
calleux,  une  coloration  jaune  - serin  , dans  1 étendue  dune 
amande,  sans  altération  de  consistance  (1). 

La  moelle  épinière  est  d’un  volume  remarquablement  petit , 
surtout  au  niveau  de  la  région  dorsale.  L arachnoïde  présente 
un  épaississement  notable,  rouge  et  couverte  de  fausses  mem- 
branes blanches,  très-denses  et  disposées  en  couches  irrégulières. 
La  pie-mère  est  fort  adhérente  au  tissu  de  la  moelle  dont  on 
ne  la  sépare  qu’avec  beaucoup  de  peine.  La  moelle  est  elle- 
même,  dans  presque  toute  son  étendue,  dans  un  état  de  dif- 
fluence prononcé,  surtout  au-dessous  des  membranes  (2). 

Les  poumons  adhèrent  peu  aux  parois  de  la  poitrine.  Le  dioit 
présente,  dans  toute  la  partie  postérieure  , une  infiltration  de 
sang  énorme,  accompagnée  d’une,  très-légère  friabilité.  Le  sang 
s’écoule  abondamment  quand  on  le  coupe  ou  qu’on  le  presse 
entre  les  doigts.  Le  poumon  gauche  est  le  siège  d’une  infiltra- 
tion moins  considérable  ; cependant  une  coupe  y présente  des 
marbrures  noirâtres  dues  à des  infiltrations  circonscrites. 

Quelques  cuillerées  de  sérosité  sanguinolente  dans  le  péri- 
carde. Le  cœur  est  peu  volumineux  ; ses  cavités  ne  contiennent 
presque  pas  de  sang. 

L’estomac  a un  volume  normal  ; sa  cavité  contient  plus  d’un 
verre  d’un  liquide  aqueux,  demi-transparent,  grisâtre,  mêlé  de 
mucosités  et  exhalant  une  forte  odeur  de  laudanum.  (La  malade 
avait  vomi  abondamment.)  La  muqueuse  est  complètement  dé- 
truite au  niveau  du  grand  cul-de-sac.  Dans  le  reste  de  son  éten- 
due, elle  offre  une  consistance  normale  et  présente  quelques 
stries  d’un  rouge  vif,  et  qui  ne  suivent  pas  le  trajet  des  gros 
vaisseaux.  Quelques  plaques  rosées  dans  le  duodénum.  L’intes- 
tin grêle  est  tapissé  de  mucus  et  de  bile,  et  présente  à peine  un 
peu  d’injection.  Le  foie  contient  une  assez  grande  quantité  de 
sang,  aijisi  que  les  reins. 


(t)  Je  regarde  ceci  comme  la  trace  d’une  ancienne  infillraiion  .sanguine 
non  inflammatoire. 

(2)  L’autopsie  ne  fut  faite  que  cinquante  heures  aprè.s  lu  mort,  à cause  du 
suicide. 


300  RAMOI.LÏSSF.MKINX  ClIHOMOrjE.  (anAT.  TATir.) 

Observation  S4.~Pnriilysic  avec  atropliie  du  bras  droit,  datant  de  la 
première  enfance.  — Disparition  du  lobe  postérieur  de  l’iiémisphère 
gàuclic. 

Une  feinnie,  âgée  de  plus  de  soixante  ans  , suvcoinba  à une 
affection  de  poitrine.  Le  bras  droit  était  atrophié  et  privé  de 
luôuVément;  sa  sensibilité  conservée.  Celte  femme  faisait  re- 
monter celte  paralysie  à des  convulsions  qu’elle  avait  éprouvées 
à l’âge  de  quinze  ou  seize  mois. 

Autopsie.  — Le  lobe  postérieur  de  l’hémisphère  gauche 
n’existait  qu’en  partie  ; en  dehors  et  en  haut,  on  n’en  voyait 
aucune  trace  ; la  membrane  qui  tapisse  le  ventricule  était,  en 
cet  endi’oit,  doublée  par  une  membrane  accidentelle,  transpa- 
rente, sub-jacente  à la  méningine,  de  sorte  que  , dans  une  cir- 
conférence de  deux  pouces  environ  , la  paroi  du  ventricule  se 
trouvait  au-dessous  de  l’arachnoïde  ; autour  de  cette  perte 
énorme  de  substance,  les  circonvolutions  étaient  petites,  ridées, 
minces,  comme  atrophiées,  etc.  (1). 


Observation  85.  — Hémiplégie  gauche,  depuis  l'enfance,  causée  par 
une  chute.  — Disparition  de  toute  la  partie  supérieure  de  l’hémis- 
jihère  droit. 

Un  homme  mourut,  à l’âge  de  vingt-huit  ans  , d’une  périto- 
nite sur-aigué-  Il  était  tombé,  à l’âge  de  trois  ans,  d’un  premier 
étage  dans  la  rue  , sur  la  tête.  A la  suite  de  celte  chute , il  était 
resté  paralysé  du  côté  gauche.  Peu  à peu  il  s’était  établi  une 
forte  extension  habituelle  du  pied  gauche  sur  la  jambe,  de  sorte 
que  cet  homme  ne  marchait  à gauche  que  sur  la  pointe  du  pied. 
Le  membre  thoracique  gauche  était  complètement  privé  de 
mouvement;  il  n’offrait  d’ailleurs  aucune  trace  de  contracture. 
Cet  individu  avait  reçu  de  l’éducation,  et  il  en  avait  profité  ; il 
avait  une  bonne  mémoire,  sa  parole  était  libre  et  facile,  et  son 
intelligence  était  celle  du  commun  des  hommes;  il  n’avait  ja- 
mais oflèrt  aucun  trouble  de  ce  côté. 

Autopsie.  — Les  méninges  du  côté  droit  étaient  transparentes 

et  fluctuantes  dans  presque  toute  leur  étendue.  On  les  incisa,  et 


(t)Rosian  , loc.  rit.,  ohs.  L',  p.  2B6. 


THOiSJii^rii  rÉuiODÉ.  301 

il  en  jaillit  en  grande  ([uantile'  une  sérosité  claire  et  limpide 
comme  de  l’eau  de  roche.  Entre  ces  méninges  et  le  ventricule 
il  n’existait  pas  la  moindre  trace  de  substance  nerveuse;  ces 
membranes  constituaient  la  paroi  sup’e'rieure  d’une  vaste  cavité' 
dont  la  paroi  inférieure  était  formée  par  la  couche  optique,  le 
corps  strié,  et  toutes  les  autres  parties  situées  au  niveau  de  ces 
deux  corps.  Il  ne  restait  de  la  masse  nerveuse  située  au-dessus 
des  ventricules  que  celle  qui , située  en  avant  du  corps  strié, 
en  forme  la  paroi  antérieure. 

Tubercules  pulmonaires.  Ulcérations  et  perforation  intesti- 
nale (1). 


Toutes  les  circonstances  de  ces  altérations,  les  plaques  jaunes 
qui  les  recouvraient,  l’infdtration  celluleuse  que  nous  présen- 
tera 1 observation  suivante,  les  accidents  éprouvés  au  début  par 
la  femme  Vérin,  l’impossibilité  de  rattacher  à un  foyer  hémor- 
rhagique des  pertes  de  substance  aussi  vastes,  et  limitées  seule- 
ment par  les  membranes  d’enveloppe  du  cerveau , tout  nous 
confirme  ce  fait,  qu’elles  appartiennent  à la  période  terminale 
du  ramollissement.  Et  ce  que,  dans  la  plupart  de  ces  cas,  nous 
avons  vu  se  développer  spontanément,  eomme  il  arrive  si  sou- 
vent aü  ramollissement,  nous  le  voyons  dans  la  85e  observa- 
tion se  former  par  une  cause  traumatique. 

« Cette  lésion,  dit  M.  Andral,  en  lui  donnant  le  nom  à'alro- 
p/ne  du  cerveau,  ne  fut  pas  vraisemblablement  ici  l’altération  pri- 
mitive; elle  succéda  à d’autres  lésions  de  nature  inflammatoire 
qui  durent  se  former  immédiatement  après  la  chute.  » 

Lorsque  l’on  étudie  soit  les  descriptions  générales,  soit  les  ob- 
servations particulières  d’atrophie  du  cerveau  , on  reconnaît 
qu’elles  consistent  pre.sque  toutes,  comme  celles-ci,  en  des  pertes 
de  substance  plus  ou  moins  étendues  de  cet  organe  : ce  ne  sont 
pas  là  des  atrophies. 

On  appelle  atrophie  la  diminution  de  volume  d’un  organe, 
mais^non  pas  la  disparition  de  quelqu’une  de  ses  parties.  Un  sein 
qms’est  flétri  à la  suite  d’une  inflammation  e.st  atrophié;  mais  on 


(t)  Amli’iil.  Cliuifiut;,  t.  v,  p.  618, 


302  aAMOLLISSEMEWT  CHllONIQUE._ (AKAï.  1>ATH.) 

n’emploiera  pas  celle  expression,  s’il  a élé  de'lruil  par  une  dégé- 
néra lion  cancéreuse.  Si  atrophie  élail  synonyme  de  destruclion 
de lissu,  deperledesubslance,  une ulcéralion serait  une  atrophie; 
aussi  retrouvons-nous,  dans  la  lettre  de  M.  Lallemand  consacrée 
aux  ulcérations,  des  faits  tout  à fait  semblables  à ceux  qui  sont 
décrits  ailleurs  sous  le  nom  dü atrophie. 

On  a insisté  (1)  sur  la  nécessité  de  distinguer  l’atrophie  con- 
génitale, agénésie,  de  l’atrophie  acquise.  Celle  distinction  est 
bonne  sans  doute,  puisqu’elle  sépare  une  lésion  pathologique 
d’un  simple  vice  de  conformation  ; mais  il  en  est  une  autre  , au 
moins  aussi  importante,  qui  séparerait  de  l’atrophie  — les  cas 
où  il  y a perte  de  substance  dans  un  point  de  l’encéphale,  et  ne 
laisserait  sous  celle  dénomination  — que  ceux  où  il  y a diminu- 
tion de  volume  d’une  partie  ou  de  la  totalité  du  cerveau,  c’est-à- 
dire  atrophie  proprement  dite.  Les  premiers  pourront  être  ral- 
liés, presque  tous  au  moins,  au  ramollissement  ou  à l’inflamma- 
tion du  cerveau,  dont  ils  ne  sont  que  la  période  ultime,  tandis 
qu’en  les  rangeant  dans  l’atrophie  , ils  s’en  trouvent  tellement 
séparés  cju’on  ignore  généralement  la  liaison  intime  qui  les  unit. 

J’ai  trouvé,  dans  V Anatomie  pathologique  de  M.  Cruveilhier, 
la  même  idée  touchant  cette  division  des  atrophies  du  cerveau.  Ce 
savant  anatomiste  dit,  en  effet,  qu’il  faut  distinguer  : — les  atro- 
phies qui  sont  la  suite  d’une  destruclion,  d’une  perte  de  sub- 
stance, ou  d’une  véritable  transformation  du  tissu  de  l’organe, 
— et  les  atrophies  qui  sont  la  suite  d’une  diminution  pure  et 
simple  du  volume  de  l’organe,  soit  par  la  soustraction  du  liquide 
qui  pénètre  les  mailles  du  tissu  cellulaire,  soit  par  le  rappro- 
chement des  fibres  de  l’organe  , sans  augmentation  de  densité  , 
soit  par  le  défaut  de  nutrition  des  fibres  elles-mêmes  (2).  Je  ré- 
péterai seulement  que  lorsqu’il  y a destructiôn , perte  de  sub- 
stance, il  n’y  a pas  à proprement  parler  atrophie. 

L’observation  suivante  est  fort  intéressante,  en  ce  qu’elle  pa- 
raît servir  de  complément  naturel  à toutes  celles  que  nous  avons 
rapportées  jusqu’ici. 

(t  ) Caznuviclli  ( Archives  gén.  Je  méJ.,  t.  xiv,  p.  7 ) i Brescliet  { Arch., 
t.  XXV,  p.  453  ; l.  XXV.,  p.  38  ) ; Dclaber,^e  el  Mouneret  ( Compendium  de 

OTtÜccùie  I.  Il,  p.  139  ).  „ . I I V 

(2)  Cruveilhier,  Anatomie  pathologique,  8° livraison,  planche  V,  p.  2. 


troisième  période. 


303 


Observation  86.  — Ramollissement  cérébral  à plusieurs  degrés. 
Ramollissement  aigu  et  pulpeux  des  circonvolutions;  racornissement  et 
transformation  de  la  substance  corticale  en  plaques  jaunes  ; infiltration 
celluleuse  de  la  substance  médullaire.  Disparition  d’une  partie  de  cette 
dernière  jusqu’à  la  paroi  ventriculaire.  Altération  analogue  dans  les 
deux  hémisphères,  à la  base  du  lobe  postérieur. 

Kerkès,  âgée  de  soixante-six  ans,  entrée,  le  19  mars  1838, 
dans  la  division  des  aliéne'es  de  la  Salpêtrière,  mourut  le  4 juin 
1839.  Voici  les  renseignements  que  j’ai  pu  obtenir  sur  elle. 

A son  entrée  dans  le  service,  sa  maladie  avait  été  caractérisée 
sur  le  registre  de  la  division  : manie  aiguë,  avec  agitation  et 
grande  incohérence  des  idéés.  Amaurose  double,  qui  prive  pres- 
que complètement  la  malade  de  la  vue. 

En  effet,  elle  était  fort  agitée,  se  croyait  riche,  parlait  de  pa- 
rures, de  bijoux,  mais  au  commencement  seulement.  Il  fallut 
quelquefois  lui  mettre  la  camisole  de  force.  Elle  a toujours  re- 
connu ses  parents. 

Elle  avait  toujours  marché  difficilement  ; elle  tomba  dans  un 
grand  état  de  faiblesse,  et,  six  semaines  avant  sa  mort,  elle  était 
dans  l’état  suivant  : 

Le  bras  droit  est  paralysé;  elle  ne  se  tient  plus  debout  ; lors- 
qu’on la  lève,  il  faut  la  tenir  attachée  sur  un  fauteuil.  Depuis 
long-temps  on  voyait  parfois  ses  jambes  fléchir  sous  elle.  Elle 
criait  et  se  plaignait  beaucoup , ne  parlait  presque  plus,  bien 
qu’elle  pût  encore  prononcer  distinctement.  A la  fin  , il  fallait 
la  faire  manger.  Elle  avait,  dit-on,  des  attaques  d’épilepsie. 

Autojjsie.  — Les  os  du  crâne  sont  épais  et  d’une  grande  du- 
reté. Les  sinus  de  la  dure-mêre  contiennent  une  assez  grande 
quantité  de  sang  noir  demi-liquide.  L’arachnoïde  ne  contient 
pas  beaucoup  de  sérosité;  elle  pre'sente  peu  d’opacité,  si  ce  n’est 
près  de  la  ligne  médiane,  où  l’on  trouve  de  petites  plaques  blan- 
ches, opaques,  assez  nombreuses,  et  d’une  grande  épaisseur.  La 
pie-mère  est  infiltrée  d’une  assez  grande  quantité  de  sérosité, 
écartant  modérémént  les  circonvolutions.  On  en  trouve  une 
quantité  très-considérable  à la  base  du  crâne.  Les  artères  de  la 
pie-mère  sont  presque  toutes  ossifiées  ; ce  sont  des  plaques  iso- 
lées, minces  , et  ne  diminuant  que  peu  leur  calibre  ; dons  leurs 
intervalles  , elles  sont  blanchâtres  et  épaissies.  Les  capillaires 
sont  généralement  assez  injectés  de  sang. 


oUl  RA.VIOI.LliSliMKBT  CIlHOjNlQUE.  (ajvat.  1-AXll.) 

Le  cerveau  reposant  sur  sa  convexité,  on  voit  que  toute  la 
pointe  et  la  base  du  lube  postérieur  et  même  du  lobe  moyeu 
présentent  une  dépression  profonde  dans  les  deux  hémisphères, 
surtout  du  côté  droit. 

iJans  l’hémisphère  droit,  presque  toute  la  portion  de  sub- 
stance cérébrale  , qui  forme  la  base  de  la  portion  réfléchie  du 
ventricule,  a disparu  ; la  pie-mère  n’est  séparée  de  la  membrane 
ventriculaire  que  par  un  peu  de  pulpe  blanche  , délayée',  d’à 
peu  près  un  milUmèlre  d’épaisseur. 

Plus  en  dehors,  c’est-à-dire  à la  base  et  à la  pointe  du  lobe 
postérieur,  les  circonvolutions  sont  toutes  ratatinées,  leur  cou- 
che corticale  réduite  à une  lame  très-mince  , mollasse  , couleur- 
peau  de  chamois  ^ au-dessous  est  un  espace  profond  , traversé 
de  quelques  brides  celluleuses,  renfermant  un  liquide  blanchâ- 
tre, trouble  , lait  de  chaux  , assez  abondant  j cette  infiltration 
celluleuse  s elend  jusqu  a la  membrane  ventriculaire,  c|ui,  à son 
niveau,  est  comme  disséquée  dans  une  assez  grande  étendue  ; 
en  dehors,  elle  est  limitée  par  de  la  substance  médullaire,  très- 
molle  dans  quelques  millimètres  d’épaisseur,  pulpeuse,  blanche, 
contenant  çà  et  là  de  petits  noyaux  d’induration  tout  à fait 
blancs,  difficiles  à couper,  et  assez  semblables  à du  cartilage. 
Encore  plus  en  dehors,  c’est-à-dire  en  remontant  un  peu  sur  la 
partie  externe  du  lobe  postérieur,  les  circonvolutions  sont  mol- 
les, sans  diffluence  , laissant  entraîner  par  la  pie-mère  presque 
toute  leur  couche  corticale,  et  d’une  couleur  rose  peu  foncée  : 
au-dessous , la  substance  médullaire  est  également  molle  et  ro- 
sée, et  un  grand  nombre  de  petits  vaisseaux  rouges  s’y  dessi- 
nent. 

Ainsi,  en  allant  de  dedans  en  dehors,  c’est-à-dire  de  la  por- 
tion réfléchie  du  yôntricule  à la  face  externe  de  riiémisphère, 
on  trouve  successivement  : disparition  de  toute  l’épaisseur  de 
la  substance  cérébrale  ; infiltration  celluleuse,  avec  circonvolu- 
tions jaunes  et  ratatinées;  ramollissement  pulpeux,  blanc,  avec 
de  petits  noyaux  d’induration;  puis  ramollissement  rosé. 

Dans  toute  l’étendue  de  la  basé  du  lobe  postérieur  gauche  , 
les  circonvolutions  sont  converties  en  un  tissu  d’un  jaune  d'ocre, 
sans  forme  déterminée,  plus  mince  que  la  couche  corticale 
<ju’il  rc|>réscnlc,  se  laissant  entraîner  par  la  pie-mère,  et  au- 
«lessous  duquel  on  trouve  un  tissu  celluleux  blanchâtre,  infiltré 


SIÛGlv. 


3(15 


de  lait  de  chaax  : les  limites  de  cette  infiltration  celluleuse  sont 
d’une  part  la  membrane  ventriculaire,  mise  à nu  dans  une 
îp-ande  étendue;  d’une  autre  part,  de  la  substance  médullaire 
pulpeuse,  blanche,  contenant  quelques  points  d’induration  (1). 

Je  passe  le  reste  de  l’autopsie. 


Celte  observation  est  fort  curieuse,  et  parlaiteinent  propre  à 
servir  de  résumé  à l’histoire  anatomique  du  ramollissement 
cérébral.  Elle  suffirait  presque  à elle  seule  pour  démontrer 
l’origine  et  la  nature  des  alterations  que  nous  avons  at- 
tribuées au  ramollissement  chronique  , puisqu  elle  nous 
présente  tous  les  degrés  de  la  maladie , ranges  les  uns  à 
côté  des  autres  , depuis  la  ])ériode  aiguë  jusqu’à  celle  au- 
delà  de  laquelle  elle  ne  peut  plus  subir  aucune  modification , 
en  y comprenant  tous  les  degrés  intermediaires  : ramollisse- 
ment pulpeux,  plaques  jaunes,  infiltration  celluleuse  et  même 
induration. 


article  quatrième. 

SIÈGE  DU  RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE. 

J’ai  noté  avec  exactitude  le  siège  du  ramollissement  chro- 


nique dans  63  observations.  Itn  voici  le  résumé  : 

Circonvolutions 45  lois. 

— leur  couche  corticale  seule 7 

— avec  la  substance  médullaire. ...  38 

La  substance  médullaire  seule 13 

Le  corps  strié  et  la  couclie  optique  seuls 3 

Le  corps  strié 1 

La  couche  optique 2 

Les  parois  d’un  ventricule  latéral 1 


On  a trouvé  en  outre,  ramollis  en  même  temps  que  les  cir- 
convolutions : 

Le  corps  strié  et  la  couche  optique  ensemble.  ...  5 

Le  corps  strié 9 

(I)  Ce  cerveau  a etc  présenté  à la  Société  anatomique.  Soy.  Bullelint  de 
la  Soc.  anal.,  183'J,  p.  tOI. 


20 


306 


^ RAAtOLLlSSEMEJMT  CHKOJSIQUE.  (anAI  . PAXH.) 

Le  cervelètj[a  été  trouvé  ramolli  quatre  fois,  dont  trois  eni 
même  temps  que  le  cerveau. 

Eu  résumé,  sur  67  cas  de  ramollissement  chronique  du  cer- 


veau , les  circonvolutions  ont  été  trouvées  malades.  45  fois. 

Les  corps  striés  et  les  couches  optiques 22 

Sur  33  cas  de  ramollissement  aigu , j’avais  trouvé  : 

Les  ch'convolutions  malades 51  fois. 

Les  corps  striés  et  les  couches  optiques 7 

Ainsi,  sur  lOo  cas  de  ramollissement  du  cerveau,  observés 
par  moi  : 

Les  circonvolutions  étaient  affecte'es . 76  fois. 

Les  corps  striés  et  les  couches  optiques 29 


Nous  allons  voir  tout  à l’heure  quelle  est  l’importance  de  ce* 
résultat. 

J’ai  trouvé  sur  29  cas  de  ramollissement  chronique  emprun-  • 


lés  à différents  auteurs  : 

Les  circonvolutions  et  la  substance  blanche 15  fois.. 

La  substance  blanche  seule 6 

Le  corps  strié  et  la  couche  optique 1 

Le  corps  strié.  6 

La  couche  optique 1 

La  voûte  à trois  piliers 2 

Un  hémisphère  tout  entier* 1 


Ce  qui  fait, . sur  quinze  ramollissements  des  circonvolutions  , , 
huit  ramollissements  des  corps  striés  et  couches  optiques. 

En  additionnant  ces  28  cas  ( je  laisse  de  côté  celui  de  ra- 
inollissemeirt  de  tout  un  hémisphère  ),  et  mes  67  observations, 
(ne  comptant  pas  le  ramollissement  du  cervelet),  nous  trou- 
vons : 

Les  corps  striés  et  les  couches  optiques  ramollis  30  fois  sur 
95; 

Et  sur  60  cas  de  ramollissement  des  circonvolutions. 

Comme  sur  86  cas  de  ramollissement  aigu,  nous  avions  trouve 
précédemment  : 

Les  circonvolutions  malades 59  fois. 

Les  corps  striés  et  les  couches  optiques 29 

De  la  réunion  de  ces  diftérents  faits,  nous  obtiendrons  le  lé- 
sultat  suivant  : 


SIÈGE. 

Sur  181  cas  de  ramollissement  : 


0(17 


Circonvolutions. 

Corps  striés  et  couches  optiques. 

llaniüllisscment  aigu 

ây 

.70 

RamolJissement  chronique 

eu 

•28  . 

119 

58 

De  ce  résultat,  nous  allons 

tirer  quelques  inductions  qui,  si 

,/  / ^ vi*  a. 

sans  doute  que,  dans  le  ramollissement  aigu  et  dans  le  ramol- 
lissement chronique,  nous  avons  obtenu  les  mêmes  chiffres  et 
les  memes  proportions,  sauf  des  différences  insignifiantes.  Or, 
ce  rapprochement  établit,  ce  me  semble,  une  forte  présomption 
que  nous  ne  nous  sommes  pas  trompé  dans  rinterprétatiou  des 
lésions  attribuées  par  nous  au  ramollissement  chronique,  puis- 
que ces  lésions  nous  présentent  exactement  les  mêmes  condi- 
tions de  siège  que  dans  le  ramollissement  aigu. 

Cette  première  induction  va  se  trouver  fortement  corroborée 
par  la  suivante. 

On  a vu  que  le  nombre  des  ramollissements  des  corps  striés 
et  des  couches  optiques  était  juste  la  moitié  du  nombre  des  ramol- 
lissements des  circonvolutions.  Cette  proportion,  exactement  la 
meme  dans  le  ramollissement  aigu  et  dans  le  ramollissement 
chronique,  est  tout  à fait  opposée  à ce  qui  s’observe  dans  l'hémor- 
rhagie  ceiebiale.  Tout  le  monde  sait  en  effet  que  l’hémorrhagie 
cérébrale  a presque  toujours  son  siège  dans  les  parties  centrales 
du  cerveau,  en  particulier  les  corps  striés  et  les  couches  opti- 
ques, et  presque  jamais  a la  périphérie  ; ce  fait  même  est  telle- 
ment connu  que  je  pourrais  me  contenter  de  le  rappeler.  Je 
vais  cependant  rapporter  ici  quelques  chiffres  , car  c’est  préci- 
sément dans  les  questions  de  ce  genre  que  les  chifïres  sont  le 
mieux  applicables  et  le  plus  frappants. 

Sur  96  cas  d’hémorrhagie  encèplialique , 14  avaient  leur 
siège  dans  le  cervelet  ou  la  moelle  allongée  : 82  dans  le  cei> 
veau  lui-même. 

Sur  ces  8l>  cas,  riiémorrhagie  avait  son  siège  52  fois  dans  le 
corps  strié  ou  la  couche  optique  : 

22  (ois  dans  h;s  deux  à la  fois  j 

17  flans  II'  corps  slrii'  ; 


6 


338  ïlAMOLLltiSIiMJLJNX  CllRÜiN'lQUIi.  (aî(AX.  rAlH.) 

13  dans  la  couclic  optique. 

Les  circonvolutions  paraissaient  avoir  fourni  ou  contribué  i. 
fournir  le  sang  e'panclié,  dans  5 cas  seulement  ; 

2 fois  elles  paraissaient  seules  altérées, 

3 fois  la  substance  médullaire  avait  participé,  dans  une  cer- 
taine étendue,  à l’épanchement. 

Enfin  , dans  les  autres  cas,  au  nombre  de  22,  rhémorrliai 
gie  s’étaii  faite  uniquement  aux  dépens  de  la  substance  médul 
laire  (1). 

Ainsi,  tandis  que  les  couches  optiques  et  les  corps  striés  pré- 
sentent seulement  un  cas  de  ramollissement  sur  deux  des  cir- 
convolutions., ils  offrent  dix  cas  d’he'morrhagies  , sur  un  de  E: 
périphérie  du  cerveau. 

Puisque  le  siège  du  ramollissement  et  celui  de  l’hémorrhagi» 
présentent  une  aussi  notable  différence,  il  ne  saurait  être  indif-f 
férent  de  prendre  en  considération  le  siège  d’une  série  donnéi 
d’altérations,  dont  l’origine  serait  douteuse,  mais  devrait  êtn 
nécessairement  rapportée  à l’une  ou  l’autre  de  ces  deux  aff'ea 
lions. 

Or,  il  est  arrivé  que  presque  toutes  les  altérations,  autrefoi 
attribuées  à riiémorrhagie,  et  que  nous  avons  rattachées  au  ra. 
mollissemeiït,  avaient  leur  siège  vers  la  périphérie  du  cerveau 
Cette  circonstance  vient  à l’appui  de  toutes  les  preuves  que  nom 
avons  déjà  rassemblées,  pour  éclairer  celte  question  de  patho 
génie. 

Sur  95  cas  de  ramollissement  chronique, on  a trouvé  : 

Le  lobe  postérieur  affecté 18  fois 

Le  lobe  moyen 51 

Le  lobe  antérieur 13 

Les  lobes  postérieur  et  moyen  ensemble 7 

Les  lobes  postérieur  et  antérieur.  2 

Les  lobes  moyen  et  antérieur 2 

Toute  la  convexité  d’un  hémisphère 1 

La  ligne  médiane ^ 

95 

f 

^»)  Je  u’ai  icivi  compte,  dans  cc  rdc^ti,  <|uc  ilc  cas  il'liéuiorrliaj^iu  ri 
cent#. 


sii*;ge. 


309 


Si  lo  cliiftVe  il  U loi  )C  moyeu  est  si  élevé,  c’est  que  les  ramol- 
lissements des  corps  striés  et  des  couches  optiques  y sont  com- 
pris. 

M.  Cruveilhier  paraît  avoir  rencontré  très -fréquemment  le 
ramollissement  dans  le  lobe  postérieur  du  cerveau,  car  il  dit  : 
« Les  circonvolutions  occipitales  sont  peut-être,  de  toutes  les 
parties  du  cerveau,  celles  qui  sont  le  plus  sujettes  au  ramollis- 
sement et  aux  cicatrices  qui  en  sont  la  conséquence  (1).  » 

Sur  100  cas  de  ramollissement  observés  par  moi,  aigu  33  fois, 


chronique  67  fois,  je  l’ai  trouvé  ; 

Double 17  fois. 

Alfeclant  riiémisphère  gauche 44 

— riiémisphère  droit 39 


Si  j’ajoute  à cela  69  autres  cas  de  ramollissement,  38  foisaigti 
et  31  fois  chronique,  empruntés  à dilféi’ents  auteurs,  nous  aurons 


le  résultat  suivant  : 

Hémisphère  gauche  69  fois. 

Hémisphère  droit 71 

Ligne  médiane 3 

Hamollissement  double 26 


169 

Sur  89  casd  héniorrh.agie  cérébrale,  riiémorrhagie  av^t  son 


siège  : 

Dans  riiémisphère  droit 40  fois. 

Dans  l’hémisphère  gauche 43 

Elle  était  double. 6 


89  (2) 

(1)  Onivrilliier,  Auat.  33*  livraison,  p.  4. 

(2)  Portai  prét  end  que  les  luûiiorrhagies  réréhrales  sont  plus  freVpientes  à 
droite  qu’.à  qaiitlie,;  il  aitrjhue  cela  à ce  que  r.-ii  tère  carotide  droite  est  pltis 
grosse  que  la  gauche,  et  plus  dans  la  direction  île  l’aorte  {TrniUi  Je  l'apo- 
plexie, p.  333  ). 

Suivant  M.  Gcndrin  aussi,  le  siège  de  riiéniorrliagic  cérébrale  .serait  beau- 
coup plus  frequent  u droite.  Si'f  quarante-deux  cas  pris  au  hasard,  cet  au- 
teur a trouvé  six  loj’er.s  à gauche,  cin([  des  deux  cftiés,  trente  et  nn  à droite. 
Morgagni,  cité  par  lui , t vu  , sur  1 5 cas,  trois  liéraorrhagies  à gainclie,  dei  x 


« 


310 


r,\AIOM.lSSKMK>T  CUHONIQUK,  (sVMl'T.' 


CHAPITRE  VII. 

SVMI'TOMRS  nu  R AMOLLI  SSEIUIÎNT  OHnoNI^UE. 


ARTICLE  PREMIER. 

CONSIDÉRATIONS  OÉnÉR AI.ES. 

I.’étude  analoinicjue  du  ramollisseme|it  chronique  nou.s a offert 
an  grand  nombre  d’altérations,  dont  la  diversité  ne  nous  a pas 
permis  d’apprécier  sans  peine  les  rapports  mutuels,  et  dont  le 
npint  de  départ  commun  , dont  le  développement  relatif  nous 
eussent  échappé  si  nous  n’avions  apporté  la  plus  grande  atten- 
tion aux  faits  qui  nous  permettaient  de  saisir  leur  mode  de  tran- 
sition des  unes  aux  autres. 

Nous  trouverons  encore  bien  plus  de  dilliculté  à exposer 
d’une  façon  méthodique  les  symptômes  de  cette  maladie,  à les 
classer  dans  un  ordre  un  peu  naturel,  à suivre  les  rapports  qui 
les  unissent  aux  altérations  anatomiques. 

Celle  dernière  recherche,  qui  me  paraît  être  le  but  principal 
de  la  pathologie,  nous  offre  plus  de  difficultés  dans  les  maladies 
du  cerveau  que  dans  celles  de  tous  les  autres  organes.  Une  des 
causes  en  est  surtout  l’impos.sibilité  presque  absolue  où  nous 
sommes  de  soumettre  le  cerveau  aux  moyens  d’exploration  di- 
recte que  noiis  permet  la  disposition  des  autres  organes,  l’im- 
possibilité d’apprécier  durant  la  vie  les  modifications  de  forme, 
de  volume  , de  sensibilité,  de  couleur  , qu’il  peut  éprouver. 
Soyons  privés  pour  le  diagnostic  des  maladies  de  la  poitrine  et 
de  l’abdomen,  de  l’auscultation  (1  ),  de  la  percussion  , du  tou- 

doiib!e.s,  le  re.si.e  il  droite.  De  IJaen  dit  que,  sur  1 0 liemiple'^ies, il  n’y  eu,avait 
qu’une  à droite  ( mais  ceci  ne  s’apiiliquc  pas  à l’hémorrliagie  ccrebrale  en 
particulier  ).  (Geudrln.  Tritilé  phil.  de  iiie'il.  prat-,  t.  i,  p.  St7.) 

(1)  .ie  sais  rpie  r(iielqucs  ine’dcciiis  .nmeiric.ains  ont  e.ssaye  d appliifiier  1 aus- 
cultalion  au  dia;4Uoslic  des  maladies  i érchra'es,  mais  leurs  efforls  ne  me  pa- 
r.ai.ssent  avoir  abouti  ju.srpi’ici  qu'à  faire  qi;elque  chose  d a.ssev,  bizarre,  plti- 
/ti’tqup  véritahlemeni  utile. 


coNSiDÉn\TioN>  GÉN  Duales. 

( lier,  (le  la  vue,  quels  indices  nous  l'omniront  les  troubles  fonc- 
tionnels des  organes  contenus  dans  ces  cavités?  Et  encoie  il 
restera  les  sécrétions,  dont  l aspect  seul  nous  dicte  souvent  le 
diagnostic  ; et  la  douleur  même  pourra  nous  être  un  guide  pré- 
cieux dont  nous  sommes  à peu  près  privés  dans  les  maladies 
cérébrales,  car  ce  symptôme  est  si  inconstant,  si  peu  en  rapport 
ordinairement  avec  l’étendue  ou  la  forme  de  la  lésion  apparente 
qui  le  produit,  que  nous  ne  saurions  en  tenir  que  peu  de  compte. 

Le  diagnostic  des  maladies  du  cerveau  est  donc  tout  fondé  sur 
la  physiologie  de  cet  organe,  et  cette  physiologie  se  trouve  pré- 
cisément un  des  points  les  plus  obscurs  de  la  médecine  ; et  l’ana- 
tomie elle-même  du  cerveau,  son  anatomie  de  texture  n est  en- 
core que  très-imparfaitement  connue.  Ebaucher  ici  l’e'tat  de  la 
science  sur  ces  questions  , ce  ne  serait  présenter  qu’un  tableau 
confus  d’incertitudes,  de  contradictions  et  d’erreurs.  Rappelons 
seulement,  relativement  à l’anatomie  du  cerveau,  (jue,  si  quel- 
ques micrograpbes  prétendent  être  arrivés  a une  connaissance 
générale  de  la  disposition  des  fibres  de  cet  organe,  ils  n’ont  en- 
core pu  rien  nous  apprendre  de  précis  sur  leur  origine  , leur 
terminaison,  leurs  rapports  mutuels;  que  nous  ne  savons  rien 
encore  touchant  l’organisation  de  ces  fibres  , dont  l’existrynce 
même  pourrait  jusqu’à  un  certain  point  paraître  hypothé*- 
tique(l). 

Quant  à la  physiologie  du  cerveau, il  est  imposffihle  à un 

11  est  pourtant  un  signe  local  qui  peut  fournir  quelques  indications  pré- 
cieuses dans  les  maladies  delà  tête,  bieà  que  son  apjjreci<uibri’sdil'fott‘res- 
treinte  : c’est  la  chaleur.  Ddns  lés  niàlh'dîcs'des  j’élifies'  èhfàhfs  éri'piirliculier, 
il  est  [)ossible  d’en  tirer  uri'gi'and'parfi’pour  distinguer  des‘syn>ptôme«t>nre- 
ment  sympathiques ',  ;dc  ceux  (}fti  lieimepl  à‘ une  nkéralion  pRriiculiôre,  ,de 
l’ence'pliale.  Mon  ami , le,  docteur  Roger  (de  l'Orne),  a remarqué  que  , dans 
quel(pies  ca^  de  congestion  cérébrale  chez  les  adultes , un  point  de  la  lêie  se 
trouvait  ,1c  siège  d’nne.chaleyt  plus  vive  que  le.s  autres , et  il  a '.suivi  avec 
avantage  ceup  indication  .dans  l’emploi' des  mo'yens  lllérapëuliqucs  ' l'ô'- 
ca  IX.  M.  Roger  (de  l’Orne}, a aussi  presque  toujours  vu,  dans  de' semblables 
cas,  prédominer  une  forme  spéciale  de  délire . 

(t)  Ce  n’est  pa.s  que  je  np  place  aupi  haut  que  personne  les  rcclièrclies  ha- 
b Içs  et  patientes  qui  ont  été  faites,  surtout  en  Allemagne  et  en  France  , 
touçlianl  1 anatomie  c^e  texture  du  système  nerveux  ; mais  je  m’exprime  ;lci 
en  praticien,  et  je.  dis  le  peu  de  friiil  que  le.s  médecins  ont,  jie  eu  i c lirer  de 
ees  études.  ■ • ■ - . , 


312 


RAMOIXISSr.MF^T  CHROMQÜK.  (SYMPT.) 

esprit  exact  traccepler  aiijoiml’lnû  aucune  des  tentatives  Je  lo- 
calisation de  ses  fonctions , qui  ont  été  faites  successivement , 
depuis  le  grand  système  psychologique  de  Gall,  jusqu’aux  locali- 
sations les  plus  récentes  du  mouvement  et  du  sentiment  des  di- 
verses parties  du  corps.  On  voit  quelles  dilïicultés  se  présentent, 
dès  qu’il  s’agit  de  lire  dans  l’intérieur  de  la  tête  l’explication  des 
troubles  des  fonctions  de  l’encéphale,  qui  se  montrent  à nous 
sous  des  formes  si  diverses.  Si  j’insiste  sur  ce  sujet,  c’est  que 
l’on  est  souvent  obligé  d’en  appeler  . à ces  difticultés,  pour  justi- 
fier l’incertitude  que  l’on  voit  planer  dans  une  foule  de  cas,  sur 
le  diagnostic  des  maladies  du  cerveau,  et  surtout  du  ramollisse- 
ment auquel  s’adressent  en  particulier  toutes  les  réflexions  dont 
nous  croyons  devoir  faire  précéder  l’histoire  de  ses  symptômes. 

line  autre  source  de  con  fusion  dans  l’étude  delà  pathologie  du 
cerveau,  c[u’il  importe  de  signaler  ici,  c’est,  d’une  part,  la  pré- 
sence fréquente  de  lésions  organiques  sans  symptômes  appré- 
ciables; d’une  autre  part,  l’existence  de  symptômes  qu’il  n’est 
possible  d’expliquer  par  aucune  altération  visible.  Ces  deux 
faits  sont  incontestable*;  une  observation  attentive  les  fait  re- 
« f)nuaîlre  plus  fréquents  encore  qu’on  ne  saurait  le  croire.  (iOm- 
muus  à tous  les  organes,  ils  doivent  se  rencontrer  surtout  dans 
le  i'(  rveau,  dont  l’exploration  pendant  la  vie,  et  l’examen  après 
la  mort,  ofti  eut  des  diflicultés  toutes  sj)éciales. 

Arrêtons-nous  quelques  instants  sur  ce.s  cpicstions  sur  les- 
((iielles  il  importe  de  bien  s’entendre,  avant  d’entreprendre 
l’élude  des  symptômes  du  ramollissement,  car  elles  doivent  re- 
venir à chaque  instant,  lorsque  1 on  cherche  a rapprocher  ces 
symptômes  des  lésions  anatomiques  (1  ). 

On  a cherché  à s’expliquer  de  plusieurs  manières  comment 
un  point  rlu  cerveau  , quelquefois  étendu  , pouvait  se  trouver 


(I  ) J’ai  li  aitc  celle  ([.icslion  , des  rai)j>orls  qui  existent  e?iti-e  le  rumollisse- 
nient  drébral  et  les  symptômes  epdon  lui  attribue,  dans  un  mémoire  publié 
sous  ce  titre,  dans  la  Gazette  medicale  de  féuier  1839.  Quelques  journaux 
de  médecine  ont  bien  voulu  bo.iorer  ce  tiao  ail  de  leur  critique.  Mais  par  une 
oppo.siiion  assez  bizarre,  tandis  que  ks  un.s  trouvaient  que  j aitacbais  trop 
de  valeur  à l’anatomie  pathologique  {Rcuue  medicale  , avril  1839  ).  les  au- 
tres me  reprochaient  d'isoler  trop  .souvent  les  symptAmes,  de  l’allération 
anatomique  , et  de  méconnaître  riidluence  directe  de  celle-ci  sur  les 
premiers.  ( /Irchires^  mai  1339). 


CONSIDÉn\tlONS  G^NF-RALES. 

pcnlu  pour  cet  organe  , sans  cpie  ses  fondions  parussent  aucu- 
nement s’en  ressentir.  Il  semble  qu’il  n’en  doive  pas  être  du  cer- 
veau comme  du  poumon,  du  loie,  qui,  leur  texture  étant  pai- 
faiteinent  semblable  dans  tous  les  points  de  leur  étendue , 
peuvent  avec  la  plus  grande  facilité  suppléer  à la  perte  d une 
partie  de  leur  substance,  par  l’activité  du  reste.  La  conformation 
complexe  du  cerveau  semble  montrer  qu’il  n eu  saurait  êtie 
ainsi  dans  cet  organe  , chacune  de  ses  parties  se  trouvant  sans 
doute  chargée  de  fonctions  toutes  spéciales. 

Le  cerveau  étant  double  , on  a pensé  qu  un  heniisplièie  pou- 
vait l'emplacer  l’autre.  Il  est  arrive  cependant  de  rencontiei  une 
lésion  double  de  la  même  partie  des  deu.x  hémisphères,  avec 
des  symptômes  limités  à un  seul  côte  du  corps.  On  peut  croiie 
que  beaucoup  d’altérations  qui  nous  paraissent  avoir  complète- 
ment détruit  une  portion  du  cerveau,  ont  laissé  aux  points  ma- 
lades une  faculté  de  transmission , ou  ont  respecté  quelqtte 
chose  de  leur  texture  intime,  sans  que  nous  puissions  savoir  eu 
quoi  cela  consiste. 

Mais  je  crois  que  l’on  peut  établir  qu’en  général,  surtout  clans 
la  pathologie  cérébrale,  les  symptômes  résultent  moins  de  l’al- 
léralion  locale,  visible,  prise  matériellement,  que  de  circon- 
stances totU  à fait  inconnues,  existant  en  dehors  d’elle, et  qui, 
je  le  crains,  seront  longtemps  un  mystère.  Line  foule  de  faits  le 
démontrent.  Personne  ne  doute  que  le  corps  strié  n’ait  les 
mômes  fonctions  chez  tous  les  sujets.  Eh  bien  ! que  trois  indi- 
vidus soient  frappés  d’une  hémorrhagie  circonscrite  dans  cet 
organe,  un  aura  une  paralysie  du  bras  , un  autre  de  la  jambe , 
un  troisième  une  hémiplégie  complète  (Rochoux),  et  ce  ne 
sera  peut-être  pas  celui  chez  lequel  l’hémorrhagie  aura  le  plus 
d’étendue.  Vous  rencontrez  chez  plusieurs  sujets  une  altération 
toute  semblable  de  la  superficie  du  cerveau  ; par  exemple,  cette 
atrophie  partielle  de  quelques  circonvolutions,  avec  coloration 
jaune  , légère  induration  , texture  membraniforme  5 chez  un 
d’eux,  il  y avait  démence,  chez  un  autre  , hémiplégie  ^ chez  un 
autre  enfin,  à peine  Cjuelque  trouble  ajipréciable  des  fonctions 
cérébrales.  Cette  altération  locale  n’est  donc  elle-même  presque 
pour  rien  dans  la  pliysionomie  des  symptômes.  Sans  avoir  re- 
cours ici  à une  ontologie  contre  laquelle  nous  n’entendrions 
plus  s’élever  une  voix  célèbre,  ne  peut-on  pas  admettre,  qu’au 


I 


■ ’ * ^ >t  A^rOI.USSEMF.!\T  CHRONIQUE.  (SYMPT.V 

moyen  d’une  sorte  de  sympatliie,  si  l’on  veut,  cette  alléralion 
agit  sur  les  parties  qui  l’avoisinent , et  les  modifie  de  diverses 
façons?  Il  semble  que  du  point  malade  parlent  des  rayons  qui 
se  portent  tantôt  dans  un  sens,  tantôt  dans  un  autre,  et  donnent 
ainsi  des  physionomies  très-différentes  à la  même  altération. 
Que  l’on  ne  me  reproche  pas  ce  mot  de  sympathie  : vague 
comme  le  fait  auquel  il  se  rapporte  , il  est  aussi  l’expression 
d’une  idée  qui  ressort  naturellement  de  l’étude  de  la  physio- 
logie et  de  la  pathologie  des  centres  nerveux,  et  que  M.  Andral 
a tendue  en  disant:  <•  Qu  il  existe  entre  toutes  les  parties  du 
système  nerveux  une  solidarité  merveilleuse  qui  les  unit  et  les 
ramène  à l’unité  d’action  (1).  » 

N’est-ce  pas  dire  qu’il  est  presque  impossible  d’établir  d’une 
façon  absolue  la  localisation  des  fonctions  ou  des  maladies  du 
système  nerveux  ? Non  pas  que  chaque  point  n’ait  des  fonctions 
spéciales,  et  que  sa  lésion  ne  doive  entraîner  des  troubles  par- 
ticuliers, mais  c est  que  les  relations  étroites  qui  unissent  en- 
semble ces  points  divers,  ne  permettent  pas  d’isoler  dans  l’ob- 
servation ce  qui  appartient  à chacun  d’eux,  et  de  distinguer 
avec  précision  le  point  de  départ  de  la  fonction  ou  des  symptômes 
que  l’on  cherche  à localiser. 

Je  crois  donc. que  s’il  ne  faut  pas  refuser  les  lumières  que  peut 
nous  fournir  l’étude  des  sytnptômes,  il  faut  être  sobre  d’induc- 
lions  à leur  égard  , et  craindre  de  leur  accorder  une  confiance 
qu’ils  ne  méritent  pas.  Ces  considérations,  du  reste,  qui  s’adres- 
sent spécialement  à la  symptomatologie  cérébrale,  ne  sauraient 
s’appliquer  sans  restriction  aux  maladies  des  auü’es  organes. 

11  est  maintenant  deux  ordres  de  faits  plus  particuliers  sur 
lesquels  je  dois  appeler  spécialement  l’attention,  car  ils  nous 
montrent  avec  quelle  réserve  nous  devons  apprécier  les  symp- 
tômes cérébraux  dans  l’étude  du  ramollissement  cérébral. 

A.  Les  premiers  sont  des  cas  où  des  symptômes  apoplecti- 
ques bien  tranchés,  c’est-à-dire  tout  à fait  semblables  à ceux 
qui  terminent  souvent  la  vie  des  sujets  affectés  de  ramollisse- 
ment, se  sont  montrés,  sans  qu’il  fût  possible  de  les  rattacher  à 
aucune  lé.siou  organique  appréciable. 

M.  Les  autres  sont  ceux  où  l’on  a trouvé  un  ramollisseincnl 

(1)  Andrul,  t.  v,  p.  881 


r.ONSim'lUTlON.S  r,KM';n\i.F.s.  M > 

(lu  CCI  veau  chez  lies  imlivulus  qui  n’avaieiiL  présenté  pemlaiit 

leur  vie  aucun  pbénoinène  capable  d’en  faire  soupçonner  l’exis- 
tence. 

Je  vais  successivement  étudier  ces  deux  classes  de  faits. 

A.  Il  n’est  pas  rare  de  voir  succomber  à des  attaques  apo- 
plectifornies  bien  caractérisées  des  individus  , à l autopsie  des- 
quels on  eberebe  en  vain  une  altéi’ation  qui  rende  un  compte 
satisfaisant  des  accidents  qui  les  ont  emportés.  Quelquefois  ces 
sym])tômes  cérébraux,  chose  remarquable,  paraissent  être  sym- 
pathiques d’une  phlegmasie  viscérale  très-aiguë , qu’ils  mas- 
quent complètement  ; c’est  même  une  forme  de  la  pneumonie 
des  vieillards  qu’il  importe  de  connaître,  et  il  ne  sera  peut-être 
pas  sans  intérêt  de  rapprocher  ces  phénomènes  apoplectiques 
de  la  pneumonie  des  vieillards,  des  symptômes  ataxiques  de  la 
fièvre  typhoïde  chez  les  adultes,  des  convulsions  des  enfants 
atteints  d’afièctions  diverses,  etc.  , et  de  montrer  qu’ainsi 
chaque  âge  nous  présente  un  groupe  particulier  de  phénomènes 
cérébraux  , indépendant  de  toute  lésion  anatomique  appré- 
ciable. 

Plusieurs  personnes  pensent  qu’on  peut  toujours  rattacher  à 
la.  congestion  cérébrale  ces  accidents  auxquels  les  premiers  ana- 
tomo-pathologistes avaient  donné  le  nom  à' apoplexie  nerveuse. 
Cette  supposition,  qui  a l’avantage  de  remplacer  une  inconnue 
par  un  fait,  peut  être  .soutenue,  dans  beaucoup  de  cas,  avec 
quelque  apparence  de  raison , mais  est-elle  toujours  admis- 
f sible  ? 

La  congestion  dans  le  cerveau  se  présente  sous  deux  formes  ; 
elle  est  caractérisée  , tantôt  par  la  plénitude  et  la  rougeur  des 
vaisseaux,  tantôt  par  l’augmentation  de  la  quantité  normale  de 
sérosité  contenue  dans  le  ciâne,  avec  pâleur  des  tissus. 

La  première  forme  paraît  se  rapporter  spécialement  à une 
augmentatioû  de  la  circulation  artérielle  ; la  seconde  à un  en- 
gorgement du  système  veineux,  consécutif  souvent  à la  préc'é- 
dente.  l^a  présence  d’une  certaine  quaiiliié  de  sérosité  dans  le 
crâne  peut  donc  suffire  pour  indiquer  l’existence  d’une  conges- 
tion cérébrale.  Mais  comment  apprécier  la  valeur  de  ce  phéno- 
mène, lorsque  l’on  sait  que,  chez  les  gens  âgés  surtout  (ceux 
chez  qui  l’on  fait,  en  général,  ce  genre  d’observations),  la  quan- 
tité de  sérosité  physiologique  pré-ente  les  plus  .grandes  variétés, 


31(5 


nAArOLI.ISSK MENT  CIinON’lQUE.  (SYMPT.) 

et  c|u’ainsi,  chez  les  uns,  la  pie-mère  peut  être  indllrée  dans  l’é- 
paisseur de  plusieurs  lignes,  sans  que  le  cerveau  en  soit  aucune- 
ment gêné,  parce  que  cette  infiltration,  lente  et  consécutive  au 
retrait  progressif  de  cet  organe,  n’exerce  sur  lui  aucune  com- 
pression, tandis  que,  chez  les  autres,  au  contraire,  dont  le  cer- 
veau volumineux  remplit  le  crâne,  1 épanchement  d’une  petite 
quantité  de  sérosité  détermine  des  symptômes  de  compression 
grave. 

Il  est  certain  qu’à  la  suite  des  apoplexies  dites  nerveuses , il 
est  très-ordinaire  de  trouver  un  certain . degré  de  congestion 
sanguine  ou  séreuse , à laquelle  il  est  peut-être  permis  d’attri- 
buer quelque  part  dans  leur  production  ; et  nul  doute  c{ue,  dans 
beaucoup  de  cas,  on  n’ait  négligé  de  tenir  compte  de  ces  cir- 
constances, propres  à échapper  à des  yeux  peu  habitués  à ce 
genre  d’observation. 

Mais  il  faut  dire  que,  dans  quelques  cas  rares,  on  ne  trouve 
rien  dans  la  cavité  du  crâne  qui  puisse  permettre  même  de  sup- 
poser l’existence  d’une  congestion. 

Dira-t-on  que,  dans  ces  cas,  la  congestion  a existé  dans  le 
principe,  mais  qu’elle  a disparu  à la  fin  de  la  vie,  ou  après  la 
mort?  Dans  un  ouvrage  récemment  publié,  M.  Gendrin  a sou- 
tenu cette  hypothèse  : •<  Les  altérations  de  la  congestion  céré- 
brale, dit-il,  ont  été  facilement  méconnues.  Ensuite  elles  peu- 
vent facilement  disparaître  après  la  mort.  Il  se  fait  toujoui’s  un 
certain  degré  d’absorption  de  la  sérosité  ; et  ne  voil-cn  pas  les 
rougeurs  inflammatoires  de  la  peau,  de  la  bouche,  des  con- 
jonctives..., disparaître  après  la  mort  (1)?»  Cet  auteur  ne  se  se- 
rait-il pas  mépris  sur  l’analogie  qu’il  admet  entre  les  altérations 
de  ces  diverses  surfaces,  dont  les  unes  sont  soumises  à la  pres- 
sion atmosphérique,  et  les  autres  complètement  soustraites  à 
cette  influence?  M.  Scoutetien  a reconnu  , par  des  expériences 
faites  sur  des  animaux,  que  , sur  quelque  surface  que  l’on  déve- 
loppât de  rinflammation  , on  voyait  les  traces  de  celle  dernière 
disparaître  apiès  la  mort,  si  on  la  laissait  exposée  à la  pression 
atmosphérique,  persister,  au  contraire,  dans  les  circonstances 
opposées  (2).  La  disparition  de  la  congestion  cérébrale  après  la 

(t)  (lendrin.  Traité  j>hilosophir]ue  de  méd.  prat.,  l.  i,  p.  491 . 

(2)  Srouiettcn,  ■/trchû'es,  t.  iii,  p.  497.  ^ 


CO.NSlUÉKAllUiNS  CiÉ>ÉUALKS. 


317 


mort  paraît  d’autant  plus,  je  ne  dirai  pas  impossible  , mais  au 
moins  diflicile  à admettre,  que , d’après  les  recherclies  du  doc- 
teur Kellie,  de  Leitli  , la  pression  de  ralmosplièrc,  qui  s’exerce 
sur  toute  la  surface  du  corps,  et  non  sur  les  organes  contenus 
dans  le  crâne,  suffirait  souvent  pour  déterminer  après  la  mort 
une  congestion  encéphalique  (1). 

Quant  à l’absorption  de  la  sérosité  par  la  substance  céré- 
brale, je  vais  consigner  ici  quelques  résultats  communiqués  à 
M.  A.  Jlecquei'el  par  M.  Natbalis  Guillot. 

•<  Des  expériences  nombreuses  sur  les  animaux  ont  dé- 
montré à M.  Guillot  que,  dans  l’état  normal  et  pendant  la  vie  , 
les  ventricules  cérébraux  sont  remplis  et  même  distendus  par- 
la sérosité  5 

» 2°  Que  la  quantité  de  ce  liquide  diminue  à inesui-e  qu’on 
examine  ces  cavités  à un  instant  plus  éloigné  de  la  mort; 

» 3“  Que  cette  sérosité  ainsi  disparue  se  retrouve  dans  la 
substance  cérébrale  ; 

» 4®  Ces  mêmes  expériences,  très-souvent  répétées,  ont  dc- 
nrontré  à M.  G.  que  le  cerveau  est  doué  de  propriétés  hygro- 
métriques très-fortes,  et  telles  que,  par  exemple , un  fragment 
de  substance  cérébrale  recueilli  chez  un  chien  qu’on  venait  de 
tuer,  et  pesé,  si  on  |e  plongeait  dans  l’eau  ou  la  sérosité  , pou- 
vait absorber  jusqu’à  son  poids  de  ccs  liquides; 

« 5”  Sous  le  rapport  de  celte  propriété  cependant,  M.  G.  a 
trouvé  des  dilFérences  suivant  les  animaux,  et  chez  ces  irrérrres 
animaux,  suivant  l’âge  , l’époque  plus  ou  moins  éloignée  de  la 
mort  à laquelle  on  les  examinait;  enfin,  les  conditions  d’âge,  dit 
même  temps  écoulé  depuis  la  mort,  étant  remplies,  il  a constate 
des  variations  qui  dépendaient  probablement  de  conditions  in- 
connues, propres  aux  individus  » (2). 

M.  A.  Eecquerel  a de  nouveau  insisté,  dans  sa  thèse  inaugu- 
rale, sur  la  résorption  delà  sérosité  épanchée  soit  dans  les  ven- 
tricules, soit  à la  surface  du  cerveau,  avec  ou  sans  diminution 
de  consistance  de  la  substance  cérébrale  (5j,  mais  sans  indi- 

(E  T.  ramacLions  de  lu  Société  iiicd.  d' Kdimboiirÿ^  l,  1. 

(2)  Alfred  Becquerel  , Recherches  cliniques  sur  lu  meniitÿite  des  en- 
Juiils-,  1838. 

(3)  A.  Bee(|iiercl,  Disserlulion  tnau^unde  sur  les  affections  tubercu- 
leuses du  ccivcau  cl  de  ses  nicmbrunes  chez  les  enfants  ; I t-lU. 


318  , ramollissement  CHUONIQUE,  (S'VMPX.) 

quer  les  recherches  spéciales  qu’il  a pu  faire  sur  ce  [joinl. 

Un  médecin  anglais  vient  de  publier  récemment  le  résultat 
d’expériences  assez  semblables  à celles  de  M.  Guillot.  « Le  cer- 
veau, dit-il,  absorbe  rapidement  les  fluides  avec  lesquels  il  est 
mis  en  contact;  cette  absorption  s’opère  même  quand  l’organe 
est  recouvert  de  ses  membranes  d’enveloppe  , mais  dans  une 
étendue  plus  grande  lorsqu’elles  ont  été  enlevées.  Nous  avons 
fait  séjourner,  pendant  un  certain  nombre  d’heures  , dos  cer- 
velles de  mouton  dans  un  poids  donné  d’eau  , et  celle-ci  a été 
rapidement  absorbée.  Le  poids  de  l’organe  était  proportionnel- 
lement augmenté,  et  les  parties,  qui  avaient  été  en  contact  plus 
immédiat  avec  l’eau,  étaient  ramollies.  Dans  un  cas,  on  dé- 
pouilla le  cerveau  de  ses  membranes  d’un  côté,  et,  six  heures 
après  la  mort,  il  fut  plongé  dans  un  mélange  composé  de  parties 
égales  d’eau  et  de  bile  de  bœuf  : il  pesait  cent  vingt-cinq  grammes 
vingt  centigrammes,  au  moment  de  la  préparation  ; après  trente- 
six  heures  de  séjour  dans  le  mélange,  son  poids  était  de  deux 
cent  soixante  grammes  ; il  avait  une  teinte  jaune  sombre  beau- 
coup plus  foncée  du  côté  oii  les  membranes  avaient  été  enle- 
vées. De  ce  côté,  la  teinte  jaune  de  la  bile  avait  pénétré  dans 
toute  la  profondeur  de  la  substance  corticale,  mais  la  substance 
médullaire  était  intacte  de  celte  coloration.  Du  côté  où  les 
membranes  avaient  été  laissées,  le  tissu  cellulaire  sous-arachnoï- 
dien était  tout  imbibé  de  hquide  jaune,  et  les  parties  internes 
du  cerveau  étaient  très-ramollies  (1).  » 

Il  est  bien  évident  que  le  cerveau  peut  absorber  la  sérosité 
épanchée  à l’entour  de  lui  : il  y alongU  inps  que  l’on  a constaté 
chez,  lui  la  propriété  de  résorber  la  partie  séreuse  du  sang  épan- 
ché dans  sa  propre  substance  ou  à sa  surface.  IMais  ce  qu’il  im- 
porte surtout  d’apprendre,  c’est  s’il  se  fait  dans  le  cerveau  de 
l’homme  vivant  une  résorption  constante,  et  dans  quelle  pro- 
portion et  jusqu’à  quel  point  cette  résorption  peut  être  consta- 
tée dans  les  points  qui  en  ont  été  le  siège.  Nous  appelons  de 
tous  nos  vœux  des  recherches  dans  ce  sens"  car  celles  que  nous 

(3)  Robert  l’ale.rsou  , o/z  lUc  pàe.udo-morbid  ufijJCurancLX  o/  Ikc  brain , 
etc.;  Kchuibuig,  Med.  and  suri^,  joiinutl,  <t>42.  (Extrait  des  Ar- 

chU’cs  rezz.  de  incd,,  iiuiv.s 

O 


CONSIDÉRATIONS  GÉNÉRALES. 

venons  de  signaler  ne  nous  apprennent  réellement  pas  grand’ 
chose  à ce  sujet. 

Je  pense  qn’il  faut  admettre  aujourd’hui  qu’il  y a une- cer- 
taine modification  des  fonctions  cérébrales  qui  simule  parfai- 
tement une  apoplexie  proprement  dite,  et  qui,  tantôt  sympto- 
matique d’une  altération  locale  des  centres  nerveux  eux-mêmes, 
ou  d’une  maladie  éloignée,  tantôt  résultat  probable  d’un  certain 
degré  de  congestion  sanguine  de  l’encéphale,  échappe  quelque- 
fois à toute  explication  certaine,  et  peut  être  alors,  jusqu’à 
nouvel  ordre,  considérée  comme  due  à un  trouble  profond 
des  fonctions  nerveuses , dont  la  cause  matérielle  nous  est  in- 
connue. Or,  de  ce  fait,  quelle  qu’en  soit  la  nature,  on  doit  con- 
clure que,  lorsqu’à  la  suite  d’accidents  apoplectiques  aigus  , on 
ne  trouve  à l’autopsie  qu’un  ramollissement  d’apparence  chro- 
nique, il  faut  se  garder  d’établir  comme  nécessaire  , entre  l’al- 
tération anatomique  et  l’appareil  symptomatique,  un  rapport 
qui  n’existe  peut-être  pas,  et  demeurer  dans  un  doute  philo- 
sophique sur  la  cause  des  accidents  mortels,  plutôt  que  de  leur 
chercher  une  interprétation  que  la  réflexion  et  d’autres  faits 
viendraient  bientôt  démentir. 

B.  On  trouve  quelquefois  des  ramollissements  considérables 
dans  le  cerveau  de  sujets  chez  lesquels  on  n’avait  observé  pen- 
dant la  vie  aucun  symptôme  propre  à faire  soupçonner  l’exis- 
tence d’une  altération  cérébrale.  Ces  faits,  assez  rares  encore, 
se  rencontreraient  plus  souvent  sans  doute  si  l’on  avait  le  soin  . 
d’examiner  attentivement  le  cerveau  de  tous  les  sujets  morts 
de  maladies  étrangères  à cet  organe.  On  ne  saurait  croire  com- 
bien d’altérations  diverses  on  rencontre  dans  le  cerveau  de 
vieillards  chez  lesquels  on  n’avait  observé  durant  la  vie  aucun 
phénomène  qu’on  pût  rapporter  à cet  organe  , si  ce  n’est  peut- 
être  ces  troubles  fonctionnels  plus  ou  moins  prononcés  qui 
accompagnent  toujours  un  grand  âge,  et  qu’il  n’est  pas  possible 
de  rattacher  à une  altération  précise  du  système  nerveux. 

Si , par  une  circonstance  étrangère  à ces  ramollissements 
eux-mêmes,  on  avait  observé  avant  la  mort  ces  symptômes 
apoplectiques  que  produit,  soit  une  forte  congestion  cérébrale, 
soit  cette  altération  inconnue  qui  ne  laisse  point  .sur  le  cadavre 
de  traces  de  son  existence,  on  n’eùt  pas  manque  d’attribuer  ces 
symptômes  au  ramollisscniciit,  seul  capable,  dans  ce  cas. 


320 


riA-MULLlsSLAlK.NT  UlUOAiK^UE,  ( SY.MPX.) 

d’expliquei'  la  mort  et  les  phénomènes  qui  l’avaient  précédée; 
alors  l’absence  de  symptômes  précurseurs  aurait  rendu  l’er- 
reur plus  grande  encore,  et  l’on  se  serait  cru  obligé  de  noter, 
comme  exemple  de  ramollissement  aigu,  un  cas  où  la  maladie 
avait  au  contraire  suivi  une  marche  essentiellement  chronique. 
Sans  doute  plus  d’un  fait  de  ce  genre  s’est  présenté  à l’observa-- 
tion  ; il  n’y  a aucune  raison  de  le  nier,  et  d’ailleurs  j’en  rappor-* 
terai  plus  loin  quelques  exemples,  ainsi  c[ue  des  cas  assez  nom-- 
breux  de  ramollissement  latent. 


ARTICLE  SECOîsD. 

L’étude  des  symptômes  du  ramollissement  chronique  doit 
être  divisée  en  deux  parties  : dans  la  première,  nous  prendrons 
isolément  chacun  des  symplômes,  et  nous  les  étudierons  sépa- 
rément, comme  nous  l’avons  déjà  fait  pour  le  ramollissement, 
aigu,  mais  avec  moins  de  détails;  dans  la  seconde,  ces  symp-- 
tomes  seront  réunis,  groupés  ensemble,  et  les  diverses  formes  dui 
ramollissement  chronique  présentées  telles  que  nous  les  obser-- 
vons  dans  les  cas  les  plus  ordinaires. 

§ 1"  Troubles  du  inouvcnieiit. 

Dans  la  plupart  des  cas  de  ramollissement  chronique,  mais, 
non  dans  tous,  la  motilité  est  soustraite  plus  ou  moins  complè- 
tement àl’emph’e  delà  volonté  ; mais  tantôt  elle  est  simplement 
affaiblie  ou  abolie,  tantôtelle  éprouve  des  modifications  diverses . 
tout  à fait  opposées  aux  précédentes,  c’est-à-dire  qu’il  y a 
tantôt  résolution  , tantôt  contracture,  tremblements,  mouve- 
ments convulsifs,  etc 

Ces  troubles  de  la  motilité  doivent  être  considérés  aux  mem- 
bres et  à la  face.  Il  est  certain  qu’il  est  un  bon  nombre  de  cas 
où,  péndant  tout  le  cours  de  la  maladie  , on  u observe  qu  une 
résolution  simple  sans  contracture.  La  résolution  est  rarement 
complète  dans  le  ramollissement  chronique  ; il  y a presque 
toujours  un  reste  de  motilité  qui  persiste  et  permet  aux  mem- 
bres au  moins  de  se  retirer  quand  on  vient  à les  piquer  ou  à 

les  pincer. 


rUUUJJLliS  DU  U(JU\  E.MKM  . 


;‘2  • 

La  coilUacluie  se  monlre  plus  souvent,  ei  esl  plus  caracléris- 
lirjiie  <pie  la  résolution  simple.  Elle  peut  paraître  à des  épo- 
ques très-dillérentes  de  la  maladie  et  qu’il  importe  de  préciser. 
Tantôt  on  l’observe  seulement  au  début,  et  elle  fait  place  cn- 
suiteà  la  résolution;  tantôt  au  contraire,  elle  ne  se  moiiir® 
qu’à  la  suite  de  cette  dernière,  absolument  comme  dans  les  cas 
où  un  ramollissement  se  développe  consécutivement  à une  lié- 
inorrbagie.  D’autres  fois,  elle  paraît  dans  le  cours  de  la  mala- 
die d’une  manière  intermittente,  alternant  avec  la  résolution 
simple  ; d’autres  fois  enfin,  elle  existe  dès  le  commencement, 
et  s’observe  jusqu’à  la  fin. 

La  contracture  se  montre  encore  à des  degrés  et  sous  des 
formes  très-diverses.  Je  crois  qu’on  l’observe  plus  souvent  dans 
les  cas  où  la  luarcbe  de  la  maladie  est  lente  ou  progressiv’c,  que 
dans  les  cas  où  son  développement  se  fait  subitement.  Alors  on 
la  \oitd  abord  se  fixera  un  ou  deux  doigts;  elle  peut  demeurer 
un  certain  temps  ainsi  limitée,  puis  guigner  ])rogressivement 
toute  la  main,  le  poignet,  le  coude.  Dans  son  plus  haut  degré, 
ou  voit  les  membres  revenus  sur  cu,\-memes  dans  une  lle.viou 
forcée,  les  droits  appliqués  avec  force  contre  la  paume  de  la 
main,  l’avanl-bras  retenu  sur  la  poitrine,  la  jambe  fléchie  sur 
la  cuisse;  et  telle  peut  être  cette  raideur,  qu’elle  s’oppose  éner- 
giquement a tous  les  efforts  d extension  que  l’on  peut  tenter 
l.es  niu.scles  sont  raiJis  comme  des  cordes  tendues.  Le  inembre 
supeiieui  est  toujours  dans  la  flexion;  l’inférieur  est  jilus  sou- 
vent, mais  non  toujours  dans  l’extension.  La  raideur  disparaît 
ordinairement  quelques  jours  ou  quelques  heures  avant  la 
mort,  et  les  membres  contracturés  demeurent  entièrement 
fiasques.  Quelquefois,  mais  rarement,  les  muscles  du  col,  le 
sterno-mastoïdien  surtout,  participent  à cette  contracture  : 
alors  la  tête  est  déviée  du  côté  oppo.sé  aux  membres  contrac- 
turés. 

Tl  importe  de  distinguer  de  la  raideur  due  à la  conlraclion 
p.  rmanente  des  muscles,  celle  qui  dépend  de  la  rigidité  des 
articulations,  qu’une  longue  immobilité  rend  souvent^  comme 
1 on  sait,  impropres  à jouer  (1;. 

I.a  contracture  peut  exister  dans  des  membres  non  paralysés  : 

(t  ) Foyez  le  cli.-ipiuc  du  Diagiioslie. 

21 


322 


K-I.MULUiSEMÜJNX  CHllOMQUE.  (sYAll>X,) 

mais  ceia  esl  iuliuiment  rare.  Lorsqu’elle  est  légère,  les  inouve- 
menls  peuvent  encore  conserver  une  certaine  indépendance; 
mais  quand  elle  est  énergique,  ils  sont  en  général  complètement 
abolis. 

Il  arrive  so  uveiil,  dans  le  ramollissement  chronique,  que  les 
membres  soient  affectés  de  tremblements.  Ces  tremblements 
sont  généraux  ou  limités  à un  côté  du  corps,  aux  membres  pa- 
ralysés ou  contracturés;  quelquefois  liés  plutôt  à un  certain 
affaiblissement  de  la  motilité  qu’à  une  véritable  paralysie.  J^ai 
vu  un  cas  où  il  n’y  eut  guère,  pendant  longtemps,  d’autre  gêne 
du  mouvement  qu’un  tremblement  continuel  des  membres  du 
côté  gauche.  Ces  tremblements  augmentent  en  général  facile- 
ment sous  l’influence  des  émotions , d’une  souffrance  quelcon- 
que, des  mouvements  de  congestion  vers  la  tête,  etc. 

Enfin  on  observe  quelquefois,  mais  assez  rarement,  des  mou- 
vements convulsifs,  intermittents,  soit  généraux,  soit  limités  au 
côté  paralysé  ou  au  côté  opposé;  quelquefois  de  véi'itables  accès 
épileptiformes,  comme  nous  en  avons  vu  dans  le  ramollisse- 
ment aigu.  Ces  derniers  phénomènes  peuvent  se  montrer  tantôt 
comme  symptôme  ordinaire,  tantôt  comme  accident  passager, 
dans  le  cours  de  lamaladie:  dans  ce  dernier  cas,  ils  annoncent 
qu’un  travail  de  congestion  se  fait  vers  la  tête  ; s’ils  se  répètent, 
il  est  de  toute  probabilité  que  le  ramollissement  fait  des  progrès 
en  étendue , car  lorsqu’ils  sont  assez  graves  pour  entraîner  la 
mort,  il  arrive  souvent  de  trouver  un  ramollissement  aigu,  sur 
les  limites  de  l’altération  chronique. 

On  sait  maintenant  que  la  contracture,  à laquelle  on  a fait 
jouer  un  si  grand  rôle  dans  le  ramollissement  cérébral,  est  loin 
d’être  fréquente  dans  la  période  aiguë  de  cette  maladie , puis- 
quesur47  cas  de  ramollissement  aigu  accompagné  de  paralysie, 
nous  n’avons  trouvé  de  contracture  que  13  fois  dans  les  mem- 
bres paralysés,  dans  un  peu  plus  du  quart  des  cas.  La  contrac- 
ture se  montre  beaucoup  plus  fréquemment  dans  le  ramollisse- 
ment chronique. 

J’ai  trouve  l’état  des  membres  décrit  très-exactement  dans 
43  de  mes  observations  de  ramollissement  chronique  : je  suis 
obligé  d’en  laisser  de  côté  une  douzaine,  dans  lesquelles  il  n’est 
pas  indiqué  si  la  paralysie  était  accompagnée  ou  non  decontrac- 


TRÜUÜIÆS  DU  iWOb  Vli.UENX.  3 25 

Inre,  et  je  ne  veux  point  Mippléci-  à celte  lacune  par  mes  sou- 
venirs. 

Sur  ces  43  cas,  10  lois  les  mouvements  sont  demeurés  tout  à 
fait  intacts; 

6 fois  il  y avait  affaiblissement  général  des  mouvements  sans 
paralysie  proprement  dite  ; 

I fois,  des  mouvements  spasmodiques  sans  paralysie  , 

II  fois,  résolution  simple  sans  aucune  contracture  ; dans  5 
de  ces  cas , les  malades  ont  été  observés  soigneusement  par 
moi,  pendant  tout  le  cours  de  leur  maladie; 

16  fois  enfin  j’ai  trouvé  de  la  contracture.  Un  de  ces  cas  est 
un  des  sept  précédemment  indiqués,  où  il  y avait  affaiblissement 
général,  sans  véritable  paralysie.  Dans  tous  les  autres,  il  y avait 
hémiplégie.  Je  dois  faire  remarquer  que  dans  un  de  ces  cas  la 
contracture  était  à fcine  prononcée;  que  dans  un  autre  clic 
n’existait  qu’aux  doigts  , il  n’y  en  avait  ni  au  coude  ni  au  ge- 
nou. Dans  5 cas  il  a été  constaté  que  la  contracture  avait  apparu 
consécutivement  à la  résolution \simple. 

De  ces  faits  , on  peut,  il  me  semble,  conclure  : qu’à  l’opposé 
de  ce  qui  s’observe  dans  le  ramollissement  aigu,  la  contracture 
est  plus  commune,  dans  le  ramollissement  chronique,  que  la  ré- 
solution simple,  bien  qu’elle  manque  encore  assez  souvent. 

Je  n ai  pu  tiier  aucun  parti,  sous  ce  rapport,  des  observations 
de  ramollissement  chronique  de  M.Rostan,  presque  toutes  très- 
incomplètes. 

Douze  observations  de  M.  Andral  m’ont  paru  présenter  des 
détails  suffisants:  sur  ces  12  cas,  2 fois  les  mouvements  sont  de- 
meutes  intacts,  6 fois  la  resolution  a etc  observée  sans  contrac- 
ture ; 4 fois  seulement  on  a noté  de  la  contracture  dans  les 
membres  paralysés. 

La  paralysie  d’un  coté  de  la  face  accompagne  presque  tou- 
jours riiémiplégic.  La  bouche  se  trouve  déviée  du  côté  opposé  à 
celte  deiTiière;  la  narine  correspondante  au  contraire  est  affais- 
sée. On  y observe  aussi  quelquefois  des  mouvements  convulsifs 
passagers,  des  lies  variés,  .le  voyais,  il  y a quelque  temps  , une 
femme  hémiplégique,  affectée  de  ramollissement,  et  qui  exerce 
presque  constamment  avec  .sa  bouche  uu  mouvement  de  suc- 
cion. Dans  les  ramollissements  avancés,  la  déviation  de  la  bou- 
che peul  elle  portée  au  point  de  jp-ner  beaucoup  l’introduction 


IVAMOLLlSSEAlli.NT  CHUüM(^UE.  (SV.Ml'X.) 

des  liquides.  A la  face  comme  aux  lueinbres  , il  peul  y a voir 
coiitraclure  au  lieu  de  résolution  des  muscles:  dans  ce  cas  la 
bouche  est  tirée,  non  pas  dii  côté  sain,  mais  du  côté  privé  de 
mouvement  volontaire. 

Un  certain  degré  d’hemiplégie  faciale  peut  être  un  des  pre- 
miers signes  qui  fixent  l’attention  sur  le  développement  lent 
d’un  ramollissement  du  cerveau,  lorsque  la  paralysie  des  mem- 
bres est  encore  peu  prononcée:  je  ne  reviendrai  pas  ici  sur  les 
juécautions  que  j’ai  recommandées  pour  ne  pas  se  laisser  trom- 
per par  des  déviations,  que  présente  souvent  par  d’autres  causes 
la  bouche  des  vieillards. 

Les  mouvemiens  de  la  langue  ne  m’ont  pas  babituellemenl 
paru  gênes  , bien  que  l’articulation  des  sons  soit  très-souvent 
difficile.  La  gène  de  la  parole  tient,  je  crois,  le  plus  ordinaire- 
ment à l’oubli  des  mots.  La  langue  n’est  pas  souvent  dévice. 

S II.  Troubles  du  senliuienl. 

Comme  le  mouvement,  le  sentiment  pré.sente  tantôt  un  sim- 
ple affaiblissement,  tantôt  diverses  autres  modifications. 

Celles-ci  sont  ordinairement  un  des  premiers  signes  qui 
fixent  ratteiuion  sur  le  ramollissement  cérébral,  lorsqu’il  dé- 
bute graduellement.  Les  malades  éprouvent  dans  les  membres 
qui  devront  être  jilus  tard  paralysés  ou  contracturés,  de  l’en- 
gourdissement , des  fourmillements  , des  picotements  parfois 
très  incommodes.  Ces  symptômes  se  montrent  tantôt  dans  les 
deux  membres  d’un  même  côté  , tantôt  dans  le  bras  seulement 
ou  dans  la  jambe  ; ils  commencent  par  l’extrémité  même  des 
membres,  et  demeurent  quelquefois  limités  pendant  un  certain 
temps  à un  ou  deux  doigts,  ou  à un  orteil  ; puis  ils  remontent 
peu  à peu  de  bas  en  haut.  Quelquefois  il  s’y  joint  des  crampes. 

Ces  symptômes  sont,  je  crois,  plus  prononcés  quand  ils  doi- 
vent être  suivis  de  contracture,  que  quand  ils  précèdent  une  ré- 
solution simple. 

Il  n’est  ])as  rare  que , dans  les  premiers  temps  , les  malades 
éprouvent  ces  diverses  sensations  des  deux  côtés  du  corps:  cela 
prouve  que  la  congestion  qui  précède  et  produit  le  ramollisse- 
ment est  souvent  jjénérale  avant  <lc  se  fixer  sur  un  point  du  cer- 
veau. C’est  pour  la  même  raison  (|ue  la  maladie  débute  souvent 


TP.oi'Ur.KS  mr  si'\rnii;xj. 


;V?.) 

par  uno  aholilioii  jp'nt’rale  «li*s  laculü's  de  riiilelli;;eiice  et  des 
sens,  uncatiaque  d’apoplexie,  à laquelle  succèdenl  des  pliéno- 
inènes  plus  limites. 

Les  douleurs  dans  les  membres  se  montrent  rarement  au 
commencement  ; presque  toujours  à une  époque  un  peu  avan- 
cée , et  coïncidant  avec  de  la  contracture.  Elles  ont  leur  siège 
dans  les  articulations  ou  dans  la  continuité  des  membres.  Quel- 
quefois , assez  souvent  même,  elles  se  fixent  opiniâtrement  à 
une  épaule  , par  exemple  , et  peuvent  y causer , pendant  des 
mois  entiers,  des  douleui's  fort  vives.  Le  toucher  ne  les  exas- 
père pas  ordinairement;  mais  les  mouvements  que  l’on  imprime 
à ces  jointures  sont  souvent  très-douloureux.  D’autres  fois  elles 
se  fixent  sur  un  point  quelconque  d’un  muscle  : je  vois  en  ce  mo- 
ment une  femme  chez  laquelle  l’insertion  inférieure  du  deltoïde 
est  le  siège  d’une  douleur  fixe,  permanente,  assez  vive  et  qu’é- 
veillent surtout  les  conlraclions  énergiques  de  ce  muscle. 

M.  Valleix  m’a  dit  avoir  trouvé  plusieurs  fois,  sur  un  point 
quelconque  d’un  membre  paralysé,  un  point  très-circonscrit , 
que  pouvait  recouvrir  l’extrémité  de  l’indicateur,  douloureux  à 
la  pression,  sans  que  l’on  pût  savoir  ni  la  cause  ni  le  siège  précis 
de  ce  phérromène.  • ' 

Lorsque  les  douleurs  se  montrent  avec  une  faible  paralysie, 
il  faut  savoir  les  distinguer  d’une  affection  rhumatisinale.  Ce 
diagnostic  peut  être  réellement  difficile,  quand  il  n’y  a que  de 
simples  engourdissements,  et  que  l’affaiblissement  du  mouve- 
ment larde  à se  prononcer  : cependant  il  suffit , dans  la  plupart 
des  cas , de  connaître  la  possibilité  d’une  erreur  , pour  l'éviter. 
Les  maladies  de  la  moelle  en  fournissent  du  reste  l'occasion 
plus  fréquemment  que  le  ramollissement  cérébral.  Il  faut  savoir 
aussi  que  les  malades  s’y  trompent  souvent  eux-mêmes  ; j’en  ai 
vu  plusieurs  qui,  affectés  d’un  ramollissement  avancé,  croyaient 
avoir  des  douleurs. 

Ces  douleurs  varient  beaucoup  de  caractère,  et  il  est  difficile 
de  les  décrire;  beaucoup  de  malades  disent  qu’on  leur  déchire, 
(pi  on  leur  tord  la  chair,  lu  riande,  suivant  une  expression  po- 
pulaire ; une  femme  me  disait  qu’il  lui  semblait  qu’on  lui  suçait 
les  os.  Ils  distinguent  très-bien  celles  qui  sont  profondes.  Quel- 
ques-uns souffrent  excessivement,  et  dans  les  paroxysmes,  elles 
sont  parfois  assez  aiguës  pour  arracher  de  grands  cris.  On  fera 


■J'”  R A Morj.issE^rKNT  rnr,ONiorr,.  (syaii>t.) 

attienlion  que,  comme  les  tloulcnrs  rlmmatismales,  celles  ré- 
suUaut  d anciennes  blessures,  etc.,  les  chaujifements  de  temps 
les  révedlent.  Il  y a des  malades  chez  lesquels  l’influence  du 
froid  est  remarquablement  prononcée. 

Dans  quelques  cas  de  ramollissement,  on  a vu  la  sensibilité 
de  la  peau  exagérée  comme  dans  la  méningite  rachidienne.  Ce 
symptôme  peut  se  montrer  habituel  ou  passager  j seulement  ces 
cas  sont  lares.  Ils  se  rapprochent  de  ceux  où  les  mouvements 
sont  douloureux,  et  qui  n’indiquent  pas  autre  chose  qu’une 
exagération  de  la  sensibilité  musculaire. 

Quelque  soit  le  degré  de  paralysie  ou  de  contracture,  la  sen- 
sibilité peut  demeurer  tout  à fait  normale. 

D auties  fois  elle  subit  une  diminution  en  rapport  avec  l’af- 
ladDhssement  du  mouvement  ; cependant  il  est  rare  d’observer 
une  anesthesie  complète.  On  ne  l’observe  guère,  que  dans  ces 
attaques  apoplectiformes  qui  marquent  si  souvent  soit  le  début, 
.soit  le  dernier  terme  du  ramollissement.  .Te  ne  sache  pas  que 
l on  ait  jatnais  rencontré,  dans  le  ramollissement  chronique,  l’a- 
neslhesie  indépendante  de  la  paralysie  du  mouvement. 

5 Ih'  Céphalalgie. 

Non.s  avons  vu,  en  étudiant  le  ramollissement  aigu,  que  la  cé-  . 
phalalgie  s’observait  rarement  dans  les  cas  où  cette  maladie  sui- 
vait line  marche  rapide  , puisque  sur  3l  observations  qui  m’ap- 
pariiennentj  ce  symptôme  n’a  été  noté  que  7 fois,  et  12  fois  seu- 
lement sur  3()oI)ser  vations  empruntées  à MM.  Rostan,  Andral 
et  à d’autres  auteurs;  ce  qui  fait  19  fois  sur  67,  dans  un  peu 
plus  du  quart  des  cas. 

Nous  allons  voir  que,  dans  le  ramollissement  chronique,  lise 
montre  dans  une  proportion  un  peu  plus  considérable  : l’ab- 
sence ou  l’existence  de  la  céphalalgie  a pu  être  constatée  dans 
34  seulement  de  mes  observations  de  ramollissement  chronique; 
j’ai  dû  laisser  de  côté  les  cas  où  les  renseignements  ne  me  pa- 
raissaient pas  snfUsanls,  et  ceux  où  les  malades  n’etaient  pas  en 
état  de  rendre  compte  de  leurs  sensations.  Sur  ces  34  cas  , la  cé- 
phalalgie n’a  été  notée  que  1.5  fois.  Sur  19  observations  dues  à 
mm.  Rostan  et  Andral,  où  l’état  de  la  têie  a été  noté,  on  trouve 
que  la  cépbalalgie  a é'té  obsiu  véc  9 foj.s  ; ce  qui  fait  en  tout  24 


357 


IMITAT  DE  I.’lNTELMGEWCE. 

lois  sur  53  observations,  près  de  la  moitié  des  cas  . La  cépha- 
lalgie serait  donc  plus  commune  dans  le  ramollissement  duo- 
nique*  que  dans,  le  ramollissement  aigu,  bien  qu  elle  soit  encore 
loin  de  jouer  un  rôle  très-important,  même  dans  le  premier, 
par  sa  fréquence  au  moins  ; car  nous  verrons  plus  loin  si  son 
existence  n’aurait  pas  beaucoup  plus  de  valeur  pour  le  diagnos- 
tic^ dans  les  cas  où  elle  s’observe. 

La  céphalalgie  se  montre  quelquefois  dès  le  commencement 
de  la  maladie,  surtout  lorsque  celle-ci  suit  une  marche  gra- 
'duelle;  alors  elle  peut  même'en  être  le  premier  symptôme. 
Lorsque  la  maladie  débute  par  unejattaque  apoplectiforme,  la 
céphalalgie  peut  se  montrer  aussitôt  que  le  malade  a recouvre  le 
sentiment, *ou,  au  contraire,  apparaître  à une  époque  plus  ou 
moins  éloignée.  Elle  peut,  après  avoir  existé  comme  prodrome, 
cesser  lorsque  le  ramollissement  s’est  formé . Elle  peut  manquer 
alors  qu’il  existe  de  vives  douleurs  dans  les  membres. 

La  céphalalgie  varie  beaucoup  d’intensité  ; j’ai  vu  peu  de 
malades  se  plaindre  vivement  de  la  tête  : maintenant  , comme 
beaucoup  d’autres  symptômes,  elle  augmente  notablement  pen- 
dant les  paroxisines.  Il  y a souvent  simplement  de  la  lour- 
deur, de  l’embarras  dans  la  tête.  Les  sensations  que  l’on  y 
éprouve  sont  du  reste  très-variées.  Plusieurs  femmes  qui  en 
souffraient  beaucoup,  me  disaient  qu’il  leur  semblait  qu’il  leur 
bouillait  un  pot-au-feu  dans  la  tête. 

La  céphalalgie  est  presque  toujours  frontale,  quelquefois  gé- 
nérale, rarement  limitée  à un  côté  de  la  tête  : l’expérience  de* 
M.  le  docteur  Prus  est , sous  ce  point  de  vue  , semblable  à la 
mienne. 

Quant  aux  étourdissements,  il  y a quelques  malades  chez  qui 
Us  se  montrent  habituellement  ; inai.s,  la  plupart  du  temps,  ils 
ne  s’o'ljservent  qu’alors  que  surviennent  des  paroxysmes.  Je  ne 
décrirai  pas  leurs  diflérents  degrés,  depuis  un  simple  éblouisse- 
ment jusqu’à  une  perte  presque  absolue  de  connaissance. 

S TV.  Etat  de  rintelligencc. 

Le  ramollissement  cérébral  peut  parcourir  scs  ;li\  crses  pé-. 

/ iodes  sans  que  l’intelligence  soit  notablement  altéiéc;  mais 
(•  estasses  rare.  Les  altérations  de  l’intelligence  suivent,  on  gé- 


RAMOr.LlSSK^rF.NT  c.fino\ioi;i;.  (sympt.) 

lierai , une  n.arclie  analogue  à celle  des  autres  sympiA.nes. 
Ainsi , chez  les  individus  chez  qui  la  maladie  se  développe  lua- 
duelleinent  on  voit  peu  à peu  les  facultés  s’affaisser,  la  mémoire 
s al  aiblir:  les  idees  uevieimeut  plus  rares,  les  malades  sentent 
et  disent  tres-bien  que  leur  tête  s’en  va  ; enfin  ils  tombent  en 
enjcmce.^  Le  ramollissement  chronique  peut  encore  donner  lieu 
a une  véritable  démence  ^ la  manie  peut  être  le  seul  symplôme 
du  ramollissement  ; mais,  en  général,  chez  les  vieillaj-ds  , il  y a 
])luAot  affaiblissement  que  perversion  de  l’intelligence.  Le  ca- 
ractère des  lualades  peut  être  diTersement  modifié.  Quelquefois 
ils  sont  portes  à la  gaké,  ils  chantent  toute  la  journée;  plus 
souvent  ils  tournent  à la  mélancolie. 

Chez  une  femme  de  la  Salpêtrière,  évidemment  affectée  d’un 
.■amolli.ssement  avancé,  et  qui  était  babituellement  plongée 
dans  une  mélancolie  profonde,  cette  dernière  vint  à être  rem- 
placée  par  des  hallucinations.  Elle  entendait  sans  cesse  ses  voi- 
sines lui  crier  des  injures;  la  nuit,  on  s’occupait  à troubler  son 
sonnneil  ; les  jours  où  elle  était  le  plus  agitée,  c’était  moi-incnie 
qui  avais  donné  des  ordres  pour  qu’on  la  tourmentât.  D’autres 
m il.adesunl,  à ce  degré  du  ramollissement,  des  hallucinations 
lie  la  vue  ; une  d’elles  voyait  un  singe  s’asseoir  au  pied  de  son 
lit;  une  antre  voyait  des  fagots  brûler  devant  elle. 

Lorsque  le  raniollis.seinent  a débuté  par  une  attaque  apo- 
plei  tiforme,  ou  que  de  semblables  attaques  se  sont  montrées 
dans  son  cours,  l’intelligence  en  reçoit  ordinairement  des  at- 
teintes pins  ou  moins  profondes  ; les  malades  tombent  souvent 
à la  longue  dans  une  hébétude  absolue.  On  remarque  chez  eux 
ces  alternatives  de  pleurs  et  de  rires  sans  sujet,  qui  sont  un 
des  signes  les  jdiis  certains  d’une  altération  de  texture  du  cer- 
veau, et  qui  sont  peut-être  quelquefois  causés  par  un  simple 
kyste  apoplectique. 


jj  V.  Trouilles  de  la  parole. 

Ici,  comme  dans  les  autres  maladies  cérébrales,  il  faut  dis- 
tinguer avec  soin  les  altérations  de  la  ])aroIe  qui  tiennent  à la 
gène  des  mouvements  de  la  langue,  de  celles  (jui  résultent  de 
l’oubli  des  mois.  Quand  la  marche  de  la  maladie  est  graduelle, 
ce  symptôme,  quelle  qu’en  soit  la  cause,  se  développe  aussi 


ÉTAT  DES  SENS  ET  DES  DIVEESES  l'ONCTIONS. 


pou  à peu.  Lorsque  surviennent,  soit  au  début,  soit  plus  lard, 
des  accidents  apoplectiforines,  la  parole  s’en  ressent  presque 
toujours  d’une  manière  très-prononcée. 

Elle  offre  à peu  près  constamment,  dans  le  ramollissement  , 
et  même  indépendamment  de  toute  gêne  appréciable,  une  sorte 
de  monotonie  qui  lui  donne  un  caractère  tout  particulier.  Je 
ne  saurais  trop  appeler  l’attention  sur  ce  phénomène,  qui , à 
lui  seul , m’a  quelquefois  mis  sur  la  voie  d’un  ramollissement 
chronique,  encore  mal  caractérisé. 

Les  altérations  de  la  parole  présentent  quelquefois  des  phé- 
nomènes très-bizarres  et  dont  l’explication  échappe  complète- 
ment. Une  femme,  Reine  Julin,  ne  pouvait  parler  sans  que,  au 
bout  de  trois  ou  quatre  mots , elle  dît  : par  le  commande- 
ment... (1).  Celte  femme  présenta  le  même  phénomène  pendant 
plusieurs  années  ; c’était , avec  l’hébétude  de  la  phy.sionomie  , 
l’engourdissement  de  l’intelligence,  le  seul  signe  qui  pût  révé- 
ler l’existence  d’une  lésion  organique  du  cerveau.  Une  femme, 
âgée  de  soixante-huit  ans,  ne  faisait  entendre  que  des  sons  in- 
cohérents, toujours  les  mêmes,  et  qui  formaient  le  mot  sinona 
ou  chinona;  elle  entendait  et  comprenait  parfaitement;  elle 
répondait  à tout  par  ce  mot  unique,  variant  seulement  l’iir- 
flexion  de  sa  voix,  suivant  ce  qu’elle  voulait  exprimer.  Le 
membie. supérieur  droit  était  raide  et  fléchi,  privé  de  mouve- 
ment et  douloureux  dans  ses  articulations,  quand  on  cherchait 
à le  mouvoir.  La  sensibilité  y était  fout  à fait  abolie. 

Il  y a peut-être  encore  maintenant  à l’inlinuerie  de  la  Salpê- 
trière une  femme  d’une  quarantaine  d’années,  tout  à fait  hémi- 
plégique, et  qui  ne  pouvait  dire  que  : madame  été...  mon  Dieu, 
est-il  possible...  bonjour,  madame Son  intelligence  est  par- 

faitement conservée , elle  rit  des  choses  plaisantes  quelle  en- 
tend, elle  pleure  quand  elle  veut  témoigner  sa  reconnaissance 
des  soins  que  l’on  prend  d’elle;  elle  prononce  parfaitement  ces 
mots  qu’elle  peut  dire  et  qu’elle  répète  sans  cesse  ; et  cependant 
d lui  est  inipo.ssible  d’en  dire  davantage. 

S VI.  Etat  dc.s  sens  et  des  diverses  fonctions. 

Les  yeux  participent  quelquefois  , mais  assez  rarement , à la 
(f)  Voyez  Oh.<:prvntion  92.  ' 'j 


’-J''  >»A.\IOLr,lSSKMF,NT  CHRONlOür.  (SY:\rPT.) 

<lévi.ition  de  la  bouche  el;  de  l’aile  du  nez,  le  strabisme  est 
plus  souvent  simple  que  double.  On  ne  trouve  guère  les  pupilles 
altérées  dans  leur  forme  et  leur  mobilité  que  lorsqu’il  survient 
des  attaques  apoplectiformes,  ou,  au  moins  , des  signes  de  con- 
pstion  cérébrale  grave  ; hormis  ces  cas  , je  les  ai  presque  tou- 
jours vues  égales  et  mobiles.  La  vue  s’affaiblit , en  général , 
quand  le  laniollissement  fait  des  progrès  j mais  je  n’ai  jamais 
-vu  cet  affaiblissement  aller  jusqu’à  la  cécité. 

Les  individus  affectés  de  ramollissement  ne  m’ont  pas  paru  ; 
en  général,  avoir  l’ouïe  plus  dure  que  les  vieillards  dont  le 
cerveau  est  sain  : je  n^ai  non  plus  jamais  remarqué  d’altération 
spéciale  des  sens  de  l’ouïe  et  de  l’odorat;  mais  je  n’ai  peut-être 
pas  suflisamment  fixe  mon  attention  sur  ce  point.  Il  ne  faut  pas 
oublier  cependant  que  toutes  les  tnodificalions  des  sens  que 
nous  avons  notées  dans  le  ramollissement  aigu  , se  rencontrent 
toutes  les  fois  qu’une  attaque  vient  à survenir  dans  le  ra- 
mollissement chronique , attaque  de  paralysie  , de  convul- 
sions, etc. 

II  y a des  personnes  chez  lesquelles  le  ramollissement  peut 
arriver  à un  degré  avancé,  sans  que  la  santé  générale  paraisse 
s’en  ressentir  aucunement.  Il  semble  même  que  l’état  d’apathie 
ilans  lequel  ils  végètent  favorise  la  nutrition  chez  eux,  et  leur 
embonpoint , une  certaine  fraîcheur  dans  leur  teint,  montre 
le  peu  d’influence  que  le,  cerveau  peut  exercer  sur  le  reste  de 
l’économie. 

Chez  d’autres,  au  contraire,  la  maigreur  est  extrême,  la  peau 
terreuse,  les  muqueuses  pales  ou  d’un  rouge  d’irritation  j ce 
sont  ceux  ordinairement  chez  qui  il  existe  de  la  contracture, 
des  douleurs  dans  les  membres,  de  la  céphalalgie.  Ces  douleurs 
n’existent  jamais  pendant  un  temps  un  peu  long  sans  entraîner 
un  certain  degré  de  marasme. 

L’évacuation  involontaire  des  urines  et  des  matières  fécales 
est  une  fies  circonsiances  les  plus  ordinaires  de  la  fin  du  ramol- 
lissement ; elle  se  montre  quelquefois  dès  le  début,  quand  la 
maladie  commence  par  une  attaque  apoplectiforme. 

Les  fonctions  digestives  n’offrent  en  général  rien  de  particu- 
lier chez  les  individus  aflectés  de  ramollissement  : s ils  pu- 
sentent  assez  souvent  de  la  constipation,  cela  ma  p.niu  te- 
nir générahnient  plus  à leur  ;'ige,  à leur  genre  de  vie,  a un 


ATARCOE  RT  DDHÉF.  DU  P.AMOEURSEMEAT  CHRON'IQrjE.  ?>?>! 

AÔjour  liabitnol  on  pvolonfiié  dans  le  lii , qu’à  la  lésion  du 
eerveau. 

y 

§ VII.  Marche  et  durée  du  ramollissement  chronique; 

]ja  marche  du  ramollissement  chronique  présente  les  plus 
grandes  variétés  : je  ne  pense  pas  qu’il  y ait  une  maladie  qui 
offre,  sous  ce  jaoint  de  vue,  des  oppositions  aussi  tranche'es,  et 
cela  sans  que  les  altérations  trouvées  sur  le  cadavre  en  donnent 
aucunement  la  raison. 

Lorsque  la  physionomie  anatomique  d’une  altération  chro- 
nique et  ancienne  ne  rend  pas  compte  des  phénomènes  qui  ont 
ont  eu  lieu  pendant  sou  cours,  il  faut  chercher  si  Létude  des 
premières  périodes  et  du  début  de  cette  altération  ne  pourrait 
pas  jeter  quelques  lumières  sur  ce  sujet.  Tel  est  le  résultat  au- 
quel je  crois  être  arrivé  , en  démontrant  que  le  ramollissement 
se  formait  toujours  à ta  suite  d’une  congestion  cérébrale.  J’ai 
fait  voir  que  le  mode  de  développement  de  cette  affection  dé- 
pend de  la  congestion  qui  l’a  précédée  et  lui  a donné  nais- 
sance ; ainsi  nous  avons  vu,  dans  le  ramollissement  aigu  , que 
l’apparition  des  .symptômes,  chez  les  sujets  qui  succomhent  à 
celte  affection,  avait  tantôt  été  subite  et  tantôt  graduelle,  et 
(pie,  chez  les  individus  affectés  de  congestion  cérébrale,  celle- 
ci  présente  exactement  la  même  marche  et  les  mêmes  phé- 
nomènes. 

Maintenant  nous  trouvons  que  les  faits  de  ramollissement 
chronique  se  rangent  naturellement  dans  les  quatre  formes 
suivantes  : 

Première  forme.  — Le  ramolli-ssemeut  s’annonce  , dès  son 
principe,  comme  une  maladie  essentiellement  chronique.  Ac- 
compagné d’une  réunion  de  symptômes  plus  ou  moins  com- 
plète, il  marche  lentement  ou  par  secousses,  mais  toujours 
d une  manière  progressive. 

Deuxième  forme.  — Le  ramollissement  débute  brusquement, 
comme  l’hémorrhagie  cérébrale,  dont  il  suit  quelquefois  la 
marche  subséquente  avec  une  ressemblance  frappante. 

T ! ol  sième  forme. — Le  ramollissement  se  développe  sans  dé- 
tei  miner  de  svmpiomes  prononcés,  ou  au  moins  bien  earartéri- 


CUnONIOliF.  (SYMPT.) 

Sf-s;  puis  loin  à coup  il  .loiim;  lieu  à des  acci.lei.ls  ,lonl  la 
•iiai-c  lie  lapide  ne  larde  pas  à lermiuer  l’exislence. 

Qnalncme  Jonne.  — Le  ramollissement  ne  délennine  aucun 
sympiome  appiéciable  : la  mort  arrive  par  une  circonstance 
etranfrère  A lui,  et  avant  que  rien  ait  pu  faire  soupçonner  son 
existence.  [Ramollissement  latent.) 

lel  est  l’ordre  dans  lequel  je  ranfrerai  les  observations  de 
ramollissement  chronique  qui  vont  être  rapportées  dans  les 
pages  suivantes  : on  voit  qu’il  est  subordcmié  à la  manière 
dont  la  maladie  s’est  comportée  dans  ses  premières  périodes. 
J ai  cru  devoir  l’adopter,  parce  que  c’est  là  ce  qui  constitue  et 
les  différences  les  plus  tranchées,  et  les  analogies  les  plus  rap- 
prochées qui  peuvent  exister  entre  ces  faits  ; enfin,  parce  que  je 
n ai  pu  trouver  de  méthode  plus  naturelle  pour  les  classer. 

Piien  déplus  variable  que  la  durée  du  ramollissement  chro- 
nique : aucune  limite  ne  peut  lui  être  fixée,  depuis  un  ou  deux 
mois  jusqu  a un  grand  nombre  d’années.  Plusieurs  ramollisse- 
ments anciens,  trouvés  sur  des  cadavres,  dataient,  d’après  des 
renseignements  certains,  de  plus  de  trente  ans.  Beaucoup  d’u- 
/ropAie.f  prétendues  du  cerveau,  non  congénitales,  rencontrées 
sur  des  individus  adultes  ou  avancés  en  lîge,  ne  sont  autre  chose 
que  des  lamollissements  survenus  dans  l’enfance,  spontanément 
ou  par  suite  de  causes  externes. 

A^oici  seulement  ce  qui  peut  être  établi  d’une  manière  gé- 
nérale. 


Loisqu  un  ramollisâomcnt  passant  à l’état  cbronifjue  fait  des 
piogies  incessants  jusqu’à  la  mort , et  que  celle-ci  paraît  surve- 
nir sous  son  influence,  il  est  très-rare  que  la  vie  se  prolonge  plus 
d’une  année.  Mais  lorsque,  ce  qui  est  si  commun,  le  ramollisse- 
ment parvenu  à une  certaine  époque  ne  fait  plus  que  des 
progrès  très-lents  ou  presque  nuis,  et  ne  semble  exercer  pres- 
que aucun  influence  sur  le  reste  de  l’organisation,  il  est  fort 
rare  que  la  mort  survienne  par  son  fait  ; elle  est  due  presque 
toujours  à quelque  circonstance  fortuite,  à une  complication 
développée  dans  un  autre  point  de  l’économie  , ordinairement 
une  pneumonie,  chez  les  vieillards,  ou  dans  le  cerveau  lui- 
nirme,  ainsi  un  ramollissement  aigu. 

Je  regarde  donc  comme  tout  à fait  inutile  de  présenter  ici 
un  tableau  de  l’àge  des  ramollissements  que  j’ai  ob.servé.s.  parce 


rnKMJlilUi  l'UiiMJi. 


que  ce  ii’ost  que  dans  le  |das  petit  noiubre  des  cas,  que  ces 
cliillres  nous  iiidiqueiaicut  la  durée  exacte  du  rainollissenietil 
lui-même. 


ARTICLE  TROlSlÈiVlE. 

0BSERVAT10;^S. 

§ !'■.  Pieiiiièrc  lornie  du  ramollissement  chronique.  — îlamollisscmeut 
marchant  i>ar  degrés  successifs. 

Rieu  n’est  plus  difficile  que  de  tracer  avec  exactitude  l’iiistoire 
de  cette  forme  du  ramollissement;  cardiaque  cas  presque  se  pré- 
sente sous  un  aspect  particulier,  chacun  des  symptômes  du  ra- 
mollissement pouvant  manquer  à son  tour^  et  son  absence  ou 
sa  présence  donner  lieu  à un  grand  nombre  de  combinaisons 
dillérentes.  Nous  aurions,  si  nous  voulions  ne  rien  passer  sous 
silence,  à faire  connaître  une  foule  de  nuances,  depuis  les  cas  où 
tous  les  signes  du  ramollissement  se  trouvent  réunis  ensemble, 
justpi’à  ceux  où  la  maladie  n’est  plus  caractérisée  que  iiar  l’hé- 
bétude, la  paralysie  de  la  langue Je  me  contenterai  de  si- 

gnalei  les  cas  les  plus  tranches,  les  mieux  propres  à servir  de 
types. 

Commençons  par  ceux  où  les  symptômes  se  montrent  aussi 
complets  que  possible. 

Des  malades,  ordinairement  d’un  câge  assez  avancé,  commen- 
cent par  se  plaindre  de  malaise,  d’engourdissements  dans  la 
lète,  puis  de  céphalalgie,  quelquefois  générale,  le  plus  souvent 
frontale,  rarement  limitée  à un  côté  de  la  tête  ; cela  s’accompa- 
gne de  vertiges,  d’étourdissements,  quelquefois  assez  forts  pour 
occasioner  des  chutes,  même  des  pertes  de  connaissance.  Cet 
état  peut  durer  des  années  entières  ; quelquefois  , au  bout  de 
plusieurs  mois  , de  plusieurs  jours  seulement  , surviounent  de 
nouveaux  symptômes  et  plus  caractéristiques. 

Les  malades  accusent  des  engourdissements  à l’extrémité  des 
membres,  dans  les  doigts,  des  picotements  à la  peau,  comme  si 
des  lournus  couraient  à sa  surface;  ces  phénomènes  ne  se  mon- 
trent ordiuaircmcnt  ((ue  d’un  côté  du  corps.  Ils  peuvent  precé- 


OOl  HA.MOLLlSSIi.\lEJ\X  CiUlOiMQJLiE.  (SiiMPX.) 

cler  la  céphalaljwie  ou  se  moutrei'  en  même  temps  qu’elle.  On 
peut  dire  que  presque  toujours  la  céphalalgie  et  les  engourdis- 
sements précèdent  et  annoncent  le  ramollissement,  lorsque  ce- 
lui-ci débute  graduellement  ; mais  ces  deux  ordres  de  symptô- 
mes manquent  fort  souvent , soit  comme  prodromes  , soit  sur- 
tout comme  symptômes  du  début,  lorsque  la  maladie  détermine 
dès  le  commencement  des  accidents  brusques  et  rapides. 

Ce  que  je  dis  ici  de  cette  forme  de  ramollissement,  que  l’on 
pourrait  appeler  primitivement  chronique,  nous  l’avons  déjà 
remarqué  à propos  du  ramollissement  aigu , où  nous  avons  vu 
que  la  céphalalgie  et  les  engourdissements  manquaient  très-ha- 
bituellement dans  la  forme  apoplectique.  C’est  encore  au  ra- 
mollissement graduel  qu’est  particulièrement  applicable  cette 
proposition  précédemment  émise  : qu’il  est  généralement  im- 
possible de  distinguer  l’instant  où  le  ramollissement  de  la  pulpe 
nerveuse  vient  à succéder  à la  congestion  cjui  l’a  toujours  pré- 
cédé. Ainsi  cette  céphalalgie,  ces  engourdissements  dont  je 
viens  de  parler,  peuvent  exister  pendant  longtemps,  sans  re- 
connaître d’autre  cause  qu’un  état  do  congestion  lente,  habi- 
tuelle, ou  des  congestions  répétées  du  cerveau  ; d’un  autre  côté , 
de  tels  symptômes  peuvent  exister  comme  unique  manifestation 
de  ramollissements  déjà  formés  , et  dont  le  développement  gra- 
duel avait  pu  ne  pas  entraîner  d’accidents  plus  graves. 

Ceci  bien  entendu,  continuons  la  description  que  nous  avons 
commencée. 

Aux  engourdissements  succède,  à une  époque  variable,  la 
faiblesse  des  membres  : la  jambe  se  traîne  dans  la  marche;  la 
main  laisse  tomber  par  instants  les  objets  même  les  plus  légers. 
Une  femme  qui  présentait,  depuis  un  certain  temps,  des  symp- 
tômes de  ce  genre,  prélude.s  d’accidents  plus  graves  et  mieux 
caractérisés,  pouvait  encore  travailler  ; mais,  de  temps  en  temps, 
l’aiguille  lui  tombait  des  doigts,  ceux-ci  demeuraient  plusieurs 
instants,  un  quart  d’heure,  une  demi-heure  au  plus,  immobi- 
les, comme  morts,  puis  ils  reprenaient  leur  activité,  et  elle  se 

remettait  à l’ouvrage.  Souvent , à cette  époque,  la  main  éprouve 
de  la  dillicullé  ou  même  de  l’impossibilité  à sc  fermer  ; chose 
remarquable,  il  arrive  souvent  qu’elle  ne  parvienne  à se  fermer 
que  lorsque  sa  face  palmaire  sent  le  contact  d un  corps  étranger 
autour  duquel  les  doigts  viennent  se  serrer,  tandis  qu  ils  de- 


X'IlIiMlEHE  l'ÜllAIE.  835 

Jiieurent  fixement  immobiles  , dès  que  ce  corps  est  retiré. 
M.  Marshall  Hall  a également  observé  ce  phénomène  et  en  a 
donné  Texplication. 

Dans  certains  cas,  à cette  faiblesse  vient  se  joindre  la  con- 
tracture, se  montrant  taniôt  aux  doigts,  tantôt  au  coude,  s’éten- 
dant, au  bout  d’un  certain  temps,  à tout  un  côté  du  corps  ; sou- 
vent intermittente  avant  d’être  continue;  n’attendant  pas  tou- 
jours, comme  dans  le  ramollissement  aigu,  que  la  motilité  soit 
profondément  altérée. 

En  meme  temps,  la  face  se  dévie  du  côté  opposé  à la  paraly- 
sie ou  du  cote  correspondant,  en  participant  à la  contracture  des 
membres.  L œil  de  ce  cote  perd  quelquefois  la  faculté  de  se 
fermer;  il  demeure  entr’ouvert,  et  la  conjonctive  oculaire, 
sans  cesse  en  contact  avec  l’air,  s’enflamme.  Si  l’on  joint  à cela 
un  air  d bebetude  , d’étonnement  et  d’indifférence  tout  parti- 
culier, et  surtout  à une  époque  avancée,  des  pleurs,  des  sanglots 
survenant  sans  motif,  on  aura  une  physionomie  qui  suffit  géné- 
ralement, a elle  seule,  pour  caractériser  le  ramollissement. 

Dès  les  premiers  accidents  , en  général,  la  mémoire  a com- 
mencé à s’altérer,  le  jugement  à perdre  de  sa  sûreté,  les  idées  à 
se  confondre  dans  l’esprit.  Cet  affaiblissenrent  des  facultés  suit 
une  marche  graduelle , en  rapport  avec  le  développement  des 
autres  symptômes,  favorisé  encore  par  l’obtusion  des  sens  ; la 
vue  sè  trouble,  le  toucher  s’émousse.  La  parole  s’embarrasse  en 
même  temps,  soit  par  oubli  des  mots,  soit  par  gêne  de  la  langue; 

elle  se  ralentit  et  prend  un  caractère  de  monotonie  tout  particu- 
lier. 

A une  époque  plus  éloignée  encore,  la  paralysie  du  mouve- 
ment devient  complète  et  peut  s’accompagner  d’une  anesthésie 
absolue.  La  contracture  devient  souvent  extrême , et  ce  n’est 
qu’aux  derniers  jours  de  la  vie  qu’elle  fait  place  à la  résolution. 
La  céphalalgie  diminue  ordinairement  alors,  mais  les  membres 
peuvent  rester  le  siège  de  douleurs  vives,  d’élancements  insup- 
portables. ^ 

L affaiblissement  de  l’intelligence  amène  quelquefois  à un 
idiotisme  complet , bien  que,  dans  cerlains  cas,  on  voie  les  fa- 
cultés intellectuelles  demeurer  intactes  au  milieu  de  l’abolition 
generale  des  fonctions  cérébrales.  Les  malades  perdent  la  fa- 
culté de  retenir  l’urine  et  les  matières  fécales  ; ils  tombent  dans 


RA.MüLL1SSE_MEWT  cmvOûlQUE.  (hVAll'X.) 

le  marasme  et  succombent  ordhiaivement  avec  d’énormes  es- 
chares au  siège  et  souvent  une  pneumonie,  soit  hypostalifiue  , 
soit  intercurrente. 

Les  symptômes  du  ramollissement  ne  se  montrent  pas  tou- 
jours ainsi  au  complet. 

Quelquefois  les  mouvements  sont  à peine  altérés  , ou  l’intel- 
lig-ence  ne  subit  aucune  modification,  ou  la  sensibilité  demeure 
intacte.  Chez  quelques  individus,  les  facultés  intellectuelles 
sont  seules  lésées  ; tels  sont  certains  aliénés  dont  les  mouve- 
ments et  la  parole  n’ont  jamais  subi  la  moindre  atteinte;  des 
vieillards  affectes  de  démence  sénile,  souvent  considérés  comme 
en  enfance,  et  n’offrant  avec  cela  qu'’une  faiblesse  générale  des 
membres  que  l’on  attribue  volontiers  aux  progrès  de  l’âge;  les 
douleurs  dans  les  membres  et  dans  la  tête  manquent  souvent; 
quelquefois  les  effets  de  la  maladie  semblent  se  circonscrire 
ilans  un  ou  deux  rneml)res  qui  s’engourdissent  et  s’affaiblissent 
peu  à peu,  sans  qu’aucun  autre  point  du  corps  participe  à ce 
trouble  fonctionnel...  Il  serait  trop  long  d’insister  sur  ces  va- 
riétés, dont  je  vais  présenter  quelques  exemples. 


ÜBsEKVATiON  87.' — Céphalalgie;  affaiblissement,  iiiouvcineiits  in- 
volontaires et  engourdissenionts  dans  les  membres  du  côté  droit;  lé- 
gère modification  dans  la  parole. 

Langer,  âgée  de  soixante-huit  ans,  domestique,  entra  à l’in- 
lirmerie  au  mois  d’avril  1839,  pour  une  indisposition  passagère. 
M'étant  aperçu  de  l’existence  de  symptômes  cérébraux  pronon- 
cés, mais  dont  elle  ne  se  plaignait  pas,  je  l’examinai  et  je  l’in- 
terrogeai dans  ce  sens. 

Elle  me  raconta  que  depuis  plusieurs  années  elle  elait  sujette 
à de  la  céphalalgie,  à des  étourdissements  assez  forts  pour  qu’il 
lui  fallût  quelquefois  s’appuyer  de  peur  de  tomber  (1),  acci- 
dents qu’une  saignée  avait  notablement  diminués,  lorsqu  il  y a 
deux  ans,  assistant  à une  fête  publique  au  champ  de  Mars 
(1837),  elle  se  trouva  enveloppée  dans  une  foule  considérable  ; 
son  sein  droit  fut  meurtri , elle  eut  une  vive  frayeur.  On  se 

(I)  Celle  femme  , .sans  enfants , a\ail  cesse  d être  réglée  à irenle-deux 
au.s,  sans  que  su  sanie  eùl  paru  alors  eu  éprouver  aucune  alleiulc. 


l'UEMaili-E  fülVME. 


337 


rap]>clle  sans  cloule  les  malheurs  qui  sont  arrivés  àceUe’époqiic. 

Quelques  jours  après,  elle  commença  à se  trouver  aH'cclée 
d’un  tremblement  du  bras  et  de  la  jambe  droite;  ce  tremble- 
ment, d’abord  faible  et  passager,  devint  ensuite  continu,  beau- 
coup plus  fort  et  très-incommode.  ÎMaintenant  ces  membres 
sont  lourds  et  affaiblis;  la  malade  peut  marcher,  mais  souvent 
elle  sent  scs  jambes  fléchir  sous  elle,  et  elle  tomberait  si  elle  ne 
pouvait  s’appuyer.  Elle  se  sert  de  la  main  droite  pour  ses  ac- 
tions ordinaires,  mais  elle  est  lourde  et  se  fatigue  du  moindre 
poids.  L’annulaire  et  le  médius  sont  particulièrement  faibles; 
il  arrive  souvent  qu’ils  se  rapprochent  l’un  de  l’autre,  et  de- 
meurent forcément  accolés.  Le  soir,  cjuand  elle  veut  s’endor- 
mir, le  tremblement  des  niembres  devient  ordinairement  plus 
fort.  Souvent  mèinp  sa  jambe  est  soulevée  par  des  mouvements 
spasmodiques  : alors  elle  est  obligée  de  se  coucher  sur  le  coté 
droit  et  de  presser  fortement  la  jambe  droite  avec  la  gauche. 
Le  bras  droit  n’a  jamais  éprouvé  de  ces  secousses.  Elle  ne  res- 
sent pas  de  douleurs  dans  les  membres;  il  y a seulement  une 
sensation  d’engourdissement  dans  les  extrémités,  mais  faible  et 
sans  fourmillements. 

La  sensibilité  est  notablement  diminuée  du  côté  droit  : ou 
peut  pincer  assez  fortement  la  peau  sans  cjue  la  malade  témoigne 
de  souffrance,  tandis  que  l’autre  côté  sent  très-vivement;  quand 
on  chatouille  la  plante  dos  pieds,  la  jambe  droite  se  retire  beau- 
coup plus  lentement  et  moins  loin  que  la  gauche. 

La  face  et  la  langue  ne  sont  point  déviées.  Les  yeux  sont 
égaux,  les  sens  également  conservés  des  deux  côtés. 

Les  étourdissements  sont  rares  maintenant.  Il  y a de  la  cé- 
phalalgie frontale,  mais  supportable  ; plus  vive  depuis  quelque 
temps.  Depuis  plusieurs  jours,  elle  éprouve  uu  peu  de  difllculté 
à s’exprimer.  Elle  ne  ressent  aucune  altération  dans  ses  facultés, 
sa  mémoire.  Elle  donne  avec  assez  de  précision  les  renseigne- 
ments qu’on  lui  demande,  et  son  intelligence  paraît  à peu  près 
semblable  à celle  des  personnes  de  son  âge  et  de  sa  condition. 

On  ne  fil  aucun  traitement  à cette  femme  et  elle  quitta  bien- 
tôt rinfirmcrie.  Je  la  revis  quatre  mois  après. 

L’état  des  membres  était  à peu  près  le  même,  seulement  le 
tremblement  était  beaucoup  plus  prononcé  et  commençait  à 
gagner  le  côté  gauche  ; il  y avait  des  picotements  et  des  eneour- 

22 


'JOO  HA.MOLUSSEJ\4T.I\ï  CDKUJNK^UE.  (SYAUT.j 

dissemeuts  dans  les  deux  membres  inférieurs;  mais  la  face  était 
profondément  altérée,  jaunâtre,  exprimant  la  souffrance,  l’in- 
quiétude,  le  regard  étonné  ; il  n’y  avait  pas  de  déviation  de  la 
lace,  et  les  moiivcments  de  la  langue  étaient  bien  libres.  La  parole 
sans  etre  gênée,  était  lente,  traînante,  et  avait  un  caractère  de 
monotonie  tout  particulier,  chaque  phrase  retombant  sur  le 
même  ton,  comme  un  enfant  qui  récite  une  leçon  ; caractère 
loit  in)portant,  et  qui,  dans  plus  d’une  occasion,  m’a  mis  sur  la 
voie  d’un  ramollissement  chronique  ; je  n’avais  rien  remarqué 
de  semblable  à mon  premier  examen.  La  céphalalgie  était  de- 
venue continuelle  et  plus  vive  , occupant  toute  la  partie  anté- 
lieuie  et  supérieure  de  la  tete.  La  sensibilité  cutanée  n’avait  pas 
nottdjlement  diminue.  La  malade  était  devenue  depuis  quelque 
temps  très-mélancolique,  d une  exlrêine  susceptibilité,  d’une 
impatience,  qu’oii  n’avait  jamais  remarquée  chez  elle.  Elle 
disait  elle-même  que  par  instants  elle  n’avait  plus  la  tête  à elle. 


Celte  observation  présente  plusieurs  circonstances  qui  ne  sont 
pas  très-communes  ; ainsi  le  tremblement  dcsmomhres,  les 
mouvements  spasmodiques.  Ces  mouvements  involontaires  se 
rencontrent  plus  souvent  dans  les  maladies  de  la  moelle  que 
dans  celles  du  cerveau  : je  soigne  cependant  en  ville,  dans  ce 
moment,  une  femme  âgée  de  48  ans  et  qui  a présenté  cette  par- 
ticularité d’une  façon  très-prononcée.  Il  y a maintenant  chez 
elle  , paralysie  complète  du  bras  gauche  , incomplète  de  la 
jambe  ; il  y a eu  de  fréquents  étourdissements,  de  la  céphalal- 
gie , troubles  de  l’intelligence  , de  la  parole  , douleurs  dans  les 
membres...  enfin  tous  les  signes  du  ramollissement.  Il  y a quel- 
que temps,  avant  l’invasion  graduelle  de  l’hémiplégie,  il  surve- 
nait de  temps  en  ten\ps  des  mouvements  involontaires  très- 
énergiques  des  membres  gauches;  cela  lui  a pris  deux  ou  trois 
fois  dans  la  rue,  et  on  croyait  qu’elle  était  épileptique.  Quant 
au  tremblement,  on  l’observe  rarement  ainsi,  au  début  delà 
maladie;  mais  il  n’en  est  plus  de  même  à une  époque  avancée, 
ün  rencontre  assez  souvent  de  vieux  hémiplégiques  affectés  de 
tremblements  continuels  dans  leurs  membres  paralysés  : on  peut 
être  sûr  que  leur  paralysie  résulte  d’un  ramollissement  et  non 
pas  d’un  foyer  hémorrhagique,  ün  a vu  , dans  l’observation  de 


l’UILMlliUJÎ  l'üll-Mli. 


33n 


Langer  , que  de  temps  en  temps  le  médius  et  l’annulaire  Se 
rapprochaient  l’un  de  l’autre,  et  demeuraient  pendant  quelque 
temps  invinciblement  accoles.  Le  sujet  de  la  huitième  ob- 
servation de  M.  Andral  présentait  quelque  chose  de  semblable  : 
de  temps  en  temjis  le  petit  doigt  et  1 annulaire  de  la  main  gau- 
che se  portaient  avec  force,  sans  que  la  volonté  put  1 empêcher, 
vers  la  paume  de  la  main.  Cette  contracture  partielle  duiait  de- 
puis un  quart  d’heure  jusqu’à  deux  heuies,  puis  elle  cessait. 

Observation  SB.  — Faiblesse  graduelle,  engourdissements,  insensi- 
bilité de  tout  le  côté  gauche  du  corps.  Céphalalgie  intense  depuis 
longtemps.  A une  époque  plus  avancée,  engourdissements  et  louimil- 
lements  du  côté  droit. 

La  nommée  Picard , âgee  de  66  ans,  petite,  d un  embonpoint 
médiocre,  marchanrie,  sujette  pendant  toute  sa  vie  aux  rhumes 
et  ayant  à plusieurs  reprises  craché  du  sang,  entra,  au  mois  d’a- 
vril 1839,  à l’infirmerie,  pour  une  oppression  considérable  et 
une  vive  douleur  à la  région  précordiale.  Ces  accidents,  survenus 
à la  suite  d’une  forte  contrariété  et  non  accompagnés  de  fièvre,  ne 
purent  être  expliqués  par  l’auscultation  ; on  les  considéra  comme 
nerveux.  Ils  se  dissipèrent  au  bout  de  peu  de  jours.  Il  y avait 
en  outre  un  catarrhe  pulmonaire  léger.  Cette  femme  avait  une 
hémiplégie  incomplète  à gauche  et  une  violente  céphalalgie. 
Elle  me  donna  les  détails  suivants. 

A l’âge  de  40  ans,  huit  jours  après  être  accouchée,  elle 
éprouva  une  frayeur  vive,  et  ses  règles  ne  reparurent  plus  dé- 
sormais. lîlle  commença  dès  cette  époque  à devenir  sujette  aux 
étourdissements,  à la  céphalalgie,  aux  pertes  de  connaissance; 
il  fallut  la  saigner  souvent.  Elle  ne  paraissait  avoir  éprouvé  jus- 
qu’alors aucun  trouble  du  côté  de  l’intelligence  , des  mouve- 
ments de  la  langue,  des  membres,  lorsqu’il  y a quatre  mois,  à 
la  suite  d’une  grande  frayeur,  elle  éprouva  un  étourdissement 
et  se  laissa  rouler  du  haut  en  bas  d’un  escalier;  elle  demeura 
longtemps  sans  connaissance;  Use  fit  une  plaie  au  cuir  chevelu 
du  coté  droit. 

Depuis  cette  époque,  la  céphalalgie  qui  jusqu’alors  ne  se 
montrait  (juc  par  intervalles,  est  conLinue  ; par  instants  cllo  est 
assez  lorte  pour  lui  arracher  de  ;;rands  i ri.s  , surtout  dans  les 
temps  chauds  ou  à l'approche  de  la  pluie.  Elle  a Inujour.s  son 


KAiMOLLlSSEMJiJNX  CUUÜJdQtE.  (sYMPT.) 

Sié{;e  a droite  et  s’accotnpa',nie  souvent  de  batteineuls  doulou- 
reux. Il  e.st survenu  eu  même  temps  une  faiblesse  toujours  crois- 
sante du  côtêgaucbe  du  corps,  la  bouche  s’est  un  peu  déviée  à 
droite.  Elle  a beaucoup  de  peine  à se  servir  de  son  bras; 
il  lui  est  impo.ssible  de  .soulever  une  tasse  vide;  si  elle  cliercbe 
à vous  serrer  lamain,  sesdoigts  refusentde  se  plier.  Cependant  il 
lui  est  encore  possible  de  tricoter.  La  jambe  gauche  est  lourde 
traîne  en  mardiant  ; Picard  ne  peut  même  faire  que  quelques 
pas  sans  béquilles. 

^ Les  membrcsgauches  sont  égalenient  le  sié.ge  de  picotements, 
d engourdissements,  même  de  douleurs  vives  , surtout  lorsque 
le  temps  change  : alors  la  faiblesse  augmente  sensiblement.  11 
lui  arrive  également  alors  de  ne  plus  sentir  sa  main  et  .souvent 
dans  de  telles  circonstances  elle  éprouve  comme  un  monvernent 
île  rétraction  des  bras  en  arrière,  auquel  elle  ne  peut  s’opposer. 
Depuis  ([uelque  tcmp.s;  le  bras  commence  à ressentir  des  engour- 
dissements et  des  fourmillemenls.  Depuis  deux  mois  elle  pré- 
sente en  outre  un  tremblement  léger  de  la  tête  et  des  membres, 
surloul  à gauebe.  Les  sens  et  les  fonctions  digestives  paraissent 
en  bon  état.  La  vue  en  particulier  est  lionne;  les  pupilles  sont 
égales  et  moyennement  dilatées.  L’intelligence  paraît  bien  con- 
servée, la  méinoii  c assez  nette;  seulement  Picard  dit  que  par 
instants  elle  se  trouve  béliêlêc. 

Ces  notes  ont  été  prises  au  mois  d’avril  185S.  Au  mois  d’oc- 
tobre, j’eus  occ.ision  d’examiner  cette  femme;  je  ne  remarquai 
chez  elle  aucun  changement  digne  d’être  noté. 

Au  mois  de  juin  1839,  elle  revint  à l’infirmerie  pour  une  en- 
térite assez  grave  qui  nécessita  plusieurs  applications  de  sang- 
sues. Ou  négligea  alors  d’examiner  l’état  de  ses  fonctions  céré-- 
luales,  dont  elle  se  jilaignait  peu. 

J’ai  été  visi'er  cette  femme  dans  son  dortoir,  le  7 août  1839, 
c’est-à-dire  16  mois  api  ès  l’époque  où  avaient  été  recueillies  les 
notes  précédentes.  Je  la  trouvai  dans  l’état  suivant: 

l''mbon[)oint  passable,  physionomie  assez  gaie  ; un  peu  de  pâ- 
leur de  la  face,  céphalalgie  occupant  spécialement  le  coté  droit, 
plus  supportable  qu’auti  efois,  as.sez  vive  encore  par  intervalles. 
La  bouche  est  nu  peu  déviée  à droite.  Les  pupilles  d’un  dia- 
mètre normal,  égales,  nettes.  Lieu  coiUraeliles.  Depuis  quelque 
temps  la  vue  ml  allaihlie  du  eolég.auche.  L’ouie  est  assez  hoiinc. 


l.f’s  mPiH lires  sont  nfleclés  de  ireiid,ileinpii(s  font  muels,  sni  innt 
reuxdii  loté  gniulie;  la  malade  ne  peut  se  servir  de  ses  mains 
qu’en  appuyanl  ses  avant-bras  sur  sa  ceinture,  ce  qui  leur  donne 
un  point  d’appui.  C’est  ainsi  qu’elle  parvient  à tricoter  et  a 
porter,  mais  avec  beaucoup  de  peine,  sacuillerà  sa  bouclie.  Les 
mouvements  sont  fjénéraleinent  affaiblis,  lourds  et  paresseux  , 
mais  surtout  à gauche.  Cependant  la  main  gauclie  peut  serrer 
un  peu  ; la  malade  fait  quelques  pas  sans  appui  ; elle  peut  des- 
cendre et  monter  un  escalier  assez  cleve.  Il  y a parfois  des  mou- 
vements involontaires  dans  les  membres,  surtout  à gauclie.  Elle 
est  un  peu  courbée. 

Toute  la  surface  du  corps,  les  nicndjres,  le  tronc,  la  face  sont 
le  siège  de  picotements  tout  à fait  semblables  à des  piqûres 
d’aiguilles,  et  qui  empêchent  souvent  Picard  dedormir  de  toute 
la  nuit.  Elle  éprouve  encore  souvent  des  douleurs  vives  dans  les 
deux  épaules  et  des  crampes  douloureuses  dans  les  membres  : 
c’est  là  son  plus  grand  mal  -,  ces  phénomènes  sont  presque  aussi 
prononcés  à droite  eju’à  gauche.  Il  y a encore  de  l’engourdis- 
sement dans  les  mains  ; Picard  est  souvent  obligée  de  les  frotter 
l’une  contre  l’autre.  Elle  n’a  jamais  remarqué  de  raideur  dans 
ses  articulations. 

La  sensibilité  est  abolie  dans  tout  le  coté  gauche  du  corps.  La 
malade  ne  sent  pas  quand  on  la  pince.  Une  piqûre  d’épin.gle 
profonde  est  à peine  perçue.  A la  face,  au  col , à la  poitrine, 
celte  insensibilité  s’arrête  avec  une  précision  remarquable  .sur  la 
ligne  médiane.  Le  nez  sctdement  ainsi  que  la  langue  est  insen- 
sible sur  toute  sa  surface.  On  peut  pas.ser  le  doigt  sur  la  con- 
jonctive gauche  .sans  qu’idle  le  sente  à peine  , loucher  les  cils 
sans  faire  à peine  mouvoir  les  paupières,  f^a  pituitaire  est  tout 
à fait  insensible  au  toucher  à gauche.  La  sensibilité  est  conser- 
vée partout  à droite.  Le  côté  droit  de  la  face  est  le  siège  de  dé- 
mangeaisons trè.s-vivcs,  bien  qu’il  n’y  ait  aucune  rougeur. 

Les  mouvements  de  la  langue  ne  paraissent  pas  sensiblement 
gênés,  si  ce  n’est  pour  la  parole  ; de  temps  en  temps  elle  paraît  se 
refuser  à ai  liculer.  La  parole,  toujours  assez  dilbcilc,  est  cepen- 
dant assez  distincte;  elle  est  très-monotone. 

L’intelligence  paraît  intacte.  La  malade  rend  parfaitement 
compte  de  ses  sensations.  Elle  trouve  qu’il  y a,  depuis  quelques 
mois,  une  amelioration  notable  dans  la  motilité  des  membres 


K A\IOI.T.TSSK^rP.^T  CHP0NI01IF..(SYMPT.) 

^anches  ; mais  il  n’en  est  pas  de  même  pour  les  antres  fonr- 
iions. 

Cette  observation,  assez  semblable,  sous  plusieurs  rapports,  à 
la  précédente,  nousa  permis,  comme  elle,  de  suivre  la  marche 
du  ramollissement  pendant  un  temps  assez  long.  Une  des  par- 
ticularités les  plus  remarquables  que  nous  a offerte  cette  étude, 
a été  de  voir  les  symptômes,  d’abord  bornés  à un  côté  du 
corps,  envahir  au  bout  d’un  certain  temps  le  côté  opposé.  Cela 
tient  sans  doute  à ce  que  le  ramollissement  a également  atteint 
l’autre  hémisphère.  Je  signalerai  plusieurs  autres  points  : l’in- 
lluence  de  l’état  de  l’atmosphère  sur  la  céphalalgie  et  les  autres 
troubles  de  la  sen.sibilité  ; ce  léger  retour  des  mouvements  dans 
le  côté  gauche,  eu  même  temps  que  la  maladie  paraissait  .s’é- 
tendre au  reste  du  corps,  et  au  contraire,  celte  anesthésie  deve- 
nue si  profonde  et  si  bien  limitée  à une  moitié  du  corps  ; la  con- 
servation des  facultés  de  l’intelligence,  au  milieu  du  trouble  de 
tant  de  fonctions.  Enfin  j’ajouterai  que  je  ne  doute  pas  qu’en 
ville  on  n’eiit  pu  à l’aide  d’un  traitement  rationnel  et  attentif, 
amoindrir  beaucoup,  sinon  arrêter,  des  accidents  aussi  lents  et 
graduels  dans  leur  développement  : mais  il  est  habituellement 
difficile  d’obtenir  des  indigents,  dans  les  hospices,  de  se  soumet- 
tre à des  traitements,  dont  ils  sentent  souvent  à peine  le  besoin  et 
dont  ils  ne  comprennent  presque  jamais  rutililé. 

Observation  89.  — Paralysie  et  contracture  apparaissant  grailuelie- 
nient  dans  les  quatre  membres.  — Ramoliissenient  des  lobes  anté 
rieurs  des  deux  hémisphères. 

La  femme  Membre,- âgée  de  soixante-seize  ans  , bien  conser- 
vée, active,  et  prise  d’une  céphalalgie  violente,  de  douleurs,  de 
fourmillements  dans  la  main  gauche,  dans  l’avaut-bras  du  même 
côté.  Bientôt  la  jambe  gauche  devint  le  siège  des  mêmes  symp- 
tômes, puis  la  main  droite  et  la  jambe  droite;  mais  la  douleur 
et  les  fourmillements  ont  toujours  été  plus  prononcés  du  côté 
gauche  du  corps  que  du  côté  opposé.  Il  y avait  quelque  temps 
que  ces  symptômes  avaient  commencé  à se  montrer,  lorsque 
l’on  observa  celte  feivime.  Les  traits  de  la  face  étaient  fixes  , la 
langue  embarrassée,  déviée  à droite.  La  sensibilité  générale  et 
l’intelligence  ne  paraissaient  pas  troublées.  Tl  ynvaitalors,  en  ou- 


PREMIJ'-I^E  FOUATE. 


343 


tve,  quehines  troubles  des  fonctions  dij^esUvcs.  line  applicalion 
de  sangsues  au  cou  ne  fut  suivie  d’aucun  résultat  ; la  maladie 
continua  de  faire  des  progrès.  La  douleur  de  tête,  celles  des  mem- 
bres devinrent  plus  vives  ; il  survint  de  la  rétraction  des  mem- 
bres abdominaux,  ainsi  que  des  crampes  dans  les  mollets  , les 
cuisses  et  les  hanches.  Bientôt  les  deux  jambes  furent  paralysées 
complètement.  Il  y eut  aussi  un  peu  de  contracture  dans  es 
bras.  La  parole  se  perdit  , la  face  devint  livide.  La  contracture 
des  jambes  fit  toujours  de  nouveaux  progrès  , celle  des  bras 
restant  au  même  degré;  la  sensibilité  devint  de  plus  en  plus 
obtuse  sans  disparaître  complètement;  enfin  la  malade  expira. 

Autopsie.  — La  dure-mère  est  plus  injectée  que  de  coutume. 
Il  y a de  l’infiltration  entre  l’arachnoïde  et  la  pie-mère. 

La  partie  antérieure  des  deux  hémisphères  est  ramollie;  mais 
le  ramollissement  du  côté  droit  du  cerveau  n’est  pas  borné  à 
la  partie  antérieure  , il  s’étend  aussi  en  haut  et  un  peu  en  ar- 

rière.  ‘ 

Les  poumons  n’olfrent  aucune  altération  profonde.  Le  cœur- 

est  hypertrophié  (1). 


ÜBSERVAïiOîf  90.  — Céphalalgie,  paralysie  graduelle  du  cote  droit 
du  corps,  — Ramollissement  à la  partie  externe  du  corps  strié  gauche. 

Un  homme,  Agé  de  trente  ans  , entra  à l’hôpital  Guy  avec 
une  paralysie  incomplète.  Il  se  plaignait,  depuis  trois  ou  quatic 
mois,  de  douleurs  du  côté  gauche  de  la  tête,  sans  vertiges.  De- 
puis un  mois  juste,  il  avait  une  céphalalgie  violente  qui  1 empê- 
chait de  travailler. 

fl  vint  une  faiblesse  du  côté  droit  ; les  doigts  perdirent  gra- 
duellement le  pouvoir  de  saisir  les  petits, ïorps  ; il  potivail  en- 
core marcher  et  parler. 

A son  entrée  à l’hôpital,  il  se  tenait  debout , mais  sans  pou- 
voir marcher.  Il  avait  perdu  la  parole  la  nuit  précédente;  il 

(t)  Pio.sUm, /oc.  cû.  XVlh  oZi.sc/vo/io«.  Il  ii’y  a aucune  e.<;pèc(j  dédale 
dan.s  celle  oliservalion,  de  sorte  qu’il  e.sl  iinpoïsihie  de  .savoir  conihirn  de 
Icinps  la  maladie  à dure,  cl  la  hrièvêlè  des  (hîinils  aiiatmvil(|ues  ne  nous 
(•claire  pas  sur  ce  point.  CependaiU  j’ai  cru  ilevoir  la  ra|iporler  ici,  par  ce 
(pi’ollc  olïrc  mi  nnxlèle  de  la  l'uriue  du  r.iniolllsscmcul  (juc  iiou':  éi  edion.';, 


<:HRO'irOl;E,  (svHPT.) 

..«  pouvait  . «,|,i,  1, 

• ...a-,  il  a,  t.cula.t  à pcmo  (|uelq„es  monosyllabes.  Il  nessail- 
a t souvent  dans  son  sonnneil.  Les  pupilles  étaient  peu  mobi- 

si  in  P"' i P“‘'la  faible,  à 70  ; pileur.  Pas  de  con- 
stipation. (On  avait  applique  des  sangs., es , des  ventouses  , des 
vesicatoires.  Baser  laide  et  U tenir  fraîche  ; i grains  de  calomel 

par  jour.) 

Les  jours  suivants,  pas  de  selles.  {Calomel  et  coloquinte, 

I •)  grains.)  ' 

^ Quelques  jours  après,  une  oppression  qui  rxislait  auparavant 
.s  accrut  ; la  main  droite  devint  presque  complètement  immo- 

iMle;  il  biullait  souvent , s’assoupit  (pouls  à 96).  {Fentouses  au 
cou.) 


Après  une  légère  amélioration  , il  tomba  dans  un  sommeil 
profond,  avec  stertor,  de  légers  mouvements  convulsifs  des  bras, 
surtout  du  bras  gauche  ; lorsqu’on  les  touchait,  ils  se  contrac- 
taient comme  par  une  secousse  électrique.  Après  beaucoup  d’ex- 
citation, on  lui  faisait  ouvrir  les  yeux,  mais  non  tirer  la  langue. 
Pouls  a 60.  Les  symptômes  augmentèrent,  les  convulsions  sur- 
tout, et  il  mourut  quatorze  jours  après  son  entrée. 

.Autopsie.  Point  d’injection  des  méninges.  Un  peu  de  sé- 
rosité dans  la  pie-mère.  En  enlevant  celle  ci,  on  enlevait  la  sub- 
stance grise  ramollie  , surtout  à la  partie  antérieure  de  l’hémi- 
sphère gauche.  Injection  de  la  substance  médullaire,  qui  la 
rendait  comme  maibrée.  Ramollissement  à la  partie  externe 
rlu  corps  strié,  blanc,  ayant  le  volume  d’un  petit  œuf,  et  occu- 
pant une  partie  de  ce  corps.  Il  s’étendait  jusqu’à  la  scissure  de 
Sylvius,  où  il  y avait  un  peu  de  coloration  rouge.  Artères  très-in- 
durées et  cartilagineuses,  surtout  de  ce  côté  fl). 


Obseiu'atioa'  ()i.  — Alîuihlisscmcnt  graduel  des  facullcs.  Désorgani- 
sation du  corps  strié  droit. 

Un  homme,  âgé  de  quarante  ans,  athlétique,  entra  à riiôpllal 
(*iiy,  le  2l  janvier  l829;  il  ))ortaildes  iraccsd’anciennes blessures 
à la  tête.  Il  y avait  une  faiblesse  générale  du  mouvement  et  de 
l’intelligence,  avec  strabisme  et  double  vision;  la  faiblesse  était 
plus  prononcée  à gauche,  la  démarche  irrégulière,  comme  celle 


(I)  Rriglit,  medical  reporlSj  rase  J.WXlV '''•  . 


TRFAnÈRIÎ  FORME. 


,r„n  l.oin.nR  Ivre,  h face  non  paralysée;  les  urines  invoion- 
Laires,  quelquefois  meme  les  fèces,  depuis  six  semaines.  Les  ré- 
ponses étaient  assez  nettes,  mais  suivies  de  paroles  tout  a fait 
iiicohéi-eiites;  il  s’imaginait  les  clioses  les  plus  étranges.  On  ra- 
conta que,  depuis  un  an,  il  lui  arrivait  parfois  de  tomber  tout  à 
coup,  comme  par  «n  étourdissement  subit  et  passager.  La  fai- 
blesse des  membres  et  de  rintelligence  était  survenue  peu  à peu. 
Il  se  plaignait  habituellement  de  maux  de  tête  et  de  vertiges. 

Les  jours  qui  suivirent  son  entrée  , la  faiblesse  et  1 hébétude 
augmentèrent.  {Sangsues,  -vésicatoires,  hfdrarg.,  sulfate  de 
zinc.) 

Les  mois  suivants,  peu  de  changements.  On  employa  la  a-aZé- 
rinne,  puis  la  noix  'voiiiicjue,  sans  grand  ellet;  il  en  fut  de  meme 


de  Y électricité. 

Le  8 juillet,  il  sembla  plus  hébété  qu'à  l’ordinaire.  {Fentouses 
entre  le.-! épaules.)  Il  s’allàiblit  dès  lors  peu  à peu,  cessa  de  pou- 
voir quitter  le  lit  et  se  soutenir  sur  scs  jambes.  La  déglutition 
devint  fort  difficile;  U se  plaignait  de  souffrir  dans  les  jambes. 
La  mort  survint  le  23  juillet. 

Autopsie.  — Adhérences  entre  les  deux  feuillets  de  l’arach- 
noïde, surtout  à droite,  où  l’on  enlève  avec  la  dure-mère,  non 
seulement  toutes  les  méninges,  mais  encore  la  substance  grise 
qui  les  suit.  Injection  normale  de  la  pie-mère.  Sérosité  épanchée 
entre  les  circonvolutions.  Une  once  de  sérosité  dans  les  ventri- 


cules latéraux.  Sérosité  entre  les  lames  du  septnni. 


Le  corps  strié  droit  était  un  peu  aplati,  jaunâtre,  mou  ; à l’ex- 
térieur, il  était  entièrement  détruit  et  avait  une  apparence  fila- 
mentons,  et  était  infiltré  d’une  sérosité  brunâtre.  (1). 

Bien  que  nous  n’ayons  point  de  renseignements  sur  la  ma- 
nière dont  la  maladie  s’est  développée,  dans  l’observation  sui- 
vante, je  la  place  ici,  parce  qu’elle  a offert  dos  circonstances  trop 
particulières  pour  la  passer  sous  silence. 


Onsi.nvA.TioN  gi.  — Ân’aiblisseiucnt  des  facultés.  Altération  singu- 
lière du  langage.  Point  de  lésion  a|)préciahlo  des  inouveiuents. — Ra 
mollissemcnt  énorme  de  la  partie  externe  et  postérieure  de  1 lu’-mi- 
splicrc  gauclie. 


(t)  P.riglil,  Inr,  cit,,  case  T.XXXV  p.  83. 


RAMOLLISSHMKNT  chroniouk  (syatpt.) 

Pleine  Jnliii  esi  entrée  à la  Salpêtrière,  le  20  janvier  1837, 
tians  letat  que  nous  allons  décrire;  ou  ti’a  aucune  espèce  de 
renseignemenis  sur  ses  antécédents. 

Celte  feinnie,  âgée  de  soixante-seize  ans,  petite,  maigre,  sem- 
blait vivre  tout  eu  elle-même,  sans  s’occuper  jamais  de  ce  qui  se 
passait  autour  d’elle  . passant  des  journées  entières  assise  ou 
couchée,  sans  parler  ni  changer  de  place.  Sa  figure,  non  déviée, 
toujours  sérieuse,  exprimait  un  certain  degré  d’hébétude.  Elle 
ne  paraissait  pas  avoir  beaucoup  de  peine  à prononcer  les  mots, 
et  les  mouvements  de  la  langue  semblaient  assez  libres.  Mais 
son  langage  présentait  une  particularité  fort  bizarre  : lorsqu’elle 
répondait  à une  question,  elle  commençait  bien  , mais,  à peine 
avait  elle  prononcé  quelques  mots,  souvent  une  phra.se,  elle  di- 
sait par  le  cominandement.  Ces  mots  lui  revenaient  inévitable- 
ment à la  bouche,  dès  qu’elle  voulait  parler.  Ainsi  elle  disait  : 
j ai  bien  dormi  par  le  coinmandemenl  ; ou  : je  voudrais  manger 

de  la.  par  le  commandement Elle  ne  semblait  pas,  du  reste, 

s’en  apercevoir,  et  ne  paraissait  en  éprouver  aucune  contrariété  ; 
cependant,  quand  une  fois  elle  avait  prononcé  ce  mot  de  com- 
mandement,  elle  le  répétait  irrésistiblement , sans  pouvoir  aller 
plus  loin.  On  n’a  jamais  su  l’origine  de  cette  singularité  , et  il 
était  inutile  de  le  demander  à sa  faible  intelligence. 

Pendant  les  deux  années  que  celte  femme  a pas.sées  à la  Sal- 
pêtrière, elle  n’a  présenté  aucune  modification  appréciable  dans 
son  état. 

Le  mouvement  paraissait  intact , faible  seulement  , mais 
également  des  deux  côtés.  Cette  femme,  jusqu’aux  derniei-s  jours 
de  sa  vie,  se  levait  et  s’habillait  elle-même,  marchait  sans  canne 
et  d’une  manière  assez  égale. 

Elle  .se  plaignait  souvent  de  la  tête;  de  temps  en  temps  , la 
face  se  colorait  beaucoup  , et  elle  tombait  dans  un  alfaissement 
plus  profond  , dont  on  la  faisait  sortir  avec  peine.  Des  émi.ssions 
sanguines  ou  des  dérivatifs  la  ramenaient  assez  promptement  à 
son  état  naturel.  On  m’a  assuré  qu’elle  éprouvait  , de  temps  à 
autre,  des  altacjues  épileptiformes,  avec  perte  de  connaissance, 
mouvements  convulsifs,  écume  à la  bouche,  évacuations  invo- 
lontaires; mais  je  n’ai  jamais  a.ssisté  à de  semblables  accidents. 
Je  l’ai  seulement  vue  venir  à l’infirmerie,  à plusieurs  reprises. 


PREMlklUi  FORME.  ‘ 

avec  les  symptômes  île  con,o,esüon  cérébrale  dont  je  parlais  loin 

à l’heure.  „ - - 

A la  fm  de  1838,  elle  était  tombée  dans  un  étal  d’Iiébeludo 
assez  complet  ; elle  gâtait  ; cependant  elle  s’habillait  encore  seule, 
mangeait  elle-même,  se  servait  de  ses  deux  mains  et  répétait 
toujours  le  commandement.  Le  11  février  1839  , elle  tomba 
dans  un  coma  profond,  et  mourut  le  lendemain. 

Autopsie.  — La  cavité  de  l’araclinoïde  contient  un  peu  plus 
de  sérosité  qu’il  Ji’est  ordinaire.  La  pie-mère  offre  une  injection 
normale,  avec  peu  de  sérosité  ; ses  vaisseaux,  surtout  ceux  de  la 
base,  sont  ossifiés  ou  couverts  de  plaques  blanches  , denses  et 
opaques. 

Toute  la  partie  externe  du  lobe  postérieur  gauche  et  de  la 
moitié  postérieure  du  lobe  moyen  offre  une  dépression  pio- 
fonde;  la  pie-mère,  à ce  niveau,  n’est  ni  plus  injectee  ni  plus 
épaisse  qu’ailleurs;  mais  lorsqu’on  l’enleve,  on  la  trouve  dou- 
blée, à sa  face  profonde,  d’une  couche  épaisse  d’un  tissu  cellu- 
leux, blanchâtre,  tomenteux , envoyant  de  nombreux  prolon- 
gements dans  la  profondeur  de  l’hemisphere.  Celui-ci , dans 
tout  le  lobe  postérieur  et  une  grande  partie  du  lobe  moyen,  est 
converti  en  un  réseau  de  brides  celluleuses , molles , très-la- 
ches,  blanchâtres , avec  un  reflet  jaunâtre  moins  prononce  pro- 
fondément qu’à  la  superficie,  entrecroisées  en  tous  sens  ; les  in- 
tervalles , assez  larges  , qui  séparent  ce  tissu  fort  raréfié , sont 
remplis  par  un  liquide  blanchâtre,  trouble,  comme  grumeleux. 
Cette  vaste  altération  est , en  outre,  parcourue  par  un  assez 
grand  nombre  de  vaisseaux  injectés,  sinueux,  assez  volumi- 
neux. 

L’infiltration  celluleuse  s’étend  jusqu’à  la  membrane  ventri- 
culaire, dans  toute  l’extrémité  postérieure  du  ventricule,;  celle 
membrane  est  doublée  par  une  couche  lormée  de  plaques  car- 
tilagineuses, dures  , blanches,  d’un  demi-millimètre  d’épais- 
seur, et  qui  lui  donnent,  du  côté  du  ventricule,  l’aspect  rugueux 
et  inégal  de  certaines  aortes. 

Le  ramollissement  n’est  pas  nettement  limité  dans  la  sub- 
.stance  médullaire  ; il  l’est  davantage  à la  superficie;  les  circon- 
volutions qui  ^environnent  présentent  une  couclie  jaune  d’ocre, 
membraniforme,  un  peu  mollasse  (platjues  jaunes),  dans  une 
étendue  de  .3  ou  d millimètres,  puis  deviennent  saines. 


- >M...,.,ssi.-vrR^T  THROviour.  (sYArpT.) 

Ou  trouve  au  (levant  d,.  corps  siru-  gauche  une  peliic  exra- 
val.on,  |rcs-].\gèreiuent  jaunâtre,  pisilonne,  sans  fausse  inem- 
biane;  dans  le  corps  strié  droit,  «ne  petite  cavité  semblable 
tloutles  parois  plus  lisses  sont  parcourues  de  petits  vaisseaux. 

li-es-peu  de  sérosité  dans  les  ventricules  latéraux.  Kien  à 
noter  du  reste. 

Pneumonie  au  premier  degré  du  coté  droit. 

Le  cœur  , plein  de  sang  demi-liquide,  présente  au  pourtour 
de  loriHce  aunculo  - veutriculaire  gauche  un  cercle  osseux 
presque  complet,  avec  racoiiiisscunent  et  sans  doute  insuffisance 
des  valvules  , sans  rétrécissement  apparent.  A part  cela  le 
cœur  paraît  tout  à fait  sain.  ’ 

Plaques  osseuses  et  cartilagineuses  , larges  et  nombreuses,  à 
la  face  interne  de  l’aorte. 


§ II.  Deuxième  foiiiic  du  rainollissement  chronique. — Raniollisseinenl  débu- 
tant subitement.  (Début  apopiectilbrine.  ) 

Lorsque  le  ramollissement  suit  la  marche  que  nous  avons 
décrite  dans  le  chapitre  précédent,  il  semble  souvent  qu’il  soit, 
si  je  puis  m’exprimer  ainsi,  chronique  dès  le  principe;  c’est-à- 
dire  que  ses  progrès  lents  et  graduels  se  confondent  avec  les 
prodromes  ou  les  phénomènes  qui  ont  pu  précéder  son  déve- 
loppement, et  il  est  alors  impossible  d’y  .s.iisir  une  période 
d’acuit(’;. 

il  n’en  est  plus  de  même  dans  la  forme  que  nous  étudions 
maintenant  : ici  les  deux  périodes  du  ramollissement  sont 
bien  nettement  tranchées,  période  aigue  et  période  chronique. 
Nous  n’avons  pas  à nous  occuper  actuellement  des  phéno- 
mènes qui  se  pas.sent  à l’époque  du  début  lui-même  ; nous  les 
avons  sulûsamment  étiuliés  au  chapitie  du  ramollissement 
aigu.  Je  renverrai  également  aux  chapitres  de  l’appréciation 
des  symptômes  et  du  diagnostic  du  raniollis.sement  aigu,  où  j-’ai 
étudié  les  relations  c]ui  peuvent  êtie  saisies  entre  les  lésions 
anatomiques  qui  constituent  ou  accom])agneut  le  ramollisse- 
ment, et  les  synqitômes  soit  primitils , soit  secondaires  delà 
maladie.  Je  vais  seulement  essayer  de  faire  connaître  ce  qui  se 
passe  à une  époque  plus  avancée,  alors  que  le  l'amollissement 
est  décidément  passé  à l’état  chronique,  de  donner  une  idée  de 


;jio 

J’aspect  sous  lequel  se  présentent  les  individus  aiîeclés  d’uni a- 
mollisseinciit  dont  le  début  a été  subit,  apoplectifonne. 

Ici  encore  l’on  peut  observer  les  nuances  les  plus  variées, 
les  phénomènes  les  plus  diflérents.  Prenez  en  nflét  tous  les 
symptômes  dont  la  réunion  forme  en  général  le  tableau  delà 
maladie  à son  début,  et  vous  verrez  que  presque  tous  peuvent 
indifïéremment  ou  persister  ou  disparaître,  ou  subir  telles  ou 
telles  modifications. 

Un  fait  bien  curieux  et  bien  important  à connaître,  c’est  que, 
tandis  que  dans  la  forme  précédente  , les  accidents  suivent  en 
général  une  marche  successivement  croissante,  depuis  le  début 
jusqu’à  la  fin;  dans  la  forme  que  nous  étudions  maintenant, 
on  voit,  au  contraire,  les  accidents  suivre  , après  le  début,  une 
marche  tout  opposée , c’est-à-dire  graduellement  décroissante. 

On  regarde  généralement  la  première  marche  comme  carac- 
téristique du  ramollissement,  et  celte  observation  est  parfaite- 
ment juste.  Mais  on  considère  la  seconde  comme  propre  à 
riiémorrhagic.  à tort , en  ce  sens,  au  moins,  qu’elle  appartient 
également  au  ramollissement.  Si  l’on  y réfléchit,  on  verra 
du  reste  qu’il  n’en  saurait  être  autrement  : car  si  à la  suite  de 
ces  attaques  apoplectiformes  intenses,  par  lesquelles  commence 
si  souvent  le  ramollissement , les  accidents  ne  diminuaient 
pas,  la  mort  surviendrait  infailliblement.  La  première  condi- 
tion pour  que,  dans  les  cas  de  ce  genre,  le  ramollissement  puisse 
passer  à l’état  chronique,  c’est  la  diminution  des  symptômes; 
celte  diminution  s’opère  nécessairement  peu  à peu  , et  l’on  a 
alors  la  marche  de  l’hémorrhagie. 

Dans  certains  cas  , toutes  les  fonctions  frappées  au  début  de 
la  maladie  se  ressentent  indéfiniment  des  atteintes  qu’elles  ont 
subies  ; ainsi  les  membres  restent  paralysés , le  retour  de  la 
connaissance  ne  fait  retrouver  que  des  facultés  plus  ou  moins 
profondément  altérées,  la  parole  demeure  embarrassée  ou 
même  tout  à fait  impos.sible,  les  excrétions  continuent  de  se 
faire  involontairement , enfin  le  malade  végète  misérablement 
sans  que  la  plupart  du  temps  sa  vie  se  prolonge  beaucoup,  bien 
qti’il  ne  soit  pas  impossible  de  vivie  encore  plusieurs  années 
dans  un  état  de  dégradation  aussi  profonde. 

Dans  un  giand  nombre  de  cas  , l’intelligence  , la  parole  re- 
viennent  plus  ou  moins  complètement  , mais  la  paralysie  per- 


.360 


KAMOLLlSSE.MliJNT  CHUONlQUJi.  (SYAIPT.) 

sisle  , au  moins  dans  un  membre , et  rarement  sans  avoir  sul)i 
quelque  diminution.  On  croit  alors  avoir  affaire  à un  foyer 
hémorrhagique.  On  le  croira  bien  plus  encore  lorsque  l’on 
verra,  au  bout  d’un  certain  temps,  à la  résolution  simple  du  dé- 
but , succéder  la  contracture  du  membre  paralysé.  On  dira 
alors  qu’à  l’hémorrhagie  s’est  joint  un  ramollissement  consé- 
cutü.  Il  est  difficile  en  effet,  dans  les  cas  de  ce  genre,  d’éviter 
l’erreur.  Nous  pouvons  affirmer  Cependant  qu’ils  sont  loin 
d’être  rares,  et  nous  en  citerons  où  il  est  incontestable  qu’au- 
cun foyer  hémorrhagique  n’a  pu  exister  à aucune  époque.  Re- 
marquons du  reste  que  ce  sont  les  faits  de  ce  genre  qui  font 
tous  les  jours  attribuer  à des  foyers  hémorrhagiques  , des  lé- 
sions qui  appartiennent  uniquement  et  certainement  au  ra- 
mollissement. 

Les  facultés  de  l’intelligence  et  des  sens  sont  celles  qui  re- 
paraissent le  plus  vite  et  le  plus  complètement , lorsque  les  ac- 
cidents du  début  tendent  à se  dissiper.  Il  faut  bien  s’attendre 
cependant  que  la  mémoire  ne  reprendra  pas  habituellement 
toute  sa  netteté,  que  le  jugement , le  caractère  ne  seront  pas 
toujours  ce  qu’ils  étaient  auparavant. 

Il  est  rare  que  la  parole  demeure  à jamais  abolie  ; mais  il 
est  plus  rare  encore  , peut-être  , qu’elle  reprenne  entièrement 
son  caractère  naturel.  Lors  même  qu’elle  n’est  plus  gênée,  elle 
conserve  toujours  cette  monotonie  que  j’ai  déjà  plusieurs  fois 
indiquée,  et  qui  est  un  signe  si  caractéristique  d’une  lésion  du 
cerveau  et  surtout  d’un  ramollissement. 

La  contracture  des  membres  paralysés  peut  se  montrer  dans 
les  trois  circonstances  suivantes.  Tantôt  elle  existe  dès  le  début 
et  persiste  jusqu’à  la  fin;  tantôt  après  avoir  existé  au  commen- 
cement, elle  disparaît  au  bout  d’un  certain  temps  ; tantôt  en- 
fin elle  vient  à se  montrer  à une  époque  plus  ou  moins  éloi- 
gnée du  début , sans  avoir  paru  de  toute  la  première  période 
de  la  maladie. 

I)e  toutes  les  fonctions  lésées  au  début , le  mouvement  est 
celle  qui  conserve  le  plus  inévitablement  des  traces  de  l’attaque  ; 
cependant  il  arrive  souvent  que  le  malade  reprenne  l’usage  de 
ses  membres,  au  moins  en  partie,  et  peut-être  même  que  tout 
affaÜdisscmenl  disj)araisse.  .le  n’ai  rien  à ajouter  de  particulier 
aux  détails  tlans  lesquels  je  suis  entré  ])réeédcinmenl,  lelaliAe- 


uEu xiiîMi;;  rou mü  . 


.'151 


ment  aux  troubles  divers  de  la  sensibilité  ; ils  peuvent  tous  se 
montrer  , soit  dès  le  début,  soit  à une  époque  plus  avancée, 
avec  toutes  les  variétés  que  j*ai  indiquées  ; douleuis,  engourdis- 
sements , fourmillements  des  membres,  céphalalgie.  Je  ferai 
seulement  remarquer  que  lorsque  le  mouvement  doit  reparaître 
dans  des  membres  paralysés , son  retour  e.st  presque  constam- 
ment annoncé  et  accompagné  par  des  fourmillementsprononcés, 
quelquefois  même  douloureux. 

L’existence  de  ces  douleurs,  fourmillements,  etc.,  est  lort 
importante  pour  le  diagnostic  : elle  annonce  toujours  un  ra- 
mollissement, à moins  que  ces  phénomènes  ne  soient  très-peu 
prononcés.  Lorsque  le  malade  les  accuse  dès  le  début,  ou  au 
moins  dès  qu’il  a recouvré  sa  connaissance,  on  doit  penser  que 
l’on  n’a  affaire  qu’à  unramollissement^  mais  lorsqu’ils  ne  se  mon- 
trent que  consécutivcnient,  ils  peuvent  très-bien  tenir  au  déve- 
loppement d’un  ramollissement  à l’entour  d’un  foyer  hémor- 
rhagique. 

Cette  forme  du  ramollissement  paraît  être  la  plus  fréquente: 
on  se  rappelle  en  effet  que  précédemment  nous  avons  trouve 
que  sur  138  cas  de  ramollissement  où  la  maladie  avait  été  sui- 
vie dès  son  principe,  80  avaient  offert  un  début  apoplectiforme, 
58  avaient  suivi  à celte  époque  une  marche  différente.  Il  nous  a 
paru  résulter  également  de  l’examen  de  ces  faits,  que  la  pre- 
mière forme  était  surtout  commune  à un  âge  avancé  (1).  Nous 
ajouterons  que  dans  un  grand  nombre  de  faits  , appartenant  à 
nous  ou  à d’autres,  et  dont  les  détails  n’étaient  pas  du  reste 
assez  explicites  pour  pouvoir  les  faire  entrer  dans  ce  relevé, 
nous  avons  trouvé  mentionnées  des  attaques  d’apoplexie  qui , 
sans  aucun  doute,  avaient,  dans  mainte  occasion,  joué  un  rôle 
important  clans  leur  début. 


Observation  g3.  — Hémiplégie  gauche  subite  sans  raideur.  Six  se- 
maines après,  douleurs  et  raideur  dans  les  membres  paralysés.  Mort  au 
bout  de  six  mois.  — Double  infdtration  celluleuse  de  la  convexité  de 
l’hémisphère  droit. 

La  nommée  Lemoine,  âgée  de  87  ans,  était  depuis  longtemps 
(I  ) l^oycz  di.  111,  url.  ii,  § 2. 


r.A.-\LOLL!SSi;MLi\T  UlUOiNK^L'E.  ( SVAU’T.) 

à rinfirmerie  de  la  Salpétrière,  pour  une  afieclioii  du  cœur.  Je 
Ja  vis  pour  la  première  fois  au  mois  d’avril  1838.  Elle  était  con- 
tinuellement en  proie  à une  oppression  très-vive  et  qui  lui  cau- 
sait des  angoisses  exlrémes  ; elle  passait  les  nuits  assise  dans  un 
fauteuil,  pre.sque  entièrement  privée  de  sommeil  ; les  extrémités 
inférieures  étaient  enflées,  la  face  pale,  altérée,  la  respiralioni 
très-frécjuente  , les  accès  de  dyspnée  souvent  répétés  et  d’une* 
grande  intensité.  La  région  du  cœur  présentait  une  matité 
étendue  5 ses  battements  étaient  irréguliers  , tumultueux,  très- 
forts,  accompagnés  au  premier  temps  d’un  bruit  de  souille. 

Les  antispasmodiques  sous  toutes  les  formes,  la  digitale,  les, 
sinapismes...  ne  la  soulageaient  point.  On  pensait  qu’elle  suc- 
comberait bientôt  à la  dyspnée  toujours  croissante.  Elle  parais- 
sait avoir  toutes  ses  facultés  à peu  près  intactes  , et  l’attention 
ne  s’était  jamais  portée  du  côté  du  cerveau. 

Le  12  mai,  elle  fut  prise  tout  à coup,  le  malin,  d’une  attaque 
apoplectiforme  ; je  la  trouvai  une  demi-beure  après  dans  l’état 
suivant: 

La  face  est  morne  et  sans  expression,  les  paupières  ouvertes, 

les  veux  fortement  tournés  à droite  et  en  haut:  la  bouche  aussi 
•/  ^ 

tiès-forlement  déviée  à droite;  il  s’en  écoule  un  peu  de  salive 
écumeuse.  Elle  n’est  pas  sans  connaissance,  mais  les  facultés 
de  l’intelligence  paraissent  très-obtuses  : cependant  elle  pousse 
des  gémissements  et  essaye  de  prononcer  quelques  mots. 

Il  y a une  bémiplégie  gauche  complète  du  sentiment  et  du 
mouvement,  sans  aucune  raideur.  Le  bras  droit  s’agite  vive- 
ment. La  respiration  est  fréquente,  le  pouls  irrégulier  comme  à 
l’ordinaire,  et  sans  aucun  changement  appréciable  dans  sa 
forme  ni  sa  fréquence.  (Saignée,  sinapismes.)  Le  soir,  le  pouls 
était  plus  fréquent,  la  malade  parlait,  mais  peu  distinctement. 

l^c  mouvement  ne  se  rétablit  pas  du  côté  gauche;  la  parole 
demeura  toujours  un  peu  gênée;  les  yeux  reprirent  leur  posi- 
tion normale,  la  sensibilité  reparut  presqu’entièrement.  A par- 
tir du  jour  de  l’attaque,  la  malade  cessa  de  se  plaindre  d’étouf- 
fer ; les  palpitations  se  calmèrent,  le  bruit  de  souille  disparut,  le 
pouls  devint  moins  irrégulier. 

A peu  près  six  semaines  apres,  Lemoine  commença  à se  plain- 
dre de  douleurs  aiguës  dans  l’épaule  gauche  et  dans  la  main. 
Peu  à peu  le  coude  devint  raide,  le  bras  se  plia  au-devant  de  la 


UEUXUi-Mü  FOUJIE. 


363 


pohrint;,  et  il  devint  impossible  de  le  ineltie  dans  l’extension  ; 
la  luidenr  des  doigts  était  moins  forte.  Le  membre  inférieur  se 
flédiit  à demi,  mais  ne  fut  jamais  aussi  raide  que  le  supérieur. 
Les  douleurs,  que  la  malade  rapportait  surtout  à l’épaule,  du- 
rèrent jusqu’à  la  mort;  elles  étaient  incessantes  et  quelquefois 
assez  vives  pour  arracher  des  cris.  Tous  les  efforts  c]uc  l’on  fai- 
sait pour  mouvoir  quelqu’une  des  articulations  de  ce  côté 
étaient  fort  douloureux.  Lorsqu’on  pinçait  la  peau,  le  bras  se 
rctiraitun  peu,  les  doigts  demeuraient  toujours  parfaitement  im- 
mobiles. La  jambe,  bien  que  raide,  était  encore  assez  mobile,  et 
sa  sensibilité  presque  intacte. 

L’intelligence  s’affaiblit;  elle  pleurnichait  souvent  sans  cause. 
Cependant  elle  conserva  toujours  la  conscience  de  son  état  et  de 
toutes  les  choses  qui  se  passaient  autour  d’elle.  Les  évacuations 
furent  toujours  involontaires  depuis  l’attaque. 

Vers  la  lin  du  mois  de  septembre  , une  eschare  se  forma  au 
siège;  Lemoine  tomba  dans  une  grande  prostration- A cette 
époque  le  pouls  était  tout  à fait  régulier.  L’eschare  lit  des  pro- 
grès rapides;  bientôt  la  fièvre  s’alluma,  la  langue  se  sécha,  la 
peau  devint  brûlante,  les  douleurs  des  membres  paralysés  ex- 
trêmement vives,  puis  Lemoine  tomba  dans  l’assoupissement  et 
la  mort  arriva  le  6 octobre. 


j4iitopsic.  La  cavité  de  1 arachnoïde  contient  une  très- 
grande  quantité  de  sérosité  un  peu  trouble.  Beaucoup  de  séro- 
sité dans  la  pie-mère  et  plus  à droite  qu’à  gauche. 

A la  partie  externe  et  supérieure  des  lobes  moyen  et  posté- 
iieui  de  lhemispheie  dioit,  on  voit  un  vaste  ramollissemeut 
de  plus  de  6 centimètres  carrés  en  tous  sens,  ayant  réduit  les 
circonvolutions  en  une  substance  mollasse , jaune  et  dans  quel- 
ques points  verdâtre,  informe,  et  à laquelle  la  pie-mère. adhère 
intimement.  Au-dessous,  la  substance  médullaire  est,  dans  une 
assez  grande  profondeur,  transformée  en  une  pulpe  très-molle, 
blanchâtre,  grumeleuse,  infiltrée  d’une  grande  quantité  de  lait 
de  chaux.  A la  partie  externe  du  lobe  antérieur  , on  trouve  un 
ramollissement  tout  semblable  au  précédent,  mais  beaucoup 
moins  étendu,  sans  aucune  communication  avec  lui. 

Le  corps  strié  est  affaissé,  du  côté  du  ventricule,  et  trans- 
formé en  une  cavité  à parois  Uès-légèrement  jaunâtres, sans  fausse 


23 


354 


nAMOLLlSSJiMEHT  CIHIOHIQUE.  (SYMPT.) 

membrane,  et  pleine  de  lait  de  chaux.  Dans  le  corps  strié  gau- 
che, cicatrice  jaunâtre,  assez  large. 

Les  poumons  ne  présentent  rien  de  remarquable.  Le  cœur 
est  très-volumineux,  couvert  de  légers  nuages  blanchâtres.  Le 
ventricule  gauche  a ses  parois  extrêmement  épaissies,  et  sa 
cavité  un  peu  élargie.  Ses  orifices  sont  paifaitcment  sains. 
L’aorte  est  dans  toute  son  étendue  parsemée  de  plaques  os- 
seuses et  athéromateuses. 


Si  jamais  la  marche  d’un  ramollissement  a simulé  celle  d’une 
hémorrhagie,  c’est  bien  dans  ce  cas.  Invasion  subite  sans  pro- 
dromes, au  moins  appréciables,  sous  l’influence  apparente 
d’une  hypertrophie  du  cœur;  diminution  graduelle  des  acci- 
dents primitifs;  hémiplégie  simple  d’abord  , puis  développe- 
ment consécutif  d’une  contracture  sans  eesSe  croissante , de 
douleurs  vives  dans  les  membres  paralysés.  Ne  trouvions-nous 
pas  là,  aussi  bien  caractérisés  que  possible,  les  symptômes 
d’une  hémorrhagie  cérébrale  , puis  d’un  ramollissement  con- 
sécutif , développé  , comme  il  arrive  souvent , à l’entour  du 
foyer  sanguin  ? Cependant  l’absence  de  toute  cavité,  de  toute 
trace  de  sang  au  sein  du  ramollissement,  montre  avec  assu- 
rance qu’il  n’y  a jamais  eu  là  d’hémorrhagie. 

Pourquoi , chez  cette  femme  , la  contracture  s’est-elle  ainsi 
montrée  consécutivement  à la  résolution  simple?  Il  y avait 
deux  ramollissements  distincts  dans  le  même  hémisphère.  La 
contracture  ‘aura-t-elle  été  le  résultat  du  second  ramollisse- 
ment, qui  se  serait  formé  lentement,  au  lieu  de  la  production 
rapide  du  premier,  et  cette  différence  dans  leur  mode  d’origine 
ne  pourrait-elle  pas  rendre  compte  de  cette  différence  dans  les 
symptômes  ? Ne  serait-ce  pas  plutôt  que  la  contracture  se  se- 
rait développée  lorsque  la  compression  qui  accompagne  si 
souvent  la  période  aiguë  du  ramollissement  des  circonvolu- 
tions se  serait  dissipée?  Il  est  des  symptômes  à l’apparition 
desquels  la  compression  du  cerveau  peut  faire  obstacle. 

Un  des  ])oints  les  plus  intéressants  de  cette  observation, 
c’est  le  changement  qui  s’est  opéré  du  côté  du  cœur.  Il  n’y  a 
pas  eu  seulciueul  diminution  de  quelques  symptômes,  comme 


deuxième  eobme.  366 

dyspnée,  palpitations...,  mais  disparition  complète  du  bruit 
de  souffle,  et  incomplète  de  rirrégularité  du  pouls.  Il  est  vrai 
qu’il  n’y  avait  pas  dans  le  cœur  d’obstacle  mécanique  au 
cours  du  sang  ; cependant  le  développement  rapide  d une  lé- 
sion cérébrale  grave  peut  exercer  une  action  bien  remarquable 
sur  les  altérations  organiques  les  mieux  prononcées.  M.  Du- 
parcque  rapporte  « qu’une  femme  agee  portait  depuis  une 
trentaine  d’années  un  cancer  au  sein  gauclie  ; ce  cancer  était 

énorme,  d’un  aspect  hideux  , d’une  extrême  fétidité Un 

jour  cette  femme,  qui  se  plaignait  de  vertiges  et  de  pesanteui 
de  tête  depuis  quelque  temps , eut  une  attaque  d apoplexie  , 
perte  dé  connaissance,  hémiplégie  gauche  complète.  Lapaia- 
lysie  diminua  graduellement.  Un  mois  apres  l attaque,  le  can- 
cer avait  complètement  disparu.  Plus  de  gonflement  squii  - 
rheux,  plus  de  plaie,  plus  de  suintement  d’aucune  espèce.  La 
peau  s’était  rapprochée  de  la  circonférence  au  centre,  et  avait 
formé  une  cicatrice  sans  perte  apparente  de  substance , mais 
plissée  comme  la  cicatrice  qui  reste  après  l’amputation  d un 
sein  cancéré.  » Il  semblait  que  la  malade  eut  ete  operee.  Plus 
tard,  la  paralysie  ayant  presque  entièrement  disparu,  l’affec- 
tioncancéreuse  du  sein  récidiva  et  redevint  progressivement 
ce  quelle  était  auparavant  (1). 

Observation  94.  — Hémiplégie  gauche  subite  j contracture  six  se- 
maines après.  Mort  au  bout  de  six  mois.  — Ramollissement  pulpeux 
et  plaques  jaunes  de  l’hémisphère  droit. 

Une  femme  de  65  ans  a été  prise  , au  mois  de  janvier  1838, 
d’une  attaque  apoplecliforme.  Il  y a eu  perte  de  connaissance, 
hémiplégie  gauche  complète,  sans  raideur.  Plus  tard  la  malade 
assura  que  son  attaque  n’avait  été  précédée  d’aucun  prodrome 
récent  ou  éloigné.  Il  paraîtrait  seulement  qu’au  moment  de  l’at- 
taque, elle  aurait  éprouvé  une  vive  douleur  dans  les  muscles.  La 
connaissance,  l’intelligence  et  la  parole  se  rétablirent.  L’hémi- 
plégie demeura  toujours  complète.  Seulement,  six  semaines 
après  l’attacjue,  à peu  près,  il  survint  de  la  contracture  dans  les 
membres  paralysés,  et  il  s’y  joignit  des  signes  de  congestion  cé- 


1)  lJiq>ûrct[ut',  Mahulifn  de  la  iiiaUicr,  5ü“étlil.,  1. 1,  p.  -88. 


HA.UOLUSSliHlLM’  CHUüMQUE.  (sVMPX.) 

rébrale.  Il  lallut  pratiquer  des  saigiiees  locales  et  générales.  La 
malade  s’élcignit  lentement  et  succomba  le  9 juin.  Un  mois 
auparavant , on  avait  constaté  de  la  matité  dans  le  côté  gaudic 
de  la  poitrine. 

Autopsie.  — La  cavité  de  l’arachnoïde  contient  quelques  cuil- 
erées  d’une  sérosité  trouble  et  grisâtre. 

L’hémisphère  droit  du  cerveau  présente  un  volume  beau- 
coup {dus  petit  que  l’autre,  ce  qui  est  dû  à la  destruction  de 
toute  sa  partie  externe.  Les  circonvolutions  de  cette  région,  dans 
presque  toute  la  longueur  de  rbéinisphère,  sont  à peu  près  dé- 
truites, remplacées  par  une  couche  mince,  d’urr  jaune  vif,  très- 
molle,  sans  forme  distincte.  La  substance  blanche  au-dessous  est 
très- molle,  presqu’en  bouillie  dans  toute  la  moitié  externe  de 
riiémisplière,  et  présente  dans  quelques  points  une  couleur  gri- 
sâtre, dans  d’autres  une  teinte  blanche  éclatante.  Le  corps  strié 
de  ce  côté  est’d’un  très-petit  volume,  jaunâtre  à rextérieur,  d’un 
gris  sale  au-dedans. 

Les  ventricules  sont  très  dilatés,  surtout  le  droit,  et  contien- 
nent un  liquide  trouble  et  grisâtre.  Tout  le  reste  de  l’encé- 
phale est  sain. 

Hépatisation  de  tout  le  poumon  gauche. 


Cette  observation  présente  absolument  la  môme  marche  que 
la  précédente  ; les  memes  réflexions  y sont  par  conséquent  ap- 
plicables. Nous  en  dirons  autant  de  l’observation  suivante. 

Obsekvation  g5.  — Hcîr.iplégie  gauche  suivie  de  contracture.  Mort 
deux  mois  après,  d’une  gangrène  du  poumon.— Iiililtratioii  celluleuse 
du  lobe  postérieur  droit,  dans  une  petite  étendue. 

Une  vieille  femme  mourut  à la  lin  du  mois  d’octobre  1840  , 
au  numéro  G de  la  salle  St-Luc,  dans  le  service  de  M.  bouvier. 
Cette  femme  avait  été  prise,  deux  mois  auj)aravaut,  d’une  atta- 
que apoplectiforme  à la  suite  de  laquelle  elle  était  demeurée 
hémiplégique  du  côté  gauche.  Au  bout  de  quelque  temps,  la  ré- 
solution avait  fait  place  à la  contracture.  Les  excrétions  se  fai- 
saient involontairement.  La  mort  arriva  par-  suite  d’une  gan- 
giènc  puluionaire.  Ces  rensciguements  me  lurent  donnés  par 


nKiTyriiME  fop.mk. 


M.  Bouvier  et  M.  Fiaux  , interne  du  service  : ces  messieurs 
avaient  été  pardenlièrement  frappés  de  la  succession  de  la  ré- 
solution et  de  la  contracture , et  avaient  diLignosticpié  une  hé- 
morrhagie suivie  d’un  ramollissement. 

Autopsie.  — La  pie-mère  contient  une  assez  grande  quantité 
de  sérosité  limpide.  Les  artères  de  la  base  ont,  dans  une  grande 
étendue,  leurs  parois  blanchâtres  et  épaissies. 

La  substance  corticale  des  hémisphères  du  cerveau  est  un  peu 
pâle , mais  la  substance  médullaire  est  assez  vivement  injectée. 
A rexlréinité  du  lobe  postérieur  dx'oit,  tout  à la  pointe  de  l’hé- 
misphère , on  trouve  une  circonvolution  détruite  dans  un  es- 
pace grand  comme  une  pièce  de  vingt  sous-  à la  place  de  la  sub- 
stance corticale,  est  un  tissu  celluleux,  jaunâtre,  adhérent  à la 
pie-mère  et  faisant  un  peu  saillie  à la  surface  du  cerveau.  Ce 
tissu  celluleux  d’où  s’écoule,  lorsqu’on  détache  la  pie-mère,  un 
liquide  peu  épais,  point  transparent,  à peine  colore  en  gris  jau- 
nâtre, est  formé  de  filaments  déliés,  d’un  blanc  jaunâtre,  entre- 
croisés en  tous  sens,  infiltrés  de  lait  de  chaux,  et  remplit  une 
petite  cavité  creusée  dans  l’épaisseur  du  cerveau.  Cette  cavité, 
qui  contiendrait  une  noisette,  a des  parois  assez  lisses , non  ta- 
pissées par  une  membrane,  mais  par  une  couche  de  tissu  cellu- 
laire condensé  , à laquelle  viennent  comme  s’attacher  ces  fila- 
ments celluleux.  La  substance  cérébrale  environnante  est  tout 
à fait  saine.  Ses  parois  sont  assez  fermes,  d’une  teinte  très-légè- 
rement jaunâtre  dans  une  petite  épaisseur  ; mais  cette  teinte 
n’est  un  peu  prononcée  qu'au  niveau  de  la  couche  corticale  de.s 
circonvolutions,  qui  se  trouvent  très-nettement  coupées.  Le  voi- 
sinage de  cette  altération  n’est  pas  plus  injecté  que  le  reste  du 
cerveau. 

Bien  à noter  dans  le  reste  de  l’encéphale.  Gangrène  de  tout 
le  lobe  supérieur  de  l’un  des  poumons. 


Dans  ce  cas  comme  dans  les  précédents,  la  marche  des  symp- 
tômes avait  fait  diagnostiquer  une  hémorrhagie  suivie  d’nn  ra- 
mollissenienl.  Oo  n’a  trouvé  à l’autopsie  qu’un  ramoHissemem 
à l’état  d’infiltration  celluleuse,  .le  sais  que  la  forme  sous  la- 
qiiellc  s’est  présentée  celle  altération  l’eût  fait  attribuer  par 
quelques  personnes  à un  foyer  hémorrhagique  ; mais  je  nedoate 


358 


rAmot.lissemîînt  chronique,  (sympt.) 

pas  qu’elles  ne  se  fussent  trompées.  Ce  n’est  pas  d’ailleurs  en 
deux  mois  qu’un  foyer  hémorrhagique  eût  pu  subir  une  trans- 
formation semblable , sans  conserver  aucun  indice  du  sang 
épanché,  et  si  une  hémorrhagie  s’était  faite  en  ce  lieu,  le  sang 
se  serait,  de  toute  nécessité,  répandu  au-dehors  du  cerveau.  J’a- 
jouterai que  je  ne  pense  pas  qu’un  foyer  hémorrhagique  simple 
puisse  déterminer  consécutivement  de  la  contracture,  à moins 
qu’il  ne  survienne  de  l’inflammation  à l’intérieur  de  sa  cavité 
ou  du  ramollissement  à l’entour  de  lui.  ; 

J’engage  le  lecteur  à étudier,  aux  observations  113  et  114, 
ces  deux  cavités  béantes  à la  surface  du  cerveau,  que,  pour  des 
raisons  que  nous  avons  développées  avec  soin,  nous  avons 
cru  pouvoir  rapporter  à des  ramollissements  et  à des  ramollis- 
sements guéris.  Que  l’on  prenne  celle  qui  vient  d’être  décrite  et 
dont  l'origine  est  encore  moins  douteuse;  que  l’on  suppose  enlevé 
par  absorption  ce  lacis  celluleux  et  frêle  qui  la  remplissait,  et 
l’on  aura  une  cavité  toute  semblable,  béante  à la  surface  du  cer- 
veau, bienarrêtée  sur  ses  bords,  tapissée  par  une  couche  de  tissu 
cellulaire  condensé,  à peine  jaunâtre,  environnée  de  substance 
cérébrale  saine... 

Quelques  jours  avant  cette  autopsie,  j’avais  examiné  avec  le 
même  médecin  une  altération,  sur  l’origine  de  laquelle  nous 
n’étions  pas  demeurés  d’accord. 

Une  femme  était  venue  dans  le  service  de  M.  Bouvier,  por- 
tant une  hémiplégie  complète,  accompagnée  de  coutracluro,  à 
droite.  Cette  femme,  dont  l’intelligence  était  parfaitement  con- 
scrve'e,  avait  dit  avec  beaucoup  de  précision  que  son  hémiplé- 
gie s’était  formée  tout  à coup,  neuf  mois  auparavant,  que,  sans 
raideur  dans  le  commencement,  elle  s’était  plus  tard  accompa- 
gnée de  contracture.  Cette  femme  était  morte  en  quelques  jours, 
d’une  pneumonie. 

Nous  trouvâmes  le  corps  strié  gauche  creusé  d’une  cavité  du 
volume  d’une  grosse  noix,  empiétant  un  peu  sur  la  couche  op- 
tique. Du  côté  du  ventricule  , elle  était  limitée  dans  une  cer- 
taine étendue  par  la  membrane  ventriculaire  transparenîe,  bien 
qu’un  peu  épaissie,  légèrement  opaque  seulement  sur  quelques 
points.  Inférieurement,  cette  cavité  n’était  séparée  de  la  super- 
licie  du  cerveau  que  par  une  couclie  mince  de  substancè  cere- 
luale.  Mlle  ne  cnnlenait  point  de  tissu  cellulaire , mais  un  li- 


deuxième  forme. 

quide  grisâtre  , trouble,  mêlé  de  petits  grains  blancs , lait  de 
chaux.  Ses  parois  étaient  tapissées  par  des  fibres  celluleuses  , 
entrecroisées,  fines,  qu’on  soulevait  et  qu’on  développait  un 
peu,  à l’aide  d’une  pince  ; ces  fibres  , au  lieu  d être  tendues 
d’unedes  parois  à l’autre,  étaient  couebées  sur  ces  parois.  Celles- 
ci  étaient  fermes , dures  même  dans  quelques  points  , molles 
nulle  part,  à peine  colorées  en  jaune,  si  ce  n’est  dans  la  couche 
optique,  qui  présentait,  dans  un  espace  grand  comme  un  noyau 
de  cerise,  une  couleur  d’ocre  jaune  fonce,  avec  un  peu  d indu- 
ration de  son  tissu,  sans  trace  de  cavité  ni  de  cicatrice. 

Je  me  fondais , pour  soutenir  que  cette  cavité  résultait  d’un 
ramollissement  et  non  pas  d’une  hémorrhagie , sur  ce  qu’un 
épanchement  de  sang  aussi  considérable  n’eût  pu  disparaître  en 
neuf  mois  sans  laisser  aucune  trace  de  sa  presence,  pas  meme  de 
coloration  jaune  (car  celle  de  la  couche  optique  tenait  a une  in- 
filtration sanguine  distincte),  sur  l’absence  de  toute  fausse  mem- 
brane, et  sur  la  présence  de  ces  fibres  celluleuses  entrecroisées 
des  parois,  dont  on  ne  comprendrait  guère  la  disposition  dans 
l’hypolbèse  d’un  foyer  hémorrhagique.  Quant  aux  symptômes 
dont  on  invoquait  surtout  la  marche,  pour  appuyer  cette  hypo- 
thèse, les  observations  précédentes  nous  ont  suffisamment  éclai- 
rés sur  leur  valeur. 

Obskrvation  96.  — Hémiplégie  droite  complète,  sans  raideur.  Con- 
servation du  sentiment.  Altération  de  l’-intelligcnce.  Mort  danslemême 
état  au  bout  de  soixante-lmit  jours.  — Ramollissement  pulpeux  du 
corps  strié  et  de  la  partie  moyenne  de  riiémisplière  gauche  ; infdtra- 
tion  celluleuse  et  plaques  jaunes  du  lobule  du  corps  strié. 

La  nommée  Cochu,  âgée  de  72  ans,  est  une  femme  d’un  em- 
bonpoint considérable;  elle  est  d’un  naturel  apathicjue  ; cepen- 
dant il  ne  paraît  pas  y avoir  d’altération  notable  de  ses  facultés; 
elle  travaille  beaucoup  à l’aiguille. 

Il  y a un  an,  elle  a eu  une  attaque  avec  perte  de  connaissance, 
(jui  ne  lui  a laissé  aucune  trace  de  paralysie,  de  gêne  de  la  lan- 
gue... Une  semblable  atlacpie  a eu  lieti  au  mois  d’août  der- 
nier. 

Depuis  deux  jours,  elle  se  jilaignaiide  niau\  de  tête,  lorsque 
tout  à coup  , hier  soir  à minuit,  (dl(‘  perdit  la  parole;  on  ne 


A:\roT.T. issj'Air.NT  CFinoNiQrrr,  (sa'mpt.) 

peuL  savoir  s’il  y eut  alors,  passagèrement,  perle  complète  <lc 
connaissance.  Il  paraît  qu’on  fut  averti  Je  cette  attaque  par  des 
plaintes  assez  vives. 

L’élèveide  garde,  M.  Duméril,  qui  la  vit  alors,  lui  pratiqua 
une  saignée  de  3 palettes,  et  lit  appliquer  40  sangsues  au  cou.  Le 
sang  étau  peu  séreux,  et  ne  présentait  pas  de  couenne. 

Suivant  son  rapport,  cette  femme  était  alors  dans  l’état  dans 
lequel  nous  la  trouvons  ce  matin,  9 mars  1839,  couchée  au  nu- 
méro 7 de  la  salle  Saint-Antoine. 

La  malade  est  couchée  sur  le  dos,  dans  un  abattement  assez 
piofond.  La  face  est  rouge,  hébétée;  tant  qu’on  est  auprès 
d elle  et  qu  on  la  touche,  sa  physionomie  est  assez  éveillée  ; ses 
yeux  sont  ouvert.s  et  mobiles  ; si  on  la  pince,  ou  seulement 
qu’on  agite  ses  membres, 'ses  traits  se'conti  actent  et  expriment  la 
contrariété  : mais  dès  qu’on  la  laisse  tranquille , ses  paupières 
s abaissent,  et  elle  demeure  comme  endormie.  ' 

Il  n y a pas  de  déviation  des  globes  oculaires,  les  pupilles 
sont  égalés,  contractiles,  médiocrement  dilatées. 

La  bouche  est  fortement  déviée  à gauche  et  en  haut  ; la  na- 
rine gauche  est  un  peu  tirée  de  ce  coté.  On  nepeutlui  faire  ou- 
vrir la  bouche,  pour  constater  l’état  de  la  langue.  La  dégluti- 
tion se  fait  assez  bien.  La  respiration  se  fait  passablement  et 
sans  bruit  ; il  y a 28  inspirations  par  minute. 

Elle  essaye  de  parler,  et  cherche  à jirononcer  quelques  mots 
que  l’on  a peine  à saisir  ; elle  pousse  de  temps  en  temps  quel- 
ques plainte.s;  quand  on  lui  demande  où  elle  a mal,  elle  porte  la 
main  gauche  à sa  tête. 

Lorsque,  ses  yeux  étain  fermés,  on  veut  relever  la  paupière 
gauche,  elle  la  contracte  avec  force,  tandis  que  la  droite  n’op- 
pio.se  aucune  résistance. 

Le  bras  et  la  jambe  droite  sont  en  résolution,  et  soulevés  re- 
tombent comme  des  masses.  On  n’y  remarque  pas  de  mouve- 
ments spontanés.  Lorsqu’on  pince  le  membre  supérieur,  il  se 
letire  très-légèrement,  mais  le  bras  gauche  s’agite,  et  la  figure 
se  contracte.  Quand  on  chatouille  la  plante  du  pied  droit,  le 
membre  se  retire  à peine,  et  les  orteils  s’agitent.  Du  côté  gauche, 
la  motilité  et  le  sentiment  paraissent  intacts. 

Aucune  raideur  nulle  part. 

I.e  pouls  est  régulier,  assez  développé,  à 72.  Pas  de  clialenr 


DEUXIKMr,  FOnAriî. 


r.oi 

à 1.1  pe.in.  fSaignéc  de  3 pnl.  Julep  ai’cc goinme-gutle  gr.  viij. 

Le  sang-  sortit  rutilant  de  la  veine  , semblable  presque  à du 
sang  artériel.  Il  ne  se  forma  pas  de  couenne. 

Il  y eut  une  selle  involontaire. 

Soir.  — Même  état.  On  ne  remarque  aucune  raideur  dans 
les  membres  paralysés.  Elle  demeure  toujours  assoupie  : mais 
quand  on  s’approche  d’elle,  ses  yeux  s’ouvrent,  sa  figure  s’a- 
nime ; elle  est  assez  colorée.  Elle  essaye  de  montrer  sa  langue, 
la  tire  un  instant.  Elle  dit  : Mon  Dieu. 

Il  n’y  a pas  de  chaleur  à la  tête.  La  peau  a généralement  une 
température  normale.  Le  pouls  a pris  plus  de  développement. 
Ou  ne  trouve  rien  de  remarquable  à l’auscultation  du  cœur.  {Sai- 
gnée de  2 palettes.) 

10.  — Même  étatj  même  décubitus  ; la  face  est  assez  colorée  ; 
la  malade  se  plaint  par  instants,  et  porte  la  main  gauche  à sa 
tête.  Lorsqu’on  lui  demande  à voir  sa  langue,  elle  fait  un  mou- 
vementpour  la  porter  en  avant,  puis  la  retire  aussitôt,  elle  ne 
paraît  point  déviée.  Elle  ne  profère  aucuneparole.  On  ne  remar- 
que de  raideur  nulle  part.  (40  sang,  au  cou  • lav.  purgé) 

Soir.  — Face  pâle,  demi-coma.  Quand  on  la  cjueslionne  vi- 
vement, elle/lit  oui  à voix  basse,  et  retombe  dans  l’a.^soupisse- 
ment.  Le  pouls  est  à 60,  régulier,  dépressible  ; pas  de  chaleur  à 
la  peau.  Ilespiration  calme  , paraissant  se  faire  aisément  , par 
les  côtes  et  par  le  diaphragme. 

Rien  de  nouveau  les  deux  jours  suivants. 

13.  — Physionomie  hébétée  ; beaucoup  moins  d’assoupisse- 
ment. 

Le  bras  droit  est  toujours  flasque,  résolu  ; cependant  il  paraît 
s’y  faire  quelques  contractions  musculaires.  La  sensibilité  y pa- 
raît normale. 

Quand  on  lui  parle,  elle  essaie  de  répondre,  m.ai.s  il  est  rare 
qu’on  puisse  distinguer  ce  qu’elle  dit.  Le  peu  de  paroles  que 
l’on  .saisit  paraissent  sans  suite.  Elle  semble  avoir  tout  à fait 
perdu  la  mémoire.  Elle  ne  veut  pas  montrer  sa  langue,  malgré 
des  instances  réitérées.  Quand  on  la  presse  ainsi,  sa  physiono- 
mie se  contracte. 

Il  n'y  a pas  de  rougeur  de  la  lace,  nulle  part  de  chaleur  à la 
j)eau.  Le  pouls  est  lent,  régulier,  a.ssez  développé. 

Celte  femme  vécut  encore  deux  mois  dans  cet  état.  Son  inlel- 


302 


RAMOLMSSKMENT  CIIRONIQTIE.  (SYMPT.) 

lifjence  ne  fil  aucun  progrès.  Elle  n’était  point  assoupie  Labi- 
luellement  ; ses  yeux  ouverts  et  mobiles  se  fixaient  sur  ceux  qui 
rapprochaient  ; sa  physionomie,  souvent  en  mouvement,  expri- 
mait surtout  la  contrariété,  même  la  souffrance,  principalement 
quand  on  lui  parlait  ou  qu’on  la  touchait.  Mais  elle  était  tou- 
jours engourdie  , immobile  , ne  parlant  jamais  , ou  proférant  à 
peine  quelques  monosyllabes  dépourvus  de  sens  , quand  on  ve- 
nait à l’exciter.  Sa  bouclie  était  toujours  fortement  déviée  à 

Le  mouvement  demeura  toujours  parfaitement  libre  à 
gauche.  Elle  portait  souvent  sa  main  gauche  à sa  tête;  elle  se 
liâtait  de  ramener  son  drap  sur  elle,  lorsqu’on  la  découvrait. 

Quant  aux  membres  droits,  ils  demeurèrent  toujours  com- 
plètement paralysés,  sauf  quelques  légères  contractions,  quand 
on  les  pinçait,  car  leur  sensibilité  paraissait  aussi  vive  que  celle 
du  côté  gauche.  Il  n’y  eut  jamais  aucune  rigidité  des  membres. 
Le  bras  droit  devint  le  siège  d’un  œdème  considérable. 

Les  évacuations  se  faisaient  involontairement. 

De  larges  eschares  se  formèrent  de  bonne  heure  autour  du 
siège.  Pendant  longtemps  elles  ne  parurent  pas  avoir  une  grande 
influence  sur  l’état  général  de  la  malade  , à moins  qii  elles  ne 
contribuassent  ii  la  maintenir  dans  l’aflaiblissement  dans  lequel 
elle  était  plongée.  Son  embonpoint  même  ne  sembla  faire  que 
s’accroîti'e. 

Elle  succomba  enfin  lentement,  le  16  mai,  sans  avoir  rien 
jn  ésenlé  de  nouveau. 

Le  sacrum  était  dénudé. 

On  avait  diagnostiqué  une  hémorrhagie  cerebrale  probable- 
ment du  corps  strié  et  de  la  couche  optique  gauches,  sans  pé- 
nétration du  sang  dans  les  ventricules. 

y/utopsie  cinquante  heures  après  la  mort.  Les  os  duciane 
sont  très-durs  et  épais.  La  dure-mère  est  tellement  adhérente  à 
la  voûte  du  crâne,  qu’elle  suit  cette  dernière  lorsqu’on  l’enlève. 

La  pie-mère  contient  une  assez  grantic  quantité  de  sérosité 
limpide,  égale  des  deux  côtés.  Elle  est  injectée  d’une  médiocre 
quanti  lé  de  sang.  Les  vaisseaux  de  la  base  ont  leurs  paiois  par- 
tiellement jaunâtres  cl  épaissies. 

Les  ventriêüles  latéraux  contiennent  une  assez  grande  quan- 

tité  (le  .sérosité  limpide. 


/ 


DEUXÏKME  FOTVME. 

La  surface  du  cerveau  ne  présente  aucune  espèce  d’altération, 
excepté  à la  partie  externe  de  l’hémisplière  gauche.  Toute  la 
moitié  postérieure  de  Vinsuht  présente  une  destruction  des  cir- 
convolutions que  remplace  une  surface  d’un  jaune  chamois , 
mollasse,  ayant  l’apparence  d’une  couche  membraneuse  , 
d’une  ligne  à deux  d’épaisseur.  Paixourue  à sa  superficie 
par  quelques  vaisseaux  assez  développés  , on  n’y  voit  point 
d’adhérences  prononcées  de  la  pie-mèi'é.  Auprès  de  cet 
endroit , au  -dessous  et  en  arrière,  on  trouve  au  fond  de  plu- 
sieurs anfractuosités  une  altération  toute  semblable , environ- 
nant quelques  circonvolutions  d’apparence  saine,  seulement 
diminuées  de  volume. 

En  pénétrant  clans  le  cerveau,  au-dessous  de  cette  surface,  on 
arrive  dans  un  espace  étendu,  formé  de  brides  blanches,  comme 
celluleuses',  disposées  en  plusieurs  sens,  et  dont  les  intervalles 
sont  remplis  d’un  liquide  trouble , blanchâtre  , lait  de  chaux. 
Plus  profondément  encore,  la  substance  blanche  de  l’hémi- 
sphère, moins  complètement  désorganisée,  est  très-molle,  pul- 
peuse, blanche,  parcourue  par  des  vaisseaux  rouges , assez  nom- 
breux et  volumineux.  Ce  ramollissement  s’étend  juseju’à  la 
membrane  du  ventricule  latéral  ; il  n’occupe  c[ue  la  partie  ex- 
terne de  la  couche  optique  , mais  la  presc^ue  totalité  du  corps 
strié,  dont  la  portion  grise  a pris  une  teinte  jaunâtre. 

Du  côté  de  la  cavité  ventriculaire,  la  surface  du  corps  strié  pa- 
raît afiaissée , et  offre  une  teinte  un  peu  jaunâtre.  La  tête  du 
corps  strié  est  seule  demeurée  saine  , mais  dans  une  petite 
étendue. 

Ce  ramollissement  occupe  à peu  près  le  tiers  moyen  de  l’hé- 
misphère. On  voit  qu’il  est  formé,  de  dehors  en  dedans,  de  trois 
couches  successives  et  bien  distinctes  : Couche  jaune  chamois, 
membraniforme,  bien  limitée  , extérieure  , répondant  à la  cou- 
che corticale  des  circonvolutions-,  — disparition  delà  substance 
médullaire,  remplacée  par  des  filaments  celluleux,  infiltrés  d’un 
liquide  lait  de  chaux  j — énfin,  et  ces  deux  dernières  altérations 
se  fondent  l’une  dans  l’autre,  ramollissement  blanc  , pulpeux  , 
s ctendant  jusqu’au  ventricule. 

Le  reste  du  cerveau  parai.ssail  tout  à fait  sain^  à peine  injecté 
et  d’une  assez  bonne  consistance,  maigre  le  tenqis  qui  s’était 
ecoulc  depuis  la  mort  du  sujet. 


” ^ T’^AMOLLISSn-MENT  CHr.OXlQÜE.  (sYmPT.1 

Rien  à noter  au  cervelet  ni  à la  moelle  alongée.  _ Les  pou- 
mons étaient  infillrês  d’une  grande  quantité  de  sérosité  spu- 
meuse et  sanguinolente,  surtout  aux  parties  déclives. —Cœur  vo- 
lumineux, flasque.Ses  cavités,  très-larges,  sont  presque  complè- 
tement vides  desang.  Un  peu  de  sang  liquide  dans  les  oreillettes. 
Aucun  épaississement  des  parois. 

§ III.  Troisième  forme  du  ramollissement  chronique.  — (La  mort  survient 
par  des  accidents  aigus,  paraissant  s’èlre  développés  sous  l inlluencc  d’un 
ramollissement  chroni(|ue.) 

On  voit  souvent,  chez  les  individus  affectés  de  ramollisse- 
ment chronique,  la  vie  se  terminer  par  des  accidents  cérébraux 
aigus,  bien  caractérisés , et  pour  l’eiplication  desquels  on  ne 
trouve  autre  chose  sur  le  cadavre  qu’une  altéi’ation  évidemment 
ancienne,  et  rien  que  l’on  puisse  rapporter  en  aucune  manière 
aux  phénomènes  observés  à la  fin  de  la  vie.  J’ai  toujours  vu  ces 
accidents  consister  en  de.s  attaques  apoplcctiformes  , simulant 
parfaitement  soit  une  hémorrhagie  , soit  un  ramollissement 
aigu,  et  ces  faits  représentent  ainsi  précisément  ceux  que  nous 
avons  déjà  rapportés,  où  un  ramollissement  aigu  se  développait 
enté  sur  un  ramollissement  chronique. 

Parmi  ces  faits,  on  voit  que  tantôt  le  ramollissement  chroni- 
que s’était  déjà  annoncé  par  des  symptômes  évidents  et  carac- 
téristiques, tantôt,  au  contraire,  par  des  phénomènes  vagues  et 
cjui  ne  pouvaient  que  faire  pré.^uiner  ou  à peine  soupçonner 
son  existence  ; enfin  que,  dans  d’autres  cas,  son  développement 
s’était  fait  d’une  façon  tout  à fait  latente,  de  manière  que  ces  ac- 
cidents rapides  de  la  fin  de  la  vie  se  trouvaient  précisément  les 
premiers  auxquels  eût  donné  naissance  une  lésion  chronique  et 
ditant  d’une  époque  éloignée.  On  conçoit  toute  l’importance  de 
ces  faits  : ces  derniers,  en  particulier,  se  rapprochent  heaucoiip 
de  ceux  cpje  nous  avons  rangés  dans  la  quatrième  forme,  où  le 
rajnollisseinent  demeure  latent  jusqu’à  la  fin  de  la  vie;  peut- 
être  mcnie  trouvera-t-oii  que  nous  ayons  eu  tort  de  les  en  sépa- 
rer, car  il  est  permis,  jusqu’à  un  cci  tain  point,  de  douter  si  c’est 
bien  en  effet  sous  rinllueiice  du  ramollissement  chronique,  que 
ces  accidents  se  sont  développés.  Nous  reviendrons  tout  à l’heffre 


TROisiijili;  lüiiJME.  56  5 

sur  les  conséquences  qui  nous  paraisseul  devoir  eue  tirées  des 
laits  de  ce  genre. 

Oeservation  97. — 'Etat  d’hébétude.  Tout  à coup,  iiertc  de  con- 
naissance, raideur  dans  les  membres,  puis  résolution  complète  à droite; 
mort  au  bout  de  trente-six  heures  à peu  près.  — Double  ramollissc- 
inent  dans  riiémisphère  gauche.  Production  anormale  dans  le  quatrième 
ventricule 

Une  femme,  nommée  Truchot , âgée  de  soixante-seize  ans, 
était  en  enfance;  il  fallait  la  lever  et  l’habiller.  Elle  était  dans  la 
division  des  gâteuses. 

Le  27  novembre  1838,  dans  la  matinée  (il  y avait  deux  jours 
qu’elle  paraissait  assez  affaissée),  elle  tomba  tout  à coup  dans 
l’état  suivant  : 

Elle  est  très-pâle,  couchée  sur  le  dos,  profondément  assoupie; 
les  paupières  sont  fermées,  mais  s’entr’ouvrentunpeu  quand  on 
l’excite.  La  bouche  est  déviée  à gauche,  la  narine  droite  afl’ais- 
sée,  la  mâchoire  raide;  un  peu  de  mucus  spumeux  s’écoule  en- 
tre les  lèvres  ; les  pupilles  sont  très-dilatées  et  mobiles.  Les  bras 
sont  raides  et  immobiles,  se  mouvant  seulement  un  peu,  surtout 
à gauche,  quand  on  les  pique  profondément.  Les  jambes  sont  un 
peu  raides,  plus  mobiles,  se  retirant  un  peu  quand  on  chatouille 
la  plante  des  pieds  , la  gauche  plus  que  la  droite.  On  remarque 
quelques  tremblotements  du  peaucier.  Le  pouls  est  fréquent , 
peu  développé,  la  peau  un  peu  chaude. 

Le  soir,  quelques  mouvements  spontanés  du  bras  gauche. 

Le  lendemain,  les  membres  droits  sont  complètement  résolus; 
le  bias  gauche  se  soutient  un  peu  en  l’air.  Légère  raideur  des 
coudes.  Respiration  fréquente.  Chaleur  moindre  de  la  peau  ; 
pouls  plus  faible,  mort  le  soir. 

yliLtopsic  11  cvAC’liiiii  liciiTcs  cipvcs  Ici  fnoi't*  — — Il  y a encore  une 
. cei  tainc  quantité  de  seiosite  dans  la  cavité  de  l’arachnoïde.  La 
pie-mèrc  offre  une  injection  assez  considérable  , un  peu  d’infil- 
tratiou  séreuse  à la  convexité,  beaucoup  de  sérosité  limpide  à la 
base.  Les  méninges  s’enlèvent  très-aisément. 

A la  partie  externe  du  lobe  moyen  de  l’hémisphère  gauche  , 
tiois  ou  quatre  circonvolutions  et  leurs  anfractuosités  sont  ra- 
tatinées et  transformées  en  une  laine  jaune,  ridée,  assez  dense , 


366 


ramollissement  chronique,  (sympt.) 

au-dessous,  la  substance  médullaire  est  convertie  en  un  lacis  de 
6bres  celluleuses,  jaunâtres,  entrecroise'es,  et  laissant  entre  elb  s 
de  larges  vacuoles  pleines  de  lait  de  chaux;  des  vaisseaux  rouges 
et  assez  dilatés  traversent  ce  tissu.  La  surface  ventriculaire  du 
corps  strié  est  jaunâtre  et  affaissée  ; on  voit  que  ce  corps  et  une 
partie  de  la  couche  optique  se  trouvent  occupés  par  une  cavité 
assez  large,  pleine  d’un  liquide  épais,  trouble,  grisâtre,  chargé 
de  flocons  grisâtres;  ses  parois  sont  de  même  couleur,  iné- 
gales et  un  peu  molles.  On  trouve  quelques  petites  cavités  jau- 
nâtres dans  la  couche  optique  gauche. 

Quelques  cuillerées  de  sérosité  limpide  dans  les  ventricules 
latéraux.  Etat  parfaitement  normal  de  tout  le  veste  de  l’encé- 
phale, sauf  l’altération  suivante  du  quatrième  ventricule. 

On  trouve  dans  ce  ventricule,  au-devant  de  chacune  des  py- 
ramides postérieures,  près  de  la  pointe  du  calamus,  deux  petites 
tumeurs  du  volume  d’un  très-petit  pois,  vasculaires  à leur  sur- 
face , mamelonnées.  Elles  sont  formées  d’un  tissu  blanc,  sem- 
blable à la  substance  médullaire  , mais  beaucoup  plus  dense. 
Ces  espèces  de  végétations  se  continuent  sans  ligne  dedémar- 
cation  avec  le  tissu  des  pyramides,  qui  ne  présentent  aucune* 
autre  altération  (1). 

Engouement  assez  considérable  des  poumons  ; infiltration i 
sanguine  de  leurs  parties  déclives.  Le  cœur  est  assez  volumi-- 
neux  , mais  ne  présente  aucune  alteration. 

Les  reins  sont  d’un  très-petit  volume,  surtout  le  gauche,  quii 
est  évidemment  atrophié.  Leur  enveloppe  enlevée,  on  voit  leur 
surface  très-injectée,  présentant  un  grand  nombre  de  petits  ma- 
melons irès-rapprochés.  A l’interieur,  la  substance  tubuleuse  ai 
disparu  dans  quelques  endroits  ; le  tissu  des  reins  est  rougeâtre 
et  assez  ferme;  on  trouve  quelques  petites  concrétions  jaunâtres: 

dans  les  calices. 


Cet  exemple  est  très-précis  : la  date  des  altérations  de  la  pulpe 

fl)  Ces  sories  de  végétations  élalenl-elles  le  résida  d’un  ancien  épanchc- 
menl  de  sang  ? Elles  avaient  la  forme,  mais  non  pas  l’apparence  mleneure 
des  produits  qui  reconn.iis.sent  une  s.-mblahle  origine.  Elaient-elles  une  pro- 
ducion  de  la  pulpe  nerveuse  elle-même?  Je  ne  saurais  résoudre  ccLie  <jues- 

lion. 


TUOI5IEMK  FORME. 


367 


cérébrale,  ramollissement  chronique  bien  caractérisé  , est  évi- 
demment ancienne  ; les  accidents  qui  ont  terminé  la  vie  ont  été 
bien  tranchés.  On  ne  leur  trouve  aucune  explication  anatomi- 
que satisfaisante  : si  l’on  invoquait  la  sérosité  épanchée  à la 
base  du  crâne,  je  ferais  remarquer  que  la  résolution  du  côté 
droit  suffirait  pour  détruire  cette  hypothèse.  Voici  donc  une 
observation  qui  nous  montre,  sans  pouvoir  laisser  aucun  doute 
dans  l’esprit,  que,  chez  des  individus  affectés  de  rainollissement 
chronique,  il  peut  se  développer  des  accidents  aigus  et  mortels, 
sans  que  l’on  trouve,  à l’autopsie,  autre  chose  que  ce  ramollis- 
sement chronique  lui-même.  ^ 

Obseuvatios  g8. — Contracture  pendant  quatre  ans  du  côté  gau- 
che. Résolution  générale  et  subite;  mort  au  bout  de  quelques  heures. 
— Ramollissement  pulpeux  de  la  substance  médullaire  des  deux  hé- 
misphères sans  changement  de  couleur.  Aucune  autre  altération. 


La  nommée  Lebreton,  âgée  de  soixante -quatre  ans,  était  af- 
fectée, depuis  quatre  ans,  d’une  contracture  permanente  et  éner- 
gique du  côté  gauche  du  corps.  Le  bras  était  complètement  im- 
mobile; les  doigts  et  le  coude  ne  pouvaient  être  redressés.  La 
jambe,  un  peu  moins  raide,  exécutait  encore  quelques  mouve- 
ments. La  malade,  maigre  et  chétive,  laissait  souvent  échapper 
les  urines  et  les  fèces.  Les  mouvements  du  côté  droit  étaient 
libres.  Le  18  mars  1838,  à quatre  ou  cinq  heures  du  matin,  elle 


tomba,  dit-on,  en  paralysie.  A huit  heures,  elle  fut  trouvée 
plongée  dans  un  coma  profond,  avec  résolution  et  insensibilité 
générales , slerlor,  pouls  insensible  ; les  parties,  auparavant 
contracturées, . pouvaient  alors  etre  redressées  sans  peine.  Elle 
mourut  dans  la  matinée. 

Autopsie.  — Les  méninges  sont  saines,  ainsi  que  -la  surface 
de  l’encéphale.  Au  centre  de  chaque  hémisphère,  dans  la  sub- 
stance médullaire,  existe  un  ramollissement  assez  étendu,  d’en- 
viron 4à  5 centimètres,  d’avant  en  arrière,  et  de  1 centimètre 
dans  les  autres  sens.  Le  ramollissement  du  côté  droit  est  le  plus 
considérable.  La  substance  ramollie  est  à l’état  d’une  pulpe 
encore  assez  consistante,  mais  qu’un  filet  d’eau  éparpille  aisé- 
ment, tandis  que  les  parties  voisines  non  altérées  résistent  in- 
définiment à l’action  de  ce  jet.  Pas  d’altération  de  couleur.  Le 
reste  de  l’encéphale  ne  présente  rien  à noter. 


1368 


HA.MÜLLli)SJi.MEi\T  CauOjVlQLE.  (sY.Ml'X.) 

Le  cœur  esl  peu  volumineux.  Les  poumons  paraissent  paiiai- 
teinent  sains,  ainsi  que  les  autres  organes. 


Ce  fait  es»,  entièrement  semblable  au  precedent.  L’ancienneté 
de  l’altération  anatomique  est  aussi  évidente  q«c  les  symptômes 
de  la  lin  de  la  vie  ont  été  tranchés  par  leur  forme  et  par  leur 
marche.  On  pourra  peut-être  s’imaginer  que,  n’y  ayant  eu 
<iu  une  hémiplégie  pendant  plusieurs  années,  le  ramollissement 
de  1 hémisphèie  droit  existait  seul,  et  que  les  accidenis  de  la  lin 
de  la  vie  ont  été  produits  par  le  développement  du  ramol- 
lissement de  l’hemisphère  gauche.  Mais  si  l’on  réfléchit  que  ces 
accidents  n’ont  duré  que  plusieurs  heures,  et  que  l’on  ne  peut 
supposer  qu’un  pareil  espace  de  temps  soit  suffisant  pour  la  for- 
mation |d’un  ramollissement  pulpeux;  en  second  lieu,  qu’au- 
cune différence  n’a  été  notée  entre  ces  deux  ramollissements,  ce 
qui  annonce  nécessairement  un  âge,  je  ne  dis  pas  semblable, 
mais  au  moins  rapproché,  ou  concevra  aussitôt  l’impossibilité 
de  s’arrêter  à cette  idée.  Il  n’est  pas  très-rare,  du  reste,  de  ren- 
contrer une  simple  hémiplégie  avec  un  ramollissement  des  deux 
hémisphères,  occupant  même  dans  tous  les  deux  un  point  sem- 
blable ou  à peu  près.  C’est,  comme  l’a  très-bien  remarqué  M.  De- 
chambre,  une  circonstance  que  le  ramollissement  présente  beau- 
coup plus  souvent  que  l’hémorrhagie. 

OBSERVATioji  9ç).  — Ancienne  faiblesse  des  membres  droits.  Tout  à 
coup  chute  avec  perte  de  connaissance.  Mort  au  bout  de  trois  jours. — 
Ramollissement  de  tout  un  hémisphère. 

Un  homme  âgé  de  quarante-sept  ans  ressentait  depuis  deux 
ans  une  douleur  habituelle  dans  le  côté  gauche  de  la  tête,  avec 
affaiblissement  des  membres  droits.  Tout  à coup,  après  s’être 
plaint  de  la  tête  plus  que  de  coutume , il  tombe  privé  de  con- 
naissance ; deux  jours  se  passent  dans  cet  état.  On  trouve  au 
bout  de  ce  temps  les  quatre  membres  résolus  et  insensibles,  les 
pupilles  contractées,  la  bouche  fortement  déviée  à gauche,  le 
pouls  très-petit,  sans  fréquence  ; la  face  est  tuméfiée,  la  respi- 
ration s’embarrasse.  La  mort  survient  le  troisième  jour. 

Jidopsie . — Les  méninges  ne  présentent  rien  de  remarquable. 


XllUlSli:..Mli  l'OUAH;. 


36!) 


L'liéniisi)lière  gauche  est  tuméfié,  les  cifconvuiiitiotis  sont  apla- 
ties et  fiuctuantes,  saines  d’ailleurs.  Au-dessous  la  substance  cé- 
roLrale  est  d’une  mollesse  extrême;  plus  bas  encore  elle  ne 
représente  qu’une  bouillie  grisâtre.  On  ne  découvre  aucune 
trace  de  sang  épanché.  La  substance  ramollie  est  traversée  eu 
divers  sens  par  des  vaisseaux  dont  les  parois  ont  conservé  leur 
consistance  accoutumée.  L’autre  hémisphère  est  sain.  Il  n’y  a 
que  peu  de  sérosité  dans  les  ventricules. 

Poumons  fortement  engoués.  Cœur  hypertrophié  ; rétrécisse- 
ment de  l’orifice  aortique.  Engorgement  général  du  système 
veineux  (1). 


Cette  observation  ne  me  paraît  pas  avoir  été  convenablement 
appréciée  par  le  judicieux  auteur  qui  la  rapporte.  « Il  est  vrai- 
semblable, dit- il,  que  ce  ramollissement,  lentement  formé,  resta 
borne  a une  petite  etendue  de  1 hémisphère  gauche,  juseju’au 
jour  oîi  le  malade  tomba  tout  à coup  sans  connaissance  et  sans 
mouvement...  » Je  ne  puis  admettre  cette  hypothèse,  par  cela 
seul  que,  si  une  partie  de  ce  ramollissement  eût  existé  depuis 
deux  ans,  et  qu  une  autre  se  lût  formée  tout  à coup  trois  joiu’s 
avant  la  mort,  on  eût  remarqué  entre  elles  des  difiérences  ana- 
lomiques  tranchées,  et  que  je  cherche  en  vain  dans  l’observation. 
Une  partie  de  cette  altération  eût  sans  doute  offert  les  carac- 
tères cjue  nous  avons  indiqués  au  rainollissemeut  récent.  Je  ne 
prétends  pas  que  tous  les  points  de  ce  ramollissement  fussent 
egalement  anciens  : il  est  probable  qu’il  s’es't  graduellement 
elendu.  Mais  je  ne  puis  admettre  que  ce  soit  à ces  progrès  suc- 
cessifs qu’il  faille  attribuer  le  développement  instantané  des  ac- 
cidents qui  ont  entraîné  la  mort. 


ÜBsnRVATioN  loo.  - Depuis  plusieurs  mois,  céphalalgie,  fouruiilie- 
menis  dans  les  membres.Tout  à coup,  perte  de  connaissance,  hémiplé- 
gauche.  Mort  trois  jours  après.  - Kamollissement  pulpeux  de 
1 liemispherc  droit.  Ramollissement  du  cœur. 


La  nommée  Chevet,  âgée  de  soi.xanle-seize  ans,  de  robuste 
constitution,  sc  plaignait  depuis  plusieurs  mois  de  céphalalgie, 

(0  .iudral,  Clini'jiic,  l,  v,  p.  -164. 


24 


-'i72  KAMÜLLlSSE.UL.Ni'  CUUOjNU^.bi:.  (^sVAU'l.) 

à i’iuliimcrie  ; lueus  une  lictire  s’ctait  à pciuc  écoulée,  qu’elle  ne 
présentait  plus  de  signes  de  paralysie,  parlant  assez  bien,  ne  se 
trouvant  pas  mai,  se  iilaignant  seulement  d’étouireiueut.  La  nuit 
suivante,  elle  fut  prise  de  nouveau  d’une  attaque  plus  grave  que 
la  précédente. 

Le  lendemain  matin,  le  bras  droit  était  complètement  para- 
lysé, sans  raideur;  bien  que  la  sensibilité  fût  demeurée  nor- 
male, il  restait  immobile  quand  on  le  pinçait;  le  membre  infé- 
rieur droit  n’était  qu’incomplétement  privé  de  mouvement.  La 
lace  était  très-pâle,  les  paupières  également  ouvertes,  les  pu- 
pilles fort  étroites,  la  bouche  très-légèrement  déviée  à gauche. 
L’intelligence  semblait  bien  conservée;  malgré  ses  eflorts  pour 
parler,  elle  ne  pouvait  parvenir  à se  lairc  eompreiulrc,  elle  bre- 
douillait. Lea  mouvements  étaient  parlaitenient  libres  a gau- 
che. Le  pouls  était  à 100,  et  présentait  quelques  intermittences. 
La  respiration  était  fréquente  et  gênée.  [Saigjive  de  4 ])ciL  Lav. 
jnirg.  Sin.) 

10.  Même  état.  {Trente  sangsues  au  cou.)  Le  soir  la  respira- 
tion devient  plus  difficile. 

Le  11,  la  sulfocation  paraissait  imminente,  la  malade  ne 
donnait  plus  signe  de  connaissance  ; l’état  des  membres  était  le 
même.  Elle  mourut  dans  la  nuit,  70  heures  après  le  début  de 
l’hémiplégie.  On  avait  diagnostiqué  une  hcmorrliagie  céré- 
brale, 

Autopsie.  — IjC  crâne  est  d’une  extreme  épaisseur,  adhérent 
à la  dure-mère.  Les  méninges  contiennent  peu  de  sérosité  ; la 
pie-mère  n’oftVe  qu’ime  injection  médiocre.  Elle  s’enlève  aisé- 
ment de  toute  la  superficie  du  cerveau,  qui  parait  parfaitement 
saine.  Les  ventricules  contiennent  peu  de  sérosité  ; leurs  patois 
ne  présentent  rien  à noter. 

Le  corps  strié  gauche  est  ramolli  dans  toute  son  étendue  , 
d’une  teinte  légèrement  jaunâtre,  surtout  prononcée  a son  ex- 
trémité antérieure.  Ce  ramollissement  assez  bien  circonscrit  au 
corps  strie,  lui  donne  la  consistance  d’un  iromage  mou. 

La  couche  optique  présente  dans  sa  partie  centrale  une  cavité 
de  la  forme  et  du  volume  d’une  très-petite  amande  , et  conte- 
nant un  peu  d’un  liquide  épais,  légèrement  roxigeatre.  Les  pa- 
rois de  cette  cavité  sont  saines- 

La  substance  médullaire  qui  avoisine  le  corjis  strié  ne  parait 


T,  WOT.T.lSfir!MKNT  T.ATR\T.  •>  ' '> 

pas  avoir  tout  à fait  sa  consistanco  normale.  Il  n’y  a .In  vesu- 
aucune  injection  ilans  aucun  point  du  cerveau.  Les  héinispliè 
res  sont  généralement  assez  pâles  et  de  iDOnne  consistance. 
Rien  à noter  dans  le  reste  de  l’eucépliale. 

Congestion  sanguine  générale  des  poumons;  les  deux  lobes  in- 
férieurs présentent  un  commencement  d hépatisation  rouge. 
Les  bronches  sont  rouges  et  contiennent  beaucoup  de  mucus. 

Le  cœur  est  assez  volumineux  , les  parois  du  ventricule  gau- 
che sont  épaisses.  Les  orifices  sont  sains.  Le  cœur  renferme  une 
assez  grande  quantité'  de  sang  demi-liquide. 


L’attaque  d’apoplexie  qui  avait  ou  lieu  un  au  avant  la  mort, 
était  sans  aucun  doute  le  résultat  d’une  hémorrhagie  de  la  cou- 
che optique,  dont  on  retrouva  sur  le  cadavre  la  trace  incontes- 
table, sous  une  apparence  qui  se  rapporte  parfaitement  à cette 
épo(jue  (liquide  rougeâtre  et  épais;.  Quant  au  ramollissement 
du  corps  strié,  il  n’y  a pas  à douter  non  plus  qu’il  n’ait  pré- 
cédé, d’un  espace  de  temps  que  l’on  ne  saurait  préciser,  les  ac- 
cidents de  la  fm  de  la  vie  ; et  cela  non  pas  seulement  parce 
qu’il  ne  s’accompagnait  pas  de  rougeur,  mais  encore  et  surtout 
àcausede  sa  couleur  jaune.  Il  est  bien  certain  en  elfct  que  lacott- 
lenr  jaune  nesaurait  être  primitive  dans  un'ramoUissement;  il  est 
certain  également,  au  moins  telle  est  notre  conviction  , qu’elle 
n’est  autre  chose  que  le  résultat  d’une  décoloration  du  sang.  Or  il 
faut  un  certain  temps  pour  qu’au  tel  cbangement  de  couleur  puisse 
.s’opérer,  et  je  ne  connais  aucun  fait  qui  nous  autorise  à croire 
que  soixante-dix  heures  siillisent  pour  cela.  Ce  rainoüissement 
préexistait  donc  aux  accidents  que  nous  avons  décrits  ; il  s’était 
développé  d’une  façon  len'.e,  peut-être  sous  l’influence  du  foyer 
hémorrhagique  qu’il  avoisinait,  et  il  est  plus  naturel  de  rappor- 
ter à lui^qu’à  ce  foyer,  dontles  parois  étaient  saines,  la  céphalal- 
gie et  les  étourdi-ssements  dont  se  plaignait  la  femme  Couillcau. 

§ IV.  Quatrième  forme  du  ramolli.s.semenl  chroniipic.  — Hamidlisscmcnt 

latent. 

On  pciit  renconlm’  des  rnmnllissemcnls  du  cerveau  chrz  des 
individus  qni,  a 1 époque  de  icnr  mort,  ne  présent, aient  aucun 


^^MOLtrsSEiWENT  CHRONIQUE.  (sTMPT.) 

trouble  appréciable  des  fonctions  cérébrales.  Cliez  quelques- 
uns,  le  ramollissement  s’était  développé  sans  avoir  jamais  donné 
lieu  à aucun  symptôme  propre  à déceler  son  existence  ; chez 
d’autres,  il  avait  déterminé  quelques  accidents  plus  ou  moins 
bien  caractérisés  à l’époque  de  sa  formation  ; mais  ces  accidents 
s’étaieut  dissipés  et  les  malades  ne  s’en  étaient  plus  ressentis. 

Quelques-uns  de  ces  individus  avaient  bien  éprouvé,  du  côté 
de  l’organe  encéphalique , certaines  souffrances  plus  ou  moins 
prononcées  , qu  après  la  mort  on  a pu  rattacher  au  ramollisse- 
ment, mais  qui,  pendant  la  vie,  étaient  tout  à fait  impropres  à 
faire  reconnaître  ou  même  à laisser  soupçonner  la  présence 
d’une  lésion  organique  du  cerveau.  Mais  le  plus  souvent,  il  faut 
le  dire,  il  est  seulement  permis  de  constater  qu’il  n’y  avait,  de- 
puis un  temps  plus  ou  moins  éloigné,  aucune  lésion  des  facul- 
tés cérébrales  ; on  est  privé  de  renseignements  assez  complets 
pour  acquérir  la  certitude  de  l’absence  ou  de  l’existence  de 
symptômes,  à une  époque  quelconque. 

Il  est  probable  qu’un  ramollissement  qui  a pu  marcher  ainsi 
d une  façon  latente,  s’est  développé  dès  le  principe  avec  lenteur, 
et  u’a  entraîné  que  peu  à peu  la  désorganisation  du  point  où  il 
siège.  Le  ramollissement  cérébral  a cela  de  commun  avec  toutes 
les  autres  lésions  chroniques  et  dans  tous  les  organes  : ainsi  ou 
sait  que  dans  le  cerveau  lui-même,  il  arrive  très-souvent  de  ren- 
contrer, à tous  les  âges  de  la  vie,  des  productions  morbides  qui 
n’avaient  entraîné  aucune  modification  dans  ses  fonctions.  Dans 
les  poumons,  dans  les  organes  abdominaux,  rien  de  plus  ordi- 
naire que  de  trouver  des  lésions  tout  à fait  imprévues,  soit  sur 
le  cadavre  d’individus  qui  n’en  avaient  jamais  ressenti  d’effet  ap- 
préciable, soit  chez  des  sujets  chez  lesquels  leur  présence  ne  dé- 
termine d’accidents  que  lorsqu’elles  ont  déjà  acquis  un  certain 
développement.  Mais  ce  sont  surtout  les  personnes  qui  se 
sont  adonnées  à l’anatomie  pathologique  des  vieillards  et  des 
enfants,  qui  peuvent  se  faire  une  idée  du  grand  nombre  de  lé- 
sions organicjues  qui  se  développent  ainsi  sans  symptômes. 

OusEKVATioN  10:/,.  — Mort  à la  suite  d'une  pleurésie,  intégrité  en 
apparence  complète  des  fonctions  cérébrales.  — Ramollissement  étendu 
du  lobe  antérieur  de  l’hémisplière  gauche. 

La  femme  Dtiian,  âgée  de  qualre-vingt-liuit  ans.  entra  à l’in- 


RAMOLLISSEMENT  LATENT. 


375 


fumeiie  au  mois  de  septembre  1838,  avec  un  épanchement 
pleurétique  énorme.  Malgré  un  traitement  assez  actif,  elle  suc- 
comba au  bout  de  huit  jours  , sans  avoir  beaucoup  souffert. 
Cette  femme  conserva  jusqu’à  la  fin  une  intégrité  remarquable 
des  mouvements  et  de  l’intelligence  : elle  mourut  sans  agonie, 
assise  sur  sou  séant,  appuyée  sur  ses  genoux,  comme  elle  se  te- 
nait habituellement.  Une  demi-heure  avant , elle  nous  avait 
parlé  fort  distinctement,  à la  visite. 

Des  renseignements  certains  m’apprirent  que  cette  femme, 
parfaitement  conservée  pour  son  âge,  ne  présentait  aucune  trace 
de  lésion  du  cerveau.  Elle  avait  passé  dernièrement  quelques 
jours  dans  le  service  de  M.  Prus,  pour  un  lombago.  A part  cela, 
elle  n’était  pas  allée  à l’infirmerie  depuis  quelques  mois. 

Jutopsie.  — Légère  infiltration  séreuse  de  la  pie-nière , in- 
jection normale  de  ses  vaisseaux. 

A la  partie  inférieure  et  interne  du  lobe  antérieur  de  l’hémi- 
sphère  gauche,  plusieurs  circonvolutions  paraissent  à travers  les 
méninges,  violacées,  aplaties,  fort  adhérentes  à la  pie-mere,  tres- 
molles  et  fluctuantes.  Une  incision  étant  pratiquée  sur  ce  point, 
on  pénètre  dans  une  sorte  de  détritus  , formé  d’une  bouillie 
rougeâtre , coulante  , de  laquelle  s’échappe  un  liquide  un  peu 
rouge,  épais  et  trouble  comme  s’il  était  mêlé  à du  pus.  Au  mi- 
lieu de  ce  ramollissement  plus  large  qu’un  gros  œuf  de  poule  , 
et  plus  étendu  profondément  qu’à  la  superficie,  on  voit  un  lacis 
considérable  de  petits  vaisseaux  rouges,  manifestement  dilatés  , 
semblant  représenter  la  trame  vasculaire  de  la  substance  mé- 
dullaire. Ce  ramollissement,  partout  d’un  rouge  brunâtre 
également  foncé,  assez  exactement  limité  à son  pourtour,  a 
complètement  envahi  le  corps  strié.  Du  côté  de  la  cavité  ventri- 
culaire , la  saillie  habituelle  du  corps  strié  est  remplacée  par 
une  légère  dépression  mollasse , violacée  et  très-injectée  ; la 
substance  de  ce  corps  ne  se  reconnaît  en  aucune  manière  au  mi- 
lieu du  détritus  qui  l’environne.  La  couche  optique  est  saine. 
Un  peu  de  sérosité  limpide  dans  les  ventricules.  La  pie-mère 
n’est  pas  plus  injectée  au  niveau  de  ce  ramollissement  qu’ail- 
leurs. 

Par  une  circonstance  singulière,  ou  trouva  enerre  sur  le 
mêmesujet  dertx  altérations  organiques  considérables,  dorri  on 
ne  soupçonnait  pas  l’existence.  C’était  d’abord,  à l’eruonr  du 


n AArou.TssFArr.NT  rfinn\rnT)e.  ( svaipt.) 


cœur,  line  masse  graisseuse  plus  grosse  que  le  poing,  avant  la 
lorme  (le  ces  végétations  en  crête  de  coq  qui  ont  été  main  tes  fois 
décrites  ; puis,  dans  le  flanc  gauche,  au-dessous  de  la  rate,  dans 
Je  tissu  cellulaire  qui  unit  le  péritoine  aux  muscles,  une  tumeur 
un  peu  ovoïde,  grosse  comme  les  deux  poings,  formée  d’un 
tissu  fibreux,  blanchâtre,  lamelleux,  très-dur. 


Lois  même  que  l’apparence  de  ce  ramollissement  ne.  serait 
pas  celle  d une  désorganisation  profonde  et  presque  nécessaire- 
ment dironique,  1 absence  complète  de  symptômes  dans  les 
derniers  temps  de  la  vie  ne  pourrait  laisser  aucun  doute  sur  son 
ancienneté.  En  effet,  si  l’observation  nous  force  d’admettre  que 
des  altérations  chroniques  peuvent  lri;s-bien  se  développer  sans 
déterminer  de  symptômes  appréciables , elle  nous  a appris  en 
même  temps  que  ce  fait  ne  s’observait  presque  jamais  à propos 
d aliéiations  aiguës  uifpeu  étendues.jJe  sais  bien  cpie  la  lougeur 
de  ce  ramollissement  n’est  pas  d’accord  avec  une  semblable  ori- 
gine, mais  c est  que  ce  fait  rentre  sans  doute  dans  ces  très*  rares 
exceptions  que  j ai  signalées  précédemment,  à la  règle  générale 
(le  1 alxsence  de  rougeur  dans  le  ramollissement  chronique. 

Oii.snRv.CTiox  to5.  — Signes  de  congestion  cérébrale.  Agitation,  puis 
prostration  profonde  ; insensibilité  des  deux  bras  , paralysie  du  droit. 
Mort  au  bout  de  r[nclques  jours.  Auparavant,  intégrité  compli-te  dé® 
fonctions  cérébrales.  — Ramollissement  aigu.  Eamollisscrnents  ebro- 
niques  multiples  du  cerveau  et  du  cervelet. 


Richard,  âgée  de  soixante-sept  ans,  maigre  et  sèche,  est  de- 
jiuis  deux  ans  a l hospice  de  la  Salpétrière.  Elle  n’a  jamais  été 
a 1 infirmerie  pendant  ce  temps.  On  n’a  jamais  observé  chez  elle 
désignés  de  paralysie.  Deux  fois  par  semaine  elle  allait  voir  son 
mari  à Ricêtre,  à la  distance  d’une  lieue,  hiver  comme  été. 
Elle  rapportait  son  linge  cl  le  raccommodait  eile-inênie  Elle  ne 
se  servait  jamais  de  canne.  Ses  facultc's  semblaient  très-bien 
conservées.  Elle  ne  se  plaignait  jamais,  en  particulier  de  la  tète. 
Elh’  avait  fait  son  dernier  voyagea  Ricctre,  dix  jours  avant  d’en- 
trer à J’infirmcric.  11  paraît  (pic  quinze  jours  avant , elle  y était- 
|Oml.)ée  par  suite  d’im  étourdissement;  il  avait  fallu  la  ramener 


?.  V-vrou.issKMBTyï  latent.  •-*  i ( 

à la  Salpéirlôre  en  la  soutenant  par  le  bras.  Dès  lors  elle  avait 
paru  un  peu  soulîrantej  niais  elle  cliercliait  a le  cacliei,  de  peui 
d’aller  à rinfirmerie. 

Elleenlraàrinfirineriele21  niai  1840,  présentant  des  signes 
de  coiigestioii  cérébrale.  La,  face  était  rouge,  la  langue  seclie  , 
elle  était  agitée,  déraisonnait  un  peu;  elle  se  levait  d elle-même, 
allait  aux  lieux  d’aisance  en  paraissant  se  soutenir  avec  peine  et 
avant  d’y  arriver  avait  laissé  aller  sous  elle  -,  elle  parlait  volon- 
tiers, niais  avec  lenteur. 

Lavement  purgatif  le  22;  quarante  sangsues  sous  les  oreilles 
le  23  ; vésicatoire  à la  nuque  le  25. 

Le  29,  elle  est  couchée  sur  le  dos,  dans  une  immobilité  abso- 
lue, les  yeux  fixes,  les  paupières  immobiles  ; elle  ne  bouge  que 
lorsqu’on  lui  parle  ou  qu’on  l’excite.  Elle  répond  juste  à toutes 
les  questions  , ne  manque  pas  de  mémoire.  Ses  réponses  sont 
brèves  et  se  font  un  peu  attendre,  la  voix  est  faible.  Les  pu- 
pilles sont  égales,  moyennement  dilatées. 

La  teinte  de  la  face  est  terne,  les  joues  livides  ; le  bord  des 
paupières  couvert  d’une  exsudation  épaisse;  la  langue  d’une  ex- 
trême sécheresse  , croûteuse.  La  peau  est  sèche  -,  assez  chaude  ; 
le  pouls  est  plus  fréquent  et  plus  développé  que  ces  jours  der- 
niers, très-irrégulier. 

Quand  on  lui  fait  lever  les  bras,  elle  tient  bien  le  gauche  en 
l’air,  mais  le  choit  retombe  promptement  ; cependaiU  il  exécute 
cjuelques  mouvements  spontanés.  La  peau  des  deux  bras  est 
tout  à fait  insensible  au  pincement.  Les  jambes  paraissent  bien 
mobiles  et  sensibles. 

Cette  femme  mourut  le  4 juin,  de  bonne  heure.  Elle  était 
tombée  peu  à peu  dans  une  prostration  profonde,  sans  coma,  et 
•à  cela  près,  était  restée  jusqu’à  la  fin  exactement  dans  le  même 
état:  conservation  de  la  connaissance,  insensibilité  des  membres 
supérieurs  , paralysie  du  droit,  conservation  du  mouvement  et 
du  sentiment  dans  les  membres  inférieurs.  Seulement  il  était 
survenu  de  la  raideur  dans  le  coude  droit,  et  la  fièvre  était  de- 
venue plus  intense . 

ytulopsie  vingt-quatre  heures  après  ta  mort.  — Os  du  crâne 
épais. 

Ln  peu  de  sérosité  légèrement  jaunâtre  dans  la  cavité  de  l’a- 
raclinoide.  Peu  de  sérosité  dans  la  pic-inère;  quelrpies  cuille- 


378 


UAMOLLISSE^TENT  CHRONIQUE.  (SYjMPT.) 

vées  à la  base  du  crâne.  Les  artères  sont  dans  la  plus  grande 
partie  de  leur  étendue  cartilagineuses,  ossiûées  même  dans  quel- 
ques points. 

La  pie-mère  est  peu  injectée  ; mais  au-dessus  des  deux  lobes 
postérieurs,  elle  présente  une  suffusion  sanguine  qui  lui  donne 
une  rougeur  uniforme.  Elle  se  sépare  aisément  des  circonvolu- 
tions qui  sont  généralement  petites,  ratatinées,  inégales  à leur 
surface. 

A la  convexité  de  l’hémisplière  gauche , vers  la  réunion  des 
lobes  moyen  et  postérieur,  deux  circonvolutions  présentent 
à leur  sommet  des  marbrures  rougeâtres  , sans  aucune  adhé- 
rence à la  pie-mère.  Une  coupe  verticale  fait  voir  que  ces  deux 
circonvolutions  sont  dans  toute  leur  épaisseur  un  peu  ramollies, 
se  laissant  seulement  fendiller  par  un  jet  d’eau.  La  substance 
corticale  est  marbrée  de  rouge  ; ce  sont  de  petites  infiltrations 
sanguines,  on  distingue  parfaitement  le  sang  hors  des  vaisseauxj 
au-dessous,  la  substance  médullaire  ramollie  présente  de  nom- 
breux vaisseaux  très-fins,  qui  lui  donnent  par  leur  rapproche- 
ment un  aspect  rosé  et  se  dirigent  vers  la  superficie  du  cerveau. 
Un  peu  plus  en  arrière  , deux  autres  circonvolutions  sont  con- 
verties en  un  putrilage  rougeâtre,  dont  la  pie-mère  entraîne  avec 
elle  la  superficie  ; ce  ramollissement,  du  volume  d’une  grosse 
noisette , présente  également  et  de  petites  infiltrations  san- 
■guines  partielles  et  bon  nombre  de  petits  vaisseaux  injectés.  Un 
ramollissement  tout  à fait  semblable , mais  du  volume  d’une 
grosse  noix,  occupe  le  point  correspondant  de  rhémis}dière 
droit. 

Ces  altérations,  évidemment  aiguës,  étaient  accompagne'es 
d’autres  lésions  d’une  date  toute  différente. 

Vers  la  partie  moyenne  de  l’hémisphère  droit,  au  fond  dune 
anfractuosité,  on  voit,  dans  l’étendue  d’une  pièce  d’un  franc,  la 
couche  corticale  remplacée  par  une  lame  jaunâtre,  luembiani- 
forme,  non  vasculaire,  d’un  millimètre  au  plus  dépaisseui, 
au-dessous  de  laquelle  la  substance  blanche  n offrait  lien  a 
noter. 

Ma  base  du  lobe  postérieur  du  même  hémisphère,  on  trouve 
une  cavité,  pouvant  contenir  plus  qu  un  noyau  de  cerise, 
bouchée  par  la  pie-mère  (pii  passait  au  devant  sans  offrir  rien 
de  particulier,  si  c-  n’est  un  peu  de  tissu  cellulaire  qui  la  dou- 


379 


RA.M0LMS5EMENT  LATENT. 

blait.  Celle  cavilé  avail  des  parois  lisses,  un  peu  jaunâtres  et 
dures  au  touclier,  qu'environnait  la  substance  médullaire  saine. 
A Tintérieur  elle  présentait  de  petites  fibres  blanchâtres,  fra- 
giles, celluleuses,  entrecroisées,  et  baignées  d’un  liquide  blan- 
châtre, très-légèrement  trouble. 

La  substance  médullaire,  voisine  du  corps  strie,  était  molle, 
raréfiée,  dans  une  assez  grande  étendue,  très-blanche  et  sans 
vaisseaux.  Le  corps  strié  lui-même  était  altéré  j on  n y pouvait 
pratiquer  de  coupes  nettes  •,  l’arrangement  de  ses  fibres  parais- 
sait altéré,  mais  il  était  endurci,  avec  une  teinte  légèrement  jau- 
nâtre. 

A la  face  inférieure  du  lobe  droit  du  cervelet,  on  trouva  une 
petite  cavité,  bouchée  parla  pie-mère,  pleine  de  tissu  cellu- 
laire infiltré  de  lait  de  chaux  , à parois  indurées  , tout  à fait 
semblable  à celle  de  la  base  de  l’hémisphère  droit. 

Dans  le  centre  de  ce  même  lobe,  petite  cavilé  de  la  forme 
d’une  très-petite  amande,  dirigée  transversalement,  à parois 
rapprochées,  contenant  un  peu  de  liquide  incolore.  Ses  parois 
étaient  indurées  dans  une  certaine  étendue  , sans  changement 
appréciable  de  couleur. 

Engouement  des  poumons.  Le  cœur  est  sain. 


On  ne  .saurait  avoir  aucun  doute  sur  la  nature  des  altérations 
chroniques  trouvées  dans  le  cerveau  de  celte  femme,  et  dont 
l’étude  emprunte  encore  de  l’intérêt  au  voisinage  des  lésions 
aiguës  et  bien  cai'actérisées  qui  s’y  rencontraient  également. 

Notons  d’abord  le  ramollissement  blanc,  voisin  du  corps  strié, 
puis  l’induration  de  ce  dernier,  puis  cette  plaque  jaune  de 
l’hémisphère  droit.  Quant  aux  deux  cavités  superficielles  de 
l’hémisphère  droit  du  cerveau  et  du  lobe  droit  du  cervelet,  à 
parois  indurées,  traversées  débridés  celluleuses,  infiltrées  d’un 
liquide  trouble,  et  béantes  à la  périphérie  où  elles  étaient  seu- 
lement bouchées  par  la  pie-mère,  elles  nous  offrent  des  exemples 
d’infiltrations  celluleuses  bien  circonscrites  et  même  guéries, 
en  ce  sens  que  le  travail  qui  avait  présidé  à leur  développement 
paraissait  entièrement  arrêté.  A ceux  qui  voudraient  encore  voir 
là  d’anciens  foyens  héniorrbagicities,  il  me  suffirait  de  rappeler  ce 
que  j’ai  déjàsisouvent  représenté,  quedesfoyers hémorrhagiques 


K amoij.bsf.aik-vt  r.H?.n?frQi!F.  (sympt.)- 

ne  peuvent  s’ouvrlr  à la  surface  du  cerveau,  sans  épancher  le 
sang  au  dehors  de  cet  organe,  et  qu’une  semblable  supposition 
est  aussi  inadmissible  dans  ce  cas  que  dans  les  autres  faits  de  ce 
genre.  Il  n’y  a que  la  petite  cavité  du  centre  du  cervelet,  dont 
tous  les  caractères  étaient  ceux  d’un  foyer  hémorrhagique. 

Les  renseignements  qui  m’ont  été  fournis  sur  la  femme  Ri- 
chard sont  de  telle  nature,  qu’ils  m’ont  permis  d’acquérir  la 
certitude  de  l’absence  complète  de  tous  symptômes  cérébraux 
pendant  les  dernières  années  de  la  vie.  Il  est  fort  probable,  du 
reste,  qu’à  l’époque  où  s’étaient  formées  les  altérations  dont  nous 
letiouvons  les  traces  dans  le  cerveau,  elle  avait  éprouvé  des 
accidents  plus  ou  moins  prononcés  j aussi  rappellerai-je  ce 
fait  au  chapitre  de  la  Curabilité  du  ramollissement. 

ÜESEnvATioN  104. — Paraplégie  ancienne;  céphalalgie  habituelle.  Hé- 
miplégie subite;  délii'e;  résolution  générale  ; mort  au  bout  de  dix-sep^ 
heures.  — Hémorrhagie  de  l’arachnoïde  ; iuliltration  sanguine  du  cer- 
veau ; petits  foyers  de  la  protubérance.  Ramollissement  pulpeux  du 
cerveau  et  de  la  moelle  épinière. 

Catherine  Jacob,  âgée  de  quarante-trois  ans,  est  depuis  dix 
ans  affectée  d’une  paraplégie  à peu  près  complète,  survenue  à 
la  suite  d’une  clmte  sur  le  siège.  Il  n’y  a point  paralysie  des 
sphincters.  Le  mouvement  des  membres  supérieurs  est  intact, 
et  l’occupation  liabituelle  de  cette  femme  est  la  couture.  On  n’a 
remarqué  aucun  trouble  de  l’intelligence  ni  de  la  parole  ; la 
face  n’est  point  déviée.  Elle  est  sujette  à des  vomissements  que 
l’on  attribue  à une  gasirite  chronique,  et  pour  lesquels  elle  s^est 
fait  traiter  récemment  dans  le  service  de  M.  Prus  ; on  n’a  con- 
staté à cette  occasion  rien  autre  chose,  du  côté  du  .système  ner- 
veux, que  la  paraplégie.  Celte  femme  est  en  outre  sujette  à des 
maux  de  tète. 

bille  s’en  plaignait  plus  qu’à  l’ordinaire  le  2 juin  1838,  et, 
dans  la  soirée,  il  lui  arriva  pour  La  première  fois  de  laisser  aller 
sous  elle. 

Le  Icudcmain,  à dix  heures  du  matin,  après  avoir  mangé  la 
.soupe,  elle  perdit  tout  à coup  la  connaissance  et  la  parole.  .Te  la 
trouvai  un  instant  après  sans  connaissance,  la  pupille  gauche 
dilatée,  la  droite  contractée,  toutes  deux  immobiles  ; le  Inas 
droit  ilasque  et  rnmpléteineut  dévié. Le  bras  gauche  s’agite  sans 


381 


llAMOLLl&SJiMIiiM'  LAIÜÏNÏ. 

cesse,  et  la  malade  se  fioUe  presque  contiimellemcut  le  liez 
avec  le  dos  de  la  main,  quelquefois  le  ventre.  Les  membres  m- 
l'érieurs  sont  complètement  paralysés  sans  raideur;  ils  sont 
absolument  insensibles,  ainsi  que  le  bras  droit  et  le  cote  droit 
de  la  face.  Efforts  de  vomissement.  La  bouebe  n’est  pas  déviée. 

(30  sangsues  au  cou,  lav.  purg.) 

Après  les  sangsues,  il  survint  une  agitation  excessive  ; elle 
avait  repris  une  partie  de  ses  sens,  et,  ne  pouvant  parler,  elle 
faisait  effort  pour  crier.  On  prétend  lui  avoir  vu  alors  remuer  les 
deux  bras.  11  fallut  l’attacber  de  peur  qu’elle  ne  tombât  de  son 
lit.  Elle  se  calma  dans  la  soirée.  A onze  beurcs  elle  était  dans 
un  coma  profond , avec  résolution  et  insensibilité  générales.  La 
dé.glutition  était  impossible;  la  respiration  fort  difficile  et  inter- 
mittente. Elle  mourut  à trois  lieures  du  matin,  dix-sept  heures 
après  le  début. 

Autopsie  trente-deux  heures  après  la  mort.  — Il  s’écoule  de 
la  cavité  de  l’aracbnoïde  une  certaine  qnanlite  de  sérosité  san- 
guinolente. Le  feuillet  pariétal  de  la  séreuse  est  tapissé  par  une 
lame  mince,  rouge,  demi-transparente,  mollement  adhérente. 
La  pie-mère  ne  contient  qu’a  peine  de  sérosité. 

On  trouve  dans  l’hémisphère  droit,  au-dessous  de  la  portion 
réfléchie  du  ventricule,  un  point  assez  étendu,  de  couleur  lie- 
de-vin,  un  peu  ramolli,  occupant  et  la  substance  blanche  et  la 
substance  grise  des  circonvolutions  de  la  base.  La  protubérance 
contient  quatre  ou  cinq  petits  foyers  de  sang,  gros  comme  une 
lentille  : la  substance  cérébrale  est  saine  à l’entour.  Les  ven- 
tricules contiennent  très-peu  de  sérosité. 

Au  centre  du  lobe  postérieur  de  l’hémisphère  gauche,  la  sub- 
stance médullaire  présente  un  ramollissement  pulpeux,  assez 
étendu,  se  laissant  délayer  par  un  filet  d’eau,  d’une  grande 
blancheur. 

Il  y a dans  le  canal  rachidieir  une  quantité  normale  de  sé- 
rosité non  sanguinolente.  La  région  dorsale  de  la  moelle  pré- 
sente dans  sa  nroitié  supérieure  un  ramollissement  qui  en  oc- 
cupe toute  l’épaisseur,  mais,  en  haut,  s’étend  plus  loin  dans  la 
substance  grise  centrale.  Ce  ramollis.sement  pulpeux,  sans  alté- 
ration de  couleur,  a tout  à fait  la  inêine  apparence  que  lo  ra- 
mollissement du  cerveau. 

Les  poumons  ne  sont  que  légèrciuent  engoués.  Le  cœur  est 


382 


RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE.  (SYMPT.) 

volumineux;  les  parois  du  ventricule  gauche  hypertrophiées. 
L’estomac  a son  volume  normal;  sa  muqueuse  est  épaisse  et 
présente  une  injection  générale  assez  serrée. 


Ici,  pour  expliquer  les  accidents  qui  ont  précédé  et  causé  la 
mort,  il  y a surabondance  de  lésions  aiguës  ; hémorrhagie  dans 
l’arachnoïde  , dans  riiémisphère  droit  par  infiltration  , dans  la 
protubérance  par  petits  épanchements  multiples  ; seulement, 
comme  il  n’y  avait  eu  de  paralysie  qu’à  droite,  il  est  à regret- 
ter que  l’observation  ne  nous  donne  pas  déplus  amples  détails 
sur  les  foyers  de  la  protubérance,  dont  la  disposition  eût  sans 
doute  rendu  compte  de  cette  circonstance.  Personne  ne  pensera 
sans  doute  que  le  ramollissement  pulpeux  et  sans  coloration  de 
l’hémisphère  gauche  se  fûtformé  en  dix-sept  heures,  bien  que  la 
malade  ne  présentât  auparavant  que  delà  céphalalgie,  signe  fort 
insuffisant  pour  caractériser  à lui  seul  un  ramollissement.  On  a 
remarqué  la  ressemblance  de  ce  ramollissement  avec  celui  de  la 
moelle  qui  datait  de  dix  ans. 

Observation  io5.  — Intégrité  apparente  des  fonctions  cérébrales. 
Mort  en  soixante-dix  heures  d’une  hémorrhagie  cérébrale. — Ramollis- 
sement chronique  du  cerveau. 

Une  femme,  nommée  Mas,  âgée  de  quatre-vingt- six  ans,  était 
entrée  depuis  plusieurs  mois  à la  Salpétrière  ; on  n’avait  jamais 
rien  remarqué  chez  elle  qui  parût  résulter  de  quelque  trouble 
des  fonctions  cérébrales.  Elle  était  fort  maigre,  et  le  teint  na- 
turellement peu  coloré.  Son  intelligence,  assure-t-on,  était  re- 
marquablement conservée  pour  son  âge  ; sa  parole  n’était  au- 
cunement altérée.  Les  mouvements  de  ses  membres  semblaient 
également  libres  des  deux  côtés  : elle  marchait  sans  boiter  et 
sans  s’appuyer  sur  un  bâton,  n’avait  jamais  accusé  de  faiblesse 
d’un  bras.  Elle  était  trop  âgée,  du  reste,  pour  se  livrer  à aucune 
occupation.  Elle  se  plaignait  quelquefois  de  maux  de  tête,  ja- 
mais d’étourdissements,  mais  beaucoup  d’étouffements,  et  la 
nuit  elle  était  souvent  obligée  de  se  tenir  assise  sur  son  séant. 

Le  22  juin  1839,  elle  eut  une  attaque  d’apoplexie  à laquelle 
elle  succomba  en  soixante-dix  heures  : il  n’est  pas  nécessaire  de 
rapporter  ici  le  détail  des  accidents  qu’elle  éprouva. 


383 


RAMOLLlSSIiMENT  LATENT. 

Autopsie  trente-sept  heures  après  la  mort. — On  trouva  le  lobe 
postérieur  et  le  lobe  moyen  de  l’hémisphère  droit  du  cerveau 
creusés  à leur  partie  externe  d’un  énorme  foyer  sanguin,  plus 
volumineux  qu’un  gros  oeuf  de  poule.  Ce  foyei  présentait  une 
déchirure  étroite  qui  avait  permis  au  sang  de  s’épancher  en  cer- 
taine quantité  dans  les  méninges. 

A la  partie  interne  du  même  lobe  postérieur  se  rencontra  une 
altération  d’une  toute  autre  nature.  A peu  près  à trois  centi- 
mètres de  la  pointe  occipitale,  trois  ou  quatre  circonvolutions, 
et  les  anfractuosités  qui  leur  sont  communes,  sont  tout  a fait 
détruites,  ou  plutôt  transformées  en  un  tissu  mince,  aplati,  d un 
jaune  très-clair,  membraniforme,  de  tm  à deux  millimètres 
d’épaisseur,  que  je  ne  puis  mieux  comparer  pour  sa  texture  et 
sa  consistance,  et  l’impression  qu’il  donne  au  toucher,  qu  à une 
toile  d’araigiîée,  un  peu  dense  et  épaisse.  La  pie-mère  s’enlève  de 
sa  surface  sans  la  déchirer,  et  la  laisse  couverte  d’une  lame  très- 
mince  de  tissu  cellulaire,  assez  vasculaire  et  bien  distincte  de 
l’altération  elle-même.  Au-dessous,  la  substance  médullaire  est 
molle,  comme  floconneuse,  grisâtre,  ce  qui  paraît  dû  à l’infil- 
tration d’une  petite  quantité  de  liquide  lait  de  chaux.  Ce  ra- 
mollissement s’étend  à un  ou  detix  centimètres  de  profondeur, 
assez  mal  limité  sur  ses  bords,  et  se  rapproche  du  ventricule.  La 
lame  mince  et  membraniforme  de  la  superficie  semble  s’attacher 
à la  couche  corticale  des  circonvolutions  demeurées  saines.  On 
ne  remarque  point  de  vaisseaux  dans  le  tissu  ramolli  ; il  n’y  a 
pas  d’injection  à l’entour  lui.  Tout  près  de  la  cavité  digitale 
du  ventricule,  on  trouve  une  petite  cavité,  assez  arrondie,  pou- 
vant contenir  une  noisette  dépouillée  de  ses  enveloppes,  à parois 
blanches,  tapissées  d’une  membrane  lisse  et  comme  séreuse,  et 
contenant  un  peu  de  liquide  lait  de  chaux. 

Il  n’y  avait  rien  à noter  dans  le  reste  de  l’encéphale.  Plaques 
opaques  et  jaunâtres  des  plus  gros  vaisseaux  de  la  base.  Petite 
quantité  de  sérosité. 

Il  y avait  une  double  pneumonie.  Le  cœur,  plein  de  sang  li- 
I quide,  était  notablement  dilaté,  surtout  le  ventricule  gauche, 
sans  hypertrophie  de  ses  parois. 


Observation  io6.  — Mort  par  une  hémorrhagie  du  cervelet.  Point 


382  ramollissememt  chronique,  (sympi.) 

volumineux  ; les  parois  du  ventricule  gauche  hypertrophiées. 
L’estomac  a son  volume  normal;  sa  muqueuse  est  épaisse  et 
présente  une  injection  générale  assez  serrée. 


Ici,  pour  expliquer  les  accidents  qui  ont  précédé  et  causé  la 
mort,  il  y a surabondance  de  lésions  aigues  ; hémorrhagie  dans 
l’arachnoïde  , dans  l’hémisphère  droit  par  infiltration , dans  la 
protubérance  par  petits  épanchements  multiples  ; seulement, 
comme  il  n’y  avait  eu  de  paralysie  qu’à  droite,  il  est  à regret- 
ter que  l’observation  ne  nous  donne  pas  de  plus  amples  détails 
sur  les  foyers  de  la  protubérance,  dont  la  disposition  eût  sans 
doute  rendu  compte  de  cette  circonstance.  Personne  ne  pensera 
sans  doute  que  le  ramollissement  pulpeux  et  sans  coloration  de 
l’hémisphère  gauche  se  fiitformé  en  dix-sept  heures,  bien  que  la 
malade  ne  présentât  auparavant  que  delà  céphalalgie,  signe  fort 
insuffisant  pour  caractériser  à lui  seul  un  ramollissement.  On  a 
remarqué  la  ressemblance  de  ce  ramollissement  avec  celui  de  la 
moelle  qui  datait  de  dix  ans. 

Observation  io5.  — Intégrité  apparente  des  fonctions  cérébrales. 
Mort  en  soixante-dix  heures  d’une  hémorrhagie  cérébrale. — Ramollis- 
sement chronique  du  cerveau. 

Une  femme,  nommée  Mas,  âgée  de  quatre-vingt-six  ans,  était 
entrée  depuis  plusieurs  mois  à la  Salpétrière  ; on  n’avait  jamais 
rien  remarqué  chez  elle  qui  parût  résulter  de  quelque  trouble 
des  fonctions  cérébrales.  Elle  était  fort  maigre,  et  le  teint  na- 
turellement peu  coloré.  Son  intelligence,  assure-t-on,  était  re- 
marquablement conservée  pour  son  âge  ; sa  parole  n’était  au- 
cunement altérée.  Les  mouvements  de  ses  membres  semblaient 
également  libres  des  deux  côtés  : elle  marchait  sans  boiter  et 
sans  s’appuyer  sur  un  bâton,  n’avait  jamais  accusé  de  faiblesse 
d’un  bras.  Elle  était  trop  âgée,  du  reste,  pour  se  livrer  à aucune 
occupation.  Elle  se  plaignait  quelquefois  de  maux  de  tête,  ja- 
mais d’étourdissements,  mais  beaucoup  d’étouffements,  et  la 
nuit  elle  était  souvent  obligée  de  se  tenir  assise  sur  son  séant. 

Le  22  juin  1839,  elle  eut  une  attaque  d’apoplexie  à laquelle 
elle  succomba  en  soixante-dix  heures  : il  n’est  pas  nécessaire  de 
rapporter  ici  le  détail  des  accidents  qu’elle  éprouva. 


RAMOLLlSSliMENÏ  LATENT. 


383 


Autopsie  trente-sept  heures  apres  la  mort. — On  trouva  le  lobe 
postérieur  et  le  lobe  moyen  de  l’hémisphère  droit  du  cerveau 
creusés  à leur  partie  externe  d un  enorme  foyer  sanguin,  plus 
volumineux  qu’un  gros  œuf  de  poule.  Ce  foyer  présentait  une 
déchirure  étroite  qui  avait  permis  au  sang  de  s’épancher  en  cer- 
taine quantité  dans  les  méninges. 

A la  partie  interne  du  même  lobe  postérieur  se  rencontra  une 
altération  d’une  toute  autre  nature.  A peu  près  à trois  centi- 
mètres de  la  pointe  occipitale,  trois  ou  quatre  circonvolutions, 
et  les  anfractuosités  qui  leur  sont  communes,  sont  tout  a fait 
détruites,  ou  plutôt  transformées  en  un  tissu  mince,  aplati,  d’un 
jaune  très-clair,  membraniforme,  de  un  à deux  millimètres 
d’épaisseur,  que  je  ne  puis  mieux  comparer  pour  sa  texture  et 
sa  consistance,  et  l’impression  qu’il  donne  au  toucher,  qu’à  une 
toile  d’araignée,  un  peu  dense  et  épaisse.  La  pie-mère  s’enlève  de 
sa  surface  sans  la  déchirer,  et  la  laisse  couverte  d’une  lame  très- 
mince  de  tissu  cellulaire,  assez  vasculaire  et  bien  distincte  de 
l’altération  elle-même.  Au-dessous,  la  substance  médullaire  est 
molle,  comme  floconneuse,  gi'isâtre,  ce  qui  paraît  dû  à l’infil- 
tration d’une  petite  quantité  de  liquide  lait  de  chaux.  Ce  ra- 
mollissement s'étend  à un  ou  deux  centimètres  de  profondeur, 
assez  mal  limité  sur  ses  bords,  et  se  rapproche  du  ventricule.  La 
lame  mince  et  membraniforme  de  la  superficie  semble  s’attacher 
à la  couche  corticale  des  circonvolutions  demeurées  saines.  On 
ne  remarque  point  de  vaisseaux  dans  le  tissu  ramolli  ; il  n’y  a 
pas  d’injection  à l’entour  lui.  Tout  près  de  la  cavité  digitale 
du  ventricule,  on  trouve  une  petite  cavité,  assez  arrondie,  pou- 
vant contenir  une  noisette  dépouillée  de  ses  enveloppes,  à parois 
blanches,  tapissées  d’une  membrane  lisse  et  comme  séreuse,  et 
contenant  un  peu  de  liquide  lait  de  chaux. 

Il  n’y  avait  rien  à noter  dans  le  reste  de  l’encéphale.  Plaques 
I opaques  et  jaunâtres  des  plus  gros  vaisseaux  de  la  base.  Petite 
i quantité  de  sérosité. 

Il  y avait  une  double  pneumonie.  Le  cœur,  plein  de  sang  li- 
quide, était  notablement  dilaté,  surtout  le  ventricule  gauche, 
sans  hypertrophie  de  ses  parois. 


Observation  io6.  — Mort  par  une  hémorrhagie  du  cervelet.  Point 


( 


KAMULJLlSsli.UEAT  CHKORlQljü.  (sYAIl>X.) 

d’autres  troubles  cérébraux,  depuis  longtemps,  quede  la  céphalalgie  et 
«les  étourdissements.  — Piamollissement  chronique  des  parois  du  ven- 
tricule droit. 

La  uoiniuée  Leblanc,  âgée  de  soixante-quinze  ans,  succomba, 
en  dix-sepl  heures,  à une  hémorrhagie  du  cervelet.  Voici  quels 
renseignements  j’ai  obtenus  des  personnes  cjui  vivaient  habi- 
tuellement avec  elle,  renseignements  qui  m’ont  paru  offrir  quel- 
que certitude. 

Elle  s’était  cassé  la  jainbe,  il  y a cinq  ans,  et  depuis  lors  n’c- 
tait  pas  allée  une  seule  fois  à l’infirmerie.  Depuis  cette  époque 
elle  boitait  et  ne  pouvait  marcher  sans  s’appuyer  .sur  un 
bâton.  Depuis  quelque  temps  elle  avait  été  obligée  de  cesser 
de  s'occuper  à tricoter,  comme  elle  faisait  autrefois  j cependant, 
toujours  agissante,,  le  matin  de  son  attac|ue,  elle  avait  préparé 
elle- même  son  déjeuner,  et  avait  aidé  à nettoyer  son  dortoir. 
Elle  parlait  sans  aucune  difficulté  ; elle  aimait  à plaisanter  et 
avait  des  prétentions  à faire  de  l’esprit.  Assez  généralement  souf- 
frante, surtout  dans  ces  derniers  temps,  elle  toussait  beaucoup, 
se  plaignait  d’oppression,  de  frissons.  Elle  se  plaignait  souvent 
de  céphalalgie,  d’étourdissements  ; quand  ceux-ci  lui  prenaient, 
elle  n’y  voyait  plus  clair  ; cependant  ils  n’étaient  jamais  assez 
forts  pour  qu’elle  tombât  par  teire  ou  perdît  connaissance.  Elle 
n’avail  jamais  parlé  d’ancienne  attaque,  et  personne  n’avait  ja- 
mais remarqué  chez  elle  aucune  trace  de  paralysie.  Depuis  plu- 
sieurs mois  elle  baissait  beaucoup,  et  on  l’avait  plusieurs  fois 
engagée  à aller  à l’infirmerie. 

Autopsie  vingt-quatre  heures  après  la  mort.  • — On  trouva  une 
vaste  hémorrhagie  de  l’hémisphère  gauche  du  cervelet. 

La  voûte  et  le  septum  lucidum  étaient  complètement  ramol- 
lis et  convertis  en  un  tissu  rosé,  ou  plutôt  parsemé  d’un  grand 
nombre  de  points  rouges,  sans  aucune  consistance  , se  laissant 
délayer  par  un  courant  d’eau.  La  face  inferieure  du  corps  cal- 
leux présentait  un  ramollissement  tout  semblable. 

Les  quatre  ventricules  et  l’aqueduc  de  Sylvius  avaient  des 
dimensions  énormes,  dues  à la  distension  opérée  par  une  grande 
quantité  de  sérosité  rougeâtre  qui  les  remplissait  et  qui  s’était 
écoulée. 

Les  parois  des  ventrictiles  latéraux  étaient  rauioUies  dans  une 


K A JI  OLl.  XS  s E.M  K NX  AX  EN  X . 


SS  S 


J>iautlc  partie  do  leur  étendue,  niais  surtout  à leurs  cxlrénulcs 
antérieure  et  postérieure.  A l’extrémité  antérieure  du  ventricule 
droit,  la  ineinbrane  interne  était  coiume  disséquée  et  séparée  du 
tissu  sous-jacent;  celui-ci  était,  dans  un  point,  lougeatie  et  su- 
perficiellement ramolli;  dans  un  autre,  il  formait  des  faisceaux 
lilancs,  strjés  longitudinalement,  entrecroisés,  assez  semlilables, 
en  petit,  aux  colonnes  cbarnues  de  second  ordre  c|ui  tapissent 


les  ventricules  du  cœur.  La  substance  médullaire  sous-jacente 
était  dans  l’épaisseur  d’à  peu  près  deux  millimètres,  comme  ra- 
réfiée, comme  si  elle  avait  été  le  siège  d'une  sorte  d’atropbie 
interstitielle.  Toute  la  partie  postérieure  de  ce  ventricule  était 
aussi  ramollie  superficiellemeut;  la  membrane  interne  détruite  ; 
une  couebe  très-mince  de  sang  coagulé  recouvrait  une  partie 
du  tissu  ramolli  ; le  reste  était  soulevé  par  un  courant  d’eau  en 


forme  de  chevelu  blanchâtre,  tacheté  d'un  grand  nombre  de 
points  rouges.  Ce  dernier  ramollissement  ressemblait  beaucoup, 
comme  on  le  voit,  à celui  qui  forme  les  parois  des  foyers  hé- 
morrhagiques récents. 

Au  milieu  de  ce  tissu  ramolli,  du  plancher  inférieur  du  ven- 
tricule, naissaient  trois  petites  végétations  arrondies,  du  volume 
d’un  petit  pois,  formées  d’un  tissu  grisâtre,  ayant  la  teinte  de  la 
substance  corticale  des  circonvohztions , mais  une  plus  grande 
consistance. 

Les  parois  du  ventricule  gauche  présentaient  des  altérations 
analogues,  mais  beaucoup  moindres.  Les  corps  striés  et  les  cou- 
ches optiques  étaient  parfaitement  sains  à leur  surface  et  dans 
leur  intérieur. 


Les  ramollissements  que  nous  trouvons  décrits  dans  ces  deux 
observations  présentaient , au  moins  dans  une  partie  de  leur 
étendue,  des  conditions  de  texture  qui  ne  permettent  pas  de 
douter  de  leur  ancienneté.  J’ai  exposé  tout  au  long  les  l enseigne- 
ments  que  j’ai  pu  me  procurer  sur  ces  deux  femmes  ; le  lecteur 
jugera  s’ils  sont  de  nature  à nous  autoriser  à considérer  ces  ra- 
mollissements comme  latents.. Te  ferai  remarquer  que,  dans  le  cas 
de  Leblanc,  où  les  renseignements  remontent  à cinq  ans,  et  où 
le  ramojlissemcat,  n’ayant  que  peu  d’étendue  et  de  profondeur, 
ne  date  sans  doute  pas  d’une  époque  aussi  éloignée,  il  est  tout  à 
• 25 


386  KAIMOLLlSSliMlilVÏ  CMUOKIQUE.  (SYMPT.) 

fait  probable  que  celle  allération  s’est  développée  Icnteuieut,  et 
sans  avoir  donné  lieu  à aucun  symptôme,  à aucune , époque  de 
son  existence. 

Je  dois  rappeler  ici  notre  77®  observation,  celle  deThirion. 
Cette  femme  vint  mourir,  à l’inâmierie  de  la  Salpétrière,  d’une 
maladie  du  cœur.  Son  intelligence  était  parfaitement  conservée. 
Elle  fut  examinée  avec  soin,  interrogée  sur  ses  antécédents  ; 
rien,  ni  dans  ses  réponses,  ni  dans  sa  personne,  n’était  de  na- 
ture à nous  faire  soupçonner  une  altération  du  cerveau,  dont  les 
fonctions  ne  furent  pas  par  conséquent  l’objet  d’un  examen  spé- 
cial. Eli  bien,  on  trouva  à la  superficie  du  cerveau  de  nom- 
breuses plaques  jaunes  et  une  ulcération  étendue,  un  vaste  ra- 
mollissement de  la  substance  médullaire  d’un  hémisphère,  un 
ramollissement  du  cervelet. 

M.  Lallemand  rapporte  une  observation,  non  pas  de  ramol- 
lissement latent,  mais  d’induration  latente,  induration  qui  sans 
doute  avait  elle-même  pour  origine  un  ramollissement. 

\ 

Observation  107. — Induration  d’une  circonvolution  sans  aucun 
symptôme  cérébral.  Mort  par  un  ramollissement  aigu. 

Un  homme  âgé  de  trente  ans  entra  à l’Hôtel-Dieu,  présentant 
tous  les  signes  d’une  phthisie  pulmonaire  avancée,  mais  aucun 
indice  d’une  lésion  de  l’encéphale.  Quelques  jours  après,  il  fut 
pris  d’embarras  de  la  parole,  puis  d’impossibilité  d’articuler  *, 
trente  heures  après,  il  tomba  dans  le  coma,  et  mourut  à peu  près 
cinquante  heures  apres  le  début  de  ces  accidents. 

Autopsie.  — La  substance  céiébrale  est  peu  consistante,  et  les 
plus  petits  ramuscules  sanguins  sont  plus  injectes  que  de  cou- 
tume. A la  suiface  inférieure  du  moyen  lobe,  en  dehors  de  la 
couche  optique  et  du  corps  strié,  endurcissement  cartilagineux 
en  forme  de  cupule,  de  l’étendue  d’une  pièce  de  trois  francs, 
résistant  et  criant  sous  le  scalpel,  emboîtant  pour  ainsi  dire  la 
circonvolution  sous  jacente;  substance  grise  de  cette  circonvo- 
lution ramollie  et  pénétrée  de  sang  récemment  infiltre;  sub- 
stance blanche  également  ramollie  et  d’une  teinte  jaunatie  fl). 


(1)  LiiUcHiuijd,  heure  Vi,  11.  'J. 


Ri^MOiitilSSEMENT  LA.TEAX. 


38T 


Observation  io8.  — Ramollissement  pulpeux  chocolat  du  corps 
strié  et  de  la  couche  optique  gauches. 

Un  maçon  de  23  ans  était  aft’ecté  d’une  communication  des 
deux  ventricules  du  cœur.  11  était  phthisique,  sujet  à delà 
dyspnée  et  à des  palpitations.  Il  n’avait  ni  céphalalgie  ni  vertiges. 
Il  éprouvait  seulement  des  étourdissements  frequents.  Il  suc- 
comba peu  après  une  hémoptysie.  Ce  malade  avait  été  examiné 
et  interrogé  sur  ses  antéce'dents , avec  tout  le  soin  que  l’on 
connaît  au  savant  observateur  auquel  j’emprunte  ce  fait  : l’ab- 
sence de  tous  symptômes  cérébrau.x  avait  été  parfaitement 
constatée. 

yiutopsie  le  25  o,yril , seize  heures  après  lu  mort.  — La  cavité 
de  l’arachnoïde  contenait  de  trois  à quatre  petites  cuillerées 
de  sérosité  louche  ; la  pie-mère  était  très-rouge  , la  substance 
corticale  très-rosée  , la  médullaire  très-injectée,  mais  d’ailleurs 
d’une  couleur  naturelle.  Le  ventricule  latéral  gauche  contenait 
environ  une  cuillerée  et  demie  de  sérosité  : à droite  il  n’y  en 
avait  nulle  trace , et  la  partie  antérieure  du  corps  strié  était 
d’un  rouge  brun  chocolat,  ramollie  , à consistance  de  crème, 
dans  une  épaisseur  de  six  lignes  , une  hauteur  de  quatre  et  la 
longueur  d’un  pouce  ; l’arachnoïde  correspondante  était  un 
peu  épaissie,  mais  sans  la  moindre  trace  de  fausse  membrane. 
Un  peu  en  arrière  et  dans  la  couche  optique  du  même  côté, 
était  un  second  ramollissement  tout  à fait  semblable  au  pre- 
mier, un  peu  moins  étendu  seulement , autour  duquel  la  sub- 
stance médullaire  était  jaunâtre  et  un  peu  ramollie.  Je  passe 
sous  silence  les 'altérations  des  autres  organes  (1). 


M.  Louis  a rapporté,  dans  un  autre  travail,  un  second  fait 
qu’il  donne  également  pour  un  exemple  de  ramollissement 
latent,  mais  dans  lequel  l’altération  du  cerveau  est  beaucoup 
moins  bien  caractérisée  que  dans  le  cas  précédent.  Un  menui- 
sier , âgé  de  vingt-un  ans,  passait  devant  la  Charité,  allant 
déjeuner , lorsqu’il  tomba  tout  à coup  sans  mouvement.  Un 
quart- d’heure  après  il  était  mort.  On  trouva  à l’autopsie  pra- 

(t)  Louis,  Mémoire  iur  la  comintinicalion  îles  c unies  (Ii  uUr.s  arm  Us  ca~ 
nUs  gauches  du  cœut  i x*  obseuv. 


38S  nA.MOLLlSSEMEM'  CHIlOJMQUE.  (sVAIET.) 

liquée  le  13  septembre  , vingt-deux  heures  après  la  mort , que 
le  cerveau  était  en  général  plus  mou  qu’à  l’ordinaire,  ainsi  que  le 
cervelet,  la  moelle  alongée  et  la  moelle  épinière.  En  outre,  le 
lobe  antérieur  gauche  et  le  corps  strié  correspondant  étaient 
plus  mous  évidemment  que  ceux  du  coté  opposé  ; la  cloison 
transparente  et  une  partie  des  piliers  de  la  voûte  étaient  encore 
plus  ramollies  , sans  néanmoins  être  pulpeuses.  La  substance 
médullaire  n’était  pas  injectée  , les  ventricules  latéraux  con- 
tenaient chacun  une  petite  cuillerée  de  sérosité  (1). 

M.  Andral  rapporte  quatre  observations  de  ramoflisseinent 
sans  symptômes  ; voici  l’analyse  succincte  des  trois  pre- 
mières (2)  : 

Oiis.  1.  — \ieillard  de  dix-huit  ans.  Mort  dans  l’adynamie, 
sans  symptômes  cérébraux  particuliers.  L’hémisphère  gauche 
est  transformé  à sa  base,  dans  l’ctendue  d’un  œuf  de  poule,  en 
une  bouillie  d’un  blanc  sale. 

Obs.  II.  — Un  homme,  âgé  de  quarante-sept  ans,  succomba 
à un  cancer  du  foie  et  de  l’estomac,  sans  avoir  présenté  de 
symptômes  du  côté  du  cerveau.  Plusieurs  points  du  cerveau 
présentaient  un  ramollissement  blanc  considérable  ; toute  la 
substance  blanche  des  deux  couches  optiques , quelques  cir- 
convolutions , le  pourtour  des  cavités  ancyroïdes,  la  base  de 
l’hémisphère  gauche. 

Obs.  ni.  — Un  homme,  âgé  de  soixante- onze  ans , mourut 
des  suites  d’une  affection  chronique  de  la  poitrine  et  de  l’ab- 
domen. Aucune  altération  des  fonctions  cérébrales.  Ramollis- 
sement blanc  de  la  voûte  , du  lobe  postérieur  de  riiémisphère 
gauche  et  du  lobe  moyen  de  l’hémisphère  droit. 

•Te  citerai  le  quatrième  fait,  au  chapitre  de  la  guérison  du  ra- 
mollissement. 


(I)  Louis,  Miinoire  sur  les  morts  subites  j vn  ousriiv. 
(5)  Amiral,  Clinique,  l.  v,  p.  3'Jl  et  sui\ . 


DTAGiNOSTIC. 


.^89 


; 

CHAPITRE  VIH. 

DIAfiNOSTTC  I)ü  BAMOLT.ISSEMEM  CDRONIOITE. 


.le  ne  lu’occiipcMal  pas  ici  du  dlappiosllc  du  rainollissetuent 
clirouique  à son  début,  bien  que  ce  soit  l’époque  à laquelle  il 
importe  le  plus  de  savoir  bien  reconnaître  la  nature  de  cette 
maladie.  Le  ramollissement  ebronique,  succédant  en  p;énéral  ù 
nu  ramollissement  aip;u,  les  détails  (}ue  j’ai  donnes  précédem- 
ment, lelativement  au  diafjno.stic  de  ce  dernier,  .se  trouvent  par- 
iaitement  applicables  à la  première  pciiode  du  v.amollisscmenl 
chronique. 

Ce  qu’il  nous  faut  étudier  ici,  ce  sont  les  moyens  de  recon- 
naître un  ramollissement  cluonicjue  à une  époque  plus  avancée 
de  son  développement,  lorsque  l’on  se  trouvera  privé  de  ren- 
seignements précis  sur  son  début,  ou  bien  encore  lorsqu  une  er- 
reur aura  été  commise  dans  le  principe,  ou  que  l’on  sera  resté 
dans  le  doute  sur  la  nature  de  la  maladie  au  moment  do  son 
apparition.  Kous  aurons  encore  à étudier  les  moyens  de  recon- 
naître le  ramollissement  qui  viendrait  à se  développer  à l’entour 
ou  à une  distance  rpielconquc  d’une  altération  organiq:ie  pré 
existante,  ainsi  d’un  ancien  foyer  bémorriiagiquc  ou  d’une  tu- 
meur. 

.li;  ])uis  dire  d’avance  que  j’aurai  beaucoup  île  peine  à arriver 
à quelque  chose  de  précis  sur  ce  sujet.  Le  diagnostic  différentie 
est  le  poiiule  pins  difficile  à traiter  dans  la  pathologie  cérébrale; 
la  plupart  des  maladies  de  l’encépliale  offrent  bien  un  groupe 
de  symptômes  particuliers,  qui  permet  d’en  tracer  un  tableau 
spécial  ; mais  il  est  toujours  im  certain  nond)re  de  faits  qui, 
])lacés  sur  les  limites  des  düTéreiues  famille.s,  établissent  entic 
clics  une  confusion  qu’il  est  souvent  impossible  de  faire  cesser, 
soit  à cause  de  rabscnce  de  phénomènes  importants,  caracté- 
ristiques, soit  au  contraire  par  la  présence  de  symptômes  inu- 
sités ou  appartenant  babilm  llcmeiU  à des  fads  d’un  ordre  dif- 
férent. 


390, 


fl  i UUI.l.lS.>K.\ih.X,l  cHhU '«lÿLi:.  SI-UPT. 

<j’csi  juiiüul  av<r  los  ;>nd<*ïi'j  lojeis  héinoiiliagjqües  ci  avec 
les  uimeurs  encéphaliques  de  diverse  nature  que  le  ramollis- 
sement chronique  peut  etre  confondu.  Occupons-nous  d’abord 
des  foyers  hémorrhagiques. 

§ I 

Nous  savons  qu’il  est  un  certain  nombre  de  cas  où  il  est  im- 
posible,  lors  de  l’apparition  d’un  ramollissement  et  pendant  les 
premiers  jours  de  son  existence,  de  le  distinguer  d’une  hémor- 
rhagie cérébrale.  Lorsque  la  mort  n’aura  pas  empêché  le  ramol- 
lissement de  passer  à l’état  chronique,  c[uelles  circonstances 
pourront  venir  .alors  éclairer  le  diagnostic  ? 

Ce  qui  paraît  surtout  caractériser  riiémorrhagie  ce'rébrale, 
c’est  une  marche  graduellement  décroissante,  jusqu’à  l’époque 
où  elle  devient  stationnaire,  tes  facultés  le'sées  ayant  aussi  com- 
plètement recouvré  leur  intégrité  que  le  permet  la  persistance 
d’une  lésion  organique  guérie,  mais  non  disparue. 

Or,  il  est  des  cas  où  le  ramollissement  suit  exactement  la 
même  marche.  On  en  sera  convaincu,  sii’on  veut  bien  relire 
l’observation  de  Doutremont  (i),  où  la  marche  de  la  maladie, 
pendant  sept  ans,  ne  semblait  pouvoir  laisser  aucun  doute  sur 
l’existence  d’une  hémorihagie  aussi  simple  que  possible,  tandis 
que  l’on  n’a  trouvé  autre  chose  qu’un  ramollissement  pulpeux, 
sans  aucune  trace  d’épanchement  sanguin. 

Si  la  marche  de  la  maladie  peut  être  toute  semblable,  n’existe- 
t-il  pas  quelques  phénomènes  particuliers  qui  puissent  mettre 
sur  la  voie  du  diagnostic  ? 

La  question  n’est  pas  aussi  facile  à résoudre  qu’à  poser.  Il  n’y 
a sans  doute  autre  chose  à faire  qu’à  prendre  un  nombre  suf- 
fisant d’observations  d’hémorrhagies  anciennes  du  cerveau,  et 
à les  rapprocher  des  observations  de  ramollissement,  pour  re- 
connaître les  différences  qui  peuvent  exister  entre  elles 

Mais,  si  l’on  nous  accorde  ce  que  nous  avons  avancé  touchant 
l’origine  de  toutes  les  altérations  que  nous  avons  cru  devoir  rap- 
porter au  ramollissement,  et  qui  la  plupart  étaient  considérées 
comme  les  vestiges  les  plus  habituels  de  rhéinorrhagie,  on  con- 


(i)  ttbsprvalion  62. 


D1A.GN0STIC. 


391 


viendra  également  que  sans  doute  cetle  dernière  guérit  moins 
souvent  qu’on  ne  le  pensait  ; et  le  nomhre  des  faits,  appartenant 
légitimement  à l’hémorrhagie,  se  trouvera  ainsi  singulièrement 
restreint  ; si  l’on  songe  encore  qu’il  est  essentiel  de  ne  tenir 
compte  que  des  foyers  hémorrhagiques  non  entourés  de  ramo  - 
lisseinent,  et  que  ces,  deux  lésions  se  rencontrent  très  souvent 
simultanément  ; enfin  si  l’on  croit  nécessaire,  avec  nous,  de  ne 
s’adresser  qu  à des  observations  suffisamment  circonstanciées, et 
dans  lesquelles  la  simpliciié  de  l’altération  anatomique  ne  puisse 
laisser  aucun  doute,  on  comprendra  la  difficulté  de  reunir  des 
faits  assez  nombreux  pour  arriver  à des  résultats  un  peu  con- 
cluants. _ , . 

Cependant  je  crois,  d’après  les  observations  que  j’ai  pu  réunir, 
de  foyers  hémorrhagiques  guéris  et  trouves  chez  dés  individus 
morts  de  diverses  maladies  ; je  crois  pouvoir  établir  qu  à la  suite 
de  la  guérison  de  l’hémorrhagie  cérébrale,  les  choses  se  passent 
d’une  des  trois  manières  suivantes  : 

Tantôt  il  n’y  avait  plus,  dans  les  derniers  temps  de  la  vie,  de- 
puis une  époque  plus  ou  moins  éloignée,  aucun  vestige  de  lésion 
cérébrale. 

Tantôt  la  parole  et  le  mouvement,  primitivement  lésés,  n’a- 
vaient pas  recouvré  toute  leur  intégrité  ; c’est  ce  qui  arrive  le  plus 
communément. 

Tantôt  enfin,  et  c’est  le  cas  le  plus  rare,  il  était  resté  ou  une 
hémiplégie  ou  une  perte  de  la  parole  à peu  près  au.ssi  complète 
que  dans  le  principe. 

Il  m’a  semblé  que  dans  tous  les  cas,  ou  à bien  peu  de  chose 
près,  l’intelligence  se  rétablissait,  sauf  quelquefois  un  peu  d’af- 
faiblissement dans  les  facultés  affectives,  portant  le  plus  souvent 
sur  la  mémoire. 

Mais  ce  qu’il  y a de  frappant  et  de  vraiment  caractéristique 
dans  les  c-as  de  ce  genre,  c’est  que  l’on  n’observe  qu’un  certain 
degré  d’affaiblissement  des  fonctions  primitivement  lésees  et 
imparfaitement  rétablies,  mais  jamais  de  phénomènes  différents, 
tels  (jue  céphalalgie,  douleurs  dans  les  membres,  contracture, 
convulsions,  modifications  clans  la  sensibilité  cutanée,  etc.  Au 
moins,  lorsque  ces  phénomènes  .se  rencontrent,  il  est  en  géné- 
ral facile  de  reconnaître  qu’ils  tiennent  à quelque  circonstance 
autre  que  la  présence  du  foyer  hémorrhagique  guéri. 


392 


raaiolt,issf,me:^t  chroxique.  ( sympt.) 

11  faut  se  garder  de  confondre  la  contracture  des  membres 
avccla  roidenr  des  articulations,  queTon  rencontre  souvent  chez 
les  individus  demeurés  paralytiques  à la  suite  d’anciennes  hé- 
morrhagies. Lorsqu’un  memhreestparalysé  depuis  long-temps,  il 
survient  habituellement  une  certaine  rigidité  des  jointures  qui 
peut  aller  jusqu’à  une  véritable  ankylosé^  c’est-à-dire  une  im- 
possibilité absolue  de  les  faire  jouer.  C’est  le  résultat  fort  natu- 
rel d’une  immobilité  prolongée.  On  reconnaît  cette  rigidité  pas- 
sive à ce  qu’elle  survient  très-graduellement,  toujours  à une 
époque  un  peu  éloignée  du  début  de  la  maladie  ; mais  surtout 
à ce  que  son  développement  n’a  coexisté  avec  l’apparition  d’au- 
cun symptôme  céréhrrd,  à ce  qu’elle  ne  s’accompagne  pas  de 
douleurs  dans  les  membres,  de  sensibilité  à Impression,  de  ri- 
gidité des  muscles,  qui  demeurent  flasques  et  inertes,  tandis 
(jii’ils  sont  contractés  et  tendus  alors  cju’il  existe  une  véritable 
contracture.  Les  efforts  pour  redresser  ou  fléciiir  ces  articula- 
tions peuvent  être  douloureux,  si  l’on  emploie  uue  grande 
force  ; mais  ils  ne  provoquent  jamais  de  douleurs  comparables 
.à  celles  que  l’on  fait  naître,  en  eberebant  à imprimer  des  mou- 
v^ements  à des  membres  contracturés.  La  rigidité  passive  des  ar- 
ticulations persiste  après  la  mort,  tandis  que  la  contracture  cesse 
toujor.vs  alors,  et  babilucllcment  même  disparaît  dans  les  der- 
niers jours  de  la  vie,. 

Voici  cependant  une  exception  bien  remarquable  à la  règle 
que  je  viens  d’établir,  touchant  la  marche  symptumatique  de 
riiémorrbagic  cérébrale,  pendant  la  période  de  guérison  ; je  ne 
connais  pas  d’autre  fait  de  ce  genre. 

Odserv.vuoîj  iO().  — Kj?'C  liêr.ion-liagicjiio  dans  le  cervc.nii.  — Ac- 
cès épileptiformes  répétés. 

Une  femme  nicinut.  à l’àge  de  cinquante-sept  ans,  d’une  bé- 
luorrhagie  cérébrale.  Dix  sept  ans  auparavant,  clic  .avait  déjà 
éprouvé  une  attaque  d’apoplexie  qui  lui  avait  laissé  une  hémi- 
plégie droite  et  un  mutiuuc  complet.  Depuis  quinze  ans,  cette 
femme  éprouvait  régulièrement  tous  les  huit  jours  une  attaque 
d’épilepsie.  Ces  accès  avaient  cela  de  remarquable,  que  les  con- 
vulsions u’affectaieiit  que  les  membres  perclus,  (leux-ci  deve- 
u.aieiil  eu  même  temps  le  siège  de  douleurs  aigiu-s  ; la  malade 


DIAGNOSTIC. 


39.'’, 

poussait  les  hauts  cris  ; hientôt  elle  pci  flait  connaisssance,  sa 
bouche  écumait  ; un  assoupissement  de  deux  heures  succédait 
à cette  anxiété,  puis  le  calme  renaissait. 

j4utoj)sie.  — On  trouva  une  hémorrlingic  énorme  du  cer- 
velet. 

Dans  le  corps  strié  etla  couche  optique  du  côté  gauche,  exis- 
tait une  cavité  qui  aurait  pu  admettre  une  pomme  d’api.  Cette 
cavité  était  remplie  par  environ  quatre  onces  d’une  sérosité 
teinte  de  sang.  Ce  liquide  était  contenu  dans  une  véritable  poche 
membraneuse,  moulée  sur  la  cavité  cérébrale.  Cette  membrane 
parlditement  organisée,  ressemblait  à la  pie-mère,  dont  elle  ne 
différait  que  par  sa  moindre  transparence  et  sa  plus  grande  con- 
sistance. Sa  couleur  rouge-jaunâtre  paraissait  lui  être  communi- 
quée par  une  couche  de  substance  cérébrale  de  trois  lignes  d’é- 
paisseur, de  même  couleur  et  très-dure,  sur  laquelle  die  était 
immédiatement  appliquée  sans  cependant  lui  adhérer,  et  qui  . 
formait  elle-même  les  parois  de  la  cavité  (I). 


()uoi  qu’il  en  soit  de  ces  exceptions  dont  rexjdicatlon  nous 
échappe,  elles  sont  trop  rares  pour  nous  empêcher  d’établir  les 
propositions  suivantes  : 

Lorsqu’un  ramollissement,  après  avoir  revêtu,  à son  début, 
la  physionomie  propre  à l’hémorrhagie  cérébrale,  ne  présente 
plus  lard  autre  cliose  qu’un  décroissement  graduel  des  syin- 
plüincs  de  sa  première  période,  il  doit  être  généralement  im- 
possible de  le  distinguer  d’une  hémorrliagie  cérébrale.  Exemple, 
l’obseivalion  de  Doutremonl. 

Toutes  les  fois  qu’un  individu,  portant  une  ancienne  liémi- 
plégie,  ])réseutera  delà  contracture,  ou  des  inouvemenls  convul- 
sifs, ou  des  douleurs  dans  les  membres,  ou  une  altération  no- 
table de  l’intelligence,  ou  devra  croire  (pi’il  y a autre  chose 
qu’un  foyer  hcnioirliagique. 

ÏMaintenant  il  nous  faut  chercher*  a cjucls  signes  ori  pont  l'C- 
connaître  la  coexistence  d’un  ramoHisscmçiu  ci  d’une  Iréinor- 
1 hagle. 


'1'  Moiillii,  Trailt!  Je  l'iqiojJcxie.  [■.  7i  ; IS|‘J. 


oM'l  RAMOLI.ISSIeMEKT  CHROKIQUH.  (s\MPT.) 

Lorsqu’un  ramollisseinent  vient  à survenir  d’une  manière  ai- 
guë dans  le  voisinage  d’un  foyer  liémorrhagique  guéri  ou  eu 
voie  de  guérison,  on  voit  alors  apparaître  les  symptômes  pro- 
,pres  au  ramollissement  aigu,  et  dans  ce  cas  le  diagnostic  n’ofTre 
pas  de  difficultés  spéciales. 

Mais  les  choses  ne  se  passent  pas  habituellement  ainsi.  C’est 
presque  toujours  d’une  manière  très-lente,  souvent  même  la- 
tente, qu’un  ramollissement  vient  à se  développer  autour  d’un 
foyer  hémorrhagique.  Alors  il  faut  beaucoup  d’attention  pour  en 
reconnaître  l’existence,  et  surtout  il  ne  faut  pas  oublier  les  pro- 
positions émises  précédeminent  ; et, si  chez  un  individu,  chez  le- 
quel un  foyer  hémorrhagique  est  envoie  de  guérison,  il  survient 
des  douleurs  dans  les  membres,  ou  une  céphalalgie  considérable, 
locale,  continue,  ou  de  la  contracture,  -ou  une  difficulté  inac- 
coutumée de  la  prononciation,  ou  quelques  nouveaux  troubles 
des  facultés  intellectuelles,  il  ne  faudra  pas  attribuer  ces  phé- 
nomènes, quelque  légers  qu’ils  soient,  au  foyer  hémorrhagique; 
il  faudra  se  garder  de  voir  là,  comme  on  le  dit  souvent,  l’effet 
du  travail  de  cicatrisation  ; mais  on  reconnaîtra  l’invasion  d’un 
nouveau  travail  morbide,  d’une  complication,  aux  progrès  de 
laquelle  on  devra  se  hâter  de  s’opposer. 

Un  ramollissement  peut  se  développer  à l’entour  d’un  foyer 
hémorrhagique  presque  aussitôt  après  que  l’épanchement  san- 
guin s’est  effectué.  Dans  ce  cas,  les  symptômes  propres  au  ramol- 
lissement pourront  se  montrer  dès  les  premiers  jours  de  la  ma- 
ladie : alors  du  délire  succédera  au  coma,  des  mouvements  con- 
vulsifs se  montreront,  surtout  dans  le  côté  non  paralysé,  les 
membres  paralysés  deviendront  le  siège  de  douleurs  vives. IMais 
il  est  assez  rare  d’observer  de  semblsbles  phénomènes.  Si  le  ra- 
mollissement est  considérable,  la  mort  survient  presque  toujours 
Irès-proinptement  ; s’il  ne  l’est  pas,  il  est  rare  c[u  il  s annonce 
dès  celte  époque  par  des  signes  un  peu  caractérisés  : il  semble 
(jue  les  pbénomènes  qui  déviaient  traduire  sa  presence  soient 
ntasqués  par  ceux  de  rbémorrbagie.  Est-ce  aller  trop  loin  que 
de  dire  que  c’csl  la  compression  exercée  par  le  sang  épanche,  et 
non  encore  résorbé,  qui  s’oppose  à ceriaincs  manifestations  sym- 
ptomatiques ? 

Du  reste,  ce  n’est  pashabittudlement  dans  la  première  période 


nhVUJSOSTic. 

lie  l'Iiénioviliajjic  «‘éi'ôbi  ale  iju’uii  larnollissejneiiLse  loi  me  a l eu 
tour  du  loyer  : on  a exagéré  le  rôle  que  joue  l inflammation  a 
celte  époque  de  riiéinorrhagie.  Aussi,  lorsque  dans  les  premiers 
jours  d’une  attaque  d’apoplexie,  ou  observe  de  la  contracture 
ou  même  des  mouvements  convulsifs,  il  ne  fairt  pas  voir  datas 
ces  phénomènes  l’annonce  d’un  ramollissement  \ on  n oubliera 
pas  que  j’ai  indiqué  précédemment  les  symptômes  de  ce  genre, 
surtout  la  contracture,  comme  appartenant  aux  épairchements 
ventriculaires  ou  des  méninges  (1).  Je  serais  même  porté  àcroite, 
bien  que  je  ne  l’aie  pas  observé  moi-même,  que  le  contact  du 
sang  avec  les  membranes  d’enveloppe  du  cerveau  peut  en  outre 
donner  lieu  à du  délire.  En  effet,  dans  trois  observations  eur- 
prrrntées  à l’ouvrage  de  M.  Roeboux  (2),  où  un  peu  de  déliie  a 
été  observé  le  second  ou  le  troisième  jour  de  la  maladie,  on  ne 
trouve  pas,  malgré  le  soin  habituel  avec  lequel  cetauteur  décrit 
les  altérations  anatomiques,  on  ne  tr  ouve  pas  autre  chose  que  ce 
degré  de  ramollissement  qui  environne  constamment  une  hé- 
morrhagie récente,  et  qui,  s’il  n’est  pas  primitif  à l’épanchement, 
comme  je  le  pense  avec  ce  savant  écrivain,  du  moins  ne  saurait 
être  considéré  comme  un  ramollissemeut  inflammatoire  conse- 
cutif ; mais,  dans  ces  trois  cas,  le  sang  épanché  était  eir  contact 
.•\vec  la  membrane  ventriculaire  ou  les  méninges  extérieures.  Le 
délire,  du  reste,  avait  toujours  été  fort  léger. 

§ 11- 

De  toutes  les  affections  de  l’encéphale,  les  tumeurs  ou  dégé- 
nérescences du  cervelet  sont  certainement  celles  qui,  par  leur 
marche  et  la  nature  de  leurs  symptômes,  se  rapprochent  le  plus 
du  r’amollisseinent  chronique.  Le  diagnostic  différentiel  en  est 
cependant  fort  important,  ne  fùt-ce  qu’au  point  de  vue  du  pro- 
nostic, car  il  n’y  a pas  à douter  qu’il  n’y  ait  beaucoup  plus  à 
espe'rer  et  du  travail  de  la  nature,  et  des  efl'orts  de  la  thérapeu- 
tique, dans  le  ramoUissement  cérébral,  que  dans  un  cas  de  tu- 


(t)  Voyez  p.  194. 

(2)  Rochoux,  Traùd  de.  V apoplexie,  seconde  edilion,  oh.serva lions  3",  tO* 


«amolijssej.if.nt  cnnoNiQUE.  (sympt.) 

meur  Luberculeuso  ou  cancéreuse  de  l’encépliale.  .le  vai.s  pre'.scn- 
ter  un  tableau  concis  des  plie'nomènes  qui  accompagnent  le  plus 
habituellement  les  dégénérescences  du  cerveau,  et  nous  les  rap- 
procherons des  symptômes  propres  au  ramollissement. 

J’aurais  voulu  d’abord  distinguer  les  tumeurs  non  accompa- 
gnées de  ramollissement,  de  celles  à l’entour  desquelles  s’est  déjà 
développé  un  travail  inllammaloire;  mais  la  plupart  des  observa- 
tions publiées, ne  contenantaucun  détail  surFétatdelasubstance 
cérébrale,  à l’entour  des  dégénérescences,  il  m’a  été  impossible 
de  tenir  com])te  de  cette  circonstance  importante.  Voici  le 
relevé  de  soixante  et  onze  observations  de  tumeurs  du  cerveau, 
empruntées  à différents  auteurs,  quelques-unes  recueillies  par 
moi.  .T’ai  réuni  ensemble  les  tumeurs  cancéreuses  et  les  tumeurs 
tuberculeuses,  parce  qu’il  m'a  paru  impos.sible  de  différencier, 
pendant  la  vie,  ces  deux  sortes  de  dégénérescences  autrement 
qu’à  l’aide  de  circonstances  étrangères  aux  symptômes  do  la 
maladie  elle-même  ; telles  que  l’àge  des  sujets,  par  exemple, 
qui  permet  à peine,  dans  l’enfance,  de  soupçonner  l’existence 
d’une  tumeur  cancéreuse  : tandis  qu’il  doit  toujours  faire  présu- 
ïucr  alors  la  nature  tiibercLdeuse  d’une  dégénérescence.  Parmi 
les  observations  que  j'ai  réunies,  il  en  est  sans  doute  plusieurs 
qui  ont  trait  à des  tumeurs  des  méninges,  ayant  pénétré  consé- 
cutivement dans  l’intérieur  de  la  pulpe  cérébrale j mais,  dans 
ces  cas  encore,  les  symptômes  peuvent  être  absolument  les 
mêmes.  Enfin,  j’ai  laissé  de  côléjes  observations  de  tumeurs  du 
c nveau,  dans  la  première  enfance,  afin  que  la  comjiaraison  des 
symptômes  de  ces  dégénérescences  avec  ceux  du  ramollissement 
jiuisse  être  plus  exacte. 


N’ayant  en  vue  que  le  diagnostic,  nous  étudierons  seulement 
ici  les  symptômes  offerts  durant  la  première  période  et  dans  le 
coms  de  la  maladie,  et  nous  n’aurons  pas  à nous  occuper  des 
phénomènes(|ui  jirécèdcnt  immédialeineut  la  mort;  que  sert  de 
reconnaîtrealors  la  nature  d’uneaffection  semblable?  Je  dirai  seu- 
lement que,  quelle  qu’ait  été  jusqu’alors  la  marclic  et  la  physio- 
nomie de  la  maladie,  il  survient  ordinairement,  dans  les  derniers 
jours  de  la  vie,  de.s  accidents  bien  tranchés,  et  souvent  toutdif- 
iérents  de  ceux  ob.servés  précédemment,  ainsi  le  coma,  une 
paralysie  subite,  des  convulsion.s,  etc. 


DIAGNOSTIC.. 


397 


Sur  les  soixaiue-onza  obseï  valions  que  j’ai  reunies,  dans  Irois 
cas,  il  u’y  a eu  aucun  symptôme  de  noté  (1  ). 

De  tous  les  phénomènes  observés  dans  les  soixante-huit  autres 
cas,  le  plus  constant  et  un  des  plus  caractéristiques  a été  la  cc- 
phalnlgie  : elle  a été  notée  soixante-unc  fois.  .Te  rappellerai  que, 
sur  cinquante-trois  observations  de  ramollissement  chronique,  la 
ccphalal{;ie  n’a  été  rencontrée  que  vingt-quatre  fois,  dans  moins 
de  là  moitié  des  cas.  Sur  quarante  cas  do  tumeurs  de  rencéphale, 

non  tuberculeuses, M.Calmeil  a trouvéla céphalalgie  notée  ti  en  le- 

trois  fois  (2);  il  dit  plus  loin  que  dans  les  dégénérescences  tuber- 
culeuses, c’est  le  symptôme  le  plus  fréquent  ; à peine  manque- 
t-il  chez  quelques  malades  (3).  Mais  ce  phénomène  n’est  pas  seu- 
lement remarquable  par  sa  fréquence  dans  les  tumeuis  du  cer- 
veau, il  l’est  encore  par  sa  nature  et  par  son  siège  : dans  presque 
tous  les  cas,  la  céphalalgie  était  excessive,  arrachant  des  cris  sur- 
tout dans  les  paroxysmes,  presque  toujours  continue,  sauf  tou- 
tefois dans  le  commencement.  Enfin  elle  était  à peu  près  coii- 
slammentbornée  àuncôté  de  la  tête,  et  c’en  est  là  la  circonstance 
la  plus  caractéristique  ; je  ne  l’ai  vu  indiquer  générale  que  deux 
fois;  dans  tous  les  autres  cas,  elle  était  locale,  sauf  quelques  ob- 
servations peu  détaillées  où  son  siège  n’est  point  indiqué. 

Or,  dans  le  ramollissement,  la  céphalalgie  est  rarement  bornée 
àuncôté  de  la  tête  ^ elle  est  quelquefois  générale,  presque  tou- 
jours frontale  : elle  n’est  pas  habituellement  intense,  et  surtout 
il  est  infiniment  rare  qu’elle  le  soit  assez  pour  arracher  des  cris 
au  malade. 

Dansseize  cas,  la  céphalalgie  fut  leseul  symptôme, (4)  au  moins 
jusqu’aux  derniers  jours  delà  vie,oùsurviurent  des  convulsions, 
otiuiiehémiplégie,  ou  du  coma.  La  céphalalgie  fut,  dansions  ces 
cas,  extrêiiKinent  vive,  bornée  à un  côté  de  la  tête,  quelquefois 
accompagnée  de  vomissements. 

(1)  L.T!icjicr,  Journal  la  CUnitiuc,  l,  i,  n"  -fü  ; 31  juillcL  ttî27.  Aiulral, 
CH  nique  medicale,  t.  v,  p.  6’j(), 

(2)  Calmcil,  Dicl.  demiid.,  deuxième  edit.,  t.  ii,  p.  o<)0. 

f3)  Loc.  cit..  p.  i)74. 

^4)  Aljcrerorubie,  J^es  maladies  tic  l’encc'fjhale,  etc.,  irad.  de  M.  (Icn- 
drii),  |),  <16o.  Gazette  des  hôpitaux,  19  lévrier  1833  ; cliuique  da  ÎU.  Liu  r- 
■seuL.  A udral, /oc.  cil-,  p.  üî2.  VîouûVaxxd,  Traitd  de  l’encdjdiulitc,  oh%e.T- 
Tuliou  xr.iii. 


3g8  RÀMOLLlSSKMEttX  CHHONU^UE.  (sYMPT.j 

Six  fois  à la  céphalalgie  s'ajouta  une  cécité  graduelle  (1),  sans 
aucun  phénomène  de  paralysie,  sauf  un  seul  cas,  mais  où  la  pa- 
ralysie ne  se  montra  que  long-temps  après  la  perte  de  la  vue. 
Une  autre  fois,  il  s’y  joignait  des  convulsions  survenant  à dif- 
férents intervalles.  Assez  souvent  encore,  on  a rencontré  ou  im 
affaiblissement  ou  des  troubles  divers  de  la  vision. 

Le  ramollissement  ne  présente  guère  de  semblables  phé- 
nomènes : ainsi,  pour  tout  symptôme,  une  céphalalgie  très- viv^e, 
partielle,  sans  paralysie,  ou  bien  accompagnée  de  troubles  de 
la  vision.  .Te  ne  connais  pas  un  seul  cas  où  une  perte  complète  de 
la  vue  ait  paru  s'opérer  sous  l’influence  d’un  ramollissement. 

On  a observé  une  hémiplégie  graduelle  dans  quatorze  cas  (S), 
.marche  qui  se  rapproche  davantage  de  celle  du  ramollissement. 
La  céphalalgie  ne  paraît  avoir  manqué  que  dans  trois  de  ces  cas. 
Deux  fois  il  n’y  eut  qu’un  simple  affaiblissement  du  mouve- 
ment d’une  des  moitiés  du  corps.  Il  y eut  des  convulsions  dans 
trois  cas  ; deux  fois  elles  avaient  précédé  de  long-temps  la  pa- 
^ralysie.  Les  membres  paralysés  ont  présenté  quelquefois  delà 
contracture  : les  observations  que  j’ai  sous  les  yeux  ne  sont  pas 
toutes  assez  détaillées,  pour  me  permettre  de  donner  le  chiffre 
précis  de  la  fréquence  de  ce  symptôme  j mais  je  ne  pense  pas 
qu’il  ait  été  souvent  rencontré. 

On  a observé  quatre  fois  une  paraplégie  (3).  Elle  succédait 
une  fois  à une  hémiplégie.  Dans  trois  cas  elle  fut  précédée  par 
une  céphalalgie  très-violente  5 dans  un  quatrième,  la  céphalalgie 
n’est  pas  notée,  mais  la  parole  était  embarrassée  ; il  n’y  avait 
pas,  du  reste,  une  véritable  paraplégie,  mais  une  paralysie  .géné- 
rale, survenue  graduellement. 

Des  convulsions  ont  été  observées  vin;  t cinq  fois  (4)  : elles 

(t)  Abercromhie  , loc.  cil.,  p.  470.  Lalleiiiand,  7c  LcUre  , n°  t9. 

(2)  Anclral,  loc.  c/i-,p.  646  et652i  Roslan,  loc.  cil.,  obs.  xciv.  Aber- 
crombie,  ^oc.  où.,  p.  482.  Lau:;ier,  Zoc.  cU.  Bulletins  de  la  Socidle' ana- 
tomiijue,  iie  année,  p.  43,  et  13'  année,  p.  H4,  Komberg,^/cA/Vej  geV».  de 
mdd.,  2c  série,  t.  vu.  Carré,  Archives,  juin  t834.  Bouillaud,  loc.  cil.,  ob- 
servation XLlI  . 

(3)  Abcrcroiïibic, /oc.  c//. , p.  485.  An//e/.  de  la  Soc.  anal.,  t5oan.,p.8t. 

(4jIloslan,  loc.  cil.,  obs.  xcin  et  xciv.  Aberorombie,  loc.  cù.p.473.  Lau- 

i»icr,  loc.  cil.  Kainbclii,  Clinique  des  hôpitaux,  1. 1,  juin  1827.  Bulletins  de 
lu  Soc.  anat.,  12*  anu  , p.  37.  Lallemand,  loc.  cil.,  u.  3 et  18.  Hoiiillaiid, 
loc,  cil.,  ubs.  XLii. 


lilA-GNOsllC. 


399 


soûl  presque  toujours  indiquées  sous  le  nom  d’épilepsie  ou  de 
convulsions  épileptiformes.  Ceileforine  de  convulsions,  presque 
constante  dans  les  tumeurs  du  cerveau,  est  moins  commune 
dans  le  ramollissement  chronique,  bien  qu’elle  s’y  observe  aussi. 
Elles  étaient  assez  souvent  limitées  iiun  seul  côté  ducorps.  Vingt 
fois  elles  ne  s’accompagnaient  d’aucune  paralysie.  Ceci  est  im- 
portant à noter,  parce  que,  dans  le  ramollissement  chronique, 
les  convulsions  se  rencontrent  infiniment  rarement  sans  para- 
lysie.Dans  tous  les  cas,  sauf  un  on  deux,  on  a noté  cette  céphalalgie 
si  caractéristique  qui,  en  général,  avait  précédé  les  convulsions. 

Dans  cinq  cas,  le  symptôme  dominant  fut  encore  la  céphalal- 
gie; mais,  en  outre,  on  nota,  comme  phénomènes  habituels,  des 
étourdissements,  des  vertiges,  des  attaques  avec  perte  de  con- 
naissance , quelquefois  un  coma  prolongé;  à cela  se  joignaient 
souvent  des  nausées,  des  vomissements,  des  troubles  divers  des 
sens  (1).  Les  cas  de  ce  genre  sont  difficiles  à caractériser.  Une 
fois,  il  y avait  seulement  de  la  rigidité  dans  les  membres  avec  un 
état  de  démence  (2). 

Dans  deux  cas  d’hémiplégie  précédemment  indiques,  il  surve- 
nait de  fréquentes  attaques  apoplectiformes.  Une  fois,  des  at> 
taques  d’hémiplégie  gauche  se  répétaient  fréquemment,  accom- 
pagnées de  symptômes  spasmodiques  (3).  D’autres  cas  encore 
suivent  une  marche  peu  usitée  : ainsi  on  a vu  une  violente  cépha- 
lalgie s’accompagner  d’une  roideur  tétanique  des  membres  avec 
du  délire  par  intervalles  (4),  ou  bien  d’un  affaiblissement  géné- 
ral sansparalysie(5).Enfm,M.Calrneil  paraît  avoir  observé  quel- 
quefois la  démence  (6). 

Il  me  semble  résulter  de  ce  résumé  que,  dans  le  plus  grand 
nombre  des  cas,  il  est  possible  de  distinguer  les  tumeurs  du  cer- 
veau, du  ramollissement  cérébral. 

L’existence  prolongée  d’une  céphalalgie  violente,  bornée  à un 
côté  de  la  tête,  accompagnée  ou  non  de  vomissements,  de  cécité 

(1)  Aburcrombic,  loc,  cil.,  [).  190.  liullelim  de  la  Soc»  anat  , \ te  annc'e 
p.  109. 

(2)  AndraH,  loc.  c//.,p.  619. 

(3)  Lallemand,  loc.  cil.,  ii.  11. 

(4)  Bulletins  de  la  Soc.  anal.,  15o  anii.,  p.  3}J. 

fS)  Bidlelins  de  la  Soc.,  anal.,  tru;  ami  , p.  8r>. 

(6)  Cnlmeil , loc.  cil.,  p.  562. 


4U0 


n.V.MOLLlSàüAIEKX  CUllüMQtJE.  {sYAri'T.) 

OU  de  troubles  divers  de  la  vue,  sans  pliénomciies  de  paralysie, 
si  elle  n’indique  pas  toujours  avec  certitude  la  présence  d’une 
tumeur  dans  le  cerveau,  ne  saurait  guère  au  moins  laisser  sup-- 
poser  celle  d’un  raïuollisseiuent  : s’il  s’y  joint  des  accès  convul- 
sils  sous  forme  épileptique,  sans  paralysie  dans  leurs  intervalles, 
les  probabilités  sont  encore  plus  grandes  en  faveur  d’une  tumeui-t 
encéphalique,  surtout  si  la  parole  ou  l’inielligencesont  demeu- 
rées intactes.  En  effet,  la  parole  est  moins  fréquemment  lésée 
dans  les  alTeclions  do  ce  genre  que  dans  le  ramollissement  ; elle 
présente  beaucoup  moins  souvent,  en  particulier,  ce  caractère 
de  monotonie  que  nous  avons  signalé  comme  une  des  circon-- 
stances  les  plus  constantes  du  ramollissement  chronique.  Quant 
à l’intelligence,  M.  Andral,  se  basant  sur  l’examen  tic  quarante- 
trois  faits,  dit  qu’elle  est  restée  intacte  dans  le  plus  grand  nom- 
bre des  cas  (l).  J’ai  fait  exactement  la  même  observation  que  ce 
jrjol'esscur.  Cependant,  M.  Calmeil  a trouvé  que  sur  quarante 
cas  d’affections  organiques  de  l’encéphale,  l’intelligence  était  lé- 
sée dans  la  moitié  des  cas  (2).  Si  ce  chiffre  est  vrai  pour  la  géné- 
ralité des  faits,  cette  circonstance  perd  beaucoup  de  sa  valeur  ; 
mais  il  faudrait  savoir  si  cet  auteur  y a compris  les  phénomènes- 
observés  tout  à fait  à la  fin  de  la  vie. 

La  paralysie  est  certainement  le  phénomène  c]iil  est  dénaturé 
à ajouter  le  plus  de  difficulté  au  diagnostic.  M.  Calmeil  dit  que 
les  cinq  huitièmes  des  individus  atteints  d’affections  organiques 
de  l’encéphale  pre'sentent  des  symptômes  de  paralysie,  etquelai 
moitié  sont  hémiplégiques  (.3).  J’ai  obtenu  des  résultats  bien  dif- 
férents ; car, sur  les  soixante-onze  observations  que  j’ai  réunies,, 
je  ne  trouve  de  phénomènes  de  paralysie  indiqués  que  vingt- 
deux  fois,  encore  quatre  de  ces  individus  étaient  paraplégiques. 
M.  Andral  dit  simplement  que  les  lésions  du  mouvement  existent 
dans  plus  de  la  moitié  des  cas  (4);  mais  il  entend  parler  des  con- 
vulsions aussi  bien  que  de  la  paralysie. 

31.  Calmeil  dit  encore  que  la  paralysie  s’établit  graduellement 

(I)  Andi'.'il,  loc.  oit.  , [I.  Gj8. 

(i)  Calmeil,  loc.  cil.  p.!>G2.  Cela  luuU-11  à cc  ipic  M.  Calaie.il  a rmioilli  la 
pliipai'l  de  ses  observations  clans  des  Iios[iiccs  d’alicaes  ? 

(3)  Culmcil,  loc.  cil.,  p.  oGI. 

(4)  Audral,  loc.  ctt.,  p.  638. 


mAGNOSXIC. 


•un 


ou  toiil  à coup  (1).  Celle  assertion,  ainsi  présentée,  me  paraît 
manquer  de  justesse  : non  pas  que  je  nie  absolument  que  la  pa- 
ralysie puisse  survenir  tout  à coup;  cette  circonstance  a dù  se 
rencontrer,  puisque  cet  auteur  le  dit;  mais  au  moins  elle  doit 
être  bien  rare,  puisque  je  n’en  trouve  pas  un  seul  exemple  dans 
mes  soixante-onze  observations.  Cependant  il  faut  s’entendre  : 
on  voit  bien  quelquefois,  chez  un  individu  non  encore  paralysé, 
survenir  tout  à coup  une  attaque  apoplectiforme,  accompajpiée 
de  paralysie  géne'rale  ou  partielle  ; mais  alors  le  mouvement  re- 
vient avec  la  connaissance.  Ce  sont  des  attaques  toutes  passagères, 
auxquelles  certains  malades  sont  sujets  : mais  cela  ne  peut  cire 
considéré  comme  un  mode  de  début  de  la  paralysie.  J’ai  toujours 
vu  cesymptôme  apparaître  graduellement.  J’insiste  sur  ce  point, 
parce  qu’il  est  capital  pour  le  diagnostic  qui  nous  occupe,  et  qu’il 
trouvera  souvent  son  application.  Nous  savons  combien  souvent 
l’hémiplégie  débute  tout  à coup  dans  le  ramollissement,  ün 
pourra  être  à peu  près  certain,  dans  les  cas  de  ce  genre,  que  l’on 
n’apasaffaire  à une  tumeur  de  l’encéphale,  surtout  si  cette  inva- 
sion de  la  paralysie  n’a  été  précédée  ni  d’une  céphalalgie  spéciale, 
ni  de  convulsions. 

Il  n’en  est  plus  de  même  dans  les  cas  où  il  se  forme  une  hé- 
miplégie graduelle  : il  est  alors  presque  toujours  difficile,  quel- 
quefois impossible,  de  distinguer  une  tumeur  d’un  ramollisse- 
ment, à moins  toutefois  qu’une  céplialalgie  locale,  vive,  des 
accès  convulsifs,  n’aient  précédé  de  longtemps  la  première  ap- 
parition de  la  paralysie.  * 

M.  Rostan  paraît  attacher  beaucoup  d’importance,  dans  le  cas 
de  tumeurs  cancéreuses  du  cerveau,  à l’existence  de  douleurs 
dans  les  membres  paralysés,  très-vives,  lancinantes^  lien  difj'c- 
r entes  de  celles  du  ramollissement  (2).  Je  ne  sais  en  quoi  consiste 
celte  différence  ; mais  desdouleurs  vives  et  lancinantes  des  mciii 
lu  es  sont  trop  communes  dans  le  ramollissement,  pour  pouvoir 
servir  à caractériser  les  tumeurs  de  l’cncéphalc. 

En  résumé,  les  circonstances  les  plus  propres  à faire  distin- 
guer les  tumeurs  encéphaliques  du  ramollissement  cérébral  sont  : 
pour  les  premières,  l’existence  d’une  céphalalgie  très-vive,  bornée 


2(i 


(1)  Galmeil , eod.  loc. 

(2)  Rostau,  loc.  ciL.  p,  404. 


4^2  llAMOLi,lat.EMKHX  CUKONIQUE. 

à une  moitié  de  la  têle,  de  la  cécité  ou  d’un  afiaiblisseineut 
considérable  de  la  vue,  de  convulsions  épileptiformes  sans  pa- 
ralysie : pour  le  ramollissement , l’apparition  subite  d’une  hé- 
miplégie persistante  (1). 


(J)  Un  médecin  allemnod,  le  docteur  Romberg,  • prétendu  que  l’on  pou- 
vait distinguer  la  céphalalgie  dépendant  de  productions  morbides  du  cer- 
veau, à ce  que  les  fortes  expirations  raugmenlaienl,  en  pressant  le  cervelet 
contre  la  tente,  et  le  cerveau  contre  la  voûte.  Cela  remplace,  disait-il,  la 
pression  dans  les  maladies  abdominales  et  thoraciques.  Il  se  demandait  en 
mAme  temps  si  la  même  remarque,  faite  dans  l’inspiration,  où  le  cerveau 
était  pressé  contre  la  base  du  crâne,  ne  pourrait  pas  éclairer  le  diagnostic 
des  tumeurs  de  la  base.  ( yirchives,  2<  série,  t.  vu,  juin,  1835.) 


TROISIÈME  PARTIE. 


CHAPITRE  IX. 

t>U  LA  CURABILITÉ  ET  DES  MODES  DE  GUÉRISON  DU 
RAMOLLISSEMENT. 

« 

Que  le  raniollissemenl  cérébral  soit  curable,  c’est  un  fait  dont 
on  ne  saurait  guère  plus  douter  aujourd’hui  que  de  la  curabi- 
lité des  tubercules  pulmonaires.  Mais,  dans  l’une  comme  dans 
l’autre  de  ces  questions,  une  des  difficultés,  c'est  de  savoir  quelles 
sont  précisément  les  traces  que  peuvent  laisser  ces  affections  en 
subissant  l’arrêt  dans  leur  marche,  ou  bien  le  travail  de  cicatri- 
sation, ou  d’induration,  ou  de  transformation,  qui  est  la  con- 
dition de  leur  guérison.  Il  serait  facile  de  pousser  plus  loin  ce 
parallèle,  qui  s’appliquerait  à plus  d’un  point  de  l’Iiisloire  de 
ces  deux  maladies. 

On  peut  employer  deux  méthodes  pour  arriver  à la  solution 
d’une  telle  question.  L’une,  interrogeant  avec  soin  les  phéno- 
mènes observés  pendant  la  vie,  essaie  de  juger,  par  les  carac- 
tères qu’ils  ont  présentés,  de  la  nature  des  altérations  rencon- 
trées après  la  mort,  et  de  retrouver,  à l’aide  d’un  tel  examen, 
la  physionomie  primitive  de  ces  dernières;  l’autre,  n’accordant 
qu’une  importance  secondaire  aux  données  que  peut  fournir 
cette  étude,  s’attache  simplement  à suivre,  dans  leurs  différentes 
périodes  et  avec  leurs  nuances  diverses,  les  altérations  qui  se 
rencontrent  dans  le  tissu  du  cerveau,  et  ne  peuvent  en  général 
exister  pendant  un  certain  temps  sans  subir  des  transformations 
variées.  Eu  procédant  ainsi  par  l’anatomie  pathologique, 
on  suit  une  voie  peut  - être  plus  lente,  mais  sans  doute  plus 
sûre  ; en  nous  apprenant  ainsi  à' connaître  les  nuances  diverses 
qui  conduisent  à ces  transformations,  elle  nous  permet  de  re- 
construire, une  altération  étant  donnée,  tous  les  éléments  qui 
ont  présidé  à sou  développement  primitif  et  aux  degrés  consé- 
cutifs par  lesquels  elle  a passé. 

Je  ciois  avoir  facilité  cette  étude  en  décrivant,  avec  plus 
de  soin  et  de  luécision  qu’on  ne  l’a  fait  jusqu’ici,  les  divers  de- 
grés que  suit  le  raniollissemenl  ciTcbral  entre  ses  deux  périodes 


iO'i 


ramollissement  céuébral. 


extrêmes.  Nous  allons  reprendre  successivement  chacun  de  ces 
degrés,  et  l’étudier  sous  le  point  de  vue  qui  fixe  maintenant 
notre  attention. 

Ce  n’clait  pas  pour  un  seul  motif,  qu’à  l’occasion  du  ramollis- 
sement aigu  j’insistais  siir  ce  fait  : que,  hors  les  cas  de  sup- 
puration, il  se  distinguait  spécialement  du  ramollissement  chro- 
nique par  l’absence  de  désorganisation,  qui  est  un  des  caractères 
les  plus  constants  de  ce  dernier. 

En  effet,  tandis  qu’un  tissu  non  désorganisé  peut  parfaite- 
ment revenir  à son  état  normal  sans  conserver  aucune  trace  de.s 
modifications  qui  l’ont  affecté,  une  altération  profonde  dans 
l’organisation  d’un  tissu  ne  saurait  guérir  que  par  un  travail 
analogue  à la  cicatrisation,  c’est-à-dire  qui  laisse  une  empreinte 
ineffaçable,  et  souvent  altère  à jamais  les  fonctions  de  l’organe. 
Ainsi  on  n’a  dû  jamais  douter  que  l’on  n’eût  guéri  maintes  lois 
de  ces  encéphalites,  au  premier  degré,  le  plus  souvent  superfi- 
cielles, développées  à la  suite  d’opérations  ou  de  plaies  de  tête, 

ouspontanemeut,  et  que  devait  caractériser  déjàun  premier  degré 

de  ramollissement.  Tels  sont  peut- être  les  faits  que  j’ai  mppor-- 
lés  comme  exemples  de  congestion  cérébrale,  et  dont  j’aisignalc 
l’identité  parfaite,  sous  le  rapport  des  symptômes,  avec  le  ra- 
mollissement à son  début.  Il  est  difficile  de  savoir,  dans  les  cas 
suivis  de  guérison,  quelles  ont  été  précisément  les  limites  de 
rallératiou  anatomique  ; jusqu’à  quel  point,  par  exemple,  elle 
a été  au  delà,  ou  est  restée  en  deçà  du  point  qui  lie  le  ramollis- 
sement à la  simple  congestion.  Mais  ce  point  même,  que  nous 
supposons  par  la  pensée,  existe-t-il  dans  la  nature? N y aurait- 
il  pas  seulement  dans  tous  ces  faits  une  différence  du  plus  au 
moins?  Je  le  pense,  au  moins  pour  un  bon  nombre  d entre 
eux  ; et  je  crois  que  dans  beaucoup  de  cas  d’apoplexie,  de  coup 
de  sang,  de  délire,  arrêtes  par  un  traitement  li*ureux,  ce  sont 
de.s  ramollissements  commençants  que  l’on  a gueris- 

LeramoUissement  chronique,  lorsqu’il  se  présente  sous  loi  tue 
d’une  simple  molle.sse  pulpeuse,  sans  rougeur,  n est  le  plus 
souvent,  comme  nous  l’avons  vu,  qu’un  état  de  transition  entre 
le  ramollissement  aigu  et  les  degrés  consécutifs  que  nous  avons 
désignés  sous  le  nom  de  plaques  jaunes  et  d’inliltration  cellu- 
leuse Il  n’y  a pas  encore  précisément  transformation  du  tissu 
cérébral,  et  pourtant  il  est  difficile  de  ne  pas  regarder  comme 


GUÉnlSON  DU  KA.MOI.LISSEMEST. 

une  véiilable  désorganisation,  cette  altération  qui  ne  laisse  a ses 
moléculesguèreplusde  cohésion  que  n’en  ontcellesd  unliqmde. 

Cependant  nous  avons  vu  que,  dans  certains  cas,  la  maladie 
pouvait  persister  presque  indéfiniment,  à ce  degre,  comme  ans 
l’observation  de  Doutremont,  où  elle  datait  de  sept  ans  ( 

Le  ramollissement  à cet  état,  le  ramollissement  pulpeux,  est-i 
susceptible  de  guérison  ? Si  nous  entendons  par  guérison  le  re- 
tour à l’état  anatomique  normal,  je  ne  crois  pas  qu’il  puisse 
en  être  ainsi  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas,  car  la  diimmi- 
tion  de  cohésion  du  tissu  cérébral  est  trop  grande  pour  qu  il 
puisse  reprendre  la  consistance  qui  lui  est  propre.  On  peut 
douter  même  que,  lorsqu’il  est  parvenu  à une  grande  iluidite, 
il  puisse  éprouver  diiectenient  des  transformations  analogues  a 
l’induration,  à la  cicatrisation,  etc.  (2)  , sans  avoir  passe  par 
l’état  d’infiltration  celluleuse  ; c’est  ainsi  qu’il  faut  également, 
pour  que  les  ramollissements  pulpeux  de  la  couche  corticale  dis- 
paraissent par  absorption  et  fassent  place  à de  véritables  ulcé- 
rations, qu’ils  aient  passé  à l’état  de  plaques  jaunes;  c’est  au 
moins  ce  que  nous  ont  appris  les  observations  d’ ulcérations  des 
circonvolutions  que  nous  avons  rapportées  précédemment. 

Mais,  lorsque  le  ramollissement  pulpeux  a cessé  de  faire  des 
progrès,  lorsqu’on  même  temps  son  état  d’anémie  l’isole,  en 
quelque  sorte,  de  l’organe  au  sein  duquel  il  s est  développé, 
il  se  trouve  dans  un  état  stationnaire,  qui  paraît  remplacei  poui 
lui  la  cicatrisation  dont  les  autres  périodes  du  ramollissement 
nous  fournissent  des  exemples. 

Ainsi,  chez  Doutremont  ()Obs.  62),  le  mouvement,  d abord 
tout  à fait  perdu  du  côté  gauche,  est  presque  complètement  re- 
venu ; la  parole  est  redevenue  libre,  l’intelligence  est  demeurée 

Qj  .Si  l’on  s’cn  ra]-.pürle  aux  observations  des  aulcur.s,  on  croira  que 
relie  lorme  de  ramollissctnenl  (pulpeux)  est  de  beaucoup  lapins  frc.quenle  ] 
mais  on  est  sans  doute  convaincu  maintenant  avec  moi,  que  beaucoup  d en- 
ire  elles  ne  sont  autre  chose  que  ce  (jue  j’ai  dû  eu  distinguer  sous  le  nom 
d’infiltraiion  celluleuse. 

(23  Dans  les  autres  tissus  naturels  ou  sans  analogues  do  l’économie,  c(uand 
le  ramollissement  a atteint  un  certain  degré,  il  peut  se  fondre,  en  pus  ou 
s’éliminer  par  ulcération....  Mais  je  pense  que  les  inflammations  que  nous 
voyons  sc  terminer  par  induration,  n’avaienl  jamais  délermuié  qu’un  ra- 
mollissement léger. 


-lue; 


K ‘ Ml  \ i,, 

Imatlc.  CelU;  iciume  I i;iit  daiib  IVliiL  tjiii  peut  suu  t-iier  à Ja 
guérison  d’un  foyer  liémorihaglque,  celle-ci  laissant  de  toute 
nécessité  une  cicatrice,  dont  la  présence  neperinetpas  habituel- 
lement l’entier  rétablissement  des  fonctions  lésées.  L’observa- 
tion suivante  est  un  exemple  de  guérison  complète  des  acci- 
dents causés  par  un  ramollissement  ; seulement  d s’agit  d’une 
encéphalite  traumatirjue.  •. 

Observation  iio.  ■ — Ancienne  blessure  à la  tète.  Intégrité  absolue' 
des  fonctions  cérébrales. — ^’races  d'nn  ancien  ramollissement  cé- 
rébral . 

Un  cocher,  âgé  de  cinquante-cinq  ans,  fut  blessé  à la  tête* 
dans  la  campagne  de  Tlussie  ; il  présentait,  comme  vestige  de' 
cette  blessure,  une  dépression  notable,  de  lalargeur  d’une  pièce 
de  cinq  francs,  sur  le  pariétal  gauche.  Cet  homme  u’éprouvait 
âucunë  cé[)halalgié  5 il  avait  toute  l’intégrité  de  ses  facultés  in- 
tellectuelles ; aucun  de  scs  sens  n’était  troublé,  sa  parole  était: 
hélte  ; ses  mouvements  n’offraient  pas  le  moindre  désordre.  Il 
‘ süccoi’nba  ainsi  aux  progrès  d’une  phthisie  pulmonaire. 

Jfuiops'ie.  — Vers  la  partie  moyenne  du  pariétal  gauche,  l’osi 
était  complètement  détruit,  et  une  siuiplc  lame  cartilagineuse  ■ 
se  trouvait  interposée  entre  !è  cuir  chevelu  et  le  cerveau.  La. 
diire-mère  adhérait  intimement  à cette  lanre  et  se  confondait 
àvéc  elle.  An-dessons  de  la  dure-mère  existait  un  épaississement 
^ notable  de  l’arachnoïde,  ou  mieux  de  la  pie-mère,  dont  le  tissu 
, tr.insparent  et  mince  était  remplacé  par  une  membrane  dense 
et  opaque.  Enfin,  au-dessous  de  cette  déinière , on  trouva  les 
circonvolutions  correspondantes  singulièrement  ramollies  ; à la 
place  de  cinq  ou  six  circonvolutions,  il  n’cxistàit  plus  vérita- 
blement qu’une  sorte  de  fluide  comme  gélatineux.  Aucune  in- 
jection Ae  se  montrait  ni  dans  la  partie  ramollie,  ni  autour 
d’elle.  Le  reste  de  l’encéphale  n’offrait  aucune  altération  ap- 
préciable (1)., 

«Il  est  bien  vraisemblable,,  ajoute  le  professeur  Andra),  qu’au 


# • .* 


GUÉRISON  DU  KAMOLIifSSRMENT.  ’wi 

inomenl  où  la  blessure  eut  lieu,  des  accidents  révélèrent  que 
l’encéphale  venait  d’être  atteint  ; mais  ils  se  dissipèrent.  • 

Il  me  semble  que  cette  observation  , que  cet  auteur  envisage 
seulement  au  point  de  vue  de  l’état  latent  du  ramollissement, 
peut  être  aussi  bien  considéi  ée  comme  un  exemple  de  guérison  de 
« ette  maladie  ; et  cette  guérison  n’était- elle  pas  aussi  complète 
cju’on  puisse  le  supposer,  avec  une  altération  qui  avait  désorga- 
nisé sans  retour  une  portion  du  cerveau  ? 

Je  ne  saurais  cependant  affirmer  que  le  ramollissement  pul- 
peuxne  fût  pas  susceptible  de  guérir  par  cicatrisation,  sans  avoir 
passé  par  la  période  d’infiltration  celluleuse. 

Le  docteur  Sims,  qui  paraît  avoir  parfaitement  compris  la 
possibilité  de  démontrer  par  l’anatomie  pathologique  la  cura- 
bilité du  ramollissement  cérébral,  regarde  les  petites  cavités  que 
l’on  rencontre  souvent  dans  la  substance  blanche  ou  grise  du 
cerveau,  tapissées  par  une  membrane  pâle,  celles  qui  la  font 
ressembler,  ainsi  que  la  grise,  à du  pain  frais  ou  à du  fromage, 
comme  la  preuve  de  l’arrêt  ou  de  la  guérison  du  ramollissement 
blanc  (1).  Mais  celte  opinion  n’a  d’autre  valeur  qu’une  simple 
assertion,  car  l’auteur  ne  s’appuie  d’aucun  fait  probant,  d’au- 
cune démonstration  raisonnée,  et  la  plupart  des  observations 
qu’il  rapporte  sont  très-incomplètes  sous  le  rapport  des  sym- 
ptômes et  même  de  l’anatomie  pathologique. 

\oici  un  de  ces  faits  : une  femme  de  cinquante  ans  eut,  dans 
les  deux  dernières  années  de  sa  vie,  plusieurs  attaques  de  para- 
lysie d’un  côté  ou  de  l’autre,  qui  se  dissipaient  au  bout  d’un  cer- 
tain temps,  et  qui  laissèrent  une  paralysie  de  la  jambe  gauche 
et  du  bras  droit.  Elle  mourut  presque  en  enfance.  Les  deux 
hémisphères  présentaient  des  ouvertures  semblables  à des  pi- 
qûres dè  vers  ; il  y en  avait  aussi  quelques-unes  dans  le  cerve- 
let. Elles  étaient  de  grandeur  variable,  quelques-unes  sphé- 
riques, d’autres  au  contraire  très-inéguhères  ; les  unes  à parois 
nettes  et  blanches,  les  autres  tapissées  par  une  membrane  fine  et 
jaunâtre.  On  trouva,  sur  plusieurs  points,  de  petits  corps  noirs, 
de  forme  sphérique,  semblables  à de  la  m'danose,  mais  qu’on 
reconnut  pour  des  caillots  de  .sang  enveloppés  d’une  mein- 

(t)  Docteur  Sims,  Mémoire  uir  la  guc'risnn  du  ramoUissr.ment  du  cer- 
yrnu  ( Gawtte  médicale. , 58  juillet  4838). 


^ÛvS  nAAIOLLIssE^rR^^T  rr.RÉBiui.. 

hrane.  Toule  l*i  siibslance  cérf'brale,  excepté  la  couche  optique 
droite,  était  plus  ferme  qu’à  l’état  ordinaire. 

Je  crois  qu’il  y a lieu  de  douter  que  ce  fait  soit  un  exemple  de 
guéaison  d’un  ramollissement  : le  ramollissement  ne  se  montre 
guère  ainsi  parsemé  par  petits  points  dans  le  cerveau.  ]Nf’était-ce 
pas  plutôt  la  trace  de  petites  liémorrliagies  miliaires  ? Ou 
trouva  encore  çà  et  là  un  certain  nombre  de  petits  caillots  san- 
guins, envelopj)és  d’une  membrane,  et  l’auteur  lui-mème  attri- 
bue à la  résorption  de  semblaldes  hémorrhagies,  les  petites  ca- 
vités tapissées  d’une  membrane  jaunâtre.  N’est-il  pas  d’ailleurs 
.singulici-  de  voir  présenter,  comme  guérie  de  ramollissement, 
une  femme  qui  meurt  en  enfance  et  paralysée  à cinquante-deux 
ans,  et  chez  laquelle  des  attaques  se  montraient  encore  de  temps 
en  temps  ? 

On  trouve  quelquefois  un  point  circonscrit  du  cerveau,  sur- 
tout des  corps  striés,  comme  criblé  d’un  grand  nombre  de  va- 
cuoles, souvent  jaunâtres,  tapissées  ou  non  d’une  fausse  mem- 
brane, et  dans  l’intérieur  riesquelles  on  reconnaît  difficilement 
la  ])i'ésence  d’un  liquide.  Ou  ne  sait  guère  à quoi  rapporter  ces 
vacuoles  que  l’on  a souvent  comparées  aux  yeux  du  fromage 
<!(•  Oriiyère  : I\lorgagni  en  a parlé  le  premier,  je  crois  , et  sans 
eu  expliquer  le  mode  de  formation  ; M.  Rochoux  a exprimé  la 
même  ignorance.  Ces  vacuoles,  avec  lescjuelles  , dans  les  corps 
striés,  ou  a quelquefois  confondu  des  cavités  destinées  à loger 
des  vaisseaux  assez  volumineux,  mais  revenus  sur  eux-mêmes 
après  la  mort,  pourraient  bien  n’ètre  autre  chose  cjue  la  trace 
de  ramollissements  guéris,  à la  période  dont  nous  nous  occu- 
pons maintenant. 

En  général,  les  individus  chez  lesquels  j’ai  rencontré  de  sein-  . 
blables  alterations  ne  présentaient,  du  côte  des  fonctions  céré- 
brales, aucun  phénomène  qui  pût  leur  être  rapporte.  Voici 
(pielqucs  exemples  de  ce  genre. 

Une  femme  de  soixante-treize  ans,  parfaitement  conservée 
sous  le  rapport  des  facultés  céréinalcs,  mourut  d’une  gastrite 
chronique.  Ou  trouva,  dans  le  corps  strié  gauche,  cinq  ou  six  ca- 
vités très-petites,  pouvant  contenir  les  unes  une  tête  depingle, 
les  autres  une  lentdle.  Leurs  parois  n étaient  pas  tres-lisses,  et 
ou  pouvait,  dans  deux  ou  trois,  soulever  une  petite  lame  cellu- 
leuse et  vasculaire.  Il  n’y  avait  pas  d’altération  de  ronlenr  lu 


GTJÉUISOU  DU  RAMOLUSSEMETÏT.  IDn 

lie  consistance  à l’entour.  On  n’y  distinfiiiait  pas  de  liquide. 
Kien  à noter  dans  le  reste  du  cerveau. 

Une  femme  nommée  Thomas,  â.gée  de quatre-vinj^t-un  ans, 
mourut  d’une  hémorrhagie  cérébrale.  On  trouva  chez  elle  une 
altération  particulière  des  circonvolutions , qui  nous  paraît  un 
vestige  certain  de  ramollissement  guéri,  et  dont  nous  nous  oc- 
cuperons quelques  pages  plus  loin  (1);  mais  en  outre  on  nota 
que  le  corps  strié  du  coté  gauche  était  criblé  de  petites  cavités 
du  volume  d’un  pois  , revêtues  d’une  membrane  et  à parois  un 
peu  jaunâtres,  sans  altération  de  consistance  à l’entour.  On 
trouva  dans  le  corps  rhomboidal  du  cervelet,  d un  coté  seule- 
ment, plusieurs  petites  cavités  à peu  près  semblables  aux  pie- 
cédentes. 

Une  femme  de  soixante-onze  ans  succomba  à une  pneumo- 
nie ; elle  ne  présentait  durant  sa  vie  aucune  lésion  des  facultés 
cérébrales.  Les  centres  nerveux  étaient  sains  : seulement  ou 
trouva,  dans  le  centre  des  corps  striés,  deux  ou  trois  petites  ca- 
vités pisiformes,  paraissant  tapissées  par  une  inembiane  tiè.s- 
line,  parfaitement  transparente  et  incolore,  parcourue  de  pe- 
tits vaisseaux  louges,  fort  délies.  La  substance  cercbiale,  a 
l’entour,  était  tout  à fait  saine  (2) , 

Voici  comment  je  crois  pouvoir  rattacher  cette  altération  au 
ramollissement. 

Lorsqu’un  ramollissement,  encore  recent  et  dans  cet  état  oxi 
le  tissu  cérébral  non  désorganisé  est  encore  susceptible  de  re- 
prendre ses  qualités  normales,  va  passer  à un  degré  plus  avancé, 
sans  doute  ce  dernier  se  montre  d’abord  dans  des  points  isoles 
pour  envahir  ensuite  la  totalité  du  ramollissement,  de  même 
que,  dans  un  poumon  hépatisé  en  rouge,  le  passage  à la  suppu- 
ration s’annonce  par  des  marbrures  grises,  qui  indiquent  que 
le  pus  se  forme  dans  des  points  circonscrits  avant  de  s’élendie  à 
i’organe  tout  entier.  Que  si,  en  ce  moment,  la  maladie  vient  à 
s’arrêter  tout  à coup  sous  une  influence  quelconque,  le  tis.su  ra- 
molli tendra  à revenir  à sa  con.sistance  normale  ; mais  les  points 
les  plus  désorganisés  ne  saill  aient  en  faire  autant  ; et,  lorsqu’ils 


(t  ) Voyez  observation  1 1 .1. 

(Z)  Voyez,  observations 7t>  et  9l,d’aulrcs  exemples  d’une  altc'rntion  sem* 
1)1.1  ble  des  corps  Ktrio'.s. 


410 


1!  AMOL 1 , 1 SS  E M r.  ÎS  T C Ér.  É B R i I, . 

se  trouvent  ainsi  cotn  pris  au  milieu  de  substance  cérébrale  saine, 
on  conçoit  parfaitement  un  travail  de  résorption  qui  les  fait 
disparaître  et  les  remplace  par  de  petites  cavités  ; ces  dernières 
conservent  quelquefois  une  teinte  jaune,  trace  du  sang  qui  im- 
bibe si  souvent  les  tissus  ramollis  au  premier  degré. 

« L’idée  d’une  résorption  de  la  matière  ramollie  n est  pas 
une  idée  purement  théorique,  dit  M.  Decliambre.  Elle  est 
fondée  sui  ce  que  l on  trouve  souvent,  aux  environs  ou  au  centre 
deiamollissementsen  bouillie,  des  cavités  évidemment  récentes, 
de  véiitables  foyers  vides  ou  ne  contenant  plus  qu’une  petite 
quantité  de  détritus  cérébral.  On  peut  aller  plus  loin  : on  peut 
piendie  en  quelque  sorte  sur  le  fait,  surtout  dans  les  ramollis- 
sements blancs  étendus,  la  formation  des  vacuoles.  Ici  la  sur- 
face est  toute  seniee  de  points  blancs,  brillants  comme  des 
paillettes  , ce  sontautant  de  gouttelettes  de  substance  médullaire 
liquefiee.  Là,  au  lieu  de  simples  gouttelettes,  on  voit  une  foule 
de  petites  lacunes,  variables  pour  la  grandeur  et  pour  la  forme, 
plus  ou  moins  pleines  de  liquide  lactescent,  et  donnant  à cette 
surface,  surtout  vers  les  parties  centrales  du  cerveau,  un  aspect 
celluleux  et  entrelacé,  comme  si  la  trame  organique  avait  été 
mise  à nu  (1).  » Ce  que  M.  Dechambre  décrit  ici,  c’est  l’infiltra- 
tion celluleuse  : nous  chercherons  tout  à Lheure  si  le  ramollis- 
sement paraît  susceptible  de  guérison  sous  cette  forme,  et  com- 
ment cette  guérison  peut  s^opérer. 

l.’ indur atiun  n’est-elle  pas  un  mode  de  guérison  du  rainollis- 
sement?Djns  laplupart  des  organes, dansles  organesglanduh  u\ 
surtout,  l’induration  est  généralement  présentée  comme  une  des 
terminaisons  de  l’inflainmalion  : cette  terminaison  est  une  espèce 
de  guérison,  dans  ce  sens  qu’habituellement  elle  ne  s’accom- 
pagne plus  d’aucun  des  syunptômes  qui  caractérisaient  la 
maladie;  mais  ce  n’est  qu’une  guérison  très-incomplète,  puis- 
qu’elle ne  permet  en  général  qu’un  retour  tout  au  plus  impar- 
fait des  fonctions  de  l’organe  lésé.  Toutefois  nous  devrons 
regarder  comme  très-heureusement  terminé  un  ramollisse- 
ment qui  aurait  abouti  à une  induration  définitivement  cir- 
conscrite, lors  même  que  les  fonctions  de  l’organe  ne  se  seraient 

(t  ) Decliambre  , Ménoire  sur  la  curabililé  du  raiiiollisseiitenl  cerSral 
( Gazeilr  Mddicnie,  m«i 


(ÎUM'.SON  DL  lUMOI.Î  ISSJiMEN't  . 


41  i 

l^•..saLsulalllent  léialilics;  niaisàpluslorte  raison, si  elles  avaieiK 
complètement  reparu. 

L’induration  jouerait  un  bien  grand  rôle  dans  1 inflamma- 
tion du  cerveau  , si  l’on  en  croit  M.  Lallemand  , puisque  cet 
auteur  lui  a consacré  trois  de  ses  lettres , une  aux  indurations 
rouges  , une  autre  aux  indurations  libreuses  et  cartilagineuses  , 
une  autre  aux  indurations  minces,  aplaties,  etc.,  et  qu  il  rattache 
toutes  ces  indurations  au  ramollissement.  Assurément  ces  lettres 
contiennent  un  grand  nombre  de  faits  instructifs  ; cependant,  si 
l’on  réfléchit  que  la  presque  totalité  de  ces  observations  n’ont 
pas  été  recueillies  par  l’auteur  lui-même  (1)  , que  beaucoup  , 
empruntées  à des  écrivains  peu  récents , n’offrent  que  du  vague 
et  de  l’incertitrrde,  dans  la  rédaction  surtout  de  leur  partie 
anatomique  , que  la  plupart  présentent  des  complications  im- 
portantes, on  hésiter  a sans  doute  un  peu  à suivre  cet  auteur  dans 
tous  les  développements  qu’il  a donnés  à celle  partie  de  son  tra- 
vail , et  l’on  trouvera  peut-êire  avec  nous  que  l’on  n’en  saurait 
tirer  tout  le  fruit  que  semblent  promettre  des  faits  aussi  nom- 
hrerrx  et  analysés  avec  autant  de  talent. 

L’enseuible  de  ces  observations  nous  démontre  ceperrdant 
d’une  façon  incontestable  que  le  ramollissement  cérébral  peut 
aboutir  à l’induration  : cette  circonstance  est  sans  doute  fort 
rare  , puisque  le  professeur  de  Montpellier  a trouvé  si  peu  d’oc- 
casions de  l’observer,  et  nous  ne  l’avons  nous-même  rencontrée 
que  dans  bien  peu  de  cas  : c’est-à-dire  que  nous  avons  vu  assez 
souvent  l’induration  unie  aux  plaques  jaunes  ou  à l’infillration 
celluleuse  j ainsi  des  plaques  jaunes  plus  fermes  que  la  substance 
corticale  saine  , ainsi  les  parois  d’une  infiltration  celluleuse , 
comme  fibreuses  ou  cartilagineuses  ; mais  ce  que  nous  avons  fort 
rarement  observé,  c’est  une  induration  de  la  pulpe  cérébrale, 
ayant  pris  la  place  d’un  ramollissement.  Telle  serait . l’ohserva- 

[i)  Des  \ingt-quairc  dli.servàtioris'dé  la  leUrc  sur  les  indurations  min- 
cP.S'ri  aplaties...,  trois" seulfement  ont  été  vues  par  M.  Lallemand  lui-mème  j 
deux,  Siirle^  vingt  iix  de  Ià7*  leilie  sur  les  indurations  lihreii.se.s  etcanila-' 
gineiises  ç ancmie  enfin  dc,s  vingt-cinq  ohservalions  de  la  b'  lettre  sur  le.s  ia-, 
durations  rougc.s.  Ainsi,  sur  spixanle-quinze  faits  d’après  desquels  oet  puleur 
a établi  un  grand  nombre  de  propositions  affirmatives  sur  l’induration  du 
cerveau,  il  n’y  en  a que  cinq  fiui  aient,  été  observés  par  lui, 

' ‘ '•  otr'  ..  i I ^ .OUI,;.  ,U. 


nAMOU.lSSKAIF.rVT  C^nÉBUAL. 


lion  suivante,  dans  laquelle  IM.  Lallemand  volt  un  exemple 
incontestable  de  [jiie'rison  du  ramollissement. 

Obsekvation  111.  — Induration  partielle  du  cerveau,  probablement 
consécutive  à un  ramollissement.  Ramollissement  aigu  de  la  moelle 
épinière. 

Une  fille  de  quatorze  ans  , grande  , mais  d’une  constitution 
faible  et  lymphatique , avait  été  traitée  à l’hôpital  des  Enfants 
pour  une  hémiplégie  du  côté  droit , presque  complète  , et  sur- 
venue sans  cause  connue.  Elle  sortit  de  riiôpital  à peu  près  gué- 
rie , mais  seulement  un  peu  faible.  Quatre  mois  après  , elle  fut 
prise  des  accidents  suivants:  faiblesse  des  jambes,  augmentant 
graduellement,  mais  avec  vitesse;  paralysie  du  mouvement, 
ensuite  de  la  sensibilité  , qui  s’étend  à l’abdomen  et  a la  poi- 
trine; gène  de  la  respiration  , augmentant  jusqu’au  sixième 
jour.  Mort  à cette  époque. 

Autopsie.  — On  trouve  un  épanchement  de  sang  entre  la 
dure-mère  et  les  vertèbres  , surtout  à la  partie  inférieure  du 
col;  dans  cet  endroit , augmentation  de  volume  de  la  moelle, 
rougeâtre  à l’intérieur,  désorganisée  dans  l étendue  d un  pouce , 

et  re’duite  eu  une  espèce  de  bouillie. 

Une  portion  de  la  substance  médullaire  de  Ihcinispbeie 
gauche  , immédlateiueut  au-dessus  du  ventricule  latéral , avait 
subi  une  altération  remarquable  dans  l’étendue  d environ  un 
jrouce  et  demi  eu  longueur,  sur  deu.x  à trois  lignes  d épaisseur  ; 
elle  était  endurcie  au  point  d’ofiVir  de  la  résistance  sous  le  scal- 
pel. On  peut  se  faire  une  idée  assez  exacte  de  sa  consistance,  en 
la  comparant  à du  iroinage  de  Oruyère  (1;. 

M.  Lallemand,  après  avoir  établi  qu’une  semblable  altération 
ne  pouvait  en  aucune  façon  être  attribuée  à une  hemorrliagie  , 
dit  qu’il  est  très- probable, 'certain  même,  que  la  lésion  du  cer- 
veau était  de  inèine  nature  que  celle  de  la  moelle;  que  cet  en- 
durcissement particulier  de  la  substance  cérébrale  avait  été  le 
résultat  d’une  inflammation  eircouscnte  ; la  suite  , en  un  mol , 
d’un  ramollissement  partiel  du  cerveau. 

(t)  Lallemand,  lettre  II,  n.  30.  Observation  reoueillie  par  M.  Legouais. 


GUliPaSOiN'  DU  llAJIÛI-LlSSEMliNT.  1 

J’ai  cité  précédemment  (1)  une  observation  empruntée  à 
M.  Trousseau,  et  qui  paraît  un  exemple  certain  de  la  trans- 
formation d’un  ramollissement  en  une  induration. 

M.  Hostau  parle  , dans  son  livre  , de  la  possibilité  que  le  la- 
nioHissement  se  termine  par  induration  ; mais  il  n avait  , à 
l’époque  où  il  l’a  publié  , observé  aucun  fait  qui  lui  permit  de 

se  prononcer  sur  celte  question  (2).  . > ■ i 

Lorsque  le  ramollissement  des  circonvolutions  est  à l’elat  de 
plaques  jaunes  ou  d’ulcération  , est-il  susceptible  de  guérison  ? 
Sous  le  point  de  vue  anatomique , il  est  certain  qut:  l’on  ren- 
contre des  plaques  jaunes  bien  circonscrites,  fermes,  sans  ra- 
mollissement de  la  substance  médullaire  sous-jacente,  des 
ulcérations  parois  saines  ou  légèrement  indurées  , qui  offrent 
tous  les  caractères  de  lésions  anciennes,  tout  a fait  arrêtées  dans 
leur  marebe,  assez  analogues,  sous  ce  rapport,  à des  cicatrices  , 
mais  nous  les  avons  presque  toujours  rencontrées  chez  des  indi- 
vidus présentant  dans  le  reste  de  leur  cerveau  d’autres  altéra- 
tions , dont  la  présence  pouvait  être  la  cause  des  troubles  fonc- 
tionnels qu’ils  éprouvaient , et  s’opposaient  ainsi  a ce  qu  on  put 
parfaitement  apprécier  l’état  des  précédentes. 

Dans  l’observation  soixante-dix-septième  seulement,  où  les  cir- 
convolutions présentaient  plusieurs  plaques  jaunes  et  une  ulcé- 
ration étendue , il  ne  fut  trouvé  aucune  lésion  notable  des  fonc- 
tions cérébrales  ; il  n’y  avait  point  de  trouble  appréciable  de 
l’intelligence , de  la  parole  , des  mouvements  ; la  malade  , exa- 
minée avec  soin  pour  des  accidents  d’une  autre  nature,  n’accu- 
sait rien  du  côté  du  système  nerveux  , si  ce  n’est  des  étourdisse- 
ments habituels.  Sans  doute  cependant  elle  avait  éprouvé  à une 
certaine  époque  des  accidents  dus  au  développement  de  ces 
altérations,  et  sans  doute  ces  accidents  avaient  guéri.  Nous  de- 
vons également  renvoyer  aux  observations  rapportées  comme 
cxemplesde ramollissements  latents  (3).  La  plupart  des  individus 
qui  eu  font  le  sujet  n’ont  pas  été  interrogés  suHisammeut  sur 
leurs  antécédents  , parce  que  rien  ne  faisait  soupçonner  les  alté- 
rations que  présentait  leur  cerveau;  mais  ou  s’est  contenté  de 


(1)  Voyez  page  182. 

(2)  Rüstaii.  loc.  cil.,  p.  176. 

(3)  Voyez  cliap.  VII,  art*  3 , § iv- 


RA.\10LLlSSEMiiJ<X  CÉRÉÏiUÀL. 


4 U 

constater  l’absence  d’aucun  trouble  des  fonctions  cérébrales 
dans  les  derniers  temps  de  leur  vie.  Tant  que  l’on  ne  possédera 
pas  riiistoiie  complète  et  certaine  d’un  individu  , il  pourra  être 
difficile  de  distinguer  les  ramollissements  latents , dès  leur 
principe  , des  ramollissements  guéris  , c’est-à-dire  dont  les  ma- 
nifestations symptomatiques  auront  complètement  disparu. 

Lorsque  le  ramollissement  est  arrivé  à la  période  d’infiltra- 
tion celluleuse  , il  paraît  pouvoir  guérir  de  trois  manières  : 

A.  Le  tissu  cellulaire  cjui  garnit  le  pourtour  de  cette  infiltra- 
tion , celui  qui  la  parcourt , éprouvent  un  certain  degré  d’eii- 
durcisscment  ; quelques  points  même  deviennent  fibreux  , 
presque  cartilagineux  ; les  espaces  compris  entre  les  mailles  de 
ce  tissu  cellulaire,  agrandis  par  un  commencement  d’absorption 
ou  par  un  véritable  raccornissement  de  ce  dernier,  sont  remplis 
de  lait  de  chaux  ou  de  sérosité  ; à l’entour  on  trouve  la  sub- 
stance cérébrale  saine  , ou  un  peu  endurcie  , ou  légèrement  ra- 
mollie, ordinairement  sans  changement  de  couleur. 

B.  La  portion  de  substance  cérébrale  qui  présentait  l’infiltra- 
tion celluleuse  est  complètement  résorbée  , et  il  en  résulte  une 
cavité  circonscrite , à parois  blanches  et  plus  ou  moins  indu- 
rées , tapissée  ou  non  d’une  membrane  , pleine  de  lait  de  chaux 
ou  de  sérosité,  et  contenue  dans  l’intérieur  des  hémisphères  ou 
s’ouvrant  au  dehors. 

C.  Enfin  cette  cavité  , si  elle  n’est  pas  très-large  , peut  se  ré- 
trécir par  une  sorte  de  plissement  de  ses  parois,  s’oblitérer,  et 
donner  lieu  à une  cicatrice  blanche,  étoilée  ou  linéaire. 

Tels  sont  également  les  trois  modes  de  guérison  du  ramollis- 
sement, auxquels  se  peuvent  rapporter  ceux  qu’indiquent  les 
observations  de  l’excellent  mémoii'ede  M.  Uechambre. 

A.  Disposition  fibreuse,  avec  infiltration. 

B.  Cavités  séreuses. 

C.  Cicatrices  véritables. 

La  première  forme  répond  tout  à fait  à notre  infiltration  cel- 
luleuse ; seulement , à la  place  de  ce  tissu  celluleux  , lâche  et 
mollasse  qui  est  décrit  dans  nos  observations,  ce  sont  « des 
brilles  grisâtres  , d’une  densité  assez  considérable  pour  résister 
aux  frottements  du  scalpel,  n’olFrant  aucune  trace  d’organisa- 
tion celluleuse,  et  n’ayant  d’autre  apparence  que  celle  de  fais- 
ceaux isolés  de  substance  cérébrale  indurée  (obs.  I du  mcinoiri: 

\ 


GUÉIUSÜN  DL  UAMOLGlSSEMJiA'l'.  41  5 

% 

de  M.  Dechanibre  )...  ; une  induration...  caractérisée  par  l’intri- 
cation irrégulière  de  fibres  blanches  , résistantes , difficiles  à 
couper,  mouillées  d’une  petite  quantité  de  liquide  blanc  de 
chaux  , qui  se  trouve  comme  infiltré  dans  leurs  intervalles 
(obs.  2)...;  une  infiltration  d’une  soi  te  de  bouillie  blanche,  très- 
liquide,  au  sein  d’une  induration  blanche,  à fibres  nattées,  sans 
traces  de  tissu  celluleux  (obs.  3).  » 

\oici  une  de  ces  observations. 

Observation  iiu.  — Ramollissement  guéri  par  induration  d’une 
iiiGltration  celluleuse. 


Une  femme  , âgée  de  cinquante-neuf  ans , fut  transportée  à 
l’infirmerie  de  la  Salpétrière,  le  4 mai  1839,  dans  l’état  sui- 
vant : air  de  stupeur  j ellerernue  les  lèvres  comme  si  elle  parlait, 
sansaiticulei  un  seul  mot;  prolapsus  de  la  paupière  supérieure 
dioite,  et  déviation  de  la  bouche  à gauche  ; le  membre  supé- 
rieur gauche  est  presque  complètement  paralysé;  point  de 
signes  de  sensibilité  dans  les  deux  membres  supérieurs  ; rien 
de  semblable  dans  les  inférieurs.  Il  paraît  qu’on  avait  entendu 
cette  femme  se  plaindre  la  nuit  précédente , et  que  , tandis 
qu  elle  essayait  inutilement  de  se  lever,  le  matin  , on  lui  avait 
tiouvé  la  parole  embarrassée.  La  paralysie  du  bras  gauche  aug- 
menta pendant  cinq  jours  , accompagnée  d’une  légère  contrac- 
tion, puis  tous  ces  accidents  diminuèrent,  le  mouvement  re- 
païut,  ainsi  que  la  sensibilité,  presque  entièrement,  et  la  pax’ole 
aussi , mais  elle  demeura  toujours  fort  embarrassée. 

M.  Dechambre  vit  de  nouveau  cette  femme  entrer  à l’infir- 
inerie  vingt-deux  mois  après  ,pour  une  pneumonie  , à laquelle 
elle  succomba.  Il  paraît  qu’elle  n’avait  plus  qu’un  peude  faiblesse 
dans  les  membres  gauches  ; la  sensibilité  , examinée  un  peu  ra- 
pi  ement , sembla  intacte;  1 intelligence  l’était  également. 

Autopsie.  — Dans  le  centre  ovale  gauche , vers  l’union  du 
ders  antérieur  et  du  tiers  moyen  , noyau  d’induration  blanche, 
<1  un  demi-pouce  environ  en  longueur  et  en  largeur,  et  d'une 
prolondeur  de  trois  à quatre  lignes  , caractérisée  par  l’intrica- 
t.on  irregu  lere  de  fibres  blanches  , résistantes , difficiles  à cou- 
pei,  mouillées  d’une  i>elite  quantité  de  liquideblanc.de  chaux 
qui  se  trouve  comme  infiltré  dans  leu, s intervalles  Cotte  alté- 


416 


UAMOLLlSSEiMENT  CÉaÉUUAK. 


ration  , plus  prononcée  à son  centre , se  perd  graduellement 
dans  le  tissu  normal  environnant. 

Petite  cavité  irrégulièrement  arrondie  , à parois  un  peu  gri- 
sâtres , denses  , et  non  tapissées  de  membrane  au  centre  de  la 
couche  optique  gauche;  une  autre  analogue , mais  plus  alou- 
gée  , dans  le  coi  ps  strié;  aucune  altération  dans  le  reste  de  l’en- 
céphale ni  dans  la  portion  cervicale  de  la  moelle. 


Les  symptômes  observés  dans  ce  cas  ont  été  ceux  du  ramol- 
lissement. Leur  augmentation  graduelle  pendant  plusieurs 
jours  suffit  pour  le  caractériser,  et  nous  savons  que  la  contrac- 
ture éloigne  l’idée  d’une  hémorrhagie  centrale  des  hémisphères. 
Il  y a eu  réellement  guérison,  autant  au  moins  que  le  permettait 
l’altéi'atiori  indélébile  dent  les  fibres  cérébrales  se  trouvaient  le 
siège, puisqu’il  ne  restait  plus  qu’un  peu  de  faiblesse  des  mouve- 
ments et  d’embarras  de  la  parole.  Quanta  la  lésion  cérébrale, 
l’absence  de  toute  trace  de  sang,  le  lait  de  chaux,  la  disposition 
celluleuse... , nous  révèlent  l’existence  ancienne,  dans  ce  point, 
d’un  ramollissement  et  non  point  d’un  loyer  hémorrhagique. 

Les  deux  observations  c|ui  suivent  nous  présenteront  presque 
absolument  les  mêmes  altérations.  Je  crois  pouvoir  les  rangei 
au  nombre  de  celles  qui  démontrent  le  mieux  la  curabilité  du 
ramollissement. 

OnsEnvATiON  ii5.  — Perte  de  substance  du  cerveau,  considérée 
comme  trace  d’un  ramollissement  guéri. 

La  femme  Thomas,  âgée  de  quatre-vingt-un  ans,  mourut 
d’une  bemorrbagie  cérébrale  presque  foudroyante  , le  29  nicus 
18139.  On  m’a  assuré  ejue  depuis  trois  ans  qu’elle  était  à la  Sal- 
pétrière , elle  n’avait  jamais  présenté  aucun  signe  de  paralysie. 
Elle  descendait  souvent  dans  les  cours,  et  ne  se  servait  point 
de  canne.  Elle  avait  bien  un  peu  de  difficulté  a marcher  , tuais 
elle  ne  paraissait  pas  boiter  ; la  prononciation  était  legerenicnt 

Autopsie.  — Je  trouvai , outre  les  désordres  produits  par 
l’hémorrhagie  cérébrale , les  altérations  suivantes  : à la  partie 
externe  de  l’hémisphère  gauche , sur  le  bord  tranchant  qui 


GbÉalSON  DU  lUMÜLLlsSEAiESX.  ' ‘ 

l éuuillal'ace  externe  à la  face  inférieure,  on  voit  une  fente  iou- 
giludinale  , béante  , parallèle  à l’axe  du  cerveau  , de  cinq  centi- 
nièlres  de  longueur,  et  s’ouvrant  dans  une  cavité  qui  pénétrait 
dans  l’épaisseur  de  l’héniisplière,  à quinze  ou  vingt  inillimctrea 
de  profondeur  ; cette  cavité  était  tapissée  par  une  inenibranu 
épaisse  , transparente  , sans  aucune  coloration  , parcourtte  ])ar 
quelques  vaisseaux  fins  qui  se  dirigeaient  de  dedans  en  dehors  ; 
les  parois  étaient , à la  partie  prolonde  où  elle  se  terminait  en 
manière  de  cul-de-sac,  réunies  par  des  filaments  celluleux  , 
blancluitres,  d’autant  plus  longs  qu’ils  étaient  plus  rapprochés 
de  l’orifice  ; vers  cet  orifice  , elles  se  trouvaient  un  peu  rappro- 
chées  l’une  de  l’autre,  sans  adhérer  et  sans  se  toucher  immédia- 
tement; la  substance  corticale  des  circonvolutions  environ- 
nantes était  saine  et  nettement  découpée  ; la  pie-mère  s’en 
détachait  sans  qu’on  pût  lui  reconnaître  de  continuité  avec  la 
membrane  qui  tapissait  cette  cavité  ; les  parois  de  cette  der- 
nière étaient  très-blanches , saines,  et  peut-être  un  peu  plus 
fermes  que  le  reste  du  cerveau. 

fje  corps  strié  gauche  et  le  corps  rhomboïdal  présentaient  de 
petites  cavités  qui  ont  été  décrites  page  408. 


ÜJiSERVATioK  I i/i.  — Altération  toute  semblable  à la  précédente. 

La  femme  Coclin  , âgée  de  soixante-sept  ans  , mourut  d’une 
pneumonie,  le  23  janvier  1839,  dans  le  service  du  docteur 
Prus.  Cette  femme  ne  m’avait  présenté  aucun  signe  d'une  af- 
fection cérébrale  quelconque.  Voici  les  renseignements  que  j’ai 
pu  me  procurer  sur  elle. 

Elle  n’était  pas  à l’hospice  depuis  longtemps  j elle  était  très- 
affaissée , avait  toujours  l’air  soulïrant  ; elle  ne  se  plaignait , du 
reste , que  de  la  respiration  , toussant  habituellement  et  souvent 
oppressée;  son  intelligence  , peu  développée  , n’ofi'rit  jamais  au- 
cune altération  ; on  n’a  remarqué  aucun  signe  de  paralysie  ; 
elle  prononçait  assez  bien.  Quoiqu’elle  ne  travaillât  jamais,  elle 
paraissait  se  servir  également  bien  de  ses  deux  bras  ; elle  mar- 
cliait  d’un  pas  égal , et  sang  .sc  servir  de  canne. 

^iulopsie.  — Les  os  du  crâne  sont  épais  , très-injectés  , fort 
adhérents  à la  dure-mère;  la  pie-mère  contient  une  certaine 

27 


il8 


al.MOLUSSE.ME>T  C^aÉBHAl.. 


quantité  de  sérosité  incolore  et  limpide  , qui  n’écarte  pas  nota- 
blement les  circonvolutions  ; elle  est  très-injectée , et  égale- 
ment des  deux  côtés;  épaississement  léger  des  parois  de  c[uel- 
qut's-uns  de  ses  vaisseaux  ; sérosité  assez  abondante  à la  base  ; 
les  méninges  se  détachent  facilement  de  la  superficie  du  cer- 
veau. ^ 

A la  face  interne  du  lobe  postérieur  de  l’hémisphère  gauche  , 
deux  ou  trois  circonvolutions  sont  tout  à fait  détruites  et  rem- 
placées par  une  cavité  creusée  dans  la  substance  médullaire , ca- 
pable de  contenir  une  noix  de  moyenne  grosseur.  Cette  cavité, 
pleine  d’une  sérosité  transparente,  est  béante  à la  surface  du 
cerveau  , où  elle  se  trouve  fermée  par  la  pie-mère  qui  passe  au- 
devant  , épaissie  à son  niveau  ; elle  est  tapissée  à l’intérieur  par 
une  membrane  un  peu  jaunâtre  , vasculaire  , assez  épaisse , et 
qui  semble  se  continuer  avec  la  pie  mère  ; la  couche  corticale 
des  circonvolutions  qui  environnent  l’orifice  de  cette  cavité  est , 
dans  une  petite  étendue  , transformée  en  un  tissu  mollasse  , 
jaune,  membraniforme  ( plaques  jaunes).  La  substance  avoisi- 
nante paraît  tout  à fait  saine. 

La  surface  ventriculaire  du  corps  strié  gauche  présente  , près 
de  son  extrémité  antérieure,  une  déjtression  un  peu  jaunâtre  , 
et  que  recouvrirait  la  pulpe  de  l’index  ; une  coupe  faite  en  ce 
point  ne  montre  qu’un  peu  d’affaissement  de  la  substance 

grise. 

Au  milieu  de  la  substance  médullaire  de  l’hémisphère  droit, 
à la  réunion  du  lobe  postérieur  avec  le  lobe  moyen,  on  trouve 
une  cavité  arrondie  , du  volume  d’une  grosse  noisette  , pleine 
de  sérosité  limpide  , et  tapissée  par  une  membrane  épaisse  jau- 
nâtre et  vasculaire.  Intégrité  absolue  de  la  substance  environ- 
nante. . , , , 

On  trouve  encore  dans  les  corps  stries  et  les  couches  optiques 

plusieurs  petites  cavités  pis  formes,  quelques-unes  un  peu  jau- 
nâtres , et  bien  distinctes  des  cavités  vasculaires  que  présentent 
souvent  les  mêmes  points;  leurs  parois  sont  saines.  Un  peu  de 
sérosité  limpide  dans  les  ventricules;  rien  dans  le  cervelet  ni  la 

moelle  alongée. 


Les  deux  cavités  ciue  je  viens  de  décrue  , creusées  à la  sur- 


ftliÉRIhüW  DU  KAMOLLlSSEMliST. 


il9 

face  des  hémisphères  , béantes  au  dehors  du  cerveau  , ne  peu- 
vent avoir  été  produites  que  par  une  hémorrhagie  ou  un  l'amol- 
lissement. Sans  nous  arrêter  à l’absence  de  coloration  de  leurs 
parois  (1),  je  dirai  que  leur  situation  et  leur  forme  rend  la 
supposition  d’une  hémorrhagie  tout  à fait  inadmissible. 

Il  est  certain  , en  eft'et , qu’un  épanchement  de  sang  n’eût  pu 
former  une  semblable  excavation  , sans  se  répandre  au  dehors 
du  cerveau;  et  dans  ce  cas,  la  guérison  n’eût  pas  eu  lieu  , car  il 
n’existe  pas  , que  je  sache  , un  seul  fait  qui  autorise  à croire 
qu’une  hémorrhagie  du  cerveau  , avec  rupture  du  foyer  au  de- 
hors, puisse  guérir,  et  l’on  ne  conçoit  guère  la  possibilité  d’une 
semblable  terminaison.  Maintenant  si  un  tel  phénomène  avait 
eu  lieu , on  aurait  trouvé  au  moins  quelques  traces  de  sang 
épanché  dans  les  méninges , où  l’on  en  cherche  aussi  vainement 
que  sur  les  parois  de  l’excavation.  Si  l’on  remarque , outre  cela, 
que  dans  les  deux  cas  l’altération  a évidemment  , d’après  sa 
disposition  en  cul-de-sac , marché  de  dehors  en  dedans  , c’est- 
à-dire  de  la  couche  corticale  vers  la  substance  médullaire  , 
marche  opposée  à celle  de  l’hémorrhagie , tandis  qu’elle  est  la 
plus  habituelle  dans  le  ramollissement;  que,  dans  l’observât  ion  de 
Coclin,  l’orifice  de  l’excavation  était  entouré  de  plaques  jaunes  , 
iuite  certaine  d’un  ramollissement  ; enfin  , que  les  observations 
précédentes  nous  ont  permis  de  suivre  graduellement  le  ramol- 
lissement jusqu’à  cette  période  , où  la  partie  ramollie  disparaît , 
pour  laisser  à sa  place  des  pertes  de  substance  ou  des  cavités  de 
formes  variées,  ou  ne  doutera  plus  de  l’origine  de  ces  deux  exca- 
vations , et  on  n’hésitera  plus  à y voir  la  trace  d’anciens  ramol- 
lissements guéris. 

(t)M.  Dechambre  paraît  attacher  uue  a.-sez  grande  importance  a l’ab- 
jence  de  la  couleur  jaune,  dans  les  cas  de  ce  genre.  « Quand  celte  coideur 
existe,  dit-il  ( autour  des  cicatrices),  elle  change  peu  de  chose  à la  question  • 
mais  quand  elle  manque,  c’est  un  caractère  impcriant , car  il  est  douteux 
qu’une  cicatrice  de  foyer  hémorrhagique  puisse  se  faire,  sans  conserver  quel- 
ques traces  de  la  teinte  jaunâtre  que  les  résorptions  sanguines  laissent  tou- 
jours après  elle.  » ( Mémoire  cild,  p.  3<0).  Ce  que  M.  Dechambre  dit  des 
cicatrices,  il  doit  l’cnlcndrc  des  cavités  ; i!  arrive  cependant  assez  souvem 
de  rencontrer,  dans  le  cerveau,  d’ancienne;,  cavités,  sans  coloration  de  leur 
parois,  et  qu’il  cm  d.lhcile  -le  ne  pas  ullrij.ucr  i d'antifimvs  lu'aioirhu- 
Siei. 


RA.M0M.1SSH.MENX  CÉKÉBUAL.  . 


M.  Cniveilliier  s’exprime  dans  les  termes  suivants,  relali  ve- 
inent à la  {juérison  du  ramollissement,  considérée  anatomi- 
quement : 

« Le  ramollissement  hlanc  et  le  ramollissement  rouge  (1),  dit- 
il  , ne  sont  pas  marqués  au  sceau  de  l’incurabilite.  Plusieurs 
laits  m’ayant  permis  cl’établir  positivement  la  possibilité  de  leur 
;;uérisou  et  d’en  établir  le  mécanisme  , je  crois  être  en  mesure 
de  ditlérencier  les  cicatrices  du  rainollisseinent,  des  cicatrices 
des  foyers  sanguins. 

« Les  cicatrices  du  ramollissement  blanc  sont,  lorsqu’il  est 
circonscrit , des  espèces  de  petites  cavités  ou  géoles  à parois  con- 
tiguës , remplies  ou  non  de  cellulositc  sans  couleur.  Lorsqu’il 
est  diffus  , la  cicatrice  n’est  autre  chose  qu’une  cellulosité  làcbe, 
blancbaire,  infiltrée  de  bouillie  lait  de  chaux  ; 1 absence  de  co- 
loration dans  la  cicatrice  atteste  l’al-isence  du  sang  dans  1 altera- 
tion primitive. 

« Les  cicatrices  du  ramollissement  rouge  , ou  apoplexie  capil- 
laire , sont  diversement  nuancées  de  jaune  ou  de  brun  , et  ne 
peuvent  être  différenciées  des  cicatrices  des  foyers  sanguins  que 
par  leur  siège  et  leur  disposition  : ainsi  les  apoplexies  avec 
foyer,  lorsqu’elles  occupent  les  circonvolutions,  ont  leur  siège 
au  centre  des  circonvolutions  , taudis  que  les  apoplexies  capil- 
laires ( ramollissement  rouge  infiltré  de  sang  ) des  circonvolu- 
tions affectent  presque  toujours  exclusivement  la  substance 
grise.  Il  en  résulte  que  , lorsque  nous  trouvons  une  circonvolu- 
tion dépouillée  de  substance  grise  , laquelle  est  remplacée  par 
une  pellicule  jaune  diversement  nuancée , nous  devons  en  accu- 
ser, non  une  apoplexie  en  foyer,  mais  une  apoplexie  capillaire 

( ramollissement  ) (2).  » . ' 

Tout  ceci  est  parfaitement  exact  comme  description;  mais  on  voit 
qu’en  considérant,  d’une  manière  générale,  les  plaques  jaunes  et 
l’infiltration  celluleuse  comme  àescicalrices  du  ramollissement, 


(1)  Nous  avons  cléj.i  eu  occasion  de  faire  remarquer  que  M.  le  professeur 

CruveiUner  s’efforce  toujours  de  distinguer  le  ramollissement  blanc  du 
ramollissement  rouge.  On  verra,  dans  les  lignes  suivantes,  riuc  ces  expressions 
de  ramollissement  et  ùlanc  répondent  pre.eisciucnt  au  ramollissemu. 

des  circonvolutions  et  à celui  des  parties  cculiales. 

(2)  Criivcilliicr,  ^nat.  pathol. , 35*  livraison. 


clkiuson  nt;  f.amom.issement. 


421 


cet  anleiu-  esl  à côté  de  la  véiUé  , puisque  ces  altérations  iie 
constituent,  à proprement  parler,  que  des  pcrmdes  de  transi- 
tion du  ranmllissement,  et  qu’on  ne  les  voit  que  dans  des  eu - 

constances  toutes  spéciales  iouer  le  rôle  de  cicatrices-  Remar- 
quons encore  que  cette  distinction  du  raniollisseinenl  et 

In  ramollissement  hlanc  , ce  nom  d apople.ne  capdlnay 

donne  au  ramollissement  roufie  ou  infiltre  de  sang , jettent  ne. 
cessairement  une  certaine  confusion  dans  ce  passage.  ^ 

Le  docteur  Carswell,  cité  par  le  docteur  Sans  , dit  n avoir 
pas  vu  un  seul  cas  de  cicatrisation  complété  du  cerveau  a la 
Lite  du  ramollissement -,  cependant  il  indique  comme  le  pre- 
mier degré  du  retour  de  la  substance  ramollie  , la  foimation 
d’une  excavation  remplie  d’une  matière  fluide , laiteuse  , gri- 
sâtre, rougeâtre  ou  iaunâtre,  avec  un  peu  de  tissu  cellulaire 
lâche.  Peu  â peu  ce  tissu  cellulaire  se  transforme  en  une  mem- 
brane  séreuse  qui  tapisse  l’excavation.  Il  dit  avoir  observe  trois 
cas  de  ce  genre  (1).  Ce  passage  indique  avec  beaucoup  de  préci- 
sion comment  le  ramollissement  arrive  à ces  cavités  que  nous 
venons  de  décrire  dans  les  observations  précédentes,  apres  avoir 
passé  par  l’infiltration  celluleuse.  Je  suis  heureux  de  voir  mes 
observations  confirmées  par  un  médecin  aussi  distingue. 

Inobservation  suivante,  rapportée  par  M-  Decbambre,  me  pa- 
raît un  exemple  aussi  certain  que  possible  d’une  cicatrice  pro- 
prement dite  appartenant  au  ramollissement  : je  n’ai  pas  rencon- 
tré rnoi-mêine  de  laits  de  ce  genie. 


Obskrvatioîi  ii5.  — rTiiêrison  du  ramollissement  par  cicatrisalion. 

La  nommée  Beitliier,  âgée  de  soixante-dix-neuf  ans  , avait 
re.s.senti  passagèrement , en  septembre  1834  , de  vives  douleurs 
le  long  du  rachis  , sans  rien  dans  les  membres;  elle  as.sura 

qu’elltVavail  jamais  rien  éprouvé  de  ce  côté.  Le  4 février  sui- 
vant , elle  revint  à l’infirmerie.  Il  paraît  que  , depuis  une  quin- 
zaine’ de  jours,  on  la  voyait  s’affaiblir  de  plus  en  plus  et 
chanceler  sur  ses  jambes-,  l’étreinte  de  la  main  gauche  était 
sensiblement  moins  forte  que  celle  de  la  droite  j il  n y avait  pas 
de  diftérence  appréciable  dans  les  mouvements  des  deux  mem- 


(1)  Sims  , Ménoire  cit^,  p-  4G(j. 


IliMill  I ,11  I 


t ÙhKIMAI  . 


nf,miicli,«,sement  de  l’intelligence  ; la  malade  dit  qu’elle  se  sent 
om  3er  en  paralysie,  qu’elle  éprouve  de  l’engourdissemeni  dans 

Les  jours  suivants,  jusqu’au  10,1a  stupeur  devint  plus  con- 
sidérable , les  iiiouvements  du  bras  gauche  plus  bornés,  sans 

ntiactuie , la  faiblesse  demeura  égale  dans  les  deux  membres 
inleneurs  ; mais  à partir  de  ce  moment,  la  malade  devint  plus 
alerte  , 1 intelligence  s’éclaircit  uu  peu  sans  reprendre  sa  netteté 
première  ; la  parole  resta  lente  ; le  bras  gauche  conserva  sa 

'iialade  quitta  rinbrmerie.  Elle  y revint  deux 

ans  plus  tard . Depuis  lors , elle  s’était  considérablement  affai- 
blie , elle  était  devenue  gâteuse  ; des  étourdissements,  des  four- 
millements et  des  douleurs  dans  les  membres  inférieurs  avaient 
eu  beu  depuis  un  an  ; le  sommeil  était  pesant,  la  parole  lente  , 
la  mémoire  obscure;  elle  ne  pouvait  marcher  sans  être  soute- 
nue , et  ses  deux  jambes  fléchissaient  sous  elle;  la  main  gauche 
était  sensiblement  plus  faible  ; il  n’y  avait  pas  d’hémiplégie  fa- 
eiale  ; la  sensibilité  était  conservée  partout.  Cet  état  d’engour- 
dissement du  système  nerveux  augmenta  peu  à peu,  et  elle  suc- 
comba paisiblement  à un  engouement  pulmonaire. 

Autopsie.  — Très-grande  quantité  de  sérosité  .dans  la  pie- 
mère  et  les  ventricules  j injection  générale  extrêmement  intense 
des  veines  de  la  périphérie  cérébrale  ; teinte  opaline , épaississe- 
ment et  induration  inaniiesie  de  tout  le  feuillet  viscéral  de  l’a- 
raclinoïde  ; la  masse  entière  du  cerveau  est  très-molle  et  très- 


pâle. 

Dans  la  substance  blanche  du  lobe  postérieur  droit , près  de 
rextrcmité  du  ventricule  latéral  , existe  une  induration  blanche 
d’iiii  derni-pouce  de  diamètre,  dont  les  fibres,  au  lieu  de  s’en- 
tremêler, convergent  toutes  vers  un  point  central  , de  manière 
à donner  à la  cicatrice  la  forme  radiée  ; le  tissu  cérébral  s’est 
évidemment  plissé  dans  co  point  pour  oblitérer  une  ancienne 
cavité  : tous  ces  petits  faisceaux  convergents  ne  laissent  entreoux 
aucun  intervalle  capable  de  contenir  un  liquide;  la  cicatrice 
est  sèche.  Rien  à noter  dans  le  reste  de  l’encéphale. 

Les  veines  du  rachis  sont  toutes  gorgées  de  sang  noir;  le 
feuillet  vi.scéral  de  l’arachnoïde  spinale  est  tacheté  de  points 


423 


G13ÉUÎS0H  DU  RAMOULISSEMEWT. 

jaunes  opaques  dans  toute  son  étendue  ; la  moelle  eit  petite  et 
saine  (1). 

On  ne  peut  douter  de  la  nature  des  accidents  éprouvés  par 
cette  femme  deux  ans  avant  sa  mort , et  auxquels  se  rapporte 
l’altération  trouvée  dansl’liémisphere  droit.  Ces  plienomenes  eu- 
rent tous  les  caractères  du  ramollissement , et  ne  pouvaient  en 
aucune  façon  laisser  soupçonner  une  hemorrliagie.  Malgie  la 
marche  décroissante  qu’ils  suivirent , leur  guérison  parut  tres- 
incomplète  ^ mais  il  faut  tenir  compte  des  complications  qui 
existaient  du  côté  des  méninges  de  la  moelle  et  du  cerveau. 
Quant  à l’altération  cérébrale  elle-même,  elle  offrait  tous  les  ca- 
ractères d’une  guérison  par  cicatrisation. 

M.  Bouillaud  a rapporté  un  cas  de  cicatrice  linéaire  du  cer- 
veau, comme  appartenant  au  ramollissement.  Il  n’y  a malheu- 
reusement aucun  detail  sur  les  symptômes.  Une  femme  de 
soixante-treize  ans  succomba  à une  hémorrhagie  cérébrale.  Un 
an  auparavant,  elle  avait  déjà  éprouvé  une  affection  cérébrale.  On 
trouva  à l’autopsie  un  foyer  hémorrhagique  récent.  Vers  l’u- 
nion du  lobe  antérieur  avec  le.  lobe  moyen  de  l’hémisphère 
droit,  dans  la  profondeur  de  la  substance  cérébrale,  on  obser- 
vait une  ligne  ou  lame  jaune,  dense,  comme  fdîreuse,  ayant  en- 
viron un  pouce  d’étendue  transversale,  cinq  à six  lignes  de  hau- 
teur, un  quart  de  ligne  d’épaisseur,  et  entourée,  de  tontes  parts, 
d’une  couche  de  substance  cérébrale  légèrement  indurée , 
brune,  épaisse  d’une  ligne.  La  teinte  brune  était  très-pro- 
noncée près  de  la  lame  jaune,  ancienne  cicatrice,  s’éclaircis- 
sait insensiblement  et  comme  par  dégradation,  en  s’en  éloignant, 
et  disparaissait  à une  ligne  au  delà  d’elle.  M.  Bouillaud  ajoute 
que  cette  lame  jaunâtre  était  tout  à fait  comparable  aux  cica- 
trices que  l’on  observe  quelquefois  dans  le  tissu  des  poumons; 
la  légère  induration  qui  existait  autour  d’elle  est  encore  un  in- 
dice que  ce  point  avait  été  autrefois  le  siège  d’une  phlegmasie(2). 

Le  passage  suivant  montre  cjue  M Rostan  avait  observé  quel- 
ques-unes des  altérations  que  nous  avons  décrites,  mais  sans  en 

(t)  Dediambre,  Mémoire  cit^,  p.  308. 

f2)  Ronillaud,  Traité  de  f encéphalite,  p,  221 . 


«AMOLLlSSliMENT  CÉRÉBUAr.. 


4‘M 

l er.onnaître  la  nature,  « J’ai  rencontré,  dit-il,  dans  des  cadavres 
d’anciens  paralytiques,  des  altérations  qui  paraissaient  guéries  , 
et  qui  m’ont  semblé  n'être  pas  le  résultat  d’un  ancien  épanche- 
ment. Chez  ces  sujets,  on  ne  trouvait  pas  de  kyste  ; et  quoique 
Vallération  ne  fût  pas  très-ancienne,  il  n’y  avait  aucune  trace 
de  sang.  La  portion  malade  du  cerveau  était  changée  de  cou- 
leur, coupée  par  une  muUitude  de  filaments  se  dirigeant  dans 
tous  les  sens,  formant  des  mailles  irrégulières , mais  point  de 
cavités,  point  de  membranes:  une  humeur  particulière  humée 
lait  cette  portion  altérée.  Celte  absence  de  la  trace  du  sane  et  de 
la  membrane,  suflit-elle  pour  prononcer  négativement  sur  un 
épanchement  ? C’est  ce  que  la  suite  éclaircira  (1).  » 

L’observation  suivante,  bien  que  dépourvue  d’autopsie,  me 
])arrnt  un  exemple  certain  de  guérison  du  ramollissement. 

On.<;rnvATio.N  i iR,  — Hémiplégie  avec  raideur  considéral)le  ilii  genou, 
survenue  sans  perte  de  , connaissance.  Disparition  graduelle  des  acci- 
dents. 


La  nommée  Morin  , âgée  de  soixante-douze  ans  , est  une 
femme  de  ])etite  taille , d’un  assez  grand  embonpoint^  la  face 
pleine  et  toujours  très-coloiée,  d’uu  caractère  extrêmement  gai, 
Ibri,  douce  et  d’une  intelligence  peu  développée.  Elle  a souvent 
l;r  tête  lourde  et  des  étourdissements,  qui  ii’onl  jamais  été  assez 
forts  pour  la  faire  tomber:  à part  cela,  sa  santé  est  bonne.  Elle 
n’.n  jamais  eu  d’attaque  d’apoplexie. 

Ee  18  mars  1839,  vers  le  soir,  elle  était  debout  dans  une  des 
cours  de  I bospice,  lorsque  tout  à coup  elle  se  sentit  faible  sur 
ses  jambes  et  fut  obligée  de  s’appuyer  contre  un  mur  pour  ne 
])as  tomber,  Elle  regagna  avec  peine  son  dortoir  et  put  monter 
tieux  étages  ; mais  arrivée  à la  porte  , ses  jambes  fléchirent , il 
fallut  la  porter  dans  sou  lit.  Elle  allirme  qu’elle  n’éprouva  pas 
alors  le  moindre  étourdissement , pas  même  un  peu  de  cépha- 
lalgie. Elle  ne  ressentit  absolument  qu’une  faiblesse  qui  ne  s’ac- 
compagna d’aucune  sensation  particulière  dans  les  membres  , 
et  sans  remarcpier  alors  que  cette  faiblesce  fût  plus  prononcée 
d’un  côté  que  de  l’autre  Elle  demeura  assoupie  toute  la  nuit. 
IjC  lendemain  matin,  cpiand  elle  voulut  se  lever,  elle  s aperçut 

<(l)  R«*lau,  /or.  ri/  , p.  ir.’i. 


guérison  ou  ramollissement.  425 

que  ses  membres  ^Haient  raides  et  privés  de  mouvemeal  du 

’ "^Elle  fo\  alors  portée  à l’infirmerie,  où  je  la  trouvai  dans  l’état 

Elle  est  coucliéesur  le  dos,  la  face  très-coloiée,  la  pbysiono 
mie  naturelle.  La  parole  est  un  peu  génée  ; la  bouche  fortement 
relevée  ù gauche.  Le  bras  droit  est  presque  complètement  résolu  ; 
il  se  soulève  et  se  déplace  avec  beaucoup  de  peine.  Les  doigts  ne 
peuvent  aucunement  se  mouvoir;  le  coude  résiste  un  peu  a la 

flexion,  sans  offrir  beaucoup  de  raideur. 

La  jambe  droite  est  tout  à fait  immobile.  Le  genou  présente 
une  raideur  telle  qu’il  est  impossible  de  le  fléchir  sans  emp  oyer 
une  grande  force,  et  qu’au  premier  abord  je  crus  à mie  aidcy- 
lose  : mais  hier  encore  il  était  parfaitement  flexible.  Quand  ou 
chatouille  la  plante  du  pied,  tout  le  corps  s’agite,  se  soulevé  , 
la  malade  rit  aux  éclats;  la  jambe  cherche  à se  retirer  et  se  de- 
place  légèrement , mais  elle  ne  peut  opérer  le  moindre  mouve- 
ment de  flexion.  Les  mouvements  sont  parfaitement  libres  a 
gauche.  La  sensibilité  est  bien  conservée  partout. 

La  malade  donne  avec  netteté  les  renseignements  qui  lui  sont 
demandés  ; sa  mémoire  n’est  altérée  en  rien.  Elle  afiirme  quelle 
n’éprouve  aucun  embarras,  ne  ressent  rien  d’extraordinaire 
dans  la  tête. 

Apyrexie  complète.  Chaleur  normale  à la  peau.  Etat  normal 
des  fonctions  organiques  fSaignée ; huile  de  ricin  GO  grammes  ; 


sirop  de  nerprun  30  grainmesj. 

Dès  le  lendemain  la  motilité  du  bras  avait  commencé  à repa- 
raître, et  elle  continua  de  faire  des  progrès  les  jours  suivants. 

26.  Il  n’y  a guère  de  changement  dans  le  membre  inférieur. 
Les  orteils  peuvent  à peine  se  mouvoir  ; la  raideur  du  genou  est 
toujours  fort  grande.  Le  bnus  se  meut  passableaient  ; la  main 
serre  avec  assez  de  force.  Aucune  souffrance  du  côté  de  la  tôle  ; 
état  général  excellent. 

20.  Quelques  picotements  et  des  démangeaisons  viennent  de 
paraîtré  dans  le  membre  inférieur,  sans  autre  changement  dans 
son  état. 

Dans  les  premiers  jours  du  mois  d’avril,  Morin  commença  a 
mouvoir  un  peu  sa  jambe  paralysée  , et  le  genou  perdit  un  peu 
(le  sa  raideur.  Ces  progrès  se  firent  lentement,  mais  sans  être 


«amüllisskmkwt  cérébral. 

entravés  par  aucun  accident.  Il  ne  se  forma  pas  la  moindre 
écorchure  au  siège  ; il  n’y  eut  jamais  aucun  mouvement  fébrile, 
h le  répété  encore  aujourd’hui  qu’elle  n’a  jamais  eu  ni  cépha- 
lalgie ni  étourdissements. 

Au  mois  de  mai , on  la  levait,  on  l’asseyait  sur  une  chaise  ; 
plus  tard  elle  put  faire  quelques  pas,  soutenue  sous  les  bras. 

Voici  tjuel  était  sou  état  a la  fin  de  Fannée, 

Elle  avait  l’apparence  de  la  meilleure  santé  , grasse  , la  figure 
coloree,  toujours  rieuse;  l’intelligence,  comme  avant  le  début 
de  la  maladie,  c’est-à-dire  assez  peu  développée.  Il  n’y  avait 
plus  de  déviation  de  la  bouche  ; la  parole  ne  paraissait  pas  sensi- 
blement gênée.  Le  bras  droit  avait  tout  à fait  recouvré  sa  mo- 
tilité et  sa  force  naturelles. 

Quant  à la  jambe,  elle  présenlait  encore,  mais  par  instants 
seulement,  une  raideur  assez  grande  pour  que  l’on  éprouvât 
quelque  peine  à la  fléchir.  Elle  la  pliait  elle-même  assez  aisé- 
ment, quand  elle  était  au  lit,  mais  sans  pouvoir  arriver  cepen- 
dant à une  flexion  complète.  Elle  marchait  assez  bien,  même 
sans  s appuyer  sur  un  bras,  tout  en  boitant  légèrement.  La  jambe 
ne  se  fléchissait  presque  pas  dans  la  marche,  et  ressemblait  à un 
genou  ankylosé.  La  sensibilité  était  intacte  partout.  Tl  n’y  avait 
nulle  part  aucune  douleur. 


Cette  femme  ne  peut  avoir  éprouvé  que  deux  choses  : ou  une 
hémorrhagie  cérébrale,  ou  un  ramollissement.  Deux  circonstan- 
ces me  paraissent  peu  d’accord  avec  l’idée  d’uu  foyer  hémorrha- 
gique: l’ab-sencodu  moindre  étourdissement,  de  toute  altéra- 
tion même  pa.ssagèie  des  facultés  de  l’intelligence,  et  leproinpt 
retour  des  mouvements  du  bras.  Mais  ce  ne  sont  là  que  des 
présomptions. 

Quant  à la  contracture,  elle  ne  me  paraît  pouvoir  laisser 
aucun  doute  dans  le  diagnostic. 

On  se  rappelle  les  considérations  dans  lesquelles  je  suis  entré 
relativement  à la  contracture,  dans  rhéinoirhagie  cérébrale: 
j’ai  dit  que  la  contracture  ne  se  rencontrait  que  lorsque  le  foyer 
venait  à communiquer  avec  l’intérieur  des  ventricules  ou  la 
surface  du  cerveau  ; ce  qui  ne  peut  être  un  instant  supposé  che* 


<;u^  lu^ü^  JJl  KA.UOJ.I.I.'SJ-  MK»  J'. 


Ir  snjoide  notre  observalion.  .Te  frouverais  as.sez  natui  el  que  l’on 
ne  voulût  pas  adopter  entièrement  les  propositions  que  j’ai 
émises  à ce  sujet , sans  les  développer  et  sans  en  rapprocher  la 
preuve  : mais  je  crois  pouvoir  affirmer  qu’il  n’existe  pas,  dans 
la  science,  un  seul  fait  d’hémorrhagie  circonscrite  à l’épaisseur 
d’un  he'misphère,  dans  lequel  on  trouve  notée  une  contracture 
primitive  et  persistante  comme  celle  de  Morin. 

Maintenant  voici  une  observation  dans  laquelle  l’examen  ca- 
davérique a permis  de  constater  un  ramollissement,  et  oiile  dé- 
but des  accidents  a été  exactement  semblable  à ce  que  nous  a 
présenté  l’observation  précédente. 

OBSERVATIo^  117.  — Hémiplégie  subite  avec  contracture,  .Mort  au 
bout  de  vingt-cinq  ou  trente  jours,  due  aux  progrès  d’une  affection 
du  cœur.  — Ramollissement  du  corp.s  strié  et  de  la  couche  optique. 

Un  homme  de. 53  ans  était  entré  à l’hôpital  pour  des  accidents 
résultant  d’un  anévrysme  de  l’aorte  et  d’une  hypertrophie  du 
cœur.  Vingt  jours  après,  il  montra  un  iTiatin  son  bras  droit  par- 
faitement contracté.  Il  raconta  qu’en  se  réveillant  il  avait  été 
tout  étonné  de  ne  pouvoir  plus  étendre  la  main  sur  l’avant-bras. 
<Ielui-ci  était  ramené  sur  le  bras,  et  les  doigts,  fléchis  sur  la 
paume  de  la  main,  marquaient  sur  la  peau  de  cette  partie  l’im- 
pr  ession  des  ongles.  Quelque  effort  que  fit  le  malade,  il  ne  pouvait 
pas  changer  celte  position.  L’idée  d’un  ramollissement  du  cer- 
veau se  présenta  sur-le-champ  à l’esprit;  ou  lui  demanda  s’il 
souffrait  ou  s’il  avait  souffert  de  la  tête;  il  répondit  négative- 
ment. Il  n^avait  pas  non  plus  d’étourdissements,  et  ses  facultés 
Intellectuelles  avaient  toute  leur  netteté.  La  contracture  per- 
sista une  partie  de  la  journée  ; elle  cessa  le  soir,  et  le  lendemain 
matin  on  trouva  les  membres  droits  complètement  relâchés  , 
mais  paralysés.  Pendant  les  vingt  cinq  ou  trente  jours  suivants, 
cette  paralysie  resta  la  même  ; les  membres  n’offrirent  pas  la 
moindre  trace  de  contracture , et  du  côté  du  cerveau  aucun 
nouveau  phénomène  n’apparut.  Cependant  la  maladie  du  cœur 
poursuivait  son  cours,  les  membres  s’étaient  infiltrés  et  l’ascite 
commençait  à devenir  évidente,  quand  le  malade  mourut  subi- 
tement. 

Aulnp^ie,  — cerveau  ne  présenta  rien  de  notable  jusqu’au 


428 


B AMOLLISSEMENT  CÉKÉBUAL. 


niveau  <3c  la  coudre  optique  et  tlu  corps  strié  du  côté  «auclie. 
(les  deux  corps  étaient  transfcnués  en  partie  en  une  bouillie  jou- 
mUre.  La  substance  nerveuse  située  autour  d’eux  participait  à 
ce  ramollissement.  Rien  autre  chose  de  remarquable  ne  fut  ren- 
contré dans  l’encéplialc  (1). 


Voici  donc  deux  individus  qui  un  matin,  à leur  réveil,  se 
trouvent  affectés  d’une  contracture  éuerj^ique  avec  perte  du 
mouvement  volontaire  et  conservation  de  la  sensibilité,  d’un 
côté  du  corps;  il  n’y  a ni  étourdissements,  ni  céphalalgie , ni 
aucune  altération  de  l’intelligence;  rien  de  semblable  ne  sur- 
vient non  plus  les  jours  suivants.  La  seule  différence  que  1 on 
observe,  c’est  que  chez  l’un  d’eux  il  se  lait  un  retour  graduel 
des  mouvements,  avec  conservation  de  la  contracture,  tandis 
que  chez  l’autre  la  contracture  fait  place  dès  le  lendemain  a la 
résolution.  Bans  l’un  de  ces  cas  , la  guérison  s achève;  dans 
l’autre  on  trouve  un  ramollissement  sur  le  cadavre.  JNe  faut-il 
pas  admettre  qu’une  altération  semblable  existait  chez  le  pie- 
cédent?  Notez  bien  que  , dans  le  cas  où  l’autopsie  a e'te  piati- 
tpiée,  la  mort  n’a  été  nullement  le  lait  de  la  lésion  cerehiale  , 
mais  bien  de  l’affection  organique  des  centres  circulatoiies. 

L’observation  suivante,  que  j’emprunte  textuellement  à M. 
Roslan,  mérite  de  trouver  place  ici. 

Onsar.vATioN  i .8.  - Céphalalgie.  Pesanteur,  picotements  , engoiu- 
(hssements  graduellement  croissants  clans  les  membres  gauches.  Au 
fioiit  de  quelques  jours,  disparition  graduelle  de  ces  accidents. 


Madame  Biseau,  âgée  de  soixante-dix-neuf  ans,  d une  con- 
stitution délicate  , d’un  tempérament  lymphatico-nerveux,  se 
plaignit,  vers  sa  cinquante-huitième  année,  de  palpitations  m- 

lermiltentes.  Ce  symptôme,  insensible  pendant  la  belle  saison, 
reparaissait  toujours  en  hiver  sous  1 influence  des  ligueuis 
l’atmosphère.  Stationnaire  pendant  treize  ans,  il  fut  accoinpa- 
,mé  par  la  suite  de  toux,  d’orthopnée,  et  d’une  expectoration 
inuqueuse,  épaisse  et  abondante.  Très-souvent,  en  montant  un 


(t)  Andral,  CùmV/r/e,  t.  v,  p.  410. 


DU  1\ A-AlOLÎjlSSliAlli^  J- • I 

escalier,  la  malade  a senü  sou  cœur  battre  avec  un  surcroit  de 
force  et  de  vitesse  ; et  cette  impulsion,  s’étant  transmise  aux  ca- 
rotides, des  pulsations  se  sont  fait  sentir  dans  toute  la  tete  et  ont 
retenti  dans  ses  oreilles  ; la  vue  s’est  troublée  des  veilises  se 
sont  manifestés  et  ont  déterminé  la  chute  de  la  malade,  sans 

cependant  lui  faire  perdre  connaissance. 

Le  18  mars  1823,  inadameDiseau  ressentit  des  douleuis  tics- 
iatenses  dans  le  côté  droit  de  la  tête  ; ciuoiqu’elles  Persiste 
le  19  elle  ne  voulut  pas  suspendre  son  travail.  Le  2U,  elle  se 
plaignit  d’un  sentiment  de  fatigue  et  de  pesanteur  dans  la 
iambe  et  surtout  dans  le  bras  gauche;  la  céphalalgie  n a- 
vait  pas  diminué  d’intensité.  Madame]  Diseau,  dominée  pai 
l’appât  d’une  légère  rétribution  qu’elle  obtenait  en  hlant,  n y 
voulut  pas  renoncer  ; alors  se  manifestèrent  les  symptômes 
suivants  : l’extrémité  du  doigt  auriculaire  gauche  devin  e 
siège  d’un  fourmillement  et  de  picotements  tres-vii^s.  Let  c 
sensation,  que  la  malade  comparait  à celle  ciui  resuite  de  a 
contusion  du  coude  quand  le  nerf  cubital  se  trouve  comprime, 
se  propagea  le  long  du  bord  externe  de  la  main,  atteignit  peu 
à peu  et  successivement  l’annulaire,  le  pouce,  l’index,  et  e 
médius;  bientôt  le  bras  tout  entier  participa  à cet  état,  et  la 
cuisse  îgauche  ne  tarda  pas  à présenter  le  même  symptôme. 
Les  picotements  devinrent  ensuite  moins  sensibles,  et  furent 
remplacés  par  l’engourdissement  des  membres  gauches.  La  ma- 
lade attribuant  son  état  à un  mal  passager,  chercha  pendant 
quelque  temps  à continuer  son  travail  ; mais,  en  tenant  le  fil 
qu’elle  devait  tordre,  elle  était  incertaine  qu’elle  1 eut  réelle- 
ment saisi,  tant  son  tact  lui  paraissait  trompeur,  et  le  fil  échap- 
pait sans  cesse  à sa  main  tremblante.  Il  semblait  à madame  Di- 
seau qu’un  duvet  fût  interposé  entre  scs  doigts  et^  les  objets 
soumis  à leur  contact  : elle-marchait  en  hésitant,  n’osant  por- 
ter sur  sa  jambe  gauche,  et  se  mettre  en  équilibre  sur  un  pied 
quelle  ne  sentait  plus  et  qui  lui  semblait  inerte  ; elle  voyait 
des  lilaments,  des  brouillards  son  ouie  était] dure  ; mais  cette 
lésion  n’étant  pas  récente,  on  pouvait  l’attribuer  au  grand  age 
delà  malade.  Le  22,  la  céphalalgie  avait  diminué;  cependant 
la  malade  entra  à l’infirmerie,  ou  l’on  constata  les  symptômes 
qui  viemicut  d’être  énumérés  ",  l’état  anévrysmatique  du  cucuiS 
mais  l’intégrité  de  l’intelligence  et  des  lonctioiis  re.spiraloiies 


Ramollissememx  céiiébual. 

et  digestives.  M.  Rostan  craignit  le  ramollissement  commen- 
çant du  cerveau,  et  prescrivit  en  conséquence  des  sinapismes 
aux  mollets,  des  lavements  légèrement  purgatifs,  la  diète  et  le 
repos.  Le  23,  les  engourdissements  furent  beaucoup  moins  pro- 
noncés, et  présentèrent  des  intermittences  très-marquées.  Le 
24,  même  état.  La  malade  se  plaignit,  le  25,  d’engourdisse- 
ments fréquents  et  de  l’insensibilité  presque  complète  du  doigt 
auriculaire.  Ce  redoublement  fit  craindre  que  la  maladie  n’eût 
une  terminaison  fâcheuse  ; cependant,  à partir  de  ce  jour,  elle 
ne  cessa  de  s’amender  , et,  dans  l’espace  d’une  semaine,  la  ré- 
solution fut  complète  : aux  engourdissements  succédèrent  le» 
lourmillements  et  les  picotements,  et  ceux-ci  se  dissipèrent  peu 
à peu  ; et,  dans  la  résolution,  la  maladie  suivit  une  marche  in- 
verse à celle  de  son  invasion,  c’est-à-dire  que  l’engourdisse- 
ment, qui  avait  procédé  des  extrémités  des  orteils  et  des  doigts 
pour  gagner  la  partie  supérieure  des  membres,  se  dissipa  d’a- 
bord dans  les  parties  les  plus  rapprochées  du  tronc,  et  en  der- 
nier lieu  dans  le  doigt  annulaire  (1). 


« Cette  observation,  dit  M.  Rostan,  pourrait  être  citée  comme 
exemple  de  guérison  du  ramollissement,  si  les  symptômes  d’une 
maladie  suffisaient  pour  la  caractériser.  » Il  ajoute  plus  loin  : 
• Cette  observation  ne  peut  tout  au  plus  que  faire  soupçonner 
la  résolution  du  ramollissement,  puisqu’on  ne  saurait  avoir  la 
certitude  de  l existence  de  cette  maladie.  Au  reste,  nous  pensons 
que,  lorsqu’il  n’est  qu’au  premier  degré,  il  peut  se  résoudre. 
Ainsi  cet  exemple  et  quelques  autres  qu’on  a publiés  ne  lé- 
solvent  nullement  la  question  (2).  » 

Dans  ce  cas,  en  particulier,  la  marche  des  accidents  a été  assez 
rapide  pour  qu’il  soit  permis  de  les  attribuer,  non  pas  précisé- 
ment à un  ramollissement,  mais  à une  simple  congestion.  Quoi- 
qu’il en  soit,  cette  observation  n’en  est  pas  moins  digne  d’inté- 
rêt : il  est  infiniment  rare  qu’une  simple  congestion  suive  une 
marche  semblable.  J’ai  presque  toujours  vu  de  tels  symptômes 
appartenir  à un  ramollissement,  .soit  qu’une  mort  prompte  per- 

(t)  Itüslan,  loc.  cil.,  i>.  t72. 

(7.)fcW. /oc.,p.  175. 


ÜUÉRISOK  DU  ramollissement.  431 

mit  de  conslaler  sur  le  cadavre  l’existence  d’un  ramollissement 
aigu,  soit  que  la  maladie,  passant  à l’état  chronique,  ne  laissât 
plus  dès  lors  aucun  doute  sur  sa  nature. 

Le  docteur  Deslandes  a publié,  il  y a un  certain  nombre 
d’années,  comme  exemple  de  ramollissement  guéri,  et  on  a 
depuissouvent  cité  comme  tel,  une  observation  qui  nemériteau- 
cunement  ce  titre.  Je  dois  en  dire  ici  quelques  mots. 

Il  s’agit  d’une  femme  de  trente-neuf  ans,  sujette  aux  attaques 
de  neifs,et  qui  présentait  depuis  plusieurs  mois  un  affaissement 
notable  des  facultés  intellectuelles. 

Elle  fut  prise  un  matin  de  mouvements  convulsifs,  après  avoir 
^•souffert  de  la  tête  pendant  la  nuit  ; quelques  heures  après,  pa- 
|iralysie  complète  de  la  jambe  droite  avec  raideur  excessive, 
moindre  dans  le  bras  ; sensibilité  presque  nulle  de  ce  côté  •,  un 
.peu  de  railleur  et  d’anesthésie  dans  les  membres  gauches  ; pe- 
tits mouvements  convulsifs  des  membres;  langue  déviée  à gau- 
Iche,  meurtrie  par  des  morsures.  Assoupissement,  œil  stupide, 
^nausées,  pouls  petit,  faible,  sans  fréquence.  (Sangsues  au  col, 

tigljcesur  la  tête,  synapismes).  Le  second  jour,  plus  de  raideur, 
lia  sensibilité  reparaît,  l’assoupissement  diminue,  la  malade  rap- 
Itporte  au  côté  droit  la  douleur  du  pincement  du  côté  gauche. 
|lLe  troisième  jour,  l’assoupissement  et  l’hébétude  persistent 
f(Sangsues  au  col,  glace  sur  la  tête).  Le  quatrième  jour,  il  ne 
reste  plus  qu’un  peu  de  trouble  dans  l’intelligence,  mais  qui  per- 
sista si  bien  qu’il  fallût  la  mettre  à la  Salpétrière,  où  elle  mou- 
rut un  an  après  (1). 

Il  y a une  remarque  bien  simple  à faire  sur  cette  observation 
c’est  que  l’on  ne  saurait  considérer  comme  guérie,  une  altéra- 
tion qui  entraîne  un  trouble  de  l’intelligence  tel  qu’il  faille  met- 
tre un  individu  dans  une  maison  d’aliénés.  Je  sais  bien  que  la 
stupidité  avait  disparu  , que  la  raideur  des  membres,  l’affaiblis- 
sement de  la  sensibilité,  les  mouvements  convulsifs  n’existaient 
plus.  Mais  cela  vient  de  ce  que,  lorsqu’une  maladie  pas^e  à l’état 
chronique,  elle  cesse  de  déterminer  un  certain  nombre  des  sym- 
ptômes qui  l’accompagnaient  à l’étal  aigu. 

Maintenant  est-il  bien  certain  qu’il  y ait  eu  ramollissement  ? 
f.a  méningite  ne  saurait- elle,  chez  un  adulte,  donner  lieu  à de 

ît)  Nouvelle  ùibUoihci/ue  incdicule,  i82ti,  l.  p.  ^7.1 


RA.MOLUSSIiMEJiX  CÉUÉBUAL. 


432 

semblables  symptômes?  On  voit  cpie,  sous  plus  d’un  rapport, 
cette  observation,  assez  Incomplète  du  res  te,  ne  mérite  pas  qu’on  y 
attache  une  grande  importance.  Si  j’en  ai  parlé  ici,  c’est  qu  il 
m’a  semblé  utile  d’en  présenter  ce  que  je  crois  être  la  véritable 
appréciation. 

Ce  chapitre  de  la  guérison  du  ramollissement  se  trouvera  na- 
turellement complété  par  celui  que  j’ai  consacré  au  traitement 
de  cette  maladie  : j’engage  le  lecteur  à y chercher,  dès  u pré- 
sent, robservation  de  la  femme  Gard,  un  nouvel  exemple,  et 
je  crois,  incontestable,  de  guérison  d’un  ramollissement  cérébral 
à un  deeré  assez  avancé. 

O 


CHAPITRE  X. 

DE  LA  MORT  DAKS  LE  R AM0LL1SS£ME>T, 


Telle  est,  surtout  chez  les  vieillards,  l’indépendance  dans  la- 
quelle la  vie  organique  peut  se  trouver  de  la  vie  animale,  qu  il 
est  rare  de  voinun  malade  succomber  uniquement  aux  piogiès 
successifs  d’un  ramollissement  chronique.  Ce  sont  ordinairement 
des  complications  qui  amènent  la  fin  de  la  vie  ; mais  il  faut  re- 
marquer que  c’est  presque  toujours  sous  rmlluence  de  1 af- 
fection cérébrale  elle-même,  que  se  développent  ces  comph- 


cations. 

Elles  peuvent  avoir  leur  siège  : A.  Dans  le  cerveau  lui-meme 
dans  un  point  autre  que  celui  qui  était  le  siège  de  la  lésion  chio 


nique. 

B.  Dans  le  poumon. 

C.  Consister  en  des  eschares  des  téguments. 

I.es  autres  complications  qui  peuvent  survenir  dans  le  couis 
du  ramollissement,  sont  ou  fortuites  ou  trop  peu  impoi  tauto 


pour  mériter  de  nous  arrêter. 


I 1.  Mort  par  le  cerveau. 

Il  peut  se  ialie  <|u’„n  i.talade,  atteint  tl’un  ramollisse, nent 
a,ro.,i<|Ucpa,  ïem.  à sapm  iodela  plus  avancée,  meui  e sa„s  ,|ne 
(le  nouveaux  symptômes  cérébraux  vieiment  annoncci  i 


COJVTI'LICATIOAS  CÉUÉBllAJLKS. 


433 


lermiiiaison  fatale,  et  sans  que  l’on  trouve  à l'autopsie  autre 
chose  que  l’altération  ancienne,  sans  aucun  changement  d’appa- 
rence récent,  qui  explique  pourquoi  la  maladie  s’esi  terminée 
dans  ui:jj temps  plutôt  que  dans  un  autre. 

Quelquefois  une  hémorrhagie  cérébrale  vient  terminer  brus- 
quement la  raai'che  d’un  ramollissement  chronique;  j’ai  rare- 
ment observé  ce  fait.  Beaucoup  plus  souvent,  les  accidents  qui 
paraissent  avoir  emporté.  le  malade  tiennent  au  développement 
d’un  ramollissement  aigu,  rouge,  presque  toujouv.s  voisin  de 
l’altération  chronique  elle-même.  J’en  ai  rapporté  un  certain 
nombre  d’exemples,  surtout  au  chapitre  du  ramollissement 
aigu. 

Une  méningite  aiguë  peut  survenir,  très-rarement  chez  les 
vieillards,  avec  uneinfiltration  laclescenteou  purulente  de  la  pie- 
mère.  Enfin  on  a vm  du  sang  s’exhaler  dans  la  cavité  de  l’araeh- 
noïde  : mais  je  ne  connais  pas  un  cas  où  cet  épaiîcheinent  de 
sang  ait  paru  assez  considérable  pour  entraîner  la  mort  par  lui- 
meine,  chez  un  sujet  affecté  de  ramollissement. 

On  attribue  assez  volontiers  la  mort  des  sujets  affectés  de  ra- 
mollissement aux  infiltrations  sereuses  de  la  pie-mère  ^ plus 
généralement  encore,  on  considère  ces  infiltrations  et  les  pla- 
ques blanchâtres,  et  1 épaississement  de  l’arachnoïde,  comme 
1 effet  du  ramollissement,  comme  une  méningite  chronique,  dé- 
veloppée sous  1 influence  du  ramollissement. 

Mais  on  ne  fait  pas  attention  que  ces  altérations,  si  on  peut 
leur  donner  ce  nom,  sont  presque  un  état  normal  chez  les  vieil- 
lards ; que  chez  eux  l’épaississement,  les  taches  de  l’arachnoïde 
sont  à peu  près  aussi  constants  que  les  plaques  laiteuses  du  cœur, 
les  adhérences  des  poumons, celles  de  la  vésicule  biliaire  , etc.; 
qu’il  n’est  point  de  séreuse  , chez  les  vieillards , qui  ne  pré- 
sente de  nombreuses  traces  des  souffrances  qu’elles  ont  presque 
toujours  éprouvées  pendant  la  vie  ; que  ces  diverses  altérations 
ont  presque  toutes  le  même  caractère,  sont  le  reliquat  des  dou- 
leurs de  la  vie  tout  entière,  et  qu’on  ne  saurait,  dans  la  plupart 
des  cas,  leur  trouver  de  relation  véritable  avec  les  altérations 
développées  dans  la  vieillesse. 

Quant  aux  infiltrations  séreuses,  elles  ne  sont  ni  plus  com- 
munes ni  plus  considérables  dans  le  ramollissement  qu’en  de- 

29 


RAMOLLISSEMENT  CÉRÉBRAL. 


434 

hors  du  ramollissement  ; j’ai  déjà  eu  maintes  occasions,  du 
reste,  de  m’expliquer  sur  ce  sujet. 

• } 

§ II.  Mort  par  le  poumon. 

Les  accidents  auxquels  succombent  les  sujets  affectés  de  ramol- 
lissement cérébral  chronique , ou  même  aigu,  ont  presque  tou- 
jours leur  siège  dans  les  poumons.  Comme  ces  accidents  ont  été 
peu  étudiés  jusqu’ici,  et  que  leur  étude  offre  la  plus  grande  im- 
portance pratique  dans  l’histoire  du  ramollissement,  je  demande 
la  permission  de  leur  consacrer  un  chapitre  un  peu  étendu. 

^ On  appelle  pneumonie  hypostatique  une  forme  de  pneumo- 
nie dont  la  cause , presque  mécanique , est  l’accumulation  des 
liquides  dans  les  parties  déclives  des  poumons.  Sa  fréquence  et 
sa  marche  insidieuse,  chez  les  vieillards,  rend  son  étude  impor- 
tante, bien  qu’elle  soit  généralement  négligée.  Laënnec  et  M.  An- 
dral  traitent  de  la  pneumonie  sans  en  dire  un  mot,  et  cependant 
elle  me  paraît  devoir  faire  un  des  chapitres  intéressants  de  l’his- 
toire de  cette  maladie. 

Il  ne  faut  pas  confondre  la  congestion  et  la  pneumonie  by- 
postatique  : la  même  cause  les  produit,  il  est  vrai  ; l’une  n’est 
que  le  premier  degré  de  l’autre  ; la  seconde  n’est  habituellement 
que  le  résultat  de  la  première.  Mais  il  y a entre  elles  cette 
grande  différence,  que  tandis  que  la  congestion  hypostatique  est 
un  phénomène  presque  constant  qui , lorsqu’il  ne  s’est  pas  pro- 
duit pendant  la  vie,  se  montre  au  moins  comme  phénomène  ca- 
davérique , et  ne  doit  être  considéré  , dans  l’immense  majorité 
des  cas,  que  comme  un  épiphénomène  , si  je  puis  ainsi  dire  , 
'des  derniers  instants  de  la  vie  ; la  pneumonie  hypostatique,  au 
'contraire,  est  une  cause  de  mort  fréquente,  et  d’autant  plus  re- 
doutable que  son  développement  se  fait  d’une  façon  latente,  et 
que  la  nature  de  la  cause  qui  la  détertnine  rend  plus  difficile  de 
Vopposer  à sa  marche.  ^ 

A.  Congestion  hjpostcUiqêe. 

Dans  la  congestion  hypostatique,  la  surface  postérieure  des 
poumons  , celle  de  leurs  lobes  inférieurs  est  rougeâtre  ou  noi- 
râtre , mais  lisse  et  sans  aucune  altération  de  la  plèvre  qui  les 


PNEUMONIE  nVPOSTATIQUE. 


435 

revêt.  Je  ne  suis  cependant  pas  bien  convaincu  que,  dans  cette 
congestion  simple,  on  ne  puisse  quelquefois  trouver  un  peu  de 
sérosité  pleurale , comme  dans  la  congestion  cérébrale  on  trouve 
de  la  sérosité  épanchée  sous  rarachnoide.  Au-dessous  , le  tissu 
pulmonaire  se  trouve  infiltre  de  sérosité  spumeuse  et  sanguino. 
lente,  ou  même  de  sang  presque  pur.  Cette  infiltration  est  tou- 
jours d’autant  plus  considérable  qu’on  se  rapproche  davantage 
soit  de  la  surface  postérieure,  soit  de  la  base  des  poumons  ; tan- 
tôt elle  n’en  occupe  que  le  lobe  inférieur,  tantôt  elle  remonte 
presque  jusqu’au  sommet;  elle  occupe  enfin,  d’arrière  en  avant, 
une  étendue  plus  ou  moins  considérable  de  l’épaisseur  de  ces  or- 
ganes. 

Quelquefois  il  s’écoule  seulement , lorsque  l’on  comprime  le 
tissu  pulmonaire , une  quantité  médiocre  de  sérosité  plus  ou 
moins  colorée  par  le  sang;  d’autres  fois,  à la  coupe  du  poumon, 
ruisselle  une  quantité  prodigieuse  de  sérosité  rouge  et  spumeuse; 
d’autres  fois  enfin  c’est  du  sang  presque  pur  que  l’on  exprime 
de  la  substance  pulmonaire*:  alors  celle-ci  est  d’un  rouge  noi- 
râtre foncé  , comme  dans  l’apoplexie  pulmonaire  , mais  s’en 
distinguant  par  son  étendue  et  son  uniformité  , par  l’humidité 
qu’elle  présente  à la  coupe,  par  l’absence  de  friabilité  et  de  dis- 
position granuleuse  quand  on  la  déchire;  souvent  même  alors, 
le  tissu  rouge,  infiltré,  a quelque  chose  de  tremblotlant,  de  gé- 
latiniforme. 

Lorsqu’il  n’y  a que  congestion,  le  tissu  pulmonaire  n’est  point 
friable,  ne  va  point  au  fond  de  l’eau  , et  le  liquide  qui  l’infiltre 
contient  une  grande  quantité  d’air. 

La  congestion  hypostatique  se  reconnaît  à son  siège  aux  par- 
ties les  plus  déclives  des  poumons  et  des  deux  côtés  à la  fois  ; 
cependant  lorsque  le  malade,  dans  les  derniers  temps  de  sa  vie, 
se  tenait  couché  toujours  du  même  côté,  la  congestion  peut  exis- 
ter seulement  de  ce  côté  , ou  au  moins  y être  plus  considérable. 

M.  Grisolle  a consacré,  dans  son  livre  si  consciencieux  sur  la 
pneumonie,  un  chapitre  à l’inflilence  du  décubitus  sur  le  déve- 
loppement et  le  siège  des  pneumonies,  qu’il  nomme  consécutives. 
Relativement  au  dëcubilus  considéré  comme  cause,  il  mentionne 
l’opinion  des  auteurs  qui  pensent  que  le  sang  accumulé  dans  les 
parties  déclives  finit,  en  agissant  comme  corps  étranger , par 
provoquer  une  véritable  phlegniasie  du  parenchyme  puliuo 


T\AMOLi.lSst.MliN  i’  CÉlUiUa.Vl.. 


43fi 

naire , mais  sans  s’expliquer  sur  ce  sujet  (1).  H dit  cependant 
uii  peu  plus  loin  d’une  façon  plus  explicite  : « Cet  engouement 
est  réellement  la  cause  d’un  grand  nombre  de  pneumonies 

consécutives » Il  cite  ensuite  plusieurs  faits  pour  démontrer 

l’influence  du  décubitus  sur  le  siège  de  la  pneumonie  : ainsi , 
d’après  Billard  et  M.  Denis,  la  pneumonie  aurait  été  trouvée 
incomparablement  plus  fréquente  à droite  qu’à  gauche  , dans 
des  salles  de  petits  enfants,  à cause  de  l’habitude  que  l on  avait 
de  coucher  ceux-ci  sur  le  côté  droit  j on  les  fit  coucher  sur  le 
côté  gauche  , et  les  pneumonies  se  montrèrent  dès  lors  dans  le 
poumon  correspondant.  M.  Grisolle  et  M.  Barth  ont  vu  une  vé- 
ritable pneumonie  hypostatique  se  développer  à la  partie  anté- 
rieure des  poumons,  chez  deux  individus  que  desescares  au  siège 
avaient  forcés  de  l’ester  couches  sur  le  ventre  pendant  les  dei- 
niers  jours  de  la  vie.  Enfin  , M-  Renaut,  professeur  de  clinique 
à Alfort,  a affirmé  à M.  Grisolle  que  chez  les  quadrupèdes,  lors- 
que la  pneumonie  est  idiopathique  , elle  occupe  presejue  con- 
stamment le  bord  supérieur  ou  postérieur  de  l’organe  , tandis 
que  chez  les  animaux  affaiblis  qui  présentent  des  symptômes  ty- 
phoïdes , on  la  voit  envahir  exclusivement  les  parties  déclives 
de  l’organe,  c’est-à-dire  le  bord  antérieur  (-)• 

B.  Pneumonie  hypostatique. 

La  pneumonie  hypostatique  est  toujours  consécutive  a la  con- 
gestion à laquelle  son  mode  de  développement  et  son  siège  ont  fait 
donner  le  même  nom.  Elle  m’a  paru  se  développer  habituelle- 
ment d’abord  dans  la  partie  centrale  des  points  congestionnes, 
et  ne  gagner  que  consécutivement  leur  périphérie.  Cette  cir- 
constance ajoute  malheureusement  une  difficulté  de  plus  au 
diagnostic,  puisqu’elle  ne  permet  pas  alors  de  la  reconnaître  au 
début  par  l’auscultation. 

Au  moment  où  la  congestion  simple  passe  à l’etat  de  Pneumo- 
nie, le  premier  signe  de  la  présence  de  celle-ci  est  la  friabilité 
des  points  congestionnés.  M.  Andral  avait  dit  aussi , dans  les 
premières  éditions  de  sa  Clinique  médicale,  que  pour  la  distin- 

(t)  Grisolle,  Traité  pratique  de  la  pneumonie,  p.  178,  1811. 

(2)  Loc.  cit.f  p.  181. 


PSEUMOmE  HÏPOSTITIÇDE.  4*’’ 

fjuer,  il  fallait  avoir  ésard  moins  à la  conlour  qu’à  la  , 

du  tissu  pulmonaire,  et  que,  pour  peu  que  l ou 
plus  eraude  friabilité  de  son  tissu,  ou  devait  le  regarder  comme 
eùnammé.  Mais  de  nouvelles  recherches  le  portèrent  a penser 
que  l’augmeutatiou  de  friabilité  du  tissu  pulmonaire  pouvait 
,rès-bien*èlre  due  au  simple  fait  d'une  accumulation  de  sang 

toute  mécanique,  survenue  pendant  l’agonie  ou  apres  la  mort 

(Train  d'rinalcmie  palhologijac).M.  Grisolle  a eniislameme 
opinion  1 . Cette  friabilité , dit-il , avait  été  donnée  autrefois 
comme  pouvant  différencier  l’engouement  mnammatoiie  d 
celui  qui  n’est  que  passif  on  mécanique  et  qu’on  voit  se  formel 
dans  les  parties  déclives  du  poumon , dans  les  dernieis  instants 

delà  vie  on  même  après  la  mort.  Mais  de  nombreuses  obser- 
vations ont  démontré  que  la  friabilité  du  tissu  pulmonaiiE 
pouvait  être  indépendante  de  tout  travail  plilegmasique , et 
qu’elle  était  souvent  le  résultat  d’une  accumulation  toute  passive 
des  liquides  qui  produisent  alors  une  sorte  de  macération  (1).  » 
Je  n’oserais  , en  cette  matière  , opposer  ma  manière  de  voir  a 
celle  de  ces  deux  observateurs,  mais  cependant  je  ne  puis  m em- 
pêcher de  penser,  qu’il  y a un  moment  où  la  friabilité  est  le  seul 
moyen  de  distinf^uer  l’apparition  de  l’inflammation,  au  sein  du 
parenchyme  pulmonaire  congestionné.  Plus  tard , lorsqu  il  y a 
une  hépàiisation,  sans  doute  l’inflammation  n’est  plus  douteuse; 
mais  on  remarquera  que,  dans  la  pneumonie  liypostalique,  le 
tissu  enflammé  est  généralement  plus  humide  et  moins  granu- 
leux que  dans  l’hépatisation  rouge  ordinaire  , et  sa  couleur  est 

ordinairement  aussi  plus  livide. 

La  pneumonie  hypostatique  des  vieillards  revêt  très-souvent 
une  forme  lobulaire.  Alors  si  l’on  pratique  une  incision  dans  le 
])ounion,  aujinilieu du  tissu  pénétré  par  la  congestion  on  trouve 
quelques  points  friables,  grenus  , non  aérés  ou  moins  aérés  que 
le  reste.  Je  suis  même  , d’après  les  faits  nombreux  que  j ai  ob- 
servés , porté  à penser  que  cela  peut  être  une  des  formes  les 
plus  ordinaires  de  son  début.  Ces  points  isoles  , h mesure  que  la 
maladie  marche  et  lorsque  la  mort  ne  vient  pas  trop  tôt  en  inter- 
l’ompre  le  cours,  se  multiplient  et  se  rapprochent,  et  finissent 
par  constituer  de  véritables  pneumonies  lobaires.  C est  toujoui  s 


(t)  Grisolle,  loc.  eit.,  p.  7. 


ramollissement  cérébral. 

plutôt  dans  les  parties  profondes  qu’à  la  périphérie  qu’ils  se 
développent. 

La  pneumonie  hypostatique  se  montre  presque  toujours  des 
deux  côtés  à la  fois.  Elle  s’accompagne  très-rarement  de  pleuré- 
sie 5 celle-ci,  lorsqu  elle  existe,  se  caractérise  habituellement 
seulement  par  un  peu  de  sérosité  épanchée  dans  la  cavité  pleu- 
rale, ou  quelques  petites  p'aques  pseudo-membraneuses  minces 
à la  face  postérieure  des  poumons. 

La  pneumonie  hypostatique  a donc  pour  caractères  particuliers: 
son  siège  aux  parties  déclives  des  poumons  et  des  deux  côtés  à 
la  fois,  tandis  que  la  pneumonie  du  sommet  est  très-fréquente, 
et  la  pneumonie  double  assez  rare  chez  les  vieillards  (1)  ; sa  dis- 
position lobulaire  , sa  teinte  livide  et  la  grande  quantité  de  li- 
quide qui  pénètre  le  tissu  enflammé,  toujours  plus  mou  et  moins 
granuleux  que  l’hépalisation  ordinaire.  Je  n’ai  jamais  rencontré 
de  pneumonie  hypostatique  à l'état  de  suppuration.  M.  Gri- 
solle paraît  avoir  observé  des  cas  de  ce  genre.  Je  disparaît,  parce 
qu’il  n’est  pas  bien  certain  si  les  pneumonies  secondaires  aux- 
quelles il  fait  allusion  sont  réellement  des  pneumonies  hypo- 
statiques. 

G.  Mode  de  développement  de  la  congestion  et  de  la  pneumonie 
' hypostatique. 

Plus,  dans  l’organisation  des  vieillards,  les  forces  vitales,  dont 
le  système  nerveux  nous  est  le  représentant  le  plus  matériel,  di- 
minuent et  s’affaiblissent,  plus  les  lois  physiques,  au  contraire, 
doivent  acquérir  de  puissance.  Aussi  les  vieillards  ne  peuvent 
guère  se  trouver  soumis  à un  décubitus  prolongé  sur  le  dos, 
sans  que  des  liquides  viennent  à s’amasser  dans  les  parties  dé- 
clives des  poumons.  Le  mécanisme  qui  préside  à leur  accu- 
mulation est  analogue  à celui  qui,  même  chez  les  adultes,  donne 
lieu  à rcnflure  des  pieds  à la  suite  d’une  station  debout  très- 
prolongée. 

Lorsque  la  sérosité,  qui  naturellement  lubrifie  la  portion  cel- 

(1)  J'ai  recueilli  cinquante-deux  observations  de  jmeumonies  primitives 
chez  des  vieillards)  vingt-cinq  fois  la  (itneuinonie  avait  son  sie'ge  dans  le 
lobe  supérieur  j elle  était  double  huit  fois. 


pneumonie  hypostatique.  45® 

luleuse  du  tUsu  pulmonaire,  vieni  à s Waer  en  quantité  plus 
considérable  qu’à  l’état  normal  dans  le»  parties  decbves  des  pou 
tuons,  l’absorption,  qui  déjà  paraissait  avoir  quelque  peine  à en- 
tretenir un  équilibre  convenable  dans  cet  organe,  devient  d au- 

tantplus  insnfflsante  qn’unequantité  plus  considérable  de  liquide 

se  trouve  réunie  dans  unpoint  donné.  A ce  dernier,  quis  accroît 
incessamment,  viennent  s’ajouter  les  mucosités  qui  se  secretent 
dan»  les  bronches  en  plus  ou  moins  grande  quantité  cher  a plu- 
part des  vieillards,  et  s’accumulent  peu  à peu  dans  lespaities  les 
plus  déclives  de  l’arbre  bronchique.  Des  traces  d une  semblable 
congestion  se  rencontrent  sur  presque  tous  les  cadavres  d® 
larib.  Mais  il  ne  faut  pas  oublier  qu’elle  peut  se  produire  de  , 
plusieurs  manières  ; qu’ainsi,  à l’heure  de  l’agouie,  il  se  fait  or- 
dinairement une  congestion  pulmonaire  passive,  résultat  de  1 as- 
pbvxie  dans  laquelle  survient  la  mort,  et  qui  occupe  d abord  la 
totalité  des  poumons,  dans  les  parties  déclives  esque  s es  1 
quides  ne  s’amassent  qu’après  la  mort. 

Lorsque  les  parties  déclives  des  poumons  sont  seulement  co-- 
lorées  en  rouge,  sans  contenir  à peine  plus  de  liquide  qu  a l état 
normal,  on  peut  être  certain  que  c’est  un  phénomène  purement 
cadavérique. 

Lorsque  la  sérosité  qui  infiltre  les  parties  déclives  des  poumons 
n’est  pas  colorée  par  le  sang,  on  peut  à peu  près  affirmer  qu  elle 
s’est  formée  pendant  la  vie  ; car,  si  elle  était  un  phénomène  de 
simple  transsudation  cadavérique,  le  sang  contenu  dans  les  vais- 
seaux eût  également  transsudé  et  l’eût  teinte  en  rouge. 

Lorsque  l’engouement  pulmonaire  estformépar  du  sang  pres- 
que pur,  si  les  vaisseaux  sont  gorgés  de  sang, c’est  qu’il  s’est  fait, 
pendant  la  vie  une  congestion  sanguine,  peut-être  simple  épi- 
phénomène de  l’agonie.  Mais,  si  les  vaisseaux  sont  vides,  il  est 
probable  que  c’est  après  la  mort  que  le  sang  les  a quittes  et  s est 
infiltré  dans  le  tissu  pulmonaire.  Il  ne  m’est  arrivé  qu’une  fois 
de  rencontrer  les  poumons  d’un  vieillard  exempts  de  tout  en- 
gouement hypostatique  et  de  toute  coloration  cadavérique, etce- 
pendant  il  était  mort  au  bout  de  quelques  jours  de  maladie. 

Eu  général,  l’engouement  est  d’autant  plus  considérable  que 
les  individus  sont  plus  âgés,  plus  faibles,  couchés  depuis  plus 
longtemps  , et  que  la  maladie  dont  ils  sont  affectes  est  plus  dé- 
bilitante. 


amollissement  cérébral. 

La  pneumonie  hypostatique  se  développe  toujours,  comme 
nous  1 avmis  du,  consécutivement  à la  congestion  que  nous  ve- 
aiousde  décrire.  Son  développement  se  fait  en  vertu  de  cette  loi 
quelorsque  des  liquides  s’amassent  anormalement  dans  un  tissu. 
Il  s y développé  une  tendance  à l inflammalion.  « La  congestion 
sero-sangumolente  vers  le  poumon,  dit  Laennec,  qui  a lieu  chez 
presque  tous  les  mourants,  se  change  souvent  en  pneumonie  pour 
peu  que  l’agonie  se  prolonge,  et  présente  des  points  distincte- 
ment hépatisés,  surtout  dans  les  temps  où  la  constitution  ré- 
gnante est  inflammatoire  » (1).  Cette  expression  de  points  dis- 
tinctement hépatisés  prouve  que  Laennec  avait  également  ob- 
serve le  développement  lobulaire  de  la  pneumonie  hyposta- 
tique. 

Chez  les  individus  qui,  soit  parla  lenteur  avec  laquelle  s’o- 
père la  conpstion  hypostatique,  soit  par  la  force  qu’ils  possèdent 
encore,  résistent  pendant  un  certain  temps  aux  progrès  de  l’en- 
gouement pulmonaire,  le  liquide  infiltré  agit  comme  un  corps 
étranger,  irrite  le  tissu  pulmonaire  et  l’enflamme.  C’est  ainsique 
celte  inflammation  ne  se  montre  d’abord  que  sur  des  points  iso- 
lés, qui  peu  à peu  se  rapprochent  et  n’ont  pas  toujours  le  temps 
de  s’étendrejdans  des  espaces  considérables. 

1 el  me  parait  etre  le  mécanisme  du  développement  de  cette 
pneumonie  qui  enlève  beaucoup  de  vieillards  atteints  d’affec- 
tions chroniques,  ou  seulement  d’infirmités  qui  les  forcent  à gar- 
der le  lit.  Tant  qu’une  certaine  quantité  de  liquide  seulement 
.se  trouve  infiltrée  à la  partie  postérieure  des  poumons,  le  reste 
de  ces  organes  peut  suffire  aux  besoins  de  l’hématose  ; mais,  une 
fois  l’inflammation  développée,  ils  succombent  rapidement, 
et  d’autant  plus  sûrementquela  cause  de  cette  inflammation  est 
plus  difficile  à éloigner. 


1).  Symptômes  delà  congestion  et  de  la  pneumonie  hypostatique. 


Ilien  de  plus  vague,  de  plus  incertain,  que  les  .symptômes  de 
la  pneumonie  hypostatique  clioz  les  vieillards.  Son  développe- 
ment offre  par  excellence  le  type  de  l’inflammation  latente;  et, 
chose  remarquable,  dans  un  grand  nombre  de  cas,  lorsque  quel- 

(I)  I.aenneo,  Traite  de  rausculiaimn , l.  i,  i».  Ml . 


pneumonie  HYPOSTATIOUE.  44^ 

ques  symptômes  se  montrent,  propres  ^fixer  l’attention  sur  elle, 
ce  sont  précisément  des  phénomènes  qui  n’ont  point  de  rapport 
immédiat  avec  l’organe  pulmonaire  lui-même  t amsi  1 alteration 
des  traits  de  la  face,  la  sécheresse  de  la  langue,  1 affaiblissement 

du  pouls.  , , . • 1 

Il  est  rare  qu’il  ne  survienne  pas  dans  la  physionomie  quel- 
ques changements  propres  à frapper  un  observateur  attentif  et 
surtout  prévenu  de  l’importance  d’une  observation  minutieuse 
chez  les  vieillards.  C’est  un  certain  caractère  d hebetude,  d al- 
faissenient,  detonnement  du  regard,  une  véritable  paresse 
des  muscles  de  la  face;  eu  même  temps  les  lèvres  eUe  pom- 
tour  des  ailes  du  nez  prennent  une  teinte  griscàtre  qui  annonce 


une  hématose  incomplète.  ^ 

A cela  se  joint  à peu  près  constamment  la  secheresse  de  la 
langue.  Ce  dernier  signe  est  d’une  haute  importance  chez  les 
vieillards  ; il  est  presque  toujours  l’expression  d’uire  pneumo- 
nie ou  d’une  affection  aiguë  du  cerveau  ou  des  méninges. 
Cette  sécheresse  de  la  langue  est  beaucoup  plus  constante  dans 
la  pneumonie  hypostatique  que  dans  la  pneumonie  primitive. 
Elle  a un  caractère  particulier  : la  langue  ne  devient.pas  en  gé- 
néral visqueuse,  collante  au  doigt  ; elle  est  tout  à fait  seche, 
dure,  raboteuse,  un  peu  rougeâtre.  La  soif  devient  presque 
toujours  alors  assez  vive.  La  peau  présente  souvent  une  chaleur 
âcre  et  sèche,  mais  généralement  peu  prononcée.  Quelquefois 
dès  le  commencement,  le  nez  et  les  extrémités  se  refroidissent. 
11  y a rarement  des  sueurs,  si  ce  n’est  à la  fin,  à 1 heure  de  1 a- 
gonie  elle-même,  où  la  peau  se  couvre  d’une  sueur  froide  et 

visqueuse.  , 

Le  pouls  ne  subit  quelquefois  aucun  changement,  et  il  n y a 

de  fébrile  que  la  peau.  Presque  toujours  cependant  il  prend  une 
plus  grande  fréquence  ; il  est  rare  qu’il  prenne  en  même  temps 
plus  de  développement  qu’à  l’ordinaire.  Dans  la  plupart  des  caï, 
au  contraire,  il  se  rapetisse  et  se  concentre. 

On  observe  très-rarement  de  troubles  sympathiques  du  côté 
. des  autres  organes.  Ainsi  les  vomissements  si  communs  au  début 
de  la  pneumonie  primitive  des  viedlards,  manquent  a peu  près 
constamment.  Je  n’ai  presque  jamais  observé  de  délire.  Il  y a 
surtout  un  état  d’engourdissement  général  avec  faiblesse  des 
uaouvcTnents,  tout  à fait  en  rapport  avec  le  caractère  de  la  pby* 


ramollissement  cérébral. 


442 

siononiie.  Souvent  alors  les  évacuations  deviennent  involon- 
taires. Dans  certains  cas  , les  signes  d’un  état  typhoïde  sont 
prononcés  au  plus  haut  deg.ré;  suivant  M.  Grisolle,  ce  seraient 
surtout  les  pneumonies  secondaires,  survenant  dans  le  cours  des 
affections  chroniques  du  système  nerveux  , qui  revêtiraient  ce 
caractère.  . 

Tels  sont  les  phénomènes  généraux  qui  peuvent  mettre  sur  la 
voie  du  développement  d’une  pneumonie  hypostatique.  Il  en 
existe  toujours  quelque  chose  ; mais  ils  sont  quelquefois  si  peu 
prononcés  qu’il  est  très-dif6cile  de  les  saisir  et  de  les  apprécier 
à leur  juste  valeur,  particulièrement  lorsque  l’on  a affaire  à ces 
vieillards  débiles,  qui  vivent  dans  un  engourdissement  des  sens, 
de  l’inielligence  et  des  fonctions  animales,  en  général,  tel  qu’on 
le  conçoit  à peine  compatible  avec  l’existence.  En  effet, le  dé- 
veloppement de  ces  phénomènes  est  ordinairement  en  raison  di- 
recte de  l’activité,  de  la  vitalité  que  présentent  les  malades;  pres- 
que nuis  souvent  chez  les  sujets  très-âgés,  chez  ceux  qui  languis- 
sent sous  le  coup  d’un  ramollissement  cérébral,  qui  succombent  à 
un  dévoiement  chronique,  qui  sont  minés  par  les  progrès  lents 
de  gangrènes  superficielles,  on  les  voit  se  montrer  avec  quelque 
évidence  chez  les  individus  moins  avancés  en  âge,  gardant  le  lit 
pour  une  fracture  du  col  du  fémur,  pour  une  affection  chronique 
des  membres  inférieurs,  etc. 

Quant  aux  signes  que  pourraient  fournir  les  fonctions  respira- 
toires, ils  manquent  presque  constamment.  Je  n’ai  jamais  vu  de 
crachats  caractéristiciues  dans  une  pneumonie  hypostatique;  s’il 
y avait  une  expectoration  habituelle,  ses  caractères  ne  sont,  en 
général, aucunement  modifiés;  seulement  elle  diminue  presque 
toujours  notablement.  La  douleur  de  côté  ne  se  montre  que  par 
exception  : d’abord,  parce  que  la  pleurésie  est  fort  rare  ; en- 
suite, les  malades  se  trouvent  souvent  plongés  dans  un  état  où  la 
sensation  et  son  expression  sont,  pour  ainsi  dire,  presque  néga- 
tives. La  gêne  de  la  respiration  elle-même  manque  le  plus  sou- 
vent; les  malades  sùccombenl  fréquemment  sans  avoir  éprouve 
la  moindre  dyspnée.  Il  est  rare  cependant  que  la  respiration  de- 
meure bien  naturelle:  elle  subit  presque  toujours  une  certaine 
accélération,  c[uelquefois  en  demeurant  tres-paisible,  et  souvent 
alors  cette  augmentation  de  fi'équence  échappé  ; d autres  fois  en 


IKEUMOSIÏ  KYPOSTAIIQUE.  44* 

nécessitant  de  grand»  efforts  sans  ponr  cela,  chose  remarquable, 

causer  la  moindre  souffrance.  * n ' i» 

Lorsque  la  congestion  hyposta.ique  ne  survient  que  tout  a la 
fin  de  la  vie,  pendant  une  agonie  causée  par  des  accidents  d une 
autre  nature,  ses  signes  se  confondent  avec  ceux  de  1 agonie.^ 
Lorsqu’elle  se  forme  lentement,  elle  ne  trouble  en  general 
que  fort  peu  les  fonctions  respiratoires.  Il  faut  a un  vieillaid  . 
qui  languit  sans  mouvement,  sans  émotions,  il  lui  faut  bien  peu 
de  chose  pour  alimenter  son  organisation;  il  lui  faut  bien  peu 
d’air  pour  Lématoser  le  peu  de  sang  qu’il  dépense.  Qu  est  chez 
lui  l’évolution  nutritive?  que  sont  les  sécrétions  qui  s opèrent. 

Mais,  lorsque  la  congestion  se  fait  rapidement,  elles  annonce, 

en  général,  par  des  signes  bien  plus  expressifs  que  la  pneumonie 

elle-même:  ceci  tientàce  quelle  occupe  toujours  une  plus  grande 

étendue  qu’une  inflammation  à son  début,  et  que  les  accidents 
qui  peuvent  se  développer  dans  de  semblables  circonstances  tien- 
nent beaucoup  plus  à la  gêne  mécanique  delà  respiration  et  de 
l’bémalose,qu’à  une  réaction  qui  manque  absolument  ou  se  lait 
très-incomplètement.  Ce  sont, en  effet,  alors  des  pbenomenes  d as- 
phyxie que  l’on  observe;  la  physionomie  s’altere  profondément, 
la  face  devient  livide,  se  gonfle  quelquefois,  les  exiremites  se  c\  a- 
nosentet  se  glacent  ; la  respiration  devient  fréquente,  intermit- 
tente, trachéale  ; les  canaux  aériens  se  remplissent  de  mucosUes 
qui  refluent  quelquefois  par  la  bouche  et  les  narines  ; et,  si  la 
mort  tarde  un  peu  à arriver,  il  se  peut  que  l’on  trouve  un  com- 
mencement de  pneumonie.  Ces  accidents  rapides,  bienîaiaciei  i- 
sés,  ne  sont  pas  rares  dans  la  première  période  de  1 hemorihagie 
cérébrale,  ou  dans  ces  attaques  apoplectifonnes  que  détermine 
si  souvent  à une  époque  quelconque  le  ramollissement  cérébral. 
Mais  encore  une  fois,  la  congestion  hypostatique  ne  donne  heu  a 
des  phénomènes  aussi  tranchés  que  lorsqu’elle  se  fait  rapidement 

et  dans  une  assez  grande  étendue. 

H est  d’une  grande  importance  d’examiner  attentivement  la 
poitrine  des  individus  chez  qui  l’on  a quelque  raison  de  soupçon- 
ner le  développement  des  altérations  que  je  viens  de  décrire, 
puisque  les  troubles  fonctionnels  ou  sympathiques  auxquels 

elles  peuvent  donner  lieu  sont  si  peu  prononcés.  Malheureuse- 
ment l’auscultation  elle-même  ne  donne  souvent  que  des  résul- 
tats bien  incomplets. 


UAMOLLISSEMENT  CÉRÉBRAL. 


444 

Chez  les  individus  avancés  en  âge,  débiles,  habitués  à garder 
le  lit,  la  respiration  se  fait  quelquefois  si  mal,  même  à l’état 
normal,  que  l’air  pénètre  peu  profondément  dans  le  tissu  pul- 
monaire; aussi,  lorsque  vous  posez  l’oreille  sur  les  parois  de  la 
poitrine,  n’entendez-vous  qu’à  peine  le  mouvement  respira- 
toire. C’est  chez  ces  vieillards  principalement  que  l’on  voit  si 
souvent  manquer  à l’auscultation  le  premier  degré  de  la  pneu- 
monie ; le  souffle  tubaire  et  la  matité  apparaissent  alors  sans 
que  l’on  ait  pu  percevoir  le  moindre  râle  crépitant.  Voilà  une 
première  source  de  difficultés.  Maintenant  en  voici  une  autre  : 
chez  beaucoup  de  vieillards  catarrheux,  la  poitrine  offre  con- 
stamment à l’oreille,  surtout  en  arrière  et  s’ils  restent  habituel- 
lement couchés,  des  râles  muqueux,  sous-crépitants,  sibilants, 
qui  masquent  les  modifications  que  peut  éprouver  le  tissu  pul- 
monaire. Aussi  je  ne  saurais  trop  recommander  d’ausculter  sou- 
vent les  vieillards  atteints  de  maladies  chroniques  , auxquels  on 
a à donner  des  soins  : il  importe  de  se  tenir  toujours  parfaite- 
ment au  courant,  qu’on  me  pardonne  cette  expression,  de  ce 
qui  se  passe  dans  leur  poitrine  ; et  ce  n^est  pas  seulement  pour 
être  certain  de  saisir  à leur  début  les  altérations  qui  viendraient 
à se  développer  dans  les  poumons  : mais  c’est  que  c’est  souvent 
le  seul  moyen  de  pouvoir  bien  apprécier  les  signes  vagues  et 
légers  par  lesquels  elles  se  traduisent  au  dehors. 

En  généi'al,  lorsqu’il  s’est  formé  une  congestion  un  peu  con- 
sidérable des  parties  déclives  des  poumons,  on  trouve  un  raie 
muqueux  ou  sou.s-crépitant,  abondant,  égal  des  deux  cotés,  a 
moins  que  le  malade  se  tienne  toujours  couché  du  même  côté, 
d’àutant  plus  abondant  qu’on  se  rappi'oche  de  la  base  des  pou- 
mons, à peu  près  aussi  prononcé  dans  l’expiration  que  dans  1 in- 
spiration. Lorsqu’il  y avait  déjà  des  raies  de  catarrhe,  on  dis- 
tingue en  général  le  développement  de  la  congestion  a ce  que 
le  râle  aucpiel  elle  donne  lieu  est  plus  abondant,  plus  égal,  peut- 
être  d’un  caractère  différent,  qu’il  se  rapproche  davantage  de  la 
base,  cju’d  occupe  également  les  deux  côtes.  J ai  trouvé  à 1 aus- 
cultation tantôt  un  râle  muqueux  à grosses  bulles,  tantôt  du  lale 
.sous-crépitant,  sansejue  l’examen  du  poumon  m apprit  la  cause 
de  cette  différence.  Il  est  probable  que  l’état  antérieur  des  bron- 
ches y est  pour  beaucoup  ; il  ne  faut  pas  oublier  que  l engoue- 
ment Iiypostatiqne  peut  avoir  «on  point  de  départ  dans  une 


/ ^ 5 

VNEXJMOWIE  HVI’OSTAI'IQUE. 

„.S«uo„  acwe  ou  passive,  ei  aies  sou  s^^^PéÇ'^ 

,0,  canaux  aériens  dou.  la 

Quand  il  existe  de  la  avec  ceux  de 

ne  peut  la  dislinguer,  et  ses  »>»■■“  étendue, il  est  vare 

l’engouement  qui  I enviionne.  Loi j , . al  de 

nn’nn  entende  de  la  crépitation  ; on  ne  s apeiçou  ei  j,  , 

^on  existence  que  parle  souffle  tubaire  et  la  broncboplionie,  s il  y 

a Iiioven  d’aJcullei  la  voix.  Eneoie  ces  signes  ne 

ils  quelquefois  appréciables  que  lorsqu’il  est  possible  de  faii 

U;rc:lu  I^es.  pas , eu  général , d’un  grand  secours^Tl  y 
a bien  matité  quand  la  pneumonie  est  lobaire  et 
tat  d liépatisation;  mais  au  commencement , alors  que  dia 
gnostic  est  si  difficile , elle  ne  peut  l’aider  eu  nen.  11  est  cei  an 

cependant  qu’un  engouement  considérable  s accompagne  oïdi- 

nairement  d’un  peu  de  diminution  du  son. 

Je  ne  dois  pas  manquer  de  signaler  ici  une  circonstance  ties- 
importante  et  propre  à mettre  sur  la  voie  du  développement 
d’une  congestion  ou  d’une  pneumonie  hypostatique  : c est  qu 
lorsque  les  parties  déclives  des  poumons  sont  infiltrées  d une 
assez  grande  quantité  de  liquides  pour  que  la  respiration  ne 
puisse  s’y  effectuer  dans  une  certaine  étendue  , les  parties  ante- 
rieures de  ces  organes  cberclient  à suppléer  à ce  defaut  de  per- 
méabilité ; alors  , non-seulement  la  respiration  y prend  une  ac- 
tivité inusitée  , mais  il  s’y  développe  un  véritable  emphysème  j 
non  pas  que  j’aie  jamais  constaté  sur  le  cadavre  de  rupture  des 
vésicules  pulmonaires , mais  une  dilatation  extreme  des  cel- 
lules aériennes;  la  respiration  y devient  alors  puerile  et  tres- 
bruyante,le  son  tympanique;  deux  fois  même  ] ai  constate 
une  saillie  des  espaces  intercostaux.  A l’aulopsie  , on  trouva  la 
partie  antérieure  des  poumons  blanche , presque  exsangue  , 
gonflée  d’air,  et  faisant  une  saillie  considérable  dès  que  la  poi- 
trine fut  ouverte. 

Ainsi , lorsqu’un  individu  placé  dans  les  conditions  qui  nous 
occupent  maintenant  présentera  une  sonorité  et  une  activité 
de  la  respiration  inusitée  à la  partie  antérieure  de  la  poitrine  , 
on  dçyra  aussitôt  soupçonner  le  développement  d’une  conges- 


I 


446  ramollissement  cérébral. 

lion  ou  d’une  pneumonie  hypostatique.  Je  ne  saurais  trop  re- 
commander cette  circonstance  à l’attention  des  observateurs  , 
puisqu’elle  permet  d’obtenir,  par  l’examen  des  parties  anté- 
rieures des  poumons , des  notions  sur  l’état  des  parties  posté- 
rieures, qu’il  est  si  souvent  difficile  et  quelquefois  presque  im- 
possible d’examiner  directement. 

S III.  Mort  par  les  escares. 

Un  accident  très-fréquent  et  des  plus  redoutables  dans  le  ra- 
mollissement cérébral,  c’est  la  formation  d’escares  au  siège.  Il 
' peut  survenir  à deux  époques  différentes  de  la  maladie  : soit  au 
commencement,  alors  que  le  malade  est  sous  le  coup  d’une  atta- 
que apoplectiforme  ; soit  plus  tard  , quand  le  ramollissement  a 
passé  à l’état  chronique  , à la  suite  d’un  séjour  au  lit  prolongé  ; 
ce  sont  surtout  les  vieillards  qui  sont  exposés  à cet  accident,  et 
ils  le  sont , du  reste  j dans  toutes  les  affections  qui  exigent  un 
long  décubitus  sur  le  dos.  Ces  escares  se  développent  quel- 
quefois d’une  façon  latente  chez  les  individus  très-âgés , surtout 
quand  l’intelligence  est  lésée  d’une  façon  quelconque,  et  cela  va 
sans  dire , quand  ils  sont  privés  de  connaissance.  Il  importe 
d’autant  plus  , dans  de  semblables  circonstances  , de  se  tenir 
soigneusement  sur  ses  gardes  , qu’elles  font  souvent  des  progrès 
extrêmement  rapides  , de  sorte  qu’en  très-peu  de  jours  on  peut 
trouver  le  sacrum  mis  à nu,  et  même  érodé,  et  il  ne  faut  guère 
compter  sur  la  guérison  de  semblables  lésions  lorsqu’une  fois 
elles  sont  un  peu  avancées.  Si  l’on  voit  les  escares  les  plus 
étendues  guérir  à la  suite  des  fièvres  typhoïdes  , c’est  que  leur 
cicatrisation  se  trouve  aidée  par  le  changement  immense  qui 
s’opère  dans  l’état  général  du  malade  ; c’est  qu’une  fois  la  con- 
valescence commencée  , les  conditions  qui  ont  présidé  à leur 
développement  se  trouvent  complètement  éloignées.  Mais  il  n’en 
est  pas  de  même  quand  des  escares  viennent  à se  former  {dans 
le  cours  d’une  maladie  cérébrale;  il  n’y  a pas  à compter  sur  la 
nature  pour  les  arrêter  et  les  guérir,  et  les  moyens  que  l’art  pos- 
sède ont  bien  peu  de  pouvoir. 

Lorsque  les  escares  ont  acquis  une  étendue  suffisante  pour 
réagir  sur  le  reste  île  l’économie  , on  voit  la  face  s’altérer,  les 
lèvres  s’entourer  d’un  cercle  grisâtre , les  narines  devenir  pulvé- 


PRONOSTIC.  ' 

rulentes;  la  fièvre  s’allume,  le  soir  d’abord  , puis  elle  devient 
continue  ; la  langue  et  les  lèvres  deviennent  sèches  et  dures  , 
comme  grillées  ; la  peau  se  couvre  d^une  couche  visqueuse , les 
phénomènes  cérébraux  s’accroissent , le  malade  tombe  dans  une 
prostration  profonde , la  respiration  s’embarrasse  , et  la  mort 
survient,  soit  dans  le  coma,  soit  dans  un  état  d’adynamie  toute 
semblable  à celle  de  la  fièvre  typhoïde.  Après  la  mort , on 
trouve  presque  constamment  une  pneumonie  hypostatique  , ou 
au  moins  une  eongestion  considérable  des  poumons. 

Outre  les  escares  au  siège  , il  s’en  forme  quelquefois  au  ta- 
lon , succédant  toujours  à une  accumulation  de  sérosité  rous- 
sâtre  qui  en  soulève  l’épais  épiderme.  Ces  escares , si  on  les 
néglige  , peuvent  entraîner  la  carie  du  calcanéum. 


CHAPITRE  XI. 

PRONOSTIC  DU  RAMOLtlSSEMENT. 

Le  ramollissement  cérébral  a été  généralement  considère 
jusqu’ici  comme  une  affection  incurable  , comme  une  maladie 
fatale , dont  l’étude , bonne  tout  au  plus  pour  les  anatomo-pa- 
thologistes , ne  saurait  en  rien  iutéi  esser  la  pratique.  Telle  est 
aujourd’hui  l’opinion  la  plus  répandue  parmi  les  praticiens. 

Cette  opinion  tient  aux  idées  que  l’on  s’est  généralement 
faites  touchant  la  nature  du  ramollissement.  Comment  songer, 
en  effet,  à guérir  une  lésion  organique  spécifique  de  la  substance 
cérébrale  , ou  bien  une  altération  semblable  , ou  au  moins  ana- 
logue à la  gangrène  ; car  telles  sont  les  hypothèses  qui  sont  jour- 
nellement répétées  sur  ce  sujet.  Assurément,  si  le  ramollissement 
cérébral  était  tout  cela,  il  serait  permis  de  regretter  le  temps 
que-l’on  aurait  consacré  à son  étude  ^ mais  heureusement  il  n en 
est  pas  ainsi.  En  essayant  de  démontrer  que  le  ramollissement 
était  toujours,  sauf  peut-être  d’infiniment  rares  exceptions,  une 
maladie  inflammatoire  , j’espère  avoir  fait  voir  que  c’était  une 
maladie  semblable  à la  plupart  de  celles  dont  nos  differents  or- 
ganes deviennent  le  siège  , en  ce  que  , tout  en  étant  fort  grave  , 
elle  n’en  est  pas  moins,  comme  les  autres,  susceptible  de  guérir, 


44^  UA.»MüLLlaSiMj;NT  CÉPlLUKAL. 

susceptible  de  céder  aux  ressources  de  la  nature  et  aux  eüorls 
de  l’art. 

Le  rainollissenieiit  du  cerveau  est , en  effet , toujours  une 
maladie  fort  grave;  grave  par  son  siège , car  les  affections  de 
l’encéphale,  et  en  particulier  de  la  pulpe  nerveuse  elle-même  , 
paraissent  au  nombre  de  celles  sur  lesquelles  notre  thérapeu- 
tique a le  moins  de  prise  ; grave  par  l’excessive  rapidité  avec  la- 
quelle il  lui  arrive  fréquemment  de  se  développer,  par  la  promp- 
titude avec  laquelle  la  substance  cérébrale , si  délicate  et  si 
fragile,  peut  subir  une  désorganisation  souvent  irrémédiable. 

Cependant  le  ramollissement  peut  guérir.  A priori , je  ne  sais 
pourquoi  on  lui  refuserait  cette  faculté  ; ce  serait , si  j’en  excepte 
des  dégénérescences  toutes  spéciales  et  sans  aucune  espèce  de 
rapport  avec  la  maladie  qui  nous  occupe  , ce  serait  à peu  près  la 
seule  affection  qui  possédât  cette  fatale  prérogative  -,  et  d’ailleurs 
les  études  que  l’on  avait  faites  jusqu'ici  sur  le  ramollissement 
cérébral  étaient , je  ne  crains  pas  de  le  dire,  tout  à fait  insuffi- 
santes pour  justifier  les  propositions  que  l’on  entend  chaque 
jour  émettre  à ce  sujet.  Tout  le  monde  n’a  pas  imité  en  cela  la 
sage  réserve  de  M.  Rostan.  Cet  auteur  se  demande  fort  judi- 
cieusement si  le  ramollissement , étant  souvent  une  maladie  in- 
flammatoire , ne  doit  pas  présenter  les  divers  modes  de  termi- 
naison de  l’inflammation  .Mais  les  faits  lui  manquaient  ; aussi, 
tout  en  avouant  que  la  mort  lui  paraît  le  terme  presque  inévi- 
table de  cette  maladie  (1) , il  dit  qu’il  laisse  aux  observateurs 
qui  le  suivront,  ou  à des  faits  ultérieurs,  de  décider  si  le  ramol- 
lissement est  ou  non  susceptible  de  résolution  (2).  Nous  avons 
vu  précédemment  que  le  même  auteur  avait  pressenti  la  vérita- 
ble origine  de  certaines  infiltrations  celluleuses  , des  indura- 
tions  (3). 

1 

(t)  Rostaii,  loc-cit , p.  tSO* 

(2)Eod.  loc.,  p.  17t. 

Il  y a vingt  ans  que  ces  ligues  ont  clé  écrites.  Il  parait  que  les  etudes 
auxquelles  a pu  se  livrer,  depuis  cette  époque,  cet  habile  écrivain,  lui  ont 
fait  remplacer  le  doute  philosophique  qu’il  professait  alors,  par  une  convic- 
tion toute  négative.  Voici  en  effet  ce  qu’il  disait  récemment  dans  une  de  scs 
leçons  cliniques,  à l'Hôlel-Dicu  : « Le  ramollissement  cérébral  a une  mar- 
cbe  toujours  croissante  et  ime  levniinaison  infailliblement  Ou  i 

avancé  que  le  ramollissement  était  curable  : mais  les  persouBcs  qui  ont 


PKOKÜS'i'lC. 


Que  le  raïuoliisseineut  soit  susceptible  de  guérison  , c’est 
chose  qui  uepeut  plus  l’aire  de  doute  inainlenaut  : je  n’ai  , tju 
reste , qu’à  renvoyer,  sur  ce  sujet,  aux  chapitres  que  j’ai  consa- 
crés à l’étude  de  la  cuifibilité  et  à celle  du  traitement  du  ramol- 
lissement. J’ai  intitule  un  chapitre  De  la  curabilité  du  ramolUs- 
seinenL  , parce  que , dans  l’état  de  la  science  , c’était  encore  là 
une  question  neuve  et  qui  demandait  une  élude  spéciale  ; mais 
j’espère  que  le  moment  n’est  pas  éloigné  où  , dans  l’histoii  e du 
ramollissement , comme  dans  celle  de  tant  d’autres  alî'eclions  , 
un  semblable  chapitre  n’aura  plus  pour  but  de  prouver  la  cura- 
bilité du  ramollissement,  mais  seulement  d’etudier  ses  modes 
de  guérison. 

Bien  d’autres  parties  de  ce  livre  sont  encore  remplies  défaits 
qui  démontrent  combien  le  pronostic  du  ramollissement  est 
moins  grave  qu’on  ne  l’a  prétendu  ; ainsi  je  pense  que  l’on  ne 
doutera  pas  avec  moi  que  les  laits  réunis  au  chapitre  de  l’ap- 
préciation des  symptômes  du  ramollissement  aigu  , sous  la  dé- 
nomination de  congestion  cérébrale  , n’aient  été  , en  partie  dti 
moins,  des  ramollissements  commençants  arretés  dès  leur  pre;- 
mière  période.  On  a vu  que,  plus  tard,  des  ramollissements  pul- 
peux pouvaient  persister  presque  indéfiniment  sans  déterminer 
d’accidents  graves  , et  sans  entrer  pour  rien  dans  les  causes  de 
la  mort  ; que  la  présence  de  plaques  jaunes  , limitées  à l’épais- 
seur de  la  couche  corticale  des  circonvolutions  , n’était  souvent 
qu’une  circonstance  peu  grave  en  elle-même,  bien  que  ces  pla- 
ques jaunes  eussent  succédé  à des  ramollissements  injectés  ou 
infiltrés  de  sang , et  qu’elles  pussent  encore  passer  à l’état  d’ul- 

% 

avancé  une  pareille  asserliou  s’eu  sont  prohablcineni  laissé  imposer  iJar 
une  particulariic  qui  était , en  effet , dénaturé  à induire  en  erreur;  e’c't 
que  la  marche  de  la  maladie  n’est  pas  régulièrement  croissante  ; elle  pro- 
cède au  contraire  d’une  manière  irrégulière,  présentant  des  arrêts  cl  mêiiie 
des  améliorations  .spontanées  qui  font  croire  à une  guérison  spotuaiiée.  La 
raison  de  celle  marche  irrégulière  est  dans  la  coïncidence  de  deux  olldra- 
tions,  c’est-à-dire  la  compliccUion  de  mouvemems  de  congestion  périodi- 
ques avec  le  ramollissement,  w ( Gazette  des  hôpitaux,  9 aofii  1812.) 

Je  crois  devoir  faire  remarquer  que  les  recherches  que  l’on  a fuites  sur  la 
curabilité  du  ramollissement  ayant  iu.squ’ici  presque  exclusivement  porté 
sur  l’anatomie  pathologique,  les  observations  précédcnles  leur  sont  dlfiiciie- 
menl  applicables. 


29 


450  kamollissemekï  cérébral. 

céladon  ; enlin  , en  démontrant  que  l’infiltration  celluleuse  ap- 
partient au  ramollissement , j’ai  fait  reconnaître  que  bien  des 
altérations  , considérées  jusqu’ici  comme  annonçant  des  foyers 
hémorrhagiques  guéris  , doivent  être  , au  contraire  , rapportées 
à des  ramollissements  guéris , et  qu’ ainsi  une  grande  partie  des 
idées  que  l’on  avait  appliquées  à la  curabilité  de  l’hémorrhagie, 
se  trouvent  exactement  applicables  à celle  du  ramollissement. 


CHAPITRE  XII. 


DK  la  natdre  et  de  l’étiologie  dü  ramollissement. 


ARTICLE  PREMIER. 

Il  y a deux  ordres  de  causes  à envisager  dans  l’étude  de  la  pro- 
duction du  ramollissement  cérébral  : les  causes  organiques  qui 
président  à sa  formation,  c’est  ce  que  l’on  entend  généralement 
par  nature  de  la  maladie  ; puis  les  causes  occasionelles  aux- 
quelles il  doit  de  se  développer  dans  un  instant'pluiôt  que  dans 
un  autre.  On  conçoit  qu’unramollissement  puisse  se  former  indé- 
pendamment de  ces  dernières  , et  par  la  seule  influence  d’une 
modification  organique  spontanée  développée  dans  le  tissu  du 
cerveau  : mais  les  premières  sont  tout  à fait  indispensables , 
car  elles  sont  l’essence  de  la  maladie. 

On  comprend  pourquoi  je  rapproche  ici  de  l'étiologie,  ce  que 
rpn  étudie  habituellement  sous  le  nom  abstrait  de  nature.  J’ai 
cherché  à démontrer,  dans  tout  ce  travail , comment  le  ramol- 
lissement cérébral  était  de  nature  inflammatoire  et  se  formait 
toujours  à la  suite  d’une  congestion  sanguine.  La  cause  organi- 
que du  ramollissement  est  donc  la  congestion,  puis  l’inflamma- 
tion* les  causes  occasionelles  de  ces  dernières  deviendront 
celles  du  ramollissement  lui-même. 

Mais  il  ne  suffit  pas  d’avoir  démontré  ce  fait,  comme  j’espère 
au  moins  y être  parvenu  ; il  faut  encore  prouver  que  les  diverses 
théories  que  l’on  avait  essayé  d’appliquer  à cette  maladie  ne 


NATURE  UU  RAMOLLISSEMENT. 


451 

s’appuient  sur  aucun  fait,  qu’elles  ne  puiTent  que  de  données 
fausses  ou  incei  iaines,  enfin  qu’elles  n’oflrent  aucune  garantie  à 
un  esprit  exact  et  ami  de  l’observation. 

Je  vais  donc  passer  en  revue  ces  diverses  théories  : c’est  un 
travail  critique  qui  m’est  imposé  par  la  nature  des  discussions 
auxquelles  j’ai  déjà  dû  me  livrer,  et  dans  lequel  j’entre  avec 
d’autant  plus  d’indépendance  que  j’ai  l’habitude  de  séparer  en- 
tièrement les  idées  que  je  combats,  des  personnes  à qui  elles  ap- 
partiennent. 

§ I". 

Une  des  principales  hypothèses  auxquelles  ait  donné  lieu  l’é- 
tude du  ramollissement,  sous  le  point  de  vue  de  sa  nature,  ou, 
pour  parler  plus  clairement,  de  son  étiologie , est  celle  qui  le 
considère  comme  le  résultat  d’une  affection  asthénique , ana- 
logue à la  gangrène  sénile,  et  provenant  soit  d’un  appauvris- 
sement général  de  l’économie,  soit  d’une  diminution  spéciale  de 
la  circulation  encéphali(iue.  A l’appui  de  cette  hypothèse  ont 
été  invoqués  quelques  laits,  peu  nombreux,  mais  surtout  des 
considérations  philosophiques,  dues  particulièrement  à ceux  qui 
n’avaient  pas  eu  l’occasion  d’étudier  cliniquement  la  maladie 
dont  ils  avaient  entrepris  de  disserter.  Oubliant  un  moment  les 
propositions  contenues  dans  les  pages  précédentes,  nous 
allons  analyseravec  quelques  détails  les  arguments  et  les  faits  dont 
se  sont  servis  les  défenseurs  de  cette  opinion. 

« Je  considère  , dit  Abercromhie , le  ramollissement  de  la 
pulpe  cérébrale  comme  analogue  à la  gangrène  qui  survient 
dans  les  auti  es  parties  du  corps  j comme  la  gangrène  , il  peut 
reconnaître  deux  causes  très-differentes,  l’inflammation  d’abord 
et  ensuite  la  suspension  de  la  circulation  par  maladie  des  ar- 
tères. Je  regarde  la  première  de  ces  causes  immédiates  comme 
l’origine  de  la  maladie  que  j’ai  observée,  et  la  seconde  comme 
celle  des  désordres  observés  par  M.  Rostan...  L’ossification  des 
artères  dans  une  grande  étendue  est  très-commune  chez  les 
vieillards  ; elle  paraît  être  fréquemment  la  cause  de  l’apoplexie 
avec  extravasation  de  sang  dans  le  cerveau,  si  commune  aux 
dernières  périodes  de  la  vie.  Il  me  paraît  donc  extrêmement 
probable  que  cette  ossification  peut  déterminer  cette  lésion  par- 
ticulière d’une  partie  du  cerveau,  d’où  naît  le  ramollissement 


KliMOLLlSSElItKX  CÉUÉBUAL, 


que  M.  Uostan  a observe'  clieÈ  les  vieillards.  « Plus  loin;  « le 
ramollissement  correspond  précisément  avec  cet  état  des  ar- 
tères par  lequel  nous  savons  que  la  gangrène  est  produite  dans 
d’autres  parties  du  corps,  et  en  parliculier  dans  les  jambes  et 
les  pieds  des  vieillards  (1).  » 

La  comparaison  que  M.  Abercrombie  cherche  à établir  entre 
la  gangrène  sénile  des  extrémités  et  le  ramollissement  cérébral, 
sous  le  point  de  vue  de  la  cause  qui  les  produirait,  me  paraît  fort 
défectueuse.  En  effet,  si  l’ossification  des  vaisseaux  d’un  mem- 
bre peut  en  produire  la  gangrène,  c’est  seulement  lorsque  la  cir- 
culation se  trouve  interrompue  par  suite  d’une  coagulation  du 
sang,  ou  parce  cpie  l’ossification  elle-même  a fini  par  oblitérer 
entièrement  le  calibi’e  des  vaisseaux,  ou  encore,  ainsi  que  l’a  vu 
l’auteur  anglais,  si  le  même  ^ttet  vient  a etre  produit  par  la  sé- 
paration de  la  membrane  interne  d’un  gros  vaisseau  ossifié  ; 
mais  il  ne  s’agit  pas  ici  de  ce  qui  peut  arriver , il  s agit  seulement 

de  ce  qui  s’observe.  ^ 

On  rencontre,  il  est  vrai , chez  la  plupart  des  vieillards,  des 
épaississements,  des  productions  caiülagineuses  dans  les  artères 
de  la  base  du  crâne,  quelquefois  des  ossifications  ; mais  il  y a 
loin  de  là  à un  réirécissement  des  vaisseaux  assez  considérable 
pour  entraîner  une  gangrène  ou  quelque  chose  d’approchant. 
Ce  n’est  pas  surtout  dans  les  artères  cjui  se  ramifient  dans  le 
crâne,  et  dont  les  anastomoses  en  tous  sens  sont  tellement  mul- 
tipliées, que  cette  altération  pourrait  avoir  une  grande  valeur  : 
c’est  dans  les  troncs  qui  apportent  le  sang  à la  tête,  que  l’inté- 
jj-rité  de  la  circulation  est  importante  à considérer.  Or,  si  l’on 
songe  au  volume  de  ces  troncs,  si  l’on  réfléchit  que  quatre  vais- 
seaux, les  deux  carotides  et  les  deux  vertébrales  pénètrent  dans 
la  cavité  du  crâne  , que  leurs  anastomoses  sont  telles  qu’il  suffit 
que  l'un  d eux  soit  perméable  au  sang  pour  que  toutes  les  par- 
ties du  cerveau  soient,  en  moindre  quantité  il  est  vrai,  mais  éga- 
lement visitées  par  ce  liquide,  pu  acquerra  aussitôt  la  convic- 
tion que  rien  n’est  plus  invraisemblable  que  l’hypothèse  que  je 
combats,  et  l’on  demandera  surtout  des  faits  sur  lesquels  il  soit 
possible  de  l’appuyer. 

On  conçoit  qu’il  doive  être  plus  que  rare  de  trouver  tous  les 

(t)  Abercroiubic,  loc.  cU>,  p.  Si. 


NATURE  DU  RAMOLMSSEMENT.  453 

vaisseaux  qui  portent  lesang  dans  le  cerveau,  oblitérés  ou  pres- 
que oblitérés; aussi  je  ne  connaisaucun  faitde  ce  genre.  MM.  De- 
laberge  et  Monneret  citent  cependant  un  cas  où  les  deux  ca- 
rotides internes  étaient  oblitérées  par  suite  d’une  incrustation 
calcaire,  sans  qu’il  y eût  de  ramollisseinent  ; mais  il  restait  les 
deux  vertébrales.  J’ai  vu,  à Bicêtre,  chez  un  homme  mort  par- 
suite  de  l’accumulation  d’une  quantité  considérable  de  sérosité 
dans  l’imérieur  du  crâne,  les  artères  de  la  base  tellement  ossi- 
fiées, que  plusieurs  et  des  plus  volumineuses  étaient  converties 
en  des  tubes  pleins.  Il  n’y  avait  aucune  trace  de  ramollissement 
dans  le  cerveau.  Il  est  vrai  que  les  carotides  internes  et  les  ver- 
tébrales, bien  qu’assez  ossifiées  pour  se  laisser  scier  plutôt  que 
couper,  étaient  encore  largement  perméables  au  sang. 

Maintenant,.lors  même  que  chez  un  individu  chez  lequel  les 
vaisseaux  qui  portent  le  sang  dans  la  tête  seraient  oblitères  par- 
ossification,  par  séparation  de  la  membrane  interne  ou  par  coa- 
gulation du  sang,  on  viendrait  à trouver  un  ramollissement  du 
cervearr  ; lors  même  que  ce  dernier  se  serait  évidemment  dé- 
veloppé sous  l’influence  de  l’arrêt  de  la  circulation,  que  prou- 
verait un  fait  semblable ,.  que  prouveraient  plusieurs  faits 
isolés  pour  les  cas  sans  nombre  où  l’on  ne  retrouve  plus  ces 
circonstances? 

L’hypothèse ‘du  docteur  Abercrombis  porrrrait  doncbien  etie 
juste  comme  hypothèse,  car  on  conçoit  parfaitement  que  le  cer- 
veau puisse  se  ramollir  sous  1 influence  d une  cause  piopie  a dé- 
terminer la  gangrène.  Mais,  qu’elle  sort  applicable  au  ramollis- 
sement cérébral,  considéré  en  general,  voici  qui  doit  etie  nie  ^ 
car  il  n’est  pas  vrai  que, 'chez  les  individus  affectés  de  ramollis- 
sement , le  cerveau  se  trouve  dans  des  conditions  analogues 
à celles  que  présentent  les  membres  affectés  de  gangrène  sé- 
nile. 

Voyons  maintenant  quelle  est  la  valeur  de  quelques  faits  in- 
voqués pour  soutenir-  cette  hypothèse. 

M.  Lenoiv,  dans  une  dissertation  qui  contient  quelques  remar- 
ques sur  les  gangrènes  spontanées  (1),  a rapporté  tout  au  long 
trois  observations,  où  il  signale  la  coïncidence  d’une  gangrène  des 
extrémités  et  d’un  ramollissement  du  cerveau.  Notons  d’abord 


(t)  Leijoir,  Thes^t  de  Paris,  <8  août  t837» 


HAMOLUSSEMENT  CÉRÉBRAL. 


454 

que,  si  une  gangrène  des  extrémités  venait  à se  développer  sous 
l’influence  d’un  état  général  ou  d’une  altération  de  l’organe  cen- 
tral de  la  circulation,  la  coïncidence  d’un  ramollissement  céré- 
bral serait  digne  de  toute  l’attention  possible  ; mais,  lorsqu’elle 
résulte  , ainsi  qu’il  arrive  le  plus  communément,  d’une  oblité- 
ration des  vaisseaux  d’un  membre,  elle  ne  peut,  de  toute  évi- 
dence, avoir  de  rapport  de  causalité  avec  un  ramollissement  du 
cerveau,  à moins,  bien  entendu,  que  les  vaisseaux  qui  portentle 
sang  dans  le  crâne  ne  soient  eux-mêmes  oblitérés.  Il  importe 
donc,  dans  les  trois  cas  de  M.  Lenoir,  où  il  s’agit  de  gangrène  de 
la  main,  suite  de  l’oblitération  des  vaisseaux  du  membre  supé- 
rieur, de  voir  quel  était  l’état  de  la  circulation  du  cerveau. 

Dans  le  premier  cas,  le  ramollissement  était  jaunâtre,  ce  qui 
y indique,  comme  nous  lé  savons,  la  présence  ancienne  du  sang; 
les  vaisseaux  qui  portentle  sang  à la  tête  étaient  sans  doute  sains, 
puisque  leur  état  n’est  pas  indiqué.  Dans  la  deuxième  observa- 
tion, il  y avait,  il  est  vrai,  ossification  des  artères  du  crâne,  et 
de  plus  un  rétrécissement  considérable  de  l’origine  de  la  caro- 
tide gauche;  on  trouva  dans  le  lobe  postérieur  droit  un  ramollis- 
sement dont  la  couleur  n’est  pas  indiquée  ; mais  au-dessus  les 
membranes  étaient  congestionnées. 

he.  troisième  fait  paraît  aupremier  abord  plus  remarquable:  une 
coagulation  du  sang  s’était  iaite  pendaiit  la  vie  dans  lasous-cla- 
vièreetla  vertébrale  droite,  et  l’on  trouva  un  ramollissement  du 
lobe  postérieur  droit  du  cerveau  et  du  lobe  droit  du  cervelet.  Mais 
il  est  noté  que  les  carotides  et  l’autre  vertébrale  étaient  tout  à fait 
saines:  or,  je  demande  si  le  sang  qui  arrivait  par  ces  trois  vaisseaux 
dans  le  cerveau  n’était  pas  grandement  suffisant  pour  la  nutrition 
de  cet  organe,  et  si  les  anastomoses  de  la  base  n'ont  pas  dù  rétablir 
immédiatement  dans  les  points  ramollis  une  circulation  tout 
aussi  complète  que  celle  qui  se  faisait  dans  les  autres  parties  du 
cerveau.  Il  est  encore  une  circonstance  fort  importante  à noter  : 
la  couleur  du  ramollissement  du  lobe  postérieur  du  cerveau 
n’est  pas  indiquée  ; mais  il  est  dit  que  le  ramollissement  du  cer- 
velet était  d’un  gris  rougeâtre  Est-il  logique  d’attribuer  à 1 ab- 
sence du  sang  un  ramollissement  qui  s’accompagne  de  rougeur  ? 
En  outre  les  premiers  symptômes  avaient  été  des  contractions 
<’pileptiform«5,  ce  qui  est,  comme  nous  le  savons  déjà,  unsym- 


NATDRE  DU  RAMOLLISSEMENT.  4^^ 

plôme  d’encéphalite  (1).  Il  est  probable  que  la  cause  qui  a dé- 
terminé le  ramollissement  se  trouvait  liée  de  fort  près  à celle 
qui  a donné  lieu  à la  coagulation  du  sang  dans  les  vaisseaux. 
C’est  ainsi  que,  dans  notre  31"  observation  , où  l’extrémité 
antérieure  de  l’hémisphère  gauche  était  ramollie,  tumefiee, 
ronge,  adhérente  aux  méninges,  il  y avait  une  coagulation 
récente  du  sang  dans  la  carotide  interne  de  ce  coté  et  ses  ra- 
meaux voisins  du  ramollissement.  La  même  circonstance  s est 
rencontrée  dans  l’observation  34.  La  carotide  interne  gauche 
était  remplie  par  un  caillot  rougeâtre,  dense,  friable,  adhèrent. 
Il  y avait  dans  l’hémisphère  gauche  un  ramollissement  avec  in- 
jection considérable  de  la  substance  médullaire,  et  couleur 
rouge-vif  de  la  substance  corticale  ; il  y avait  également  un  peu 
de  ramollissement  rose  et  très- injecté  à la  superGcie  de  1 autre 
hémisphère.  Je  ne  doute  pas  qu’il  n’y  ait  dans  les  cas  de  ce  genre 
une  liaison  entre  ces  deux  altérations  ; mais  il  n’est  pas  permis 
d’y  appliquer  sérieusement  l’hypothèse  que  nous  discutons. 
C’est  ainsi  que  la  phlébite  des  méninges  s’accompagne  presque 
constamment  d’infiltration  sanguine,  puis  de  ramollissement  dei 
circonvolutions,  comme  l’ont  vu  M.  Tonnelé  etM.  le  professeur 
Cruveilhier,  et  comme  je  l’ai  signalé  moi-même  dans  ma  dis- 
sertation inaugurale.  ' 

Dans  deux  autres  faits  que  M.  Lenoir  a empruntés  à M.  Alli- 
bert  et  à IVI.  François,  la  substance  ramollie  présentait  une  fois 
une  tache  ecchymotique,  et  une  autre  fois  une  couleur  rosée. 
Et,  à ce  propos,  voyez  dans  quelle  contradiction  entraîne  un  exa- 
men aussi  superficiel  des  faits  : « L’ossification  des  artères,  dit 
Abercrombie,  paraît  être  fréquemment  la  cause  de  l’apoplexie 
avec  épanchement  dans  le  cerveau  (hémorrhagie  cérébrale),  si 
commune  aux  dernières  périodes  de  la  vie.  Il  me  paraît  donc 
extrêmement  probable  que  celte  ossification  peut  déterminer 
cette  lésion  particulière  du  cerveau,  d’où  naît  le  ramollissement 
que  M.  Rostan  a observé  chez  les  vieillards.  » Mais  nous  avons 
vu  que  cet  écrivain  compare  expressément  à la  gangrène  des 
autres  parties  du  corps  les  faits  de  ramollissements  observés  par 
M.  Rostan,  dus  à la  suspension  de  la  circulation  par  maladie  des 

(t)  Cette  observation  a été  également  publiée  dans  le  Bulletin  clinique 
août  1835,  p.  104. 


nA^rOLLISSHUIENT  CKRÉP.RAL . 


4 5 P) 

arlèrcs.  Ainsi,  voici  une  altération  qui  jouirait  tle  la  faculté  de 
• léterminer  également  et  des  hémorrhagies  et  des  gangrènes  par 
anémie  : cette  circonstance  méritait  au  moins  que  l’auteur  nous 
dit  comment  il  conciliait  des  effets  aussi  opposés  (1). 

(1)  On  a fait  jouer  un  nMe  important,  dans  la  production  de  plusieurs 
maladies  ce'rcbralcs,  et  surtout  de  riiémorrhagie  du  cerveau,  à l’ossification 
des  artères  cc'rébrales  : on  aurait  du  commencer  par  étudier  cette  ossilica- 
lion  elle-mcrae  et  s’assurer  si,  comme  le  dit  Abercrombie  , et  comme  on  le 
pense  généralement,  l’ossyicnlion  des  artères  du  crâne  dans  une  grande 
dlendue  est  très-commune  chez  les  vieillards.  On  aurait  alors  reconnu  nue 
cette  assertion  est  erronée,  et  que  l’ossifîoation  des  artères  du  crâne  , qui  ne 
SC  rencontre  guère  , il  est  vrai , que  chez  les  vieillards,  est  une  lésion  assez 
rare,  et  que  si  les  parois  de  ces  vaisseaux  sont  communément  altérées  à cet 
âge  , cette  altération  ne  consiste  en  général  qu’en  un  simple  épaississe- 
ment. 

Je  ne  sais  trop,  du  reste,  sur  quels  faits  ou  a pu  s’appuyer  jusqu’ici  pour 
assigner  un  rôle  quelconque  à l’ossilicalion  des  artères  du  crâne  dans  le  ra- 
mollissement ou  riicmorrha|iedu  cerveau,  car  les  auteurs  qui  ont  réuni  quel- 
ques observations  sur  ces  maladies  ont  tous  complètement  ou  à peu  près 
négligé  d’indiquer  l’état  de  ces  vaisseaux. 

.Ainsi,  pour  l’hémorrhagie  ; dans  les  vingt-cinq  premières  observations  de 
l’ouvrage  de  M.  Rochoux  , il  n’est  pas  une  seule  fois  question  de  l’élat  des 
artères  du  crâne;  il  en  est  de  même  des  observations  de  la  clinique  de 
M.  Andral  , sauf  la  cinquième  , où  il  e-t  dit  que  ces  artères  étaient  ossifiées 
cliezun  vieillard  de  soixante-neuf  ans. 

l’ourle  ramollissement  : M.  Rostan  n’en  parle  dans  aucune  de  ses  observa- 
tions ; M.  Andral  dans  deux  seulement  : lalfic  (soixante-onze  ans), où  il  dit  : 
les  grandes  artères  cérébrales  sont  ossifiées  ; la  (soixante-huit  ans),  ossi- 
fication des  carotides  internes  et  de  leurs  divisions.  l^Ième  silence  dans  les 
lettres  de  M.  Lallemand.  Comme  nous  ne  possédons  pas  de  collections  d\/D- 
servations  sur  les  vieillards,  on  voit  iftie  tout  ce  qui  s’est  dit  sur  1 ossifica- 
tion des  artères  du  cerveau  n’a  aucune  espèce  de  fondement. 

Il  s’en  faut  mallieureusemcnt  fjue  j’aie  noté  l’état  des  vaisseaux  dans  tou- 
tes mes  observations  : voici  cependant  un  relevé  rpi’on  ne  trouvera  peut-être 
pas  dénué  de  toute  utilité. 

i^'J’ai  noté  avec  soin  l’état  des  artères  du  crâniTchcz  32  vieillards  morts  de 
différentes  maladies,  cl  chez  lesquels  lepervenu  était  parfakeraent  sain  ; je 
les  ni  trouvées  ; 

Saines  9 fois. 

Epaissies  21  — 

Ossifiées  2 — 

Cher.  30  individus  affectés  de  ramollissement  cérébral,  je  les  ai  trou- 
Yfrs  : 


NATURE  DU  RAMOUUISSEMENT. 


457 


Mais  continuons.  Le  docteur  Piobert  Law  a publié  (1)  un  mé- 
moire intitulé  : De  certaines  altérations  du  cœur  considérées 
comme  cause  du  ramollissement  cérébral. 


Saines 

6 fois. 

Epaissies 

18  — 

Ossifiées 

6 - 

Enfin,  dans  20  cas  d’hémorrhagie 

cérébrale,  elles  étaient  : 

Saines 

3 fois 

Epaissies 

10  — 

Ossifiées 

6 — 

Présentant  de  petites  plaques  car 

lilagineuscs  isolées,  1 fois. 

En  réunissant  tous  ces  faits,  on  voit  que,  chez  82  vieillards,  les  artères  du 
crâne  étaient  : 

Saines 

18  fois. 

Epaissies 

49  — 

Ossifiées 

14  — ( dans  G cas  , ces  ossifications 

• 

sont  notées  légères  ou  com- 
mençantes ■ 

Parliellerae.nl  carlilaglneuses,  1 fois. 


Ces  releves  nous  apprennent  que  l’os.sificalion  des  artères  du  crâne  n’est 
pas  chose  si  commune  clie?,  les  vieillards,  et  surtout  à un  degré  un  peu  con- 
sidéralile.  âlaintcnanl  je  sais  qu’au  point  de  vue  qui  nous  occupe,  on  peut 
attribuer  autant  de  valeur  à l’épaississement  simple  <[ii’à  l’ossificaiion  des 
vaisseaux,  puisqu’il  est  surtout  question  de  la  diminution  de  leur  calibre. 
Mais  je  ferai  remarquer  que  si,  sur  trente  cas  de  ramollissement,  les  artères 
ont  été  trouvées  saines  seulement  six  fois  et  vingt-quatre  fois  malades  , elles 
ont  été  trouvées  vingt-trois  fois  altérées  cl  saines  neuf  fois  seulement  dans 
trente-deux  cas  où  le  cerveau  était  sain  , ce  qui  constitue  une  proportion 
a peu  près  semblable.  11  me  semble  qu’il  est  permis  de  croire  que  cet  état  des 
vais.seaux  n’entre, pas  pour  beaucoup  dans  la  production  du  ramollissement, 
puisqu’on  le  rencontre  à peu  près  aussi  souvent  chez  les  sujets  dont  le  cerveau 
n’est  pas  ramolli.  C’est  ainsi  que,  bien  que  les  épaississements  et  lesossifica- 
*ions  des  vaisseaux  des  membres  s’observent  très  fréquemment  chez  les  vieil- 
lard.s,  la  gangrène  des  extrémités  est  loin  d’être  une  affection  fréquente  , 
puisque,  pendant  deux  années  que  j’ai  été  attaché  h la  Salpétrjère,  je  n’en  ai 
observé  que  deux  cas  , et  pas  un  seul  une  troisième  année  où  j’ai  suivi  con- 
stamment le  service  de  l’inlirmerie  de  cet  hospice.  Je  n’ignore  pas,  du  reste, 
que  d’autres  observateurs  et  à d’autres  époques  ont  rencontré  ia  gangrène 
spontanée  dans  une  plus  forte  proportion  j mais  enfin,  ce  n’est  jamais  une 
maladie  fréquente,  tandis  que  les  épaississements  des  vaisseaux  des  mcmbre.s 

(1)  f'razettc  mifJirale,  8 août  1840. 


458  RAMOLLISSEMENT  CÉrÉBRAL. 

L’idée  de  ce  travail  est  que  s’il  est  des  altérations  du  cœur 
qui  déterminent  des  lésions  du  cerveau  en  augmentant  la  force 
de  la  circulation,  ainsi  que  l’hypertrophie  du  cœur  produit  1 a- 
poplexie,  il  en  est  d’autres,  au  contraire,  qui  causent  des  lésions 
de  cet  organe  en  diminuant  et  en  rendant  insuffisante  la  circula- 
tion. Tel  est,  par  exemple,  le  rétrécissement  de  la  valvule  mi- 
' traie,  ou  tout  autre  lésion  propre  à diminuer  la  quantité  de 
sang  qui  se  porte  au  cerveau,  et  que  1 on  voit  produire  le  ramol- 
lissement cérébral. 

« Les  circonstances,  dit  l’auteur,  dans  lesquelles  se  développe 
le  ramollissement  cérébral  dont  je  me  suis  occupé  dans  ce  tra- 
vail, semblent  l’identifier  avec  la  gangrène  ou  avec  la  mort  d’une 
partie  causée  par  la  diminution  du  sang  qu’elle  reçoit.  » Ce  se- 
rait  le  cas,  il  me  semble,  pour  appuyer  cette  manière  de  voir, 
de  citer  des  exemples  de  coïncidence  de  ce  ramollissement  avec 
la  gangrène  des  extrémités  j mais  l’auteur  n’en  fait  rien,  et  ne 
paraît  même  pas  avoir  songé  à rapprocher  des  faits  aussi  im- 
portants, des  assertions  fort  douteuses  qu  il  émet. 

Les  observations  qu’il  cite,  au  nombre  de  huit,  portent  sur 
des  sujets  de  dix-sept  à quarante-cinq  ans.  U n’y  a que  quatre 
autopsies  ; elles  manquent  généralement  un  peu  de  details  en 
ce  qui  concerne  le  cerveau.  Daais  aucun  cas  on  n’a  note  de  rou- 
geur dans  le  cerveau  ; il  est  indiqué  anémique  une  fois.  Dans 
tous  les  cas,  le  ramollissement  était  tout  à fait  partiel  et  de  cou- 
leur verdâtre;  cette  dernière  circonstance  indique  habituelle- 
ment de  la  suppuration  dgns  le  cerveau.  Quant  au  peu  d’eten- 
due,  ou  plutôt  à la  circonscription  du  ramollissement  dans  de 
certaines  limites,  elle  n’est  pas  d’accord  avec  la  théorie  de  1 au- 
teur ; car  il  semble  que  si  le  cerveau  venait  à souffrir  dans  sa 
nutrition,  du  défaut  de  sang  que  le  cœur  envoie  dans  le  ciane, 
il  s’en  ressentirait  dans  toute  son  étendue,  et  non  ans  ui 
pace  étroit  seulement  ; et  cela  d’autant  plus  que  1 auteur  nous 


se  présentent  très-souvent.  Ajouterai-je  enfin  que  1 ^ 
chei  les  vieillards? 


NATTJRE  ramollissement. 

montre  de  semblables  ramollissements  durant  des  mois,  plus 
d’une  année  même. 

On  voit  combien  de  doutes  s’attachent  aux  opinions  et  aux 
faits  rapportés  par  le  docteur  Robert  Law.  M.  le  docteur  Hen- 
roz,  qui  a analysé  ce  travail  dans  le  journal  V Expérience  (1),  se 
range  complètement  de  Tavis  du  médecin  anglais  : « Les  ob- 

servations que  nous  venons  de  citer,  dit-il,  présentent  encore 
un  autre  intérêt  en  sanctionnant  les  doctrines  de  quelques  mé- 
decins modernes  qui , loin  de  vouloir  regarder  tout  ramollis- 
sement du  cerveau  comme  le  résultat  de  l’inflammation,  en  ont  » 
e'tabli  deux  variétés,  dont  une  analogue  à la  gangrène.  Nous  ^ 
même  avons  vu  une  fois  le  ramollissement  du  cerveau  coïncider 
avec  un  rétrécissement  considérable  de  l’orifice  auriculo- ventri- 
culaire gauche  ; et,  une  autre  fois,  nous  l’avons  vu  se  déclarer 
subitement  chez  un  malade  affecté  de  rhumatisme  articulaire 
aigu,  pour  lequel  il  avait  été  saigné  très-ahondainment.  Le  dé- 
lire que  l’on  observe  quelquefois  dans  le  cours  des  affections 
traitées  par  la  digitale  à haute  dose  ne  dépendrait-il  pas,  au 
moins  dans  quelques  cas,  plutôt  de  l’action  insuffisante  du  cœur 
sur  le  centre  cérébral,  que  de  l’action  directe  de  la  uigilale  sui  le 
cerveau  ? » 

J’ai  cité  ce  passage  tout  au  long,  afin  de  faire  voir  l ombien 
les  questions  les  plus  graves  et  les  plus  difficiles  pouvaient  être 
traitées  avec  vitesse  et  légèreté,  car  je  suis  sûr  que  cet  honora  i.de 
confrère  ne  voudrait  pas  se  charger  de  défendre  la  doctrine 
dont  il  tient  à faire  honneur  aux  médecins  fi-ançais,  à l’aide 
des  arguments  qu’il  a exposés  dans  cet  article;  en  particulier, 
lorsqu’il  cite  au  nombre  des  faits  « qui  pourraient  au  besoin 
servir  d’appui  aux  opinions  de  l’auteur  anglais,  relativement  à 
l’influence  du  défaut  de  la  quantité  suffisante  de  sang  sur  la 
production  de  quelques  affections  du  cerveau,  un  cas  emprunté 
à M.  Andral,  de  ramollissement  du  cerveau  survenu  subitement 
après  une  saignée  ! (2)  » _ 

(1)  Expérience,  27  août  <840. 

(2)  Voisiu  de  Limoges  a rapporté,  dans  V Expérience  du  20  août  1840, 
l’observation  d’un  homme  qui  mourut  d’hémorrliagie  plusieurs  jours  après 
une  blessure  de  l’artère  vertébrale  droite.  On  trouva  un  ramollissement  du 
lobe  postérieur  droit  du  cervelet,  dont  la  couleur  n’est  pas  indiquée.  Il  j 


ramollissement  cérébral. 


460 

Si  la  diminution  de  l’abord  du  sang  dans  le  cerveau  devait 
aussi  facilement  entraîner  la  désorganisation  par  anémie,  ou,  si 
l’on  veut,  la  gangrène  de  cet  organe,  on  aurait  dû.  fréquemment 
observer  ce  résultat  à la  suite  des  opérations  qui  ont  eu  pour 
effet  d’oblitérer  immédiatement  quelqu’un  des  gros  troncs  qui 
alimentent  le  cerveau  : car  on  sait  qu’un  effet  pathologique  se 
produit  en  général  d’autant  plus  sûrement,  que  la  cause  propre  à 
le  déterminer  agit  avec  plus  de  rapidité. 

La  ligature  de  la  carotide  est  ordinairement  suivie  du  déve- 
loppement de  phénomènes  cérébraux,  qui  peuvent  bien  en  effet 
tenir  à la  diminution  subite  de  l’abord  du  sang  dans  cet  organe, 
mais  à la  suite  desquels  on  n’a  pas  encore  noté,  que  je  sache,  de 
ramollissement  anémique  du  cerveau,  sauf  toutelois  un  cas  rap- 
porté par  M.  Vincent  (1),  où  le  malade  succomba  le  septième 
jour  avec  une  hémiplégie  gauche,  survenue  une  demi-heure  après 
la  ligature  de  la  carotide  droite.  « On  trouva,  dit  M.  Bérard, 
qui  rapporte  ce  fait,  le  lobe  droit  du  cerveau  ramolli  et  moins 
pénétré  de  sang  que  de  coutume  (2).  » Il  serait  bon,  du  reste, 
pour  apprécier  exactement  ce  fait,  de  posséder  des  renseigne- 
ments un  peu  plus  détaillés. 

Une  femme, il  qui  IVUlvey  avait  lie  la  caiotide  dioile,  s tndoi** 
mit  profondément,  après  avoir  éprouvé  une  quinte  de  toux,  fit 
entendre  pendant  sa  respiration  un  bruit  de  ronflement  qui  lui 
était  ordinaire,  puis  mourut  paisiblement.  On  trouva  que  la  ca- 
rotide gauche  était  à peu  près  oblitérée  à son  insertion  à l’aorte, 
et  que  les  deux  vertébrales  se  trouvaient  plus  petites  que  de 
coutume.  Le  cerveau  était  sain;  ses  vaisseaux  n offraient  rien  de 
particulier,  et  contenaient  la  quantité  de  sang  qui  les  remplit 
ordinairement.  Un  peu  de  sérosité  était  épanchée  entre  les  mé- 
ninges'3).Un  autre  individu,  opéré  par  M.  Langenbeck, aussitôt 
après  l’opération,  resta  immobile,  les  yeux  fermés,  et  mourut 


.avait  Cl  à la  Tmi  de  la  vie  quelques  symplôaies  ccrel.raux  values . \ o.sm 
était  porté  .é  penser  qwe  ce  ramollissement  tenait  .à  la  rhmmuUon  de  1 abord 
du  .sang....  Comment,  disait-il , un  ramollissement  inflammatoire  se  .serait- 
il  développé  dans  un  tel  état  d’ancmic? 

n)  The  Lancet,  l.  ii,  p.  570. 

(2)  Bérard,  Dict.  de  nuùL,  deuxième  édit.,  t.  vt,  p.  «0,  art.  UOiTime  ne 
i.A  c.iaoTinE. 

(3)  Beislef,'i!i.  D '.fsertation  innu^ffvalc,  2 mars  1841,  p.  00. 


I 


461 


KATUltE  JÜU  llAMOLLlSSEjMl'.SX . 

ti-eate-quati-c-heures  après,  sans  avoir  présenté  dautrcs  sym- 
ptômes cérébraux.  Il  ne  paraît  pas  que  le  cerveau  ait  présenté 
rien  déplus  remarquable  que  dans  le  cas  précédent.  M.  Bérard 
dit  que,  sur  soixante-dix  cas  de  ligature  de  la  carotitle,  ce  sont 
là  les  deux  seuls  individus  qui  paraissaient  avoir  succombé  par 
lelait  du  cbangement  survenu  dans  la  circulation  cciebrale  (i). 
Mais  il  faut  admettre  que  ce  cbangement  se  serait  opéré  sans  - 

laisser  de  traces  sur  le  cadavre. 

M.  Bérard,  à l’excellent  article  duquel  j’ai  emprunté  la  plu- 
part des  détails  qui  précèdent,  y a placé  quelques  rétlexions  que  je 
demande  la  permission  de  rapporter  ici. Il  pense  que  la  différence 
des  effets  de  la  ligature  de  la  carotide  lient  en  grande  partie  à 
la  différence  de  diamètre  des  artères  communicantes.  Si  les  ar- 
tères communicantes,  dit-il,  sont  volumineuses,  le  sang  qm  ar- 
rive au  trapèze  artériel,  après  l’opération,  est  presque  égaleinenl 
réparti  dans  les  deux  moitiés  de  l’encéphale,  aussi  bien  que  dans 
ses  régions  antérieure  et  postérieure.  Si  au  contraire  les  artères 
communicantes  sont  peu  développées,  la  ligature  arrêtera  en 
partie  l’abord  du  sang  dans  la  partie  correspondante  du  cerveau, 
etpourra  donner  lieu  à des  accidents  primitifs,  dusà  cette  cause  ; 
mais,  ejuant  aux  accidents  consécutifs,  bien  loin  de  les  considé- 
rer comme  le  résultat  de  l’état  anémique  du  cerveau,  M.  Bé- 
rard pense  qu’il  se  fait  dans  le  tissu  cérébral  un  travail  de  circu- 
lation supplémentaire,  une  dilatation  des  ramuscules  infiniment 
ténus,  qui  prédisposent  à la  rupture  hémorrhagique  , et,  si  les 
choses  se  passent  réellement  ainsi,  me  paraissent  pouvoir  pré- 
disposer tout  aussi  bien  au  développement'd’un  travail  inflam- 
maioire  (2). 

Au  moment  de  faire  imprimer  ces  pages  , je  viens  de  rencon- 
trer dans  la  Gazette  médicale  une  observation  de  M.  le  profes- 
seur Sédillot  qui  me  paraît  digne  d’attention.  Que  l’on  me  par- 
donne d’insister  si  longuement  sur  ce  sujet  ) les  faits  auxquels 
je  fais  allusion  ont,  pour  quelques  personnes , beaucoup  de  gra- 
vité dans  la  question  qui  nous  occupe  , et  d’ailleurs  c’est , je 
crois  , la  première  fois  qu’on  essaye  de  les  réunir  sous  ce  point 
de  vue. 

(1)  Bérard,  loc.  cil.,  p.  427.  M.  Bérard  oublie,  ce  uie  semble,  le  cas  de 
M.  Vincent , cite  précédemment. 

(2)  Bérard,  loc.  cil,,  p.  42B  et  430. 


462 


RAMOLLISSEMENT  CÉrÉBrAL. 


« Un  jeune  homme  reçut , le  1 1 avril  1842,  une  blessure  pro- 
fonde en  arrière  de  la  branche  droite  de  la  mâchoire  inférieure. 
Une  hémori'hagie  très-abondante  eut  lieu  , et  se  renouvela  les 
jours  suivants.  Le  cinquième  jour,  une  tentative  infructueuse 
fut  faite  pour  lier  la  carolide  primitive.  Le  23  avril , M.  Sédillot 
trouva  le  malade  pâle , exsangue  , profondément  affaibli  ; il 
parvint  à lier  la  carotide. 

Trois  heures  après  cette  opération  , on  constata  une  hémi- 
plégie complète  du  côté  gauche  et  une  paralysie  de  la  face  du 
côté  droit  ; l’intelligence  du  malade  s’affaiblit;  il  resta  assoupi 
les  jours  suivants  et  dans  un  état  demi-comateux.  Le  1®>‘  mai,  il 
s’agita , porta  la  main  gauche  à sa  tête  , et  mourut  le  lende- 
main. Les  jours  précédents  il  avait  éprouvé  des  frissons  suivis  , 
de  sueur,  que  l’on  avait  considérés  comme  des  accès  de  fièvre  ' 
intermittente  perpicieuse. 

On  trouva  , à l’autopsie  , des  traces  d’infection  purulente  ; 
l’instrument  vulnérant  avait  atteint  la  carotide  externe  droite  ; 
la  carotide  primitive,  coupée  par  la  ligature,  était  oblitérée 
dans  son  bout  supérieur  et  dans  plusieurs  millimètres  de  hau- 
teur par  un  caillot  partiellement  adhérent.  Le  crâne  ouvert,  on 
vit  qu’une  injection  , pratiquée  sur  le  cadavre  , avait  beaucoup 
moins  pénétré  dans  les  artérioles  des  lobes  moyen  et  antérieur 
du  côté  droit  que  dans  ceux  du  côté  opposé  5 les  membranes 
étaient  saines,  et  il  n’y  avait  pas  d’épanchement  séreux  apprécia- 
ble ; mais  tout  le  lobe  antérieur  droit  était  manifestement  ra- 
molli. Il  suffisait  d’appuyer  alternativement  le  doigt  sur  le  lobe 
antérieur  -gauche  et  sur  celui  du  côté  droit  pour  s’apercevoir 
que  celui-ci  ne  présentait  pas  la  même  résistance;  le  ramollis- 
sement n’était  en  aucun  point  dilîluent , mais  la  matière  céré- 
brale se  laissait  déprimer  et  s’écrasait  sous  les  doigts  avec  une 
bien  plus  grande  facilité...  (1).  » 

Bien  que  la  couleur  de  ce  ramollissement  ne  soit  pas  indiquée, 
je  ne  doute  pas  qu’elle  ne  fût  naturelle , car  une  circonstance 
de  ce  genre  n’eût  pas  manqué  d’être  notée  par  l’auteur  de  cette 
observation.  Ce  fait  me  paraît  très-semblable  à celui  de 
M.  Vincent  que  j’ai  cité  tout  à l’heure,  et  sur  lequel  je  regrette 
beaucoup  de  n’avoir  que  des  indications  succinctes  ; ce  sont  les 

(t)  GazetU  medicale,  3 septembre  t842. 


NATURE  DU  RAMOLLISSEMENT. 


463 


deux  seuls  que  je  connaisse  où  le  ramollissement  ait  réellement 
paru  s’opérer  sous  l’influence  d’une  diminution  de  l’abord  du 
sang  dans  le  cerveau.  En  tirerons-nous  maintenant  les  mêmes 
conclusions  que  M.  Sédillot?  «Cette  observation,  dit-il,  ne 
jette-t-elle  pas  quelque  jour  sur  le  ramollissement  cérébral  des 
vieillards  , attribué  par  la  plupart  des  médecins  , et  en  dernier 
lieu  par  W.  Durand-Fardel  (Voy.  Archives  générales  de  méde- 
cine) k l’inflammation?  Est-il  possible  qu’un  pareil  phénomène 
se  soit  développé  en  deux  ou  trois  heures  dans  des  parties  pri- 
vées de  sang  , et  les  saignées  eussent-elles  été  d’un  usage  conve- 
nable pour  combattre  une  lésion  dont  le  défaut  de  sang  était 
la  cause  ? Il  suffit  de  poser  une  pareille  question  pour  la  ré- 
soudre... « 

J’admets  très-volontiers  cette  dernière  conclusion  ; mais 
quant  au  rapprochement  que  M.  Sédillot  cherche  à établir  entre 
l’altération  qu’il  a observée  et  le  ramollissement  des  vieillards  , 
j’en  nie  absolument  la  justesse  : d’abord  , parce  que  les  vieil- 
lards ne  se  trouvent  jamais  dans  des  conditions  physiologiques 
comparables  à celles  du  sujet  de  son  observation  ; ensuite,  parce 
qu’il  n’y  a réellement  pas  de  rapport  entre  l’altération  anato- 
mique que  nous  avons  montrée  constituer  le  ramollissement  à 
aucune  de  ses  périodes  , et  cette  simple  diminution  de  consis- 
tance de  tout  un  lobe  cérébral  sans  diffluence  aucune  et  sans 
altération  de  couleur.  Dans  aucun  des  faits  contenus  dans  cet 
ouvrage  , non  plus  que  dans  les  divers  recueils  d’observations  , 
on  ne  trouvera  de  ramollissement  caractérisé  uniquement  par  la 
facilité  plus  grande  avec  laquelle  une  portion  du  cerveau  se 
laissait  déprimer  ou  écraser  sous  les  doigts.  On  ne  retrouve  guère 
de  semblables  caractères  que  dans  ces  ramollissements  généraux 
du  cerveau,  sur  la  nature  desquels  on  se  rappelle  que  nous  n’a- 
vons  cru  pouvoir  exprimer  que  des  doutes. 

S n. 

11  semble  encore  à plusieurs  personnes  que  les  auteurs  qui  ont 
étudié  le  ramollissement  cérébral  dans  des  hospices  consacrés  à 
la  vieillesse,  ont  observé  une  autre  maladie  que  ceux  qui  ne 
l’ont  rencontré  que  dans  les  autres  hôpitaux  ou  dans  la  pra- 
tique de  tous  les  jours  ; aussi  pensent-elles  qu’il  faut  se  garder 


464  R-UlOLUSSliMü;]VT  CÉkÉUrAL. 

d’adresser  àTiiue  de  ces  espèces  de  ramollissemenL  les  réflexioos 
que  l’on  a pu  appliquer  à l’autre  , et  reprochent-elles  vivement 
à quelques  auteurs  de  les  réunir  dans  un  même  groupe  , dans 
un  même  ordre  pathologique. 

Avant  de  rechercher  ce  cju’il  peut  y avoir  d’exact  dans  celte 
manière  de  voir,  voyons  si  elle  est  applicable  à d’autres  mala- 
dies qu’au  ramollissement. 

Il  est  incontestable  que  la  pathologie,  dans  les  dilïérenls  âges, 
présente  une  physionomie  toute  spéciale  , facile  à saisir,  et  qui, 
dominaiU  les  points  les  plus  élevés  de  l’observation  , se  montre 
encore  dans  les  menus  détails.  Il  est  certain  que  ces  différences 
portent  aussi  bien  sur  la  manière  dont  se  développent  les  symp- 
tômes que  sur  l’esprit  qu’il  faut  apporter  à l’étude  des  lésions 
cadavériques  , aussi  bien  sur  la  thérapeutique  que  sur  la  phy- 
siologie. 11  ne  faut  qu’observer  quelque  temps  dans  les  hôpitaux 
consacrés  aux  âges  extrêmes  de  la  vie,  pour  être  frappé  des  con- 
trastes qu’ils  présentent. 

Mais  cependant  il  importe  d’apprécier  avec  exactitude  en  quoi 
consistent  ces  différences. 

Des  recherches  modernes  ont  appris  que  désaffections,  qui 
paraissaient  exclusivement  propres  à l’enfance  ou  à l’âge  adulte, 
se  montrent  encore  à d’autres  époques  de  la  vie.  En  est-il 
autrement  dans  la  vieillesse?  Si  nous  en  exceptons  quelques  affec- 
tions particulières  à certains  tissus,  comme  la  goutte,  les  incrus- 
tations des  artères,  etc.,  qui  ne  se  montrent  guère  qu’à  cet  âge, 
et  encore  ceci  est  loin  d’être  absolu,  la  réponse  sera  négative  , 
surtout  pour  les  maladies  des  organes  contenus  dans  les  cavités 
splanchniques.  Nous  voyons  bien  la  vieillesse  imprimer  à ces 
maladies  un  cachet  spécial  ; mais  chacune  de  celles  que  nous 
observons  chez  les  vieillards  est  commune  à cet  âge  et  à un 
âge  moins  avancé.  Si  nous  cherchons  dans  les  différentes  formes 
d’inflammation  ou  de  lésion  de  texture  des  organes  parenchy- 
mateux de  l’abdomen  , de  l’intestin , des  poumons,  du  cœur, 
nous  ne  saurions  trouver  une  seule  maladie  qui  soitpaiticülièie 
à cet  âge  ou  qui  même  y offre  des  différences  absolues.  L’hé- 
morrhagie, les  tumeurs  du  cerveau,  les  affections  des  méninges 
se  montrent  sous  la  même  forme  chez  les  vieillards  que  chez  les 

adultes. 

Il  est  donc  bien  entendu  qu’en  faisant  du  i ainoliissetueul  des 


AAltnt  UU  liAMOLI.ISSKMEKT. 


465 


vieillards  cL  du  rainollisseinent  des  adultes  deux  maladies  dilTé- 
1 entes,  on  atlribue  au  ramollissement  du  cerveau  ce  qui  n’existe 
point  pour  les  antres  maladies  de  cet  organe  ou  de  ses  envelop- 
pes, et  ce  qui  ne  s’observe  également  dans  aucun  autre  organe(l). 
Voici  quelle  est  du  reste  rargmnentation  de  MM.  Delaberge  et 
Monneret,  cjui  soutiennent  l’opinion  dont  je  conteste  ici  l’exac- 
titude (2). 

Ils  commencent  par  établir  les  conditions  spéciales  dans  les- 
quelles se  trouve,  suivant  eux  le  cerveau  chez  les  vieillards  , 
conditions  de  vascularité,  de  volume,  de  consistance,  de  fonc- 
tions ; modifications  qui  tiennent  les  unes  aux  altérations  cau- 
sées par  l’àge  dans  le  cerveau  lui-même,  les  autres  à l’éta't  dans 
lequel  se  trouvent  les  autres  organes  dont  le  cerveau  perçoit  plus 
ou  moins  l’influence , puis  ils  en  déduisent  rigom'euscmenl , 
disent-ils: 

« Que  le  ramollissement  résulte  de  la  diminution  de  nutri- 
tion de  cet  organe; 

Que  le  plus  souvent  il  s’accompagne  d’une  perturbation  gé- 
nérale des  actes  de  l’organisme , qui  entraîne  la  faiblesse  des  in- 
dividus, et  se  trouve  en  rapport  avec  les  altérations  que  subit  le 
jeu  des  divers  appareils,  par  suite  des  j)rogrès  de  l’Age; 

Que  c’est  par  une  prcdispositiçn  spéciale,  inconnue,  que  cer- 
tains individus  en  subissent  les  atteintes  ; 

Qu’il  est  1 analogue  enfin  de  ces  dyspnées-'spéciales,  de  ces  af- 
fections catarrhales  spéciales,  de  ces  perturbations  patliologiques 
jcnfin  qui  ne  sévissent  qu’à  cet  âge  et  épargnent  les  aduUes  et 
l’enfance.  » 

Mais  il  faut  remarquer  que  ces  messieurs  ont  définit  ces  con- 
I séquences  non  pas  de  l’observation  du  ramollissement  lui-rnême, 
imais  du  point  de  vue  auquel  ils  se  sont  placés. 

I Ils  ont  dit  : les  conditions  anatomiques  et  physiologiques  du 
* cerveau  sont  changées,  donc  ses  maladies  doivent  être  de  nature 

I 

^ f 

(t)  M.  Rodioiix  a fait  remarquer  avec  beaucoup  de  juslessn  et  à ])iojios  du 
ramoUissemeiu  cérébral  , que  la  gravité  d’ime  maladie  et  l’age  des  siijpis 
fiu’elle  affecte  ne  cbaiigenl  rien  à sa  nature.  ( Recherches  sur  l’apoj>lexi<-, 
deuxième  édition,  p,  314.) 

(2)  Delaberge  et  Monneret,  (JoiniJciuUiwi  de  iiie'd-  , l,  ii,  p.  lOS. 

30 


s 


466  HA.M0LL1SSEME1NT  CÉRÉBHAL. 

différente.  Car  tel  est  leur  unique  et  exact  raisonnement.  Or  cela 
pourrait  être  vrai  ; mais  ce  n’est  pas  conforme  à 1 observation. 
Ainsi  le  poumon  a certes  ressenti  aussi  bien  que  le  cerveau  1 in- 
fluence de  la  vieillesse.  MM.  Dechambre  et  Hourman  ont  très-  1 
bien  fait  connaître  les  conditions  anatomiques  et  physiologiques 
qu’il  revêt  dans  un  âge  avancé  : et  cependant  la  pneumonie  est 
la  même  à cet  âge  que  chez  l’adulte.  Je  n’insisterai  pas  sur  ce  ; 
qu’il  y a dé  bizarre  et  d’infldèle  dans  cette  comparaison  de  dys-  | 

pnées  , d’affections  catarrhales  spéciales , qui  ne  laissent  habi-  ^ 

tuellement  aucune  trace  sur  le  cadavre , avec  une  maladie  qui 
exerce  sur  l’organisation  du  cerveau  une  impression  aussi  pro- 
fonde et  aussi  caractérisée,  que  le  ramollissement. 

L’erreur  qui  sépare  le  ramollisseti^ent  des  vieillards  de  celui 
des  adultes  est  la  même  qui,  à une  autre  époque,  avait  créé  l a- 
poplexie  séreuse  telle  que  l’admettaient  nos  prédécesseurs.  On^ 
avait  remarqué  que,  chez  les  vieillards  surtout,  à la  suite  d’ac-' 
cidents  particuliers,  on  trouvait  dans  le  cerveau  de  la  sérosité  au 
lieu  de  sang,  et  parce  qu’on  observait  cela  le  plus  souvent  chez 
des  individus  affaiblis  , on  en  avait  conclu  que  ce  devait  etre 
une  affection  asthénique,  et  on  lui  avait  crée  un  cortege  e 

symptômes' appropriés  à cette  opinion  dont  les  bons  observa-^^ 

teurs  ont,  du  reste,  promptement  fait  justice. 

Je  crois  qu’il  est  impossible , après  avoir  un  peu  étudié  les 
faits  contenus  dan's^iet  ouvrage,  de  ne  pas  admettre  la  propo- 
sition suivante:  que  le  ramollissement  cérébral  est  une  meme 
maladie  chez  les  vieillards  que  chez  les  adultes  : qu  il  n offre 
d’autres  différences  que  les  modifications  qu’entraîne  toujours 
avec  soi  une  grande  différence  d’âge  , modifications  qui  portent 
elles-mêmes  seulement  sur  la  formé  et  non  sur  la  nature  des . 

*"^Orcomme  on  ne  doute  pas  en  général  que  le  ramollissement 
cérébral,  chez  les  adultes  , ne  soit , au  moins  dans  l’immense  - 
majorité  des  cas  , le  résultat  d'un  travail  inflammatoire  , qu  ill 
se  développe  spontanément , ouà'la  suite  de  plaies  de  lele 
ou  à l’entour  de  productions  organiques  , si  le  ramollissement 
des  vieillards  n’est  pas  une  maladie  différente  de  celui  des  adul- 
tes c’est  donc  très-probablemeut  une  encéphalite. 

\près  avoir  exposé  les  raisons  qui  portent  a attribuer  au  ra- 


I 


nature  UU  KAMOLLISSEMEWT.  4^ 

iiiollissement  une  origine  inflammatoire , M . Roslan  continue 
ainsi  : « Malgré  toutes  les  raisons  que  nous  venons  de  donner 
en  faveur  de  la  nâture  inflammatoire  du  ramollissement  céré  ■ 
bral,  nous  ne  saurions  croire  qu’il  soit  constamment  l’effet 
d’une  inflammation  : d’abord  parce  que  , dans  le  plus  grand 
nombre  des  circonstances,  il  u existe  aucun  des  signes  qui  carac- 
térisent cet  état;  la  diminution  de  contractilité  et  de  sensibilité, 
la  paralysie  , la  stupeur,  l’inertie  de  l’intelligence  , sont  des 
symptômes  infiniment  plus  fréquents  que  les  phénomènes  con- 
traires, c’est-à-dire  que  la  contracture,  les  convulsions,  les 
douleurs  des  membres  , le  délire . Ces  derniers  annoncent , sans 
doute,  une  exaltation  dans  les  propriétés  dites  vitales  du  cer- 
veau ; mais  les  premiers^  qui  sont  plus  ordinaires  , indiquent 
une  altération  d’uné  nature  tout  opposée.  Souvent  il  n’a  point 
existé  de  douleur  de  tête  , la  couleur  de  la  substance  du  cerveau 
n’est  nullement  changée,  il  n’existe  aucune  tuméfaction  ni  aucuns 
symptômes  fébriles;  il  nous  semble  alors  impossible  d’admettre 
que  ce  soit  une  pblegmasie.  Enfin  celte  altération  arrive  chez 
des  vieillards  et  dans  des  circonstances  entièrement  opposées  à 
celles  qui  donnent  naissance  à des  phlegmasies  (1).  » Je  ne  com- 
prends pas  comment  ce  professeur  peut  dire  que  la  perte  de 
l’intelligence,  de  la  sensibilité  , la  paralysie  , indiquent  une  al- 
tération d’une  nature  tout  opposée  à l’inflammation.  Mais  ce 
sont  là  des  phénomènes  communs  à toutes  les  phlegmasies 
encéphaliques  ; mais  ils  se  montrent  très-  fréquemment 
comme  seuls  symptômes  ou  à peu  près  , dans  la  méningite 
des  enfants,  quelquefois  même  dans  celle  des  adultes;  ils 
constituent  une  des  formes  les  plus  habituelles  de  la  con- 
gestion cérébrale  active  ; on  les  observe  souvent  dans  les  en- 
céphahtes  traumatiques.  Ce  n’est  réellement  pas  là  une  raison 
sérieuse.  Et  peut-on  , lorsque  l’on  a eu  occasion  d’obsei  ver  la 
pneumonie  des  vieillards,  à la  Salpétrièi’e  , s’étonner  de  la  fré- 
quence d’une  affection  inflammatoire  dans  la  vieillesse?  « Mais 
alors,  continue  M.  Rostan  , quelle  sera  la  nature  du  ramollis- 
sement? Nous  pourrions  nous  abstenir  de  répondre  à cette 
question -,  mais  nous  croyons  pouvoir  dire  toutefois  avec  retenue 
et  sans  crainte  de  tomber  dans  les. divagations  dont  nous  par- 
(I)  Roslan,  Recherches,.,.,  p.  165. 


468 


UAMOr.LlSSKMEN  1’  CÉ  K Èui\ A.L . 


lions  touL  ù riieme,  (jiie  cctle  altéraiion  du  cer’tcau  nous  paiaîl 
être  souvent  une  destiuclion  sénile,  offianl  la  plnsjjrande  ana- 
logie avec  la  gangrène  de  la  vieillesse.  Comme  celte  dernière,  le 
ramollissement  nous  semble  la  désorganisation  de  la  partie  5 
comme  dans  cette  maladie  , les  vaisseaux  destinés  à apporter  le 
sang  et  la  vie  dans  l’organ^ affecté  sont  ossifiés,  non  par  suite 
d’une  inflammation,  maispav  iesprogrèsde  râge(l).».  Quelques 
lignes  plus  bas,  l’auteur  que  nous  analysons  termine  ainsi  son 
chapitre  de  la  nature  du  ramollissement  : « Concluons  c|u’il 
faut  admettre  un  ramollissement  inflammatoire  et  un  ramollis- 
sement non  inflammatoire  une  dége'nérescence  particulière  qui 
a ses  signes^  ses  caractères  propres.  » Qui  ne  croirait,  d’après 
ce  passage,  C[ue  l’auteur  va  faire  l’iiistoire  diflè'rentielle  de  ces 
deux  ramollissements  à l’aide  des  signes  et  des  caractères  qui 
leur  sont  propres?  Cependant  il  n’en  est  plus  question  dans  au- 
cun autre  endroit  de  son  livre , et  on  ne  trouve  nulle  part  la 
moindre  indication  qui  puisse  nous  servir  à les  distinguer  l’un 
de  l’autre.  Que  prouve  ceci  , si.  ce  n’est  que  cette  distinction  est 
purement  imaginaire,  puisque  celui  qui  l’a  proposée  n'a  même 
lait  aucun  effort  pour  essayer  de  la  justifier? 

M.  Andral  a jugé  cette  cpiestion  avec  plus  de  réserve,  avec 
une  réserve  cjue  commandait  l’état  de  la  science  , et  il  s’est  con- 
tenté , relativement  à la  nature  du  ramollissement , de  poser  des 
questions  sans  prétendre  les  résoudre:  «Pour  nous,  dit-il 
( je  vais  rapporter  un  passage  un  peu  long  , parce  que  je  crois 
juste  d^exposer  ici  les  arguments  contraires  à mon  opinionl, 
pour  nous  ejui  pensons  que,  dans  une  foule  d’états  morbides,  il 
n’y  a pas  plus  hypersthénie  qii’asthénie,  mais  simple  perversion 
des  actions  vitales  , nous  ne  sommes  pas  plus  obligés  de  regar- 
der le  ramollissement  cérébral , ou  tout  autre  ramollissement , 
comme  une  inflanmialion  , (|uc  les  tubercules  comme  une  pneu- 
monie. C’c.st  une  altéi  ation  spéciale  de  la  nutrition,  cjui  peut  sur- 
venir sous  l’influence  de  conditions  morbides  bien  différentes  les 
unes  des  autres.  Chercher  à bien  déterminer  ces  conditions  ai- 
verscs,  voilà  le  travail  à làire,  travail  diflicile  sans  doute  , mais 
il’iuiebien  autre  importance  que  celui  dans  lequel  on  s estepuisé 


î * rîoslau,  inc,  cil.,  p.  tti'J 


NxVTUUE  DU  ramollissement.  4^9 

tlans  ces  dernieî's  temps,  lorsqu’on  a voulu  ramener  tout  ramol- 
lissement cérébral  à n’ètre  qu’une  des  formes  ou  qu’un  des  de- 
grés de  l’inllammation  des  centres  nerveux.  Nous  sommes 
intimement  convaincus  qu’en  pi-océdant  ainsi  on  s’est  engagé 
dans  une  route  ♦diamétralement  opposée  à celle  qui  doit  con- 
duire au  vrai.  Nous  aussi , nous  pourrions  grouper  des  faits 
pour  démontrer  que  le  ramollissement  est  susceptible  d etie 
produit  par  des  causes  toutes  diflcrentes  de  l’inflammation  : ainsi 
nous  trouverions  un  groupe  de  faits^d’où  il  résulterait  que  1 o- 
blitération  commençante  des  artères  l^ui  se  rendent  au  cerveau 
est  une:  des  conditions  qui  concourent  à la  production  d un 
certain  nombre  de  ramollissements.  Nous  citerions  d’autres 
faits  qui  nous  montreraient  une  coïncidence  remarquable  entre 
\ appauvrissement  du  sang  ou  une  altération  quelconque  de  ce 
liquide  et  le  ramollissement 'd’un  grand  viombre  de  nos  tissus  (1). 
Sont-ce  là  autant  de  causes  de  ramollissement  ? L’avenir  le  dé- 
cidera ; l’avenir  découvrira  sans  doute  beaucoup  d’autres  causes 
que  , dans  l’état  actuel  de* nos^connaissances  , nous  ne  sommes 
pas  même  en  état  de  soupçonner.  Tout  ce  que  nous  pouvons 
affirmer,  c’est  qu’il  faut  ebereber  ailleurs  que  dans  une  inflam- 
mation la  cause  de  tous  les  ramollissements...  (2).  >• 

Ce  sont  précisément  ces  groupes  de  faits  qu’il  fallait  clierclier 
à réunir,  dont  if  fallait  étudier  le  sens  et*la  valeur  ; on  aurait 
alors  reconnu  que  ce  que  l’on  avait  pris  pour  des  relations  di- 
‘ rectes  n’était  autre  chose  que  de  simples  coïncidences.  M.  An- 
j dral  avait,  du  reste  ^ raison  de  douter  delà  nature  constamment 
I inflammatoire  du  ramollissement  cérébral  , qui , il  faut  le  dire, 

! dans  la  grande  classe  de  faits  qui  se  rapportent  au  ramoUisse- 
1 ment  des  vieillards  , n’avait  pas  été  mieux  prouvée  que  les 
autres  conditions  d’étiologie  cpie  Ton  avait  supposées. 

(I)  Ksl-il  néoesi;aire  de  faire  remarquer  à ce  propo.s  que  les  causes  de  ce 
^curc,  a;.;l.<;s;mlsiir  laijjcnéi  alilc  des  or;^aue.s  devraient  déterminer, presque  tou- 
jours au  moins,  des  ramollissemVntsgénéraux,  et  ne  sauraient  donner  lieu  à des 
ramollissements  (lartlels  j or,  rien  île  plus  rare  nue  le  ramollissement  ge'ne!- 
ral  du  cerveau;  j’en  ai  traité  précédemment.  Je  rappellerai  ici  qne  sur  cent 
SûixanU'-on7.e  cas,  M.  Andrallui-  meme  ne  compierpie  rpiatre  ramoHifiie- 
inentsde  la  totalité  des  h(!mi.sphères,  et  rjue  moi.  sur  plus  de  cent  cas,  je  n’en 
i rencontré  que  deux,  et  encore  douteux. 

('2)  Aiidrnl  , Cliuif/ue,  t.  v,  p.  .'i2()  et  527. 


/ 


RAMOLLISSEMENT  CÉr^BRAL. 


470 

C’est  cette  lacune  que  j’ai  cherché  à remplir  dans  ce  travail  ; 
c’est  à cette  démonstration  que  j’espère  être  parvenu. 

,*§  III. 

IA  • 

M.  Rostan  a cru  voir  encore  dans  le  ramollissenient  cérébral 
une  affection  scorbutique  : «...  Dans  quelques  circonstances  , la 
substance  cérébrale  est  d’un  rouge  lie  de  vin  , présente  exacte- 
ment l’apparence  de  tacliès,  d’ecchymoses  scorbutiques  , et , 
dans  ces  cas  , il  n’a  existé  dui’ant  la  vie  des  malades  aucun  signe 
de  réaction.  Cet  aspect  n’est  nullement  celui  d’un  ti.ssu  en- 
flammé. Il  offre  la  plus  grande  analogie  avec  l’hémorrhagie 
scorbutique  , et  jusqu’à  ce  qu’on  considère  celle-ci  comme  in- 
flammatoire , il  nous  sera  permis  de  regarder  cet  état  du  cer- 
veau comme  n’étant  pas  une  phlegmasie.  Ces  deux  altérations 
pathologiques  sont  incontestablement  les  plus  fréquentes , ce 
qui  me  porte  à croire  que  , dans  Je  plus  grand  nombre  des  cas  , 
le  ramollissement  n’est  pas  inflammatoire  (1).  » Ceci  veut  dire  , 
si  je  ne  me  trompe,  que,  pourM.  Rostan  , le  ramollissement 
cér^ral  est  quelquefois  une  affection  scorbutique.  C’est  là  as- 
surément une  question  fort  grave,  et  qui  valait  bien  d’être 
sérieusement  discuU’e  , ou  au  moins  appuyéè  de  quelques  ob- 
servations ; mais,  soit  que  cet  auteur  l’ait  regardée  comme  trop 
évidente  pour  mériter  de  l’arrêter  plus  longtemps  , soit  qu’au 
contraire  il  n’ait  voulu  que  jeter  une  idée,  sans  s’inquié- 
ter de  ce  qu’elle  pourrait  devenir  , il  est  certain  qu’il  n’a  trouve 
pour  elle  ni  d’autres  faits  , ni  d’autres  raisonnements,  et  qu  il 
n’est  pas  question  davantage  dans  le  reste  de  son  livre  de  la 
nature  scorbutique  du  ramollissement  cérébval. 

Dans  un  autre  ouvrage , cepeildant  , M.  Rostan  reproduit 
cette  même  idée  , mais  sous  une  forme  d’argumentation  peu 
sévère  : « Si  l’on, admet,  dit -il,  un  état  scorbutique  dans  les  or- 
ganes, si  l’on  admet  des  maladies  hyposthéniques  , et  même  des 
altérations  de  ^lutrition  , je  ne  sais  pas  du  tout  pourquoi  l’on 
rejetterait  une  allcratiou  .'cérébrale  de  cette  nature  , sui tout 
lorsque  , pendant  la  vie  , tous  les  phénomènes  morbides  géné- 


(t)  Ro.sian,  Recherches.,.^  p. 


natuive  du  ramollissement*  4 

raux  sont  ceux  qui  accompagneut  ces  malades  (1).  . U ne  s’agit 
uas  de  savoir  si  on  doit  rejeter  une  semblable  ntamere  de  voit, 
Lis  si  l’on  doit  l’admettre.  Or  ce  n’est  pas  sur  quelque  chose 
^e  vague , comme  la  figure  d’une  altération  , qu  ou  peut  baser 

1’anDi'écia.tion  de  sa  natui’6. 

Le  scorbut  étant  une  maladie  générale , la  premtere  condtuon 
poGr  admettre  qu’une  lésion  du  cerveau  en  dépend  , est  - 
Trouver  dans  quelques  autres  parties  du  corps  des  traces  de  cet 
état  morbide  qui  caractérise  les  affections 
dans  aucune  des  observations  de  M-  Rostan  , deM  Andral,  du 
docteur  Abercrombie  , dans  aucune,  des  miennes  , dans  aucune 
de  celles  que  j’ai  empruntées  à bien  d’autres  auteurs,  je  n ai 
rencontré  de  coïncidence  entre  un  ramollissement  du  ceiveau  e 
quelques  lésions  scorbutiques  des  autres  organes  Maintenant  il 
n’y  aurait  eu  rien  d’étonnant  à ce  qu’une  semblable  coïncidence 
se  fût  rencontrée  maintes  fois  entre  deux  affections  communes 
dans  les  hospices  de  vieiUards  , autrefois  au  moins  , car  depuis 
que  les  indigents  y sont  soumis  à de  meilleures  conditions  iiy 
giéniques,  le  scorbut  est  devenu  presque  rare  dans  ces  asiles  , 
et  le  ramollissement  cél  ébrai  ne  parait  p^s  y avoir  diminue 
de  fréquence;  mais  enfin  je  n’en  connais  pas  d exemple;  ce 
seul  fait  juge  la  question  (2). 

§ IV.  - 

% 

Je  crois  avoir  démontré  que  les  diverses  doctrines  que  ]• 
viens  d’analyser  pèchent  par  la  base,  c est-a-diie  et  pai  la  lo 
gique  et  par  l’observation.  Par  la  logique,  car  à presque  toutes 
il  est  possible  d’opposer  dès  objections  (jui  les  enta^:hent  d im- 
possibilité ; par  l’observation,  car  il  est  évident  qu’elles  n ont 
pas  été  inventées  d’après  les  faits,  et  que  ces  deinieis  résistent 
invinciblement  aux  efforts  que  l’on  pourrait  tenter  pour  les  y 
rattacher.  ^ 

(t)  Rostan,  Traité  élément,  du  diagnostic,  t.  n,  P-  304,  1826. 

(2)  Ce  qui  n’est  pas  exact  pour  le  ramoHis.seraenl,  est  irès-vrarpour  l’in- 
filtration sanquine  du  cerveau.  Il  n’est  nullement  rare,  en  effet , dans  les 
maladies  hémorrhagiques , de  trouver  quelques  lésions  de  ce  genre  dans 
le  cerveau  et  le  cervelet,  soit  .sous  lorme  de  petits  foyers,  soit  sous  forme  de 
taches,  de  pétéchies  J’ai  cité  quelques  faits  de  ce  genre  dans  ma  dissertation 
inaugurale,  et  aussi  dans  le  chapitre  de  cet  ouvrage  sur  1 hsfiltration  sab- 
gttibe. 


i 


ramollissement  cérébual. 

J ai  voulu,  me  plaçant  sur  leur  terrain  , combattre  ces  iliver- 
es  doctrines  par  la  discussion  et  les  ramener  à ce  qu’elles  sont 
léelleinent,  des  liypotlièses  fruit  d’idées  préconçues  chez  les  uns, 
ou  simplement  du  doute  chez  les  autres.  Mais  il  aurait  pu  suf- 
fire réellement  de  renvoyer  aux  descriptions  que  j’ai  faites  pré- 
cédemment et  deslcsions  anatomiques  qui  constituent  le  ramol- 
lissement cérébral  et  des  symptômes  qui  les  accompaj^nenl,  pou  r 
démontrer,  moins  encore  que  le  ramollissement  célébrai  est 
une  encéphalite,  que  ceci:  que  le  ramollissement  ne  peut  être 
lien  de  ce  que  1 on  avait  supposé  ; ni  une  lésion  anémique,  ana- 
ogue  a la  gangrène,  résultat  delà  diminution  de  la  circulation 
sanguine  ; ni  une  alteration  senile,  produit  de  l’appauvrisse- 
ment de  l’oconoinie.;  ni  une  lésion  scorbutique,  etc. 

Lu  effet,  pour  attaquer  celte  conclusion  négative,  il  fau- 
drait nier  que  le  tableau  que  j’ai  tracé  du  ramollissement  fût 
vrai,  il  faudrait  en  recommencer  une  autre  description. 

Car  la  rougeur  qui  accompagne  toujours  le  ramollissement 
a son  début,  et  c|ui  plus  tard  y laisse  presque  constamment 
pour  traces  une  coloration  jaune  ; les  modifications  de  texture 
qui  le  caractérisent  à un  degré  plus  avancé,  ces  plaques  jaunes 
des  circouYolutioiVs,  ces  infiltrations  celluleuses,  ces  indura- 
tion^, ces  cavités  organisées,  etc.,  tout  cela  caractérise  des 
lésions  de  nutrition  absolument  inconfjaatibles  avec  les  expli- 
cations que  l’on  avait  irtiaginées  sur  celte  maladie.  J'én  pour- 
rais dire  autant  de  mille  circonstances  des  symptômes  , et 
du  début,  et  de  la  marche  du  ramollissement. 

Maintenant  tous  ces  faits  démontrent-ils  également  que  1p. 
ramollisseirfent  soit  une  encéphalite  ? Je  le  crois  ; mais  , si 
j’erre  sur  ce  point,  il  faudra  au  moins  que  l’on  ait  recours  à 
une  interprétation  toute  nouvelle,  pour  rendre  compte  des 
phénomènes  que  j’ai  décrits;  car,  encore  une  fois,  aucune  de 
cellesque  l’on  a proposées  n’est,  à mon  sens,  désormais  admissible. 

Je  ne  m’arrêterai  pas  davantage  ici  sur  celte  question  de 
l’encéphalite  ; j’y  ai  consacré  trop  de  place  dans  le  cours  de 
ce  travail,  cl  les  faits  anatomiques  et  les  faits  symptomatiques 
(|ue  j’ai  rapportés  me  paraissent  concourir  trop  merveilleusement 
à sa  démonstration  , pour  que  je  croie  nécessaire  d’exposer  ici 
de  nouveaux  arguments  dans  l’intérêt  de  cette  doctrine. 


47?. 


hamoi.mssement  blanc. 

Mais  il  est,  je  le  sais,  une  réflexion  qui  naît  d’elle-niêine  à 
ce  propos  : il  est  possible  que  quelques-uns  de  ces  faits,  que 
la  plupart  d’entre  eux  puissent  être  rapportes  a 1 encéphalite  ; 
mais  n’y  en  a-t-il  pas  un  certain  nombre  qui  n’appartiennent 
pas  à cette  classe,  et  qui  doivent  en  être  distraits  pour  être 
rappoitéscà  d’autres  causes?  Tel  est  le  raisonnement  que  je 
faisais  à l’époque  où,  commençant  à étudier  le  ramollissement 
cérébral,  j’étais  frappé  du  peu  d’accord  que  je  trouvais  entre 
mes  observations  et  les  opinions  cjue  soutenaient  tant  d au- 
teurs recommandables,  .l’attendais  chat|ue  jour  lappaiiliou 
(le  ces  faits  dont  ils  nous  avaient  présenté  1 histoire,  et  ([ui 
devaient  former  à côté  de  l’encéphalite  d’autres  sériés  bien  dis- 
tinctes. Puis  plus  tard , supposairt  que  üobservation  isolee  de 
chaque  fait  ne  m’avait  pas  permis  d’en. apprécier  exactement 
la  nature,  je  m’apprêtai,  eir  réunissant  les  matériaux  que  j a- 
vais  rassemblés,  à écarter  de  la  masse  les  faits  spéciaux,  ceux 
dont  la  nature  particulière  exigerait  la  séparation  du  ramollis- 
sement inflammatoire.  Mais  il  ni’a  été  impossible  de  ne  pas 
voir  dans  tous  ces  faits  une  complète  identité  de  nature,  que 
pouvaient  n’.asquer  un  instant  quelcpies  particularités  de  phy- 
sionomie , mais  qui  ressortait  avec  la  plus  grande  evidence  a 
un  examen  attentif. 

Il  m’a  donc  été  impossible  dès  lors  d’admettre  plusieurs  es- 
pèces de  ramollissements,  parce  que,  d’une  part,  aucune  de 
celles  qu’avaient  établies  les  auteurs  ne  paraissait  acceptable 
à mon  esprit  ; et  que,  d’une  autre  part,  je  ne  trouvais  au- 
cune distinction  possible  à établir  parmi  les  faits  que  j’avais  ob- 
ser^s. 

§v. 

Faut-il  donc  définitivement  refuser  d’admettre  des  ramol- 
lissements primitivement  blancs?  .4 vaut  de  répondre  à cette 
question  il  importe  de  bien  préciser  l’état  de  la  science  sur  ce 
sujet. 

Pour  la  plupart  des  auteurs,  il  existe  deux  espèces  distinctes 
de  ramollis-semont  : un  ramollissement  rou^e  et  un  ramollisse- 
ment blanc.  Ce  seraient  là  deux  altérations  toutes  differentes, 
et  qui  n’auraient  de  commun  entre  elles  que  leur  siège  dans  les 


R amollissement  cérébral. 


474 

centres  nerveux  et  le  fait  de  la  diminution  de  consistance  de  la 
pulpe  cérébrale.  Par  un  abus  de  langage,  on  comprend  généra- 
lement sous  celte  seconde  dénomination  tous  les  ramollissements 
qui  ne  présentent  pas  de  rougeur,  car  on  ne  saurait  considérer 
comme  sérieuses  les  distinctions  que  l’on  a voulu  établir  entre 
tous  les  ramollissements  de  couleur  différente,  griV,yÆ«7ie^^,  etc. 

Rien  n’est  plus  facile  que  de  démontrer  que  cette  distinction 
absolue  du  ramollissement  rouge  et  du  ramollissement  blanc 
est  tout  à fait  contraire  à la  vérité.  Il  nous  a été  parfaitement 
aisé  d’établir  cette  division  générale  du  ramollissement  aigu  et  du 
ramollissepient  chronique,  à laquelle  on  voit  précisément  cor- 
respondre avec  la  plus  grande  fidélité  l’absence  ou  la  présence 
de  rougeur  dans  le  ramollissement. 

Si  quelques  faits  semblent  en  opposition  avec  les  propositions 
générales  c]ue  j^ai  établies,  j’ai  démontré  que  la  plupart  ren- 
traient cependant  dans  la  règle  commune. 

Ainsi,  parmi  les  faits  que  l’on  nous  donne  comme  exemples  de 
ramollissements  récents  sans  rougeur,  nous  trouvons  chez  les 
uns  une  coloi'ation  jaune,  qui  montre  que  du  sang  les  avait  pé- 
nétrés dans  leur  principe  •,  chez  les  autres,  un  état  de  suppura- 
tion qui  explique  la  disparition  de  la  rougeur  en  même  temps 
qu’il  témoigne  de  leur  nature.  Beaucoup  de  ces  prétendus  ra- 
mollissements blancs  récents  ne  sont  autre  chose  que  des  ramol- 
lissements chroniques  : tantôt  on  manque  de  renseignements  ou 
on  n’en  a que  d’incomplets  sur  l’époque  qqi  a précédé  les  ac- 
cidents de  la  fin  de  la  vie  ; d’autres  fois,  on  n’a  pas  su  appré- 
cier la  valeur  de  phénomènes  que  l’on  a négliges  ou  consideies 
comme  des  prodromes,  taudis  qu’ils  annonçaient  déjà  le  enve- 
loppement lent  et  graduel  de  l’altération  organique  ; d autres 
fois  enfin  la  maladie  était  restée  latente  pendant  sespiemières 
périodes,  et  l’on  avait  faussement  fixé  sou  début  à l’époque  où 
avaient  apparu  ses  premières  manifestations. 

D’autres  fois  encore,  on  s’est  trompé  sur  la  nature  de  l’alté- 
ration anatomique,  et  l’on  a pris  pour  un  ramollissement  ce  qui 
n’était  qu’un  véritable  œdème  du  cerveau.  Ceci  s’applique 
surtout  au  ramollissement  blanc  des  parties  centrales  du  cer- 
veau, septum,  voûte  à trois  piliers.  Il  est  certain  que  cette  al- 
tération se  montre  en  général  dans  des  conditions  toutes  parti- 
culières, et  qui  la  distinguent  entièrement  de  toutes  celles  dont 


475 

HAMOI-LISSEMENT  BLANC. 

'.,nî  t^nt  d’exemples  dans  cet  ouvrage.  Ce  ramol- 
nous  avons  reuni  tant  a exeu  j » • i Tnl  nas  as- 

■oûrirwn  histoire  : d’ailleurs  c’est  dans  les  hôpitaux  consa- 
crés à l’enfance,  et  non  dans  les  hospices  de  vieillards,  qu  il 

“u  que  ce  ra^ollisseuieut  se  trouve  |ié  ^uue  faç^ 
toute  spéciale  aux  épanchements  ventriculaires  ; c ^ 

se  rencontre  rarement  sans  coïncider  avec  un  epanchement 
séro-purulent  ou  séreux  des  ventricules,  «que  d un  autie  co 
on  rencontre  très-rarement  ces  épanchements , a l état  chi 
nique  surtout,  sans  un  semblable  ramollissement. 

Cette  double  circonstance  conduit  naturellement  à penser  qu  il 
existe  entre  ces  deux  phénomènes  une  relation  de  cause  à effet, 
et  il  ne  répugne  nullement  à l’esprit  d’admettre  que  ce  ramo  - 
lissement soit  dû  à une  imbibition  du  tissu  cérébral  pai  le  li- 
quide épanché,  à un  véritcable  cedème.  Je  m’exprime  ainu,  parce 
que  ie  dois  convenir  qu’il  n’existe  actuellement  aucune  ilemonsv 
tration  directe  ou  indirecte  de  la  vérité  de  celte  propoMtion  : 
c’est  simplement  une  vue  de  l’esprit;  mais  je  Ini  ci  ois  lean- 

coup  deviaisemblance  et  même  de  probabilité.  i r i 

J’ai  dit  précédemment  (1)  quelque  chose  de  la  facnli«>  d al3- 
sorption  et  d’imbibition  dont  jouit  la  substance  cérébrale  . Ce  que 
nous  supposons  ici  serait  un  phénomène  d’iinbibinon  : j’ai  rap- 
pelé que  de  semblables  phénomènes  se  passaient  assez  fréquem- 
ment et  avec  une  grande  évidence  dans  la  pulpe  cérébrale  ; en- 
suite, et  j’en  appelle  à toutes  les  personnes  qui  ont  observe  ces 
ramollissements,  il  est  certain  que  cette  pulpe  blanche,  molle, 
déliquescente,  ou  plutôt  comme  délayée,  atout  à fait  l’air  d’une 

substance  infiltrée,  imbibée  de  liquide. 

Je  sais  que  l’on  a argué  contre  cette  opinion  des  cas  beaucoup 
plus  rares,  où  l’on  trouve  les  parties  centrales  du  cerveau  saines 
et  même  très-fermes  au  milieu  de  semblables  épanchements,  et 
de  ceux  où  des  ramollissements  tout  semblables  en  apparence 
se  montrent  sans  épanchement  notable.  Mais,  de  ce  cjue  nous 
ne  savons  pas  quelles  conditions  peuvent  présider  à cette  infil- 
tration séreuse,  à cet  œdème  de  la  pulpe  nerveuse,  ou  s y oppo 

i 


(1)  Voyez  P . 347. 


nAAIOLLISSRMENT  CkRÉbRAL. 


476 

sev,  il  ne  s ensuit  pas  que  ce  pliënomène  ne  puisse  avoir  lieu  dans 
certaines  circonstances  données, et  manquer  dans  d’autres.  Sou- 
vent, dans  ces  derniers  cas,  il  y a au  contraire  un  certain  degi’é 
d induration  de  ces  parties  : ne  serait-ce  pas  précisément  le  tra- 
vad  pathologique  auquel  est  due  cette  induration  qui  se  serait 
oppose  à 1 infillration  de  la  sérosité?  Lorsque  l’on  trouve  de 
.semblables  ramollissements  sans  épanchement,  n’est-il  pas  pos- 
sible cjue  le  liquide  épanché  ait  disparu  par  résorption,  à une 
epocjue  quelconcjue  avant  la  mort,  tandis  que  la  pulpe  infiltrée 
n aurait  pu  revenir  à son  état  normal  ? Ce  n’est  là  cpa’unesupposi- 
tion,  mais  enha  cette  supposition  repose  sur  un  fait  dont  la  pos- 
sibilité ne  saurait  être  contestée.  .Te  ne  veux  pas  poursuivre  plus 
loin  une  cjueslioii  cjui  ne  saurait  être  résolue  ici  ; j’ajouterai  seu- 
lement c{ue  j’ai  consulté  sur  ce  sujet  plusieurs  médecins  ayant 
appartenu  à l’hôpital  des  Enfants-Malades,  et  c(ue  tous  ont  rap- 
porte de  l’examen  des  exemples  nombreux  de  ce  genre  qui  ont 
passé  sous  leurs  yeux  , l’impression  ou  l’opinion  que  ce  ne  sont 
autre  chose  que  des  infdlralions  séreuses,  des  œdèmes  de  la 
pulpe  nerveuse  ; je  m’appuierai  surtout  avec  plaisir  de  l’auto- 
rité des  docteurs  Barthez  et  Rilliel  (1). 

Maintenant  il  est  certain  qu’il  existe  dans  la  science  quelques 
observations  de  ramollissements  blancs,  ou  plutôt  sans  rougeur, 
et  qui  paraissent  aroir  suivi  une  marche  tout  à fait  aiguë.  .Te  vais, 
rapporter  ici  cpielques  exemples  de  ce  genre,  car  c’est  mon  de- 
voir d’exposer  les  faits  qui  sont  en  contradiction  avec  mes  opi- 
nions, tout  aussi  bien  que  ceux  qui  cadrent  le  mieux  avec  mes 
idées  (2). 


(t)  « Dans  ({uelques  circonstances,  disent-ils  en  faisant  l’anatomie  patho- 
logique de  l’hydrocéphalie  aiguë,  la  substance  cérébrale  participe  à l’hy- 
tlrrqésie,  cl  elle  e.st  molle,  crémeuse  dans  les  parties  qui  l’avoi.sinent.  Ainsi 
ilans  riiydrocéphalk;  venu  iculairc,  les  parois  de  ces  cavilé.s,  la  voûte  .i  troi.s 
piliers  |)(;uvenl  être  ramollies  et  rede/yirt/iecs,  soit  sponlanémeul,  .soit  a la 
suite  de  l'imbibilion  du  liquide  ventriculaire.  {^Trailc  chn.qtie.  cl  pratique 
lies  malaJics  des  eiijitiils,  l.  i , p.  782,  IS13.  ) 

(2)  Le  cervçau  peut  encore  se  ramollir  sous  (luelques  iuilucnccs  spéciales  , 
mais  ([iii  ne  sauraient  donner  lieu  à aucune  altération  que  l’on  piii.s.se  coii- 
l'ondre  avec  ci  lles  f[ue  nous  avons  décrites  : ainsi  la  conlu.sion  (.lu  ceneau  ey 
lüules  les  violences  extérieures  qui  viennent  à agir  directeiucul  ^ir  cet  r./-' 


IX-OIOLLISSEMEKT  TjLAKC. 


477 


Observation  119.— Perte  de  connaissance,  résolution  et  msensibihlc 
^c.uVales  ; mort  au  bout  d’un  jour  et  demi.  - Ramollissement  de  la 
protubérance  annulaire  , blanche  en  dessus  , grisâtre  en  dessous. 


Une  femme,  âgée  de  trente- quatre  ans,]ouissak  depuis  quel- 
que temps  d’une  santé  précaire,  et  se  plaignait  de  douleurs 
vagues  dans  la  tète  , etc.  Le  21  mars,  vers  minuit,  elle  perdit 
tout  à coup  connaissance,  l’usage  des  sens  et  celui  de  la  paiolc  , 
elle  resta  dans  cet  état  jusqu’au  lendemain,  où  elle  fut  conduite 
à rilôlel-Dieu.  Elle  était  alors  dans  un  profond  assoupissement,, 
la  tète  renversée  en  arrière,  les  ÿeux  fixes  et  slrabiles,  les  pu- 
pilles contractées  et  immobiles  à l’aspect  d’une  bougie  ; les  mem- 
bres paralysés  cédaient  à leur  propre  poids  ; sensations  presque 
milles,  sensibilité très-émoussée,  cris  plaintifs,  stertor  ; pouls  na- 
turel. Le  23,  mêmeétat.  Le  soir,  accroissement  des  symptômes. 
Mort,  la  nuitsuivanle. 

Aalopsie. — Le  cerveau,  proprement  dit,  n’offrait  aucune  al- 
tération ; il  n’y' avait  que  très-peu  d’eau  dans  les  ventricules  la- 
téraux ; mais  la  protubérance  était  profondément  altérée  clans 
sa  substance,  qui  se  trouvait  réduite  en  une  sorte  de  bouillie 
blanche  à la  partie  supérieure,  et  grisâtre  inférieurement.  Le 
cervelet  ne  pré.sentait  aucune  altération  (1). 


güue.  Du  reste,  ce  ramollissement,  tout  mécanique  d’abord,  ne  tarde  pas  à 
devenir  inflammatoire  si  la  vie  se  prolonge.  ^ 

L’œdème  du  cerveau  pourrait  être  pris,  dans  quelques  circonstances,  pour 
un  ramollissement  général  du  cerveau  ou  d’un  licmispbèrc.  Ainsi , dans 
la  quatrième  observation  du  mémoire  de  iM.  llaikcm,  plusieurs  fois  ciié  dans 
cet  ouvrage,  on  voit  qu’un  bémisplière,  au  bout  de  quelques  jours  de  mala- 
die, était  réduit  presque  en  totalité  en  une  substance  molle,  pultacée,  très- 
peu  consistante,  comme  de  la  bouillie.  Le  volume  de  cet  bémisplière  était 
supérieur  à celui  du  côté  opposé,  «7  était  extrdineinml  injiliiv  de  sdrosiic,  et 
scs  circonvolutions  étaient  dilatées  et  aplaties. 

La  gangrène  du  cerveau,  cette  altération  dont  l’e.visience,  liormis  quel- 
ques cas  de  lésions  traumatiques,  est  presque  douteuse,  car  on  n’en  possédé 
guère  d’exemples  autbentiques,  doit  s’accompagner  également  de  ramollis- 
sement. « La  partie  du  cerveau  gangrenée,  dit  Baillie,  est  de  couleur  rougt- 
brunâlrc,  cl  n’a  pas  plus  de 'consistance  et  de  fermeté  que  la  iioire  la  plus 
pourrie.  » ( Bailli»,  ylnat.  /lalhoL,  Irad.  franc.,  sccl.  xv,  p.  421 .) 

(1)  Lallemand,  dire  1,  p.  60  (Extrait  du  Journal  complémcuUÙrc  du 
ükl.  des-  SC  uidd-,  4'^  cahier,  1818,  p.  304.  M.  Bricbelcau .) 


478 


HAMOLLISSEMIIHT  CÉRÉBUAL. 


Observation  120.  — Hémiplégie  droite  subite,  perte  de  la  parole  , 
mort  au  bout  de  cinq  jours.  — Ramollissement  sans  changement  de 
couleur  du  corps  strié  gauche. 

Une  femme,  âgée  de  soixante-treize  ans,  d’une  bonne  santé, 
ne  se  plaignant  jamais  de  la  tête,  sentit  un  jour,  sans  perdre  con- 
naissance, sa  jambe  droite  fléchir  sous  elle,  et  elle  tomba.  On  la 
releva  sur  le  champ  •,  elle  était  paralysée  du  côté  droit.  Le  sur- 
lendemain, hémiplégie  droite  complète  j point  de  contracture, 
conservation  de  la  sensibilité.  On  assure  qu’il  n’a  existé  ni 
raideur,  ni  convulsions.  La  parole  est  abolie  ; l’intelligence  pa- 
raît bien  conservée.  Lorsqu’on  lui  demande  où  elle  souffre,  elle 
porte  la  main  à la  joue  droite.  La  bouche  est  déviée  à gauche  ; 
les  pupilles  naturelles  : les  sens  intacts.  La  langue  est  sèche  et 
rouge,  le  pouls  dur  à 80,  la  face  pâle,  la  respiration  fréquente 
et  sifflante.  Une  saignée  est  pratiquée  et  répétée  le  lendemain  ; 
le  pouls  était  alors  à 116,  et  la  respiration  plus  fréquente.  La  se- 
conde saignée  seule  se  couvrit  d’une  couenne.  Les  deux  jours  sui- 
vants, on  observa  des  signes  d’engouement  du  poumon,  et  la 
malade  succomba  dans  un  état  d’asphyxie,  le  cinquième  jour, 

u4utopsie.  — Les  grosses  veines  qui  rampent  entre  les  circon- 
volutions sont  gorgées  de  sang  ; la  pie-mère  est  injectée.  Les 
circonvolutions  ne  le  sont  point.  Le  corps  strié  du  côté  gauche 
a perdusa  consistance  accoutumée.  Le  ramollissement,  dont  il  est 
le  siège,  commence  à trois  lignes  au-dessous  de  sa  surface  exté- 
rieure, et  en  occupe  à peu  près  toute  l’étendue.  Il  n’y  a vérita- 
blement que  sa  partie  la  plus  superficielle  qui  ait  conservé  sa 
consistance,  et  qui  forme  l’enveloppe  d’une  coque  remplie  d’une 
bouillie,  dans  laquelle  on  retrouve  la  couleur  ordinaire  du  corps 
strié.  On  y distingue  encore  les  deux  substances  grise  et  blanche. 
Celle-ci  est  seulement  d’une  teinte  moins  brillante.  Quelques 
vaisseaux,  isolés  de  la  substance  nerveuse  et  comme  disséqués, 
traversent  les. parties  ramollies,  qui  ne  présentent  elles-mêmes 
aucune  injection,  aucune  trace  d’épanchement  de  sang.  Les  par- 
ties environnantes  sont  parfaitement  saines  (1). 


(1)  Andral,  Clinique  medicale,  t.  v,  p.  4b8. 


N ■ « 

kamollissement  blanc. 


479 


0.s.nv.t,o»  .1.  .-Hémiplégi»  gauche.  Mort  au  bout  deucuf  jours. 
— Ramollissement  blanc  de  l’hémisphère  droit. 


Un  homme  de  soixante-dix  ans,  javdimer,  ti.s-fort  et  lobus  e 
pour  son  âge,  est  pris  d’une  violente  céphalalgie  et  ^ 
plégie  gauche.  Il  s’y  joignit  un  délire  presque  continuel , et  il 
mourut  dans  cet  état  le  neuvième  jour.  L hemiplegie  demeuia 
complète  jusqu’à  la  ûn,  et  ne- s’accompagna  jamais  de  contrac- 
ture La  sensibilité  demeura  intacte  ; dans  les  derniers  jours  seu- 
lement, elle  parut  un  peu  exagérée.  ^ 


Autovsie.  — \\  n'y  a aucune  injection  dans  le  cerveau  ni  dans 
les  méninges.  Au  devant  du  centre  ovale  droit,  ou  trouve  un 
ramollissement  blanc,  de  l’étendue  d’une  petite  noix,  se  déta- 
chant en  flocons  sous  un  filet  d’eau.  Le  corps  strié  est  tres-mol, 
sans  rougeur  ni  injection  (1). 


Obsebvatiok  122.— Céphalalgie,  attaque  apoplectiforme,  hémiplégie 
droite  J mort  le  second  jour.  — Ramollissement  général  du  cerveau. 

Une  femme  de  soixante-quatorze  ans  était  aftectée  d un  can- 
cer de  l’utérus.  Un  jour  elle  se  plaint  de  céphalalgie.  Trois  jours 
après,  elle  tombe  dans  un  état  apoplectique  avec  paralysie  des 
membres  droits,  flasques  et  sans  roideur  ; la  sensibilité  persiste, 
elle  donne  des  signes  de  connaissance.  Le  lendemain,  stertor, 
assoupissement  profond,  mort. 

Autopsie  dix  - huit  heures  après  la  mort.  — Sérosité  rouge, 
abondante  dans  l’arachnoïde.  Le  cerveau  s’affaisse  sous  son  pro- 
pre poids,  et  offre  un  état  de  ramollissement  général.  L hémi- 
sphère gauche  se  trouve  dans  un  état  de  ramollissement  piesque 
diffluent  ; le  droit  est  également  ramolli  partout,  mais  à un  degie 
moindre  ; la  substance  corticale  du  lobe  postérieur  est  moins  ra- 
mollie que  la  blanche  ; il  en  résulte  que  ce  lobe  forme  une  sorte 
de  poche  qui  renferme  la  substance  blanche  en  détritus.  Paitout 
I la  couleur  naturelle  est  conservée.  La  pie-mère  enlève  partout 


(1)  Shedel,  Thèse  inaugurale,  1828,  n<>  73. 


l■>■^.MOLUSSliMri^T  cébéiuiAl. 

la  s uLsIaiicc  coi  licale.  Le  cei  velct  est  remarquablement  mol,  sans 
paraître  altère  dans  sa  texture (l). 

Voici  rjuatre  observations  qui  paraissent  des  exemples  aussi 
certains  que  possible  de  ramollissement  aigu  sans  rougeur.  Si 
trois  de  ces  individus  étaient  septuagénaires,  deux  d’entre  eux 
étaient  bien  portants  et  robustes,  et  un  quatrième  n’avait  que 
trente-cpiatre  ans.  Supposerons-nous  qtie  si  ces  altérations  n’ont 
pas  offert  de  rougeur  sur  le  cadavre,  c’est  quelles  existaient  à 
1 état  latent,  des  une  epoque  antérieure  à l’apparition  des  acci- 
dents qui  ont  termine  la  vie,  ou  bien  encore  que  les  traces  de  la 
congestion  qui  les  avait  accompagnées  au  moment  de  leur  for- 
mation avaient  disparu  tout  à la  lin  de  la  vie  ou  après  la  mort? 
Je  ne  pielends  nullement  que  les  choses  aient  dû  se  passer  ainsi 
Je  me  suis  déjà  expliqué  relativement  à cette  dernière  hypo- 
thèse ; j ai  dit  que,  sans  en  nier  précisément  la  possibilité,  je  ne 
pensais  pas  que  la  congestion  cérébrale  disparût  après  la  mort, 
comme  le  peuvent  faire  les  injections  vasculaires  de  certains  or- 
ganes. Quant  aux  ramollissements  latents,  j’ai  dit  et  prouvé 
qu’ils  pouvaient  facilement  induii'e  en  erreur,  touchant  l’origine 
d’altérations  qui  auraient  existé  pendant  un  certain  temps  sans 
donner  lieu  à aucune  manifestation  de  leur  présence  j mais  ce 
fait,  aisé  à constater  dans  certaines  circonstances,  n’est  pas  tou- 
jours facile  il  appliquer  à un  cas  donné  ; aussi  n’aurais  je  pas 
même  parlé  de  ces  deux  hypothèses,  car  on  ne  me  reprochera  ja- 
mais de  forcer  les  faits  pour  les  plier  à mes  doctrines,  si  elles 
n’avaient  déjà  été  mises  en  avant,  précisément  par  des  personnes 
f]ui  ont  soutenu  l’existence  d’un  ramollissement  primitivement 
blanc,  ou  en  ont  rapporté  des  observations.  Ainsi,  M.  Shédel,à 
qui  nous  avons  emprunté  l’observation  122,  dit  positivement 
qu’il  pense  que  ce  ramollissement  était  latent,  au  moins  en  par- 
tie, et  qu’il  existait  avant  l’apparition  des  accidents  observés. 
D’un  autre  côté,  nous  trouvons  à l’article  Ramollissement  du 
ceri'eau,  du  Compendium  de  médecine  pratique,  le  passage  sui- 
vant : «M.  Dechambre  n’a  vu  cpie  dans  un  cas  le  ramollissement 
partiel  du  cerveau  débuter  par  des  symptômes  subits.  La  ma- 
lade perdit  instantanément  connaissance,  et  fut  prise  decotivul- 


(1)  Sliedcl,  Thèse  cilve. 


RAMOLUSSEMEWT  BI.ANC.  ^ ‘ 

sions  (Ui  côlé gauche.  Quand  ces  spasmes  eurent  cessé,  l’hémiplé- 
gie était  complète.  Elle  diminua  rapidement  en  quelques  jours, 
puis  se  reproduisit  à la  suite  d’une  nouvelle  attaque  semblable, 
pour  persister  enfin  jusqu’à  la  mort.  On  ne  trouva  rien  autre 
chose  à l’autopsie  qu’un  ramollissement  blanc  dans  l’héimsphere 
droit.  Il  est  très-probable,  dit  M.  Dechambre,  qu’une  forte  con- 
gestion sanguine,  actuellement  disparue,  a été  le  point  de  dépait 
de  cette  altération  (1).  « Je  laisse  à la  sagacité  du  lecteur  de  dé- 
cider si  quelqu’une  de  ces  hypothèses  est  applicable  aux  faits 
précédemment  cités,  ou  s’il  faut  voir,  comme  je  suis  tout  disposé 
à l’admettre,  des  exceptions  réelles  ou  apparentes  aux  lois  aux- 
quelles se  montre  généralement  soumis  le  ramollissement  céré- 
bral. 

Voici  quelques  autres  faits  donnés  comme  exemples  de  ramol- 
lissement blanc,  et  qui  nous  offrent  bien  moins  de  ceilitudc. 

Observation  i25.  ■ — Attaques  apoplectiformes  légères;  obtusion  gê  - 
nérale  des  facultés.  Perte  subite  de  connaissance,  paralysie  du  bras 
droit  ; mort  au  bout  de  trois  jours.  — Ramollissement  blanc  du  lobe 
antérieur  gaucbc.  .Altérations  anciennes  multiples  des  circonvolutions 
(plaques  jaunes). 

Benoît,  âgée  de  quatre-vingt-un  ans,  était  très-sujette  aux 
étourdissements  avec  douleur  de  tête  et  perte  de  connaissance. 
Deux  fois,  dans  le  courant  de  1834,  savoir,  le  6 mai  et  le  16  no- 
vembre, elle  fut  reçue  à l’infirmerie  pour  des  contusions,  suites 
de  cliutes  faites  au  moment  de  la  perte  de  connaissance.  Son  in- 
telligence était  obtuse,  son  air  hébété,  ses  réponses  lentes;  il  y 
avait  affaiblissement  général,  mais  point  de  paralysie.  Il  parait 
que  dans  son  dortoir  on  était  obligé  de  la  traîner  dans  un  fau- 
teuil. 

Le  3 février,  au  matin,  elle  fut  trouvée  sans  connaissance.  Le 
1 bras  droit  était  paralysé  et  un  peu  rigide.  Le  pincement  du  bras 
I ne  détermine  aucun  mouvement,  la  figure  n’exprime  aucune 
douleur  ; mais  la  malade  retire  en  haut  l’épaule,  du  côté  op- 
posé. Perte  complète  de  connaissance  ; la  face  est  pâle,  la  respi- 
ration facile,  le  pouls  lent,  les  urines  involontaires 

I 

(1)  ComycndiMm,  t.  i),pi  iSy. 


31 


4Ô2 


KÀM0L1.1SSEMEMT  CÉRÉBEAL- 


Le  lendemain,  coma  plus  profond.  Le  5,  même  état.  Mort  la 
nuit  suivante^ 

Autopsie.  — Ramollissement  en  bouillie  pultacée  sans  chan- 
gement de  couleur  du  lobe  antérieur  gauche.  La  substance  cé- 
rébrale est  diffluente.  L’altération  s’étend  jusqu’à  la  membrane 
du  ventricule  correspondant. 

Un  très-grand  nombre  de  circonvolutions  et  d’anfractuosilés, 
appartenant  aux  deux  hémisphères,  présentent  à leur  surface 
des  cicatrices  couleur  peau  de  daim,  plus  ou  moins  étendues, 
avec  perte  de  substance  plus  ou  moins  considérable  (]  ). 

n est  très-probable  que  ce  ramollissement  pulpeux,  blanc» 
était  chronique  : Benoit  était  dans  un  état  qui  annonce  toujours 
l’existence  de  lésions  organiques  profondes  dans  le  ceiveau;  il  est 
vrai  de  dire  toutefois  que  les  circonvolutions  présentaient  des  al- 
térations multiples,  parfaitement  suffisantes  pour  expliquer  cet 
état.  On  se  rappelle  que  nous  avons  rangé  dans  la  troisième  forme 
du  ramollissement  chronique  des  cas  dans  lesquels  des  ramol- 
lissements chroniques  du  cerveau,  après  avoir  manifesté  leur 
existence  par  des  phénomènes  plus  ou  moins  caractéristiques,  ou 
même  être  restés  à l’état  latent,  se  présentent  à l’autopsie  comme 
seule  explication  d’accidents  aigus,  bien  tranchés,  ayant  pré- 
cédé la  mort.  Peut-être  l’observation  de  M.  Cruveilhier  devrait- 
elle  être  rangée  parmi  ces  faits. 

Je  ferai  ici  une  remarque:  M Cruveilhier  professe  la  distinc- 
tion du  ramollissement  rouge  et  du  ramollissement  blanc,  et  voit 
là  deux  altérations  d’origine  et  de  nature  différentes.  Or,  dans 
son  grand  ouvrage  d’anatomie  pathologique,  parmi  un  grand 
nombre  d’observations  de  ramollissement  et  d’altérations  di- 
verses  du  cerveau,  recueillies  presque  toutes  à la  Salpétrière, 
celle  que  nous  venons  de  rapporter  est  la  seule,  au  moins  je 
crois  pouvoir  l’affirmer,  qui  y soit  présentée  comme  exemple 
de  ramollissement  blanc  aigu  du  cerveau,  et  encore  offre-t-elle 
au  moins  des  doutes.  Si  le  ramollissement  ne  se  présentait  pas 
sous  cette  forme,  seulement  dans  des  cas  exceptionnels,  com- 
ment se  fait-il  que,  dans  ce  magnifique  recueil  d’observations, 
on  n’en  trouve  pas  d’autres  exemples? 

(t)  Cruveilhier,  Anatomie  pathologique,  20' livraison,  p.  10. 


lUMOLLISSEMJiPfT  BLANC. 


483 


I Observation  124.  — Hémiplégie  droite.  Mort  au  bout  de  vingt-qua- 
I tre  jours  d'une  pneumonie.  “•  Ramollissement  blanc  de  1 hemispberc 
! gauche. 

Une  femme  , âgée  de  cinquante-six  ans  , concierge  , causait 
I avec  son  mari^  lorsque  tout  a coup  elle  chancela  et  porta  sa 
I main  à sa  tête.  On  la  fit  asseoir  ; elle  avait  perdu  la  parole  et  le 
; mouvement  dans  le  bras  droit. 

I Le  second  jour,  le  bras  droit  était  paralysé  du  mouvement 
j seulement  , la  bouche  déviée  à gauche,  la  langue  à droite  ; 

; la  parole  était  complètement  abolie  ; la  malade  avait  toute  sa 
1 connaissance,  et  se  tenait  très-bien  sur  ses  jambes  j face  colorée  ; 
i pas  de  céphalalgie  , pas  de  fièvre  ; signes  d’une  affection  orga-, 
i nique  du  cœur.  Le  lendemain,  la  jambe  droite  fut  paralysée.  Les 
jours  suivants  , la  sensibilité  se  perdit  dans  les  membres  privés 
de  mouvement-,  ils  devinrent  en  même  temps  le  siège  de  dou- 
leurs vives,  et  il  survint  de  la  céphalalgie  5 plus  tard  , il  survint 
I du  dévoiement , de  la  fièvre , de  la  sensibilité  abdominale  , puis 
i un  état  d’adynamie  ^ enfin  une  pneumonie  se  développa  , et  la 
! malade  succomba  levingt-quatrième  jour  sans  rien  offrir  de  nou- 
; veau  du  côté  du  cerveau. 

Autopsie.  — Légère  injection  de  ['arachnoïde  / un  peu  de  sé- 
rosité sous'  cette  membrane  ; sérosité  assez  abondante  à la  base 
du  crâne  ; cerveau  légèrement  piqueté  ; ramollissement  blanc 
de  la  substance  médullaire  dans  l’hémisphère  gauche  au-dessus 
du  ventricule , large  comme  une  pièce  de  trente  sous , sans  qu’il 
y ait  de  rougeur  à l’entour.  Cette  lésion  était  assez  légère  pour 
que  la  plupart  des  personnes  qui  assistaient  à l’autppsie  n’aient 
pas  trouvé  de  rapport  entre  la  lésion  et  les  symptômes  observés 
jurant  la  vie  ; les  ventricules  ne  contiennent  point  de  sérosité. 

Le  poumon  droit  est  hépatisé  dans  sa  plus  grande  partie  ; 
commencement  de  suppuration  au  sommet  ; hypertrophie  et 
dilatation  du  ventricule  gauche  du  cœur  ; ossification  des  val- 
vules aortiques  • squirrhe  commençant  dû  pylore  (i). 


La  mort  n’a  pas  eu  lieu  par  le  fait  du  ramollissement  céré- 
bral , mais  bien  d’une  pneumonie  grave  survenue  chez  un  sujet 

(t)  LiUrc,  Journal  hebdomadaire,  l.  i,  p.  222. 


ramollissement  cérébral. 


48 

atteint  d’une  afl’ection  organique  du  cœur.  Le  raïuollisseiuent 
datait  de  vingt-quatre  jours  ; on  n’avait  rien  observé  de  nouveau 
du  côté  du  cerveau  dans  les  derniers  temps  de  la  vie.  11  est  très- 
possible  que,  dans  ce  cas,  la  rougeur,  l’injection  du  rainollisse- 
nient,  aient  disparu  pendant  la  vie  , peut-être  meme  sous  l'in- 
fluence du  développement  de  rafleclion  du  poumon. 

V oici  maintenant  deux  observations  dans  lesquelles  on  voit 
un  ramollissement  blanc  du  cerveau  se  développer  en  même 
tempe  qu’une  méningite. 


OBSEavATioN  120.  — Suppuratiou  des  méninges.  Ramollissement 
blanc  des  couches  optiques  et  des  parties  centrales  du  cerveau. 

Un  homme  de  vingt-huit  ans  , à la  |uite  d’une  fièvre  bilieuse, 
fut  pris  d’un^p  forte  douleur  de  tête  avec  fièvre  intense;  la  cé- 
phalalgie lui  arrachait  des  cris  continuels  , il  s’y  joignait  un  dé- 
lire continu  et  un  épislhotonos  prononce.  Il  mourut  dans  cet 
état  au  bout  de  quelques  jours. 

Julopsic.  — Supputation  dans  la  pie-mère  , surtout  à la  base 
du  cerveau  ; le  cerveau  est , en  général , plus  mou  et  plus  in- 
jecté que  de  coutume  ; chacun  de  ses  ventricules  latéraux  con- 
tient environ  deux  onces  de  sérosité  légèrement  trouble  et  blan- 
châtre, et  leurs  parois  sont  parsemées  de  ramifications  vasculaires 
gorgées  de  sang  ; la  voûte , le  septum  et  les  couches  optiques 
sont  transformées  en  une  substance  pultacée  , blanche,  presque 
diffluente , semblable  à du  fromage  à la  crème...  (1). 

ÜB8ERVAT10S  120.  — Inflammation  des  méninges  de  la  base  du  cer- 
veau et  du  veqtricule  gauche.  Ramollissement  blanc  du  corps  strié. 

Une  femme  de  vingt-huit  ans,  plongée  dans  la  misère,  fut 
prise  de  malaise  avec  céphalalgie.  Le  troisième  jour,  elle  cessa  de 

parler.  Le  quatrième  ,*assoupisseinent, agitation.  Le  cinquième» 
trismus  , impossibilité  de  [larler  , conservation  de  la  connais- 
sance, paralysie  avec  contracture  du  bras  gauche.  Pdoit  le  sep- 
lième  jour  dans  le  coma. 

(1  ) Rajkem,  Mémoire  cild,  obervalioul4%  î 


NÀTtRl  DU  RÀJIOLLISSBMENT. 

Auiovsie.  Suppuration  des  méninges  de  la  base  ; l’arachnoïde 
du  ventricule  gauche  était,  dans  une  portion  de  son  ctendue  , 
épaissie,  opaque,  rouge  et  évidemment  enüammee;  sa  partie 
interne  olFrait  des  stries  rougeâtres  ; les  ventricules  contenaient 

tout  au  plus  une  demi-once  de  sérosité  ; la  pie-mere  était  injec- 
tée à la  face  inférieure  et  aux  faces  latérales  des  hemisplieres 


cérébraux.  . 

Le  corps  strié  droit  était  ramolli  vers  sa  partie  anterieure;  ce 

ramollissement  ne  se  prolongeait  pas  au-delà  de  quelques  lignes 
dans  la  pulpe  cérébrale , qui  , du  reste  , ne  présentait  point  de 
traces  bien  sensibles  d’injection  sanguine  (!)• 


Voici  des  exemples  de  ramollissement  blanc  du  cerveau  pris 
dans  des  conditions  bien  diverses.  Pensera-t-oii  que  quelques- 
unes  des  hypothèses  destinées  à rendre  compte  de  la  nature  du 
ramollissement  non  inflammatoire  leur  soient  applicables?  Nous 
voyons  qu’ils  se  montrent  chez  des  adultes  comme  chez  des 
vieillards , chez  des  individus  débiles  comme  chez  des  sujets 
robustes  , accompagnés  de  signes  de  cijjigestion  cérébrale 
ou  de  méningite  , ou  comme  une  altération  simple  du  cerveau. 
Quoi  qu’il  en  soit , acceptons-les  comme  dfi  rares  exceptions , 
et  sur  la  nature  desquelles  nous  serons  sans  doute  un  jour  mieux 
éclairés  que  maintenant. 

§ VI. 

La  nature  inflammatoire  du  ramollissement,  considéré  en 
général,  a été  soutenue  par  plusieurs  auteurs  : ainsi  MM.Briche- 
teaii  , Moulin  , Pâtissier,  llaikem , Georget , Foville , etc.  ; 
mais  la  plupart  de  ces  écrivains  avaient  traité  cette  question  trop 
superficiellement , de  trop  loin , si  je  puis  ainsi  dire , pour 
qu’elle  pût  se  trouver  jugée  définitivement.  J’en  dirai  autant  de 
M.  Lallemand  lui-même,  car  il  est  évident  qu’il  est  un  bon 
nombre  de  points  de  l’iiistoire  du  ramollissement  qui  sont  restés 
en  dehors  de  ses  études.  Quant  à M.  Bouillaud  , il  a traité  cette 
question  avec  une  réserve  fort  louable,  et , malgré  ses  tendances 
bien  connues  , il  s’est  contenté  d’exprimer  la  nécessité  d’étude» 


( I)  Parent  cl  Martinet,  de  V Âracltiiitisj  p.  12L 


486 


RÀMOtLlSSEMEKT  CÉRÉBRAL. 


plus  complètes  avant  de  pouvoir  décider  de  la  nature  de  tous 
les  ramollissements  (I). 

Les  pathologistes  anglais  professent  généralement  les  mêmes  ■ 
doctrines  qu’Abercrombie. 

Suivant  le  docteur  Bright , le  ramollissement  cérébral  peut  > 
résulter  de  causes  très- variées  : 

1°  Par  suite  d’une  obstruction  de  la  circulation  ( from  oh-  ■ 
structed  circulation  ) , la  partie  malade  subit  un  changement  i 
analogue  à la  gangrène  ; c’est  là  la  forme  la  plus  commune  de  = 
la  maladie  ; 

2o  A la  suite  d’une  congestion,  la  substance  cérébrale  éprouve  : 
\me  lacération  plus  ou  moins  complète  , et  à cette  classe  peuvent  i 
se  rapporter  tous  les  cas  dans  lesquels  la  désorganisation  est  : 
secondaire  , et , jusqu’à  un  certain  point , mécanique  , dépen-  ■ 
dant  de  la  pression  de  tumeurs  , ou  d’un  épanchement  de  séro- 
sité , ou  apoplectic  dots. 

3°  Le  ramollissement  est  le  résultat  d’une  inflammation  ( is  • 
produced  hj  injlammatory  action  (2). 

Le  docteur  Carswell  distingue  dans  le  cerveau,  comme  dans  ■ 
les  autres  organes  : 1®  un  ramollissement  par  inflammation  i 
{from  injlammation)',  2°  un  ramollissement  par  oblitération  des  ■ 
artères  ( from  oblitération  of  the  arteries...  ) 

Puis,  plus  conséquent  avec  cette  doctrine  que  les  autres  au- 
teurs, il  étudie  séparément  ces  deux  espèces  de  ramollissement, 
mais  toutefois  sans  pouvoir  indiquer  une  seule  circonstance  ana- 
tomique ou  symptomatique  propre  à les  distinguer  l’une  de  ' 
l’autre  , si  ce  n’est  la  présence  des  vaisseaux  malades  eux- 
mêmes.  C’est  ce  que  prouve  le  passage  suivant  : « Pour  distin- 
guer le  ramollissement  par  oblitération  du  ramollissement 
produit  par  l’inflammation  , il  est  seulement  nécessaire  de  re- 
connaître la  présence  de  l’état  morbide  des  artères  que  nous 
avons  décrit  : To  distinguish  soflening  from  oblitération  from 
softening  produced  by  inflammation , it  is  only  neccssary  to 
Hscertain  the  présence  of  the  morbid  State  of  the  arteries  ivhich 
we  hâve  described.  (3).-  La  seule  différence  qui  existerait  entre 

(t)  Bouillaud,  Dict.  de  méd.  cl  de  chirur.  prat.,  l.  xv,  p.  793. 

(2)  Briglil , Medical  reports,  discases  oj  the  hrain,  t.  n,  p.  t95. 

(3)  Carswcl,  The  cycloptedia  of  praclical  mtdecine,  vol.  iv,  p.  6,  art. 


lOFTKNINC. 


487 


nature  dxj  ramollissement. 

le  ramollissement  par  oblitération  artérielle  et  le  ramollissement 
par  inflammation , serait  donc  précisément  cet  état  morbide  des 
artères.  Une  telle  proposition  ainsi  présentée  est  logiquement 
insoutenable. 

Le  docteur  James  Copland  est  passablement  abstrait  ; il  ad- 
met un  ramollissement  inflammatoire  : «Les  circonstances  dans 

lesquelles  on  l’observe  , dit-il  , ainsi  à la  suite  des  blessures  et 
des  contusions  , par  la  pression  de  tumeurs  , etc.  , et  durant  le 
cours  de  maladies  malignes  , montrent  qu  il  n’est  pas  produit 
par  une  forme  d’inflammation  sthénique  et  de  bonne  nature, 
mais  cette  espèce  unhealthy,  desorganising  and  diffusive  , que 
l’on  observe  chez  les  individus  cachectiques  ou  chez  ceux  chez 
qui  la  puissance  vitale  est  diminuée.  En  même  temps  on  ne 
peut  nier  que  l’absence  de  tout  signe  d’irritation  inflamrnamire 
ne  doive  le  faire  considérer  comme  la  conséquence  de  la  dimi- 
nution et  de  la  perte  du  pouvoir  vital , et  de  la  cohésion  du 
tissu  affecté  (1).  • 

Un  savant  écrivain  , M.  Rochoux  » tout  en  admettant  que  le 
ramollissement  cérébral  est  de  nature  inflammatoire , a émis  , 
touchant  le  développement  de  cette  altération  , plusieurs  pro- 
positions dont  nous  ne  saurions  admettre  1 exactitude. 

■ Quoique  recevant , dit-il,  une  enorme  quantité  de  sang,  le 
cerveau  n’en  conserve  pas  un  seul  atome  combine  avec  son 
tissu  5 le  courant  non  interrompu  qui  arrose  chaque  molécule  de 
la  masse  paraît  uniquement  destiné  à faire  naître  le  phénomène 
comme  électrique  de  l’innervation...  • 

«Les  inductions  auxquelles  l’anatomie  pourrait  nous  con- 
duire presque  seule  , sont  pleinement  confiimees  par  l’observa- 
tion pathologique  , qui  ne  montre  la  rougeur  du  tissu  nerveux 
que  dans  deux  cas  : 1®  lorsqu’il  est  le  siège  d’hémorrhagies 
spontanées  ; 2®  quand  il  a éprouvé  quelque  contusion...  • 

« Une  lecture  attentive  des  observations  destinées  à prouver 
l’existence  de  la  rougeur  dans  !a  première  période  du  ramollis- 
sement , m’a  montré  que  cette  disposition  prétendue  inflamma- 
toire devait  toujours  être  attribuée  à une  des  deux  causes  ci- 
dessus  mentionnées...  * 


(t)  JamPB  Copland,  Diction .nf  prrœl.  nirtlrc.,  l.  i,  p.  216. 


58-8 


BAMOr.LISSEMBNT  CÉRÉBRAL. 


« V absence  de  rougeur  au  début  du  ramollissement  ne  doit  pas 
nous  empêcher  de  reconnaître  sa  nature  inflammatoire...  (1)  >. 

Les  observations  contenues  dans  cet  ouvrage  me  dispensent 
de  toute  réfutation  de  ce  passage.  Je  pense  qu’elles  ne  laisseront 
aucun  doute  dans  l’esprit  de  mon  ancien  maître  touchant  la 
possibilité  d’une  rougeur  par  injection  vasculaire  du  tissu  céré- 
bral enflammé  , tout  à fait  semblable  à celle  qui  s’observe  dans 
les  autres  tissus. 

L’estimable  auteur  des  recherches  sur  l’apople.xie  paraît  avoir 
été  induit  en  erreur  à ce  sujet  par  un  cas  d’encéphalite  consé- 
cutive à une  nécrose  du  pariétal , dans  lequel  une  perte  de 
substance  d’une  partie  de  cet  os  avait  permis  de  suivre  de  l’œil 
la  marche  de  l’inflammation  de  la  superficie  du  cerveau.  On 
avait  vu  la  pulpe  nerveuse  passer  à la  suppuration  sans  avoir 
jamais  présenté  d’injection  ni  de  rougeur.  Quelle  que  soit  la  va- 
leur de  cette  observation  comme  fait  isolé  , il  est  évident  qu’elle 
ne  saurait  rien  prouver  relativement  aux  faits  où  des  circon- 
stances toutes  différentes  ont  été  rencontrées. 

La  seule  induction  qu’il  me  semble  possible  d’en  tirer, 
c’est  c{ue  les  choses  ne  se  passent  pas  , lorsque  la  pulpe  nerveuse 
est  à nu  , de  la  même  manière  que  lorsqu’elle  est  renfermée 
dans  la  boîte  crânienne.  ^ 

M.  Récamier  a émis  , touchant  la  nature  du  ramollissement 
cérébral  , des  idées  toutes  particulières  , et  qui  n’ont  jamais  , 
que  je  sache  , été  publiées  ; il  les  a seulement  fait  connaître  dans 
son  enseignement  oral.  M.  Lallemand  écrivait,  en  183o  : « Cet 
habile  praticien  (M.  Récamier)  regarde  plus  que  jamais  les 
ramollissements  du  cerveau  comme  une  altération  sut  generis  , 
une  dégénéi  escence  particulière  , qu’il  compare  à certains  ra- 
mollissements de  la  rate  ; il  croit  ces  désorganisations  indé- 
pendantes de  toute  inflammation,  et  produites  par  une  cause 
générale,  une  maladie  de  toute  l’écouomie,  une  fièvre  ataxique, 
nerveuse,  maligne  ou  pernicieuse,  qui  se  porte  sur  le  système 
nerveux,  et  spécialement  sur  le  cerveau,  détruit  et  désorganise 
son  tissu  ; de  là  les  ramollissements , les  dégénérescences  , les 
foyers  ataxiques  X 

(t)  Uochoiix,  toc.  ci!.,  p.  303  et  suiv. 

(i)  Lallemand,  2*  letirr,  p.  tvy. 


NATURE  DU  RA5I0DLISSEMENT.  ^89 

Le  docteur  Carswell  dit  aussi , en  parlant  du  ramollissement 
pâle  du  cerveau  qui  se  montre  fréquemment  dans  rhydrocé- 
pliale  , ou  encore  dans  ces  fievres  où  le  cerveau  est  piimili\e 
ment  ou  secondairement  affecté  : « M.  Récainier  a. décrit  ce  ra- 
mollissement pâle  du  cerveau  dans  ses  leçons  cliniques  de 
l’IIôtel-Dieu  de  Paris  , longtemps  avant  les  travaux  de  Rostan  , 
Lallemand  et  Abercrombie.  Cet  auteur  regardait  le  ramollisse- 
ment pâle  comme  la  première  condition  des  fièvres  nerveuses 
ou  malignes  ; aussi  l’appelait-il  ramollissement  ou  dégénérescence 
ataxique  , foyer  ataxique  (1).  ■ 

Les  faits  auxquels  faisait  allusion  le  célèbre  médecin  de  l’Ho- 
tel-Dieu  sont  probablement  d’un  ordre  tout  diftérent  de  ceux 
que  nous  venons  d’étudier...  ; cependant  il  est  remarquable  que 
personne  n’ait  encore  répété  le  même  genre  d’observations. 

Je  terminerai  ce  paragraphe  en  rappelant  une  théorie  chimi- 
que du  ramollissement  qui , malgré  sa  singularité  , et  peut-être 
à cause  de  sa  singularité  , s’est  présentée  sous  le  patronage  de 
M.  Magendie. 

« M.  Couerbe  a trouve  le  cerveau  composé  de  : 

1°  Graisse  jaune  pulvérulente stéaroconote. 

2“  Graisse  jaune  élastique céphalote. 

3®  Huile  jaune  rougeâtre éléencéphol. 

4”  Matière  grasse  blanche  de  Vauquelin.  cérébrote. 

5“  Cholestérine. 

« L’éléencéphol...  dissout  assez  bien  les  autres  matières  du 
cerveau  qui  lui  donnent  de  la  consistance..  Elle  est  isomère  avec 
la  cérébrote. 

U M.  Couerbe,  continue  M.  Magendie,  pense  que  celte  isomérie 
peut  servir  à expliquer  un  phénomène  physiologique  fort  im- 
portant , le  ramollissement  de  la  pulpe  cérébrale  , car  la  cépha- 
loie  , ayant  la  même  composition  , peut , sous  une  influence 
morbide  , se  métamorphoser  en  éléencéphol , dissoudre  les  au- 
tres matières  solides  du  cerveau  , et  , par  lâ,  en  diminuer  la 
consistance  (2).  » 

(1)  Carswell,  toc,  cil.,  p.  o. 

(2)  Magendie,  Leçons  sur  le  syslènie  neiveux,  t.  1,  p.  t(il . 


490 


RAMOLLISSEMEKT  CÉRÉBRAL. 


ARTICLE  II 

CAUSES  DU  RAMOLLISSEMENT. 

Nous  sommes  arrivés  maintenant  à l’étude  des  causes  directes 
du  ramollissement  cérébral,  de  celles  (]ui,  indépendamment  de 
sa  nature,  et  venant  du  dehors,  font  qu’il  se  développe  dans  un 
moment  plutôt  que  dans  un  autre. 

Il  est  probable  que  cet  ordre  de  causes  existe  réellement,  au 
moins  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas  , et  cependant,  comme 
1 a très-bien  remarqué  M.  Andial,  il  est  presque  toujours  impos- 
sible de  les  saisir.  Aussi  ne  puis-je,  en  aucune  façon  , combler 
cette  lacune,  répondre  à cette  question  : Quelles  sont  les  causes 
extérieures  qui  président  au  développement  du  ramollissement 
cérébral  ? ou  plutôt  je  puis  confirmer  de  mon  expérience  cette 
proposition  ; que  dans  presque  aucun  cas  de  ramollissement 
cérébral,  chez  les  vieillards  en  particulier,  on  ne  peut  apprécier 
la  cause  de  la  maladie.  Mes  efforts  pour  obtenir  quelques  don- 
nées sur  ce  point  ont  toujours  été  infructueux,  et  cela,  non- 
seulement  pour  les  cas  de  ramollissement  cérébral  terminé  par 
la  mort,  mais  encore  pour  ces  cas  de  congestion  cérébrale  pas- 
sagère que  l’on  observe  assez  fréquemment  chez  les  vieillards,  et 
que  j’ai  rapprochés  , comme  on  l’a  vu  , du  ramollissement  lui- 
même. 

§ 1- 

L’âge  avancé  est-il  une  prédisposition  à cette  maladie?  Bien 
qu’il  soit  tout  à fait  impossible  de  résoudre  cette  question  par 
des  relevés  statistiques,  à cause  de  l’inégale  répartition  des  ma- 
lades des  différents  âges  dans  les  hôpitaux,  ce  n’en  est  pas  moins 
un  fait  incontestable.  Il  est  certain  que  ce  n’est  que  dans  les 
hospices  de  vieillards  que  l’on  voit  ce  grand  nombre  de  ramol- 
lissements se  développant  spontanément,  ou  au  moins  en  dehors 
de  toute  cause  extérieure  appréciable  ; mais  cela  ne  veut  pas  dire 
cependant  que  le  ramollissement  puisse  être  considéré  comme  une 
affection  sénile  exclusive  à la  vieillesse. 

Si  l’on  veut  savoir  l’influence  de  l’âge  sur  le  développement 
du  rainollissèment,  il  ne  faut  tenir  compte  que  de  l’âge  qu’a- 
vaient les  malades  à l’époque  de  l’invasion  de  leur  maladie.  Or, 


CAÜSES  DU  RAMOLLISSEMENT.  ^9^ 

c’est  là  une  précaution  qui  n’a  pas  été  prise,  que  je  sache,  dans 
la  plupart  des  relevés  faits  sur  ce  sujet  ; habituellement  on  prend 
l’âee  des  individus  à l’époque  où  on  les  observe  et  où,  en  gene- 
ral, ils  meurent  : c’est  bien  pour  le  ramollissement  aigu.  Mais, 
lorsqu'il  s’agit  de  ramollissements  chroniques,  durant  depuis 
plusieurs  années,  une  semblable  manière  de  compter  ne  peut 
qu’introduire  des  données  fausses  dans  un  tableau. 

Voici  un  relevé  de  l’âge  précis  qu’avaient  55  individus  obser- 
vés par  moi  à la  Salpétrière,  à l’époque  où  le  ramollissement 
débutait  ; j’ai  assisté  moi-même  aux  premiers  accidents  chez  es 
uns,  et  j’ai  pu  me  procurer  chez  les  autres  des  renseignements 
certains.  J’ai  laissé  de  côté  tous  les  cas  qui  pouvaient  laisser 
quelques  doutes  dans  l’esprit. 

De  30  à 40  ans . . • ^ 

De  40  à 50 • ■ • • I 

De  50  à - - 

De  60  à ^ 

De  66  à 70  . • • ^ 

De  71  à 75 

De  76  à 80 

De  80  à 87 ^ 

La  majorité  de  la  population  à la  Salpétrière,  en  laissant  de 
côté  les  aliénées,  se  compose  de  septuagénaires,  car  75  ans  est 
l’âge  6xé  pour  l’admission  des  indigentes.  Cependant  il  y a un 
assez  grand  nombre  d’individus  plus  jeunes,  soit  admis  par 
protection  particulière,  soit  atteints  de  quelque  affection  incu- 
rable. Notons  que  parmi  ces  derniers,  il  y a beaucoup  de  para- 
lysies, c’est-à-dire  de  lésions  anciennes  du  système  nerveux,  et 
entre  autres  de  ramollissements  chroniques.  Jajouteiai  qui, 
parmi  les  observations  que  j’ai  laissées  de  cote  en  faisant  ce  re- 
levé, il  y en  a un  certain  nombre  qui  ont  trait  a d anciennes  pa- 
ralysies, certainement  antérieures  à la  vieillesse.  Si  je  fais  ces 
réflexions,  c'est  que  je  crois  nécessaire  d’insister  sur  ceci  : que, 
si  le  ramollissement  cérébral  est  réellement  plus  fréquent  dans 
un  grand  âge  qu’aux  autres  époques  de  la  vie  , cependant  il  est 
loin  d’appartenir  exclusivement  à la  vieillesse,  et,  par  consé- 
quent, ne  peut  en  aucune  façon  être  considéré  comme  une  af- 


ramollissement  cérébral. 


492 

fection  sénile,  spécifique.  On  a remarqué  sans  doute  que,  dans 
les  divers  chapitres  de  cet  ouvrage,  j’ai  pris  soin  de  rapprocher 
de  mes  observations  de  vieilles  femmes,  des  observations  appar- 
tenant à l’âge  adulte,  et  même  à la  première  enfance,  afin  de 
montrer  qu’à  toutes  les  époques  de  la  vie,  le  ramollissement  re- 
vêtait les  mêmes  formes  anatomiques,  et  sans  doute  alors  était 
de  même  nature. 

J’ai  noté  l’âge  des  malades  de  M.  Rostan  et  de  M.  Andral,  chez 
lesquels  1 époque  du  début  de  la  maladie  a été  indiquée.  Ceux  de 
M.  Rostan  étaient  tous  fort  âgés  : 

7 avaient  de  80  à 87  ans.  ^ 

8 de  70  à 78  ans. 

4 seulement  de  60  à 69  ans. 

Toutes  ces  observations  viennent  aussi,  comme  on  le  sait,  de 
la  Salpétrière. 

M.  Andral  a recueilli  ses  observations  à la  Charité.  Voici  l’é- 
poque du  début  du  ramollissement  chez  26  de  ses  malades  : 

4 avaient  de  17  à 20  ans. 

2 27  ans. 

2 30  et  37  ans. 

2 43  et  45  ans. 

4 de  53  à 59  ans. 

7 de  63  à 69  ans. 

6 de  70  à 78  ans. 

Je  transcris  ici  le  t.ableau  qu’a  dressé  M.  Andral,  de  l’âge  de 
153  individus  affectés  de  ramollissement  ; mais,  en  faisant  re- 
marquer que,  sans  doute  pour  la  plupart,  ces  chiffres  ne  repro- 
duisent que  l’âge  de  la  mort  des  malades,  et  non  celui  du  début 
de  la  maladie,  chose  importante  à noter,  puis(|u’il  s’agit  de  ra- 
mollissements chroniques  aussi  bien  que  de  ramollissements 
aigus. 


De  15  à 20  ans 
De  20  à 30 
De  ;10  à 40 


10 

18 

11 


CAUSES  DU  ramollissement. 


De  40  à 50 
De  50  à 60 
De  60  à 70 
De  70  à 80 
De  80  à 89 

Pour  arriver  à des  proportions  certaines  ou  à bien  peu  de 
choses  près,  il  faudrait  pouvoir  dresser  sur  une  grande  echelle 
un  tableau  des  ramollissements  de  toute  la  population  indi- 
gente de  Paris  ; il  n’y  a pas  de  doute  qu’ils  passent  tous  par 
les  hôpitaux  ou  par  les  hospices.  Lorsque  l’administration  des 
hôpitaux  comprendra  l’utilité  de  faire  faire  dans  tous  les  sci  - 
vices  des  relevés  officiels  des  m'aladies,  il  sera  possible  d ai  ri- 
ver à une  foule  de  résultats  de  ce  genre,  dont  on  comprend 
aisément  l’intérêt  et  l’utilité. 

Avant'  de  quitter  cette  étude  de  l’àge  des  malades  affectés  de 
ramollissement,  ’je  dirai,  de  nouveau,  que  lorsque  l’on  compare 
toutes  les  observations  recueillies  chez  les  individus  de  diffé- 
rents âges,  il  est  impossible  de  trouver,  sous  le  rapport  des 
lésions  anatomiques  comme  des  formes  symptomatiques,  au- 
cune différence  notable  entre  celles  qui  appartiennent  à la 
jeunesse,  à l’âge  adulte,  ou  à la  vieillesse. 


49-^ 

19 

27 

34l 

30 

4 


§ II. 

Si  l’on  veut  connaître  l’influence  que  les  saisons  peuvent 
exercer  sur  le  développement  du  ramollissement,  il  faut, 
comme  pour  l’âge , teirir  compte  de  l’epoque  du  début  de  la 
maladie  et  non  pas  de  la  mort.  Voici  le  releve  de  62  cas  ob- 
servés par  M.  Rostan  ou  par  moi , un  très-petit  nombre  par 
M.  Andral,  dans  lesquels  cette  époque  a été  indiquée  ; 


Décembre 

3 

Janvier 

10 

17 

Février 

Mars 

7 

Avril 

3 

13 

Mai 

3 

494 


RAMOLLISSEMENT  CÉRÉBRAL. 


Juin 

J 

Juillet 

7 } 20 

Août 

6 ! 

Septembre 

5 j 

Octobre 

5 5 13 

Novembre 

3 

On  voit  que  ces  chiffres  n’offrent  pas  de  très-grandes  dif- 
férences pour  les  diverses  époques  de  l’année  ; cependant  le 
ramollissement  paraîtrait  un  peu  plus  fréquent  dans  l’hiver 
et  surtout  dans  l’été.  Ce  résultat  est  d’accord  avec  la  remarque 
que  j’avais  faite  et  vu  faire,  en  général,  à la  Salpétrière,  que 
les  accidents  cérébraux  sont  surtout  communs  lorsque  la  tem- 
pérature est  très-élevée  ou  très-basse.  Voici  le  relevé  d’un 
nombre  égal  de  cas  d’hémorrhagie  cérébrale  ; 37  ont  été  ob- 
servés par  moi  à la  Salpétrière  ; 34  par  M.  Andral  et  M.  Ro- 
choux.  Ils  nous  donnent  exactement  le  même  diiffre  pour  léte 
et  pour  l’automne  ; mais  au  printemps,  un  chiffre  supérieur 
à celui  de  l’iiiver. 


Décembre 

5 cas  1 

Janvier 

3 — ) U 

Février 

6 - 1 

✓ 

Mars 

9 - 1 

Avril 

4 — ) 16 

Mai 

3 - ( 

Juin 

8 - f 

Juillet 

9 — } 20 

Août 

3 - l 

Septembre 

^ " 1 .O 

Octobre 

8—13 

Novembre 

4 — \ 

5 in. 

Le  ramollissement  atteint-il  de  préférence  les  individus  qui 
présentent  le  plus  de  faiblesse,  d’appauvrissement  de  l’écono- 
mie? Non,  sans  doute;  et,  si  nous  avons  vu  le  ramollissement 
se  développer  chez  des  vieillards  secs  et  décrépits,  nous  avons 
également  noté  chez  beaucoup  de  nos  malades  l’embonpoint, 


CAUSES  DU  RAMOLLISSEMENT. 


495 


la  force,  l’activité',  enfin  toutes  les  conditions  d’une  parfaite 
santé,  quelquefois  même  ce  que  l’on  a appelé  une  constitution 
apoplectique. 

Je  ne  trouve  indiqué  d'une  manière  précise  que  dans  28  de 
mes  observations  l’état  général  de  mes  malades,  au  moment  où 
le  ramollissement  s’est  développé  chez  eux. 

9 se  trouvaient  atteints  d’affections  graves  ; 5 avaient  une 
affection  du  cœur;  2,  un  rétrécissement  de  l’orifice  auriculo- 
ventriculaire  gauche  ; 3,  une  hypertrophie  ou  une  dilatation 
considérable  des  cavités  du  cœur.  Un  autre  malade  était  af- 
fecté d’un  cancer  avancé  de  l’utérus  ; un  autre,  d’une  entérite 
chronique  ; chez  deux  autres  enfin  le  ramollissement  s’est  mon- 
tré pendant  le  cours  d’une  pneumonie.  Dans  tous  ces  cas,  l’in- 
vasion de  la  maladie  fut  rapide;  dans  tous  le  ramollissement  fut 
trouvé  accompagné  de  rougeur,  de  tuméfaction  ou  d’infiltration 
sanguine.  Dans  un  d’eux  seulement,  où  il  y avait  une  hyper- 
trophie et  une  dilatation  générale  du  cœur  très-considérable, 
le  ramollissement  ayant  passé  à l’état  chronique  , on  n’a  plus 
trouvé  d’autres  traces  de  rougeur  primitive  qu’une  coloration 
jaune  du  pourtour  d’une  infiltration  celluleuse. 

Sur  19  malades,  dont  la  constitution  a été  décrite  avec  soin, 
il  y en  a 8 qui  avaient  un  embonpoint  considérable  ; 8 qui 
étaient  forts,  bien  portants,  très-bien  conservés  pour  leur  âge  ; 5 
seulement,  maigres  et  débiles.  Je  regrette  de  n’avoir  point  à 
ma  disposition  de  cltiffres  plus  nombreux  ; je  ne  donne  nulle- 
ment ceux-ci  comme  indiquant  une  proportion  exacte  ; mais 
cependant  je  leur  attache  beaucoup  d’importance,  parce  qu’ils 
prouvent  que  le  ramolUssement  ne  se  montre  pas,  en  général, 
plutôt  lié  à une  constitution  débile  et  détériorée,  qu’à  une  autre. 

MM.  Delaberge  et  Monneret,  croyant  que  le  ramollissement 
cérébral  est  une  affection  propre  à la  décrépitude  (1),  se  plai- 
gnent du  vague  des  renseignements  que  l’on  peut  puiser  dans 
les  auteurs  ; ceux-ci  se  plaisant  trop  souvent  à confondre  les  dif- 
férentes espèces  de  ramollissements.  M.  Decharnbre,  d’après  les 
renseignements  qu’ils  lui  attribuent,  n’aurait  jamais  observé  le 
ramollissementpartieZ  chez  les  jeunes  filles  et  les  femmes  adul  tes 
qui  font  en  assez  grand  nombre  partie'de  la  population  de  la  Sal- 


(1)  £cc.  c((,,p,  162. 


UA.MüLMSSEMENT  CÉIlÉlsnAL. 


4 ()G 

pétribe.  Un  sait  maintenant  que  cet  ouvrage  ne  renferme  que 
des  exemples  de  ramollissements  partiels,  observés  à tous  les 
âges  de  la  vie,  et  que,  jusqu’à  nouvel  ordre  au  moins,  j’ai  cru  ne 
devoir  admettre,  sauf  exception,  que  le  ramollissement  partiel. 
Je  me  contenterai  donc  de  mentionner,  toujours  d’après  les  au- 
teurs du  Compendium ^ cette  assertion  deM.  Dechanibre,  si  sin- 
gulièrement en  désaccord  avec  mon  observation  personnelle, 
que  le  ramollissement  général  présente  comme  condition  pro- 
bable de  développement  : 1"  l’existence  d’un  foyer  liémorrha- 
gique,  2°  un  état  avancé  de  maigreur  et  de  décrépitude  sénile. 

Il  y a longtemps  que  l’on  a remarqué  le  rapprochement  du 
ramollissement  cérébral  et  des  auciens  foyers  hémorrhagiques; 
et  cette  circonstance  est  une  de  celles  qu’on  a le  plus  souvent  in- 
voquées pour  appuyer  la  nature  inflammatoire  du  ramollisse- 
ment. Ce  rapprochement,  dans  lequel  nous  croyons  qu’en  effet 
on  doit  voir  autre  chose  qu’une  simple  coïncidence,  est  infini- 
ment moins  fréquent  qu'on  ne  l’a  dit;  car  ce  que  l’on  a présenté 
comme  de  semblables  exemples,  ce  sont  presque  toujours,  comme 
nous  l’avons  vu,  des  infiltrations  celluleuses,  environnées  d’un 
ramollissement  pulpeux  (Rochoux). 

Suivant  MM.  Delaberge  et  Monneret,  le  ramollissement  par- 
tiel, lié  à d’anciennes  cicatrices,  se  montre  au  moins  aussi  sou- 
vent chez  les  vieillards  fortement  constitués,  à thorax  large,  à 
chairs  fermes  et  abondantes,  que  chez  ceux  dont  le  corps  a subi 
l’influence  de  l’atrophie  sénile.  Cette  observation  s’accorde  peu 
avec  la  théorie  de  ces  mêmes  auteurs,  qui  prétendent,  à la  même 
page,  que  le  ramollissement  cérébral  est  une  lésion  propre  à la 
décrépitude^  car  rien  ne  nous  donne  à entendre  qu’ils  reconnais- 
sent dans  ces  différents  cas  une  nature  différente  au  ramollisse- 
ment. 


§ IV. 

L’état  du  cœur  chez  les  individus  affectés  de  ramollissement 
doit  nous  occuper  maintenant  : j’ai  trouvé  le  cœur  sain  dans 
toutes  les  observations  de  ramollissement  que  j’ai  recueillies 
chez  les  adultes,  c’est-à-dire  chez  des  individixs  au-dessous  de 
50  ans.  Voici  quel  était  l’état  du  cœur  chez 41  vieillards  delà  Sal- 
pétrière; affectés  de  ramollissement  cérébral  : 


CAUSES  iJU  li.VMOLLlSSEMEiNT. 


k)7 


Saiu 

Hypertrophié  . . » 

Dilaté  sans  hyperlropbie o 

Rétrécissement  de  i’oiifice  auriciiio-ventriculaire 
gauche,  sans  hypertrophie  ....  2 


28  t’ois. 
8 


Il  ne  faudrait  pas  attacher  beaucoup  d’importance  à ces  af- 
i'ectious  du  cœur,  dans  la  pathogénie  du  ramollissement,  au 
point  de  vue  de  la  gêne  de  la  respiration  et  de  la  circulation  qui 
les  accompagnent.  En  effet,  comme  je  n’ai  jamais  vu  survenir  le 
ramollissement  dans  les  cas  ti  ès-nombreux  d’asthme  et  de  dys- 
pnées de  toutes  sortes  que  j’ai  observés  à la  Salpétrière,  j’tn 
conclus  naturellement  que  les  troubles  de  la  respiration  n’exer- 
cent pas  par  eux-mêmes  une  notable  influence  sur  le  développe- 
ment de  celte  maladie.  Mais,  comme  on  a fait  jouer  à l’hypertro- 
phie du  cœur  un  grand  rôle  dans  la  production  de  l’hémorrhagie 
cérébrale  et  aussi  du  ramollissement,  nous  nous  arrêterons  prin- 
cipalement à cette  circonstance. 

Or,  nous  voyons  que  sur  4 1 cas  de  ramollissement  chez  des 
vieillards,  I hypertrophie  du  cœur  s’est  rencontrée  dans  le  cin- 
quième des  cas. 

.T’ai  noté  avec  soin  l’état  du  cœur  chez  60  vieillards  morts  de 
différentes  maladies  : j’ai  trouvé  le  cœur  sain  chez  45;  hyper- 
trophié chez  15,  c’est-à-dire  dans  le  quart  des  cas.  Je  n’ai  pas 
noté  dans  ce' relevé  les  individus  qui  ont  succombé  aune  af- 
fection du  cœur  lui-même. 

Dans  28  cas  d’hémorrhagie  cérébrale  observés  chez  des  vieil- 
lards seulement,  j’ai  trouvé  le  cœur  hypertrophié  11  fois,  c’est- 
à-dire  dans  un  peu  plus  du  tiers  des  cas. 

A'oici  donc  le  résultat  de  mon  observation  î 

Chez  les  vieillards  morts' de  différentes  maladies,  ayant  le 
cerveau  sain,  hypertrophie  du  cœur  dans  le  quart  des  cas  ; 

Chez  les  vieillards  morts  avec  un  ramollissement,  hypertro- 
phie du  cœur  dans  le  cinquième  des  cas  ; 

Chez  les  vieillards  morts  d’une  hémorrhagie  cérébrale,  hy- 
pertrophie du  cœur  dans  un  peu  plus  du  tiers  des  cas. 

D après  ces  proportions,  il  est  permis  de  conclure,  au  nicins 
dans  la  limite  de  ces  faits,  que  l’hypertrophie  du  cœur  n’a  nas 
exerce  une  grande  influence  sur  la  production  du  ramollissc- 

32 


498 


RAMOLLISSEMENT  CÉRÉBRAL. 


ment,  puisqu’elle  a été  rencontrée  plus  fréquemment  chez  les 
individus  morts  de  toutes  sortes  de  maladies  étrangères  à l’en- 
céphale, que  chez  ceux  affectés  de  ramollissement.  Pour  ce  qui 
est  de  l’hémorrhagie,  il  en  est  autrement  ; mais  nous  n’avons 
pas  à nous  en  occuper  ici  ; j’ai  cru  seulement  que  ce  rappro- 
chement ne  serait  pas  sans  intérêt. 

L’état  du  cœur  est  noté  dans  30  observations  de  la  clinique 
de  M.  Andral  : le  cœur  a été  rencontré  hypertrophié  8 fois, 
c’est-à-dire  dans  le  quart  des  cas.  Cette  proportion  est  un  peu 
plus  forte  que  la  nôtre  ; et  il  faut  faire  atîention  qu’il  s’agit  ici 
d’individus  d’âges  fort  différents. 

Maintenant  nous  allons  trouver  tout  autre  chose  dans  l’ou- 
-yrage  de  M.  Rostan  : sur  18  cas,  où  il  est  fait  mention  de  l’é- 
tat du  cœur , cet  organe  était  hypertrophié  12  fois,  c’est-à-dire 
dans  les  deux  tiers  des  cas.  Toutes  ces  observations  ont  été 
prises  chez  des  individus  fort  âgés.  Cette  proportion  est  énorme. 
Ce  qu’il  y a de  singulier,  c’est  que  M.  Rostan  ne  semble  pas 
lui-même  s’en  être  aperçu,  car  je  n’ai  pas  vu  qu’il  signale  nulle 
part  cette  circonstance. 

Ces  faits  sont  bons  à citer;  mais  je  ne  pense  pas  qu’il  soit  per- 
mis d’en  tirer  aucune  conclusion.  Il  n’est  pas  probable  qu’ils  re- 
présentent une  proportion  exacte,  puisque  les  71  faits  dus  à M. 
Andral  et  à moi  nous  fournissent  un  chiffre  si  différent,  un 
peu  moins  du  cinquième  des  cas. 

M Rostan  admet  comme  causes  du  ramollissement  toutes  les 
circonstances  qui  passentpour  avoirquelqueinfluencesui  les  affec- 
tions du  cerveau  : soled  ardent , coups  sur  la  tête,  passions  violen- 
tes, chagrins,  usage  des  alcooliques.  Mais  il  a ]ilutot  été  conduit  à 
cela  par  l’analogie  que  par  l’observation  directe  ; car,  dans  ses 
observations  comme  dans  les  nôtres,  on  n’a  presque  jamais 
noté  aucune  de  ces  cau.ses  Remarquant  que  les  prodromes  du 
ramollissement  cérébral  étaient  surtout  formés  par  des  sym- 
ptômes de  congesiion,  il  a jugé  que  toutes  les  causes  connues 
de  congesiion  cérébrale  devaient  favoriser  la  production  du  ra- 
mollissement Je  crois  bien  qu'il  a raison,  et  que  ces  causes 
peuvent  agir  dans  ce  sens  ; mais  il  n’en  est  pas  moins  certain  que 
le  I amollissement  se  développe  le  plus  souvent  chez  les  vieil- 
lards, en  dehors  de  ces  circonstances,  comme  de  toute  autre 

cause  appréciable. 


traitement  dû  ramollissement* 


49i) 


CHAPITRE  Xlll. 

TRAITEMENT  DU  RAMOLLISSEMENT  CÉRÉBRAL. 

L’histoire  du  ramollissenieuL  cérébral  me  paraît  des  plus  pro- 
pres à mettre  en  lumière  l’influence  que  l’anatomie  pathologique 
peut  exercer  sur  la  thérapeutique.  En  effet,  tant  qu’ont  dominé, 
touchant  la  nature  de  cette  maladie,  les  diverses  opinions  dont 
nous  avons  essayé  de  démontrer  l’inanité,  il  est  évident  que  la 
thérapeutique  d’une  affection  considérée  comme  analogue  à la 
gangrène,  comme  spécifique,  sénile,  etc.,  a dû  être  toute  néga- 
tive ; les  efforts  du  praticien  devaient  tendre  à peu  près  exclusi- 
vement à distinguer  ces  diverses  espèces  de  ramollissements  du 
ramollissement  inflammatoire,  le  seul  qu’il  pût  raisonnable- 
ment essayer  de  traiter  ; et  nous  savons  maintenant  qu’aucune 
tentative  sérieuse  n’a  encore  été  faite,  n’a  pu  être  faite  dans  ce 
sens. 

S’il  est  vrai,  comme  je  crois  l’avoir  démontré,  que  le  ramol- 
lissement cérébral,  chez  les  vieillards  aussi  bien  qu’aux  autres 
âges  de  la  vie,  soit  toujours,  sauf  peut-être  d’infiniment  rares 
exceptions,  une  affection  inflammatoire,  on  doit  présumer  par 
cela  seul  qu’il  n’y  a rien  dans  la  nature  de  cette  maladie  qui 
s’oppose  à sa  curabilité  ; on  trouve  dans  ce  fait  de  pathogénie 
une  source  d’indications  que  l’on,  suivra  sans  doute  avec  plus  de 
méthode  et  de  persévérance,  que  lorsqu’on  traitait  au  hasard  les 
symptômes  d’une  affection  sur  la  nature  de  laquelle  nul  ne 
pouvait  avoir  aucune  certitude. 

Rappelons  en  quelques  mots  les  circonstances  qui  doivent  le 
plus  encourager  le  praticien  dans  le  traitement  du  ramollisse- 
ment cérébral,  et  sur  l’étude  desquelles  nous  nous  sommes  par- 
ticulièrement appesantis. 

Le  ramollissement  débutant  par  une  congestion  sanguine  qui 
précède  toujours  la  de'sorganisation  de  la  pulpe  nerveuse,  il  est 
sans  doute  un  moment  de  la  maladie  où  il  sera  possible,  par 


5U0 


K A.MOLHS6KMJii\’  X C lîx,  Éi)  U A L . 


un  traitement  actif,  de  pre'venir  le  développement  de  celle  dés-  ' 
orj>,anisalion. 

L’ideutilé  des  symptômes  rend  infiniment  probable,  peut-être 
certain,  que  beaucoup  de  cas  où  l’on  a cru  guérir  une  simple 
congestion  cérébraleou  une  méningite  à son  début,  étaient  des  ra' 
mollissements  commençants,  ou  seraient  devenus  des  ramollisse' 
inents,  si  l’on  n’avait  an  êlc  à temps  la  marche  de  la  maladie. 

Le  ramollissement , une  fois  développé  , est  susceptible,  à 
peu  près  à toutes  ses  périodes,  de  subir  un  travail  de  transfor- 
inalioti  ou  de  cicatrisation,  après  lequel  tous  les  symptômes  peu 
vent  disparaître  complètement  ou  faire  place  à une  infirinilé  dé' 
sonnais  parfaitement  compatible  avec  la  vie  et  même  avec  la 
santé.  En  l’absence  même  de  ce  travail  de  cicatrisation,  les  sym- 
ptômes du  ramollissement  peuvent  s’amender  pendant  un  temps 
illimité,  de  manière  à faire  croire  à la  guérison  de  l’altération 
organique,  à simuler  par  exemple  la  guérison  d’un  foyer  hé- 
morrhagique. 

Le  point  important,  il  ne  faut  pas  l’oublier,  c’est  que  lera- 
inoUissement,  une  fois  développé,  ne  fasse  plus  de  progrès  en 
étendue.  H est  certain  cju’en  général  un  ramollissemeut,  demeu. 
rant  limité  à un  point  primitivement  atteint,  si  une  fois  le  ma- 
lade a résisté  aux  premiers  accidents,  a une  tendance  réelle  et  in- 
cessante à la  guérison,  telle  qu’on  doit  l’entendre,  toutefois,  à 
propos  dùme  lésion  organic|ue  profonde.  Les  exemples  de  ce 
.oenre,  c|ue  j’ai  présentés  dans  le  cours  de  cet  ouvrage,  paraissent 
dus  la  plupart  au  travail  de  la  nature.  Est-il  téméraire  de  pen- 
ser que  l’art  puisse  l’aider  dans  ses  efforts,  la  suppléer  parfois, 
concourir  enfin  avec  elle  dans  celte  maladie  comme  dans  tant 
d’autres  à ce  qui  est  le  but  de  notre  science,  la  guérison? 

Que  l’on  nç  s’attende  pas  toutefois  à trouver  dogmatisée 
dans  ce  chapitre  l’histoire  de  la  thérapeutique  du  ramollisse- 
ment. Habitué,  comme  on  a pu  le  voir,  à me  tenir  autant  que 
possible  dans  la  limite  des  faits  soumis  à ma  propre  observa- 
tiQi^  Qix  oflerts  par  d autres  a mon  éludé,  je  dois  m arietei  ici  , 
car,  pour  tracer  avec  vérité,  pour  présenter  avec  certitude  l his- 
toire de  la  thérapeutique  du  ramollissement,  je  ne  possède  pag 
encore  de  matériaux  suffisants  ; je  n’y  suppléerai  pas  par  de 
vains  discours. 

Si  l’on  admet  les  inO[iosilions  que  j’ai  émises  toudianl  l’oii- 


501 


TP^AlTEMr.NT  EU  P,  AAlOLLISSEAtENT. 

crine  du  ramollissement,  si  l’on  accepte  les  exemples  que  j’ai 
réunis  de  transformation  et  de  cicatrisation  de  la  substance  cé- 
rébrale ramollie,  on  reconnaîtra  que  l’iiistoire  du  ramollisse- 
ment cérébral  a fait  un  pas  dans  une  direction  reellemçnt  pra- 
tique. Sans  doute,  c’est  peu  encore  ; mais,  si  je  n’ai  pas  réussi  a 
faire  passer  dans  l’esprit  du  lecteur  la  conviction  profonde  ou 
je  suis,  que  l’art  peut  exercer  une  grande  influence  smr  la  pro- 
duction, sur  le  développement  et  sur  la  terminaison  du  ramol- 
lissement, au  moins  conviendra-t-on  , je  n’en  doute  pas,  qu  i y 
a sigulièreinent  à revenir  sur  ce  caractère  d’incurabdile  et 
de  fatalité,  dpnt  on  avait  fait  tristement  l’apanage  de  cette 

maladie. 

Préoccupé,  comme  on  l’a  vu,  pendant  tout  le  cours  des  re- 
cliercbes  dont  ce  livre  est  l’exposé,  de  la  néce.ssilé  d’éclairer 
d’abord  et  la  nature  et  la  symptomatologie  du  ramollissement, 
je  ne  pouvais  encore  envisager  cette  maladie  au  point  de  vue^ 
de  la  thérapeutique  ; telle  devait  être  la  marche  naturelle  a un 
esprit  qui  ne  voit  dans  l’empirisme  que  le  fait  du  hasard,  et  ne 
l’invociueque  comme  une  nécessité  dernière,  .l’ai  cru  pouvoir  ex- 
poser dès  à présent  les  résultats  des  recherches  auxquelles  je  me 
suislivré;  je  les  déclare  incomplets,  ces  résultats,  en  ce  sens  qu’ils 
s’arrêtentpréciséinentlà  oùl’on  s’attend  à trouver  une  conclusion 
necessaire  à ces  études,  une  justification  des  propositions  qu’elles 
émettent,  des  dogmes  ciu’elles  soulèvent.  Celte  conclusion,  lebut 
de  tous  mes  efforts  sera  de  la  présenter  un  jour  comme  complé- 
ment de  ce  travail.  Pénétré  et  logiquement  et  médicalement,  de 
son  importance,  si  j’en  entrevois  les  termes,  je  ne  veux  m l’ac- 
cepter moi-même,  ni  la  soumettre  au  jugement  public  avant 
de  lui  avoir  fait  subir  l’épreuve  d’une  expérience  suffisante. 

,îe  sais  leà'difficultés  de  celte  élude  ; mesurer  les  limites  de  la 
yiuissance  de  notre  art  dans  un  cas  donne,  cheichei  les  lois  de 
riiarmonic  qui  doit  présider  à son  inlervcnlion  dans  le  travail 
spontané  et  régulier  delà  nature,  c’est  un  problème  que  des 
conditions  .spéciales  peuvent  environner  ici  de  diffictdlés  plus 
grandes  encore  qu’aillcuvs  ; mais  quel  esprit  assez  dépourvu 
d’ardeur  et  de  foi  pour  dénier  la  possibilité  de  remplir  une  lâ- 
che à peine  encore  essayée  ? car,  je  le  demande,  quels  travaux 
suivis  ont  encore  eu  pour  but  avoué  d’arriver  à la  connaissance 


ô02  HAMOLLISSBMRNT  CÉRÉBRAL. 

(lu  traitement  et  des  modes  de  curation  du  ramollissement  cé- 
rébral ? 

Je  me  contenterai  donc,  dans  ce  chapitre,  d’exposer  les  princi- 
pales indications  à remplir  dans  le  traitement  du  ramollisse- 
ment cérébral  , et  aussi  un  petit  nombre  de  faits  intéressants 
pour  cette  étude. 

Trois  indications  principales  se  présentent  dans  la  thérapeu- 
tique du  l'amollissement  considérée  d’une  manière  générale  : 

Prévenir  le  développement  d’un  ramollissement  chez  un  su- 
jet prédisposé  ; 

Combattre  les  accidents  causés  par  l’imminence  ou  l’appari- 
tion d’un  ramollissement  ; 

Surveiller  la  marche  ultérieure  de  la  maladie,  et  s’opposer  à 
toutes  les  circonstances  qui  pourraient  venir  entraver  l’évolu- 
tion anatomique  du  ramollissement,  c’est-à-dire  la  tendance  gé- 
néralement favorable  de  la  nature. 

M.  Rostan  a parfaitement  reconnu  que  les  prodromes,  que  les 
signes  précurseurs  du  ramollissement  (ce  qu’il  appelle  impro- 
prement première  période  de  la  maladie),  tiennent  à des  con- 
gestions cérébrales  répétées;  aussi  a- 1- il  donné  pour  les  com- 
battre des  conseils  thérapeutiques  parfaitement  logiques.  Mais  il 
n’a  pas  su  voir  la  liaison  qui  unit  ces  phénomènes  de  conges- 
tion au  ramollissement  lui-même  : celui-ci  formé,  la  maladie 
■paraît  avoir  pour  lui  changé  de  nature,  et  si  des  symptômes  de 
paralysie  surviennent,  c’est  qu’alors  ces  phénomènes  de  conges- 
tion ont  fait  place  à un  état  d’asthénie.  Il  est  singulier  que  cette 
connaissance,  facile  à acquérir,  du  reste,  de  la  nature  de  ces 
signes  précurseurs,  n’ait  pas  mieux  éclairé  sur  celle  du  ramollis- 
sement lui-même.  Il  est  cependant  bien  évident  que  ces  phéno- 
mènes d’apoplexie,  de  paralysie,  sont  précisément  ceux  qui  an- 
noncent le  plus  haut  degré  de  congestion,  et  sans  doute  de 
compression  de  l’encéphale. 

11  importe  donc  beaucoup  dans  la  médecine  des  vieillards,  en 
particulier,  puisque  c’est  surtout  chez  des  personnes  âgces  que 
se  réncontre  cette  maladie,  de  savoir  que  toutes  les  fois  qu  il  se 
fait  une  congestion  sanguine  vers  la  tête,  il  y a préparation,  ten- 
dance au  ramollissement  ou  à la  désorganisation  partielle  du  cei- 
Veau,  peut-être  imminence  d’une  semblable  altération.  Il  im- 
pwtc  de  ne  pas  ignorer  que  des  lésions  profondes  de  u^xture 


r.nt 

traitement  DW  RAMOLLISSEMENT. 

peuvent  exister  clans  le  cerveau  sans  donner  d’autres  signes  de 
feur  présence  que  quelques  troubles  insign.6ants  et  peu  carac- 

léristiques  (les  fonctions  cérébrales. 

M.  Rostan  a consacré  un  chapitre  à l’hygiène  pour  le  traite- 
„,,nt  préservatif  ou  prophylactique  du  ra.nolhsseiuent.  .<  Ce 
lraitement,dit-.l  avec  beaucoup  de  raison,  ne  saurait  etre  base 
que  sur  la  connaissance  des  causes  prédisposantes  et  des  p • 
dronies  de  la  maladie,  et  l’obscurité  qui  règne  sur  ces  prédis- 
positions ne  permet  pas  d’émettre  à cet  égard  des  principes  qui 
ne  pourraient  être  que  des  conjectures.  » H ue  reste  dcMic  que 
les  prodrcmies  dont  l’appréciation  puisse  gu, dei  le  médecin  , 
mais  ces  prodromes,  étant  constitués  par  des  congestions  ceie- 
brales,  ne  nous  éclaireni-ils  pas  sur  les  prédispositions  elles- 
mêmes,  en  nous  montrant  ciue  le  retour  fréquent  des  conges- 
tions au  cerveau  prédispose  au  ramollissement?  Le  traitement 
prophylactique  le  meilleur  ne  sera-t-il  pas  aloi s celui  qu‘ Pré- 
servera le  plus  efficacement  des  coiigi'Slions  au  cerveau  . Lette 
manière  de  voir  nous  fournit  déjà  quelques  données  qui  ne  sont 
pas,  je  crois,  sans  utilité.  Maintenant  quelles  sont  les  circon- 
stances qui,  favorisant  le  relourdes  congestions  cérébrales  chez 
les  vieillards,  se  trouvent  influer  ainsi  indirectement  sut  a pio 
duction  du  ramollissement?  JS  ous  savons  quelles  nous  échap- 
pent dans  la  plupart  des  cas.  Mais  remontons  plus  haut  ; n est- 
ce  pas  la  vieillesse  elle-même  ? Nous  allons  eiilrei,  à ce  sujet, 
dans  qiielques  explications  que  l’on  ne  trouvera  pas  déplacées, 
jé  pense,  dans  ce  chapitre. 

11  est  un  cél-iain  nombre  de  vieillards  dont  la  constitution  se 
rapproche  beaucoup  de  celle  des  adultes  : par  le  développe- 
ment du  système  musculaire,  par  l’intégrité  de  la  conformation 
du  thorax  et  de  la  muiiuguse  bronchique,  par  la  vivacité  des 
allures  et  du  caractère,  et  surtout  peut-être  par  la  conservation 
des  fonctions  delà  peau.  Chezjccs  individus  la  nutrition  et 
matose  se  font  presque  ausni  rompléieinent  que  dans  les  âges 
pivcédents,  et  des  indications  à peu  près  semblables  se  pré- 
sentent, pour  prévenir  et  combattre  le  développement  des  af- 
fections aigues  et  inflammatoires. 

Mais  il  est  d’autres  vieillards  qui  offrent  des  conditions  toutes 
différentes,  des  chair.s  flasques  ou  environnées  seulement  d’un 
tissu  adipeux  mou,  la  poitrine  déformée,  le  rachis  affaissé,  l’in- 


' ''  ' nAMOLUSSRAIEKT  CÉRÉbUAL. 

tellujeiice  affaiblie,  les  mouvements  lents,  et  les  membres babi- 
ues  comme  1 esprit  à l’engourdissement  du  repos,  les  bronches 
catarrhales,  la  peau  enfin  amincie,  sèche  et  inhabile  à remplir 
ses  Jonctions  (l).  * 


Chez  ces  individus  qui  portent,  en  définitive , les  caractères 
spéciaux  de  la  sénilité,  la  vie  s’est  en  quelque  sorte  retirée  de  la 
Peripherie  ; elle  n’existe  plus  que  dans  les  deux  points  d’oii 
son  départ  sera  le  signal  de  la  mort  générale,  la  poitrine  et  la 
tete^  aussi  ces  individus  meurent  presque  uniquement  de 
pneumonies  ou  d’affections  cérébrales,  et  de  ces  dernières  au 
moins  aussi  souvent  que  ceux  à col  court,  à embonpoint  consi- 
dérable, a physionomie  animée,  et  qui  passent  pour  avoir  émi- 
nemment la  constitution  apoplectique. 

Ce  retrait  de  la  vie  et  de  l’activité  fonctionnelle  qui  en  est  le 
principal  apanage,  de  toute  la  périphérie,  et  sa  concentration 
dans  les  parties  centrales,  et  surtout  le  poumon  et  le  cerveau 
(car  1 activité  des  fonctions  abdominales  s’éteint  aussi  de  bonne 
heuie)  (2),  s obsenent  chez  tous  les  vieillards,  mais  particulière- 
ment chez  les  derniers  qui  sont  comme  le  type  de  ce  phéno- 
intMic.  On  voit  par  là  combien  manque  de  justesse  une  doct-  ine 
qui,  d’après  l’aspect  général  d’un  vieillard,  s’efforce  de  préju- 
ger de  la  nature  des  altérations  qu’il  présente,  et  hésite  à rap- 
procher l’idée  d’inflammation  et  celle  de  l’état  asthénique 
qu’amène  .si  souvent  la  vieillesse. 


Cette  donne-e  physiologique  porte  en  même  temps  avec  elle  , 
«eme  semble,  quelques  enseignements  hygiéniques  et  théra- 
peutiques. S il  est  vrai  que  la  reelle  disposition,  qui  existe  dans 
la  vieillesse  aux  affections  de  l’encéphale  et  des  poujnons,  tienne 
au  retrait  des  iorce.s  vitales,  de  la  périphérie,  et  à leur  concen- 
tration dans  les  parties  centrales,  on  voit  quelles  tendances  or- 


(1)  Il  est  ircs-prohablc,  comme  on  l’a  dit  depuis  longtemps,  et  MM.  Hour- 
mann  et  Decliambre  ont  reproduit  rccemiueut  cette  idée,  tpie  , chez  les 
v'tcill.irds,  la  supersécrétion  haititiielln  des  broiiclies  (catarrhe,  bronclior  ■ 
rlice,  etc.  ),  a généralement  pour  luit  de  suj'ple'cr  à rinactivité  fouciiobnelle 
de  la  peau. 

('?)  D’où  l’affaiblissement  des  fonctions  dige.slivcs.  la  diminution  de  l.a 
f liylification,  et,  par  suite  de  la  mitrilion,  la  constipation,...  rextrème  ra- 
reté des  nfleclions  îdtdominales  aiguës,  {f^oyez,  sur  ce  sujet,  Prus,  Ménioire 
sur  /eç  maladies  des  vieillards  dans  icsAIémoires  de  l’Académie  de  niédeeinel. 


Tr.AlTEHKNT  DU  r,A:\rOT>I*lSSliiMEIvT. 


CA)r> 

j^aniques  doivent  être  combattues,  quelles  fouctions  excitées, 
clans  quel  sens  les  moyens  propbylacliques,  les  agents  médi- 
caux devront  agir,  quelle  direction  sera  donnée  à l’hygiène  des 
vieillards,  encore  si  peu  étudiée,  à leur  thérapeutique  dont  les 
ressources  ne  sont  encore  cjue  bien  imparfaitement  connues. 

S’il  importe  de  se  préoccuper  sans  cesse  de  ces  idées  physiolo- 
giques, qui  doivent  considérablement  modifier  le  traitement 
d’une  même  affection  chez  les  différents  sujets  et  surtout  les  dil- 
férentsages,  cependant  il  faut  faire  attention  qu’au  moment  où 
débutent  d’une  façon  grave  et  rapide  les  symptômes  d’un  ra- 
mollissement, c’est  à cette  altération  elle-même  qu’il  faut  im- 
médiatement s’adresser,  c’est  la  congestion,  puis  l’Inflammation 
partielle  de  la  pulpe  nerveuse  cpi’il  faut  d’abord  combattre 
aussi  directement  et  aussi  énergiquement  que  possible.  Je  re- 
commande aux  méditations  des  praticiens  le  fait  suivant , dans 
lequel  l’action  très-évidente  du  traitement  me  paraît  propre 
à encourager  leurs  efforts  dans  ce  sens. 


Observation  127.  — Etourdissements,  pertes  passagères  de  connais" 
sance,  puis  hémiplégie  droite  devenue  graduellement  complète  ; cé- 
phalalgie, troubles  de  rintelligencc  et  de  la  parole,  douleurs  vives  dans 
lesmemhres.  Disparition  de  tous  ces  accidents-  Persistance  seulement 
d’un  peu  de  faiblesse  dans  la  main  droite. 

Madame  Garci,  âgée  de  qnarante-lmit  ans,  a toujours  mené 
une  vie  très-active  et  assez  misérable.  Elle  est  maigre 'et  d’appa- 
rence assez  chétive  ; cependant  elle  affirme  n’avoir  jamais  fait 
de  maladie  et  n’avoir  jamais  été  saignée.  Elle  a quatre  enfants. 
Les  règles  viennent  très-régulièrement  et  sont  trés-abondantes 
depuis  plusieurs  années.  Elle  était,  il  y a quelques  années,  su- 
jette à des  migraines  fortes  et  fréquentes:  il  m’a  été  impossible  de 
me  procurer  à ce  sujet  des  renseignements  bien  circonstanciés  ; 
seulement  il  paraît  (]ue  ces  migraines  ne  s’accompagnèrent  d’au- 
cun autre  phénomène  morbide,  cl  ne  semblaient  pas  influer  no- 
tablement sur  l’état  général  de  l’économie. 

Ces  migraines  avaient  notablement  diminué  de  fréquence  et 
d’intensité,  lorsrju'elles  reparurent  avec  plus  de  violence  , il  y 
a un  an.  Depuis  cette  époque,  il  arrivait  quelquefois  à la  nîa- 
lado,  la  nuit,  d’être  prise  de  mouvements  involontaires  dans  les 


ramollissement  cérébral. 

membies  inférieurs,  qui  sautaient  malgré  elle  ; elle  éprouvait 
aussi  parfois  la  même  chose  dans  le  bras  gauche.  Lorsqu’elle 
était  debout,  quelquefois  elle  ne  sentait  plus  la  terre  sous  ses 
pieds.  Elle  éprouvait  encore  de  temps  en  temps  des  étoiuflisse- 
ments,  et  on  croyait  qu’elle  allait  tomber  de  haut  mal.  Voilà, 
avec  quelques  douleurs  vagues  dans  l’épaule  et  le  bras  gauche, 
à peu  près  tout  ce  qu’elle  aurait  ressenti  pendant  plusieurs 
mois. 

Il  y a deux  mois,  elle  tomba  sans  connaissance,  rue  des  Ar- 
cis.  On  la  rapporta  chez  elle,  et  elle  reprit  ses  sens  au  bout  d’une 
demi  heure.  Une  paraît  pas  que  cette  attaque  se  soit  accompa- 
gnée de  paralysie.  Depuis  elle  e.st  encore  tombée  deux  ou  trois 
fois  à la  suite  de  violents  étourdissements;  mais  elle  revenait 
promptement  à elle.  Les  membi  es  gauches  venaient  quelquefois 
tout  à coup  à être  pris  de  faiblesse  : ainsi,  quand  elle  marchait 
ou  lorsfju’elle  travaillait;  il  lui  fallait  alors  .s’asseoir,  ou  elle 
laissait  tomber  son  ouvrage  ; mais  cela  se  dissipait  toujours  au 
bout  d’une  demi  heure  ou  d’un  quart  d’heure.  Du  reste,  elle 
sortait  toujours  pour  ses  affaires,  et  cousait  encore  il  y a quinze 
jours.  Pendant  tout  ce  temps,  elle  souffrait  de  maux  de  reins, 
de  douleurs,  surtout  dans  l’épaule  et  les  membres  gauches  : 
c’était  un  sentiment  de  froid  profond,  des  douleurs  vives.  Il  y 
avait  aussi  une  céphalalgie  iniense  et  continue.  On  me  rapporte 
également  que,  depuis  une  (juinzaine  jours,  elle  n’avait  pas 
toujours  sa  tête,  disait  des  choses  extraordinaires,  riait  sans 
propos. 

Il  y a huit  jours,  à la  suite  d’un  étourdissement  sans  perte  de 
connaissance,  il  est  survenu  de  nouveau  dans  les  membres  gau- 
ches une  faiblesse  cjui  ne  s’est  point  dissipée.  Elle  pouvait  encore 
mai  cher  et  remuer  sa  main  ; mais  la  paralysie  avait  fait  des  pro- 
grès graduels  et  rapides.  Depuis  trois  jours,  il  lui  est  impossible 
de  se  soutenir.  Je  fus  appelé  jirès  d’elle,  le  16  janvier  1842. 

Elle  éiail  jiâle,  l’air  un  peu  égaré,  la  bouche  fortement  déviee 
à droite,  les  yeux  déviés  de  ce  coté  sans  pouvoir  se  diriger 
dans  un  autre  sens  ; la  langue  se  tirait  droite  et  sans  peine.  Ea 
parole  était  monotone,  gênée;  par  instants  elle  le  devenait 
davantage,  et  la  malatle  sentait  que  sa  langue  l’cfusaitde  se  mou- 
voir. Elle  répondait  à toutes  les  qnestionsavec  beaucoup  de  pré- 
cision, mais  quelquefois  cherchait  long-temps  ou  répétait  plu- 


507 


traitement  du  ramollissement. 

sieurs  fois  la  même  chose  ; elle  riait  machinalement.  Les  pu- 
pilles, un  peu  dilatées  à un  jour  faible,  se  resserraient  à peine  a 

l’approche  d’une  lumière.  / 

Le  membre  supérieur  gauche  était  complètement  paralyse, 
sans  aucune  raideur  ; les  mouvements  du  membre  inferieur 
étaient  faibles  et  difficiles,  surtout  ceux  des  orteils.  Mouvements 

parfaitement  libres  à droite.  . r,  . 

Elle  éprouvait  des  douleurs  vives  dans  le  membre  interieui 
gauche  : c’était  comme  si  on  lui  suçait  les  os  ; c’était  une  sen- 
sation d’un  froid  profond  qui  court,  et  des  engourdissements  pé- 
nibles. Elle  avait  éprouvé  depuis  quelques  jours  la  même  chose 
dans  le  membre  supérieur  ; mais,  depuis  qu’il  était  tout  à fait 
paralysé,  elle  n'y  ressentait  plus  rien.  Elle  souffrait  seulement 
beaucoup  dans  l’épaule  et  le  long  de  l’omoplate  ; le  froid  et  le 
contact  de  l’air  augmentait  beaucoup  ces  douleurs.  Elle  avait 
souffert  également,  dans  ces  derniers.jours,  du  côte  gauche  de  la 
face;  il  lui  semblait  qu’il  était  enflé.  La  sensibilité  cutanée  était 
partout  normale.  Il  y avait  une  céphalalgie  vive,  continue, 
siégeant  toujours  au  sommet  de  la  tête,  sui  la  ligne  médiane. 
La  déglutition  était  naturelle.  Il  n’y  avait  pas  de  constipation  ; 
l’émission  des  urines  était  volontaire.  L’état  général  paiaissail 
très  bon  : le  pouls  était  ferme,  régulier,  médiocrement  déve- 
loppé, la  peau  naturelle,  la  langue  normale;  appétit,  pas  de 
soif.  (15  sangsues  sous  V oreille  droite  ; sinapismes^  compresses 
imbibées  d'eau  vinaigrée  sur  latête  ; limonade,  bouillon). 

17.  Il  n’a  pris  que  sept  sangsues  à cause  de  l’impatience  de 
la  malade.  Elle  me  paraît  dans  le  même  état,  bien  qu  elle  se 
trouve  elle-même  un  peu  mieux.  [Poser  le  reste  des  sangsues  ; 
lavement  avec  trois  gouttes  d'huile  de  crolon). 

18.  Il  y a un  mieux  notable.  La  malade  se  sent  la  tete  déga- 
gée, moins  douloureuse  ; ses  idées  sont  plus  nettes;  ses  réponses 

. promptes,  faciles.  Elle  remue  un  peu  les  orteils.  Rien  de  nou- 
veau, du  reste.  Les  sangsues  ont  coulé  tres-abondaininent  ; le 
lavement  a produit  peu  d’effet  [f^ésicatoire  au  col). 

20.  L’intelligence  et  la  parole  ont  repris  leur  état  normal. 
La  malade  soulève  un  peu  le  membre  supérieur  gauche  ; elle 
n’y  éprouvait  aucune  sensation  depuis  qu’il  était  entièrement 
paralysé  ; hier  elle  v a senti  des  douleurs  vives,  allant  du  coude 
au  poignet,  et  des  fourmillements  dans  les  doigts,  ain.si  que 


508 


RAAtOT,LlS5ElWI'.NT  CÊra^EllAL. 

dans  le  pied.  Elle  se  soutient  un  peu  sur  ses  jambes,  et  fait 
meme  un  ou  deux  pas  sans  appui.  La  céphalalgie  est  assez  vive  ; 
les  douleurs  des  membres  n’ont  pas  diminué  {Prendre  le  matin 
pendant  quatre  jours  15  grammes  desuljate  de  soude). 

Selles  abondantes  sans  coliques.  Le  vésicatoire  du  cou  est  dou- 
loureux et  suppure  abondamment.  La  marche  devient  tous  les 
jours  plus  facile.  Il  est  survenu  une  bronchite  qui  fatigue  beau- 
coup la  malade.  Elle  s’attriste  ; elle  demeure  tout  le  jour  assise 
sur  un  fauteuil,  quelquefois  même  la  nuit. 

26.  Presque  plus  de  céphalalgie,  plus  de  dotdeurs  dans  l’é- 
paule gauche.  Pour  la  première  fois,  elle  meut  assez  bien  le 
coude,  le  plie,  porte  l’avant-bras  dans  la  pronation  ; il  ne  se  fait 
encore  aucun  mouvement  des  doigts  ni  du  poignet.  Fourmille- 
ments dans  la  main  jusqu’au  bout  des  doigts.  Douleurs  vives, 
secousses  pénibles  et  répétées  de  la  jambe  gauche;  hier  elle  était 
plus  faible.  Il  est  survenu  à plusieurs  reprises  un  peu  d’embar- 
ras dans  la  langue.  Pouls  naturel,  assez  développé.  La  malade 
s’inquiète  beaucoup. sons  V oreille  droite  ; sina- 
pismes aur  poignets). 

Les  sangsues  ont  donné  beaucoup  de  sang  ; il  y a eu  soulage- 
ment immédiat.  Dès  la  nuit  suivante,  la  malade  s’est  sentie  la 
tête  dégagée,  la  langue  plus  libre  {Faire  des  frictions  sur  le  mem- 
bre supérieur  gauche  avec  un  Uniment  ammoniacal). 

A février.  Elle  est  gaie,  et  dit  sentir  tous  les  jours  du  mieux. 
Elle  marche  bien  ; elle  porte  la  main  à sa  tète,  et  plie  le  coude 
sans  aucune  difficulté;  elle  essaie,  mais  avec  beaucoup  de  peine, 
quelque.s  mouvements  depronation  et  de  supination.  Les  doigts 
demeurent  immobiles  ; cependant  elle  dit  que,  lorsqu’elle  s’étire 
dans  son  lit,  sa  main  se  ferme  quelquefois  avec  tant  de  force  que 
ses  ongles  lui  entrent  dans  la  chair.  Elle  n’éprouve  plus  rien 
dans  la  tète.  Elle  a quelques  douleurs  dans  les  membres, 
les  os,  mais  légères  ; des  rourmillements  aux  extrémités.  Les 
selles  sont  naturelles,  l’appétit  est  très-grand,  elle  tousse  tou- 
jours. l'ille  a suppriim:  son  vésicatoire. 

8 février.  Lorsqu’on  introduit  un  corps  quelconque  entre  les 
doigts,  ceux-ci  se  ferment  avec  assez  de  lorce  ; mais  ils  demeu- 
rent immobiles  si  la  main  est  vide  {Foser  de  nouveau  un  vésica- 
toire à la  nuque). 


' ' I 

TUAITEMEJXT  eu  IlAMOLLlSSEMENT.  '3^*9 

lo.  Elle  soulève  sa  chaulïeietle  de  la  main  gauche.  Depuis 
lors  le  mieux 'marche  rapidement. 

20  mars.  Elle  fait  plus  d’une  lieue  à pied  sans  se  fatiguer  beau- 
coup. Les  mouvements  du  bras  gauche  sont  naturels,  mais  les 
doigts  n’ont  pas  encore  recouvré  toute  leur  force  ; ils  peuvent 
nouer  une  rosette,  mais  c’est  l’action  la  plus  délicate  qu’ils 
puissent  opérer.  Il  n’y  aplus  de  douleurs,  ni  de  fourmillements, 
ni  d’engourdiss,ements  dans  le  côté  gauche  du  corps,  mais  seu- 
lement des  douleurs  rhumatismales  auxquelles  elle  est  sujette 
depuis  longtemps,  qui  se  montrent  également  dans  les  quatre 
membres,  et  que  la  malade  trouve  bien  différentes  de  celles 
qu’elle  ressentait  naguère  dans  les  membres  gauches.  11  n’y  a 
plus  jamais  de  céphalalgie.  Intégrité  parfaite  de  l’intelligence  et 
de  la  parole.  L’état  général  paraît  également  satisfaisant.  La 
bronchite  s’est  dissipée. 

Elle  était  exactement  dans  le  même  état  au  mois  d’août,  .le 
dois  ajouter  que,  d’après  les  personnes  qui  vivent  avec  elle,  ses 
facultés  intellectuelles  et  son  caractère  auraient  conservé  quel- 
que ressentiment  de  sa  maladie  ; ainsi  sa  mémoire  est  affaiblie  : 
elle  a souvent  des  absences,  son  humeur  est  bizarre. 

.le  ne  l’ai  point  revue  depuis  la  lin  du  mois  d’août. 


J’ai  rapporté  cette  observation  dans  tous  ses  détails,  afm  que 
la  question  du  diaposticue  laissât  aucun  doute  dans  l’esprit  du 
lecteur.  Je  crois  que,  malgré  1 absence  de  renseignements  ana- 
tomiques, 1 existence  d un  ramollissement  est  évidente  ; non 
seulement  la  marche  des  symptômes  a été  toutâ  fait  caracléris- 
tique  de  cette  maladie,  mais  encore  il  est  facile  de  prouver 
qu  ils  ne  peuvent  être  rapportés  à aucune  autre  chose  crii’à  un 
ramollissement. 

Serait-ce  à une  hémorrhagie  ? Mais  l’existence  d’une  hémi- 
plégie,  graduellement  croissante  et  accompagnée  de  douleurs 
vives  dans  les  membres,  suffirait  pour  éloigner  d’une  façon  ab- 
solue l’idée  d’une  semblable  altération.  Serait  ce  à une  tumeur 
du  cerveau?  Mats,  dans  cette  hypothèse,  comme  on  ne  pourrait 
se  flatter  d avoir  guéri  la  tumeur  elie-inêine,  il  faudrait  bien  ad- 
mettre  que  les  accidents  que  nous  avons  eu  à combattre  seraient 

nos  sous  1 influence  d’un  rainollisscnicul  voisin  de  cette  lésion 


4 


510 


ramollissement  cérébral. 


oî(^anique,  et  dont  on  aurait  arrêté  les  progrès,  ce  qui  revien- 
drait, comme  on  le  voit,  absolument  au  même  ; seulement  ce 
serait  une  hypothèse  toute  gratuite  et  même  fort  improbable, 
car,  s’il  eût  existé  une  tumeur  dans  le  cerveau,  ces  accidents  ne 
se  fussent  pas  ainsi  dissipés.  Enûn  il  n’y  a assurément  aucune  es- 
pèce d’altération  hémorrhagique  ou  inflammatoire  des  mé- 
ninges, à laquelle  on  puisse  être  tenté  d’attribuer  les  phéno- 
mènes dont  nous  avons  rendu  compte. 

11  est  donc  certain  que  nous  avons  eu  affaire  à un  ramollisse- 
ment, non  seulement  parce  que  les  symptômes  observés  ont  été 
tout  à fait  caractéristiques  de  celte  maladie,  mais  aussi  parce  qu’il 
est  impossible  de  les  attribuer  à aucune  autre.  La  conviction  du 
lecteur,  à cet  égard,  devra  se  baser  moins  encore  sur  les  phéno- 
mènes d’état  de  la  maladie,  c’est-à-dire  ceux  que  nous  avons 
constatés  à notre  premier  examen,  que  sur  ceux  qui  ont  accom- 
pagné son  développement,  et  même  les  légères  traces  qu’elle  pa- 
raît devoir  laisser  indéfiniment. 

Quant  au  traitement,  ses  effets  ont  été  des  plus  prononcés  : 
malgré  la  gravité  des  symptômes,  malgré  leur  marche  inces- 
samment croissante,  ils  ont  cédé  avec  une  facilité  inespérée  aux 
moyens  employés,  et  je  crois  qu’il  serait  difficile  de  trouver  un 
fait  qui  mît  mieux  en  évidence  les  rapports  qui  peuvent  exister 
entre  un  traitement  et  la  disparition  des  accidents  auxquels  il 
est  opposé. 

Je  ne  pense  pas  que  la  persistance  d’un  certain  degré  de  fai- 
blesse dans  les  doigts  d’un  membre,  naguère  paralysé,  doive 
nous  empêcher  de  regarder  ce  fait  comme  un  exemple  de  ra- 
mollissement guéri.  Sans  doute,  à l’époque  où  j’ai  été  appelé,  il 
s’était  déjà  produit  dans  un  point  de  la  pulpe  nerveuse  une  dés- 
organisation trop  avancée  pour  qu  il  fût  possible  de  la  ramener 
à son  état  normal.  Une  semblable  circonstance,  certainement 
tout  à fait  au  dessus  des  ressources  de  l’art,  doit,  du  reste,  d’au- 
tant moins  décourager  le  praticien,  que  les  exemples  de  lésions 
anciennes,  cicatrices  ou  cavités  du  cerveau,  trouvées  chez  des 
individus  entièrement  débarrassés  de  tous  accidents  cérébraux, 
sont,  comme  nous  l’avons  vu,  trop  fréquents  pour  que  l’on  ne 
puisse  conserver  dans  tous  les  cas  l’espérance  d’obtenir  une  gué- 
rison plus  complète  encore  que  celle  de  la  femme  Garci. 

Je  ferai  remarquer  que  dans  ce  cas,  ce  n’est  pas  la  médecine  des 


traitement  du  ramollissement.  511 

symptômes,  mais  celle  de  l’altéi  ation  anatomique  que  j’ai  faite  ; 
il  en  a été  de  même  dans  le  suivant  : 

Observation  laS. — Hémiplégie  survenue  graduellement , anesthésie 
incomplète,  céphalalgie.  — Diminution  de  tous  les  symptômes,  retour 
de  la  sensibilité,  à la  suite  d’une  application  de  sangsues. 

Une  femme,  âgée  de  soixante-dix.  ans,  était  entrée  à l’infir- 
merie de  la  Salpétrière,  au  mois  d’octobre  1839,  pour  un  em- 
barras gastrique  qu’un  vomitif  dissipa  prornplemenl,  lorsque  je 
m’aperçus  qu’elle  présentait  des  accidents  cérébraux  assez  pro- 
noncés, bien  qu’elle  ne  se  fût  pas  plaint  d’elle  même.  Elle  me 
donna  les  renseignements  suivants  : elle  avait  commencé  un  an 
auparavant  à devenir  sujette  à de  la  céphalalgie,  ou  pliiiôt  à un 
sentiment  pénible  de  pesanteur,  siégeant  aü  sommet  et  au  côté 
gauche  de  la  tête.  En  même  temps  la  jambe  droite  avait  com- 
mencé à s’affaiblir  ; elle  la  traînait  en  marchant  ; plus  tard  la 
faiblesse  avait  gagné  le  membre  supérieur  du  même  côté  ; elle  ne 
portait  son  verre  et  sa  cuiller  à sa  bouche  qu’en  tremblant  ; il  lui 
était  impossible  de  soulever  un  corps  un  peu  pesant,  et  sa  main 
ne  pouvait  serrer  que  légèrement.  Quelquefois  ses  doigts  se  rai- 
dissaient et  ne  pouvaient  plus  se  fermer.  Elle  éprouvait  aussi 
dans  ses  membres  des  engourdissements  continuels,  douloureux, 
quelquefois  des  crampes  légères,  et  une  sensation  de  froid  per- 
manente ; de  légers  engourdissements  se  faisaient  également 
sentir  dans  le  côté  droit  de  la  face  et  du  tronc  ; rien  de  sembla- 
ble dans  la  moitié  gauche  du  corps.  La  sensibilité  au  pince- 
ment, à la  piqûre  avec  une  épingle,  était  inhniment  moindre 
dans  les  membres  du  côté  droit  que  dans  ceux  du  côté  gauche. 

La  bouche  n’était  pas  déviée,  mais  le  sillon  naso-labial  gauche 
beaucoup  plus  élevé  que  le  droit.  La  parole  avait  un  caractère 
particulier  de  monotonie  et  de'lenteur  qui  avait  fixé  le  premier 
mon  attention  sur  l’état  du  cerveau  ; elle  éprouvait  de  temps  en 
temps  un  peu  de  difficulté  à s’exprimer.  L’intelligence  parais- 
sait en  bon  état,  seulement  elle  sentait  que  sa  mémoire  s’affai- 
blissait. L’étal  général  s mblait  assez  satisfaisant  ; mais  la  ma- 
lade était  maigre  , le  teint  pâle  ou  plutôt  un  peu  jaunâtre  et 
dépourvue  de  toute  vivacité. 

On  posa  trente  sangsues  aux  apophyses  mastoïdes. 

Dès  le  lendemain  il  y avait  un  changement  remarquable  dans 


512 


llAMOLLlSSlC.ME^T  CIÎUÉJUIAL. 


1 état  de  cette  lemine  : la  tète  était  beaucoup  moins  lourde,  les 
engourdissements  des  membres  diminués:  elle  se  sentait  les 
membres  droits  beaucoup  plus  forts,  et,  en  effet,  elle  serrait  bien 
mieux  de  sa  main  droite  ; enfin  la  peau  avait  recouvré  toute  sa 
sensibilité. 

Elle  demeura  encore  quinze  jours  à rinfirmerie  sans  que  cette 
amelioration  se  démentît  un  instantj  mais  il  ne  nous  fut  pas 
possible  de  la  décider  à y demeurer  plus  longtemps. 


Il  est  bien  a regretter  que  cette  femme,  insouciante  comme 
presque  tous  les  vieillards  des  hospices,  n'ait  pas  voulu  rester 
davantage  à 1 iuûrmeriej  il  eût  été  curieux  de  voir  jusqu’à  quel 
point  un  traitement  méthodique  eût  pu  rappeler  l’intégrité  de 
ses  facultés  lesees.  J’ai  rapporté  ce  fait,  tout  incomplet  qu’il  soit, 
à cause  des  conditions  où  se  'trouvait  cette  femme  : son  âge,  sa 
pâleur,  sa  maigreur,  son  peu  de  vivacité,  la  date  de  sa  maladie 
qui  paraissait  remonter  à un  an,  la  nature  des  accidents  qui  con- 
sistaient en  un  simple  affaiblissement  sans  pliénomènes  doulou- 
reux ni  de  réaction,  rien  ne  semblait  indiquer  l’iililité  des  émis- 
sions sanguines,  et  cependant  une  amélioration  immédiate  et 
bien  prononcée  suivit  l’emploi  de  ce  moyen.  C’est  qu’il  faut  bien 
SS  convaincre  que  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas  le  ramol- 
lissement est  une  affection  toute  locale,  d’autant  plu^  indépen- 
dante, pour  ainsi  dire,  du  reste  de  l’économie  qu’elle  est  plus 
ancienne,  mais  s’en  isolant  souvent  même  dès  son  principe  ; et 
cela  est  aussi  vrai,  en  général,  de  la  congestion  qui  en  est  le 
point  de  départ,  que  du  ramollissement  lui-même- 

Je  termine  ici  ce  chapitre  que  l’on  trouvera  encore  trop  long 
en  considérant  le  peu  de  choses  qu’il  contient.  J’ajouterai  seu- 
lement, pour  résumer  mes  idées  sur  ce  sujet,  que  je  crois  que  le 
traitement  du  ramollissement  doit  être  basé  à la  fois  sur  la  con- 
naissance de  la  nature  de  l’altération  elle-même  qui  le  constitue, 
et  des  conditions  physiologiques  que  présentent  les  individus 
chez  lesquels  on  l’observe.  La  nature  du  ramollissement,  on 
pensera  peut-être  qu’elle  est  suffisamment  éclairée  par  les 
études  dont  ce  livre  est  l’exposé  ■,  quant  à la  seconde  source 
d’indications,  je  désire  que  l’on  trouve  (lignes  de  méditation  les 
courtes  considérations  que  j’ai  présentées  à ce  sujet  dans  les 
pages  précédentes. 


«Amollissemenï  chez  les  enfants. 


010 


APPENDICE. 


DD  nAMOLLISSBMENT  CÉRÉBRAL  CHEZ  LES  ENFANTS. 


J’ai  laissé,  faute  d’observation  personnelle,  une  lacune  dans 
cet  ouvrage  en  ne  parlant  pas  du  ramollissenient  cérébral  chez 
les  enfants.  Je  suis  heureux  de  pouvoir  y suppléer  à l’aide  de 
l’article  suivant,  que  MM.  les  docteurs  Rilliet  et  Barthez  ont 
bien  voulu  me  communiquer. 

« Le  ramollissement  du  cerveau,  maladie  si  fréquente  chez 
les  vieillards,  plus  rare  chez  Tadulte,  l’est  encore  davantage  dans 
les  premières  années  de  la  vie.  Nous  ne  voulons  pas  dire  cepen- 
dant qu’on  n’observe  jamais  chez  l’enfant  une  diminution  de 
consistance  partielle  ou  générale  du  tissu  cerebial  ; mais  nous 
prétendons  c|ue  , comme  maladie  idiopathique  , sui  generis, 
ayant  ses  symptômes  spéciaux  et  sa  marche  propre,  le  ramollis- 
sement du  cerveau  chez  l’enfant  est  une  maladie  tout  à fait  ex- 
ceptionnelle. Nous  n’avons  rencontré  de  ramollissement  que 
dans  les  circonstances  suivantes  : 

« l°Chez  des  enfants  qui  avaient  succombé  à des  maladies  de 
nature  très-différente,  et  dont  les  ventricules  contenaient  une 
plus  ou  moins  grande  quantité  de  sérosité,  la  voûte  à trois  pi- 
liers, le  septum  luciditvi,  et  quelquefois  les  parois  ventriculaires 
étaient  ramollis  dans  une  plus  ou  moins  grande  étendue  ; 
mais,  comme  nous  avons  cherché  à le  prouver  ailleurs,  cette  lé- 
sion, qui  du  reste  ne  s’était  révélée  pendant  la  vie  par  aucun 
symptôme,  n’était  qu’un  simple  œdème. 

" 2“  Dans  des  cas  où  le  ramollissement  était  consécutif  à des 
lésions  cérébrales  anciennes,  et  s’était  développé  soit  autour 
d’elles,  soit  dans  des  points  voisins.  Ainsi  nous  avons  vu  la  pulpe 
cérébrale  ramollie  au-dessous  de  la.  pie-mère  enflammée,  au- 
tour des  granulations,  des  tubercules  cérébraux,  des  produits 
accidentels,  de  l’induration  de  la  substance  cérébrale,  des  foyers 

33 


5i4 


RAMOLLISSEMENT  CÉRÉBRAL. 


hémorrhagiques  , etc.  Dans  tous  ces  cas  , le  ramollissement 
était  évidemment  secondaire. 

« Les  différentes  observations  consignées  dans  les  journaux 
de  médecine  confirment  presque  entièrement  le  résultat  auquej 
nous  sommes  arrivés.  za, 

« Parmi  les  faits  parvenus  à notre  connaissance,  nous  n’en 
avons  trouvé  que  deux  qui  nous  paraissent  des  exemples  incon- 
testables de  ramollissement  idiopathique. 

Observation.  Ramollissement  aigu  du  corps  strié. 

M Un  enfant  de  trois  ans,  fort  et  bien  portant,  après  avoir 
passé  une  nuit  très-tranquille  et  déjeuné  avec  appétit,  fut  pris 
tout  à coup  de  convulsions  générales  violentes.  Le  docteur  Ni- 
roch,  appelé  aussitôt,  le  trouva  dans  l’état  suivant  : yeux  ha- 
gards et  immobiles,  pupilles  très-dilatées,  pouls  petit  et  fré- 
quent, respiration  entrecoupée  et  difficile,  intelligence  entière- 
ment abolie. 

« 11  demeura  dans  cet  état  pendant  cinq  heures  ; alors  tout  le 
côté  droit  du  corps  fut  frappé  de  paralysie.  Les  membres  gauches 
s’agitaient  violemment  ; les  yeux  étaient  loitemeut  déviés  à 
gauche  (deux  applications  de  sangsues,  calomélas,  sans  soulage- 
ment). La  nuit  fut  mauvaise.  Le  lendemain  cependant  il  y eut 
plus  de  calme  -,  l’enfant  se  dressa  plusieurs  fois  sur  son  séant,  et 
donna  quelques  signes  d’intelligencej  l’hémiplégie  paraissait 
même  avoir  diminué.  Mais  cette  amélioration  apparente  fut  de 
courte  durée  ; bientôt  survinrent  les  signes  précurseurs  de  la 
mort  et  l’enfant  succomba  dans  la  nuit,  quarante  heures  après 
l’apparition  des  premiers  symptômes. 

« Autopsie. On  trouva  un  ramollissement  du  corps  strié 

gauche,  qui  était  réduit  en  bouillie,  d’un  rouge  brun,  n’offrant 
plus  aucune  trace  d’organisation.  Toutes  les  autres  parties  de 
l’encéphale  et  les  différents  organes  de  la  poitrine  et  de  l’abdo- 
men étaient  dans  leur  état  normal  {JVochenschrift  für  die  ge- 
samt  JJeilk.  m7,  n»  11.  Extrait  des  Archwes  de  Médecine).  » 


Jl  J 


RAMOLLISSEMÉJNX  chez  les  EM'ANi'S. 

OBsiiR<r4rioN.  Pendaul  U-énlC-liull  heures,  syiniUÙmes  fugaces  (icu  cvi- 
dents.Morl  subite.  = Ramollissement  de  la  loialité  du  cervedU  Cl  du  cer- 
velet. 

« Un  enfant  de  trois  ans,  fort,  bien  portant,  de  facullcs  pré- 
coces, parût  un  soir,  après  dîner,  légèrènient  indisposé  ; il  se 
plaignait  un  peu  de  la  tête.  Nuit  agitée.  Le  lendemain,  il  se  leva 
comme  à rordinaire,  et  ne  présenta  dans  la  journée  que  moins 
d’appétit, un  peu  de  céphalalgie,  et  quelcpiés  vomissements  ver- 
dâtres. Le  soir,  sommeil  calme,  sans  fièvre,  face  un  peu  pâle. 

» La  nuit  fut  calme,  meilleure  que  la  précédente.  Le  matin, 
il  vomit  une  ou  deux  fois  ; on  crut  remarquer  quelques  indices 
dé  délire.  A neuf  heures,  il  survint  de  l’assoupissement;  à onze 
heures,  cet  assoupissement  n’était  pas  très-profond  ; on  ne  pou- 
vait lui  parler  ni  le  toucher  sans  lui  arracher  des  cris  aigus  : pouls 
naturel,  peau  fraîche,  intégrité  des  mouvements.il  n’y  avait 
absolument  que  de  l’assoupissement.  Un  moment  après,  comme 
on  allait  lui  mettre  les  sangsues,  l’enfant  expira  tout  à coup. 

« Autopsie  dix-sept  heures  après  la  mort.  — Crâne  volumi- 
neux, bien  ossifié.  Sinus  de  la  dure-mère  gorgés  de  sang.  A me- 
sure qu’on  incisait  celte  membrane,  le  cerveau  s’échappait  par 
l’ouverture.  Circonvolutions  un  peu  aplaties.  La  portion  d’a- 
rachnoïde qui  recouvre  la  convexité  des  hémisphères  était 
rouge,  injectée;  on  n’y  remarquait  ni  opacité  ni  exsudation. 
Elle  présentait  surtout  cette  rougeur  sur  l’hémisphère  droit,  vers 
le  lobe  moyen  duquel  elle  était  comme  ecchymosée.  Près  de 
cet  endroit  existaient  deux  taches  blanches,  irrégulières,  ayant 
à peu  près  un  pouce  dans  leur  plus  grand  diamètre.  Ici  Varach- 
no'ide  manquait.,  et  la  couleur  blanche  appartenait  à la  substance 
corticale,  qui  était  considérablement  ramollie.  Toute  la  sub- 
stance du  cerveau  et  du  cervelet  était  dans  un  état  de  mollesse 
tel  qu’on  ne  pouvait  la  toucher  sans  la  détruire.  Il  n’y  avait  pas 
une  goutte  de  sérosité  dans  les  ventricules.  On  retrouva  à la 
face  interne  de  la  dure-mère,  à l’endroit  qui  correspondait  aux 
deux  taches  blanches  qui  ont  été  notées,  de  la  bouillie  céré- 
brale qu’on  recueillait  sur  le  scalpel.  Le  cerveau  n’était  point 
injecté  de  sang.  Rien  dans  la  poitrine  ni  dans  l’abdomen,  si  ce 
n’est  de  la  rougeur  dans  quelques  points  de  la  muqueuse  iléale, 


UAMOLLISSEMENT  CÉRÉBRAL. 


51  (S 

et  de  rengorgement  dans  les  glandes  du  mésentère  (observation 
empruntée  au  docteur  Deslandes)  (1).  w 

SuituntroisièinefaitcommuniquéparM.Durand, ancien  interne 
de  1 hospice  des  Enfunts-IVlaladesy  avec  abcès  sigu  du  cerveau. 

« Les  autres  faits , ajoutent  MM.  Rilliet  et  Barthez,  insérés 
dans  les  journaux  de  médecine,  sous  le  titre  d’encéphalite,  de 
ramollissement  jaune,  etc.,  appartiennent  aux  inflammations  ou 
ramollissements  secondaires,  et  sont  pour  la  plupart  liés  à des 
affections  organiques  de  l’encéphale  (2).  » 

Il  faut  cependant  ajouter  aux  observations  rapportées  par 
MM.  Rilliet  et  Barthez  deux  observations  que  j’ai  empruntées  à 
MM.  Lallemand  et  Raikein,  de  ramollissement  aigu  trouvé  chez 
un  enfant  de  trois  ans  (3),  et  d’un  an  (4). 

Billard  parle  d’uii  l’amollissement  du  cerveau  qu’il  aurait  as- 
sez souvent  rencontré  chez  les  enfants  nouveau-nés.  « 11  est, 
dit-il,  une  lésion  propre  à l’encéphale  des  nouveau-nés,  et  qui  est 
le  résultat  évident  des  congestions  de  cet  organe.  Je  veux  parler 
d’une  espèce  de  ramollissement  local  ou  général,  qui,  loin  de 
présenter  les  caractères  de  rinflammation,  offre  au  contraire 
tous  les  signes  propres  à indiquer  la  décomposition,  et  l’on  pour- 
rait dire  la  putréfaction  de  l’organe. 

<1  iJn  enfant,  affecté  d’un  endurcissement  général  du  tissu 
cellulaire,  mourut  le  sixième  jour  après  sa  naissance  sans  avoir 
présenté  de  symptômes  cérébraux  appréciables.  Les  organes 
étaient  généralement  gorgés  de  sang  ; les  méjiinges  étaient  très- 
injectées  ; la  pulpe  cérébrale  rougeâtre,  réduite  en  une  bouillie 
floconneuse,  qui  s’écoulait  de  tous  côtés  lorsqu’on  incisait  l’a- 
rachnoïde, et  qui  répandait  partout  une  odeur  sulfurée  très- 
prononcée.  Ce  ramollissement  s’étendait  jusqu’aux  ventricules 

(t)  Celle  ob.servalion,  curieuse  sous  beaucoup  de  rapporls  , pre'senlc  en 
parliculier  une  circonstance  assez  extraordinaire  : je  veux  parler  de  celle 
destruction  partielle  de  la  pie-mère  et  de  l’aracbnoide.  M.  Littrë  a rencon- 
tre une  semblable  alleValion  des  mCniinges,  au  niveau  de  ramollisscmenls 
aigus  multiples  sur  un  même  licniispbcre.  (Voyez  Journal  hebdomajairç, 
t.  1,  p.  212,  1828.)  .Te  n’ai  moi-inèiuc  jamais  rien  rcnconlr(!  de  semblable. 

(2)  Rilliet  cl  Barthez,  Traite  clinique  et  pratique  des  maladies  des  en- 
fants^ t.  1 . 

(3)  Observation  8,  p.  28. 

(.j)  Observation  12,  p.  4"-  ... 


RAMOLLISSEMENT  CHEZ  LES  ENFANTS.  51/ 

latéraux,  où  se  irouvaltuae  assez  grande  quantité  de  sang  épan- 
dU  ;Te  «s,e  du  «.  veau  était  r„..oUi,  et  d'une  couleut  v.ola- 
cée  i mais  il  était  loin  d'élve  diffluent  comme  lapaitie  desl.e- 

inispUères  supérieure  aux  venincules. 

<t  On  voit,  ajoute  Billard,  que  cette  désorganisation  generale 
delà  pulpe  du  cerveau  était  le  résultat  de  son  contact  et  de  son 
«Ange  avec  le  sang  épanché  dans  les  vent,. cules,  et  .nfiitte 
dans  la  substance  propre  du  cerveau.  Ce  ra.noll.ssement  .e- 
.uarquable  par  sa  couleur  lie  de  vin,  et  par  son  odeur  d h,d.<^- 
Bène’sulfuré.  est  souvent  le  résultat  du  mélangé  du  sang  avec  la 
substance  du  cerveau,  car  il  y a presque  toujours  en  ...en.e 

tcrpsune  hémorrhagie  cérébrale.  D’un  autre  cote,  je  sms  porte 

à croire  que  le  ramollisse.nent  peut  précéder  1 hemo.  rbag.c, 
peut-être  même  y donner  lieu,  car  je  l’ai  trouve  plusieurs  fois 

sans  épanchement  sanguin.  , r • 

<t  Le  ramollissement  dont  je  parle  n existe  quelquefois  que 
dans  un  seul  lobe,  quelquefois  dans  les  deux  ; tres-souvenl  toute 
la  masse  cérébrale  est  ainsi  détruite  : on  ne  trouve  plus  en  ou- 
vrant le  crâne  qu’une  bouillie  floconneuse,  noirâtre  et  melangee 
d’un  grand  nombre  de  caillots  de  sang  et  de  flocons  pulpeux. 
Un  fait  très-particulier,  c’est  que  les  méninges  restent  toujoui s , 
étrangères  à cette  désorganisation  ; la  moelle  alongee  et  la  moelle 
épinière  demeurent  le  plus  ordinairement  intactes. 

«J’ai  trouvé  ce  ramollissement  chez  des  nouveau-nes  morts 
presque  immédiatement  après  la  naissance,  ce  qui  me  portait  a 
croire  qu’il  avait  eu  lieu  pendant  le  séjour  de  l’enfant  dans  1 u- 

térus.  (!}.  “ . , 

Le  docteur  James  Copland  (2)  dit  avoir  remarque,  comme 

Billard,  que  le  ramollissement  cérébral  était  ires-frequent  chez 

les  petits  enfants,  chez  qui  il  précède  souvent  la  naissance,  et  il  y 

a trouvé  comme  lui  une  odeur  d’hydrogène  sulfuré  (5). 


fl)  Hillard,  Traite  des  maladies  des  enfants  nom>eau^nés  , 3»  édition  , 
p.  6G7  et  siiiv. 

(2)  J.  Copland,  Dicl.  qf  praciical  medecine,  t.  i,  p.  SI.*). 

(3)  J’avais  annoncé,  page  209,  une  appendice  sur  l’élude  microscopique 
du  raniollissemenl  cérébral,  mai.s  je  n’ai  pu  malheureusement  me  procurer 
encore  qu’une  partie  d’un  irayail  étranger,  dout  l’analyse  devait  faire  l 
sujet  de  cette  appendice. 


J a,  ™ occasu,,,  a»  ctcr  ol  .U.  p|„3ie„,^  foi» , ,, 

»onrs  de  ce  iravail,  des  olisoi  vations  cl  des  «i, inions  de  M le  doc- 

<en,.  Declambre,  rapponfe  l-ar  les  amènes  du  Co,„pe„Æ„m  A 
medec,„e  pratique  (art.  R*molusse.,e»i  du  enavEAu,  année 
1835  ).  Cet  estnnaUe  confière  n.>  fait  remarquer  qq’il  ne  saura.! 
accepter  aujourd’hui  l’entière  responsalnlitédeces  citations,  com- 
muniquées, d’ailleu,»,  à une  époque  oi,  il  ne  possédait  encoi  e 
(]iic  des  matériaux  incomplets. 


Je  me  fais  un  plaisir  de  rapporter  ici  cette  déclaration  , tout  en 
faisant  observer  à M.  Decbambre  que  la  forme  donnée  à ces  cita- 
tions ne  Im  permet  pas  d’en  décliner  entièrement  la  responsabilité, 
tant  qu’il  n’en  aura  pas  fait  le  sujèt  d’une  réclamation  formelle.  ' 


table  des  matières 


Préface.  . • • • • . . • • 

Division  du  ramollissement 


I 

PREMIÈRE  PARTIE. 

RAMOIXISSEMENT  AlGV. 


CHAPITRE  PREMIER. 

Pag. 


Anatomif  PATHonoGiQUE  DU  ramolussbmert  aigu 

Aat.  I.  Caractères  anatomiques  du  ramollissement  aigu. . . 

§ T.  Siège  . • '• 

§ II.  Consistance 

Delà  consistance  normale  du  cerveau.  • • 

§ lll.  Couleur.  -, 

Rongeur 

De  la  coloration  jaune  dans  le  cerveau.  . . 

§ IV.  Modifications  dans  la  forme  du  cerveau.  . . 

§V.  État  du  reste  du  cerveau  et  des  méninges  . . 

Injection  des  méninges 

Sérosité  dans  les  méninges 

Adhérences  de  la  pLe-racre 

Art.  II.  Observations.  . • • u'  ' 

§ l.  Observations  pour  faire  connaître  le  ramollisse- 
ment aigu  dans  lasubstance  médullaire,  avec 
injection  , puis  avec  infiltration  sanguine. 
Odsebvatiors  I — 8. 

^ H.  Observations  pour  faire  connaître  le  ramollisse- 


t 

A 

4 

.5 

7 

7 

10 

i4 

i6 

1 

i 

20 

22 


25 


00  VI 


520 


TABLE  T)ES  MATIÈRES. 


ment  aigu  dans  la  substancecorticale,  avec  colo- 
ration  rose,  puis  avec  infiltration  sanguine. 
OuSïKVATIOKS  9 — 17,  ° 


CHAPITRE  II. 

ApPHltcliTION  DES  ALTÉBATlOîlS  AMATOMIQUES  DANS  LE  BAMOtUSSE- 
>iH.\T  Aine 

§ 1.  Congestion  cérébrale 

§ 11.  Infiltration  sanguine. 

A.  Observations  d’infiltration  sanguine  , avec 
conservation  de  la  consistance  normale  du 

cerveau.  . • 

Observations  18 — 5.2. 

K.  Observations  d’infiltration  sanguine,  avec 
augmentation  de  la  consistance  normale  du 

cerveau 

Observations  20  — 26. 

De  l’induration  primitive  de  la  substance  céré- 
brale  

C.  Observations  d’infiltration  sanguine,  avec  di- 
minution delà  consistance  normale  du  cerveau. 

Observations  27 — 28. 

§ 111.  Inllammation 

Delà  rougeur  dans  le  ramollissement  cérébral. 
Analy.se  des  observations  de  ramollissement 
de  MM.  Roslan,  Andral,  Lallemand  etRai- 
kem  , au  point  de  vue  de  la  couleur  de  la  , 
substance  cérébrale  ramollie 


CHAPITRE  ni. 

SvUPTÙMKS  du  KAW0I.LISSE.MENT  AlfiU 

A. .T.  J.  Ob.servations 

S 1.  Première  forme  {apoplectique).  — A/faiblisse- 
menl,  ou  abolition  des  fonctions  cérébrales. 
yl.  Développement  rapide  ou  instantané  des 

symptômes.  . 

ttn.^rBViTioN.s  '>()  — 7i(>. 


table  Ï)ES  matières. 

Pag- 

B.  Développement  graduel  des  symptôme».  . 106 

OBSiHVA110."(S  37  — 58. 

§ II.  Deuxième  forme  (otaaîi^tte).  Excitation  ou  per- 
version des  fonctions  cérébrales.  . io8 

Obsurvahoks  38  — 44- 

Abt.  11.  Analyse  des  observations  précédentes.  , ; . . uS 

§ I.  Prodrômes • • . • 119 

§ II.  Début 

§ 111.  Troubles  du  mouvement 

De  la  contracture - ^~7 

S IV.  Trouble»  du  sentiment.  . . , i3o 

§ V.  Céphalalgie *55 

§ VI.  Troubles  de  l’intelligence «ôt) 

§ VII.  État  de  la  face ^4^ 

§VIll.Etat  de  la  parole i48 

§ IX.  Etat  des  sens.  i48 

De  la  contraction  et  de  la  dilatation  de  la  pu- 
pille  

5 X.  Circulation. iSo 

§ XI.  Respiration iSa 

§ XII.  Nutrition ‘53 

5 XIII.  Durée ■ • 

§ XIV. Résumé.  |56 


CHAPITRE  IV. 

ApPBKCUTIOS  OHS  SVMPIÔMBS  Dû  BAMOLLISSBMEKT  a ICO |58 

§ I.  Congestion  cérébrale >5<) 

Observations  de  congestion  cérébrale.  ...  i6ô 
OüSBBVATioiss  48  — 54. 

§ II.  Encéphalite >7® 


CHAPITRE  Y. 

Diagnostic  du  bauou.issbmknt  aigu >82 

S l.  Développement  graduel  des  symptômes . . . ,i85 

Congestion  cérébrale »83 

Hémorrliagie  cérébrale *84 

Hémorrhagie  des  méninges.  ......  i8'( 


TABLE  DES  MATIÈRES, 

§ II.  Début  subit • . . . . 

Diagnostic  différentiel  du  ramollissement  et  de 
rbémorrhagie  cérébrale.  ...... 

§ III.  Forme  ataxique.  ...... 

Méningite.  . 


DEUXIÈME  PARTIE. 

RAMOLLISSEMENT  CHRONIQUE. 


CHAPITRE  VI. 

Anatomie  pathologique  du  ramollissement  chronique 

Art.  I.  Première  période  du  ramollissement  chronique  ; ^ramo/- 

lissement  pulpeuao) 

■ De  la  suppuration  dans  le  ramollissement.  . 

Recherches  microscopiques  sur  le  ramollisse- 
ment  

Ramollissement  général  du  cerveau. 
Observations  55  — 5j. 

Observations  de  ramollissement  pulpeux.  . 
Observations  58  — 64. 

Art.  11.  Deuxième  période  du  ramollissement  chronique.  . 

S I.  Deuxième  période  du  ramolli.ssement  chroni- 
que dans  la  couche  corticale  des  circonvolu- 
tions. [Plafiics  jaunes  des  circonvolutions.).  . 
Observations  de  plaques  jaunes  des  circonvolu- 
tions  

Observations  65 — 68. 

§ II.  Deuxième  période  du  ramollissement  chronique 
dans  la  substance  médullaire  et  les  parties 
profondes  du  cerveau  [infiltration  celluleuse). 
Observations  d'infiltration  celluleuse . 
Observations  69  — ^5. 

Ce  que  l’on  trouvedauslcç  auteurs,  relativement 

à l’infiltration  celluleuse 

Infillrnlion  celluleuse  dans  la  moelle  épinière. 


Pag. 

185 

186 
^97 
>97 


TOI 

203 
ao5 

204 

211 

219 

201 


202 

234 


244 

248 


265 

269 


table  des  matières. 


533 

Pag. 


§111.  Etude  des  cavités  propres  au  ramollissement, 

^ comparées  aus  cavités  hémorrhagiques.  • 

Examen  des  observations  de  Rocheux.  • • 

Des  modifications  que  subit  le  sang  dans  les 
• cavités  hémorrhagiques 

Aai,  III.  Troisième  période  du  ramollissement  chronique.  (ü*s- 
parition  du  tissu  ramolli.) ....  • • 

5 l.  Ulcérations  des  circonvolutions 

Obsbhvatiohs  76  — 80. 

§ 11.  Disparition  d’une  partie  de  la  substance  mé- 
dullaire  . . 

Obskbvatiohs  81  — 86. 


270 

271 

280 

385 

285 


295 


Aar.  IV.  Siège  .du  ramolissement  chronique,  . . . • • 

Rapprochement  du  siège  du  ramollissement 
cérébral  et  de  celui  de  l’hémorrhagie.  • . 


3o5 

307 


CHAPITRE  VII. 

lyHPT(^||ES  DD  B AMOLLISSEMENT  CHRONIQUE * • 010 

Aht.  I.  Considérations  générales 

DilEcultés  de  la  séméiologie  çérébrale.  • . 3io 

Lésions  cérébrales  sans  symptômes.  . . . âi2 

Symptômes  cérébraux  sans  lésions  anatomi- 
ques appréciables.  3^4 

Congestion  cérébrale- 

Absorption  de  la  sérosité  crânienne.  . . • 017 

R.imollissement  latent  ^19 

Abt.  II.  Etude  spéciale  des  symptômes  du  r.Tmollissement  chro- 
nique. . . , • • 


§ 1.  Troubles  du  mouvement.  020 

§11.  Troubles  du  sentiment . .324 

§ III.  Céphabilgie 3a6 

§ IV.  Etat  de  l’intelligence 227 

§ V.  Troubles  de  la  parole • . 529 

§ VI.  Etat  des  sens  et  des  diverses  l'onctions.  . 329 


§ VII.  Marche  et  durée  du  ramollissement  chro- 
nique  


table  des  matières. 


52  5 

Abt.  III,  Observations  de  ramollissement  chronique. 

§ I.  Première  forme.  — Ramollissement  marchant 

par  degrés  successifs 

Obseevatioks  87—92. 

§ II.  Deuxième  forme.  — Ramollissement  débutant 

subitement.  (Début  apoplectiformc.)  . . 

Observatiobs  g3 — g6. 

S III.  Troisième  forme.  —(La  mort  survient  à la 
suite  d’accidents  aigus  paraissant  s’être  déve- 
é()î-  loppés  sous  l’influence  d’un  ramollissement 

chronique.) 

Obskbvatioms  97 — 101. 

^ Quatrième  forme. — Ramollissement  latent,  ' . 

City.  ObsbAVATIONS  102 — 108. 


CHAPITRE  VIIT. 

Diagnostic  du  rauollissbmebt  chbonique 

§ I.-  Diagnostic  du  ramollissement  chronique  et  de 
l’hémorrhagie  cérébrale 

De  la  co-exislence  d’un  ramollissement  chro- 
nique et  d’un  ancien  foyer  hémorrhagique. 
§ 11.  Diagnostic  du  ramollissement  chronique  et  des 
tumeurs  de  l’encéphale 


TROISIEME  PARTIE. 


CHAPITRE  IX. 


Dï  ta  CCBABlUTll  BT  DBS  MODES  DE  GCBBISON  OU  K AMOLUSSBME.NT  CÉ- 
HéBBA  I 

(luéi'ison  du  ramollissement  aigu  . .... 

Guérison  du  ramollissement  pulpeux.  , 

Des  petites  cavités  des  corps  striés. 

De  l’induration  de  la  substance  céiébrale.- 
De  la  guéilson  de.s  plaques  jaunes  des  circon- 
vohilions 


TàBLE  DÈS  MÀTlÊlOiS., 


525 

Pag. 

De  la  guérison  de  l’infiltration  celluleuse.  . 4i4 

Pertes  de  substance  du  cerveau 

Cicatrices  du  ramollissement 42 1 

Observations  de  guérison  du,  ramollissement 

sans  autopsie.  4a4 


CHAPITRE  X.  ‘ ' 


J , "f  ■ ■ ■ 

Ig  LA  MOHT  DAHS  LE  HAMOLLISSE.UKÎIT.  . . ’ . 

- ; • l' 

: 5 I.  Mort  par  le  cerveau • * • 

§11.  Mort  par  le  poumon.  

A.  Congestion  h3'postalique 

B.  Pneumonie  bypostatique 

C.  Mode  de  développement  de  la  conge.stion 

et  de  la  pneumonie  hyposlatique . . . - 

D.  Symptômes  de  la  congestion  et  de  la  pneu* 

i monic hyposlatique.  . 

I § 111.  Mort  par  les  escares 


43a 

434 

434 

436 

458 

440 

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’aONOSTlC  DU  SAUOLLISSEMBKT, 


CHAPITRE  XI. 

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CHAPITRE  XII. 


)b  LA  îUrUaE  El  DE  L ÉTIOLOGIE  DO  BAMOÏLlSSEMBHt . .....  4^0 

Aht.  I.  Nature  du  ramollissement. — Examen  des  opinions  des 

auteurs  sur  ce  sujet 45o 

§ I.  Ramollissement  considéré  comme  une  altéra- 

ration  asthénique,  analogue  à la  gangrène.  . 45i 

De  l’ossification  des  vaisseaux  du  crâne . . . 456 

Des  rétrécissements  des  orifices  du  cœur,  consi- 
dérés comme  cause  du  ramollissement.  . 45y 

De  la  ligature  de  la  carotide 46o 

§ 11.  Ramollissement  considéré  comme  une  altéra- 
tion sénile,  spécifique 463 


62b'  l'AlillE^DÉS  MATIÈUÈS.'- 

• 1 

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S III.  Ramollissement  considéré  comme  uiie  lésion 

scofbntiqfné 

■ • S IV . ConCÏusîonr  

§ V,  Bu  ramollissement  blanc 

• • • • Observations  présentées  comme  exemples  de  ra- 

mollissements primitivement  blancs. 
OssEBVATions  riQ — 126. 

§ I^I»  Quelques  doctrines  touchant  la  nature  du  ramol- 
lissement  

Aar.  II.  Causes  du  ramollissement. 

§ I.  Age. 

^ II.  Saisons. 

§ III.  Constifution  et  étal  anléiieur  deu  malades  af- 
fectés  de  ramollissement. 

ff  • 

. . IV.  Etat  du  cœur.  ^ 

^ . Hypertrophie  du  Cœur.  ^ 

- • 'g.’ii  -iie  ■ 

, : II.  -i.‘. 

CHAPITRE  XIII.  .1 

TbAIIEMEXI  ou  BAMOULlSSEUEnZ. 


l’ag. 


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APPENDICE . 


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Ou  EAMOLLISSEHENX  CHEZ  UES  ENFANTS. 


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